Soleil Noir_1

5/9/2018 Soleil Noir_1 - slidepdf.com

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J 10

UIN Fno 1



La revue SoleH Nair est Ie

bulletin de I'essoctation BaronNoir. Vous pouvez vous y abon-ner pour 4 nurnarns par an au

prix de 4 0 F r a l'ordre de:

Baron Noir

BP527 ParisDenfert-Rochereau

75"666" Par-is cedex 14

Baron Nair diffuse egalement

les ouvrages suivarrts:

P'tit Punk 30F r (port compris)

Viva la I'evoIution 1 . s F r (pc)

Directeur de publicationLYMPHAM'.-F.

TrimestrielN°1Juin 1990

Depot legal a parution

formalitns en cours

50rnrnare

Page 3: Breves...

Page 4 a 6: Quelle alternative?

Page 6 a 7: Verdun (interview)

Page B a 10: LaMakhnovtchinaPage 11 a 13: Le Pen, sa vie,

son oeuvre (nouvelle).Page 13 a 21: No Exit (Anarchy

Comix)

Page 22 a 23: RomansNoirsPage 24: Bande dessinee

VIVA~:~ LA

~ 0 ! 1 l I D i 1 I I D $NOUYHUS .t IllllJ:lilIAfIONS

C J_ _ ,(lJ. _ ,U

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ya. . . . . . ;. :~ I o o v f I Q

o.;l~a

EncoI'e une revue! Avouez que Ies amateurs nesont pas gates en ce moment: apres un age d'ur

certain, les chases se sont tasseas ... C'ast pour-quni nous esperons. en publiant "Scleil Noir",

contrtbuer a changer cet etat de fait. Pour

qu'une presse !ibre, e'ast-s-dlra liberee des

contingences commer'ciales et Culturelles, vive, il

nous semble que cella-ci doit etre riche en titres.Nous n'aurons pas, dans cette revue, l'hypo-

crrsra de cachar nos convictions, nous nous

referons en effet a une ideologie: l'anarchisme.

Cependant, les sujets trattas concerneront plus

pat-ticullerernant la culture dans laquelle nous retbeaucoup d'entre vaus sans doute) baignons: celui

du bouillon de culture underground. Que ce soitcelui du rock, de la BD, de la SF, du roman nair,du graphisme... ee qui ne nous empechera pas detraiter, sous un angle different, des sujets histo-riques ou avant trait a l'actuelite ... Une culturesouterraine existe tant bien que mal au milieu dushow-buisness et des marchands; nous voulons ladefendre, la developper, la cnrrrnuniquer',la parta-

gel' et I'echanger.

Pour cela, nous refusons d'employer unequalconque "langue-de-bois", sans pour autant

faire de la "vulgarisation" demagogique. En toutcas, ce qui est certain, c'est que nous brQlerons

les idoles... dans les flammes noires du solei! qui

donne son nom a cette revue.Au fait, pnurquol "solail Nair"? Le scleil nair

est la face negative d'un snlail a lumiere blanche,

symbule d'uns verite intangible et dune religiosite

inhumaine. La lurniere noire, eclairant la realitesous des angles differents, changeants, ne peut

Eltre alnrs que profondement humaine:.--



Est-co bien r-aisonnabla N°7

ECBR N°7 devrait paraitre

avec au sommaire une interview

de O. Daeninckx (avec une

nouvelle), une inte.view de

Vidal Naquet a propos du

revisionnisme, BO de Tapage

et Chatterton. Sans oubliar un

disque en prime ... (SSOM, BP 22,75660 Paris cedex 14).

On a faim!

Le prochain numar-o devrait

paraitre d'ici peu. Allaz-

v en confiance, ce sera du

tout bon, comme d'habituda ...

(On a faim!, BP 47, 76802 st-Etienne-du-Rouvrav).

La poupee rebelle

La poupae rebelle, un zine

camp let avec un dossier anti-

apartheid, des interview de

groupes (Culture schock,

Die Trettel, Les Gnomes, etc.),

de la BO, des poemes, des

articles de fond sur les Tziga-

nes, Ie mouvement punk en

Italie, etc. A se procurer

imperativement: 15F .. 7F de

port pour 65 pages, C/o MediaSon, 43 avenue A. Le Lay,

29110 Concameau.

Sub-Rock?

Ca Ij est Sub-Rock est

mort! Apres cinq numarns

consacros a la scene under-

ground rock, Ie canard se

vend aux grands trusts disco-

graphiques. Malgre de bons

resultats, Patrice (Ie redactauren chef adjoint), animateur du

label New Wave, est vire. Le

virage commer-cial est pris, Ie

changement devrait avoir lieu

en juillet. Avis aux amateurs!

Jolly Roger·

Un zine qui a de la tr-ipe.

Belle maquette, chouette

couver-tura. articles, inter-

views excellents. p.esence annter- d'une nouvelle Capres

OAF et ECBR, Ie genre est-il

en train de se reveiller?), de

BO, de chroniques diverses:

zines, disouas, cinema, etc.

Un zine qui s'ouvre, un de

plus, pas trnp tot. Les kids

vont pouvoir bienttlt Ie filer 8

leurs parents en remplacement

du Fig-Mag ...

3

Jolly Roger N°4 (8 parattr-e):

interview Bad B.ains, Mano

Negta, VRP, Mega City Four,

EI Rotringo, Kid Pharaon ...

Jolly Roger, Samuel Morin,

8, rue du Plein-air, Le Pf'e-de-

Boyse, 39300 Champagnole.

M25

Une des meilleures revues

underground et meme des

autres consacraa a la littera-

ture, mais aussi au gf'aphisme

et a la photo. Un ensemble

envoutant ou se rnalant reves

et realite, chmniques diver-sea

et ooernes. Pour tout amateur

un peu curieux de nature. adacouvr-ir absolument: ciaRobert Vaf'ley, 36, rue des

Flamons, 42000 Ougree.

Oesseins

Un zine fait pour Ie plaisir

du voyage... Dessins libres

d'Illustr-ateurs generalement

peu cannus. et c'est souvent

dommage: Hakr-o, Chris, Frap-

pet. Lem, Tapage, Tibo, etc.,

etc. le prix de ce zine est

r-idiculament bas: 5F (une

rnisere), autant dire ou'ilserait stupide de s'en priver ...

Atomik

Le zine axplnsif qui tue! Unzine BD au contenu parf'cis

douteux POUt cer-tains, Des

graphismes pomographiques

pauvant choquer, notamment

par leur ambigui"te (machisme?

ou pas machisme? Toujours

est-Il qu'an ne vit pas dans Ie

meilleur des mandes. La violen-

ce, la pornographie et la

mor-t font partie de la .ealile,

et il ne sert a r-ien de se

voile. la face. Ces f'ese.ves

faites, malgf'e encore un

certain amateurisme (notamment

dans la mise en page), Ie

contenu est beaucoup moins

contestable que la major ite des

magazines BO actuels qui

nous presentent hypocritement

du "cui" soft OU, neanmoins,

la femme est reduite Ie plusstrictement a un role d'objet.

Avec Atamik, on a droit a du

hard qui sent Ie souf'ra. Pour-quai pas? A noter la belle

couvar tur-e en cuedr-ichr-ornie.

Atomik N°14, trimestriel,

20F Ie nurnero. L'abonnement:

C/o J.P. De Penesti, 75, rueOu Rocher, 75008 Paris.

Le Lezard

Ce fanzine associatif estsans doute I'un des plus beaux

actuellement sur Ie rnarcha.

Au sommair-e du neuxierne

numarn: une interview de

Nicollet (avec de superbes

dessins en quadrichmmie!),

des BO de Pavesi, Sternis,

lewis Trundhelrn et Cavial,

et deux nouvelles. Le tout POUf'

15F. Le Lezaf'd, 54, rue Ounois,

75013 Pa.is.

Violences (Tapage 1981,-1986)

Tapage nous avait habitue

au Peutit Keupon, Ie strip

comic, ICI c'est un recueil de

ses BO pour divers zines.

t.'insolratton est rock,

demonttant par la-rnerns I'influ-

ence et la communion de

ces deux genres. Point commun

entre les deux, dans ce cas

precis, la revolte dans sonexpression la plus tendue:

I'anarctue.

Mains drole que Peutit

Keupon, les themes sont plus

graves. Cer-tains diront que

c'est -bien na"if, trop militant ...

Pourtant, cela reflete un

etat c'esor+t, des sentiments

forts, choses qu'on ne retrouve

plus ou peu dans la SO cornmer-

ciale d' aujourd'hui. A noter Ie

titre, marque en gros et Ie

nom de I'autsur en tout petit,et aussi la forme soupla,

style fanzine, uttlisea POUf'

cet album. Autant d'exemp)es

qui nous demontf'ent qu'on

n'est pas ici dans Ie monde du

"livre-blzness", mais bien dans

celui de l'underqr-ound. au la

foi. la modestie et Ie talent

passent avant taute autr-e

chose, et natamment Ie narcis-

sime habituel de l'ar-tista.



?•

4

Q U E L L E A L T E R N A T IV E

OEPUIS quelques mois, Iepetit monde de l'alter-

natif est en ebullition.

