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L’Autonomie économique des femmes

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edito

Dans le cadre du rapprochement entre le réseau de bénévoles CCFD-Terre Solidaire et ses organisations partenaires des pays du Sud, la région Alsace-Lorraine a fait le diagnostic que la précarité et la pau-vreté touchaient particulièrement les femmes de notre région.

Nous avons donc choisi d’approfondir la thématique de l’égalité femme/homme. Ce travail s’inscrit dans une dynamique sur 3 ans, où nous aborderons les questions d’autonomie économique, de droits des femmes et de citoyenneté.

Cette année, nous nous pencherons plus particulièrement sur l’auto-nomie économique et financière des femmes ici et là-bas. C’est un

enjeu de développement pour lutter contre la pauvreté, participer au développement humain, réinterroger la mesure de la richesse.

Le principe d’égalité entre les femmes et les hommes ne peut être respecté que si les droits civils, politiques, économiques, sociaux et cultu-rels sont appliqués sans discrimination entre les sexes. Toutes les études statistiques montrent que les femmes sont le groupe humain le plus discriminé dans le monde.

Trois domaines sont particulièrement stratégiques pour lutter contre ces discriminations : l’accès à la formation librement choisie en fonction de ses compétences, l’accès aux ressources et le droit d’en disposer librement et enfin, la réconciliation de la vie familiale et professionnelle.

Ce dossier vise à la fois l’approfondissement de cette thématique et l’appropriation d’une démarche d’animation et d’éducation.

Nous voulons montrer qu’à travers les initiatives de nos partenaires et de nos alliés, des solidarités se construisent. « Ces actions ne sont pas de petites réussites » ; elles questionnent les pratiques écono-miques et financières, elles expérimentent des formes innovantes d’organisation du travail et de vie.

Alors, bonne découverte, bonnes animations et ouvrons ensemble des chemins nouveaux de solidarité et d’espérance !

Odile DELHAYE, responsable de la commission « égalité femme/homme » Alsace-Lorraine

« L’égalité des sexes, qui est inscrite dans les droits de l’homme, est au cœur de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Sans elle, on ne pourra vaincre ni la faim, ni la pauvreté, ni la maladie »Organisation Mondiale de Développement,objectif 3 du millénaire (2008)

Conception : CCFD-Terre Solidaire Alsace-Lorraine - Direction : François Lamy - Directeur de la publication : François Hollecker Coordinatrice de rédaction : Odile Delhaye - Rédaction : Chantal Bernard, Odile Delhaye, Aurélie Didier-Laurent, Marie-Clothilde Dusch, Damien Geldreich, François Hollecker, Audrey Humbert, Joseph Humbert, Clémence Hutin, Geneviève Mettling, Nathalie Ott, Mathilde Régnier, Emma Tresse.

Crédits photo : © T. Brésillon/CCFD-Terre Solidaire : p.1, 2, 5, 8, 11, 12, 15, 16, 18, 24 - © CCFD-Terre Solidaire : p.4, 11, 13, 14, 17, 19, 20, 21, 22, 23 - cc Antônio Cruz/AB : p.5 - cc Frank Plitt : p.5 - © Raffaello Morghen/Bibliothèque Universitaire, Pise : p.6 - © Archives nationales : p.6 - © ONU Femmes : p.6 - © moodboard - Fotolia.com : p.7 - © Fotowerk - Fotolia.com : p.7 - © Alexis : p.10 - © Odile Delhaye : p.11 - © Collectif Ethique sur l’étiquette : p.13 - © Pierre Mathieu : p.16.Dessins : © Dédé : p.10, 15 - © Leluc : p.16 - © Nathalie Ott : p.20 - © Le Monde Selon les femmes : p.21.

Contact : blog.ccfd-terresolidaire.org

Conception graphique : Stéphanie Yverneau-Brahy - Impression : Socosprint (Vosges)Novembre 2012

Définitions et concepts

Femmes pionnières, actrices de changement

Dates importantes pour l’autonomie économique des femmes

Education et formation

Inégalités au travail et accès aux ressources

Concilier vie professionnelle et vie familiale

Conclusion

Outils d’animation et d’éducation

4 I

5 I

6 I

8 I

12 I

18 I

23 I

23 I

Sommaire

AutOnOMie écOnOMique et finAncière DeS feMMeS I 3

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femmes PionnièRes, ActRices de chAngement

Rigoberta Menchú Tum est née à Chimel au Guatemala en 1959 et a reçu le prix Nobel de la paix en 1992, « en reconnaissance de son travail pour la justice sociale et la réconci-liation ethno-culturelle basées sur le respect pour les droits des peu-ples autochtones ». Elle a milité pour la reconnaissance des droits des indiennes. Rigoberta Menchu parle d’une triple oppression : « l’indienne est triplement margi-nalisée : en tant qu’indienne, en tant que femme et en tant que pauvre. Elle est oubliée par les lois qui ne tiennent pas compte des droits des femmes de notre peuple, et encore moins de ses attentes… »

Julie-Victoire Daubié née en 1824 à Bains-les-Bains (Vosges) et décédée en1874. Elle est journaliste et fut la première femme bachelière parce qu’elle en réclama... le droit. Elle exposa ses idées novatrices dans un essai en trois tomes : La femme pauvre au XIXe siècle (1870). Elle y défend l’égalité de salaire à service égal, l’école mixte, non discriminatoire, les bourses d’études pour les enfants pauvres, l’accès à tous les domaines de connaissances et aux études supérieures, le droit de vote et une éligibilité à des fonctions politiques pour les femmes. Julie-Victoire Daubié s’insurge contre la condamnation et la grande misère des « mères célibataires » de l’époque, ces « filles séduites » dont on excuse trop facilement les séducteurs.

Tawakkol Karman prix Nobel de la paix en 2011, est une figure emblématique du soulèvement populaire au Yémen, dans le contexte du « Printemps arabe », à qui elle dédie son prix Nobel. Militante pour

la défense des droits de l’Homme, elle fonde en 2005 le groupe « Femmes

journalistes sans chaînes », qui lutte pour la liberté de pensée et d’expression.

Wangari Muta Maathai, née en 1940 et morte en 2011 à Nairobi. En 2004, elle devient la première femme africaine à recevoir le Nobel de la paix pour « sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix ». Wangari Maathai a fondé le mouvement

de la Ceinture verte en 1977. Soutenu par les Kényanes, ce mouvement aura planté plus

de trente millions d’arbres, pour prévenir l’érosion du sol. Cette organisation a pour but principal, en replantant les arbres, de promouvoir la biodiversité tout en créant des emplois pour les femmes. Wangari Maathai faisait le lien entre le domaine de l’environnement et celui des

droits de la femme.

Jane Addams est une sociologue née aux États-Unis en1860 et décédée à Chicago en

1935. Jane Addams est la créatrice de l’Aide sociale publique aux États-Unis. Elle s’im-

plique également dans le mouvement qui revendique le droit de vote pour les femmes. Elle obtient le Prix Nobel de la paix en 1931, pour ses actions sociales dans le domaine de l’éduca-tion, de la prévention médicale et de la santé et pour ses efforts en vue de

l’amélioration des conditions de travail et d’éducation des femmes. Elle fut

présidente de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté.

définitions et concePts egALité entRe femmes et hommes

L’égalité entre femmes et hommes signifie que les com-portements, les aspirations et les besoins différents des unes et des autres sont considérés, évalués et favorisés à égalité. Elle ne signifie pas que les femmes et les hommes doivent devenir identiques, mais que leurs droits, leurs responsabilités et leurs chances ne doivent pas dépendre de leur sexe1.

genRe

Le genre désigne la construction culturelle de la différence des sexes. Le genre est à la fois défini comme l’ensemble des rôles sociaux sexués et comme système de pensée et de représentation définissant culturellement le masculin et le féminin. La notion de genre permet de distinguer l’identité biologique de sexe (être mâle/ être femelle) de l’identité sociale.

