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Enjeux Politiques dela MondialisationLobjectif du cours est dclairer des problmes internationaux la lumire des sciences politiques et sociales.La premire partie vise comprendre les dynamiques historiques de la vie politique internationale et de la mondialisation. On sintressera ensuite linstitutionnalisation du systme politique international.La deuxime partie vise effectuer un zoom sur des thmatiques, tudier des questions partir dides reues (risques et dangers/terrorisme, lide que lon vit dans un monde sans frontires, uniformisation).Les italiennes sont chiantes.Les libanaises sont folles. Les marocaines sont hystriques. Alors une fille qui est un mlange des trois .. MON DIEU! Introduction gnrale.

1. Les mots pour le dire.Dans ce cours, on sintresse des problmatiques et des dynamiques qui dpassent lEtat comme cadre principal dapprhension du politique. La mondialisation.Il est intressant de voir quau dpart, lorsque lon a commenc voir ce mot dans le dbat public, on lutilisait dans un sens strictement conomique: cela renvoyait la faon dont les entreprises devenaient des firmes nationales et avaient de plus en plus des stratgies plantaires.Aujourdhui, la mondialisation renvoie au dveloppement des changes entre diffrentes parties, diffrents types dacteurs, lchelle du monde. Cette question des changes est au cur des rflexions sur la mondialisation.Quest ce qui est chang? Il y a bien sr des changes commerciaux, mais aussi des flux migratoires, la circulation des ides, des modles On peut galement sintresser la nature de lchange, la question de savoir si lchange est quilibr ou ingal? Quel est le rythme de ces changes, leur volume?La mondialisation renvoie galement plus ou moins explicitement au retrait de lEtat, comme forme dorganisation du politique: il seffacerait au profit du march, mais aussi au profit dentits, dorganisations et dinstitutions politiques lchelon supranational.Lorsque lon parle de mondialisation, il est cependant clair que lon sintresse des relations au niveau plantaire qui dpassent les relations entre Etats. On sintresse beaucoup dchanges, beaucoup de dynamiques qui ne se limitent pas aux relations internationales. Observer la mondialisation est alors une faon dinterroger la transformation de lEtat. Globalisation.Assez souvent, parler de globalisation par rapport la mondialisation met laccent sur les vecteurs de lchange, par exemple les transports, les technologies, les NTIC. Cest ce qui peut donner lide que lon serait dans une priode spcifique, nouvelle: ce point des vecteurs de lchange est nouveau, il y a aujourdhui une capacit des vecteurs agir et se coordonner en temps rel.La globalisation ne renvoie pas qu lchelle plantaire, au monde: global signifie un tout, une entiret. Il faut donc entendre la globalisation comme quelque chose qui renvoie une pluralit de secteurs de la vie politique, conomique, et sociale.On sintresse alors aussi aux tous petits niveaux. Vie politique internationale.Plutt que de sintresser aux institutions politiques internationales, on sefforcera ici de dpasser ces cadres institutionnels. On comprend en effet politique dans un sens trs large: on sintresse au politique, lEtat, aux politiques publiques internationales.Dans un sens strict, international renvoie alors aux relations entre les Etats, mais aussi ce qui se passe entre dautres acteurs, mais dans le champ daction et de rgulation de lEtat.1. Regards croiss sur la mondialisation et la vie politique internationale.Il y a diffrentes inspirations disciplinaires dans le cours: la science politique, mais aussi la sociologie, lconomie, la gographie, lanthropologie Lide est dacqurir une culture gnrale.1. La ncessit dhistoriciser le regard.On considre souvent, sans doute tort, que la mondialisation fait partie de lordinaire, du quotidien. Au contraire, on peut considrer que cest indit. Dans les deux cas, cest une myopie historique. On arrive assez facilement concevoir quil y a eu une vie politique internationale avant lONU.En revanche, on oublie parfois que ce phnomne plus large de mondialisation na pas commenc avec internet. Il est donc trs important de sintresser cela dun point de vue historique pour comprendre la mondialisation actuelle, cad ce qui se passe aujourdhui.Il est donc ncessaire dhistoriciser le regard. On ne peut comprendre la mondialisation actuelle sans rintroduire la dimension historique.A. La ncessit et la richesse dune perspective de sciences sociales et politiques.Dans une certaine mesure, ce processus de mondialisation est essentiellement conomique: la vie politique internationale sest construite et est structure parles flux conomiques.On ne peut alors comprendre les changes internationaux si lon ne comprend pas les origines et les enjeux de lconomie de march.Mais ce processus nest pas non plus essentiellement conomique: la mondialisation nest pas quconomique, mais aussi politique, sociale, culturelle. Mme lorsquon lapprhende comme un phnomne conomique, on peut lapprhender du point de vue de la science politique, en sintressant au pouvoir, lEtat, lidentit politique des individus.B. La ncessit de faire varier les chelles danalyse.Il est normal davoir un regard macro lorsque lon sintresse aux phnomnes internationaux. Mais la globalisation est une dynamique galement observable un niveau plus petit, un niveau micro, cad au niveau de lindividu.Saskia Sassen la bien montr: elle montre comment on peut sintresser la mondialisation avec une approche sociologique, et que certaines dynamiques sont des parties prenantes importantes de la mondialisation, et ne sont pas situes lchelle plantaires.1. Problmatiques transversales.Ces problmatiques sont importantes car sont autant de thmatiques possibles pour des sujets dexamen. Et lEtat dans tout a? Retrait, dclin, dpassement?Comment lEtat sest-il construit, dvelopp sous sa forme moderne, et en quoi cela est-il en lien avec sa forme internationale? Quest-ce que la mondialisation actuelle fait lEtat?Des personnes soutiennent mme lide que lEtat, tel quon ne connait aujourdhui, est le produit de la globalisation. Cest la thse de Jean-Franois Bayart. On pourrait dire la mme chose du pouvoir et de lidentit politique. Qui perd et qui gagne, dans quel processus de mondialisation?La mondialisation est un processus structurellement ingalitaire. Il faut se souvenir que les enjeux de pouvoir sont au centre des relations sociales et conomiques, et que, dans toute relation sociale, il y a des gagnants et des perdants. Cela pose la question des ingalits et de leur mesure. La notion de classe sociale est aussi intressante pour comprendre ce que les dynamiques internationales font aux classes sociales. Le lien entre le niveau macro et le niveau individuel, entre les diffrentes chelles danalyse.Ce questionnement est trs familier, si lon part des pratiques sociales et culturelles. La globalisation renvoie lide qui pntre tous les domaines de la vie sociale. Quel regard sur lactualit?Lide est de dvelopper ce regard sur lactualit, sur la vie politique internationale.

Partie IMondialisation et vie politique internationale, histoires et dynamiques.LEtat dpass?

Titre 1: Histoires et historicit de la mondialisation.

Chapitre ILa mondialisation avant la mondialisation.Economie-monde europenne et mergence du capitalisme.

Introduction. Pourquoi sintresser lhistoire de la mondialisation?Il est absolument important de prendre en compte la dimension historique, pour plusieurs raisons. La mondialisation, que lon prsente souvent comme un phnomne rcent, ne lest pas en ralit. Cest un processus que lon ne peut comprendre quen linscrivant dans le temps long. Pour comprendre le capitalisme, notre situation actuelle, il faut comprendre ses origines, comment a-t-il merg, et quel est son rapport avec lEtat.

Une deuxime raison est analytique: comment peut-on comprendre en quoi quelque chose de nouveau si lon ne peut pas caractriser ce quil y avait avant? Dans la dynamique actuelle, un certain nombre de choses sont nouvelles, singulires. Ces caractristiques peuvent tre expliques que si lon a une connaissance solide du pass.

Lorsque lon prend plus de champ dun point de vue historique, on est alors capable de dcentrer le regard.

Une histoire ou des histoires?Le terme dhistoire au singulier renvoie notre histoire, lhistoire europenne et plus largement occidentale. Parler dhistoires au pluriel envisage le fait quil y a plusieurs histoires, histoires trs importantes pour comprendre la mondialisation. Jusquau 15e sicle, la Chine tait par exemple dans une position centrale au niveau du dveloppement. Cela nest pas sans intrt lorsque lon regarde la position de la Chine au plan mondial aujourdhui.Parler dhistoires au pluriel rappelle aussi que lhistoire est une science, quil y a des dbats, des interprtations diffrentes, et que cela donne une image composite avec des controverses. La notion dconomie monde (Fernand Braudel).Fernand Braudel, historien franais, na pas utilis le terme plus habituel et spontan dconomie mondiale: la notion dconomie-monde renvoie plutt lide dune conomie qui est un monde, cad sous-entendu un monde parmi dautres, une civilisation. Il sagit de dfinir une structure qui ne couvre pas toute la terre, mais plusieurs conomies monde qui existent un moment donn.1. Lhistoire conomique nest pas dabord celle de lOccident (Philippe NOREL).1. Quest-ce que lhistoire globale?Lhistoire globale est une approche qui nait aux Etats Unis, et qui a donn lieu aujourdhui un courant extrmement dynamique. Lide tait de rquilibrer le poids de lhistoire amricaine et europenne dans les programmes, et de dire quil ne faut pas une histoire tunnel, mais il faut en sortir, car elle ne prend pas en compte les histoires des autres parties du monde et considre trop que ce qui sest pass sest pass en raction aux faits et gestes de ce qui sest pass en Occident.Cette approche historique se diffuse, notamment en France, et met particulirement laccent sur les connexions conomiques, mais aussi politiques, culturelles, entre les rgions du monde, et cherche faire apparaitre des dynamiques densemble. Ces interconnexions ont t trs importantes pour faonner lconomie ainsi que les Etats.Lhistoire conomique globale sintresse alors plus particulirement aux changes commerciaux, aux origines du march. Cela renvoie des auteurs classiques: Smith, Marx, WeberLhistoire globale est intressante pour ce cours car si lon essaye de comprendre ce qui se passe aujourdhui, on a des institutions du march trs importantes, et une sorte de saturation de la plante par les changes. Cest alors trs intressant de voir comment tout cela est li une conomie interconnecte trs ancienne.Cette approche dhistoire globale est importante pour trois raisons. Elle permet lhistoire des peuples discrdits dexister pour elle-mme. Lorsque lon sintresse la structuration de lconomie internationale, on voit souvent quil y a eu un apport considrable des socits non europennes. Cela nous invite raconter cette histoire europenne, nous interroger nous lide quil y aurait une supriorit intrinsque de lEurope.

