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Jean-Luc Caradeau

Les Motsde pouvoir

en magie et théurgie

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CHAPITRE I

Qu'importe ce que l'on dit, pourvuque ce soit bien dit.

"Un bon communicateur c'est quelqu'un qui emporte l'adhé-sion des foules en s'arrangeant pour que celles-ci ne compren-nent ni les prémices, ni les conséquences de ce qu'il expose."

Résumé d'un cours de communication(1).

En magie comme dans le monde, parler est un art. Si l'on nevous entend pas, si, malgré le bien-fondé de votre discours, voussemblez pousser des hurlements et écumer de colère, alors qu'enfait, vous ne criez que pour couvrir le bruit ambiant, votre dis-cours manquera son objectif. En société, vous le saurez immé-diatement : la réaction des gens, du public vous en informera.En revanche, dans le domaine de la magie vous ne saurez jamaissi votre discours n'atteint pas son objectif.

Il faut en effet bien le comprendre, l'efficacité d'un rituel oud'un mot de pouvoir est directement liée à la perfection de votre

(1) Il est souhaitable d'ailleurs pour un praticien de la magie d’être doué d'unesprit critique fort développé faute de quoi il risque de se retrouver assezrapidement vêtu d'une camisole de force.


diction, au travail d'entraînement que vous aurez accompli survotre voix. Ne comptez pas obtenir un effet quelconque enbredouillant des mots de pouvoirs.

Parler avec des cailloux : l'articulation.

Si la plupart du temps, les gens vous entendent mal, ce n'estpas parce qu'ils sont sourds, c'est parce que votre prononciationest mauvaise, parce que vous parlez trop vite ou au contrairetrop lentement, parce que vous "escamotez" certaines syllabes,ou encore que vous parlez sans ouvrir la bouche par crainte de

Un rituel de magie est une pièce de théâtre dont vousêtes à la fois, l'unique acteur et le public. Son but est demodifier votre état de conscience, d'agir sur vous-même,pour à travers vous agir sur l'univers (le microcosme -vous est semblable au macrocosme - l'univers). Cepen-dant, vous êtes le plus mauvais public possible, et, pourque la pièce agisse sur vous-même il faut qu'elle soitjouée à la perfection. Vous avez le droit d'avoir un espritcritique(1) et de ne pas croire que l'archange Michaelattrape les âmes des damnés par la peau du cul(d'ailleurs les âmes ont-elles une peau du cul ? ) pour lesprécipiter dans l'étang de soufre et de feu. Vous avez ledroit de ne pas y croire cinq minutes avant le rituel, etcinq minutes après ; mais pendant le rituel, si vous évo-quez cette scène vous devez sentir l'odeur du soufremêlée à celle des chairs brûlées, entendre les cris desouffrance des damnés, vous devez à ce moment-là vivrepleinement la scène, être pleinement convaincu de saréalité. Un rituel est une hallucination provoquée, unefolie contrôlée, et c'est dans ce contexte que le mot depouvoir prend sa véritable efficacité.

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Les mots de pouvoir en magie et théurgie


montrer vos dents. Autrement dit, si l'on vous entend mal c'estvotre faute, et uniquement votre faute.

Ceci dit, en vous conduisant ainsi vous créez une disharmonie,puisque n'étant pas entendu ou mal entendu, il est de fait quevous parlez pour ne rien dire. Or, la magie est harmonie, etvotre diction inharmonieuse, inaudible, va empêcher les mots depouvoir d'atteindre leur pleine efficacité. Les raisons de ce phé-nomène sont faciles à comprendre. Quand vous effectuez unrituel, votre discours agit avant toute autre chose sur votre étatde conscience, c'est donc de sa perfection que va dépendre laperfection de cette action. Ne pensez pas qu'en la matière, c'estvous qui décidez. Ce n'est pas vous, c'est votre corps et vos sensqui en réagissant mécaniquement à des fréquences, à desrythmes, à des intonations, vont permettre la modification devotre état intérieur.

La "méthode Démosthène" et son intérêt.Démosthène fut le plus célèbre orateur d'Athènes. Bien que

prononçant des "discours fleuves" il savait retenir jusqu'au boutl'attention des citoyens et emporter leur adhésion… Pourtant lesconditions n'étaient pas idéales : les citoyens d'Athènes seréunissaient en plein air sur l'Agora. C'est là qu'ils discutaient desaffaires de la cité, et c'est là que Démosthène remportait sestriomphes.

