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Entre États-Unis et Mexique, la frontière dessine une fracture

économique, sociale et linguistique.

Des maquiladoras à l’insécurité liée aux cartels de la drogue,

en passant par l’immigration clandestine

et "l’hispanisation" croissante de la société américaine. (d'après "le Dessous des Cartes" – octobre 2010)

La frontière qui sépare les États-Unis du Mexique

va de l’Océan Pacifique au Golfe du Mexique, elle est longue de 3141 km.

Le fleuve Rio Grande a été utilisé comme frontière entre les deux États

sur plus de 2000 km de long.

la Frontière américano-mexicaine

La frontière est ici matérialisée par le trait jaune.

Le fleuve serpente dans des paysages montagneux, en s’écoulant au fond des canyons.

Sur le terrain, on mesure à quel point cette frontière est à la fois

difficile à franchir dans la clandestinité,

et difficile à contrôler sur une telle longueur, et dans une telle géographie,

Une frontière difficile à franchir et à contrôler

Côté États-Unis d’Amérique, la frontière longe 4 États fédérés.

Et côté Mexique, elle longe six États de la Fédération mexicaine.

les États frontaliers

Voici le territoire dont le Mexique avait hérité à son indépendance en 1821,

c'est-à-dire une superficie beaucoup plus importante qu’actuellement.

Le tracé final de ses frontières date de la fin des affrontements militaires

qui ont opposé les Mexicains aux Anglo-américains de 1835 à 1848

le Mexique lors de son indépendance, en 1821

En 1836, 15 ans après son indépendance,

le Mexique perd le Texas, plus ce morceau de territoire à l'est du Rio Grande,

peuplé majoritairement de colons européens et américains.

le Rio Grande comme frontière mexicaine

En 1848, les États-Unis déclarent la guerre au Mexique

qui refuse de vendre la Californie,

et les États Unis prennent ainsi les terres situées au Nord-Ouest du Rio Grande.

la Conquête de la Californie par les États-Unis

Enfin, le Mexique vend un dernier petit bout de terrain en 1853,

c’est ce qu'on appelle "l’achat Gadsen".

Il va permettre ensuite le passage de la ligne de chemin de fer du sud des États Unis.

l’Achat Gadsen

En 30 ans, entre les affrontements et les ventes,

le Mexique a perdu la moitié de son territoire.

les Pertes territoriales du Mexique

Aujourd'hui, il y a 310 millions d'habitants du côté américain et 112 millions du côté mexicain.

Mais l'écart entre les deux pays est encore plus grand au niveau économique :

le PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat d’un Américain

est trois fois et demi supérieur à celui de son voisin mexicain.

Un différentiel économique et démographique

Et ce différentiel économique a induit un important flux migratoire vers le Nord.

On voit sur la carte les points de passages du Mexique vers les États-Unis :

le record du nombre de passages est détenu par la ville de San Diego

où plus de 100 000 personnes passent chaque jour.

le Flux migratoire vers les États-Unis

Les deux pays ont bien sûr tenté d’encadrer à plusieurs reprises ce flux migratoire.

Notamment avec un programme de développement de la frontière

connu sous le nom de maquiladoras.

Là encore, en survolant les villes jumelés de El Paso côté américain,

et Ciudad Juarez côté mexicain, on voit bien comment ce développement a opéré

El Paso et Ciudad-Juarez

Côté mexicain, à droite, les maquiladoras sont de grandes usines

où sont assemblés des produits manufacturés tels que le textile, la mécanique, l’électronique,

c'est-à-dire à faible valeur ajoutée,

et qui sont ensuite réexportés vers les États-Unis, mais aussi vers l’Europe ou le Japon.

les Maquiladoras, le long de la frontière mexicaine

Le développement des maquiladoras a été spectaculaire, du fait de l’entrée du Mexique

dans l’ALENA, c'est-à-dire l’Accord de Libre Échange Nord-Américain, signé en 1994 .

Et aussi l'entrée du pays dans l’OMC en 1995.

