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SÉMINAIRE RÉGIONAL D'EXPERTS SUR LES ÉCOLES CORANIQUES et leur rôle dans la généralisation et la rénovation de l'éducation de base Khartoum, 20-24 janvier 1993 RAPPORT FINAL UNESCO

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SÉMINAIRE RÉGIONAL D'EXPERTS SUR

LES ÉCOLES CORANIQUES et leur rôle dans

la généralisation et la rénovation de l'éducation de base

Khartoum, 20-24 janvier 1993

R A P P O R T FINAL

UNESCO

Au nom de Dieu

Clément

et Miséricordieux

TABLE DES MATIERES

A) Organisation du séminaire, objectifs et participants B) Principales conclusions C) R é s u m é des débats et principales orientations D) Recommandations

Annexes et documents

A) ORGANISATION DU SÉMINAIRE, OBJECTIFS,

PARTICIPANTS ET THÈMES CENTRAUX

Le Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques s'est tenu à la salle «As-Sadâqa» à Khartoum, capitale de la République du Soudan, dans le cadre de la coopération entre l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture ( U N E S C O ) et les États membres islamiques, sous les auspices du Ministre de l'éducation, du 20 au 24 janvier 1993.

Objectifs du séminaire

I. Objectif général

L'objectif du séminaire était de procéder à un échange d'informations et d'expériences sur les divers types d'écoles coraniques des pays islamiques participants.

IL Objectifs subsidiaires

1. Étudier des modèles d'écoles coraniques dans les États participants.

2. Examiner les insuffisances et les points forts de ces écoles en tant qu'établissements éducatifs qui jouent un grand rôle dans la généralisation de l'éducation de base.

3. Prendre connaissancedes principaux éléments d'innovation dans les écoles coraniques, en égard aux exigences de leur environnement social.

4 . Convenir d'un modèle d'école coranique qui préserve la mission fondamentale de l'école - apprentissage du Coran, enseignement des principes de la religion musulmane - tout en permettant aux élèves de s'initier à certaines sciences modernes qui les préparent à la vie pratique.

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

Organisation du séminaire

Ont participé au séminaire des experts des pays et organisations ci-après:

Indonésie, Pakistan, Tchad, Soudan, Mauritanie et Mali ; Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture (ISESCO), Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science ( A L E C S O ) , Fondation A g a Khan, Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture ( U N E S C O ) , Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) (voir liste en annexe). L a commission nationale soudanaise pour l'éducation, la culture et les sciences a préparé le séminaire et a supervisé le déroulement en coopération avec le secrétariat de l ' U N E S C O à Paris.

Séance d'ouverture

La séance a commencé par une récitation du Coran. Le Ministre de l'éducation, dans son allocution d'ouverture, a souhaité la bienvenue aux participants et rendu h o m m a g e à l'action menée par l ' U N E S C O au Soudan en vue de promouvoir et de rénover l'éducation de base des enfants et des adultes. Le Ministre a fait observer que le thème du séminaire revêt aux yeux du Ministère de l'éducation une importance particulière car il est jugé crucial du point de vue de l'orientation islamique de l'État, qui met l'accent sur l'enseignement général et sur l'enseignement islamique en particulier. A cet égard, la «khalwa» (école coranique du Soudan) est une pièce maîtresse du patrimoine islamique au Soudan ; c'est à elle que revient le mérite de répandre l'appel islamique et d'ancrer la langue arabe dans la population.

L e Ministre a ensuite évoqué les changements survenus au Soudan grâce à la Révolution du Salut : l'éveil islamique fondé sur la fraternité, la tolérance et la solidarité entre musulmans et non-musulmans, la promotion de la vertu et des valeurs morales, l'édification des bases du développement qui ont permis un bond de la productivité dans l'agriculture et l'industrie... En conclusion le Ministre a remercié l ' U N E S C O , l'Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science ( A L E C S O ) et l'Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture (ISESCO).

Prenant ensuite la parole, M . Aoun al-Charif Qasim, représentant de l ' A L E C S O , a rappelé que les efforts déployés depuis cent ans pour

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A) Organisation du séminaire, objectifs et participants

généraliser l'éducation de base dans le m o n d e arabo-islamique n'ont touché qu'une proportion limitée des enfants de cette région. Cette insuffisance est imputable au divorce entre la communauté ( u m m a ) islamique et son système éducatif, et à la création d'autres systèmes dont le but est de dévaloriser la culture arabo-islamique dans l'esprit et dans la vie des membres de cette communauté, ce qui a entraîné une dualité dans l'enseignement. E n effet, l'État s'est surtout intéressé aux écoles laïques, s'en remettant aux citoyens pour qu'ils s'occupent des écoles coraniques. Pour sortir de la crise de l'éducation que connaît actuellement le m o n d e arabo-islamique, il conviendrait, selon le représentant de l ' A L E S C O , de relier le système des écoles coraniques au système d'enseignement général et ce à partir d'un point de vue islamique et non occidental. Cela implique que soit préservé le rôle des écoles coraniques consistant à faire apprendre le Coran, et, que sur la base de l'expérience de la société musulmane et de cette mission coranique fondamentale, on permette à l'élève musulman d'accéder à toutes les connaissances de notre époque. Consciente de l'importance de cette tâche depuis sa création, l ' A L E C S O a lancé à cet effet des projets dont un projet de contributions des établissements d'enseignement traditionnels à l'alphabétisation et un projet d'enseignement de l'arabe par l'enseignement du Coran.

M . Aboul Naga, représentant de l 'ISESCO, s'est félicité de la coopération entre son organisation et l ' U N E S C O , indiquant que l 'ISESCO porte un grand intérêt au thème du séminaire, que l'on retrouve du reste dans ses plans triennaux successifs.