De fait, il est toujours plus difficile de parler en plein air quede parler dans une salle. Parler en plein air exige une diction,une articulation parfaite. Pour y parvenir Démosthène répétaitses discours en gardant des cailloux dans sa bouche. Il s'écoutaitdiscourir et renouvelait l'exercice jusqu'à ce qu'il entende avecprécision tous les mots, toutes les nuances de son discours mal-gré les cailloux qu'il maintenait dans la bouche.

Nous savons que vous ne souhaitez pas forcément parler enplein air ou même devenir un orateur. Cependant, si vous vou-

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lez maîtriser les mots de pouvoir et les rituels, il est indispen-sable d'acquérir une grande agilité de la bouche ; et c'est enco-re une méthode inspirée de celle inventée par Démosthène quipermet d'arriver aux meilleurs résultats.

De fait, avant de faire un rituel "pour de bon", il est nécessai-re que vous l'ayez lu plusieurs fois. Le mieux est de le lire àhaute voix devant le micro d'un magnétophone.

Cela vous permettra ensuite d'écouter votre rituel.

Ecoutez-vous donc, et soyez sans indulgence.

Entendez-vous parfaitement tous les mots que vous prononcez ?

Avez-vous l'impression d'écouter un acteur qui a oublié sonrôle ou pire un enfant qui ne sait pas sa leçon ?

A propos, ce que vous écoutez vous donne-t-il l'impression quevous maîtrisez cet exercice élémentaire qu'est la lecture à hautevoix ?

N'avez-vous pas bégayé en disant certains mots ?

N'avez vous pas perdu votre souffle au milieu d'une phrase, laprivant ainsi de son sens ?

Le ton que vous employez pour prononcer les conjurationsest-il réellement adapté au sens du texte ?

En un mot, si l'on avait placé l'individu que vous écoutez surune scène et si vous aviez assisté au spectacle, l'auriez vous trou-vé crédible et talentueux ou ridicule ?

Si vous fournissez une réponse négative à une seule des ques-tions ci-dessus, il est impossible que vous puissiez effectuer unrituel efficace, utiliser un mot de pouvoir, car vous êtes incapablede vous convaincre vous-même.

Que faire ? Reprenez votre rituel, votre magnétophone, et pla-cez entre vos dents un crayon de papier. Non, pas dans le senslongitudinal ! En travers, tenez le crayon entre vos dents commele pirate y tient son couteau lorsqu'il monte à l'abordage.

Voilà, vous êtes prêt : enclenchez le magnétophone et com-mencez à lire le rituel en faisant attention de bien prononcerchaque syllabe.

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Vous verrez, avec cette méthode, on progresse très vite. Sivous vous entendez buter sur une phrase ou un mot, n'hésitezpas à relire le passage jusqu'à ce que vous obteniez la perfec-tion. Relisez plusieurs fois votre rituel de cette façon jusqu'à cequ'en vous écoutant au magnétophone vous entendiez parfaite-ment chaque syllabe… Tout doit être parfait.

Souvenez-vous qu'en effectuant votre rituel vous aurez à vousoccuper de bien d'autres choses que de la perfection de votrediction, par conséquent pendant le rituel vous ne ferez sûrementpas aussi bien.

A ce propos, il faut pratiquer cet exercice régulièrement, et lemaîtriser suffisamment, pour que, lorsque vous direz une prièrementalement, tous les mots soient silencieusement articulés avecla même perfection…. Sachez qu'il est beaucoup plus difficile etbeaucoup plus long d'apprendre à maîtriser cette récitation silen-cieuse que de parvenir à réciter ou lire un rituel à la perfection.

Cependant, même si vous êtes parvenu a acquérir une dictionparfaite, votre rituel n'est pas encore satisfaisant. On entend tout,mais qu'avez vous fait du ton, du rythme, de l'élan qu'on devraitressentir à certains moments en vous écoutant ?

Ne trouvez-vous pas que votre voix est quelque peu mono-corde, qu'on n’y ressent pas de rythme, en un mot, qu’on s’en-nuie (même seulement un petit peu) en vous écoutant ?

Il vous faut donc passer à la seconde phase : la respiration.

Parler avec le ventre.