1. Une histoire conomique eurocentre: exemples de la rvolution industrielle et des grandes dcouvertes.Nous avons une vision de lhistoire trs imprgne de significations, qui ne font presque pas dbat. Par exemple, la squence des Grandes Dcouvertes est un tournant dans lHistoire du monde: cest la priode pendant laquelle les europens semparent du monde. Nous avons lide quils le font grce une certaine supriorit technique, notamment dans le domaine de la navigation.De la mme faon, lorsque lon essaye de comprendrela Rvolution Industrielle, on considre que cest un tournant qui ne se passe quen Europe: cest un mouvement de rvolution technique qui aura des consquences trs importantes sur les modes de vie occidentaux.Plus largement, au-del de ces exemples, il y a lide que ces russites, ces moments o lOccident sest impos sur la scne mondiale, sont associs une autre russite: la dmocratie, dont le berceau est lEurope, avec notamment la Grce Antique.Dans ces rfrents de notre culture historique gnrale, on a donc cette ide que lOccident a t le moteur conomique du monde, mais aussi un modle en matire de dveloppement politique et dmocratique. On ne remet pas forcment en doute ces affirmations.Dans cette vision, si lon se pose la question de lEurope par rapport au reste du monde, on considre implicitement que le reste du monde a pendant trs longtemps emptr dans la tradition, et que lorsque lon sintresse lhistoire des questions internationales, cest pour regarder les consquences de lessor occidental sur ces socits non-europennes. Ces choses sont des rfrents de notre culture gnrale.Deux exemples pour dconstruire ce rcit. Cela a trs bien t fait par les historiens de lHistoire globale, qui essayent darticuler diffrentes histoires avec diffrents points de vue, pour comprendre quel a t vraiment lessor de lOccident.Les Grandes Dcouvertes. On les prsente parfois comme le rsultat dune sorte de gnie europen. Lorsque lon parle des grandes dcouvertes, cest par exemple le franchissement du Cap de Bonne Esprance par Bartolom Oudias en 1487. La plus grande dcouverte est la dcouverte de lAmrique par Christophe Colomb en 1492.Vasco de Gama rejoindra lInde en contournant lAfrique en 1498.Cabral au Brsil en 1500. Magellan gagne les Philippines en 1518.On peut alors se poser deux questions, que se pose notamment Philippe Norel. Ces navigateurs sont-ils vraiment les premiers franchir ces passages?Les historiens de lhistoire globale essayent de recenser ce qui a t dit dans dautres histoires. On constate alors quil y a une circulation dans ces points de passages qui sont antrieures aux grandes dcouvertes.Concernant le contournement de lAfrique, certains travaux disent que les Phniciens en auraient fait le contour plusieurs sicles avant JC. Un trs grand navigateur arabe a galement t trs important sur ce point: Amad Ibm Majid. Des travaux dhistoriens ont montr quil a eu des interactions avec Vasco de Gama, et il laurait mme pilot dans son entreprise de dcouvertes, avec des avances techniques suprieures chez les arabes par rapport aux europens.Autour du 15e sicle, certains navigateurs chinois auraient atteint la cte est de lAfrique. Concernant la dcouverte de lAmrique, des marins Viking ont atteint le nord de lAmrique ds le 11e sicle.Un dbat galement trs contest dit que les chinois auraient dcouvert lAmrique en 1421. Egalement, des tmoignages difficiles vrifier dans la littrature arabe mentionnent des dbarquements en Amrique par des marins arabes partis du Maroc ou dEspagne. Ces grands navigateurs et cette capacit naviguer nest donc pas spcifiques aux europens cette poque.

Ces grandes dcouvertes peuvent-elles vraiment tre imputes des qualits spcifiques, notamment techniques, aux europens?Il y a toute une mythologie concernant la supriorit europenne, notamment portugaise. La caravelle aurait notamment t invente par les portugais, et ils auraient dvelopp une approche logistique remarquable. On raconte mme quil y aurait une cole de navigation Sagrs.Or, les historiens ont montr notamment que le monarque, Enrique, naurait pas toutes les qualits quon lui attribue. Notamment, linvention de la cartographie a t faite par les arabes. Ce nest donc pas le rsultat dune supriorit europenne.Lorsque lon sintresse ces travaux historiques, on voit donc que lon peut remettre en cause le caractre spcifiquement europen de la navigation cette priode. LEurope nest donc pas forcment la plus efficace dans les entreprises de lpoque, contrairement ce que voudrait lhistoire reue, trs eurocentre. Il ne sagit pas de dire que les navigateurs europens nauraient eu aucun rle: cest une tendance naturelle tout groupe social de naccorder dimportance qu sa propre histoire. Cest ce quon montr des sociologues.La Rvolution Industrielle. Bien souvent, on considre que la rvolution industrielle est un phnomne technique dorigine europenne. En gnral, ce sont dune part des conditions favorables, et dautres part des innovations techniques.Concernant les conditions favorables, on a eu une rvolution agricole, avec une trs forte pousse dmographique, et un phnomne durbanisation trs important, une rvolution des transports.Mais la rvolution industrielle est souvent explique comme lapplication la production de certaines inventions trs importantes, par exemple dans le domaine textile ou de la mtallurgie.Par exemple, dans le domaine du textile, on trouve la question de lindustrialisation du tissage, notamment la navette volante, qui double la productivit du tissage, et stimule la cration dun appareil industriel, la spinning jenny.La productivit industrielle du tissage sera multiplie par 16.Si lon prend ces cas, les historiens, notamment des techniques, ont montr que lon a eu des dispositifs techniques trs similaires, connus des chinois: notamment, la navette volante est apparue trs tt en Chine. Certaines amliorations dans les premires machines sont en fait le rsultat de la circulation des techniques. Ces techniques ont alors t perfectionnes et mcanises.Ce nest donc pas rellement le gnie europen: le concept de base a normment voyag, et vient de la Chine. Il ne faut donc pas rflchir linnovation technique comme le gnie dun peuple ou dune personne: cest une dynamique collective, avec beaucoup de circulation, dhybridation, lchelle mondiale, dans une conomie dj trs interconnecte.Ce qui changera radicalement aprs 1850 est alors le rythme, la succession rapide des innovations, et lapplication de certaines innovations plusieurs champs en parallle.1. Et pourtant: une Europe longtemps marginalise et en retard sans lconomie interconnecte.Lorsque lon sintresse aux travaux de lhistoire globale, on constate que lEurope tait plutt marginalise et en retard dans lconomie interconnecte.Des travaux dhistoriens montrent par exemple que jusqu la renaissance, la civilisation chinoise tait beaucoup plus avance que la civilisation europenne, et lEurope a alors beaucoup emprunt la Chine. Cela est trs bien document par Joseph Needham.LAsie reprsente en effet une trs grande part de la production mondiale: environ 80% pour 60% de la population mondiale. La technique et productivit agricoles sont bien suprieures celles que lon trouve en Europe. Du point de vue des changes, lEurope en tant quensemble est commercialement dficitaire par rapport lAsie.Cela est aussi vrai du point de vue politique: le Moyen ge se caractrise par un miettement du pouvoir politique en Europe, mais galement par une certaine violence. Au contraire, en Asie, les systmes politiques sont beaucoup plus structurs.Lorsque lon essaye de comprendre la dynamique asiatique aujourdhui dans la mondialisation, et que lon considre quil sagit seulement dune conversion au capitalisme moderne, il faut donc galement situer tout cela dans une certaine histoire.Il ne faut pas cependant dire quil ny a pas de spcificit europenne: quelque chose de fondamental se passe en Europe entre le 16e et le 18e sicle, qui a voir avec un systme dorganisation conomique indit qui nait en Europe: le capitalisme. Cela a aussi voir avec lmergence de lEtat. Sur ce modle dorganisation du politique, lEurope assoira sa domination.Lhistoire globale permet donc de poser une question: il sagit de questionner cette priode, comment est-on pass de ce retard cet essor? Cela est assez mystrieux, et na rien dvident, contrairement ce quon peut le penser. Cela rend cette question de lessor de lOccident encore plus crucial.Ce passage historique permet donc de montrer quil y a un certain nombre de dynamiques de lhistoire europenne quon ne comprend que si on sintresse aux connexions, aux circulations dans lconomie mondiale interconnecte.Lhistoire globale permet aussi de poser diffremment la question de lessor de lOccident, et quil sagit en ralit dun puzzle, qui doit tre expliqu.