On parle en effet de

recuperation du mouve-

ment. Certains groupes

se seraient vendus aux

grands trusts discographiques,

en l'occurence a Virgin. Cer-

tains labels se seraient cor-

r ornous en vendant presque de

la soupe (!) ~t en trahissant

plus au mains leurs ideaux

de depart. La pnlemique faitrage, "sus aux traitres", cla-

ment les uns. d'autres inva-

quent Ia clernance ...

II nous a semble utile.

dans ee contexte, d'examiner

globalement Ie prnblerne de

l"'alternative". Le plus simple,

dans un premier temps, etait de

(re)deeouvrir Ie sens ethymolo-

gique du terme, puis de lever

les pans d'un voile histor-ique.

politique et culturel; enfin, de

dresser un bilan (aspects posi-tifs et negatifs), qui, nous

I'esperuns. servira Ie debat

aetuel.

5i nous pasans Ie probleme

ainsi. c'est qu'Il nous semble

que Ie mouvement alternatif

est dans une peri ode ou il se

cherche. Vel'S quoi allons-nous?

nous n'en savons rien... Mais

iI ne s'agit pas d'attendre en

spectateurs passifs. nous

devons Eltre acteurs, afin d'ac-

quarrr la capacita d'agir sur

notre avenir ...

Ne pas etre seulement des

consommateurs de produi ts al-

ternatifs, avec des labels

garantis et deposes. participer

a ce mouvement de f'acon criti-

que en consider-ant que l'e-

change qui en resultera sera

construct if tant d'un point de

vue personnel que collectif.

sociale, une idee "nouvelle"

d'un etat d'esprit positif.

Alternative/alternatif

Alternative (definition du

Larousse): choix entre deux

possibili tes.

Alternatif: qui se repete aintervalles reguliers.

En ce qui concerne la pre-

rmere definition, queUes sontces deux oossibilites dent on

nous parle'? Pour trouver des

elements de reponse, effectu-

ons un zoom arr-iara histor icc-

pnlit.ique ...

Les premieres fois que l'on

s'est mis a employer ce mot

avec des connotations poiit i-

cues, c 'elait dans Ie milieu des

annass 70. en Allemagne. Mai

68, oriva de toute base sociale

solide. n'avait ete qu'un feu de

paille (militantisme borne etsans ideal, syndicalisme refor-

miste de cogeslion).

"exemples" signi ficati fs auxyeux de ceux qui ne sont

pas convaincus par leurs

ideaux ...

Pour en revenir a notre

definition ethymologique de

l'''alternative'', on comprend

donc que Ie "choix entre deux

posaiblites" se dBfinit dans ce

cas en termes de "choix entre

deux societas"!

D'une part la societe de

consommation affiliee directe-

ment a ce que I'on appellel'esprit bourgeois, caracterise

par un individualisme elroit et

En marge d'un radicalisme

qui va devenir forcene (la fa-

meuse "Bande a Baader").

lui aussi coupe de toute base

sociale; une idee "nouvelle"

prend forme: puisque la revolu-

tion soixanta-huttarce a echoue

certains decident de vivre en

marge de la societe de consom-

mation, avec I'idee qu'il vaut

mieux daf'eridre concreternant

sur Ie terrain, pied a pied, les

droits acquis et en acouerir de

nouveaux, plutnt que de pre-

cher une societe paradisiaque

sans cesse repoussee dans

J'avenir. En bref, pratiquer,

experimenter plutnt que de

rever et ne rien faire. au bien

prat.iquer en revant moins.

Ceux qui pensent et agis-

sent ainsi ant peut-etre aussi

Ie diseret espoir d'Eltre des

rnasquin: Ie bonheur pouvant.

dans ce cadre, se resumer aune accumulation de biens.

D'autre part, une societe de

partage. Partage qui touche les

biens et Ie travail. mais qui a

aussi des connotations morales:

partage d'idaes et d'exP8l"ien-

ces, et non pas seulement une

simple "division du travail".

En resume, I'une est basee

sur un profit individuel (nonpartageable), Ie "chacun pour

soi", l'autre sur l'idee de par-

tage et d'entraide ...

L'alternative se developpe

donc a partir des armaas

1975. prenant sa vitesse de

croisiara dans les annaes

80 avec son apogee, notamment

en Allemagne, avec les fameux

"Verts" et leur accession aquelques miettes de pouvoir. En



France, apparait, le rock

alternatif, Ie hard core aux

Etats-Unis et I'anarcho-punk

en Grande-Bretagne. Cepen-

dant, c'est en Allemagne que Ie

concept d'alternative voit sa

realisation la plus large,

c'est-a-dire Iiee a de nombreux

domaines sociaux et economi-

ques, alnrs qu'en Franceet ailleurs I'elternativa reste

Iiee au domaine cultural. et

en particulier (pour ne pas dire

exclusivement) au rock. Pour-

quoi? Ceci est sOrement dLt ades circonstances tres par ticu-

liarns, liees a chaque pays.

L'Allemagne a \lecu Ie nazisme

en son sein, une partie impur-

tante de la jeunesse allemande

ne I'a pas digere et a pris en

haine son passe, ses aines et

I'hypocrisie larvee d'una"histoire" qui ne s'efface pas,

d'ou rupture plus grande entre

deux generations.

La France, tres proche

geographiquement ne pouvait

qU'etre tnuchae par ce mouve-

ment; d'autant plus facilement

que la jeunesse de l'epoque

avait, pour sa plus grande

partie, adhere aux evenements

de Mal 68. Cependant, Ia France

appartenant au camp des

vainqueurs en 1945 et avantor is soin de dissimuler au

d' assimiler discr~tement ses

"collabos", Ie ressentiment est

different. Mai 68, en France

comme ailleurs, reste plus

une explosion socio-culturelle

qu'aconomicue: mouvement

hippie, liberation sexuelle,

liberation de la femme, etc.:

c 'est une re\lolution des

moeurs ...

En Angleterre, He separeedes influences continentales,

un conservatisme traditionnel

apPUl/e par un protestantisme

puritain est de rigueur; les

mmorrtas oppressees (homosex-

uels, pacifistes, ecolos, etc.)

sont tres combattantes. Ce

sont elles qui prendront Ie

relais a la faveur du mouve-

ment punk de 1977 et constitu-

eront Ie contingent de I'anar-

chopunk.

Politiquement, Ie mouvementalternatif repose sur des slo-

gans. Si ceux-ci sont souvent

d'obsdience libertaire (ecolo-

gie, feminisme. ant.icler-icalisme.

antimilitarisme, etc), avec refe-

rence au A cercls qui pullule

sur les blousons et les fan-

zines, les prmcices qui ont

inspire cas slogans sont Ie

plus souvent ignores. En fait Ie

mouvement fonctionne sur une

5

,

revolte primaire , au coup par

coup, sans qu'une reflexion

globale (revolutionnaire) soit

reellement envisaqae. Quelques

leaders, vieux routiers de la

"dialectique", du "materialisme".

etc.. se chargent de distiller

des mots d'ordres aussi demago

que contradictoires pour

les non-Init.ias. C'est ainsi que

sa eras un complexe de l'igno-rant face a ceLui qui sait,

ce qui conduit a reproduire au

sein meme du mouvement les

schemes autoritaires de La

societe a laquelle celui-ci

pretend s'opposer.

Bilan

On est en 1990 et, quoi

qu'on puisse en dire, il semble

que Ie mouvement flechisse.Apres un age d'or situe chro-

nologiquement vel'S 86-87. Cela

ne veut pas dire pour autant

que quelque chose de nouveau

ne va pas en sortir, effondre-

ment ou rebondissement? En

fait, a notre avis, ce sur quoi

bute actuellement Ie mouvement

etait present des Ie debut.

Ainsi, en Allemagne, Ie

mouvement est aile aussi

loin que faire ce peut; et

nombre de realisations sent

d'ailleurs fort positives: il y a

des creches alternatives, des

villages et des quartiers

alternatifs, et meme (plus dis-

cutable) des banques alterna-

tives {n . Pourtant. Ie fait que

les Verts siegent au Parlement

n'a dans la pratique riende posit if'. Le mouvement

semble rnerne toucher ses

limites et tourner a vide dapuis

qualque temps: les Republika-

ners (extreme droite allemande)

gagnent du terrain, la droite

chretienne egalement, et

gageons que la reunification

sera un facteur de plus d'af-

faiblissement.

En France et ailleurs,

Le radicalisme s'effrite a force

d'impasses: les slogans s'apui-sent tout seu1s puisqua la

plupart des elements du mouve-

ment sont incapables de reac-

tualiser des slogans dont

Us ignorent souvent les princi-

pas.c. De nouveaux groupes

prennent Ie train en marche

et, devant l'absence de pers-

pectives, sont plus ou mains

obliges de fa ire des conces-

sions ...

Quelques causes

de cet etat de fait

Une revolte culturelle ayant

pour base Quelques slogans ne

peut durer eternellement sans

une reflexion plus approfondie

sur la nature de calia-ci. 5i ce

sent seulement quelques per-

sannes qui oossedent les

fruits de cette reflex ion et si

'Ies autres se contentent de

suivre betement, tout Ie mou-vement est ccndamna a breve

echeance, so it a reproduire les

schemes existants (hierar-cru-

cues) soit a crever. Une r avnl-te soontanea et ponctuelle

brule vite et s'ataind, si elle

ne s'enrichit pas des experi-

ences de chacun.