Ne trouveriez-vous pas ridicule de terminer un long rituel demagie avec une extinction de voix ? Si, évidemment, un hommequi prétend maîtriser les forces invisibles et qui ne maîtrise

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même pas sa propre voix est forcément un bouffon. Vous devezdonc apprendre à placer votre voix. Cela s'apprend assez rapi-dement et vous servira tout autant dans la vie courante que pourla pratique de la magie.

Première phase : respirer.Vous devez apprendre d'abord à respirer avec le ventre.

Pour ce faire, allongez-vous sur le dos, et, repliez les jambesde façon que vos talons qui restent au sol soient à environ dixcentimètres de vos fesses. Posez une main sur votre ventre à lahauteur de votre nombril.

Inspirez lentement par le nez. Lors de votre inspiration vousdevez sentir votre ventre se gonfler sous votre main, avant quene commence à bouger votre cage thoracique.

Inspirez trois ou quatre fois de suite en stoppant l'inspirationdès que vous sentez bouger les côtes. Après chacune de ces ins-pirations, expirez lentement par la bouche, en relâchant simple-ment les muscles du ventre. Cette expiration doit être absolu-ment silencieuse.

Quand vous maîtrisez ce premier exercice (cela prend engénéral quelques minutes), recommencez à inspirer de la mêmefaçon, mais ne bloquez pas l'inspiration au moment où la cagethoracique commence à se gonfler. Au contraire, gonflez-laautant que vous pouvez. Expirez ensuite lentement par labouche simplement en relâchant les muscles. Votre expirationdoit être parfaitement silencieuse. Cet exercice est normalementmaîtrisé au bout de trois ou quatre essais.

Si vous croyez avoir inspiré au maximum, vous vous trompez !

Reprenez l'exercice ci-dessus, mais, au moment où votre cagethoracique est gonflée au maximum, forcez légèrement pouraspirer encore une petite quantité d'air. Vous devez sentir à cemoment votre ceinture scapulaire se dilater. Cela se ressent par-

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ticulièrement au niveau des articulations des clavicules. Faites cetexercice trois ou quatre fois de suite en expirant à chaque foispar la bouche, l'expiration étant provoquée par le simple relâ-chement des muscles.

Le but de ces trois exercices est de vous faire prendreconscience des mouvements que vous effectuez pour respirer.Mémorisez donc les sensations que vous éprouvez, les mouve-ments que vous effectuez.

Seconde phase : émettre un son.Debout ! Recommencez une fois le quatrième exercice, mais

cette fois-ci en vous tenant debout, les bras le long du corps…Prenez bien conscience que vous faites exactement les mêmesmouvements que lorsque vous étiez couché sur le dos.Recommencez deux ou trois fois pour bien vous assurer quevous inspirez complètement.

Dès que vous êtes sûr que vous respirez correctement,expirez en émettant le son "A".

Vous devez à ce moment sentir et remarquer plusieurs choses.

1. Le son "A" n'est pas porté par votre voix habituelle, elle estlégèrement plus grave.

2. Vous sentez votre corps du bas du ventre à la bouche vibrercomme un tuyau d'orgue.

Il est important que vous ressentiez ces deux sensationset que vous les mémorisiez. Recommencez l'exercice jus-qu'à les avoir nettement ressenties (en général trois ou quatreessais suffisent).

Une fois que vous avez maîtrisé cet exercice, recommencezplusieurs fois, mais, cette fois-ci tentez de rester sur la même tona-lité, la même intensité de son jusqu'à la fin de l'expiration. Vousn'y parviendrez pas ! La tonalité et l'intensité varient forcément àla fin de l'expiration quand le débit de l'air expiré diminue.

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Cet exercice vise à contrôler et régulariser le flux de l'expirationle plus longtemps possible. Il vous faudra penser à le refairerégulièrement en visant à chaque fois à mieux contrôler le fluxde l'expiration.

Troisième phase : donner de la puissance.Le son est porteur d'énergie. Ce que vous avez appris jusqu'à

maintenant vous a permis d'optimiser les mouvements de votreventre et de votre poitrine ; si vous étiez une cornemuse, ondirait que vous avez optimisé le soufflet. Nous allons maintenantnous occuper du pavillon, c'est à dire de votre gorge et de votrebouche.

Posez votre main sur votre gorge, le pouce et les doigts étantjuste au dessous des maxillaires inférieurs. Posez la main sansappuyer, mais en vous assurant qu'elle fait bien contact avec lagorge.