1. LEurope du Moyen ge et les conditions de lessor de lOccident.LEurope est donc plutt en retard jusquau 15e sicle. Le capitalisme, n entre le 15e et le 18e sicle, est cependant bien n en Europe, et permet de comprendre lessor de lOccident.Pour expliquer cet essor de lOccident, on a parfois recours des mythes. La notion de mythe renvoie une histoire fondatrice que lon raconte sur quelque chose, qui a un sens et une fonction.1. Des mythes: lextension spatiale de la sphre des changes, avancement des techniques et existence dune classe de marchands comme exceptions europennes.1. Lextension spatiale de la sphre des changes.Assez souvent, on raconte que lessor des changes internationaux se serait fait dans le prolongement de la croissance des conomies locales. Il y aurait eu un mouvement de lintrieur vers lextrieur: il y aurait une division du travail, qui se ferait au niveau local puis international.Dans cette vision, on aurait au dpart des units conomiques de base, qui vivent plutt replies sur elles-mmes: la famille, le village. Ces units produisent des choses, mais consomment essentiellement ce quelles produisent: cest lautarcie. Mme sil y a cet autarcie, il peut exister un surplus: on cherchera alors lchanger, faire du troc. Les premiers lieux dchanges de ces surplus sont alors les marchs.On voit alors apparaitre la monnaie, qui vient simplifier les changes. Tout le dveloppement de la monnaie dmultipliera alors les possibilits de lchange. Le dveloppement dun march montaire fera alors craquer lautarcie: avec la monnaie, on peut acheter toutes sortes de choses. Cela favorise alors la spcialisation des activits.Progressivement, la sphre de ces changes dpassera le niveau local, puis le niveau national, pour atteindre le niveau international.Ce rcit fait sens, mais est contredit par dautres historiens, qui proposent dautres explications. En ralit, cest la petite part de ce commerce qui est tourne vers lextrieur: il y a dj des voies commerciales par lesquels il y a dj des changes conomiques trs importants en terme de richesse accumule. Par exemple, la route des pices, la route de la soie.1. Lexistence dune classe de marchands.Tout comme il ny a pas un avancement technique spcifiquement europen, les marchands, acteurs oprant le long de ces voies de commerce, ne sont pas seulement des marchands europens. Pendant le Moyen ge, il y a dj une intense activit marchande, avec au centre beaucoup le monde musulman. On retrouve galement la mme chose plus tard, au 10e sicle, avec des changes importants entre la Chine, lIslam, et lOccident des croisades. Par exemple, Bagdad est une ville trs importante au cur des changes.Par cette circulation des marchands circulent alors des ides, des pidmies, des schmas institutionnels. Vers le 15e sicle, lEmpire Ottoman sera alors au centre de ces changes. De ce fait, comment peut-on expliquer que le capitalisme apparaitra en Occident, et non pas en Chine par exemple?La question nest pas tant de comprendre comment yaurait-il une supriorit intrinsque de lOccident, mais plutt de comprendre les conditions, la spcificit, qui permet de comprendre lmergence de ce capitalisme.1. LEurope du Moyen ge ou les conditions de lessor du commerce et dune premire forme de capitalisme: le rle des villes.Il faut distinguer deux phases: Le prcapitalisme (13e 15/16E sicle), qui apparait dans les cits-tats italiennes, mais ce nest pas encore le capitalisme: la question des richesses nest pas encore connecte la production. De plus, il ny a pas encore dEtat: il ne joue pas un rle dterminant, et cest mme plutt le vide de cet Etat qui permet ces petites cits de prosprer et au commerce de se dvelopper. Le capitalisme industriel (17, 18, 19e sicles), avec une unification des marchs intrieurs: la construction de lEtat viendra alors soutenir cette accumulation des richesses, lextrieur, grce la domination coloniale, mais aussi lintrieur, avec le dveloppement des transports, lunification linguistique, la cration de systmes de mesure, de systmes ducatifs Pourquoi est-ce les marchands europens qui inventeront le capitalisme?LEurope du Moyen ge se caractrise par sa trs grande fragmentation du pouvoir politique, par son caractre chaotique, avec une multitude de minuscules seigneuries, qui constituent des entits conomiques autonomes.Sur ces marges, quelques villes sont dans une situation diffrentes, en particulier autour du bassin mditerranen: en Italie du Nord, mais aussi en Allemagne baltique. Ces villes russiront se dvelopper en saffranchissant du systme fodal, par le fait quelles sont des ports, et sont trs riches grce au commerce. Pour lItalie du Nord, cest en particulier le commerce avec Byzance.Comme ces villes se dveloppent, et sont de plus en plus autonomes, elles rachteront des droits aux seigneurs, et dvelopperont leur propre administration. Gographiquement, cela se passe non seulement aux marges de lEurope, mais aussi dans des pays o ne se forme pas un Etat central fort. En France par exemple, on trouve dj les prmices de la centralisation de lEtat: ce nest pas un cadre propice au dveloppement et a richesse de ces cits-tat.La spcificit de lOccident ce moment est que ces marchands ont principalement leur activit localise dans ces villes. On a alors un contraste entre un pouvoir tatique plutt faible, et ces villes trs dynamiques, o les marchands commercent librement.Cependant, on peut considrer quil y a des villes trs importantes ailleurs: pourquoi ne trouve-t-on pas le mme modle capitaliste qui apparait Byzance par exemple? Pourquoi sagit-il des cits de lOccident?Si lon prend la diffrence avec les cits romaines, Rome, on trouve certes des marchands, du commerce important. Mais si lon regarde le modle social, les activits commerciales ne sont pas tellement valorises, voire juges indignes. Par exemple, on limite lexportation de marchandises dalimentation. Ce qui est prestigieux socialement est plutt lengagement dans la vie publique, les charges publiques que lon peut obtenir. Laccumulation des richesses nest alors pas une fin en soi.Dans les cits-Etat, cela est assez diffrent: la structure sociale est beaucoup plus confuse, et plus cosmopolite. Laccumulation financire sera alors beaucoup plus attractive que la vie publique, et notamment, cette vie publique est ferme aux marchands.Cest dans cette configuration que laccumulation de richesses deviendra, pour cette classe sociale, une fin en soi. Cest le cas notamment de Gnes, de Venise, de Hambourg. Par exemple, Venise, il y a une richesse prodigieuse la fin du 14e sicle. Elle reprsente alors presque le centre du monde: le commerce est mondial, entre le monde chrtien, et les empires byzantin et musulman. On trouve une seconde mditerrane au Nord de lEurope, avec les cits allemandes comme Hambourg et Lubeck.Ces deux mditerranes se rejoindront dans lEurope de lintrieur, par exemple, dans les foires de Champagne: ce sont des marchs continus, des lieux de rencontre entre les marchands du nord et ceux du sud. Ces marchs ne sont alors pas les mmes marchs que ceux du village par exemple. On schange des draperies, du vin, avec des marchandises provenant dOrient, comme les pices, la soie.Les techniques financires font alors considrablement saffiner. On change avec de la monnaie, et petit petit, on changera avec des lettres de change (anctre du chque), pour viter le transport physique dargent. Ces lettres de change deviendront des instruments de crdit, mais aussi de spculation: une activit bancaire, financire se dveloppera petit petit. Ce sont notamment les banquiers italiens qui la dvelopperont dans un premier temps.Petit petit, cette activit financire entrainera le dclin des marchs: les lieux dchange seront de plus en plus dmatrialiss, avec lapparition des bourses par exemple. Ce qui compte nest donc pas davoir une classe de marchands en soi, mais que ces marchands dveloppent une activit dans un contexte, celui de ces cits mdivales, et qui accumulent des richesses considrables. Ce commerce prosprera alors sans entrave politique.Mais ce commerce est encore trs peu li au systme de production: on nest alors que dans le prcapitalisme. Le systme de production est en effet domin par les corporations, qui sont des organisations de rgulation par mtiers.Un secteur est alors assez diffrent et prcurseur du capitalisme industriel: le secteur du textile. En effet, trs tt, il y aura un lien entre lactivit marchande et lactivit de production. Trs vite, les marchands simpliqueront dans le systme de production car passeront directement commande aux artisans, fourniront les matires premires.La manufacture est diffrente de la fabrique. La manufacture sont des ateliers gants. Lorsque lon parle de la fabrique, on va vers lusine.1. Le dsenclavement plantaire de lEurope: changement dchelle, dplacement du centre de gravit, et rivalits europennes.Si lon veut comprendre ce qui se passe au 15e 16e sicle, il faut absolument envisager la dimension plantaire.De cette part des changes, une grande richesse saccumule, et cest partir de ces changes que se mettra en place lconomie-monde europenne, de laquelle sortira le capitalisme. Jacques ADDA donne des chiffres approximatifssur cette priode: 90% des biens que les paysans consomment viennent dun cercle de 5km autour de chez eux. Pour 90% de ce qui ne vient pas de ce premier cercle, cela vient dunedistance qui est une journe de marche. Et cest alors seulement dans le 3e cercle cad le 10e du 10e restant, qui vient du commerce lointain, international. Mais cest sur cette petite part du commerce, tourne vers le monde, que se construiront des fortunes.Ce commerce au long cours sarticule aussi avec le vaste processus de dsenclavement maritime de lEurope. A la fin du 15e sicle, on aura des marchands explorateurs navigateurs qui prendront le contrle du commerce, notamment arabo-indien, et aller jusquen Chine et au Japon. Les marchands semparent alors trs vite de ces voies maritimes.En revanche, ici, les Etats naissant jouent un rle important. Les initiateurs sont souvent des monarques de pays, qui noccupaient pas forcment la premire place sur la scne internationale, comme le Portugal.Lor est galement trs important dans les conomies europennes: la monnaie ncessite notamment de lor. Les gisements dor se trouvent alors en Afrique, et le commerce de lor en Afrique est contrl par les musulmans: cest ce qui fait que lEurope est dficitaire dans son commerce avec lOrient. LEurope est en effet trs pauvre en mtaux prcieux. Lide est alors de ne plus dpendre du monde musulman pour avoir accs lor.Avec cette motivation daller chercher des mtaux prcieux, cest alors une priode o, en peu de temps, saccumulera une trs grande richesse. On verra en trs peu de temps arriver des produits inconnus, qui rvolutionneront les processus de fabrication. On voit alors apparaitre avec le dsenclavement plantaire, avec louverture de ces voies commerciales, des nouveaux produits, comme le sucre, le cacao, la pomme de terre, le mas, le riz, le caf Cest la mme chose pour la production: le dveloppement de lindustrie cotonnire par exemple.Les marchands qui vendent ces produits feront alors des profils prodigieux: il y aura une accumulation des richesses absolument indite.Il faut toutefois mentionner un autre type de commerce: lesclavage, sur lequel repose tout ce commerce. On parle parfois de traite atlantique ou occidentale. Ce commerce triangulaire sorganise en trois temps: Des navires partent dEurope, de grands ports atlantiques (Nantes, la Rochelle, Lisbonne, Londres, Bristol) et emportent de quoi acheter des captifs aux puissances africaines: des textiles, de lalcool, des armes, des outils.. Il y a ensuite un troc de ces marchandises contre des esclaves. Les endroits les plus importants sont le Sngal, ou lAngola. Chargs desclaves, les bateaux partent vers leur destination de livraison, de lautre ct de lAtlantique, notamment au Brsil et sur la cte sud de lAmrique du nord. La mortalit moyenne de ces cargaisons est de 20% en moyenne, mais parfois, elles disparaissent compltement, du fait des conditions dhygine dplorables. Sur les ctes du nouveau monde, les europens vendent alors les esclaves pour obtenir les productions locales, comme le sucre, le coton. On affecte ces populations dportes ces plantations. Ces bateaux se chargent alors de ces produits.Ce commerce triangulaire est lun des ressorts de cet essor de lOccident.Il faut galement voir la faon dont les quilibres se dplacent en Europe. On voit quatre centres se succder.