équité

L’équité renvoie à l’idée de justice sociale. Elle a un caractère subjectif. Elle fait appel à des sentiments et à un jugement. Elle s’associe au principe de différence. L’action aide à corriger des inégalités de départ. L’équité revient à traiter différemment les gens de manière à compenser les inégalités pour aller vers plus d’égalité réelle. Mesures de discrimination positive, quotas en faveur des femmes…

mixité

La mixité est la co-présence de femmes et d’hommes dans une même catégorie (exemple : scolaire, professionnelle). Elle n’implique pas l’égalité numérique. La mixité ne suffit pas à l’égalité.

PAtRiARcAt

Le patriarcat désigne un mode d’organisation sociale où le père, le chef de famille, et par extension les hommes, sont dépositaires de l’autorité.

stéRéoPtyPe

Le stéréotype amène à faire d’une chose compliquée une chose simple. Les deux mécanismes principaux sont la simplification et l’exagération.(Exemples pour le stéréotype de la femme au travail : elle n’est jamais disponible, elle perd son temps dans des bavardages, un homme a les qualités de leadership.)

Autonomie économique des femmes

L’autonomie économique et financière des femmes représente la possibilité pour les femmes d’avoir accès, au cours de l’ensemble des cycles de leur vie, aux moyens et ressources économiques (emploi, services et revenu suffisant) pour répondre à leurs besoins, ainsi qu’à ceux des personnes dont elles ont la charge. L’autonomie donne la possibilité de faire des choix économiques et d’influencer les structures économiques de nos sociétés.

“ du Sud au Nord, dessinons l’égalité ”

Le CCFD - Terre Solidaire organise un concours de dessins sur le thème “ du Sud au Nord, dessinons l’égalité ”.

Le concours est ouvert aux enfants de 8 à 14 ans. Dessin, peinture, collage ... toutes les techniques créatives en 2 dimensions sont acceptées, sur format A3.

Les productions sont à envoyer avant le 29 février à la délégation départementale du CCFD -Terre Solidaire.

Jury : le 10 mars 2012. Toutes les informations et le règlement sur : ccfd-terresolidaire.org/cd88

CONCOURS DE DESSINS

1 Source : ABC des droits des travailleuses et de l’égalité entre hommes et femmes. Bureau International du Travail, Genève, 2000.

Concours de dessins d’enfants organisé par le CCFD-Terre Solidaire, mars 2012.

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1944Le gouvernement issu de la résistance reconnaît aux femmes le pouvoir de décision, en leur octroyant le droit de vote et le droit d’éligibilité. Elles voteront pour la première fois en 1945.

1948La déclaration universelle des droits de l’homme reconnaît le principe d’égalité des droits des hommes et des femmes.

1965Les dispositions inégalitaires du Code Napoléon sont enfin supprimées, ce qui permet d’ouvrir la voie vers une plus grande autonomie économique des femmes. Elles peuvent ainsi gérer leurs propres biens, ouvrir un compte en banque, exercer une profession sans l’autorisation de leur mari.

1971La loi française rend obligatoire l’égalité salariale entre hommes et femmes pour le même emploi.

1975Conférence sur le statut des femmes à Mexico : les Nations Unies lancent la décennie « Egalité, développement et paix ».

1979La Convention sur l’Elimination de toute forme de discrimination envers les Femmes est adoptée à l’ONU, une consécration majeure pour le principe d’égalité. Elle est mise en rapport avec l’instauration d’un nouvel ordre économique fondé sur la justice.

1995Conférence de Pékin : l’égalité homme-femme est réaffirmée comme un droit fondamental.

2000L’objectif 3 des Objectifs du Millénaire pour le Développement insiste spécifi-quement sur l’importance de l’égalité et l’autonomisation des femmes.

1951L’Organisation Internationale du Travail (OIT) adopte une convention qui inclut des mesures pour lutter contre les discriminations, notamment salariales.

dAtes imPoRtAntes PouR L’Autonomie economique des femmes

L’idée que les femmes ont les mêmes droits que les hommes est récente. Comme pour toute discrimination, on s’est longtemps appuyé sur des différences biologiques pour priver les femmes d’un certain nombre de droits.

1790 Sous la Révolution française, plusieurs lois sont adoptées. Les femmes obtiennent les

mêmes droits à l’héritage et la loi permet le divorce par consentement mutuel.

1804Le Code Napoléon constitue un recul

important pour les femmes : considérées comme mineures, on les place sous la tutelle de leurs époux. Elles sont ainsi cantonnées à

un rôle domestique et familial.

1861Julie-Victoire Daubié est la première

femme à obtenir le baccalauréat. Elle sera aussi la première femme à obtenir une

licence, et deviendra une militante pour les droits de la femme.

1863Victor Duruy, ministre de

l’Instruction publique, crée les cours secondaires pour jeunes filles,

jusque-là interdits.

1882Les lois Jules Ferry entérinent le principe d’égalité pour l’école primaire : elle est

obligatoire pour les filles comme pour les garçons.

1907Les femmes obtiennent le droit de

gérer seules leur propre salaire, mais pas leurs autres biens.

2001Loi relative à la lutte contre les

discriminations en France.

2011Création d’une nouvelle agence à l’ONU dédiée

spécifiquement à l’égalité femmes-hommes :

ONU-Femmes.

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Les freins à la scolarisation des filles

La pauvreté est un frein à la scolarisation des filles et des garçons mais elle touche plus particulièrement les filles.

L’idée perdure que la scolarisation des filles ne sert à rien et que leur place est à la maison. Les petites filles représentent une source de travail domestique pour les parents (ravitailler en eau, ramasser du bois, garder les plus petits enfants, vendre sur les marchés…).

Le coût de la scolarité est un facteur discriminant important. Les familles, quand elles ne peuvent pas payer toutes les scolarités des enfants, donnent la priorité aux garçons, jugés comme plus ren-tables. Les familles les plus pauvres et les plus exposées à l’insécurité alimentaire ne veulent pas se priver d’une source de revenus ou d’une paire de bras.

La situation politique et les structures de santé. Le fléau mondial du VIH/sida et les conflits armés sont des contextes de déstructuration et de déscolarisation massives des enfants qui touchent en majorité les filles : exploitation des filles comme esclave dans les foyers, pour le travail ou le sexe, migration forcée…

La puissance de certaines traditions, les mariages précoces, les grossesses des adolescentes (qui ont presque toujours pour conséquence l’interruption de la scolarité) sont des éléments impor-tants menant à la déscolarisation des adolescentes. Par exemple, le montant de la dot en Inde est si important que les familles ne peuvent pas dépenser davantage pour scolariser leurs filles.

L’insécurité. La distance entre le domicile et l’école (parfois plusieurs kilomètres sur des chemins dangereux), le manque d’infrastructure sanitaire (toilettes pour les filles dans les écoles), la violence et le harcèlement sexuel dans les écoles sont de véritables freins à la scolarisation des filles.

Les stéréotypes véhiculés dans les enseignements influent négati-vement sur l’ambition scolaire des filles et les poussent à rester à la maison3. Propos entendus : « Les études rendent la femme insoumise ou arrogante, la fille est destinée au mariage, aller trop longtemps à l’école pour une fille diminue ses chances de mariage. »

Pour faire de véritables progrès en faveur de l’éducation des filles, il faut prendre en compte les raisons spécifiques liées au sexe de la non-scolarisation, de l’absentéisme et de la déscolarisation des filles.