Mais Ie pr-obleme ne date pas

d'aujourd'hui. Deja, au X1Xe

siacle , sur des bases economi-

ques, un tr-as fort mouvement

de cooperatives mutualistesavait vu Ie jour (plusieurs

milliers en quelques annaas) en

reaction a la societe bourgeoi-

se' a laquelle eux-aussi ils

opposaient "autre chose".

Quinze ans plus tard, il n'en

restait presque plus rien. Plus

pres de nous dans la temps, Ie

grand mouvement

d'apres-guerre a

mutualiste

5urvecu et



est encore tres largement im-

planta, mais a quel prix! Puis-

que ces mutuellss ne sont

devenues pour Ia plupart,en

l'absence de controla exerce

par la base, ni plus ni moins

que de veritebles socletas

capitalistes, ce contre quoi

elles s'etaient erigees au

debut...

Aussi, to utes proportions

gardees, il ne serait pas eton-

nant que Ie mouvement alterna-

tif suive la merna voie s'Ilcommet les memes erreurs

(cf. la definition du Larousse:

"mouvement qui se repete ...'').

Un mouvement aussi diversi-

fie et riche que l'a ete Ie

mouvement alternatif risque,

s'I! ne resoud pas ses probla-

mes, de n'etre en fin de compte

cu'a I'origine de l'emergence dequelques produits nouveaux ...r

qui lui seront cnnf'lsques par

les trusts discographiques

contre lesquels it entendait

lutter.

Le radicalisme (ou ce qu'il

en reste) aff'icha par le mouve-

ment alternatif a peu de

chances de suffire si une

reflexion approfondie sur son

demi-succas (ou demi-echec!)

n'a pas lieu.

En France, par exemple, Iemouvement ne dolt-it pas

s'ouvrir a d'autres arts, ad'autres terrains que celui de

la culture? Des tentatives dans

ce sens existent et doivent

etre prolongees (ch6meurs,

precaires, logement/squatt,

etc.) sans demagogie fausse-

ment radicale. A l'heure ou

un large pan du mur communiste

autoritaire semble s'ef'f'ondr-er:

a I'heura ou Ie capitalisme

liberal se montre sous son vraijour (nouveaux pauvres, exploi-

tation accrue des salaries,

chomage chronique voulu, etc.),

il existe une attente d'''autre

chose", et Ie mouvement alter-

natif se doit de proposer autre

chose ... Or, iln'v a pas a notre

connaissance d'autre f'acon

de se debarrasser des tendan-

ces autoritaires (Iibarales ou

marxistes) que d'utiliser les

or inclpes et les methodes

libertaires (gestion directe,

partage des connaissances,

responsabilisation individuelIe,

etc.). A - priori ideologique?

Possible, nous ne cachons pas

nos oprruons anarchistes, mais

si I'on ne veut pas 'rejoindre Ie

"troupeau", il nous parait

nacessarre de remettre la

societe actuelle en cause

dans tous ces aspects. Or, la

6

radicalita se ramolit rapide-

ment quand eBe ne s'atandpas, on se bat alors en retrait

et l'on en vient a defendre les

"valeurs" hypocrites de la

democratie.

Le mouvement altematif a

ete, dans les anneas 70-BO , Ie

seul a s'opposer avec un

certain succus a la debandademilitante de cette epoque. Oes

jeunes, non formes politique-

ment, se sont retrouves spon-

tanement sur des pratiques

eminemment libertaires: en-

traide, squatt, antiracisme ...

Ce mouvement se trouve

aujourd'hul face a plusieurs

possibilites; 1'integration et/ou

la recuperation, Ie sabordage

et/ou Ie suicide, au determiner

de nouveaux movens d'action.

Mais, pour choisir de nouvellesluttes, il faut savoir ou l'on

veut aller, ce qui irnpliqua un

choix ideologique: on n'arrive

pas a la liberte et a l'egalite

par l'autoritarisme et reu-tisme!

Les gens de pouvoir ant

choisi la leur au mieux de

leurs interets: la sof't-Idaclo-gie. Une ideologie qui pretend

que la societe actuelle (la

social-dernocr-atfn) est la meil-

leure possible; qu'Il y auratoujours des riches, etc.

Pulsqua l'on ne peut pas

choisir ses mal/ens d'actton

sans savoir au l'on veut aller

- sous peine de faire exacte-

ment I'inverse -, sovons rea-

listes, choisissons nos objectifs

0U0n les choisira pour nous ...

J.-F L. et oiT

Verdun est l'un des rares

groupes francais 58 definissant

clairement d'un point de vue

idenlnqique. Jamais fatigues, ils

chantent I'anarchie: "entre nos

B heures hebdomadaires dues

aux esclavagistes et Ie reste,

on transpire!"

Verdun, c'est un groupe, une

experience, des individus, une

volonta et une sincerite: "ondit ce qu'on pense et si caplait pas, on s'en fout".

Ca ne marche pas trop mal

pour' eux (comme quoi it n'est

pas necessaire de prendre Ie

public pour un ramassis de

connards ... ). Le groupe etait

compose (Ie 7 avril 1990) d'Eva

Noule au chant, de Kurt Weimer

a la batterie, de Karl "9000" ala guitare et de Jeg a la

basse ... Verdun collecte actual-

lement Ie ble pour son prochainLP (pour les contacter: Asso

Rocking Rebel, 16, rue des

Flandres, 61200 Argentan,

tel. 33.35.29.06). "Un LP qui va

peter des flammes rouges-

orangees. C'est. un melange de

UK Subs, Dog Nasty, Poison

Idea, pour situer a peu pres.

On fait deliberement dans Ie

violent, mais aussi Ie rnelodiquecar c'est cnmolamantaire.



Quelle est la situation actu-

elle du groupe, et guels sont

vos projets?

Pour Ie moment ca roule et

ca s'arganise de mieux en rnieux

pour naus. Verdun c'est le

noyau central de Rockin'Rebel,

notre asso Qui couvra l'organi-

sation de concerts alternatifs,

une distribution par correspon-dance (disques, K7, videos.tae-

shirts et bient6t badges a des

prix super relax), un label

discoqraohique: "Plastic Doll".

Notre prochain LP, "Arner-ikan

dream", sortira courant sep-

tembre prochain sur Plastic

Doll. of course, et sera accom-

pagne d'une tournae francaise

pour l'occasion. Des que nous

en avons les moyens, nous

tournons une video qui sera un

melange de sequences live etd'interviews du groupe.

On vous dit et vous vous

dites anal'S, qu est-ce que cela

veut dire pour vous?

Qu'on S8 branle avec I'auto-

rite, la hI(karchie soclale,

I'integrisme, I'armaa, las flics,

I'inega!ite sociala, la justice de

classe, Ie travail abrutissant,

I'eglise de Rome et ainsi de

suite ...

Toute cette pretenduecivilisation n'est en fait qu'une

mascarade, tout est bizness,

tout est faux, les cartes sont

trucuaas par les bourgeois qui

veulent tout garder pour eux

et naus faire crever au boulot,

ou dans Ie ruisseau, ouand on

ne leur sert plus. Les part is,

les syndicats sont faux et

n'existent que pour mieux

berner Ie peup!e cu'Ils oppri-

ment, avec I'Etat et la classe

dirigeante a leurs cctas.

Est, Ouest, meme engeance,

meme impasse!

L'anarchie, c'est I'exact

contraire de tout ca et son

heure va bienttlt sonner,

Ie capitalisme, IE! communisme

et IE! fascisme ont affige

I'humarute et failli la faire

crever. Les gens vont vouloir

se sortir de cette merde

sans casse, et ils devront

devenir meilleurs. Les fafs

tentent de les paniquer et un

troupeau affole est pret atoutes les extremites par

trouille et par desespoir. La

derniere f'ois ca a f'ini par

53 millions de morts... II vau-

drait mieux v ,eflechir!

Pensez-vaus que ee qui arrive

au rock alternatif actueltement

(recuperation, volante d'attein-

7

dre un public plus large,

etc.) etait previsible, et

finalement normal? Quelles sont

les ambitions et les limites

d un groupe marginal aujour-

d'hui?

-c'etait previsible vu la lente

degradation des leaders alter-

natifs qui, de replis en conces-

sions, en sont devenus desgroupes rock normaux. Rien

n'est recupere, si ce n'est les

noms et l'image, Ie superficiel

du mouvement. Ce qui est

nouveau se vend, ce devient

done, sous I'impulsion des me-

dias et des majors, une mode.

C'est logique puisque ces

gens etaient exclus d'office,

parce que pourris et startles:

les gens auraient fini par

s'interroger sur Ie pourquai de

cette exclusion des gros dudisque et Ie ehiffre de leurs

ventes aurait pu seI'ieusement

en patir. C'est une gueI're sans

merei entreeux et nous taus.

On aurait pu leur flanquer une

raelee sl on avait fait un

front commun, mais au lieu de

ca iI n'y avait que des indivi-

dualit.as egolstes, une concur-

rence comrner-ciale. Ils antrenie Ie punk pour ,'etiquette

rock francais, ensuite I'alter-

natif pour l'Indapandant.

lis se disent indapendants

parce qu'Ils ne sont pas du

taut certains d'l'?tre signes sur

une grosse boite, c'est la seule

raison. II n'y a plus aucun

desir- de combat derI'iere ca.