Venise, centre trs riche la fin du 14e sicle, pendant un sicle. Vers les 15e 16e sicles, Anvers sera un centre trs dynamique. En Italie, Gnes, dans la seconde moiti du 16e. Vers la fin du 16e sicle, Amsterdam.Ce qui dplace le centre de lconomie-monde dAmsterdam vers ailleurs est la Rvolution Industrielle, qui donnera un grand avantage au Royaume Uni, avec un dbut du capitalisme industriel trs important. Le centre se dplace alors Londres vers la fin du 18e sicle. Cela bascule alors avec la crise de 1929: le centre de lconomie-monde se dplace New York.1. Trois analyses classiques pour comprendre lmergence du capitalisme.Il sagit de revenir sur trois thses dveloppes pour comprendre cette mergence du capitalisme. Diffrents regards ont en effet t ports sur cette mergence.1. Economie-monde europenne et dynamique du capitalisme (Fernand Braudel) puis notion de systme-monde.Fernand Braudel est un historien incontournable sur ce point. Il sest intress la gense du capitalisme et la priode prindustrielle. Il montre que dans un premier temps, on trouve bien une conomie de march qui existait, mais qui occupait une place restreinte dans la socit. Elle sera alors le lieu privilgi de lmergence du capitalisme. Pour lui, lmergence du capitalisme est alors bien antrieure la rvolution industrielle.Il retrace ce processus dmergence de lconomie capitaliste, qui est un phnomne trs lent: on a les premiers prmices vers le 13e sicle, et il montre ensuite comment cette conomie se dveloppera, partir de centres qui se dplaceront et regrouperont tour tour la majorit des activits conomiques.La distinction la plus importante chez Braudel est celle faite entre conomie de march et capitalisme: trs souvent, on considre quil sagit de la mme chose. Or, ce sont deux notions distinctes. Lconomie de march renvoie pour lui des changes qui peuvent tre des changes de proximit, mais rglements, transparents. Le capitalisme est une faon de contourner les rgles du march, un contre-march. Pour dgager des profits exceptionnels, on cr alors des situations de monopole, de lopacit sur ces rgles.Diffusion du capitalisme.Lconomie-monde est un espace gographique, qui a des bornes clairement identifies. Cest un espace plutt conomique: les frontires ne sont pas forcment politiques. Cest un espace polaris, cad qui gravite autour dun ple, dune ville dominante. Ces villes-centres sont trs importantes: cest l que lon centralise, que lon rpartit les richesses, les marchandises, mais aussi les informations et les hommes.Il peut exister deux centres un moment dans une conomie-monde, mais ce quobserve Braudel, cest quun centre finit toujours par tre dominant.

Enfin, cet espace est hirarchis en zone successives, qui sont concentriques. On trouve une ville-centre, et autour, des cercles concentriques, avec des zones de moins en moins participantes lconomie monde, et de plus en plus dpendantes. On trouve ensuite des zones intermdiaires, et la priphrie, des marges, plus tendues, archaques.Dans cette conomie-monde, on trouve une division du travail: les zones priphriques sont subordonnes au centre dominant, et dpendantes de celui-ci.Par exemple, concernant lconomie-monde au moment o Amsterdam est le centre. La premire priphrie sont les provinces unies. Ensuite, on trouve la baltique, la France, lEcosse, etc. Aux marges, on trouve la Scandinavie, et le sud de lEurope. Cette priphrie stend jusque lautre ct de lAtlantique.Dans une conomie-monde, une poque donne, on a une coexistence de socits trs diffrentes. Dans les priphries par exemple, on trouve des esclaves, des serfs. Le centre est alors dj capitaliste au contraire.Lide de Braudel est alors que lapparition du capitalisme procde de cette hirarchisation interne de lconomie-monde. Ce capitalisme qui apparait dans la ville-centre est alors une cration historique. Pour Braudel, le march est quelque chose de naturel: il y a du march partir du moment o il y a de lchange. En revanche, le capitalisme est une cration historique, qui apparait dans ces conditions. Le capitalisme dsigne donc ce modle dorganisation conomique. Cest une faon de filouter le march afin den profiter.Le capitalisme dsigne aussi des choses ayant voir avec les mentalits, favorables au profit, au calcul et au jeu.Son travail sur la notion dconomie-monde est majeur, assez consensuel. En revanche, sa dfinition du capitalisme comme un contre-march nest pas forcment accepte par tous.1. Invention du march, dsencastrement de lconomie, et rle du commerce au long cours (Karl Polany).Linstitution du march pour Polany est quelque chose dancien, mais pendant longtemps, le march comme institution na jou quun rle secondaire dans la vie des civilisations: dans les socits prcapitalistes, on a une conomie qui nest pas autonomise. Lconomie est encastre dans les relations sociales.Le systme conomique existe, mais est gr selon une rationalit diffrente de celle du capitalisme: on a des changes conomiques, mais la rationalit qui gouverne ces changes peut tre non conomique. Par exemple, les relations de parent peuvent gouverner ces changes, et non la qute du gain.Que ce soient les socits primitives ou les empires, ils ont des marchs, mais rguls par des principes diffrents du march capitaliste.Au Moyen ge, il faut distinguer les marchs locaux, frquents par les habitants voisins, qui nont pas tendance sagrandir, et les grandes foires, o se rencontrent les marchands du sud et du nord, et o sont issus les produits du commerce au long cours. Lhypothse de Polany est alors de dire qu partir de ce commerce extrieur, au long cours, linstitution du march investira progressivement la vie occidentale.Linstitution de la forme du march capitaliste, qui repose sur laccumulation, le mode de fixation des prix, est alors pour Polany luvre de lEtat: cest la formation des Etats en Europe qui fera la jonction entre cette multitude de marchs locaux et le commerce extrieur. Auparavant, il y avait plutt une coupure stricte, entre un march intrieur, rgul par les corporations, et un march extrieur, rgul par les marchands.Avec lEtat qui abolit les corporations, fortifie la monnaie, pourra alors se faire cette jonction et se dvelopper le capitalisme. Pour Polany, le march comme institution trouve donc plutt son origine dans linstitution de lEtat et le commerce extrieur.B. Du macro au micro: lesprit du capitalisme (Max Weber).Max Weber sintresse lui la dimension culturelle du capitalisme: il sintresse linfluence de lthique religieuse sur le comportement conomique. Il montrera le lien troit entre le protestantisme et le capitalisme. Globalement, pour lui, le capitalisme se dfinit comme le premier systme conomique entirement organis autour de la qute rationnelle du profit.Lappt du gain nest pas quelque chose de nouveau: ce qui est nouveau, cest que cela devient le modle dorganisation de la socit. Il y a certaines conditions pour que ce modle devienne le principe dorganisation de la socit: notamment, lexistence dinstitutions, par exemple, lexistence dun systme de comptabilit.Il montre que le capitalisme est aussi un ordre social particulier, fond sur des rfrences culturelles, des valeurs, qui tournent notamment autour de la valorisation du travail et de lpargne.Si lon essaye de drouler son raisonnement, Weber part dabord dun constat: en Allemagne, au dbut du 20e sicle, le pays est en plein dveloppement conomique, et les leaders de ce systme sont alors beaucoup de protestants, alors quen Allemagne, cette poque, on trouve autant de catholiques que de protestants. Cette observation est trs courante cette poque.Weber prend alors au srieux ce constat, et essaye de lier ces deux faits. Il dfinit alors le capitalisme: le capitalisme repose sur lentreprise industrielle avec le but de raliser le maximum de profits, par une organisation rationnelle du travail et de la production. Cest donc la jonction entre un dsir de profit et une discipline rationnelle.Ce dsir de profit est diffrent de celui des marchands auparavant: il sagit dune accumulation indfinie. Le capitaliste veut en effet accumuler sans limites: cela a alors une dimension culturelle. Accumuler sans fin, en soi, pargner, travailler sans relche, na rien de rationnel pour lui. Que retire cet entrepreneur, en dehors de la satisfaction de cette accumulation?

Il fait alors le lien avec lthique protestante. Il sintresse la morale protestante calviniste. Dans le dogme calviniste, on trouve la prdestination, qui nexiste ni dans le catholicisme, ni chez les luthriens. Cette ide de dogme est quil existe un Dieu transcendant, et il a prdestin chacun au salut ou la damnation. Ce qui ne change pas est que la mission de chacun est de travailler la gloire de Dieu.On trouve aussi la notion dascse: les richesses ne doivent pas tre utilises pour le luxe, on doit mener une vie sobre, sans superflu, en se concentrant sur lessentiel, cad le spiritualisme, le lien direct avec Dieu.Le problme pour le croyant, dans ce dogme, est la mission de lhomme, dans ce monde. Il doit travailler la gloire de Dieu. Il cherche alors, dans sa vie quotidienne, des signes de son lection au salut par Dieu. Il peut alors trouver des signes dans le succs, dans la russite matrielle, qui seront interprtes comme des indices dune lection divine. Ne pas russir serait alors ressentir sur soi le fait que lon nest pas lu.Cette accumulation de richesses, importante car cest un signe de llection divine, va de pair avec une morale austre, puritaine.Ce qui est donc condamnable chez les calvinistes, nest pas le fait daccumuler des richesses, mais le fait de se reposer dessus et den jouir: le luxe. Le plus grand pch est alors dtre oisif: le travail est une fin en soi.Dans cette approche, il y a une conjonction, une affinit lective entre lthique protestante et le capitalisme. Weber dmontre alors que lthique protestante fournit une motivation extra-conomique une conduite assez trange, qui est de toujours accumuler plus, mais pas pour en jouir.Dans cette approchetrs clbre, Weber fournit une explication de la naissance du capitalisme industriel. Il ne dit pas cependant que la religion est le seul dterminant de lmergence du capitaliste: il montre les affinits lectives, cad que lon na pas seulement deux choses qui coexistent.Pour Braudel, lesprit du capitalisme est bien antrieur au dbut du protestantisme: Weber et lui nont donc pas la mme interprtation.Conclusion.La supriorit de lOccident nest donc pas un donn. Il faut alors expliquer comment ya-t-il eu cet essor de lOccident, alors quil tait mme plutt en retard. Il faut donc sinterroger sur la spcificit de lOccident. On a alors montr comment ya-t-il un lien trs fort entre lmergence de lOccident, et lmergence du capitalisme, qui devient un monde dorganisation sociale, et les liens existants entre la formation du capitalisme et la formation de lEtat.

Chapitre 2Deux sicles de mondialisationRetour sur la premire mondialisation.