67 millions 2 : c’est le nombre d’enfants non scolarisés en primaire dans le monde, dont 54 % de filles. Si la parité entre les sexes avait été atteinte,

on aurait compté 3,6 millions de filles de plus à l’école primaire.

71 millions : c’est le nombre d’adolescents non scolarisés en secondaire dans le monde en 2011, parmi eux les filles représentent 70%.

796 millions : c’est le nombre d’analphabètes dans le monde en 2008, dont près des 2/3 sont des femmes.

2 Les données de l’encadré sont issues du Rapport mondial de suivi sur l’éducation pour tous, Unesco 20113 Stereotypik : Le Monde selon les femmes.

Et en France ?

L’égalité est affirmée dans les textes, mais on constate que les filles restent cantonnées dans des formations traditionnellement réservées aux filles. La question des stéréotypes qui conditionnent l’orientation n’est que rarement traitée.

Lors du Séminaire de Rosario sur les droits des femmes en Amérique Latine (décembre 2009) une participante de Colombie disait :

Ce n’est pas naturel que les femmes soient tournées vers les activités ménagères et ce n’est pas par nature que les hommes en seraient incapables. Qui oserait croire que le fait de pouvoir enfanter donne du talent pour faire la vaisselle ? Eduquer les filles dès l’enfance à tenir ce rôle domestique, par imitation de leur mère et par pressions familiales et sociales, c’est ne pas leur donner les mêmes chances qu’aux garçons de faire des études. C’est pourquoi nous avons développé un programme d’éducation contre les stéréotypes sexistes du travail à la maison. Enfermer les femmes dans cette fonction c’est bien souvent leur fermer l’accès à une activité professionnelle reconnue et rétribuée. »

«

un dRoit fondAmentAL : L’égALité fiLLe/gARçon PouR L’Accès à L’éducAtion

éducAtion& foRmAtion

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5 Processus de pouvoir individuel et collectif.6 Genre et empoderamiento : Les essentiels du Genre, Le Monde selon les femmes.7 Diaporama grands lacs – CCFD-Terre Solidaire Lorraine/Alsace campagne 2012.

« iL n’y A PAs de Petites Réussites »

Le CCFD-Terre Solidaire à travers le soutien concret à des projets, montre que la solidarité internationale est une alternative qui marche.

L’ASSOCIATION A ÉTÉ CRÉÉE EN 1989 PAR UN GROUPE DE FEMMES POUR

METTRE EN œUVRE DES PROJETS qUI RENDENT AUTONOMES

DES FEMMES.

La pauvreté et l’analphabé-tisme sont les deux freins majeurs au développement du statut de la femme au Maroc, malgré les évolu-tions législatives récentes. C’est pourquoi, les priorités de l’association se concen-trent essentiellement sur la

formation professionnelle mais aussi sur l’éducation de base

et la sensibilisation des femmes aux notions de citoyenneté et de

droits des femmes. L’objectif final est de leur donner les moyens d’être autonomes

économiquement et de cultiver chez elles l’esprit d’entreprise et d’initiative. Grâce à cela, de nombreuses femmes participent au développe-ment du pays. Les actions d’éducation de « Femme Action » sont essentiellement basées en milieu rural et permettent progressive-ment aux bénéficiaires d’accéder à davantage d’autonomie.

FEMME ACTION (MAROC)PAR LA FORMATION DES JEUNES AUX STÉRÉOTYPES DE GENRE, L’ORGANISATION LUTTE CONTRE LE MACHISME.

L’association d’éducation populaire veut donner des possibilités aux filles de suivre une formation professionnelle à Santa Fé pour que les femmes puissent accéder à un revenu et à une autonomie financière. L’association travaille aussi à donner confiance aux femmes pour qu’elles puissent se sentir en capacité de suivre des formations, de gérer leur communauté et de décider pour elles-mêmes.

Processus d’« empoderamiento »5 développé par les femmes d’Amérique du Sud 6 :• « Pouvoir intérieur » : estime de soi, identité du groupe, être un sujet, accéder au bien être.• « Pouvoir de » : capacités, aptitudes, compétences, accéder aux ressources (naturelles, humaines, éducatives, sociales…)• « Pouvoir avec » : capacité de cons-cience critique collective, impact sur le développement vers un changement politique, décision de participer et de contrôler les décisions.

ACCION EDuCATIVA (ARgENTINE)

ASSOCIATION qUI DÉFEND NOTAMMENT LES DROITS ÉCONOMIqUES ET SOCIAUX DES FEMMES.

Elle a créé des centres d’écoute et de formation pour les femmes victimes de viols pendant la guerre civile. Léoncie est une de ces femmes qui a bénéficié de ce programme. Isabelle, chargée de mission, raconte :« Alors, Léoncie et ses compagnes d’infor-tune vont sur les collines pour sensibiliser les femmes sur leurs droits mais aussi les hommes sur leurs responsabilités. A l’aide de saynètes qu’elles interprètent assistées d’hommes qui ont rejoint leur cause, elles tentent de susciter une prise de conscience. Et cela marche, semble-t-il. Les membres de l’association, tout du moins, se sentent réhabilitées, telle Rita que nous avons rencontrée. Rita, qui pleure lorsqu’elle évoque les deux viols dont elle a été victime à quelques années d’intervalle, la laissant traumatisée… et mère de jumeaux. Oui, mais Rita qui rit de fierté et de joie, devant nos mines ébahies, lorsqu’elle nous annonce qu’elle est désormais mécanicienne. Elle nous fait visiter le garage où elle a été embauchée après avoir suivi une formation prise en charge par Acord. « Je ne suis pas beaucoup rémunérée, mais cela me permet d’assurer le minimum pour mes enfants. Grâce à ce travail, j’ai regagné l’estime de ma communauté parce que mes voisins voient que je m’assume seule. Un jour, si je réunis suffisamment de moyens, je monterai mon propre garage et j’apprendrai ce métier à mes enfants ». Que ton rêve puisse se réaliser un jour, Rita ! » 7

ACORD (BuRuNDI)

SEPA PROPOSE DIFFÉRENTES FORMATIONS PROFESSIONNELLES POUR LES FEMMES.

En milieu urbain, il peut s’agir de cours de sérigraphie, d’informatique... En milieu rural, SEPA s’est focalisé davantage sur le secteur de l’artisanat pour améliorer l’autonomie économi-que des femmes. L’association leur propose d’acquérir davantage de compétences par le biais de forma-tions (comptabilité, dessin…) pour accroître leurs revenus. Les femmes s’organisent en collectifs pour s’ap-

provisionner directement en matériel, elles arrivent à faire baisser les coûts.

Tout en répondant à la demande, elles parviennent à augmenter la qualité des

produits artisanaux sans sacrifier à la tradition.

SEPA (PARAguAy)

LA foRmAtion PRofessionneLLe et LA foRmAtion tout Au Long de LA vie Restent inégALitAiRes

4 Femmes/Hommes dans le monde : Direction de l’égalité des chances Belgique.

Lutter contre les stéréotypesLa publicité ne présente pas toujours des valeurs d’égalité entre les femmes et les hommes. Elle véhicule souvent des stéréotypes et a tendance à montrer une fausse image de la place et des rôles que les femmes et les hommes ont dans la société. La femme y est souvent repré-sentée comme objet de désir, une « potiche », une irresponsable ou effectuant des tâches ménagères4. Comment parvenir à l’égalité entre les femmes et les hommes si on continue de représenter la femme en ménagère ou en objet sexuel, et de représenter le jeune homme en personnage dominateur ou violent ?