II ne reste donc que les

ours et durs Qui, s'ils veulent

survivre, doivent faire quel-

ques concessions a leur tour.Ce qui 'est normal, c'est de

vauloir elargir son audience,

e'est vrai, mais pas a n'importe

quel pr ix! Pas en faisant de la

variete rock pour mieux faire

du fric. La scene fr-ancaisa, aque!quesexceptions pr-es, est

a faire palir de hante face aux

scenes etrangfkes. Son niveau

est volontairement mediocre

(enfin c'est a esperer) pour

plaire meme aux beaufs. Desole

mais dans I'ensemble ca pete

mou! Regardez aux USA! On est

marginal quand Ia majorite vaus

eerase par conneria et intole-

rance imbecile. Si on a une

bonne dist.ribution, une bonne

promo, on touche les gens

chez les libraires, les dis-

quaires, et on peut s'en sortirtres bien. t.es limites sont

celles de La censure capita-

liste. II n'y a pas d'unlt.a, c'est

chacun pour soi et nous l'avons

compris, c'est oourouol nous

fonctionnons de maniere auto-

nome.

Vaus n'avez jamais joue aParis, haut lieu mondain de la

scene rock alternative fran-

~aise. Est-ce un bien, une

volante, une erreur" un

manque de moyens?

Nous avons joue a Ivrv, en

banlieue, rnais c'atait quand

meme mondain et tres svrnoa. Le

seul point negatif etait une

bande de poseurs americanrses

qui jouaient les momies devant

la scene en attendant Kina

pour bouger. Ces mecs suivent

les dix cammandements de la

mode branchee en excluant en

premier lieu les punks qu'Ils

assimilent a des clochards,d'ou certaines frictions dans la

salle ...

Comment parler d'uruta, de

fraternite et de lutte com-

mune quand les gens se rejet-

tent pour une simple raison

d' aoparence? Nous on appelle

cs des cons, sans avoir d'a-priori pour un clan ou un

autre. Si les uns preferent

s'aclater- sur Verdun, d'autr-es

sur Kina ou qui ils veulent,

c'est leur choix, ils sont libresmais qu'Ils s'excluent les

uris las autres, c'est digne du

premier cretin vanu! Un peu de

tolerance s' il vous plait! Caci

dit, on a evit8 les clubs pari-

siens parce qu'ils sent tr es

restr-ictifs. Plusieurs plans ont

foire par manque de salles,

d'ou notre absence dans les

hauts lieu x parisi ens.

le public par-isien a tres

mauvaise reputation, on pre-

tend souvent qu'Il ne sera it

pas toujours tres abjectif.Mais

c'est peut-etre des "on - dit",

at de toute f'acon on viendra

verifier nous-mi"!mes I'automne

prochain. Que vous soyez juifs,

Parisiens, puceaux ou effemines

venez nous gaOter, ca sent la

bi"!te!

Propos recueillis par

L. J.-F. (IE!7 avril 1990)



A H N O V T C H I

8

AConcert d'adieu des Beruriers nOlI'S: des milliers

dE! personnes reprennent en choeur I'hvrnne (quelque

peu tr'af'ique) la Makhnovtchina. Mais peu connaissent

Ie heros de cette chanson, Je cosaque anarchiste

Nestor Makhno. Encor-e mains ceux qui lutt.arent ases cotes pour une Ukraine libert.aire. Cet article se

propose de rappeler leur combat au moment ou les

pays de l'Est se llberaltsent.

ORSQU'ECLATEla revolu-

Ltion russe,. les. partis. p.eli-tiques ne jouent aucun

role. La population pr-and

en main son destin en or-

ganisant de Iibres soviets

(au conseils) d'ouvriers, de

paysans et de soldats. Mais

pour gerer la societe, il se

posa un pr-oblema. Deux solu-

tions etaient possibles: trans-

mettre au pouvoir polit.i que la

revolution en cours au bien

encourager I'auto-organisation

des masses.

Les anarchistes et avec eux

quelques socialistes-r-avolut.ion-

naires (populistes) ont soutenu

cette deuxierna voie. leur

influence grandissait dapuis

qu'rls avaient participe aux

combats contre Ie tsarisrne.

Lenine dirige en 1918 un parti

bolchevique alors en pleindesarroi. II appelle ses mili-

tants a prendre Ie pouvoir

"sinon la vague de l'anarchisme·

presente peut devenir

plus forte que

nous".

ilcolle aux evenements

pour rattraper I'elan populaire.

Aoras la prise du Palais d'Hivar

(siege du gouvernement modere)

en octobre 1917 et la mise aI'ecart du parlementarisme,

I'imposture ne tarde ·pas aeclater. Les bolcheviks confis-

quent la revolution_ lis creent

un nouvel Etat bureaucratique

et policier. Pourtant c'atait un

anarchiste, Jalezniekuv. qui

avait pr-is l'inltietive de chas-

ser les deputes pour

donner Ie

pouvoir

aux soviets. Pour

Lenine, il n'en atait pas ques-

tion!

Les Gardes noirs

A Moscou et dans les

principales villes, les anar-

chistes avaient cree des unites

d'euto-def'anse: les Gardes

noirs. Elles pouvaient tenir en

respect la Tcheka, la police

Apolitique des bolcheviks.

Aussi, en avril 191 B, ceux-ci

lancarent une attaque sur-prise

contre les locaux des Gardes

noir-s. "t,e lendemain, Ie quar-

tier ou les combats avaient

fait rage offrait un aspect ef-

frayant: les coups de canon

avaient transforms les maisons

en demi -ruines, entre les

meubles en pieces et les murs

scr-oules, dans les cours et sur

Ie pave, gisaient partout descadavres. Partout, on pouvait

voir aussi des restes san gIants

de corps humains, U'!tes, bras,

intestins ou oreilles et Ie sang

s'ecoulait dans las caniveaux.

le gouvernement boichevik

avait triomohe" (1). II v eut des

dizaines de morts et des cen-

taines d'arrestations. Devant la

protestation pooulaire. Lenine

et Trotsky durent liberer des

anarchistes rnais les organisa-

tions furent Interuites. Des

lors l'existence du rnouvement

se der-oula dans la clandestlnite

ou en prison.

Nestor Makhno

\ - _ - . ; _

Un seul mouvement gardait

sa libar-ta: celui de Makhno en

Ukraine. Nestor Makhno est ne

en 1889 dans une famille de

pavsans pauvres. II travaille

dans les fermes de son village

(Gouler-Pcle), puis comme ouvri-

er. En 1906, Makhno adhere au

groupe anarchiste local. II

participe a des actions contre

les riches (industriels, gr05

proprietaires) mais Ie groupe

est decouvert et arrete.

Makhno est condarnne a mort



mais refuse de demander sa

grace: "Nous ne pensans pas

demander quai que ce soit a ce

vaurien de tsar ... ces gredins

nous ont condamnes a mort,

qu'Ils nous pendent donc".

Finalement, son jeune age Ie

sauve d'une execution. II moisit

en prison avant d'etre libere

par la revolution. Il devientresponsabte d'un soviet de pay-

sans et d'un syndicat d'ouvrt-

ers. A la tete de villageois, it

pratique I' expropriation des

grands propr-latalras pour don-

ner leurs biens au peuple.

Makhno devient un nouveau

Robin-des-Bois dans I'esorit des

pavsans.

Lorsque Ie gouvernement

bolchevik cede l'Ukraine aux

Allemands et aux Autrichiens,

Makhno doit s'enfuir et se renda Moscou. II If rencontre Lenine

qui lui explique que les enar-

chistes persecutes sont en fait

des bandits. A la fin de l'en-

tretien, Lenine affirme que

Makhno est Ie seul "vrain anar-

chiste! Makhno quitte Ie dicta-

teur inquiet pour I'avenir de la

revolution. II rencontre aussi

des intellectuels anarchistes

dont iI deplore Ie manque

d'energie.

De retour en Ukraine,

Makhno dec ouvre que les

Autrichiens ant tua une partie

de sa famille et brOle sa

maison. Aussit6t, il met sur

pied un groupe de partisans,

combattant sous Ie drapeau

nair. Les partisans portent de

rudes coups a I'ennemi. lis

attaquent toujours par sur-

prise, disparaissant aor-ss grace

a la cornollcita des pal/sans qui

cachent leurs chevaux. Bientotla reputation de Makhno est

telle que de nombreux groupes

se joignent a lui. Mais, jamais

il n'en sera Ie chef. Lui et

to us les officiers de la "Makh-

novtchina" sont etus et revoca-

bles par leurs hommes. Un

veritable esprit libertaire 1/

regne... En novembre 1918,

l'Ukraine est evacuee par les

Austro-Allemands, et Makhno

tient en respect les armees

blanches tsaristes. II peut en-courager les pratioues liber-

taires. Des cnnqres regionaux

de pal/sans et d'Insurqes cnor-

donnent I'activite economique.

Les combattants sont sous

I'etroit contr-cle de la popula-

tion. Les pavsans ne se privent

pas de faire des rarnarques. vcompr-is sur Makhno lui-rnerna.

Celui-ci prefere soutenir les

aspirations des pal/sans plutot

9

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' ' ' ' ' : '1_ tT . <J T~ ;; ~ .