En contractant les muscles du visage et du cou, élevez le palaisvers le haut, et abaissez le "plancher" de la bouche vers le bas.Vous devez sentir votre cou s'élargir sous vos doigts.Recommencez plusieurs fois l'opération pour vous assurer quevous maîtrisez bien le mouvement. Vous venez d'apprendre à"écarter les piliers" comme disent les chanteurs lyriques.

Vous allez à nouveau émettre le son "A" mais cette fois-ci enécartant les piliers. Normalement votre bouche et votre gorgesont devenus des caisses de résonance, le son est plus profond,plus "rond".

Recommencez plusieurs fois cet exercice pour bien sentir, bienmémoriser la façon de faire.

Normalement, si vous avez respecté nos instructions, àsavoir expirer simplement en relâchant les muscles, votrevoix est "parfaitement placée". Cependant comme tout le secretde cette expiration est de ne pas faire d'effort pour expirer, il estfréquent que l'expiration ne soit pas totalement correcte.

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Recommencez donc l'exercice, cette fois-ci en faisant varierplusieurs fois la pression de l'air expiré. Il s'agit de repérer lafaçon d'expirer qui vous demande le moins d'effort, celle quiproduit le son le plus "rond", le plus vibrant (c'est la même)et c'est quand vous l'utilisez que votre voix est parfaitementplacée.

Quatrième phase : parler.Prenez maintenant un texte quelconque, et lisez-le, en res-

pirant de cette façon et en écartant les piliers. Ecoutez-vousparler, marquez les virgules et les points virgules par unecourte interruption de l'expiration et les points par une inspi-ration. Eventuellement enregistrez-vous au magnétophone,cela vous permettra en vous écoutant de repérer les endroitsoù votre voix "dérape".

Sachez qu'il vous reste un travail à effectuer : il fautprendre désormais l'habitude de parler tout le tempscomme cela. C'est le seul moyen pour vraimentapprendre à maîtriser cette voix.

Quelques observations utiles :Quand vous générez de cette façon le son "A", normale-

ment, même si le son n'est pas fort, vous devez sentir le plan-cher vibrer sous vos pieds.

Vous ne devez jamais parler tête baissée : l'axe de votrebouche doit toujours être dirigé horizontalement ou légère-ment vers le haut. D'ailleurs, si ce n'est pas le cas, il est impos-sible d'écarter les piliers.

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Parler avec la tête.

Parler avec le ventre comme nous venons de l'apprendre estparfait pour la vie courante. Cela vous donne une voix claire quiporte le son. C'est aussi la voix que vous utiliserez le plus dansles rituels. Cependant les rituels sont plus exigeants que la viecourante. Vous aurez besoin d'autres voix pour restituer un rituelavec toutes les nuances voulues. Alors que la voix du ventre estplutôt grave, celle de la tête est plutôt aiguë.

Elle est utilisée en magie pour les répons de litanies. Parexemple vous direz avec la voix du ventre : "saint Barachiel", etvous répondrez avec la voix de la tête : "Priez pour nous".

Première phase : respirer.Reprenez l'exercice de respiration silencieuse debout que vous

avez fait pour apprendre à parler avec le ventre. Bloquez lesouffle à la fin de l'inspiration. Contractez légèrement les musclesdu ventre de façon à sentir une pression de l'air vers le sommetde votre crâne. Puis expirez en relâchant simplement lesmuscles, tout en maintenant cette pression de la colonne d'air. Ilexiste entre l'exercice que vous avez pratiqué pour la voix duventre et celui-ci une différence subtile. Dans le premier, si vousportez votre attention sur le flux d'air, vous le sentez passer etfaire vibrer le fond de la gorge alors qu'avec le second, vous sen-tez le souffle passer contre le palais. Si vous faites bien attention,vous ressentirez même que l'air fait légèrement vibrer les carti-lages du nez, bien que l'air ne passe pas par le nez.

Seconde phase : émettre un son.Pour l'apprentissage de la voix de la tête, le son le plus facile

à utiliser est le son "ou". Vous allez donc refaire l'exercice ci-des-sus, mais en expirant vous allez émettre le son "ou".

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Normalement, le son émis est plus aigu, mais il doit resterrond, harmonieux ; si vous obtenez une voix de fausset, c'estque vous criez au lieu d'utiliser la colonne d'air.