POuR ALLER PLuS LOIN : Dans les pays du Sud ?

Briser les préjugés et prendre confiance en soi pour acquérir une formation professionnelle.

Le projet des pompistes mécaniciennes a vu le jour dans le district de Banda, État d’UttarPradesh, en Inde. Il consiste à encourager les femmes à l’autonomisation en leur permettant d’exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels. Banda est l’un des districts les moins développés de l’État, réputé pour son haut niveau de violence, y compris contre les femmes. Élaboré en réponse au problème de la rareté de l’eau dans la région, le projet commença par enseigner à des femmes rurales analphabètes les compétences nécessaires pour réparer les pompes à bras. L’acquisition d’un savoir technique dans un domaine traditionnellement réservé aux hommes représentait en soi une percée décisive à la fois du point de vue psychologique et du point de vue social. En devenant pompistes mécaniciennes, ces femmes ont appris à avoir confiance en leurs pro-pres capacités. Elles ont brisé les stéréotypes. Elles sont entrées dans un cycle d’apprentissage.

Le niveau de qualification : principal vecteur de l’accès à la formation continue

La formation continue des salariés est marquée par un clivage entre les employés et les ouvriers d’un côté et les cadres et les salariés exerçant une profession intermédiaire de l’autre. Le taux d’accès à la formation continue des femmes employées et ouvrières est systématiquement inférieur à celui des hommes.

Le temps partiel : un frein à l’accès à la formation continue

28% des salariés à temps partiels accèdent à la formation continue contre 38% de salariés à temps complet. Or, le temps partiel, claire-ment associé à des emplois non qualifiés, touche principalement des emplois féminins (31% des femmes salariées).

Les contraintes familiales accentuent les disparités entre femmes et hommes

Le temps libre des femmes est souvent un temps contraint par les tâches domestiques et laisse peu de temps pour suivre une formation.

Nathalie, 38 ans, stagiaire, suit une formation en comptabilité : « J’ai deux enfants et je suis seule, je dois déposer les enfants à l’école avant de venir en stage, et faire une heure de route, l’hiver c’est fati-gant, et le soir après avoir couché les enfants, je n’ai parfois plus envie de reprendre mes cours. Quand les enfants sont malades, je ne peux pas venir, c’est trop cher de payer une garde d’enfant. Je suis très fati-guée et parfois je m’énerve, ma famille me dit d’arrêter la formation. »

Il faut donc penser la formation continue dans son rapport à tous les temps de travail, temps de transport, temps domestique, temps libre…

ALEXIS, association lorraine d’insertion des femmes, a développé un programme pour encourager et déve-lopper la création d’entreprise par les femmes, lever les freins d’ordre culturel, psychologique ou économique.

En complément d’un accompagnement individualisé renforcé, le Cercle des créa-trices se décline sous différentes formes :• formation collective autour de théma- tiques variées (protection sociale du créateur, choix du statut juridique, techniques de vente, etc.),

• cours particuliers d’informatique,• réunions mensuelles où les porteuses de projets rencontrent des femmes chefs d’entreprises et échangent sur leurs expé-riences synonymes de réussites, mais aussi sur les difficultés.

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8 INSEE 9 « Fabriqué par des femmes » : travailleuses de l’industrie de l’habillement et mouvement pour les droits des femmes au travail. (Clean clothesCampaign, Peuples Solidaires, Ethique sur l’Etiquette, Le Monde selon les femmes.)

Les inégalités au travail

Partout dans le monde, le taux d’activité salariée des femmes est en augmentation. Elles représentent environ 40% de la force de travail. Cependant, dans tous les pays, leur situation est moins favorable que celle des hommes. Les femmes sont cantonnées à certains rôles restrictifs, souvent dans le domaine du social, de la santé, de l’éducatif, par opposition au travail productif qui est quasi-monopolisé par les hommes.

L’emploi féminin est caractérisé par les inégalités salariales, la dévalorisation des métiers dits « féminins » (l’enseignement, la santé, les ressources humaines…) et la précarité. En France, les femmes représentent 82% des actifs à temps partiel. Dans 28% des cas, ce temps partiel est subi8.

AU NORD ET AU SUD : LES FEMMES CONTINUENT D’OCCUPER UNE POSITION DIFFICILE SUR LE MARCHÉ DE L’EMPLOI.

Les emplois sans qualification, mal rémunérés, peu valorisants ou peu épanouissants sont principalement occupés par des femmes. Elles occupent souvent des emplois liés à leurs occupations domes-tiques (revente de repas sur les trottoirs, garde d’enfants en ville, employée de maison…). L’industrie du textile qui emploie 80% de personnel féminin est un exemple d’emplois dangereux et mal rémunérés. Les « maquilas » (usines d’habillement en Amérique Centrale et au Mexique) sont des lieux fortement discriminants pour les femmes.

On peut d’abord expliquer la pauvreté des femmes par les inégalités présentes au travail.

comment Peut-on exPLiqueR de teLLes inégALités ?

80% des travailleurs précaires.

80% des salariés à temps partiel.

80% des familles monoparentales.

80% du temps de travail ménager.

EN FRANCE LES FEmmES REPRéSEnTEnT :

DANS LE MONDE LES FEmmES SOnT PLuS EXPOSéES quE LES hOmmES à LA PAuvRETé ET à LA PRéCARITé

Les femmes possèdent moins de 1% de la richesse de la planète.

Les femmes fournissent 70% des heures travaillées mais ne reçoivent que 10% des revenus.

70% des trois milliards de personnes les plus démunies dans le monde sont des femmes.

Le collectif « Ethique sur l’étiquette »a révélé toutes ces inégalités.L’analyse de genre sur les travailleuses de l’habillement a permis de mettre en évidence, le niveau de rémunération, les caractéristiques de l’emploi (absence de contrat, de congés

maladie ou maternité, de retraite), la façon dont un supérieur parle ou touche une employée… Si l’on considère le stress engendré par la précarité de l’emploi et le harcèlement physique et moral, la malnutrition résultant des bas salaires, l’épuise-

ment dû aux heures supplémentaires forcées… On comprend quel rouleau compresseur s’abat sur la santé des femmes et de leurs enfants. De plus, les femmes assurent, dans la majo-rité des cas, l’essentiel des tâches et des soins au foyer, voire dans la communauté.9

LA JOC (JEUNESSE OUVRIèRE CHRÉTIENNE) DU NICARAGUA EST UN PARTENAIRE DU CCFD- TERRE SOLIDAIRE qUI TRAVAILLE AVEC LES JEUNES OUVRIERS DE « MAqUILAS » POUR FAIRE RESPEC-TER LES DROITS DU TRAVAIL ET LES AIDER à SE DÉFENDRE. Depuis 1998, elle recueille les témoignages d’employés des « maquilas » sur leurs conditions de travail. Parmi les points sensibles, figure une analyse sur les conditions de travail de filles qui subis-sent quotidiennement des intimidations et du harcèlement sexuel de la part de leurs responsables masculins. La population des « maquilas » est majoritairement féminine et a moins de 30 ans. Au-delà, les ouvrières ne sont plus suffisamment performantes et deviennent trop exigeantes !

Témoignage d’Isabel, ouvrière dans une « maquila » : « Les heures supplémentaires ne sont pas payées, on n’a pas de sécurité sociale, parfois les femmes sont harcelées par les chefs, quatre personnes que je connais ont dénoncé ces abus au Ministère du Travail mais le processus n’a jamais abouti ».

LA JOC (NICARAguA)

inégALités Au tRAvAiL

et Accès Aux RessouRces

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Intervention de Sylvie Kippeurt, agricultrice à Gondrexon, présidente de la commission des agricul-trices de la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles de meurthe-et-moselle.