M . Abdelwahid Abdalla Yousif, représentant de l ' U N E S C O et coordonnateur du séminaire, a, pour sa part, souligné que l ' U N E S C O est convaincue de l'importance du rôle que jouent les écoles coraniques dans la généralisation de l'éducation de base des enfants et des adultes, surtout si elles trouvent le cadre éducatif et administratif approprié. Ces établissements sont uniques en leur genre, tant par leurs objectifs que par leurs liens avec la société et leur harmonie avec l'environnement culturel et social. Le monde islamique, a-t-il fait observer, doit se servir à bon escient de ces établissements pour contribuer à la réalisation de ses grands objectifs en matière d'éducation, en priorité la généralisation de l'éducation de base chez les enfants, les adolescents et les adultes, et surtout chez les filles et les femmes. La satisfaction des besoins éducatifs fondamentaux de tous dépend, en dernière analyse des mesures prises par chaque État, mais les points c o m m u n s entre les États islamiques sont si forts que

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

ceux-ci sont voué à coopérer dans ce domaine. A cet égard, malgré les appréhensions que suscite chez certains l'dée de rénover et de développer les écoles coraniques, les besoins éducatifs fondamentaux obligent, à une époque dominée par la science et la technologie, à rechercher un nouveau modèle d'école coranique qui conserve sa mission essentielle - apprendre le Coran à ses élèves - tout en les préparant à se familiariser avec les sciences d'aujourd'hui. Cette rénovation et ce développement seront possibles si les États y procèdent dans le cadre d'une stratégie nationale englobant l'ensemble du système éducatif. (Voir le texte des allocutions en annexe).

Election du bureau

Après la séance d'ouverture, les participants ont approuvé l'ordre du jour provisoire ainsi que les objectifs et les thèmes centraux du séminaire (voir annexe), et ont procédé à l'élection du Bureau, composé c o m m e suit :

M . Hassan A h m e d Youssef Président

M m e . Safiya Said Vice-présidente

M . Idriss Diara Vice-président

M . Aoun Al-Charif Qasim Rapporteur

M . Zamakhshari Zafer Rapporteur adjoint

M . Khatiri Ould H a m e d Rapporteur adjoint

Il a également été décidé que le bureau élu, complété par les participants suivants, ferait office de comité de rédaction :

M . Bachir Al-Bakri

M . Youssef Al-Khalifa Abou Bakr

M . Abdelwahid Abdalla Yousif

Débats

Les participants ont ensuite examiné les diverses études consacrées aux écoles coraniques qui avaient été établies par des experts participants des pays islamiques et des organisations représentées, études qui portaient sur différents aspects de la question (voir liste des documents en annexe).

A) Organisation du séminaire, objectifs et participants

Thèmes centraux du séminaire

1. Politique générale en matière d'écoles coraniques

Il ressort des études présentées que les politiques des États participants en matière d'écoles coraniques diffèrent d'un État à un autre.

Quels doivent-être les principaux fondements de ces politiques, et commen t est-il possible de les intégrer dans le cadre d'une politique générale de l'éducation?

2. Planification

L a planification de l'éducation englobe-t-elle les écoles coraniques? Quelle place occupent-elles dans le plan national en matière d'éducation? Quelle place occupent-elles dans le plan national de développement?

Quelle est la part des écoles coraniques dans les ressources consacrées à l'éducation? C o m m e n t accroître leurs ressources par le travail productif? Les contributions volontaires?

3. Programme

L e programme général des écoles coraniques poursuit quatre objectifs :

a) enseignement de la lecture et de l'écriture;

b) apprentissage du Coran;

c) enseignement des bases authentiques de la religion islamique et formation des élèves à la prière;

d) développement d'un esprit propice au travail collectif chez les élèves et possibilité pour eux d'effectuer certains travaux manuels en rapport avec leur vie scolaire .

A ces objectifs généraux, certaines écoles ajoutent d'autres matières pour répondre aux besoins socio-économiques. E n tout état de cause, l'apprentissage du Coran demeure l'objectif premier des écoles coraniques dans tous les États islamiques. Quelles que soient les matières que propose le programme, elles insistent toutes sur l'aspect théorique, sans accorder une place suffisante au développement des aptitudes pratiques. ~~

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

- N e faudrait-il pas élaborer un nouveau programme qui, tout en conservant les objectifs actuels, favoriserait l'équilibre entre les connaissances théoriques et les aptitudes pratiques?

- N e faudrait-il pas faire en sorte que les élèves des écoles coraniques, en particulier les plus âgés d'entre eux, aient raisonnablement accès à des matères devenues essentielles à notre époque telles que la science, la technologie, les mathématiques et les sciences de l'environnement?

- C o m m e n t mettre à profit la souplesse qui permet actuellement aux élèves de passer d'une classe à une autre en fonction de leurs aptitudes intellectuelles?

- N e faudrait-il pas ajouter quelques activités favorisant l'épanouissement des aptitudes personnelles de l'enfant (la créativité, le sens de l'initiative, la ténacité, la curiosité, les talents manuels, les relations sociales, les aptitudes artistiques et physiques, etc.)?

- C o m m e n t construire un programme qui réponde aux besoins et aux aptitudes des divers groupes d'âge et des divers milieux géographiques?

- C o m m e n t assurer une bonne transition entre l'école coranique et les cycles ultérieurs du système scolaire?

4. Formation des enseignants

Rares sont les maîtres des écoles coraniques qui reçoivent la formation dont a besoin un enseignant à notre époque, bien que beaucoup possèdent des qualités pédagogiques et une mémoire remarquables, sans parler de leur droiture, de leur modestie et de la foi en leur mission.