Cane de !'Ukra inc {La makhnovtchma, Hombourger F.).

que de leur imposer une doctri-

ne. "Un anarchisme instinctif

transparalt clairement danstoutes ces intentions de la

pavsannerie laborieuse d'Ukrai-

ne, lesquels expriment une

haine non dissimulee pour toute

autorite etatique, sentiment

accnrnpaqne d'une nette aspira-

tion a s'en Iiber-er-." (2).

L'action de Kovalevitch

Ailleurs en Russie, la situa-

tion s'aggrave. Les bolcheviks

arr-atsnt. torturent ou execu-tent les opposants. Un chemi-

not nornms Kuvalavitch etait

resoonsable syndical a Moscou.

Persecute par Ie regime, it

s'etait refugie en Ukraine.

Lorsqu'il rentre dans la caoi-

tale, crest accompagne d'un

groupe d'ouvriers en armes qui

devient une organisation clan-

destine. Dans leurs tracts, ils

appellent a une nouvelle revo-

lution contre les bolcheviks.

Repondant a la violence par la

violence, its font sauter Iesiege du parti communiste Ie 25

septembre 1919. lis seront tues

par les policiers ou se feront

sauter pour ne pas se rendre.

Apr as cet acte, la repression

s'Intensif'ia. Makhno prenant

trop d'influence en Ukraine,

Ie regime bolchevik decide de

Ie briser. Comment oouvait-Il

tolerer ce projet de declara-

tion des makhnovistes: "Nous

considerons que, dans un

avenir proche, toutes lesclasses travailleuses C .. . )

orccaderont ellas-memes aI'organisation de leur vie

professionnelle, economique,

sociale et culturelle, a partir

de principes libres, sans Ia

tutelle, la pression et la

dictature de quelque person-

nahta, parti ou pouvoir que ce

snit" (3)? Les bok::heviks declen-

chent les hostthtas en arretent



les delegues des soviets.Trotsky aurait declare "qu'il

valait mieux Ilvrer toutel'Ukraine a Denikne (general

tsariste, NOLA)que de donner

la possibilite a la Makhnovtchi-

na de se developper"! La

ttlte de Makhno est mise aprix. L'armse rouge et la gue-

rilla s'affrontent dans une

ve,itabJe guelre. Mais siTrotsky preferait la eire desreactions a Makhno, it allaitlltre servi. Un general tsar-late,

Wrangel, reorganise les arrnaes

blanches et envahit J'Ukraine.

II repousse les bolcheviks.

Lenine prepare meme uneeventuelle evacuation de

Moscou! Les bolcheviks pro-

posent a Makhno une alliance.Celul-ci accepte pour neutra-

liser l'ennemi prioritaire. La

Makhnovtchina ramoorte unevictoire contr-e Wrangel, per-

mettant a l'Arrnae rouge de Ie

vaincre. Immadlatement, Trotskyrompt !_a treve et lance l'of-

fensive contre Makhno. Ses

principaux officiers sontcaptures par surprise et fusil-

las. La population est tarro-

risea. Les unites makhnovistesse battent a un contre cent et

disparaissent peu a peu. Makh-

no raussira a tenir jusqu'en1921. Mais il finit par s'exiler.

II est tellement couvert de

blessures que ses derniershommes l'avacuent sur un

brancard!

Les calomnies

Refugie a Paris, Makhno

devient ouvrier et mene une

vie miserable. II meurt en

1935 ronge par la maladie et

aussi par Ie chagrin. En effet.les services secrets soviatiques

repandirent des calomnies dont

certaines ont eu, helas!, ungrand succas, Ainsi Makhno fut

accuse d'actes anttsamitas, depogroms. Pourtant il etait

facile de prouver que des juifs

avaient occupa de postesimportants dans la Makhnov-

tchina. Makhno protesta dans

plusieurs articles contre ces

calomnies: "Tnute tentative de

pogrom ou de pillage fut chez

10

nous etouffee dans l'oeuf. Ceuxqui se rendirent coupables de

tels actes furent touiours

fusillas sur les lieux memesdeleurs forfaits" (4). Et ilcitait

des exemples precis, ce que ne

faisaient jamais ses accuse-taurs. Malg,e cela la rumeur apersista longtemps, et ce n'est

que recemment qu'eUe a ete

battue en bracha. Du cote desjuifs, on ne croit plus aces

calomnies. Une recente publica-tion, a Jerusalem, basaa sur

l'Encyclapedia Judaica, rehabi-

lite Makhoo (5). En URSSmeme,

la rehabilitation a aussi com-

mence. Dans les revues de

l'Armea rouqe. on fait 1't'210ge

du stratege Makhno alors qu'Il

etait consider-s jusqu'ici comme

un brigand! Memeles historiens

ravisent leur point de vue. La

revue de I'Union des ecrivains

d'URSS, Uteratournaja gazeta,

a realise un important dossiersur Makhno en fevrier 1989.

Certes, Ie cosaque anarchiste y

est cr-it.ique, mais cette fois

comme advarsaire politique et

non comme un bandit antise-

mite. L'aspect Ie plus etonnantde Ia radaccuver-te de Makhno

est son succes aupres des

groupes de rock sovietlcues.

Souvent contestataires, lasmusiciens se servent de son

souvenir pour critiquer Ieregime communiste. Ainsi,

en 1983, Ie groupe DK de

Moscou chantait un texte

lntitule Notre Batko, d'aores Ie

surnom donne a Makhno par ses

hommes: "Petit pere" (Batko en

russe):

"Comment trouver un hommedeve,ite comme Ie Batko / (...)

Ils echarnent Ie but ultime,mais je crache sur Ie malheur /Je ne vois qu'une solution:

rejoins Ie Batko! / Adieu mes

amis je pars! I Je vais auI'ataman chevauche, aerien, sa

monture."

La memoire populaire

Un groupe punk de lenin-

grad, Objet de moquerie, joue

cette chanson en juin 1987:

"Pour mon malheur j'ai ete

atteint d'une balle au cl'lte

droit / A la force de monsabrej'ai regagne rna maison / Le

commissaire a deniche l'arme /

Abattu ma monture et emmenema femme"

Refrain:

"Ei-ol fouille IndacenteDI-da Batko-ataman"

"Tout ensanglante, j'ai cache

mon arme sous ma chemise I

J'ai bondi pour mettre fin a laperquisition"

o•utres groupes pluspclittses, notamment ceux

de Siberie mettent en avant Ie

message des Makhnovistes,

commeces punks de Tioumen:

"Lamemoire populaire a conser-

ve Ie souvenir du heros taci-turne et marginal / (...) Ses

idees lumineuses et jeunesvivent / Son coeur d'or bat ..."

Comme on peut Ie voir, la .

.souvenir du cosaque anarchiste

reste vivant en URSS. Cela

pourrait fort bien faire 18-

naitre l'espoir revolutionnaire

dans ce pays. L'epopee des

Makhnovistes n'a pas fini de

nourrir Ie r~ve de llberte.

V.B.

, - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 1(1) R. Rocker: Les soviets trahis par les boicheviks, Paris, 1973,p.27

(2) Makhno: Le grand Dctobre en Ukraine, in La lutte contre l'Etat

et autres ecrits, Paris, 1984.(3) Cite par A. Skirda, Les cosaques de la Hberte, Paris.- 1989

(4) Makhno: La makhnovtchina et I'antisemitisme, in ouvrage cite

(5) Israel Pocket Library, Anti-Semitism, Keter Books, Jerusalem, 1974



LE PEN"\

Il fallait Ie f'aire. et Vin-

cent Safrat l'a fait. A une

epaque ou la passivite et la

resignation sont chases coutu-

miikes, Vincent Mite Ie livreLe Pen, sa vie, son oeuvre __

(recueil de textes et de des-

sins satiriques). Les intellectu-

els mous prefereraint (et

preferent toujours) la politique

de I'autruche: "t.e Pen, connait

pas". Pourtant, il est bien

present et chaque jour il

grossit. n est dans Ie coeur

de quelques millions de Fran-

cais, et en germe chez queL-

ques millions d'autres, Y en a-

t-il encore pour croire que laFrance sous Vichv n'atait

constttuea que de resistants?

Treve-: de balivernes. Qui

sait ou en sera Le Pen en

I'an 2000? les etrangers ont

ete ejectes; ce sont mainte-

nant les mauvais Francais qui

font les sales boulots... Une

nouvelle de Vincent Safrat

ouvrant son recueil et que

l'on esperen. non prophetigue!

11

SA VIE

Premier janvier 2000. Le

parquet du palais de l'Elysee

est jnncha de bouteilles vides.

les derniers convives ont fini

par s'endormir sur des matelas

de confettis. Sans les chiens

de garde on n'aurait jamais puterminer Ie caviar et Ie foie

gras.

Debout sur un grand lit

couvert de vierges irnmaculaes.Ie president le Pen s'etire ...

- Tout va bien, monsieur Ie

president?

C'etait Leon, Ie concierge.

- Tout va bien, Hmn.

- Je retourne au mirador,

monsieur Ie president, dit Leon

en quittant la salle.

Le president le Pen pensaqu'en cas d'emeute, il saurait

frapper fort, il n'avait pas as'en faire.

IImarcha jusqu'a une fene-

tre et vomit contre un rideau.

Tout Ie monde dormait, on ne

saurait pas' que c'etait lui. nregarda dans Ie parc. Quelques

vigiles faisaient des pornoes.

pour se rechauffer. Un couple

de moineaux passa en piaillant

au-dessus de la pelouse ...