Les agricultrices militent depuis plus de 50 ans pour une éga-

lité des droits et des devoirs entre agricultrices et agriculteurs.

Par le passé, bon nombre d’entre elles n’avait aucun statut ou

étaient simple conjointe participant aux travaux. Elles avaient

le droit de travailler mais étaient dites « sans profession ».

La création de sociétés agricoles et notamment l’EARL par la

loi de 1980 a favorisé leur installation. Jusque-là, bien souvent

les femmes devenaient agricultrices en épousant leur mari

et son métier d’agriculteur. Les femmes en Lorraine ont été

des pionnières dans le combat pour le statut de la femme

agricultrice. Aujourd’hui, près d’un agriculteur sur trois est une

femme. Les agricultrices choisissent d’exercer ce métier, cer-

taines après une période de salariat.

Elles exigent d’avoir un statut égal à

celui de leur mari. En effet, quoi de

plus normal qu’une femme qui a les

même devoirs que son mari en terme

de formation, de caution bancaire,

de prises de décisions, ait les mêmes

droits que son conjoint ?

Dans une société agricole avec une

tierce personne, c’est le cas mais

il en va différemment pour celles

qui travaillent en couple. Le combat

syndical n’est pas terminé et se

poursuit toujours et encore.

L’accès aux ressources

LA TERRE, UN ENJEU POUR LES FEMMES

L’égalité des femmes est reniée devant l’héritage et la propriété matrimoniale. Les droits des femmes à être reconnues comme proprié-taires légitimes capables d’acquérir, de céder, de louer un bien ou de contracter des prêts sur la base de leurs biens ou de leurs terres sont bafoués, à travers de nombreuses cultures et communautés. En dépit d’avancées législatives, peu de femmes ont encore accès à la terre du fait de l’inertie de normes sociales patriarcales. Cette exclusion est aggravée par les tensions foncières que connaissent certaines zones du monde (voir la campagne nationale du CCFD-Terre Solidaire sur l’accaparement des terres).

ENRAYER L’ACCAPAREMENT DES TERRES, ASSURER LE CONTRôLE ET L’ACCèS DES FEMMES AUX RESSOURCES NATURELLES.

Au niveau mondial, elles ne possèdent que 3 % des droits de propriété, leur accès à la terre est essentiellement régi par des droits d’usage coutumiers. Elles peuvent se voir brusquement dépossédées de terres qu’elles ont patiemment mises en valeur.Dans de nombreux pays du monde, les femmes produisent jusqu’à 80% de la nourriture, en cultivant des terres qui ne leur appartiennent pas, ou en pratiquant la cueillette dansdes forêts sur lesquelles elles n’ont pas de droits. La ruée vers les ressources minérales, ou les sols permettant de produire des biocarburants pour alimenter notre développement non soute-nable a déjà provoqué l’expulsion d’un très grand nombre de femmes des terres qu’elles ont cultivées et protégées pendant des millénaires. Les femmes appellent à un arrêt immédiat de l’accaparement des terres10 !

Dans les pays du Sud, ce problème est particulièrement lourd. Alors qu’il est estimé que les femmes réalisent les 2/3 des heures du travail au total, elles ne toucheraient qu’un dixième de son revenu.

Les inégALités des femmes fAce Aux RessouRces

10 Groupe Majeur Femmes : Rio+20 11 D’après une étude de la Banque Mondiale portant sur les lois codifiées et les règlements dans 124 pays. Les droits de propriété et de succession font référence aux biens mobiles et immobiles. Les pratiques coutumières ne sont pas prises en compte.

Europe centrale et orientale et Asie centrale

Régions développées

moyen-Orient et Afrique du nord

Asie de l’Est etPacifique

Amérique latine et Caraïbes

Afriquesubsaharienne

Asie du Sud

020

4060

8010

0

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bre

de

pay

s

PROPRIéTé% inégalité des droits% égalité des droits

héRITAGE% inégalité des droits% égalité des droits

Les droits de propriété et de succession des femmes varient beaucoup d’une région à l’autre.

Source : Moyenne régionale calculée par ONU Femmes en utilisant les données de la Banque Mondiale 2010 sur le droit des femmes à être propriétaire et à hériter11.

OSRA, EN ETHIOPIE, A MENÉ UNE ACTION POUR RÉVISER LA LOI COUTUMIèRE AFIN DE FAIRE RESPECTER LE DROIT NATIONAL qUI PERMET AUX FEMMES DE BÉNÉFICIER DES DROITS DE SUCCESSION DE LEUR CONJOINT OU DE LEURS PARENTS.

Il s’agit plus particulièrement de renforcer le pouvoir économique des femmes les plus vulnérables, et de défendre leurs droits, en luttant contre les discriminations qu’elles subissent.OSRA OROMO a mené un vaste travail de consultation des popu-lations. En initiant un dialogue avec les hommes et les femmes, enfants et adultes, les pratiques sociales discriminantes ont été identifiées par différents groupes. Le but était de trouver un consensus et de proposer des lois alternatives, pour plus d’égalité. Une cérémonie a clôturé ce travail sur les mentalités, un rituel traditionnel a institué de nouvelles lois pour la communauté.

OSRA (EThIOPIE)

Je dirige mon exploitation et je décide de mes investissements, mon compagnon exploitant agricole ne décide pas pour moi. Nous avons deux exploitations. Je milite aussi pour une agriculture paysanne qui favorise les circuits courts.Au début, les banques ne me faisaient pas confiance, et j’étais la cible de moqueries de collègues qui attendaient mes erreurs. Ils ont été déçus et cela fait 20 ans que je dirige mon exploitation.Pour conduire les engins, c’est pas toujours facile et je peste contre les fabricants qui n’ont pas intégré la difficulté pour les femmes d’atteler une charrue ; alors qu’on est capable d’aller sur la lune, on n’arrive pas à construire des engins agricoles faciles à déplacer pour des femmes.Il a fallu que l’on s’organise pour éduquer nos enfants, et certains jours quand il y a les vêlages, c’est dur de tout gérer. Nous avons toujours partagé les tâches à la maison. Maintenant que les enfants sont plus grands, c’est plus facile. »

Sophie P., exploitante agricole en élevage ovin dans les Vosges. Mère de 3 enfants, membre de la Confédération Paysanne. Table ronde mars 2012-CCFD-Terre Solidaire-Epinal.

«

I 14 AutOnOMie écOnOMique et finAncière DeS feMMeS I 15

Page 9: L’Autonomie économique des femmes · genRe Le genre désigne la construction culturelle de la différence des sexes. Le genre est à la fois défini comme l’ensemble des rôles

Conclusion

Les femmes sont discriminées à la fois sur le marché du travail et dans leur accès aux revenus, ce qui les vouent à une plus grande vulnérabilité face à la pauvreté. Il est absolument nécessaire d’opérer un rééquilibrage dans le domaine du travail domestique, afin que les femmes soient en

mesure de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale. Les femmes ne pourront pas véritablement s’investir dans le domaine professionnel si elles continuent de cumuler tant de responsabilités.

14 www.la pietracoalition.org

Le G50 de la Pietra interpelle le G20,une initiative de la société civile

Le G50 ce sont les femmes, soit 50% de la population mondiale. Réunies au sein de la coalition de la Pietra, ce sont aussi 50 organisa-tions qui demandent au G20 d’établir les conditions et les politiques permettant aux femmes d’accéder à leur autonomie économique (...).