- C o m m e n t pourrait être assurée cette formation?

5. Administration

L a conception de l'administration présente des aspects de centralisation qui demanderaient à être clarifiés eu égard aux relations entre les écoles coraniques et telle ou telle direction ou tel ou tel ministère, de façon à prévenir les conflits de compétences. A u niveau interne, l'administration de l'école relève uniquement du cheikh (le maître) et de ses auxiliaires.

A) Organisation du séminaire, objectifs et participants

- C o m m e n t faire participer efficacement les parents et la communauté à l'administration de l'école?

- Serait-il possible de créer une structure administrative regroupant un certain nombre d'écoles de chaque région, qui se verrait confier la responsabilité de l'organisation du développement et du financement de ces écoles?

6. Rénovation et modernisation

- Les participants ont estimé que certains aspects de l'école coranique ont besoin d'être rénovés et développés pour répondre aux besoins de l'époque actuelle sans que soit pour autant affectée la vocation fondamentale de ces écoles, à savoir l'apprentissage du Coran et l'enseignement des principes de l'Islam. Quels sont ces aspects et comment moderniser l'école coranique?

- Les études présentées ont montré que tous les Etats islamiques participants ont, à des degrés divers, modernisé leurs écoles' coraniques, mais que des obstacles s'opposent à la généralisation de cette modernisation; quels sont ces obstacles?

7 . Propositions de coopération

Il faudrait que les États islamiques coopèrent entre eux, d'une part, et avec les organisations régionales et internationales, d'autre part, afin de permettre aux écoles coraniques de participer efficacement à la généralisation de l'éducation de base, vu que la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous (Jomtien, mars 1990) a adopté une vision large de l'éducation de base, accordé une importance particulière au rôle de l'éducation dans le développement économique et social et dans le changement social et souligné la nécessité de relier les connaissances, aptitudes pratiques et valeurs afin de garantir à chacun un niveau de vie décent et la capacité de contribuer au développement de sa société.

Séance de clôture

L e rapporteur a présenté un projet de rapport final qui a été adopté par les participants à l'issue d'un débat exhaustif.

il

B) PRINCIPALES CONCLUSIONS Aperçu des études présentées

et des principaux points évoqués à leur propos

Les participants ont étudié les différents types d'écoles coraniques abordés dans les documents de travail présentés par les États, les institutions et organisations régionales et les experts participants. Il ressort de ces études et des débats auxquels elles ont donné lieu que les écoles coraniques ont joué un rôle historique dans les sociétés musulmanes de ces pays car elles ont été le pilier du système éducatif jusqu'à l'époque moderne. Or l'école coranique, telle qu'elle existe encore dans les sociétés musulmanes d'aujourd'hui, ne représente qu'une infime partie de l'ensemble majestueux sur lequel reposait l'enseignement islamique à son apogée, c'est-à-dire à l'époque où l'apprentissage du Coran et les études religieuses touchaient à toutes les sciences - linguistique, sciences humaines et sciences exactes et naturelles, d'où une complémentarité entre les connaissances religieuses et séculières. Avec le déclin de la société musulmane, ce système éducatif s'est disloqué et les graines qu'il semait se sont dispersées et perdues pour la plupart. Il n'en subsiste pas grand-chose dans les écoles actuelles du m o n d e islamique. Certes, on constate des ressemblances manifestes dans les objectifs et la fonction des écoles coraniques dans ces divers pays, mais la forme qu'elles ont prise et la mesure dans laquelle elles ont atteint leurs objectifs et rempli leur fonction ont varié en fonction des circonstances historiques, géographiques, économiques, politiques et sociales.Leur caractéristique c o m m u n e essentielle est, c o m m e il ressort des études de cas présentés, que l'école coranique, quelle qu'en soit la forme, reste l'école de la société qui l'instaure, la protège et l'influence c o m m e elle est influencée par elle. Elle est donc étroitement liée à son milieu, ce qui lui confère une capacité de résistance et une indépendance qui la rendent réfractaire à la plupart des développements de l'être moderne. Leur autre caractéristique c o m m u n e est que toutes ces écoles ont le Coran pour matière fondamentale d'enseignement et

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

n'ont qu'un enseignant unique qui, généralement, n'a pas bénéficié d'une formation pédagogique organisée. Elles ne sont pas dans leur ensemble obligées de respecter des limites d'âge ou des horaires déterminés. Elles sont peu coûteuses car elles utilisent des matériaux locaux, qu'il s'agisse de leur construction, de leur mobilier ou de leurs outils d'enseignement. A côté de ces caractéristiques communes , les conditions locales, dans leurs différents aspects, ont entraîné l'apparition de différents modèles, c o m m e le montre l'exposé ci-après des types et écoles coraniques passés en revue par le séminaire.