Introduction. La premire mondialisation a lieu de la seconde moiti du 19e sicle la premire guerre mondiale. La seconde mondialisation est celle que lon vit aujourdhui. Ressemblances et diffrences?Il est intressant de sintresser la premire mondialisation, et didentifier des ressemblances entre les deux mondialisations, car dans beaucoup de choses que lon entend sur la mondialisation, des choses ne sont pas si nouvelles. Sintresser aux dynamiques de la premire mondialisation permettra galement de remettre en cause un certain nombre dides reues, sur ces choses qui seraient nouvelles et caractristiques de notre poque. En effet, la premire mondialisation est bien moins rgule que celle que lon vit aujourdhui.Cest alors en faisant ce parallle que lon peut voir ce quil y a de fondamentalement nouveau entre ces deux priodes. La mondialisation, un processus irrversible?Aprs la premire mondialisation, donc aprs la premire guerre mondiale, on a vu linternationalisation des changes de toute sorte baisser. Pour retrouver le mme niveau dans les changes internationaux, en particulier au niveau conomique, il a alors fallu attendre les annes 1980-1990. Si lon se situe dans une priode historique, cela permet alors denvisager la question de la rversibilit de cette dynamique. La premire mondialisation montre alors que ce phnomne nest pas irrversible: il y a par exemple un retour au protectionnisme durant les annes 1930. Ces dbats sont aujourdhui trs prsents avec la crise, notamment sur la question du protectionnisme.Plus gnralement, lorsque lon sintresse aux grands dbats, ces dbats sont alors les mmes, on trouve les mmes axes qui se retrouvent. Par exemple, on parle beaucoup de lacclration de la conqute coloniale qui sest produite durant la premire mondialisation: cest la faon dont lEurope sempare du monde et le partage. Cest donc quelque chose de trs important concernant les rapports de domination qui stabliront, qui seront trs importants comprendre, car permettent denvisager notamment les relations nord-sud. Des dbats qui portent aussi sur la mondialisation actuelle.On trouve aussi la question du lien entre lconomique et le politique, et de la place de lEtat dans la mondialisation: ya-t-il un dclin de lEtat dans la mondialisation, ou au contraire, lEtat soutient-il la mondialisation? Cette rflexion est un des grands dbats contemporains.Ce parallle est donc trs intressant faire, pour ne pas considrer que certaines choses actuelles sont nouvelles, et notamment car de nombreuses questions se posent sur la mondialisation.1. La premire mondialisation: points de repre.La premire mondialisation se caractrise comme un moment o lon voit disparaitre des cloisonnements entre le march intrieur et le march international. Ces marchs deviendront de plus en plus articuls: cest la mise en march de la plus grande part de la production, qui se fait notamment sur le march international.1.1 - Un formidable essor du commerce international Progrs technologique et rtrcissement du monde. Cette priode dessor du commerce international repose en grande partie sur le progrs technologique, des transports et des communications. Cela est dabord trs li la rduction du cot des transports et des communications: les progrs faits dans ce domaine modifieront beaucoup les relations commerciales. En effet, on peut faire des changes plus vite, plus loin, et moins cher.Des avances sont aussi faites avec de nouvelles routes commerciales, avec notamment le percement de canaux, comme le Canal de Suez. Les distances sont raccourcies.Il y a un essor de diffrents types de transports. Le rail, avec des liaisons intrieures qui se dveloppent, mais aussi transcontinentales. Par exemple le transsibrien. La navigation, avec lintroduction de bateaux vapeur.Il y a aussi labaissement du cot des transports maritimes: de nombreuses marchandises sont transportes par voie maritime, et le cot du transport va considrablement baisser, pour atteindre moins de 10% au dbut du 20e sicle.Cette baisse sera possible grce au dveloppement de la machine vapeur, et grce aux canaux. Le canal de Suez (1869) rduira par exemple la distance entre Londres et Bombay de 40%, ce qui favorise les changes entre des deux pays. Jacques ADDA tablit par exemple que le cot des transports maritimes baissera de 60%.Les relations commerciales sont galement modifies avec lapparition des nouveaux moyens de communication, comme le tlgraphe et le tlphone. Ce progrs technologique est trs important pour la mondialisation. Notamment, la baisse du cout des transports permet un rtrcissement du monde. Comme cela devient moins couteux et que ce commerce est encore assez peu rgul, les activits de production seront alors de plus en plus penses en fonction de la demande trangre.Pendant cette priode, on observe une multiplication par 20 des volumes changs. On a aussi une augmentation considrable de la production. Il est alors intressant de regarder la croissance des changes par rapport la croissance de la production. Le niveau des changes augmente alors plus vite que le niveau de production.On a alors un niveau des changes trs important, qui ne sera pas atteint avant trs longtemps. On estime que ce niveau tait de 7,5% au niveau du 20e sicle, et entre 15 et 20% la veille de la premire guerre mondiale. Ce taux est donc trs lev: ce taux est le mme la veille de la premire guerre mondiale que dans les annes 1970, avant la seconde mondialisation.