Mon fusil! s'acria Iepresident.

11 I'avait laissa sur Le lit!

Quand il revint a La fenl'ltre

c'atalt trop tard, ils etaient

deja partis! Enfin, il restait du

champagne, et c'atart vrai que

tout allait bien: il etait de

plus en plus riche et si sa

popular ite continuait a baisser,

il prendrait Ie pouvoir definiti-

vement. tout eta it prl'lt pour

ca.

II attrapa une bouteille et

porta un toast: "A mes elec-

teurs!" Ilrenversa son verre en

faisant un bras d'honneur.

SON OEUVRE

II

.Je m'appelle Robert lefe-

vra. Vous pouvez chercher

partout, taus las Arabes sont

partis. Y'an a plus un seul. Et

tous ceux qui ont refuse de

partir, on les a pas refuses au

cimetiere. On est tranquille

maintenant.Pour les remplacer, le gou-

vernement a tire au sort parmi

les chtJmeurs francais.

.J 'ai un copain qu' a pas eu

d'chance, v s'est retrouve au

marteau-piqueur. Neuf heures

par jour y rale, mais on ne

l'entend pas a cause du bruit.

Mai, ca va, j'me suisretrouve aux poubelles. J'me

leve a cinq heures, d'accord,

mais a midi J'ai fini rna jnurnae

et j'suis libre. Le collequa dit

que c'est un boulot cool acause des liquides degueulasses

qui coulant des poubelles. Y dit

ca sans arret. Ca I'f'ait rire.

Mais dans l'ensemb1e c'est passouvent qu'on rigole. II faut

que je m'habitue a mon nouveau

metier.

III

Vel's quatre heures du

matin un type sortit du commis-

sariat en titubant. On lui avait

ecrase l'estomac a coups de

matraque, mais il faut dire que

s'Il n'avait pas oublle de

pJastifier sa carte d'identite

ca ne serait pas arrive. Devantun groupe de poubelles, Il

commenca a vomir- et visa

plutnt mal. 11 s'eloigna dans la

brume en 1aissant les poignees

gluantes.

Un autre homme sortit du

commissariat en titubant.

C'etait l'adjudant Dubois. 1 1

avait passe la nuit a tabasser

un tvpa, et pour avoir la forme

qu'est-ce qu'Il avait pu siffler

comme canettes! II s'arrata et

pissa contre une voiture enstationnement.

Il avait termins son ser-

vice. II tituba en siffLotant. Un

jour peut-E!tre la brurna se

dissiperait-elle. Le president

disait que c'etait La faute de

I'opposition clandestine qui

envoyait des nuages artificiels

sur la ville pour miner Ie moral

du peuple, rnais c'atait quand

mama deouis qu'Il avait fait

construire des cimenteries en

proche banlieue que I'atmos-

phara s'etait tr oublee.

IV

- Vas-v Robert! Soulevel

- Mais c'est quoi la, c'qui

y'a sur les poignees?

- Les salauds, y pourraient

degueuler proprement! Allez

soulave! On n'est pas enavance, regarde, on est seule-

ment devant chez les flics.

.J 'ai souleve et j'ai vide Ja

poubelle dans Ie camion. Main-

tenant mes gants avaient une

sale odeur.

Le collegue a siffle (oarce

que moi j'ai jamais su siffler

fort) et Ie chauffeur a rnule

jusqu'aux poubelles suivantes.

Ici c'est toujours pareil, a

gueule Ie collegue, v'a quinze

poubelles et v'en a dix de

renversees!

On a vide tout c'qu'v



S A V I E , S O N O E U V R Er-astait dans las pnubellas et

puis avec une pelle on aramassa tout c''qui etait epar-

pilla, Au bout de cinq minutes,on a fini pal' ramonter derriere

Ie camion, mais avant qu'on

redemarre, on s'est rendus

compte qu'on en avait oublia

una, Ia-bss dans l'coin.

Bouge pas, J 'v vais, a

beugle Ie collegue, des que

j'I'at videe tu siff'les, ca

nous fem gagner un peu

d'temps!

II est revenu et a tout

balance dans l'camion. C'etait

Ie moment de siffler. Comme je

savais pas, j'avais un sifflet

expres. Je I'ai att.rapa et j'l'ai

mis dans ma bouche.J'avais

oublie que mesgants avaient

trempe dans l'degueu!i!! J'ai

tout recrache mais c'atatt trootard, j'avais Ie gout sur las

levres! Baaaa! Degueulasse!

y'en avait olein SUI' mon sif-

flet!

- Ben alor-s, qu'est-ce que

tu fuus, siffle!

- Euh...

- Ben mon pote, si t'es pas

foutu de siffler. on pourra pas

te garder!

J•i pris mon sifflet et j'ai

sif'f'Ie un grand coup. Mainte-

nant, j'avais I.e gout SUI' la

langue.

- Si c'est pas malheureux,

rala Ie collegue en voyant mon

sifflet se balancer, les bou-

gnoules au mains v savaient

siffler.Le camion a roule jusqu'aux

poubelles suivantes.

Jessayais de cracher mais

ca ne changeait eian.

vRobert sortit de sa dou-

che. Treize heures trente. Qui

pouvait bien cogner contre sa

pOI'te a cette heure?

Cetait Ia police.

- Vous avez vos papiers?RobeI't avait oublta de les

mettre dans Ia poche de son

peignoir.!

- Euh... non, pas SUI' mol...

Us sont restes dans ma veste.

- Vous savez bien que c'est

interdit de se promener sans.

sas papiers!

Robert fit un pas en

arr iara pour aller chercher sa

carte d'Identita.

- Bouge pas! hurla le f'lic en

armant sa mitraillette, j't'ac-

compagne, pas de coup fourre!

Robert sortit sa carte desa veste.

- Vous vnvez, elle etait la.

Bon, tu vas me suivre

maintenant. J'aime pas beau-

coup ta f'acon de m'repondre.

ABez! las mains sur la tete!

V I

Karim et Mohamed avaient

des petites jambes, mais ca ne

les empechait pas de courtr

vite. Ils foncaient Ie long d'ungrand mur, les yeux arrondis

par la terreur, Ie coeur pret a

exploser. La mort n'atalt pas

loin derriere et on n'etait pas

au cinema, mais dans un livre,

et dans un livre les person-

nages meurent pour de vrai.

Tout a coup, Mohamed

changea de direction. Dans Ia

mur d'en face it v avait une

brechs, pres d'una large benne

remplie de papier. La breche

s'ouvrait directement SUI' une

petite gl'Otte, les deux fugitifs

v disparurent en un clln d'oail,

•••Sauves! On pouvait commencer

a reprendre son souffle!

Lls n'ataiant pas les seuis a

etre venus 512 cacher la, il\javait aussi Garib et Yasmina.

Yasmina qui justement man-

geait un petit morceau de

fromage. Yasmina et sa jolie

peau blanche.

Dans sa precipitation,

Mohamed la bouscula. Le mar-

ceau de fromage qu'elle grigno-

tait lui echappa et rnula un

peu en direction de la sortie.

Yasmina s'avanca pour la

rarnassar,

- Attention! T'es trop pres

du bord! Voulue crier Garib.

Mais cinq crochets rives aun gros bras poilu s'etaient

deja empares du corps d'alba-

tre de l'imprudente Yasmina.

L•djudant Dubois eelata

de rire.

Ca y est! hurla-t-il,

Jean-Marie en a chope une!

laqueUe demanda Ie

brigadier.

- La souris blanche.

- n en reste encore com-



bien?

- Trois, va falloir en rache-

ter.

.Jean-Marie etait Ie plus

gros chat du quartier. Oel'riere

la corbeille a papiers il com-

mencait a dechiqueter Ia

souris. L'adjudant placa Ia

corbeille pour mieux volr, Ie

brigadier s'installa dans une

chaise rambourree. Tous deux

regardaient en r@vassant.

Avant, c'etait comme ca dans

les rues, avec des vrais Moha-

med.... maintenant, il arrivait

qu'on s'ennuie un peu.

L 'adjudant souoira. Jean-

Marie s'eloigna en se lechant

les babines. II ne restait plus

qu'une tache rouge sur Ie

carrelaqe.

- Regarde moi ca! s'ecl'ia Ie

brigadier, cette conne de

souris a mis du sang partout.

IIouvrit une armoire metal-

liqua et sortit une serpilliere.

Vingt minutes plus tard Ie sol

brillait comme un casque neuf.

- Le premier qui marche Ia-

dessus avant que ca soit sec,

on l'exile!

La porte s'ouvrit brusque-

ment et Robert traversa Ie

commissariat sans toucher

terre. II heurta au passage un

. tabouret en plast.iqua, percuta

Ie mur du fond, puis degringoia

mollement vers un banc en

bois.

V II

Vers quatre heures du

matin Robert sortit du commis-

sariat en zigzaguant. On avait

dO lui ecrasel' Ie ventre acoups de matraque, il regret-

tait pour ses papiers, et lapeignoir. IIs'arrata un instant,

mais retint son envie de vomir.

C'etait bientnt l'heure du

boulot et son camion passait

par la.

La rue semblait deserte.

- Eh!

~obert chercha autour de

lui.

- Eh, fils!

Cetait un vieux clochard

cache derriere un rideau de

cartons.

- Eh fils, tu sais comment I)

fait Le Pen pour serrer la main

a un Arabe? Tu sais pas? ... Y

prend un etau!