1. L'école coranique au Soudan

A u Soudan, l'école coranique, appelée khalwa, a traversé les âges jusqu'à notre époque, en conservant sa forme traditionnelle. Elle repose sur l'effort de la collectivité et répond aux besoins de la société en matière d'enseignement et d'éducation religieuse : apprentissage du Coran et formation des élèves pour qu'ils servent leur société. Des tentatives ont bien été faites au début du siècle pour la faire évoluer en introduisant dans ses programmes des matières modernes c o m m e le calcul, mais sans succès. Cet échec n'a cependant pas empêché d'autres efforts de modernisation hors du cadre de la khalwa. Ainsi, en 1912, un institut scientifique fut créé sur le modèle des instituts primaire, secondaire et supérieur d'al-Azhar. D e m ê m e , en 1966, ont été créés des instituts religieux moyens et secondaires et des écoles de récitation et de psalmodie qui comportaient, à côté de l'enseignement et de l'apprentissage du Coran, des programmes modernes calqués, pour chaque cycle, sur ceux des écoles publiques. L e but était d'ouvrir aux élèves des khalwa l'accès à un enseignement formel complémentaire qui leur permette ensuite d'entrer dans les universités et autres établissements d'enseignement supérieur. L'école complémentaire était le moyen pour les élèves sortant de la khalwa d'accéder à un enseignement général. Les jardins d'enfants des mosquées initiaient très tôt les enfants au Coran. Ces dernières années ont vu nombre de tentatives de développement et de modernisation, dont les plus importantes sont sans doute l'«Institut Ounsa» pour la formation des diplômés des khalwa et l'Académie du Cheikh Taha al-Bathani, réunissant en un seul établissement les fonctions de la khalwa et l'école, c o m m e c'est le cas aussi de l'école coranique d ' O m d u r m a n al-Jadida. Cependant, l'initiative majeure dans ce domaine est probablement celle du Ministère de l'éducation qui s'est employé à renforcer les bases de l'école publique en donnant au

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B) Principales conclusions

Coran une large part dans les programmes scolaires de sorte qu'à l'issue du secondaire, chaque élève ait appris une bonne partie du Livre Saint. Quant à la khalwa, elle est en dépit de tout cela demeurée quasiment inchangée. Il semble que le meilleur moyen de la réformer consisterait à la transformer de l'intérieur en la dotant de maîtres qualifiés, capables de préserver sa mission fondamentale tout en inculquant des connaissances offrant aux élèves la possibilité d'une interaction permanente avec leur époque et leur société. O n s'emploie actuellement à mettre en œuvre cette réforme.

2. L'école coranique au Pakistan

A u Pakistan, c o m m e dans les autres pays islamiques, l'enseignement a toujours été lié à la mosquée, mais les politiques suivies par le pouvoir étranger ont entraîné la destruction progressive de l'enseignement coranique. Etant donné le besoin pressant d'éliminer l'analphabétisme et de répandre l'éducation de base dans le pays et le coût élevé que représente la généralisation des écoles publiques pour y parvenir, il a été nécessaire de mettre à contribution les écoles coraniques, surtout dans les campagnes où les établissements publics sont rares. O n a donc mis au point un grand programme de création d'écoles coraniques (maktab) dans les mosquées, où sont enseignées les disciplines modernes à côté du Coran et des sciences dont l'enseignement est confié à l'imam. Ces écoles suivent à peu près le m ê m e programme que l'école élémentaire publique. O n constate que les parents, inscrivent volontiers leurs filles, en particulier, dans ces écoles plutôt que dans les écoles modernes. Les campagnes d'alphabétisation ont bénéficié de l'enseignement du Coran car l'enseignement de la lecture et de l'écriture se fait pour ce qui est du Coran dans l'alphabet arabe, proche de l'alphabet urdu ; il suffit d'ajouter des caractères modifiés pour représenter les phonèmes qui n'existent pas en arabe.

3. L'école coranique en Indonésie

L'école coranique indonésienne a un caractère spécifique, à l'image de l'islam indonésien, marqué par l'histoire propre à ce pays. Jusqu'à une époque récente, l'enseignement relevait de l'école coranique traditionnelle, puis est arrivée l'école moderne, mais vu le besoin de généraliser l'enseignement et d'éliminer l'analphabétisme, il a fallu recourir aux écoles coraniques, associées à l'effort général. Les

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établissements d'enseignement islamiques ont donc été reconnus, développés et intégrés au système d'enseignement public. Il existe en Indonésie deux types d'établissements islamiques. Les premiers dispensent un enseignement à 80% moderne et à 2 0 % religieux ; ils comportent deux cycles, primaire et secondaire, répartis sur neuf ans sanctionnés par un diplôme équivalent à celui délivré par les écoles publiques. Les seconds, appelés écoles religieuses, n'enseignent que les matières religieuses. Les uns c o m m e les autres dépendent administrativement du Ministère des affaires religieuses, tandis que leurs programmes relèvent aussi du Ministère de la culture. A u niveau supérieur, coexistent également deux types d'établissements : l'«Institut gouvernemental pour les études islamiques» et les établissements privés d'études islamiques.

4 . L'école coranique au IVlali et au Tchad

V u la forte similitude entre les écoles coraniques du Mali et celles du Tchad, on peut parler de modèle c o m m u n , ayant pour origine des liens anciens avec les Arabes et l'islam, si ce n'est que le Mali a davantage subi l'influence de l'islam maghrébin et le Tchad celle de l'islam de l'est et du nord du continent. Leurs deux expériences se ressemblent en ce qu'ils ont été confrontés à un élément linguistique allogène imposé par la colonisation. La langue nationale elle-même, qui représente l'identité culturelle dans ses différents aspects, est désormais enseignée au Mali, l'arabe, langue de la culture religieuse, étant employée dans les écoles «arabes» c o m m e on les appelle au Tchad, ou les «madrassa» c o m m e on les appelle au Mali. Dans les deux cas, le français s'est imposé c o m m e langue de communication et instrument de travail. Si la majorité musulmane est dominante au Mali, où elle s'appuie sur une assise historique mieux enracinée sur le plan culturel au moins, la majorité musulmane au Tchad est relativement moins importante, ce qui se répercute sur le rapport de force avec les autres groupes non musulmans. Dans ce dernier pays, devant l'orientation résolument laïque de l'État, les écoles coraniques se sont installées dans des maisons particulières. Dans les deux pays, on constate que l'école coranique, traditionnelle ou modernisée, s'est figée, mais qu'un vent de renouveau souffle de plusieurs directions sur ces établissements qui ont donc besoin d'une assistance technique extérieure, notamment de la part des institutions arabes et islamiques. E n dépit de tous ces traits c o m m u n s , il y a des différences entre l'école coranique malienne et l'école coranique tchadienne.