Les femmes sont des leviers essentiels pour le dévelop-pement économique de toute société et tous les moyens doivent être mis en œuvre pour lever les freins à leur autonomie financière. Pour autant, il ne faut pas conditionner l’autonomie des femmes au développe-ment. Le G20 doit soutenir et financer l’égalité de genre, non pas parce que c’est bon pour les PIB, mais « parce que c’est un droit humain »14

Claudy Vouhé, présidente de l’association Genre en Action, signataire de l’Appel de la Coalition de la Pietra, septembre 2011.

«

Ci-contre, intervention de majouline Sbaï, vice-présidente du conseil régional du nord-Pas-de-Calais lors des 50 ans du CCFD-Terre Solidaire à Lievin.

La gestion des ressources

Comme le montre un rapport de la Banque mondiale, dans la majeure partie des pays du monde, les femmes ont une influence très limitée en ce qui concerne la ges-tion des revenus du ménage.

LE MICROCRÉDIT EN qUESTION

De nombreux programmes de microcrédit ont choisi de cibler les femmes expressément. Ils peuvent constituer pour elles des tremplins essentiels. Des études ont cependant mis en lumière les possibles effets pervers de ces dispositifs : détournement de prêts par les hommes, captation des entreprises quand elles deviennent rentables, spécialisation des femmes dans des secteurs peu productifs, utilisation de la micro-finance à des fins de consommation. Il faut donc veiller dans la mise en œuvre à ce que les microcrédits ne soient pas la cause de nouveaux liens de subordination, au détriment de l’autonomie économique réelle des femmes12.

UN ACCèS AU CRÉDIT qUI RESTE DIFFICILE

> Il a fallu, en France, attendre 196513 pour que les femmes soient autorisées à disposer d’un compte bancaire personnel.

> La création d’un programme national spécifique, pour aider les femmes à créer leur entreprise, révèle que l’accès au crédit reste difficile pour les femmes en France.

LA qUESTION DE L’ACCèS AUX RESSOURCES NATURELLES POUR LA FEMME RESTE UNE PRÉOCCUPATION POUR PLUSIEURS RAISONS :

• Les tendances traditionnelles qui estiment qu’accorder par exemple la terre à la femme revient à soustraire cette terre au patrimoine familial…

• L’impact des lois injustes et discriminatoires pour la femme.

L’OCDI Sokodé a construit une initiative en partant d’un constat :les familles des communautés étaient morcelées. Il n’y avait pas de coopération économique entre femmes et hommes et les hommes dépensaient seuls le revenu.

Leur projet propose « l’épanouissement des ménages du monde rural à travers l’entreprenariat agricole familial ». Le but est de travailler sur la solidarité familiale, l’union et la coopération des conjoints pour améliorer les conditions de vie de tous.Pour ce faire, l’OCDI a organisé une collaboration entre les conjoints. Leur idée est de diviser les tâches au sein du ménage : l’homme prend en charge la production agricole et les femmes la commercialisation des produits.

L’OCDI propose aussi des formations pour les femmes, facilite l’octroi d’un crédit en leur faveur, et prévoit des rencontres entre femmes et hommes pour qu’ils discutent de leurs rapports.

OCDI SOKODé (TOgO)

12 Isabelle Guérin : La Découverte, Travail, genre et sociétés 2011/1 - n° 2513 Réforme du régime matrimonial de 1804 : la femme peut gérer ses biens, ouvrir un compte en banque, exercer une profession sans l’autorisation de son mari.

En France, on trouve ce même problème. Ce phénomène se prolonge jusque dans les grandes entreprises, les femmes ont du mal à accéder à des postes stratégiques de l’entreprise.

On désigne par « Plafond de verre » l’ensemble des obstacles que rencontrent les femmes pour accéder à des postes élevés dans les hiérarchies professionnelles. Cette métaphore symbolise un plafond invisible qui empêche les femmes de grimper les échelons. Cette réalité se retrouve dans les moyennes et grandes entreprises.

I 16 AutOnOMie écOnOMique et finAncière DeS feMMeS I 17

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Les rôles de la division sexuelle du travail

On cite 2 rôles principaux de la division sexuelle du travail.

Le rôle productif : créer des biens ou des services est très valorisé car il génère des revenus. Il est assumé en majorité par les hommes. Les femmes y sont présentes souvent comme aide. Les femmes sont particulièrement touchées par la précarité et le temps partiel imposé.

Le rôle reproductif : mettre au monde les enfants, s’occuper des enfants, des tâches domestiques, des soins et de l’entretien de la famille (enfants, personnes âgées, malades) est un travail peu valorisé, informel, gratuit, invisible. Il est assumé en majorité par les femmes.

Le travail à temps partiel, toujours une affaire de femmes

La période de chômage constitue un terreau favorable au recul du temps complet et à une progression du temps partiel. Les femmes sont souvent contraintes à l’accepter dans la mesure où l’essentiel des tâches domestiques repose encore trop souvent sur elles, ou en raison d’une offre encore trop souvent insuffisante des modes de garde de la petite enfance. Le temps partiel est surtout devenu « la figure emblématique de la division sexuelle du travail ». « En Lorraine, 33% des femmes actives en 2008 exercent un emploi à temps partiel contre seulement 5.5% des hommes. Par ailleurs, le temps partiel concerne principalement les jeunes femmes ainsi que celles en situation profes-sionnelle précaire (emplois peu stables, souvent mal rémunérés, CDD, intérim…).»16

Concilier l’économique et le social, un conflit au cœur du choix de vie des femmes : un enjeu de développement ! Les enquêtes montrent que plus les charges de la vie familiale sont lourdes, plus les femmes s’éloignent du marché du travail. Il y a donc un enjeu fort de développement économique, de concilier vie familiale et vie professionnelle15.

LA division sexueLLe du tRAvAiL, qu’est-ce que c’est ?

On entend par division du travail la spécialisation des tâches, des activités et des rôles. Les hommes et les femmes collaboreraient dans divers domaines en fonction de la différence de sexe. Les activités reproductives biologiques et sociales des femmes représentent une charge de travail incontestable, elles assument ces charges pour plus de 80% de leur temps disponible contre 20% pour les hommes.

des cARRièRes féminines moRceLées

Hélène Périvier, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) souligne que :« Pour concilier travail et famille, les femmes s’adaptent : elles réduisent leur temps de travail ou s’arrêtent de travailler en prenant un congé parental. Bien qu’ouvert aux deux parents, ce dernier est pris à 98% par les mères. Le salaire des femmes étant inférieur à celui de leur conjoint, le couple choisit de ce fait l’arrêt d’activité de la femme ». De fait, le congé parental ou le temps partiel, tous deux en théorie neutres du point de vue du genre, se concentrent sur les femmes. Ils les écartent du marché du travail et engendrent ainsi une discrimination indirecte à leur égard.