1.2 - Un capitalisme financier.Durant la premire mondialisation, on trouve galement un change intense de capitaux, essentiellement europen: ce phnomne nest donc pas nouveau. Il sagit aussi de flux dconnects de la sphre relle, spculatifs, dans le but de faire des profits. On voit notamment beaucoup augmenter des investissements directs ltranger: on ninvestit pas seulement sur des valeurs, mais aussi sur des infrastructures ltranger.Ce changement est aussi li un changement de destination des flux financiers: les capitaux se dirigent de plus en plus vers des destinations lointaines, pour financer des infrastructures de transports et des usines sidrurgiques.Si lon regarde les changes internationaux au 19e sicle, on constate alors que la part relative des capitaux tait plus importante quaujourdhui: cest lune des caractristiques de la premire mondialisation.Ces placements se dirigent donc de plus en plus vers linternational, et cette part importante des produits financiers est caractristique de la premire mondialisation. Cette redirection des flux financiers vers les pays de sud ne veut pas cependant dire que lon a une convergence conomique des pays du nord vers les pays du sud: cest mme plutt linverse, avec lmergence de la priphrisation.Via ces investissements financiers, on a alors des stratgies de mainmise sur les matires premires. Cela peut tre aussi le moyen davoir une intervention directe de certains Etats europens ou certaines socits crancires dans les affaires publiques de ces pays dbiteurs.En revanche, ce qui est diffrent daujourdhui est que les risques financiers sont moins importants: on a un systme de change des monnaie qui est toujours index sur lor (talon-or), qui permet davoir une parit entre les monnaies plus ou moins fix, et donne une certaine stabilit montaire.Il y a une faon concrte de le matrialiser: par exemple, dans la vie quotidienne, beaucoup de choses taient mesures avec la monnaie. Par exemple, deux sous de farine Cela montre que la monnaie tait assez stable dans le temps, ainsi que le prix des marchandises.La seconde diffrence est que lon a aussi moins de contrles: jusquen 1914, il ny a quasiment pas de contrle de la circulation internationale des capitaux.1.3 - La soupape dmographique.La France a une position assez diffrente dans sa faon de sinsrer dans la nouvelle mondialisation: les franais qui investissaient ltranger investissent assez peu dans leurs colonies. Beaucoup de capitaux se dirigent par exemple vers la Russie, lArgentine.De plus, dans son intgration internationale, les flux migratoires ne joueront pas un rle trs important, du moins pas le mme que la Grande Bretagne par exemple, o lon trouve des flux de population massifs.La baisse du cout des transports favorisera alors les flux migratoires: entre 40 et 50 millions de personnes quittent lEurope, dont 38 millions sur la priode commenant en 1870.LEurope est alors une terre dmigration beaucoup plus quune terre dimmigration. Le cas de la France est particulier. On trouve cependant galement des mouvements migratoires intra-europens. La circulation en Europe tait lpoque trs peu contrle: en fonction de lindustrialisation de certains pays, on trouve alors des flux migratoires lintrieur de lEurope. Par exemple, dans la rgion, on a des flux importants vers le bassin minier.Il y a aussi dimportantes migrations internationales. Ce sont principalement les pays anglo-saxons qui quittent lEurope vers les nouveaux mondes (Amriques du Nord et du Sud, Australie, Afrique du Sud) Cette dynamique dmigration est trs fortement soutenue par le gouvernement britannique, qui veut peupler ses territoires, ses dominions, car cela cr un march potentiel. Cest galement une faon de se dbarrasser dune population qui pose des problmes sociaux. LAllemagne et les pays scandinaves sont galement une terre dmigration. Par exemple, au dbut du 20e sicle, la Sude et lIrlande perdront 10% de leur population.Au dbut du 20e sicle, cette migration anglo-saxone sessoufflera et stendra aux pays mditerranens mais aussi aux pays slaves. Cela correspond lpoque o le servage a t aboli: les paysans sont libres, mais se retrouvent sans travail, sans terre, et ne peuvent tre accueilli par le monde de lindustrie.Ces colonies sont donc une faon de rsoudre la question sociale, mais sont aussi une stratgie conomique: cest une faon davoir des dbouchs pour lindustrie europenne. Ces colonies deviendront en effet les marchs dexportation les plus importantes. Ces rgions accueilleront aussi la plupart des placements. Le modle conomique de cette premire mondialisation repose donc sur la colonisation, et notamment sur ces vagues de peuplement europennes.II - LEurope de la premire mondialisation et son rapport au monde.Quels modles ont-ils t dvelopps pour rendre compte de cette mondialisation, tant du point de vue historique que du point de vue conomique?Durant cette priode, les rivalits saccentueront entre les puissances europennes. Dun point de vue conomique, la rvolution industrielle sest produite, et les besoins de lappareil productif europen sont trs importants en deux choses: Les matires premires. Des dbouchs.La combinaison de ces deux besoins suscitera une relance exceptionnelle de la course lexpansion coloniale. En 1800, lEurope contrle environ un tiers de la plante, alors quaprs la premire mondialisation, on considre que les puissances europennes contrlent 4/5 de la surface du globe. Cela se fait avec une acclration considrable durant cette premire mondialisation.Cela est li une logique conomique, mais aussi politique.1. Rappel sur la notion de systme-monde (Wallerstein): centre, priphrie, priphrisation.Wallerstein est un disciple de F. Braudel. Il sintresse lespace mondial et aux rseaux dchanges qui se passent ce niveau mondial, et la division du travail qui sy opre. Il dit alors que dans ce systme monde, on trouve deux types diffrents: lempire-monde et lconomie-monde.La diffrence entre les deux est la configuration politique: Dans lempire-monde, la division du travail se fait dans une organisation politique unique. Dans lconomie-monde, le systme conomie se dploie dans un systme intertatique.Lide dun systme ne signifie pas juste quil y a des changes: pour parler de systme-monde, il faut quil y ait une division internationale du travail. (Un systme est donc un truc dans lequel les parties ont des effets entre elles).Une logique sinstaure et correspond une division internationale du travail: tant que les changes se limitent des produits exotiques ou prcieux, comme ctait le cas au Moyen ge, cela ne touchait pas lappareil de production. Cela nest alors pas un systme monde, mais plutt des changes entre des systmes monde diffrents.Dire quil y a un systme monde est quil y a un lien entre ces changes et lappareil de production. En termes du type des biens changs, cela concerne alors aussi des biens intermdiaires ou des biens de consommation courante, comme par exemple le coton.On a affaire un espace la fois polaris et hirarchis. Lopposition centre-priphrie est alors au centre de ce modle: on parle parfois mme du modle centre-priphrie. La priphrie, dans lconomie-monde, se conoit en opposition avec le centre du systme, qui comprend les puissances engages dans la lutte pour lhgmonie. Tout ce qui entoure le centre nest alors pas ncessairement la priphrie: la priphrie se dfinit par son rapport au centre, et est bien dans le systme-monde.Par exemple, si lon prend le cas de lInde, pendant une trs longue priode, il y a du commerce avec les Indes: les comptoirs des Indes. A ce moment, ces comptoirs ne permettent pas de dire que lInde est une priphrie de lconomie-monde europenne: ce commerce ne vient pas structurer son modle organisation conomique, ne transforme pas le systme de production. Les comptoirs sont plutt des lieux ddis au commerce au long cours.Cela va alors basculer au 19e sicle avec la domination britannique: ce moment, lInde devient alors une priphrie dune conomie-monde, qui a pour centre Londres. Ce qui sera produit en Inde, et le mode dorganisation politique en Inde, se structurera en fonction de sa relation avec le centre. La priphrie est donc dfinie par son mode dinsertion dans lconomie monde.Un autre critre est la division internationale du travail, cad la division internationale telle que lon dcide les puissances du centre: qui fait quoi, qui se spcialise dans quoi? Cest le centre qui dcide. Dans ce modle, la spcialisation ne dpendra alors pas de dterminants naturels, qui expliqueraient que dans tels pays, comme on a telles ressources, on ne spcialiserait dans telle production. Dans le modle centre-priphrie, lide est que la division internationale du travail sera dfinie par le centre.Dans cette emprise du centre, il y a une dynamique importante de restructuration des productions locales selon les besoins du centre.La priphrisationest le processus de restructuration des productions des rgions tombant sous le contrle politique ou conomique du centre de lconomie-monde en fonction de ses besoins de consommation finale ou intermdiaire.Il y a la question de la production, mais aussi la question du march. Avec la conqute coloniale, les colonies de peuplement reprsentent notamment un dbouch trs important pour les industries europennes.Lide est donc que le modle dorganisation des priphries est dissoci des besoins locaux. On a plutt une production directement branche sur la demande du centre et dun march cens tre mondial.Ce rapport conomique est imbriqu dans un rapport de force militaire et politique. Le rapport de force est en effet au dpart militaire, et a permis ces puissances du centre de consolider leur domination coloniale. Lconomie internationale, dans ce domaine, ne dpend alors pas de la confrontation entre une offre et une demande, mais de rapports de force, qui dterminent les termes de lchange entre le centre et la priphrie. Ce modle repose donc sur des rapports de domination, et non sur un jeu du march comme dans un modle noclassique.Le fait que ces rapports articulent lconomique et le politique permet de comprendre que ces rapports ne sarrtent pas en un jour. Avec la dcolonisation, ce nest donc pas pour autant que ce systme scroule du jour au lendemain: on peut avoir des structures de spcialisation, notamment conomiques, qui perdureront.Ce modle permet de comprendre la problmatique des rapports nord-sud aujourdhui. Ce nest donc pas la gographie qui dtermine compltement