Refaites cet exercice plusieurs fois, en sentant bien la vibra-tion des cartilages du nez (elle est plus importante quandvous émettez un son). Appliquez-vous à contrôler que vousécartez bien les piliers. Il est en effet moins facile de continuerd'écarter les piliers en utilisant la voix de la tête qu'en utilisantla voix du ventre.

Troisième phase : parler.Prenez le texte d'une litanie quelconque, par exemple la

litanie des saints. Ne vous intéressez pour cet exercice qu'à lapartie du texte contenant les versets et les répons. Ne sélec-tionnez pour cet exercice qu'une dizaine de lignes. L'exerciceconsiste à dire le texte en énonçant les versets avec la voix duventre, et les répons avec la voix de la tête. Vous devez pou-voir passer de l'une à l'autre simplement en faisant varier légè-rement la pression de l'air, cette variation de pression n'étantelle-même provoquée que par une plus ou moins grandedécontraction des muscles abdominaux… Surtout, faites bienattention à ne pas resserrer les piliers en passant de la voix duventre à la voix de tête. Il faut y être très attentif, car ce res-serrement des piliers se produit spontanément parce qu'il faci-lite le passage du gras à l'aigu. Il n'est néanmoins pas souhai-table.

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Parler avec le cœur

La voix du ventre, la voix de la tête, il en est une troisième,moins connue, mais indispensable dans les rituels, c'est la voixdu cœur. Celle-là, les chanteurs et les acteurs ne la pratiquentpas. Sachez par ailleurs qu'elle est plus difficile à maîtriser queles deux autres. Elle est utilisée en magie pour certaines prièresd'invocation et certaines évocations. En écoutant une personnequi l'utilise, on ressent fortement l'impression que cette person-ne se parle à elle-même.

Première phase : respirer.Reprenons encore une fois l'exercice de respiration silencieu-

se que nous avons utilisé pour la voix du ventre. Inspirons, blo-quons l'inspiration, et contractons légèrement le bas de la cagethoracique de façon à sentir une surpression de l'air au niveaudu plexus solaire. Attention, quand vous tentez de faire cela, engénéral les muscles abdominaux s'associent spontanément à lacontraction des muscles intercostaux. Répétez l'exercice, jusqu'àce que vous ayez compris comment pouvoir dissocier les mou-vements des muscles intercostaux et ceux des muscles abdomi-naux. Cela n'est pas très difficile, mais, il est impossible d'expli-quer comment faire parce que l'on fait ici appel à des musclesque l'homme en général n'utilise jamais consciemment. Le seulmoyen d'apprendre, c'est de respirer en recherchant les sensa-tions que nous venons de décrire.

Une fois que vous avez obtenu ce résultat, entraînez-vous àfaire quelques inspirations et expirations complètes sans jamaisrelâcher cette légère contraction au niveau du plexus solaire. Nepassez à la troisième phase que quand vous serez bien sûr demaîtriser le processus.

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Seconde phase : parlerIl est inutile de passer par la phase d'émission d'un son avec

la voix du cœur. Mieux vaut essayer directement de l'utiliser enlisant un texte. Le mieux est de choisir un texte contenant unrécit, l'évocation d'une histoire.

Il faut commencer à dire le texte avec la voix du ventre puisen arrivant au récit, dire celui-ci avec la voix du cœur qui néces-site cette légère contraction des muscles intercostaux que vousvenez de travailler.

Mais, à quoi reconnaîtrez-vous la voix du cœur ?

Elle est moins grave que la voix du ventre, et moins aiguë quela voix de la tête.

Vous ne sentez pas l'air vibrer au niveau de votre gorge, ilvibre dans la poitrine et plus précisément au plexus solaire etdans les côtes qui en sont proches. Cette sensation de vibrationdes côtes est le signe le plus caractéristique de la voix du cœur.

La voix qui s'échappe de votre bouche semble moins person-nelle, moins impliquée, plus détachée de ce qu'elle récitequ'avec la voix du ventre ou de la gorge.

Elle donne souvent l'impression subjective que c'est une voixqui parle en vous sans être réellement votre voix.

Le mantra dans le Pranayama et ailleurs.