B) Principales conclusions

(i) L'école coranique améliorée du Mali est le résultat d'une expérience conjointe menée par l ' U N E S C O et le Ministère malien de l'éducation. L'enseignement y est dispensé dans la langue nationale transcrite en caractères arabes. A côté de la religion islamique, du droit musulman (fiqh) et de la théologie (tawhid), on y enseigne les disciplines modernes telles que le calcul, l'hygiène ou l'instruction civique. C e type d'établissement conserve une vocation purement religieuse. Quant à la «madrassa», tout en étant à l'origine une école coranique, elle applique des programmes empruntés au système public, et notamment enseigne la langue française. Elle fait passer des examens reconnus officiellement par l'État, ses maîtres sont formés dans des écoles spécifiques et elle dispose de manuels et de programmes spécifiques adaptés à la situation.Dans les écoles purement traditionnelles, le maître, «marabout» ou cheikh possède une incontestable autorité spirituelle mais est dénué de formation. D e plus, dans les écoles coraniques améliorées ainsi que les «madrassa», des maîtres diplômés des écoles arabes à l'étranger et certains anciens élèves, de m ê m e que certains prédicateurs et muezzins, participent à l'enseignement.

(ii) A u Tchad, l'école coranique reçoit depuis peu une aide des autorités. O n distingue dans ce pays deux types d'écoles coraniques : la «masik» — l'école coranique traditionnelle — qui n'a pas de programme particulier et pas de méthode pédagogique et ne forme pas ses maîtres, et l'école coranique «moderne» ou «école arabe» où l'on enseigne à côté des matières religieuses le calcul, l'histoire,la géographie, les sciences naturelles et le français. Cette dernière école a notablement évolué, et ses effectifs ont doublé dans la capitale. Son programme et ses horaires sont proches de ceux du système public. Les effectifs, soit 18200 élèves sur un total de 40000 enfants scolarisés dans l'ensemble du pays, se répartissent entre 60 établissements. Quoi qu'il en soit, c'est en se modernisant, parallèlement à leur enseignement religieux, que les écoles coraniques et établissements assimilés au Mali et au Tchad donneront à leurs élèves l'espoir de trouver un emploi.

5. L'école coranique en Mauritanie

L'école coranique mauritanienne s'inscrit dans le cadre de la mahdhara, un établissement dont le rôle—ne se limite pas à

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l'apprentissage du Coran, mais englobe les sciences coraniques, la langue arabe et la c/iar/'a.L'apprentissage du Coran n'en est que la première étape. Il n'y a que dans les villes que les mahdhara se consacrent exclusivement à cet apprentissage. Jusqu'à l'indépendance (1960), les mahdhara étaient les seuls établissements d'enseignement et l'État dépendait de ses diplômés pour pourvoir les postes de fonctionnaires dans divers domaines : enseignement, justice, administration. Depuis la mise en place des écoles publiques modernes, l'État engage ses fonctionnaires parmi leurs diplômés et non plus parmi ceux des mahdhara. Ces établissements doivent compter sur eux-mêmes tant pour leur matériel que pour leurs moyens de subsistance (ardoises en bois, crayons, repas, etc.). U n maître unique y assure tous les enseignements : Coran, Charta, langue arabe. A l'instar des écoles coraniques de nombre de pays islamiques, la mahdhara est ouverte à toutes les classes d'âge, douze mois sur douze, et on peut s'y inscrire à n'importe quel momen t de l'année. Le maître se fait assister par les élèves les plus âgés qui s'occupent de l'enseignement primaire et moyen . Les plus forts enseignent aux plus faibles .Le Ministère mauritanien de l'éducation a commencé à s'intéresser aux mahdhara, qu'il cherche à relier à l'enseignement général et supérieur. Elles bénéficient maintenant de subventions annuelles. Des tentatives ont été faites pour les promouvoir en créant des établissements publics dispensant également un enseignement professionnel ainsi que d'autres disciplines modernes. C'est le cas, par exemple, de l'Institut supérieur d'études et de recheches islamiques qui accueille les diplômés des mahdhara et leur délivre, aux terme d'un cycle de quatre ans, une licence d'arabe et chaña islamique. L a Banque islamique de développement (Jeddah) finance le Centre islamique, qui a pour mission de promouvoir les mahdhara et de donner une formation professionnelle à leurs élèves. Entrent également dans cette catégorie l'«Institut Ibn Abbas», le «Centre professionnel» relevant de la Commission des mosquées et des mahdhara, l'«Association culturelle islamique», les «écoles al-Falah», les «écoles Ibn Amer» et les «Instituts al-Fath». E n coopération avec le Programme alimentaire mondial ( P A M ) , l'administration des mahdhara organise également des crèches dans ces établissements. Les mahdhara traditionnelles ont contribué à l'action d'alphabétisation et de diffusion des connaissances et de l'enseignement, au bénéfice d'un nombre d'élèves à peine inférieur à celui des écoles publiques. D e plus elles recueillent également un grand nombre d'enfants rejetés pour diverses raisons par le système scolaire. Elles jouent un rôle

B) Principales conclusions

fondamental dans la lutte contre l'analphabétisme en aidant efficacement à élargir l'assise de l'éducation de base. Signalons enfin que leurs diplômés fournissent l'essentiel des professeurs d'éducation islamique dans les écoles d'État et diffusent l'enseignement religieux et la charla dans de nombreux pays africains.