les rapports de domination. Par exemple, le Bangladesh est parfois appel lusine textile du monde. Pourtant, on ne produit pas un seul m de coton dans ce pays. Ce nest donc pas les dterminants gographiques qui expliquent les rapports de domination.1. Une premire mondialisation reposant sur lassujettissement des mondes extraeuropens.Pendant la premire mondialisation, les puissances au centre du systme monde sont les villes-capitales des grandes puissances coloniales.Le premier continent entrer dans la priphrie de ce systme-monde est lAmrique, notamment lAmrique latine. Assez rapidement, cette rgion deviendra alors une rgion-centre: aprs la crise de 1929, on peut considrer que New York est au centre du systme-monde.Si lon sintresse lAfrique, on voit que les dynamiques de priphrisation sont diffrencies: la priphrisation se produira seulement la fin du 19e sicle. Cela ne signifie pas quil ny a pas dchanges avec lAfrique: il y a les comptoirs, la traite des esclaves, mais aussi lor. En effet, il ny a pas de restructuration de la production locale en fonction du centre.Cela est trs caractristique de la premire mondialisation: la fin du 19e sicle, les europens prendront conscience des richesses trs importantes du continent africain. Il y aura alors une course la colonisation. Cette priphrisation est donc tardive en Afrique. Par exemple, le dveloppement de la Belgique a cette poque repose beaucoup sur lexploitation conomique du Congo belge.Concernant les pays du Proche-Orient et du Maghreb, on trouve des relations conomiques depuis lAntiquit. Lintgration de certains pays de cette zone lconomie-monde europenne se fera alors par tapes. Par exemple, la France colonise lAlgrie ds 1830 pour en faire une colonie de peuplement: 600000 europens y vivent. Il y a aussi dautres types de rapports conomiques, avec des traits de commerce ingaux, qui brisent les monopoles locaux.Si lon dpasse le cas de la France, lensemble du monde musulman, qui prend aussi en compte lIran, est intgr de deux faons. La priphrisation, avec un remodelage et une spcialisation de la production qui se fait pour satisfaire les besoins europens. Les flux financiers, cad des injections de capitaux pour financer des grands projets dquipement, et pour mettre certains de ces pays dans une situation de vulnrabilit financire.Cela renvoie ce problme rcurrent de la dette, qui nest pas si diffrent de question que lon se pose aujourdhui, avec les conditions fixes par les grandes organisations financires internationales.Enfin, la situation de lAsie est assez diffrente: on a un niveau de dveloppement conomique comparable au niveau europen. On peut identifier des exceptions: certaines rgions asiatiques seront colonises, et deviendront des priphries. Par exemple, lInde, sous domination britannique partir du 19e sicle, les Pays Bas colonisent lIndonsie, lEspagne colonise les Philippines.Pour le reste de lAsie, comme la Chine, la Birmanie, etc, ces pays ont une phase de prosprit qui se fait totalement hors de lconomie-monde europenne. La situation change un peu au 19e sicle: lEurope est en qute de nouveaux marchs, et essaye de les conqurir avec des rapports de force militaires, qui jouent en sa faveur. Cela consistera faire des expditions militaires pour ouvrir au commerce extrieur, et pour utiliser la force pour conclure des traits commerciaux illgaux, trs favorables aux conomies europennes.Cela correspond une situation assez inverse avec celle daujourdhui, concernant le cours de la monnaie chinoise, qui est trs faible, et rend les produits chinois trs comptitifs. Ces traits ingaux seront souvent suivis dannexions territoriales: lIndochine pour la France. On voit cette priode comment sont imbriqus une dynamique daugmentation des changes, et des rapports de force entre les puissances europennes ou dautres Etats.Conclusion.Il y a beaucoup de ressemblances entre la premire mondialisation et la seconde mondialisation. Par exemple, le facteur technologique comme ressort de ces deux mondialisations est trs important et essentiel. Cette mise en march mondial, les flux de population et de capitaux, sont galement des lments de ressemblance.Il y a cependant des diffrences. Cependant, les changes sont trs nombreux en capitaux cette poque, la finance internationale nest pas du tout contrle, rglemente, et les flux de populations sont galement plus importants pendant la premire mondialisation.Une diffrence est trs importante, et pointe par Suzanne Berger: lide que lon a une fragmentation des systmes de production, ce qui ntait pas le cas au moment de la premire mondialisation. Le systme de production est aujourdhui fragment en une multitude de squences, avec une multiplicit de sous-traitants. Une telle segmentation nest pas observe dans la premire mondialisation, mais plutt une priprisation.Une question est dbattue par les historiens sur cette priode: le rle de lEtat. Ya-t-il une primaut de lconomique sur le politique? Lorsque lon regarde les travaux conomiques sur cette priode, on se rend compte que la domination de lconomique sur le politique nest pas sre, et que lon a trs souvent des accords entre firmes. On observe plutt des jeux dinfluence rciproques entre la sphre politique et la sphre conomique.Par exemple, au Royaume-Uni, lEtat est un peu sous pression, et est alors encourag intensifier sa politique coloniale pour trouver des dbouchs. Il y a eu par exemple labolition des corn-laws, qui taient des lois protectionnistes pour les craliers. Il faut alors trouver des dbouchs pour les capitaux. Il y a alors un deal entre lEtat britannique et le monde conomique. LEtat a une vision trs mercantiliste, cad dans laquelle il choisit dinclure lconomie comme un prolongement de son pouvoir.Pour pouvoir conserver le contrle sur lempire colonial, lEtat se soucie du placement des capitaux nationaux. Les deux sont donc imbriqus.Chapitre 3Acclration de la mondialisation et nouvel ordre mondial.Repres en quelques grands ouvrages.

1. La fin de lhistoire? La dmocratie librale comme point final ou le choc des civilisations.La dynamique de globalisation du monde correspond-elle la fin de lhistoire? Comment arrive-t-on un nouvel ordre mondial avec la chute du mur de Berlin, la fin de la guerre froide?La squence des annes 1990 est intressante: le monde a bascul, le mur de Berlin est tomb, ainsi que lURSS. Il faut alors trouver comment caractriser ce monde. Cette squence se termine alors par les attentats du 11 septembre. Cette phase est donc trs dense en termes dlments majeurs.1. Fin dun monde bipolaire et fin de lhistoire (Francis Fukuyama). La dmocratie librale comme point final de lvolution idologique de lhumanit.Francis Fukuyama affirmera, tout dabord dans un court article, puis dans un livre, que la dmocratie librale pourrait bien constituer le point final de lvolution idologique de lhumanit, et la forme finale de tout gouvernement humain.Cela ne signifie pas que dans certaines dmocraties stables, il ny aurait pas dinjustice ni de problmes sociaux: il propose lide que ces problmes viennent de ce que lon a ralis de faon incomplte, cad les principes dmocratiques. Il ny a pas eu de ralisation complte des principes de la dmocratie, de libert et dgalit. Dans lidal, la dmocratie librale est un aboutissement.Cest lide que dans les principes, le point daboutissement est ce modle de la dmocratie librale. Avec la fin de la guerre froide, on a alors seulement ce modle. Louvrage et le contexte de sa rception.On dfinit cette thse de faon simple et on essaye de la comprendre. On comprend lcho qua pu avoir cette thse seulement en la replaant dans son contexte.A lt 1989, on se trouve encore dans le monde de la guerre froide. Ce politologue publie alors, dans une revue intellectuelle de la droite conservatrice amricaine, un article de 15 pages, La fin de lhistoire. Le titre de larticle a alors un point dinterrogation. Le mur de Berlin nest alors pas encore tomb, et de nombreux spcialistes considrent que la fin du communisme est impossible long terme.Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin tombe, et il y a alors un enchainement de circonstances, avec une radicalisation du rgime chinois, des revendications dans certains rgimes communistes, des transitions dmocratiques en Amrique du Sud mais aussi en Europe de lest.Dans une trs courte priode, toute cette dynamique senclenche, alors que le monde tait stable pendant longtemps. La thse de Fukuyama sera alors accueillie favorablement, car tous ces vnements lui donnent du crdit. Cela marquerait lentre dans ce nouvel ordre mondial.On aurait alors lextension de la dmocratie librale lensemble de la plante, avec la fin des deux blocs. En 1992, il dveloppe alors sa thse dans un ouvrage de 500 pages, sans point dinterrogation la fin de sa thse. Perspectives critiques: la fin des vnements? La fin de laction politique?Cette thse a tout dabord t critique avec lide que la fin de lhistoire voulait en quelque sorte dire la fin des vnements, ce qui ne voudrait rien dire. Cette critique prend alors la notion de fin de lhistoire au pied de la lettre. Il ne pourrait alors plus se passer dvnements importants autres que ceux qui mnent au progrs social et politique? Cette critique renvoie alors plutt au titre.Un second dbat est plus intressant: il pose la question de la valeur absolue, voire de supriorit intrinsque accorde la modernit occidentale. Ces valeurs, qui renvoient la centralit et la dmocratie librale, la scularisation, lindividualit, sont prsentes comme parfaites, indpassables. Ne serait-ce pas plutt une modernit parmi dautres modernits possibles?Une troisime critique a t faite par les no-conservateurs amricains et consiste dire que ce livre suggre trop que cest la fin de la politique de la puissance: cest ce qui fera dire Robert Khagan quavec le 11 septembre, la politique internationale est revenue la normale. La priode entre la chute du mur de Berlin et le 11 septembre serait alors plutt une parenthse historique.Plus globalement, le problme de cette thse de la fin de lhistoire est quelle met lcart laction publique. Ce qui a surtout dintressant dans ce livre est de voir comment cette thse a merg, et comment a-t-elle t reue dans les annes 1990.1. Le 11 septembre et le choc des civilisations (Samuel Huntington).Samuel Huntington est un professeur de Harvard, qui a crit beaucoup de choses sur lordre international. Il rflchit lordre mondial post-guerre froide.