~obert avait mal a Ia bou-

che.

- Dis donc fils, t'as pas une

petite subvention pour I'arti-

ste? une petite piece ...

- Non. fai le minimum.

L 'artiste souleva un cou-

vercle de poubelle.

13

Robert Ie quitta

en repetant qu' il

n'avait que Ie mi-

nimum, son ventre

recommencait a lui

falre mal.

IIn'etait pas tres

loin de chez lui.

Dans la rue, le cafe etait

deja ouvert. En passant devant

on entendait tres bien Ie

transistor du patron.

- "... Football. Hier soir au

Pare -des-Princes I' equipe de

France s'est Inclinee 4-0 face ala principaute d'Andorre. Les

joueurs vedettes de I'equice de

France, Bouvier, Deschamps,

Durand et Francois n'ont rien

pu faire face au raz-de-

maraa de l'equipe de la princi-

pauta."

Derriere Ie zinc, parmi les

bouteilles de Ricard et les

coupes du club de foot, s'Im-

posait un por-trait du president

a l'air revE'!che. Depuis qu'Ilavait ete eIu, il ne prenait

plus la peine de sourire sur les

photos.

- "... Education nationale. Le

droit de greve est ratablt

pour les enseignants, mais

uniquement pendant les racrea-tions. A cette occasion Le Pen

a declare. je cite: "- II ·nesera pas dit que je ne suis pas

un democrate, si les ensei-

gnants sont en colet-a, qu'Ils Ie

disent: je les ecouterai.""

Robert aurait bien oris

un p'tit cafe, mais avec son

salaire valait mieux pas jeter

j'argent par les fen@tres. Et

puis les gens jetaient assez de

choses comme ca.

- " ... Meteo, sur la plus

grande partie du pevs, Ie

temps deviendra lourd, parfoisnuageux. avec ..."

~obert voulut regarder sa

montre, mais un fUc I'avait

garde pour son fils. De toute

facon, c'etait surernent bientOt

I'heure d'aller bosser.

VIll

- Vas-v, Robert, souh'!ve!

Cetait toujours devant

I'Elvsae que les poubeUes

etaient les plus lourdes. Robertsoule va un grand sac en plas-

tique debordant de bouteilles

vides. Une petite chose inerte

tomba sur trottoir. On etait

presses, Robert n'avait pas le

temps de regarder, mais on

aurait dit un moineau rouge, amoitie de capite par un coup de

fusil de chasse.

V. Safrat

"Anarchy" est une bande

dassinas, un comix americain,

paru en 19B1. Realisee par deux

fleurons du genre, Paul Mavides

et Ja\f Kinney, on peut dire labande dessinae contestataire

etait dans les annees 60-70

dans son ~ge d'or.La qualite graphique et Ie

scenario en beton, qui n'a

finalement pas vieilli, nous ont

donne l'envie de traduire ces

8 planchas hautement corro-

sives a tous points de vue.

Comme quoi on peut allier fun,

parodie et reflexion ...

A noter que Ie groupe du

"heros", J.P. JR (fils de Jean-

Paul Sartre. raison de plus de

traduire cette Bande dessinae

en f'rancaisl), Brack Frag, esttras certainement une deforma-

tion de Black Flag, groupe bien

connu de la scene hard core

de I'epoque (et d'aujourd'hui!).

Pour terminer. disons que

Anarchy Comix existe toujours,

un quatrieme numet-n est

paru recemment, soit quatre

numerus en... 10 ans!



\ \

.," .

. "\ \ , . ~\ \ . . . .



t. A. UNE MWF ••• £)'t...\ C.OLL~.··







18

CfUl A PR.IS be;sMlttlC"RS D/ANNu''::.,

Mt\IS l-A R£VOWrIONA VAINC-U, I

r-r.:--~~JI.

IL N 'Y A PLLlS D~ GoER.RE~, II .. j) 'or,.R.1!. ~SI"N

\\ II II DE '56)<ISMe:

\' " II P E RIICISI'4E\' ., '( 0 I AGISMG

'/ DE FoA,.t\\!)t1€

'i De. T }\ .L l. .l'i NE.

1 '1 A is . .. t 1AIS

TouT U. H O N O £

VIT f>AN'f, IJ"'~COI"tI1UN,quT£,

It..N€ ~FItVTPAS ~TR&

ANTI SOC.l AL !



A Uil\Q.vc I-lEi)"£. t>()

~Ot.lR. TOl'> U::~ T€RIl..I"N~Pt;UIJE-NT !;~ (.OIJNf;('TEIl..

€. PRE.NOA.£c>£S

I>t.CISI()NS 111f 'OI l . .TANTfS

E.NSEH( l ,U.

19

BIWTO. , QIiAIJO TV

A \JR A .~ PR l'> TESrfA A . QIJ~~, TI)

P .eV IE.N O P ..ItS uN

HEM~€ f.~At.f.HelJT!

Ol+! C'E-ST L'ke\J~E

os VA~S£MtlL.e:E

C'f~cR"'C:TI(),VE 1-{ON~;I\U:

IIENT" ')',1>, IlAANCH£S.Tol

Avl! . c, <fA. €T p...rA.Gr£5

L'f')lP(;RIE~C-tl

C O M P U T E R - I N H A N C E D N E U R O " , M A G E . .\

. . . .IrIIIII ' I IOb S Mol.I "3 MINuTtS

Poult vO< JS.I Mcrr~e.

II

IrI

I

I

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A (,~nEHfuR£, OAN'i Cc S'tC#I'It.Nt; t.A

QuEHION EST P6 S/t'lGI/t )1 ce " AN6Ut>€S G IiIU £S BRIOlES ClIIlTON'C.Of,S

OoiT ~TI~e MOOI FI~ . !1'L£u oo A H B R t ?

PRES! PEN! P i ) . JOUR TlR.€ Au s o ~ rDvlART£ RAMIRE~ u:

5 Ao PAULO / BRE . S IL



fE.UT tTR € . S /E .L oN UNf

LoGIG<Jb t?£pnW;:.WNc.! Hltlt;

S a u L . . UN MA .SOO+ IS T.s AG IR ltlrAINSI - BT De recs TRO(}e,USM£WTIt(};x_ SONT C ffoSE5j) o PftSSG,I

20

Tv se-oce: PROQfE PeSANIH4(.!)t. PovRGUoI Nf. PITSVIV~(; PANS c.£TTE c~I"t;R~TI\lGFt;l\rHcR£ 0(, VER:S?

Pout\GhJOI PAS?lei, OI'lt.JS ~ FVi()R

ThoT }Jo~ vE.TtHENTS"

f "AIT!> fi t PI'IRT IR DE I IEIt5.



,.- ---.".21

No~ flrLuUS fo{)cltrivESNO(J S ONT 1 "Ou. \OU t< ' s oirQo6 U )(X~ srtCL~FUT L 'APOGEE PU

e,AftB"IRISME'o

01.11, c£ CR.fTIN

ASOc iAL - 0

IJE P6t.J1_ F IlIR E

l-A DIFrl"I(t:Nct::

I£Alrli£. Lit (..Ic.€-NC-e

. EI Ltl U8ERT6.'

)£ FE N S £. Q,uf. NOUS A . VONS C:SSIWE D E .

L'INTi\ODuIR,t TR .6P RJIPIC>£MHrr D;;kJS

N O T R £ VroP,E:! /I.. e s T I1IlNIFESf£I1ENf U 'io RiEN T€ . ...)s. SV1S II,[QUIE;f.'

It. N~ NOVS Ll\js~t;; PA!; t> /~UTRE

P05~, Gd ..1TE G..UI> OE: PASSfI( OiffR£

NoTRE R . 6 . G L E CoIVfRt:: UlIlUJSW1f)J

~ _ p o { POUR. TON BieN

News IE RCNVOYONS

A ToN €y.1STcNC~

PItEMltRE! .1



22

•BALLESDE CHARlTE

Gerard Deltei!

. (Serie Noire N°Z213)

Gerard Delteil est )' auteur

de nombreux polars "engages"

mais, dans ce livre, il elargit Ie

genre 8 la polttlqua-ffct.ion. La

societe qu'Il decrit ressemble

b;aucoup 8 la n6tre, si ce

n est que ses tares sa sontaccentuass 8 I'extreme_ Dans

un futur proche, les chorneurs

sont tellement nombreux que

I'on retablit tout doucement

I'esclavaca. En attendant, les

pauvres restent caroues dans

des ghettos 00 seuls peuvent

circuler les flics et les asso-

ciations humanitair-es. Ces

derrueres se sont developpees

au point de devenir des trusts

qui s'engraissent gr.§ce 8

la char-ita-buzness. le "heros"fait justement partie de I'un de

ces trusts: la Compagnie du

Chr ist.. II recrute quelques

pauvres dont Ie travail pre-

caire consistera 8 distraire

les riches du cantr a-villa. En

effet, dans son cocon hyper-

protege, la haute societe

s'ennuie Mais soudain tout se

detraque_ Les meurtres et les

attentats se succedant. Et si

Ie marche de l'aide humanitaire

servait des desseins crimi nels?

Ce livre se devore d'une

traite. C'est un polar angois-

sant mais passionnant. Lisez-le,

surtout si Bernard Kouchner

vous eneI've!