6. L'établissement coranique préscolaire

C e type d'établissement est une contribution de la Fondation A g a K h a n dans le cadre du projet d'éducation préscolaire qui a été lancé à M o m b a s a (Kenya) en 1986. C e projet vise à dispenser une éducation préscolaire centrée sur les traditions religieuses et culturelles générales afin de préparer les enfants à la vie moderne et de leur donner toutes leurs chances d'entrer à l'école primaire et d'y réussir.Pour garantir le succès de l'expérience, un programme de formation spécialisée a été conçu à l'intention des éducatrices. Il porte sur la pédagogie et les questions de gestion, de planifacation, de. croissance et de développement des enfants, de santé et de nutrition ainsi que sur l'élaboration des matériels éducatifs. Mais ce n'est pas là le seul objectif officiel du projet, qui vise aussi à modifier l'attitude de la société vis-à-vis de l'enseignement moderne et à s'assurer de son soutien à ce type d'établissements. Le programme d'enseignement est centré sur une combinaison des disciplines religieuses et des sciences modernes, de manière à s'adapter aux capacités intellectuelles et à la situation sociale des enfants et à les doter des capacités requises pour affronter le m o n d e d'aujourd'hui tout en gardant leurs traditions religieuses. Quatorze école ont ainsi été créées dans le cadre de ce programme qui contribue également à la création de quarante-deux autres établissements.

7. Le rôle de l'ALECSO et de 1TSESCO

L ' A L E C S O et l ' ISESCO ont toutes deux participé aux travaux du séminaire. O n peut résumer c o m m e suit leurs contributions à la promotion et au développement de l'école coranique :

a) L'Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science ( A L E C S O ) a créé trois organismes chargés d'aider les établissements coraniques, dans le cadre de son action générale de diffusion de la culture arabo-islamique. Il y a tout d'abord l'Organisme arabe pour l'alphabétisation et l'éducation des adultes, qui a effectué une étude détaillée sur les écoles coraniques et la contribution qu'elles peuvent

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

apporter à l'alphabétisation et à la généralisation de l'enseignement islamique dans quatre pays arabes. Les conclusions de cette étude ont été publiées. C e m ê m e organisme a mis à profit les résultats du projet «Lis au n o m de ton Seigneur» qui a pour but d'enseigner l'écriture et la lecture au moyen du Coran. Cette méthode a été appliquée au Soudan en 1992 à l'occasion d'un stage de formation organisé par l ' A L E C S O dans la région Est du pays, qui a permis de former cent maîtres de khalwa. Le Fonds pour la promotion de la culture arabo-islamique à l'étranger a, quant à lui, élaboré des programmes et des manuels pour l'enseignement des enfants des communautés arabo-islamiques émigrés, outre qu'il apporte son assistance au détachement de professeurs des pays islamiques. Enfin, l'Institut international de la langue arabe de Khartoum contribue à la formation des enseignants et à la transcription des langues africaines et asiatiques en caractères arabes ; il effectue également des recherches comparatives sur l'enseignement du Coran dans les divers pays islamiques ainsi que sur l'enseignement de la langue arabe au moyen du Coran.

b) L'Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture (ISESCO). Le programme de soutien aux écoles coraniques et le programme de formation de leurs enseignants font partie des programmes qui remontent à la création m ê m e de l 'ISESCO, qui a organisé nombre de stages de formation à l'intention des enseignants des écoles coraniques des divers pays islamiques d'Afrique et d'Asie.

L ' I S E S C O accorde la plus haute importance à ces programmes : elle a fourni aux pays où se sont tenus les stages de formation des professeurs détachés, mais aussi un soutien financier pour l'achat de manuels et d'équipement. Le but est de permettre aux écoles coraniques d'offrir un enseignement diversifié englobant, outre l'enseignement de la religion, celui des sciences humaines et des sciences fondamentales. Ces établissements peuvent aussi se transformer en centres d'alphabétisation et d'éducation des adultes, contribuant ainsi à développer le système éducatif dans les États membres de l 'ISESCO.

Le processus éducatif ne peut se dérouler correctement que lorsque tous ses éléments constitutifs sont réunis, à savoir un enfant, un enseignant, une méthode, une matière d'enseignement et un moyen. Si les États réunissent ces conditions, tout processus éducatif doit être couronné de succès. A l'inverse, tout déséquilibre entre ces éléments fondamentaux porte atteinte à l'esprit du processus et aux règles qui le gouvernent.

20

C. RÉSUMÉ DES DÉBATS SUR LES THEMES CENTRAUX

et des principales orientations qu'ils ont mises en évidence

Les participants ont abordé les sept thèmes centraux :

1) Politique générale des écoles coraniques 2) Planification 3) Programme 4) Formation des enseignants 5) Administration 6) Rénovation et développement 7) Coopération régionale et internationale

Principales orientations mises en évidence :

1) E n matière de politique générale

Il convient de considérer l'école coranique c o m m e la base de l'enseignement islamique et de définir avec précision ses objectifs et ses fonctions. Il faut lui apporter un soutien afin qu'elle contribue efficacement à l'éducation des garçons et des filles, dès le plus jeune âge, en leur enseignant la lecture et l'écriture et en leur faisant apprendre une part raisonnable du Coran. A côté de cette fonction première, l'école coranique a d'autres fonctions telles que l'alphabétisation, le développement de la société et l'enseignement professionnel. Il est loisible à chaque État d'y ajouter les fonctions qui lui paraissent nécessaires eu égards aux besoins de la société et à son évolution culturelle.