L’accumulation de responsabilités au regard de

la prise en charge des soins aux enfants et des

soins aux aînés a pour conséquence d’imposer aux

femmes des choix et de les conduire à se retirer du

marché du travail, ou à adopter des modalités de

travail qui les pénalisent tant dans leur évolution

de carrière que plus tard dans leur retraite.»17

«

15 Rapport CESE (Comité Economique et Social en Lorraine sur : conciliation vie familiale et professionnelle : sept 2011.16 CESE Lorraine conciliation vie familiale et vie professionnelle – rapport septembre 2011- un enjeu pour le développement économique de la Lorraine et l’attractivité de ses territoires.17 CESE Lorraine conciliation vie familiale et vie professionnelle – rapport septembre 2011.

conciLieR vie PRofessionneLLe et vie fAmiLiALe

AutOnOMie écOnOMique et finAncière DeS feMMeS I 19

Page 11: L’Autonomie économique des femmes · genRe Le genre désigne la construction culturelle de la différence des sexes. Le genre est à la fois défini comme l’ensemble des rôles

Ces tâches domestiques et éducatives non reconnues et non rémuné-rées limitent l’accès au travail rémunéré des femmes. Un changement s’impose pour une valorisation du travail qui reproduit la vie et les forces de travail. Nos organisations partenaires nous interrogent sur la valeur de ce travail de « soins » nécessaire au maintien du lien social. Les femmes s’inscrivent dans des projets collectifs qui leur permettent de compenser les faiblesses et les fragilités individuelles. Cette démar-che aide les femmes à vaincre les obstacles et à réunir les conditions de réussite. Les tâches ménagères ou d’éducation ne demeurent pas seulement inégalement réparties quant à leur durée, elles le sont aussi quant à leur nature : les femmes prennent en charge les tâches les plus répétitives et les moins valorisées (ménage, courses, soins) alors que les hommes s’investissent dans les tâches plus proches des loisirs (bricolage et jardinage).19

Avec le vieillissement de la population en Europe on va aussi assister à un passage de la prise en charge de la petite enfance à celle des aînés, et assister à un accroissement des inégalités face à la prise en charge du soin entre les hommes et les femmes.20

RendRe visibLe et vALoRiseR Le tRAvAiL domestique

La crise que nous connaissons est une crise de transition entre deux modèles de capitalisme. En parlant de parentalité en entreprise, c’est le modèle à venir que nous contribuons à construire : un modèle respectueux de l’humain (…). Derrière la quête de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, il y a les enjeux sociétaux les plus importants du moment ; la place de la famille et du travail dans la société, la prévention du stress, l’égalité homme-femme ou encore l’éducation des enfants.»

Jérôme Ballarin, président de l’observatoire de la parentalité en Entreprise

«

Les entreprises peuvent gagner à intégrer dans leur plan stratégique de nouvelles organisations du travail favorables à la conciliation famille/travail. Sur fond de nouvelles aspirations sociétales (implication croissante des pères, essor des couples biactifs et des familles monoparentales, légitimation du « hors-travail »), cette approche est susceptible de décloisonner la question de la conciliation : en cessant de la cantonner aux femmes et en l’intégrant dans une perspective d’innovation pour l’entreprise. Pour ce faire il faut favoriser les approches intégrées combinant partage de poste, télétravail, choix des horaires, mesures formelles et informelles…

Il est important de rendre visible et de reconnaître le travail domestique car il limite fortement l’accès au travail rémunéré pour les femmes. En effet, les activités domestiques des femmes semblent être acceptées unanimement comme un fait naturel. C’est là qu’un changement s’impose. Maintenir ce transfert de valeur de façon invisible est un moyen de ne pas rémunérer le travail féminin jusqu’à la fin des temps.

chAngement de LA vALeuR tRAvAiL

DE LA SATISFACTION DES BESOINS VITAUX à LA TRANSFORMATION SOCIALE.A partir des besoins de la communauté, des femmes développent une activité économique : dulce miel, une coopérative d’apicultrices. Elles développent une capacité individuelle : confiance en elles, prise de parole, estime de soi. Elles se forment pour acquérir des compétences techniques aux métiers de l’apiculture et de la biodiversité, et un pouvoir de décision sur les choix de prêts et d’investissement de la coopérative. C’est « l’empoderamiento » : agir par les capacités pour lutter contre les inégalités femme/homme.En accédant à une autonomie économique, Petronilla peut choisir de réorienter les choix de la famille. Elle gagne l’estime de son mari, et pour lui, participer à la vaisselle et au rangement de la maison ne sont plus des tâches dégradantes. Son mari Appolinar nous dit : « Il y a du machisme et grâce aux ateliers de Cantera sur l’égalité homme/femme, j’ai changé mon regard. A la maison, les hommes ne lavaient pas une assiette, ce n’est pas qu’ils ne pouvaient pas, c’est qu’ils avaient honte de laver une cuillère ou de faire une tasse de café, maintenant je fais plus attention à Petronilla. Pour moi, les femmes ont gagné de la valeur, elles nous ont fait nous débarrasser de notre machisme. Maintenant on prend tous les deux des décisions pour la famille.»

Vidéo CCFD-Terre Solidaire, Cantera 2007/2008,coopérative d’apicultrices (rappel dans vidéo 2008-2009)

CANTERA (NICARAguA)

19 Couples, familles, parentalité, travail des femmes, les modèles évoluent avec les générations, INSEE première, mars 2011.20 Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes. Mai 2012. www.observatoire-parité.gouv.fr21 Le genre du Sud au Nord (Le Monde selon les femmes) P.17

PRODuIT

InvISIBLE vISIBLE21

Un deuxième âge de l’émancipation est nécessaire. Cela passe par l’instauration d’un véritable service public de la petite enfance, par une réforme du congé parental et par une refonte de l’ensemble des dispositifs sociaux et fiscaux à la lumière de l’égalité entre les sexes.

Le CIDFF (Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles) accueille et informe le public, et plus particulièrement les femmes et les familles, dans ses domaines de compétences :• Accès aux droits• Emploi• Vie familiale et parentalité• Education à l’égalitéIl exerce une mission d’intérêt général confiée par les services de l’Etat et notamment le Service aux droits des femmes et à l’égalité.Son objectif est de favoriser l’autonomie sociale, profession-nelle et personnelle des femmes et de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes.

Exemple d’action de l’antenne de Strasbourg : « Atelier conciliation des temps de vie »L’objectif est de favoriser l’identification des différents temps sociaux et analyser les modalités de conciliation (en terme d’organisation familiale et personnelle, de déplacement,de stress, de gestion des rendez-vous...)Le programme de l’atelier est le suivant :• Perception du temps : le temps subjectif et le temps objectif• Question du temps sexué• Identification des différents temps des participants-es• Repérage des déséquilibres existants et des situations de stress• Mise en place d’une méthodologie de changement par rapport a ces situations.

L’articulation entre le travail et les responsabilités familiales : des enjeux majeurs pour les politiques sociales a fait l’objet d’une étude d’évaluation pour améliorer les performances sociales18. Ce rapport parlementaire cible particulièrement les familles monoparentales, et principalement les mères seules qui sont particulièrement exposées au risque de pauvreté en France et en Europe.

POuR EN SAVOIR PLuS

Les politiques publiques d’infrastructures (transports), de services publics (éducation et garde des enfants) et de protection sociale (santé) sont essentielles pour décharger les femmes des contraintes qui pèsent sur leur emploi du temps.

La rigueur budgétaire des dépenses publiques de santé et d’éducation impacte doublement les femmes dans l’emploi et dans les aides plus restrictives qui obligent les femmes à quitter leur emploi pour assurer les tâches « reproductives ».

Dans les pays du Sud, la prise en charge des personnes vulnérables par la communauté permet aux femmes de s’organiser pour gagner de l’autonomie. Quand ce lien communautaire disparaît à cause des conflits, des migrations..., les femmes se retrouvent isolées et sont encore plus fragilisées.

cRise des déPenses PubLiques et RôLe de LA communAuté

18 Rapport d’information N°4098, M.Heinrich et R.Juanico, députés, décembre 2011 P.186 Assemblée Nationale.

I 20 AutOnOMie écOnOMique et finAncière DeS feMMeS I 21

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L’ORGANISATION SINDO S’APPUIE SUR LE CONSTAT D’UNE RÉPARTITION INÉGALITAIRE

DES TâCHES ENTRE FEMMES ET HOMMES, lEs fEMMEs étAnt systéMAtIQuEMEnt SUBMERGÉES DE TRAVAIL.

L’objectif de Sindo était donc d’associer femmes et hommes pour une plus juste répartition des tâches.