Y _ B _

VAURIEN

Jim Thompson

(Autobiographie, Rivage nair)

Jim Thompson, un grand nom

de Ia Iitterature noire ameri-caine, nous convie 18 8 un

fameux par iple, celui de sa via,

On devrait plutnt parler de

parcours du combattant auquel

etaient obliges de se soumettre

les travailleurs amar icains de

la grande crise pour trouver un

boulct, Misere noire, alcoo- -

lisme, faim, vexations, humilia-

tion, exploitation de l'homme

par l'homme Tout y est. Des

traits de l u r n i a r a de ci de 1 0 ' 1 _

L'humour tres sarcastique et

poetique ( 0 : ) la limite du sur-realisme et du fantastique) de

Jim Thompson passe a travers

la noirceure des conditiuns

humaines, le fou rire nerveux

so us la douleur, la tragedie-

com8die de la vie, Ie destin

poignant d'un homme integre et

diqne. En surplus, un tableau

social de I'Amerique d'avant-

guerre_ Un grand coup de

poing dans la gueule du "reve

amer icain".

L. J.-F.

HAUTECOUTURE

ET BASSES BESDGNES

Thomas H_ Cook

(Serie Noire NUZ210

Les fondateurs du roman

nair americain, Hammett, Mac

Coy et autres ajoutaient un

certain engagement social au

recit d'anouate. T. H_ Cook

reprend Ie flambeau dans un

pur classlcisme. II a pub lie, il va quelques annaes, I'excellent

Du sang sur I'autel (Serie Noire

NU2DZ1), un polar situe parmi

les morrnons.

Dans ce livre-ci. il met en

scene un detective prive. Dans

La grande tradition, Frank

Clemmons est un criva insurn-

niaque, 8 la derive et mal al'aise aucr-es d'une pouoae de

luxe. Il enquete sur la mort

d'une employee de la haute

couture dont on a tranche Le

pninq. Il dacouvre que ce poing

a ete leva, il y a longtemps,

lors des greves du textile

new-yorkais en 1935_ Peu 8

peu, Le mystere s'eclair-crt tout'

en maintenant un suspense tres

soutanu. Le livre s'acnava sur

une tras belle fin, une lacon destyle et d'humanite. Comme

quai I'on peut choisir un

cadre peu original st reussirun coup de maitre!

Y. B.

Andre Helena

(Fanvai Noir)

Incontournable pour tout

amateur de polars et de romans

nail'S qui se respecte. Pluttit

que d'etre chiant et poussif 8

la far;on d'un Leo Malet, Andre'

Helena entre dans Ie lard et cafait mal. Jarnais il n'y eut

autant de mor-ts dans des

polars que dans les sians. A

tel point que La violence v est

desamorcee _

Ses heros tuent par rage,

desespoir. Jusqu'au-boutistes

lis en ant marr-e de la societe

et des saJauds qui I'habitent

(Les salauds ont la vie dure,10/18)_ Le rasult.at est evidem-

ment explosif, non seulement ca



canarde dans tous Ias coins,

mais en plus e'est truculant,

drola, noir a I'extrf!me et ca se

lit d'une traite. Pour autant Ie

style n'est pas bacle, il est

remarquable. Quant aux te-:

bleaux presentes, ils sont

criants de verite, notamment en

ee qui concerne Montmartre et

son monde interlope (serie desCompagnons du destin) et

la France sous l'Occupation.

Auteur maudit pour parfaire la

legende, mor-t alcoolique,

comme son maitre en poesla,

Verlaine, et pauvre en 1973_

Snobe par les inteUectuels et

les mauvais de son temps,

exploits a 2 sous Ie feuillet

par de petits editeurs. vereux,

n est grand temps de red€!cou-

vrir un auteur digne de ce

nom face aux ramassis de

recornls que l'on porte au

pinacle. La Ilttaratura popu-

laire ca axiste, a vous de

la decouvrir _..

L. J_-F.

Les ouvraqas d'AndI'e H€!l€!na

rMdites recemment

Les plus "destroys":

Les salauds ont la vie

dure; Le festival des maccha-

bes; J'au["ais la peau de Salva-

dor; Les clients du Central Hfl-

tel (suparnat); Le bon Dieu

S'en fout (tous chez 10/18).

Attention! Us sont en passe

d'~tI'e epuises ou de part.ir

au pilon, deplkhez-vous!

Sur Montmartre:

La saga des "Compagnons

du destin", neuf volumes racon-

tant chacun une histoire

(30F Ie volume chez Fanval

Noir, a notar la reprise des

couver-tures d'origine).

Et, pour les fouineurs:

Plus de 200 titres ont ete

Mites ou rMdit€!s sous divers

pseudonymes, certains sont

encore disponibles dans les

baes des bouquinistes. Souhai-

tons aux meilleurs d'entre

eux d'~tre aussi reedites ...

ROMANSNDIRS

Pas de revelations dans Ie

roman noir f'reneeis en ce mo-

ment. Les m~mes auteurs en-grangent des livres pas vrai-

ment marquants. Ainsi, Marie et

Joseph ant pubHe La mine d'or

de Taphalescha (Serie Noire

ND

217B) au Ie couple brode sur

Ie theme d'un mvthlqua filon

d'or dans un coin perdu de

France. Le roman n'est pas

desagreable. Les persunrreqes

sont bien camcas, mais on

'23.--~~ --~ ~-- ~ .~.,~~.~.:!:"I

cherche en vain la satire

sociale des premiers romans de

Marie et Joseph.

C'est un peu la meme chose

avec Fenetre sur route de

Gerard Delteil (8 L'Instant

Noir). Le theme est bien sOr

tire du film d'Hitchcok (Fen~tre

sur cour), mais replace dans

Ie contexte des embouteillagesdu mois d'aoOt! L'auteur decrit

8 merveille Ia tension creee

par les "boucnons", II cree un

suspense assez prenant, mais ce

n'est sans doute pas son

chef -d'oeuvre.

L'observation socia Ie carac-

tartstlqua d'un certain roman

noir est plus vive, en ce

moment, du cOte arnaricain.

Ainsi Ie livre de John Douglas,

La mort 8 gI'ands guides (Serie

Noire N°Z154) meI'ite I'atten-

tion. Au debut, il s'agit d'un

polar classique. Dans un coin

perdu des Appalaches, aux

Etats-Unis, une jeune fille,

amateur de photos en tenues

legeres. est assassinee. Ce

roman est aussi une violente

attaque contre des politiciens

cliniques, des pr{!tres corrom-pus et ambitieux. C'est aussi Ie

tableau de villes slnistrees. qu'on laisse a l'abandon,

chose que I'on peut retrouver

dans certains coins de I'hexa-

gone. C'est pourquoi on ne

peut que recommander cet

excellent polar. Profitons-en

pour citer un autre roman, plus

ancien et passe un peu inaper-

CU , de Donald Westlake, Un loup

chasse I'autre (Carre Noir).

Westlake 'Y darmnca l'arrivisme

des permanents svndicaux.

l'allusion a I'AFL v est trans-

parente mais I'auteur ne

donne pas POUI' autant dans

I'antisyndicalisme. S'B critique

la bureaucratie, Il defend la

lutte organisee face 8 un

patronat dur et... pr~t atuer. Car il s'agit d'un polar,

et I'intrigue est passionnante.

A lire d'urgence.

Y. B.

EXTRAITDE...

Extrait de La chasse au

bahut (Serie Noire N°Z183):

~mma Goldman, I'abominable

anarehiste des jeunes etait une

des heroines de ma mere. Et

une des miennes aussi. M~me si

je Ia vois sous les tr-aits de

Maureen Stempleton dans

Rouges - j'ai ete berce par les

glorieuses histoires racontant

celles de sa mere et de la

greve des ouvrtares coutu-

rier-es de New-York. Ma futuregrand-mere, apparemment

frappa une "jaune" a la t{!te,

s'est fait prendre et a passe lanuit au poste de Ia Bowery"

A part ca, c'est un tI'!~S

mediocre polar contra l'IRA.

NOUVELLESNUnS

(revue de la nouvelle noire)

Une initiative plus ou'Inta-ressante: redonner vie au

texte, a I'histoire breve,

8 ce qu'on appelle "la nouvelle"

- genre dedaigne de par nos

contraes au I'on prefere Ie

roman fleuve ou saga-gao C'est

pourtant 1 8 qu'on juge les

vrais auteurs. a mon avis ...

Ceux qui ont de la plume,

du nerf, du style, de la tripe

se sont taus essalles 8 ce

genre qui ne pardonne pas.

Innovation en ee qui concar-ne ce type de revue, elle est

consacras en majortte aux

auteurs francais et, qui plus

est, pour moitie a des auteurs

inconnus, I'autre mottia etant

constttuee d'autaurs conf'irmes.

C'est courageux, car les

nouvelles publiees en France

sont generalement anglosaxon-

nes et Ie fait d'autaurs ultra-

eonnus. Auteurs en hsrba,

a vos plumes. L'abonnement est

plus que raisonnable; BOFpourquatre numsros a l'ordre

de Clfl Presse, Le Coularou,

30120 Le Vigan.

L. J.-F.

A noter Ia parution de deux

titres interessants: Trois

carres rouges, de Benacquista

(SN N°Z218), et La nuit du

souvenir, de Bialot (SN N°ZZ15).



Documents

Soleil Noir_1