2) E n matière de planification

Bien que les écoles coraniques traditionnelles qui se limitent à l'apprentissage du Coran continuent à dépendre, dans la plupart des pays islamiques, du bénévolat individuel ou collectif, la multiplication

21

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

des établissements éducatifs de tous les niveaux - dont les écoles coraniques — a obligé à intégrer ces dernières dans les divers plans nationaux d'éducation et de développement, et ce pour deux raisons: d'abord pour assurer la coordination des objectifs et des actions en matière d'éducation et en second lieu pour garantir à ces établissements une part des ressources publiques. E n outre, la planification permet aux responsables de mesurer l'efficacité de ces établissements selon une méthode scientifique précise et de leur fournir les services dont ils ont besoin - services sanitaires, sociaux, etc.

3) E n matière de p r o g r a m m e

Nul ne conteste que le programme de l'école coranique repose sur le Coran, un livre qui a des caractéristiques propres puisqu'il est la base de la foi, de la connaissance, de la construction sociale, économique politique, constitutionnelle et intellectuelle de Yumma islamique. L'école coranique représente le premier pas sur la voie de la mise en œuvre de ce programme, vaste et global, dont le principe directeur est l'éducation permanente, une éducation qui se veut également pratique. Il appartient à chaque État qui veut atteindre ces objectifs de définir sa philosophie à long terme en matière d'éducation et de formuler les plans permettant de transformer cette philosophie en objectifs éducatifs et en programmes détaillés dont la mise en œuvre incombera au système éducatif dans son ensemble avec pour point de départ l'école coranique, que celle-ci ait pour fonction de dispenser un enseignement aux enfants âgés de 4 à 6 ans ou pour mission de s'occuper des adultes dans le cadre de l'éducation permanente. La réalisation de ces objectifs requiert aussi la mise au point de méthodes et de moyens appropriés et la mise à profit des progrès accomplis par la pédagogie moderne. Pour commencer, il convient d'apprendre aux élèves à apprendre, ce qui est en accord avec la méthode de l'école coranique consistant à individualiser l'enseignement et est indispensable en cette époque d'explosion des connaissances. Il faut aussi s'employer à enseigner aux élèves la manière de résoudre les problèmes et de réfléchir sur le monde qui les entoure, et développer leur sentiment d'appartenance à une communauté ayant ses caractéristiques et qualités propres.

Quant aux moyens et matériels didactiques, ils doivent répondre à la diversité des besoins et des situations économiques et culturels des élèves, la seule condition étant qu'ils soient adaptés au niveau où ils

22

C) Resume des débats et principales orientations

sont utilisés, de manière à être à la fois bien acceptés par les élèves

et efficaces. L e contenu du programme des écoles coraniques varie

selon les besoins de chaque pays, mais il faut qu'à tous les niveaux

ce programme fasse acquérir à l'élève les connaissances, les aptitudes

et les orientations appropriées qui lui permettront de vivre dignement

à une époque dominée par la science et la technologie et où les

bouleversements socio-économiques se succèdent de plus en plus

vite.

4) E n matière de formation des enseignants

L e maître d'école coranique réunit nombre de qualités rares : frugalité,

mémoire puissante, patience, foi profonde en sa mission, modestie,

tempérance, amour du travail bien fait afin de plaire à Dieu.

Il suit la méthode qu'ont suivie durant des siècles ses prédécesseurs,

lesquels ont rempli leur mission selon les exigences de leur temps.

Cependant, les progrès accomplis dans les méthodes et les moyens

de l'enseignement imposent de mettre au point des programmes de

formation des maîtres des écoles coraniques afin qu'ils s'acquittent

de leurs fonctions efficacement de manière à répondre à l'évolution

de la société et à la personnalité de leurs élèves, d'une part, et à

satisfaire aux exigences résultant des nouvelles fonctions que l'école

est appelée à remplir dans telle ou telle société, d'autre part.

5) E n matière d'administration

Dans la plupart des pays islamiques l'administration des écoles

coraniques relève entièrement du cheikh, assisté parfois de ses

collaborateurs ; la société n'a qu'un rôle consultatif indirect.

Quant à l'administration des écoles coraniques publiques, dans

certains pays islamiques, l'État intervient aux niveaux central et

régional, fixant les orientations générales et fournissant des fonds,

mais l'autorité de tutelle varie d'un pays à l'autre : ministère de

l'éducation, ministère des affaires religieuses ou autre ministère. E u

égard au rôle efficace que peut jouer la gestion moderne dans le

développement de ces établissements, il faudrait mette en place une

structure administrative souple assurant la communication entre ces

établissements eux-mêmes , mais aussi entre eux et les établissements

d'enseignement publics. Ainsi l'administration scolaire jouerait un

rôle tangible dans la vie des élèves, leur relation avec le maître et

les rapports entre l'école et la société qui l'entoure. Elle permettrait

Seminaire regional d'experts sur les écoles coraniques

d'autre part d'introduire des registres d'inscription et des moyens de

suivi, d'évaluation et de protection sanitaire et sociale dans ces

établissements.

6) E n matière de rénovation et de modernisation

Bien qu'il y ait eu de multiples tentatives de rénovation et de

modernisation des écoles coraniques qui ont donné naissance à de

nombreux modèles dans tout le m o n d e islamique, l'école coranique

traditionnelle n'a pas changé : on a assisté à un ressourcement de

l'école moderne plutôt qu'à la modernisation de l'école coranique. L a

rénovation porte nécessairement sur les fonctions assignées à l'école

coranique, ce qui veut dire qu'elle doit changer l'école coranique de

l'intérieur et englober le programme, les fonctions et les méthodes

ainsi que le maître. Il faut que la société, les maîtres des écoles

coraniques et leurs responsables participent au processus de

rénovation et de modernisation, dans le cadre d'une stratégie nationale

à long terme tenant compte de la vision prospective de l'éducation

et des besoins du pays en matière de développement et de culture.