L’organisation a mis en oeuvre un program-me de microcrédits et de formations, pour

permettre aux femmes d’acheter des terres ou développer leur activité, mais surtout, elle a

lancé un travail de réflexion dans la communauté. Les enfants et les adultes ont été invités à réfléchir sur les rapports entre hommes et femmes. La communauté s’est ainsi appropriée la question, et a pris conscience de son importance. Tous se sont mobilisés pour cette égalité.Elle a obtenu un changement de mentalités. Les femmes ont pris confiance en elles, et ne sont plus submergées de travail, ce qui a permis leur accès aux sphères décisionnelles.

SINDO (BéNIN)

Ces initiatives, enracinées dans un contexte de transformation sociale, nous interrogent sur une nouvelle conception de la richesse qui considère les activités de lien et de soin non pas comme des activités secondaires, invisibles, féminines mais comme des activités essentielles pour l’épanouissement des indi-vidus, femmes et hommes, et pour la pérennité de nos sociétés et de notre planète22.

PouR une AutRe concePtion de LA Richesse

Présentation des enjeux de l’emploi féminin par le CES Lorrain La place importante de l’emploi industriel en Lorraine, qui est un type d’emploi très masculin, a freiné l’entrée des femmes sur le marché du travail, surtout dans le nord Lorrain.

Sur le plan économique, on constate une corrélation entre :• le taux d’activité des femmes et le taux de croissance• le taux d’activité des femmes et l’augmentation de la performance des entreprises (organisation et finances)• un investissement des temps de formation investis par la collectivité et un apport économique

Sur le plan socialLe travail des femmes est un rempart à la pauvreté des familles et des enfants.« La surexposition des femmes à la pauvreté est liée à la fois à la structure familiale (famille monoparentale), à leur situation professionnelle et à la nature de l’emploi (CDD, temps partiel) qu’elles occupent. » En Lorraine, 88% des chômeurs ou inactifs à la tête de familles monoparentales sont des femmes.

Sur le plan démographiqueIl existe un lien entre le taux d’emploi et le taux de fécondité.Dans un contexte de vieillissement de la population, l’activité féminine est un facteur de maintien d’une croissance.

22 Femmes, Economie et développement, de la résistance à la justice sociale, Isabelle Guérin, Madeleine Hersent et Laurent Fraisse , édition Eres, déc.2010.

Au regard de notre expérience en Alsace- Lorraine, nous soulignons l’importance de se former à ces questions car ce thème nous questionne et peut déstabiliser dans la mesure où ce travail thématique réinter- pelle les rôles, les représentations et dévoile des rapports de domination dans lesquels nous pouvons être acteurs ou victimes, dans la société et dans l’Eglise.

Dans les prochains dossiers, nous traiterons des droits et de la citoyenneté des femmes avec toutes les implications en matière de violences faites aux femmes (pourquoi et comment agissent nos parte-naires sur ces questions de dignité humaine) et en matière d’accès à la gouvernance (qu’est ce que la présence de femmes dans des instances de décision syndicales, politiques, associatives… change pour faire avancer les droits des femmes et l’égalité femme/homme ?)vous pouvez nous contacter pour nous faire parta-ger vos expériences, des initiatives proches de chez vous, des rencontres de partenaires sur ces prochains thèmes et ainsi contribuer à la rédaction de ces futurs dossiers.

en concLusion

A la lecture de ce document, on constate que :

La question de l’égalité femme/homme traverse toutes les thématiques développées par le CCFD-Terre Solidaire. De la souveraineté alimen-taire à la prévention des conflits en passant par l’économie sociale et solidaire, les migrations et les richesses financières. Il est important donc de rendre visible ces actions pour l’évolution des rapports hommes/femmes pour plus d’égalité.

La notion de travail continue trop souvent de se référer uniquement au travail salarié et d’exclure le travail domestique ou celui lié aux soins des enfants ou des proches dépendants, ainsi que de toute autre activité bénévole de service à la communauté, qui est à 80% le lot des femmes.

Les questions posées par ces initiatives portent sur la division sexuelle du travail, la défense des droits et la conception de la richesse. Comme le préconise le collectif Rio+20, il faut « faire de l’approche par les droits humains intégrant l’égalité homme/femme l’épine dorsale de la définition de toutes les politiques et stratégies de développement soutenable.»

Il est important de remettre dans leur contexte les actions de nos partenaires dans une histoire, des réalités sociales et économiques. Cet aspect est indispensable pour conduire une animation et pour ne pas véhiculer de nouveaux stéréotypes Nord/Sud.

La démarche partenariale interroge particulièrement nos pra-tiques en termes d’égalité femme/homme par l’effet miroir ou de convergences des luttes que nos organisations partenaires nous renvoient. Elles nous montrent qu’il n’y a pas de petites réussites, mais que leurs organisations produisent une richesse infinie et un changement social. Elles redonnent de la dignité aux femmes.

outiLs d’AnimAtion et d’éducAtion

Pour les enfants

Des quizz, des petits jeux adaptés aux plus jeunes pour les aider à comprendre les inégalités filles-garçons et les solutions qui peuvent être mises en place pour décons-truire les stéréotypes.

Pour les ados

« Sur la planète Fého » : un grand jeu pour les 11-14 ans.De 15 à 40 personnes.Au travers d’un univers fantastique, les participants en-treront dans une quête qui leur permettra de découvrir en quoi les inégalités entre hommes et femmes désé-quilibrent la Planète Fého. Féhoniens et Féhonniennes se mobiliseront tous pour lutter contre l’inégal accès aux choix de formation, aux différences de salaires et aux obstacles du bien vivre ensemble.Un jeu facile à animer, drôle et pédagogique !

Pour les grands ados

Des outils pédagogiques pour sensibiliser cette tranche d’âge à l’autonomie économique et financière des femmes. Des jeux qui vont leur permettre d’être acteurs dans leurs lieux d’études ou de professionnalisation, ainsi qu’à la maison !

Pour les adultes

vidéo « Autonomisation économique et financière des femmes »

A partir de la table ronde sur l’autono-mie économique et financière des femmes, organisée par le CCFD-Terre Solidaire le 10 mars 2012, cette vidéo permet de :

• Découvrir des situations vécues en France et dans le Monde en matière d’autonomisation économique et financière des femmes.• Comprendre les actions qui peuvent être mises en place pour favoriser l’accès à l’autonomie économique et financière des femmes.

Cette vidéo séquencée propose une animation dyna-mique auprès d’un public adulte, en petits ou grands groupes. Vous y découvrirez des témoignages d’acteurs locaux, associatifs, partenaires de pays du Sud…

ET BIEn D’AuTRES OuTILS à DéCOuvRIR sur le blog du CCFD-Terre Solidaire Alsace- Lorraine (rubrique Egalité femme/homme) ou dans les délégations Alsace/Lorraine.

blog.ccfd-terresolidaire.org/alsace-lorraine

I 22

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27 Septembre 2012 — ONU Femmes et les trois organismes des Nations Unies en charge d’alimentation et d’agriculture ont lancé un programme commun destiné à rendre plus autonomes les femmes rurales pauvres par des initiatives d’intégration économique et de sécurité alimentaire.Accélérer les progrès vers l’autonomisation économique des femmes rurales est une initiative étalée sur cinq ans.

« L’autonomisation et l’élargissement des droits des femmes rurales, ainsi que leur accès à la terre, aux pouvoirs, aux opportunités et aux choix, permettent de développer les économies, renforcer la sécurité alimentaire et améliorer les perspectives pour les générations actuelles et futures. »

michelle Bachelet, Directrice exécutive d’ONU Femmes.


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