Le mot mantra est pratiquement synonyme de mot de pouvoir.Dans le cadre traditionnel des enseignements hindous, le mantratient son pouvoir de trois sources : lui-même, le maître qui l'atransmis, la prononciation correcte. De fait, cette triple source depouvoir s'explique facilement : un même mantra n'est pas pro-noncé de la même façon dans toutes les voies. Le Aum, parexemple, sera dit avec la voix du ventre dans le pranayama, avecla voix de tête dans le hata yoga, et avec la voix du cœur dans

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d'autres disciplines. Le maître transmet donc avec les mots d'unmantra la manière dont il doit être prononcé dans la voie parti-culière qu'il enseigne. Le plus souvent, ce qui nous intéresseradans ce livre, c'est la façon dont un mantra est prononcé dans lepranayama.

Le plus connu de tous les mantras, est le AUM. Il est faciled'apprendre à le prononcer à la façon de ceux qui pratiquent lepranayama. Pour cela reprenons l'exercice du son "A" que nousavons fait en étudiant la voix du ventre. Prononçons ce "A" avecla bouche largement ouverte et les piliers bien écartés.Rétrécissons lentement l'ouverture de la bouche ce qui permet-tra de produire un "O" long, puis continuons de clore la bouchepour "vibrer" le "M" de la fin. Ces mouvements des lèvres doi-vent être enchaînés, continus et on entend : AAAAAOOOOOMMMM le "M" se prolongeant dans un bourdonnementquand la bouche est entièrement refermée.

La bouche est A demi fermée Elle se fermegrande ouverte complètement

A l'inverse dans les voies qui prononcent le aum avec la voixde la tête ou la voix du cœur le Aum se prononce ôm sans quela voyelle ou la consonne soit exagérément allongée. C'est le caspar exemple lorsque le rituel est un rituel de dévotion (bakti ensanskrit).

En magie occidentale les mots de pouvoir peuvent être consi-dérés comme quelque chose de proche des mantras, bien que

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leur utilisation soit quelque peu différente. De fait, l'utilisationhabituelle du mantra est la "répétition systématique", et son uti-lisation exceptionnelle l'inclut dans un rituel ou l'écrit sur untalisman ou un pentacle, appelé "yantra" en sanskrit. Comparati-vement, l'utilisation exceptionnelle du mot de pouvoir est l'utili-sation habituelle du mantra, et inversement.

Le rôle du sens

Quand le mot de pouvoir a un ou plusieurs sens, il est impor-tant que celui qui le prononce les connaisse, parce que, l'actiondu mot sur lui-même est ainsi plus profonde et plus riche. Vouspouvez prononcer un mot de pouvoir mille fois par jour, si vousne savez pas qu'il s'agit d'un mot de pouvoir il n'aura aucun effetni sur vous-même ni sur le monde. Prenons pour exemple unnom d'ange "Gabriel". Si tout ce que vous savez de Gabriel estque c'est le nom de l'archange de la Lune, vous avez bien peude chance que ce mot de pouvoir trouve en vous-même les "sub-strats" émotionnels et intellectuels qui lui permettront d'avoir sonaction optimum. En revanche, si vous savez que la racine "ghi-mel, beth, resh" signifie à la fois "force" et "augmentation". Sivous savez que ce nom lui a été donné à cause des variationsd'éclairement de la lune, si vous savez également que c'estGabriel qui joue le rôle de messager de Dieu, si vous connaissezsuffisamment l'astrologie pour avoir conscience de ce que laLune par sa position dans le zodiaque et dans le thème natal, parses mouvements, par son aspect dans le ciel, peut annoncer àpropos d'un destin individuel, de celui d'une ville ou d'une col-lectivité, du temps qu'il fera dans les jours à venir, de la crois-sance et de la morphologie des plantes ainsi que du mûrissementdes fruits… Alors, quand on vous dit que Gabriel est un mot depouvoir qui, prononcé en certaines circonstances, peut favoriser