En 2010, il y a 5 283 maquiladoras au Mexique,

dont plus de 3000 sont situées dans les États frontaliers.

le Développement des Maquiladoras

Et les États-Unis sont le premier partenaire commercial pour le Mexique,

représentant 80 % des exportations et 48 % des importations.

les États-Unis, premier partenaire commercial du Mexique

Depuis quelques années, le dynamisme économique des maquiladoras s’essouffle,

en partie parce que la Chine a dépassé le Mexique en nombre de délocalisations.

Donc les importations américaines venant de Chine dépassent celles venant du Mexique,

du fait des coûts de main d’œuvre qui sont encore plus compétitifs en Chine.

la Concurrence de la Chine

Cette carte montre que la migration mexicaine est avant tout concentrée

le long de la frontière américaine et dans l’ouest des États Unis.

la Migration mexicaine aux États-Unis

Les Mexicains sont 11,5 millions, soit 30 % de la population américaine née à l’étranger.

C’est la première communauté de citoyens américains nés à l’étranger.

Ils constituent aussi la 1re communauté de clandestins - migrants entrés, ou résidant

clandestinement aux États-Unis (7 Mn de personnes, soit 60 % des clandestins aux États-Unis,

selon les chiffres du Ministère américain de la sécurité intérieure).

le Poids de la communauté mexicaine aux États-Unis

Et ce mouvement de population de Mexicains

renforce dans son ensemble la communauté hispanique aux États Unis.

Si on ajoute migrations et solde naturel dû à un taux de fécondité élevé, les hispaniques

devraient d’ici 2050 tripler passant de 15 à 30 % de la population résidente aux États-Unis.

À cette date, les Américains "blancs" ne représenteront plus la majorité absolue aux É-U.

la Communauté hispanique aux États-Unis

Cette carte des hispanophones installés de part et d’autre de la frontière montre que

la frontière entre Amérique anglophone et Amérique hispanophone

ne correspond plus tout à fait à la frontière de souveraineté.

En 2010, sur les 20 % de résidents américains ne parlant pas anglais à la maison,

plus de la moitié parle l’espagnol, soit près de 37 millions de personnes.

l’Effacement de la frontière linguistique

Le politologue américain Samuel Huntington estime que

face à une communauté hispanique de plus en plus importante numériquement,

concentrée dans certaines régions du pays, parlant une autre langue que l’anglais,

provenant en partie de l’émigration clandestine, et refusant de s’assimiler,

et bien la nation américaine risquerait finalement d'éclater.

la Montée des réflexes identitaires aux États-Unis

Quatre cartels se sont partagé le contrôle de la frontière :

Golfe du Mexique, Juarez, Sinaloa, et Tijuana.

Mais ce partage territorial est régulièrement remis en cause.

Le Pnt Caldéron a lancé en 2006 "la guerre contre les cartels", qui a exacerbé la violence :

on estime qu'en dix ans, il y aurait eu entre 25 000 et 28 000 morts

la Guerre des cartels

Côté américain l'État Fédéral a décidé en 2006

de procéder à la construction le long de la frontière, d’une barrière physique et électronique,

qui s’étend désormais sur environ 1100 km.

Le contrôle de cette frontière Sud des Etats-Unis

absorbe 88 % des ressources humaines et matérielles du dispositif frontalier américain.

les Inégalités régionales de revenus

On peut retenir de tous ces éléments que

c’est un peu comme si on avait plusieurs sortes de frontières…

- la frontière linguistique s’estompe peu à peu des deux côtés ;

- la frontière de l’emploi, elle aussi est de plus en plus mobile,

beaucoup de Mexicains travaillent aux États-Unis

(et cela arrange les employeurs américains),

et dans le sens du Nord vers le Sud, les transferts financiers vers

le Mexique sont eux aussi très importants ;

- enfin, il y a une frontière de sécurité :

les lois américaines, le mur qui a été construit, se voudraient de

protection car la frontière de souveraineté nationale, elle n’est pas

négociable et elle ne bougera pas.


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