Vers laffrontement gnralis entre civilisations plutt que vers la fin de lhistoire.Il cherche comprendre quelles ont t les logiques daffrontement successives au niveau international dans lhistoire: guerres entre nations, guerres didologie.Maintenant que la guerre froide est finie, quels sont les clivages contemporains? Quest-ce qui gnrera des conflits dans le monde post-guerre froide?Sa rponse est que les conflits majeurs auxquels on assiste sont avant tout des conflits identitaires. Dune certaine faon, les conflits entre nations taient dj identitaires, mais lchelle tait lEtat: ce que Huntington dfinit comme conflits identitaires sexprime plutt lchelle des civilisations. Une civilisation est une entit beaucoup plus englobante que la nation, ce sont des aires culturelles.Pour lui, cest entre ces entits didentification quon trouvera les clivages dans le monde post guerre froide. Pour lui, le principal marqueur civilisationnel est la religion dominante dune rgion donne.Il recherche notamment contredire Fukuyama et son ouvrage La fin de lhistoire. Il pense que cette thorie est trs idaliste, et que le monde ne va pas du tout vers lexpansion de la dmocratie librale. On va plutt vers un affrontement gnralis entre civilisations. Selon lui, on entre dans une nouvelle phase, et les conflits les plus importants nauront pas pour origine lidologie, lconomie: les conflits verront saffronter des groupes qui ont des civilisations diffrentes. Cet affrontement dominera alors la politique mondiale.Lapproche raliste des relations internationales part de lide que la scne internationale est le chaos, lanarchie. Les seuls acteurs permettant de mettre de lordre sont alors les Etats. Se passe alors sur la scne internationale des arrangements entre Etats, des accords. Les noralistes disent alors que lordre international vient de la coopration entre les Etats.Huntington est raliste, mais ne part plus des Etats, mais des civilisations: il change lunit danalyse, et transpose cette vision du monde au niveau des civilisations. Il dcoupe le monde en grandes plaques, et ces plaques sont alors les civilisations: les civilisations occidentale, latino-amricaine, africaine, islamique, chinoise, japonaise, hindoue, orthodoxe, et bouddhiste. Il ne nie pas quil puisse y avoir des conflits entre les pays, ou entre des groupes qui appartiennent une mme civilisation. Mais le principe de sa thse est de dire que les conflits, qui seront les plus importants et auront un potentiel de dstabilisation majeure des relations internationale, opposeront des Etats ou des groupes qui appartiennent deux aires civilisationnelles.Ltape suivante de son raisonnement est que son approche consiste aussi dplorer le dclin du monde occidental, et identifier des civilisations dangereuses. Pour lui, ces civilisations sont les civilisations chinoise et islamique. La civilisation chinoise devient en effet le plus grand rival de loccident sur le plan conomique. La civilisation islamique est caractrise par un trs grand essor dmographique, et par un bellicisme dmographique. Ce serait une civilisation par dfinition proslyte, cad qui souhaite faire adopter par les autres sa religion.A lintrieur de cette civilisation, il ny a pas dEtat phare, dominant (dans la civilisation Occidentale, il considre que cest les Etats Unis) qui pourrait stabiliser.Pour lui, lislam est une religion du glaive, qui contient un potentiel de violence tout fait spcifique. Louvrage et le contexte de sa rception (11 septembre 2001).Au dbut des annes 1990, cest la premire fois quil parle du choc des civilisations, donc assez tt. Il publie alors un ouvrage quelques annes plus tard. Cet ouvrage est dj dbattu, plutt dun point de vue scientifique, avant le 11 septembre. Il devient alors un paradigme gopolitique.Le 11 septembre 2001 ont alors lieu les attentats: il deviendra alors un paradigme scientifique, mais il y aura aussi une irruption de la notion du choc des civilisations dans le dbat public.Ces thses sont alors reprises par le courant noconservateur, et serviront de grille de lecture du monde. Beaucoup de gens font alors un lien direct entre la guerre globale des Etats Unis et la thse de Huntington.Au lendemain du 11 septembre, il y a une demande fantastique de cet ouvrage. Robert Khagan dit alors de nombreuses reprises que louvrage est une des meilleures analyses du monde moderne, et tient mme Huntington pour prophte. Perspectives critiques: sur la civilisation, sur la dynamique conomique et politique.La vision du monde que propose Huntington a t trs critique.Tout dabord, cest une vision du monde qui laisse de ct toute une srie daspects de la mondialisation qui ne vont pas dans son sens. Diffrents ouvrages critiques ont t crit sur le choc des civilisations, notamment Limposture du choc des civilisations de Marc Crpon, qui fait un certain nombre de rappels utiles et de critiques. Dans ces identits collectives grande chelle, il ny a aucune raison de considrer quelles sont exclusives, ni de considrer quelles sont ultimes et indpassables. Mme si lon reconnait qutre europen ou occidental est quelque chose dimportant, cela ne veut pas cependant dire que ces identits sont conflictuelles voire meurtrires. Cette identit nest donc pas forcment une identit de combat.Un point est lud par Huntington, et renvoie un certain nombre dinstitutions internationales, qui montre quil existe des constructions internationales, qui renvoient un sentiment de responsabilit. Si lon sintresse par exemple au G20, au protocole de Kyoto, la Cour pnale internationale, on voit que lon a des constructions politiques qui renvoient une logique de coopration internationale, qui transcendent ces conflits identitaires.Autre critique, larticulation trs troite faite dans son approche entre civilisation et religion doit tre remise en cause: elle est non seulement trs caricaturale, mais ne permet pas non plus de comprendre le religieux dans la mondialisation.Ces critiques ont notamment t dveloppes par Olivier Roy, spcialiste de lislam, qui a fortement critiqu le choc des civilisations pour montrer que ce quil y a de trs intressant dans les mouvements religieux aujourdhui, dans le revivalisme religieux, est que cela permet de comprendre le rle des mouvements religieux dans les dynamiques de mondialisation. Il est donc trs caricatural de considrer que les groupes religieuses auraient une base culturelle homogne, et parfaitement positionne au niveau gographique.Par exemple, si lon sintresse la tradition chrtienne anglicane, dont le berceau est la Grande Bretagne, aujourdhui, les plus grands dfenseurs de cette tradition sont au Nigria, en Ouganda, au Kenya. Si lon sintresse aux pays do proviennent le plus grand nombre de missionnaires protestants, aprs les Etats Unis cest alors la Core du Sud.Finalement, le choc des civilisations prtend alors dfinir les civilisations par le facteur religieux, alors que ce facteur, qui est trs intressant tudier dans la mondialisation et dans les enjeux politiques contemporains, ne peut pas tre expliqu par le choc des civilisations. En effet, aujourdhui, ce facteur nest pas lexpression de facteurs identitaires traditionnels, mais est aussi une consquence de la mondialisation: il y a un rle du religieux dans la mondialisation, mais aussi une mondialisation du religieux, avec une circulation des problmatiques. Les identits sont donc au contraire multiples et enchevtres.Il y a un second type de critiques, par rapport la faon dont louvrage a t reu et ce quoi il a servi: dans une certaine mesure, il est devenu une prophtie autoralisatrice. Il ne donne pas seulement des cadres imparfaits, voir faux pour comprendre le monde, mais peut aussi donner lieu des comportements qui faonnent le monde en retour. Reconnaitre que Huntington est comme un prophte ne serait pas faonner le monde selon cet ouvrage?Ce qui est intressant nest donc pas forcment la thse en elle-mme, mais plutt le contexte dans lequel cet ouvrage a t reu, la faon dont il est devenu un paradigme pour comprendre le 11 septembre, et pour le rle quil a jou dans ce contexte.1. La fin de lEtat? La globalisation de lconomie et le retrait de lEtat.Dans ce dbat sur la mondialisation dans les annes 2000, on retrouve la question de la fin de lEtat. Cette question est pose pas tant du point de vue des relations internationales, mais plutt pour comprendre la nature de la mondialisation. Il y a lide que lon assisterait aujourdhui un dclin, un retrait de lEtat.Cest lide de la globalisation de lconomie et de la finance, lide que lon a des organisations de plus en plus puissantes au niveau rgional ou international, comme lUE, et de plus en plus de dlgation de pouvoir au niveau national (dcentralisation, etc). Cela serait alors des facteurs du retrait de lEtat par rapport aux dcennies prcdentes: lintervention de lEtat aurait atteint un pic, son apoge, et lEtat serait alors en retrait du fait de la globalisation.Ce point de vue peut tre discut, partir de travaux sociologiques. Lorsque lon rflchit lide de la fin de lEtat, on ne sintresse pas des ouvrages aussi dbattus que les prcdents. Les ouvrages sont trs nombreux sur cette thmatique.1. La globalisation conomique et lEtat en retrait (Susan Strange).Susan Strange refuse dentrer dans un certain nombre de dbats sur la globalisation. Elle ne sintresse pas aux hamburgers, mais des catgories de rflexion fondamentales de la science politique: le pouvoir et lEtat. Il faut alors faire attention lide dinterdpendance, qui supposerait que lon ait des acteurs gaux. On aurait plutt des rapports de pouvoirs. Son approche est beaucoup plus critique et consiste revenir aux catgories de pense fondamentales de la science politique. Linversion du rapport de pouvoir Etats-Marchs.Sur la question du rapport de pouvoir Etat-march, Susan Strange se situe dans le champ des relations internationales, et propose une approche plus originale (aujourdhui rpandue): une perspective dconomie politique internationale. Cette approche fait alors le lien entre lconomie et le politique au niveau international.Pour comprendre les enjeux internationaux, elle se pose alors la question du pouvoir: quel type de ressources, de pouvoir a chacun, et qui obtient quoi lissue de cela? Quelles sont les structures basiques de pouvoir dans le jeu international?Elle dfinit alors quatre structures basiques de pouvoir, et mesure quel est le pouvoir relatif de lEtat et du march pour chaque type de pouvoir. Celui qui a du pouvoir est en mesure de faire quatre choses. tre en position doffrir la scurit, ou de la menacer. tre en position de proposer du crdit. = finance tre en position de contrler laccs linformation et la connaissance. Avoir le pouvoir de dcider ce qui est produit, par qui, o, et dans quelles conditions.Strange observe alors que pour chacun de ces points, lautorit politique de lEtat est en retrait dans la globalisation. Elle reste cependant la plus importante pour la premire structure de pouvoir, cad offrir la scurit (dfinition wbrienne de lEtat), mais reste concurrence sur ce point. Pour les trois autres, les Etats sont non seulement concurrencs, mais aussi trs largement dpasss par les marchs. Concernant la finance, il y a une place dominante des marchs de capitaux internationaux. Pour la connaissance et la production, cela fait trs longtemps que les Etats ont perdu le contrle sur la production des biens et des services: ces processus dpassent largement les frontires. Les Etats ont galement perdu le contrle sur la cration, le stockage, et la conservation de linformation. En effet, une recherche considrable est effectue par des acteurs privs, et avec les nouvelles technologies, un contrle est de plus en plus fait par des acteurs privs.Cela ne signifie pas que ces processus ne sont pas politiques: dire quil y a un retrait de lEtat signifie au contraire quavec la globalisation actuelle, le registre politique nest pas lapanage des Etats.Ce qui est politique ne renvoie alors pas qu laction des Etats. En effet, si lon sintresse au rle des marchs, cela renvoie alors des activits politiques, qui concernent la fabrication des rgles, la rgulation. Un grand nombre dacteurs participent alors ces activits politiques et ne sont pas des acteurs tatiques.Si lon sintresse aux firmes multinationales ou aux acteurs en marge de la lgalit par exemple les mafias, qui produisent des rgles, ce sont des organisations trs structures. Concernant la mafia, ces organisations sont globalises avec des rgles mondiales produites.La politique internationale est alors quelque chose de beaucoup plus large que ce que font les hommes politiques sur la scne internationale. Ce pouvoir politique est alors exerc par des gouvernements, mais galement, et de plus en plus, par des autorits tatiques. A lide dune fin de lEtat, elle rpond donc quil sagit plutt dun retrait de lEtat, et prcise que fin de lEtat ne signifie pas forcment fin du politique, mais reconstruction du politique, avec un rle important de certains acteurs tatiques dans la politique internationale.Cette approche a donc le mrite de construire un modle. Mais on pourrait alors se dire que cette approche surestime les organisations non tatiques. Une observation paradoxale: intervention croissante de lEtat dans la vie quotidienne, et mobilisation en faveur de la cration et la reconnaissance de lEtat.Cette approche est cependant paradoxale: Susan Strange note bien que lon a une pntration croissante de lEtat jusque dans la vie quotidienne, lEtat produit des rgles et intervient dans la socit dans peu prs tous les domaines, malgr ce retrait de lEtat. LEtat rgule tous les domaines de la socit. LEtat na galement jamais extrait autant de ressources de la socit: la dpense publique reprsente presque 50% de la richesse nationale.On peut alors rappeler que la question nest pas celle de la quantit dEtats, qui reste trs importante, et est plus importante quelle ne la jamais t. La question que pose Susan Strange est alors celle de la qualit de lintervention de lEtat sur la scne internationale, et sa capacit rguler ce qui se pose au niveau international. Cest alors l quil y a un retrait. LEtat na pas perdu la main au niveau domestique. Dans sa capacit rguler au niveau international, lEtat est alors en retrait.De plus, aujourdhui, un grand nombre de revendications politiques portes au niveau international ont pour objet la cration dun Etat. LEtat nest donc pas concurrenc comme mode dorganisation politique.1. Perspectives sociologiques sur la globalisation et lEtat.On peut ici mentionner deux auteurs, selon lesquels non seulement la globalisation nentraine pas le dclin de lauteur, mais au contraire lEtat contemporain est profondment transform par la globalisation, et tellement profondment transform que lon peut considrer que lEtat tel quil existe aujourdhui est le produit de la globalisation. Il sagit alors de voir ce que la mondialisation fait lEtat.Ces deux auteurs rpondent alors distinctement la question de la fin de lEtat.JF Bayart lie le processus de transformation de lEtat contemporain, comme un Etat qui serait le produit de la globalisation. Cest donc cette dynamique mondiale, depuis deux sicles, qui a form lEtat. Saskia Sassan sintresse plutt la transformation et la dnationalisation de lEtat. Le gouvernement du monde et lEtat comme produit de la globalisation (JF Bayart).Dans son ouvrage Le gouvernement du monde, il sattache montrer que la globalisation nest pas le dlitement de lautorit publique, mais cest linterface, entre ce qui se joue entre le local et le global, que lEtat sest form. Cela remonte alors au 19e sicle: il situe lmergence de lEtat contemporain cette priode. Cette priode est alors trs importante. On ne peut alors pas comprendre la formation de lEtat si lon ne comprend pas son rapport au monde: cette formation se joue ds le dbut dans la globalisation. Ce processus est long et dure deux sicles. Pendant cette priode, la formation de lEtat se joue entre le local et le global, en extraversion.Notamment, il sintresse beaucoup au champ historique transatlantique: il essaye notamment de montrer comment le commerce triangulaire des esclaves a structur des choses importantes dans la formation des Etats.Il fait alors diffrentes analyses de cas, et propose de regarder le cas des Etats Unis, qui est particulirement intressant: lorsque lon parle de dclin de lEtat, on ne pense pas aux Etats Unis, du moins sur la scne internationale. Il raconte alors lhistoire de la formation de lEtat amricain, en montrant que cette formation est trs imbrique avec la vie politique internationale de cette poque.Une priode a donc t le pivot de la formation de lEtat amricain: la guerre de scession. Cest lissue de ce conflit que lon peut parler dune unit de lEtat amricain. Il essaye alors de montrer en quoi le conflit a en grande partie pour cause et pour enjeu linsertion une confdration dans lconomie transatlantique. La question du libre-change est trs importante. La question de lesclavage est galement fondamentale. Se pose notamment alors toute la question de ltendue de lesclavage.Sur ces deux problmatiques majeures, on voit que la formation de lEtat amricain obit une logique dextraversion, cad tourn vers lextrieur. Son argument est alors que cette logique dextraversion nest pas lexception: cette logique est au contraire la rgle dans la formation de lEtat, cest quelque chose dassez constant.Des ides quil dveloppe ne sont pas si nouvelles: par exemple, lide des frontires, reconnues par les autres Etats sur la scne internationale. La formation de lEtat se joue donc ces frontires.De la mme faon, les diaspora, communauts de nationaux vivant ltranger, renforceront les Etats dont elles sont issues. La souverainet des Etats, et la consolidation de ces Etats souverains, procdent donc des relations internationales: ces Etats sont insrs, reconnus par leurs pairs, ce qui limite leurs prrogatives respectives sur la scne internationale.JF Bayard tire alors cette ide jusquau bout: on est toujours dans ce processus dextraversion dans la construction de lEtat, et lEtat est un produit de ce processus de globalisation. La globalisation actuelle, lessor du transnational renforce alors les Etats, au lieu dannoncer leur fin.Il insiste par exemple beaucoup sur les organisations internationales, en disant que lon met souvent ces arguments en avant pour expliquer un dclin de lEtat. Pour lui, au contraire, il ny a pas dinstitution supranationale sans Etat, et lexistence de ces institutions est alors plutt un indice qui montre que l'Etat se renforce avec la globalisation. Il dit la mme chose propos du dveloppement de la socit civile internationale: des acteurs non tatiques ont fait irruption sur la scne internationale, par exemple des ONG. Si lon essaye de synthtiser les revendications de ces ONG, on voit alors quelles demandent une intervention de lEtat.JF Bayard sintresse aussi des rseaux criminels transnationaux: il considre que ces rseaux ont bien souvent particip la formation des Etats, au lieu daller contre ces Etats. Par exemple, au 19e sicle, la Grande Bretagne sest attribue le march chinois de lopium, et sera est alors trs important dans la formation de lEtat en Asie.Enfin, il construit son argumentation autour dune notion wbrienne: la dcharge, qui est une procdure par laquelle lEtat peut dlguer une fonction, non pas une organisation supranationale, mais un organe priv. Cela renvoie la privatisation de lEtat. Peut-on alors vraiment parler de dclin de lEtat, lorsque lon assiste cette dcharge? Par exemple, lorsque lon prend lavion aujourdhui, on est contrl par toutes sortes dacteurs, qui ne sont pas des agents de lEtat, mais travaillent pour des socits de scurit prives. Pourtant, la scurit est par essence une fonction rgalienne.Cela ne sinscrit-il pas plutt dans une dynamique de contrle de lEtat sur les flux internationaux, dans un contexte o lon a de plus en plus dchanges? On conoit bien quil ne sagit pas ici dun dclin de lEtat, dans cette dlgation de la scurit. Cela peut mme signifier un renforcement de lEtat. Cela renvoie cependant un changement dans lEtat. Cest galement le cas dans certaines oprations militaires internationales: par exemple, suite lintervention amricaine en Irak, dans certaines situations, des socits prives ont pris le relais de larme amricaine. Mais cela ne signifie pas un dclin de lEtat amricain sur le territoire amricain.Dcharge ne signifie d


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