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la fécondation, non seulement, cela vous paraît évident, mais deplus vous savez exactement quand et en quelle circonstances cemot doit être prononcé pour qu'il ait sa pleine efficacité. Mieuxencore, si vous savez tout cela, vous saurez également que cemot possède bien d'autres pouvoirs comme par exemple celuid'aider à résoudre les problèmes de mathématique… Cependant,parce que le mot de pouvoir "Gabriel" a un sens, si votre cultu-re, votre compréhension de ce mot, ne vous permet pas de voirle rapport entre "la fécondation" et la "résolution d'un problèmede mathématique" ou plutôt de voir et de comprendre pourquoice même mot peut mettre en action deux pouvoirs si différents,alors, la probabilité que vous puissiez utiliser le mot de pouvoir"Gabriel" avec efficacité, devient pratiquement inexistante. Celane s'appliquant pas dans le cas particulier où ce mot de pouvoirvous a été transmis dans le cadre d'un enseignement vous per-mettant d'exercer une fonction de magie institutionnelle. Parexemple, il est probable que la plupart des marabouts quiconnaissent bien, et utilisent, les pouvoirs du mot "Gibraîl"(Gabriel en arabe), seraient bien en peine d'expliquer le pour-quoi de ces pouvoirs.

Cependant, parce qu'ils sont un maillon d'une longue chaînede transmission, chaîne qui elle-même est spirituellement reliéeà d'autres chaînes du même type, et que cet ensemble connaît etcomprend ou a connu et compris, parce que cet ensemble l'uti-lise sans interruption depuis des siècles, ce mot a quand ils leprononcent sa pleine efficacité.

On notera d'ailleurs le même phénomène dans le pansage(2)de secrets, cette magie paysanne qui se transmet de père en filsou de mère en fille depuis des générations. Les mots de pou-voirs, bien que souvent horriblement déformés parce que trans-mis phonétiquement de génération en génération gardent leurpleine efficacité. Ainsi, j'ai pu relever que dans une recette pourguérir les maladies de peau un guérisseur paysan utilisait commemot de pouvoir "merde au chat"… C'était écrit tel quel dans soncahier. Il s'agit probablement d'une déformation d'un mot de


(2) Cette expression désigne les opérations de magie des campagnes opéréespar la seule puissance de formules qui sont des sortes de “mini rituels”. Sile pansage exige l’utilisation d’une formule “régulièrement transmise”, enrevanche, il ne demande aucune étude, aucune connaissance particuliè-re ni même aucun intérêt particulier pour la magie.


pouvoir en hébreu ou en chaldéen, mais il est bien évidentqu'après avoir subi une telle déformation, il est impossible deretrouver le "mot de pouvoir originel". Cependant par la vertu dela transmission, ce mot gardait son efficacité.

En dehors d'ailleurs de ce cas particulier de la transmission, ilest des mots de pouvoir qui n'ont pas de sens ou plus de sens.Certains sont des mots qui ont été simplement "révélés". Un jourquelqu'un a "reçu ce mot par voyance", l'a utilisé, puis l'a révé-lé à d'autres, et le mot s'est transmis à travers des discours, deslivres, des rituels. L'efficacité de ces mots ne tient évidemmentpas à leur sens, puis qu'ils n'en ont pas. Elle est liée à leurancienneté, au fait que leur usage s'est répandu, au fait égale-ment que contrairement aux mots qui ont un sens ils ne sontconnus et utilisés que par ceux qui veulent utiliser le pouvoirprécis et limité qui est lié à eux. C'est également le cas de ce queJamblique appelait les "mots en langue barbare", mots delangues oubliées, auxquels il attachait une grande importance etun grand pouvoir en magie. Nous reviendrons sur ces mots bar-bares au chapitre quatrième.

Le rôle de la compréhension

La compréhension ne peut évidemment jouer réellement derôle que pour les mots de pouvoir qui ont un sens, en fait desmots généralement connus de tous, qui ne deviennent "mots depouvoirs" que lorsqu'ils sont utilisés comme tels. Pour qu'un telmot soit un mot de pouvoir, il faut savoir qu'il en est un, savoirquel pouvoir lui est attaché, et enfin le prononcer dans le butd'utiliser son pouvoir.

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Table des matières

Introduction 5Le nom et la parole. 6La parole et l’écriture. 8La magie : une équivalence information - énergie. 12Les bases d'échange de l'information et de l'énergie. 13Les systèmes d'échange information-énergie. 17Un mot de pouvoir, mais pour quel pouvoir ?

(le pouvoir magique, social, politique…) 18Le mot, et son sens… et le sens caché du sens. 22

Chapitre I : Qu'importe ce que l'on dit, pourvu quece soit bien dit. 25

Parler avec des cailloux : l'articulation. 26La "méthode Démosthène" et son intérêt. 27Parler avec le ventre. 29Première phase : respirer. 30Seconde phase : émettre un son. 31Troisième phase : donner de la puissance. 32Quatrième phase : parler. 33Quelques observations utiles. 33Parler avec la tête. 34Première phase : respirer. 34Seconde phase : émettre un son. 35Troisième phase : parler. 35Parler avec le cœur. 36Première phase : respirer. 36Seconde phase : parler. 37Le mantra dans le Pranayama et ailleurs. 37Le rôle du sens. 39Le rôle de la compréhension. 41

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Chapitre II : Ne criez pas ! Respirez ! Ouvrez la boucheet plus encore la gorge ! 45

L'art du respir : le pouvoir de l'orateur sur l'homme et dumage sur les esprits. 46La maîtrise des muscles de la gorge… 48Faites vibrer les murs et les planchers. 52Un test : écoutez avec les genoux ou les pieds. 53

Chapitre III : Mots de pouvoir et rituels 55Les trois modes plus un. 54Le mode psalmodié. 59Le mode évocatoire (ou récitatif). 60Le mode invocatoire. 61Le mode conjuratoire. 61

Chapitre IV : Dire sans dire ou l'art de l'invocationsilencieuse. 63

"Vibrez les mots à l'intérieur". 64Sentir votre corps dans le silence. 64Sentir votre corps dans le son. 64L'envahissement par un mot de pouvoir. 67La visualisation des sons. 69Mots de pouvoir et télépathie. 70

Chapitre V : Mots étranges, familiers et langues barbares 75L'importance de l'utilisation des langues barbares. 75Les mots de pouvoir fabriqués lettre à lettre. 76Les langues sacrées et les langues profanes. 77Les langues liturgiques. 83Ces mots de pouvoirs que vous prononcez tous les jours. 87La puissance cachée des paroles sibyllines. 88

Chapitre VI : Ces mots de pouvoirs écrits ou gravés... 95Le vrai usage de l'Ain Becar (le sur codage des carrésmagiques de lettres ou de chiffres) et des procédés destéganographie. 113

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Un carré peut en cacher un autre : 116Compter en 7 c’est comme compter en 10. 118Le code secret de John Dee. 122Les mots de pouvoir superposés. 122Les mots de pouvoir décalés. 124Les mots de pouvoir et la langue des oiseaux. 125Sur coder la langue des oiseaux avec l'Ogam pour plus

de puissance. 128Le verlan magique ou le pouvoir des invocations inversées. 130D'une langue à l'autre : le verlan en verlan, ou comment unmot de pouvoir en verlan français ou latin peut n'avoir desens qu'en verlan arabe ou hébraïque. 132

Chapitre VII : Les mots de pouvoir traduits en gestes :la puissance de la main. 137Le signe de la croix. 138Compter et parler aux esprits avec les doigts (de Bède

le Vénérable à Henri Corneille Agrippa). 141L’entraînement des mains. 145Efficacité du procédé : 148La mise en nombre des mots de pouvoirs et

sa signification. 148

Chapitre VIII : Le pouvoir sur les foules : ou les motset les noms au service du cynisme. 151

Social, morale, ordre, loi, liberté, désordre, ennemi 153intérieur, infidèle, mécréant ces mots qui ont marché

et marchent encore. 153Le fonctionnement au quotidien des mots et formules

de pouvoirs “ sociaux ”. 155Mots et formules de pouvoir dans le monde de

la consommation. 156Les mots et expressions de pouvoir du monde socio-politique. 158Calme, serein ou excité ? Tout dépend du sens

du discours et du public. 165

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Mots de pouvoir


Nommez la chose, tout le monde croira que vousl'avez pensée. 167

Monsieur à quoi pensez-vous ? A rien c’est pour faire avancer le “ Schmilblick ”. 168

Sachez faire glisser le sens des mots. 169Sachez inventer des mots nouveaux. 170Quand César (Jules) inventa La Gaule.Communication et enseignement ou la différence entre

la prise de conscience et l'adhésion. 175La voix de commandement. 177

Chapitre IX : Les mots et les maux - le jet de sorts etl'enchantement. 179

L'association mot de pouvoir pentacle en Occident et mots de pouvoir Yantra en Orient. 180Le mot et le geste. 183Le mot et le chant. 184La bénédiction. 185La malédiction. 188

Conclusion : le pouvoir des mots. 190

Chapitre X : Lexique (bien incomplet) des motsde pouvoirs 193

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Mots de pouvoir