7) E n matière de coopération régionale et internationale

L'école coranique, sous ses différentes formes, constitue le plus grand

dénominateur c o m m u n des pays islamiques : toutes les écoles

coraniques ont le m ê m e enracinement dans la société islamique.

Étant donné le grand potentiel qu'offrent ces établissements en matière

de développement de l'éducation et de généralisation de l'éducation

de base, la coopération entre les pays islamiques sur une base

bilatérale et dans le cadre des organisations régionales aidera ces

établissements à remplir leurs fonctions et enrichira l'expérience de

ces pays grâce à l'échange. V u que ces établissements s'emploient à

généraliser l'éducation de base, ils méritent d'être pris en considération

dans le cadre du suivi des décisions de la Conférence mondiale sur

l'éducation pour tous (Jomtien, Thaïlande, mars 1990). Aussi les pays

islamiques doivent-ils s'efforcer d'instaurer une coopération entre eux

et avec les organisations internationales qui se sont engagées à

soutenir les efforts de tous les Etats en matière de généralisation de

l'éducation de base, notamment l ' U N E S C O , l 'UNICEF, le P N U D et

la Banque mondiale.

D) RECOMMANDATIONS

I. Préambule

Considérant la spécificité des méthodes et du programme de l'école

coranique, qui transcende les cloisonnements d'âge et de temps, est

peu coûteuse, repose sur un maître unique et assure une bonne

formation sociale,

convaincus que l'école coranique, sous les diverses formes qu'elle

revêt dans le m o n d e islamique, est à m ê m e de répondre aux besoins'

de la société et des élèves si elle dispose des ressources humaines

et des moyens techniques nécessaires,

soucieux de développer et de rénover l'école coranique pour qu'elle

remplisse ses fonctions essentielles en tant que source de

connaissance, de foi, de culte et de comportement correct,

désireux de lui permettre de se doter de nouvelles fonctions que peut

dicter l'évolution de la société,

considérant que l'école coranique est profondément enracinée dans

les sociétés islamiques, c o m m e l'atteste leur grand succès auprès des

enfants, notamment des filles, mais aussi des femmes dans les villes

et les campagnes,

reconnaissant le rôle que joue l'école coranique dans la généralisation

de l'éducation de base des enfants et des adultes, pour un coût modeste

adapté à la situation économique des pays en développement,

considérant que cette éducation doit être authentique et liée à la

culture et aux besoins spirituels et matériels de la société,

les participants, après avoir étudié les divers types d'écoles coraniques

des pays islamiques représentés, ont formulé les recommandations

suivantes :

25

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

II. Recommandations générales

Les participants estiment que la rénovation et le développement des khalwa et autres écoles coraniques ne remettent pas en cause leur rôle spirituel ou éducatif traditionnel qui doit être préservé, mais visent à leur permettre de répondre aux exigences de leur temps, de servir d'exemple pour la rationalisation des dépenses, de diffuser l'éducation permanente et de transmettre les valeurs et les compétences d'une génération à l'autre. Par ailleurs, ces établissements jouent un rôle important dans les campagnes en contribuant à fixer les populations et à limiter l'exode rural. Ils peuvent promouvoir l'hygiène et la santé, en donnant l'exemple, ainsi que des comportements sociaux sains. Dans les villes, leur rôle consiste à créer des oasis spirituelles qui apprennent aux jeunes les préceptes de la religion, la leur fassent aimer et diffusent ses principes et ses pratiques ; quant aux adultes, ils y trouvent un lieu où ils se réunissent et peuvent parfaire leur connaissance de la religion.

III. Recommandations aux États membres

Politique, mobilisation et planification

Les participants recommandent aux États membres d'adopter une politique claire en vue d'un enseignement authentique, de considérer l'école coranique comme faisant partie intégrante de l'éducation de base et de considérer celle-ci comme un élément de la planification du développement global.

Ils leur recommandent en outre de mener une campagne de mobilisation en vue de la mise en œuvre de la présente recommandation et de redonner aux écoles et établissements coraniques la place qui leur revient dans le système éducatif.

Administration

Les participants recommandent aux ministères de l'éducation et aux autres ministères compétents de créer des administrations responsables des écoles coraniques et de mettre en place dans chaque école un conseil des parents d'élèves chargé de représenter la société et les familles des élèves et d'aider les écoles moralement, matériellement et sur le plan de la santé.

26

D) Recommandations

Programme

Il appartient à chaque État d'élaborer un programme pour ses écoles coraniques conformément à sa situation et à ses traditions, mais en tenant compte des principes ci-après :

1. Veiller à l'articulation entre les matières religieuses et les matières scientifiques contemporaines de manière à faire de l'école coranique un modèle d'authencité et de modernité.

2. Moderniser les programmes en faisant en sorte que l'éducation des plus jeunes soit centrée sur le Coran (écriture, apprentissage, calligraphie et psalmodie) et sur les principes des sciences religieuses, et en introduisant progressivement les différentes connaissances dans les cycles appropriés mais sans que l'école perde de vue sa fonction essentielle qui est de faire apprendre le Coran, la dernière étape étant celle qui consiste à préparer l'élève à poursuivre ses études dans les établissements supérieurs et les universités.

3. Elaborer un programme spécifique pour les minorités musulmanes, minorités ethniques ou encore groupes défavorisés ou marginalisés, programme qui s'adressera également aux parents.

4 . Préparer un programme spécial pour les élèves confrontés à des difficultés scolaires.

5. Elaboration par l'école d'un p r o g r a m m e d'enseignement complémentaire destiné aux ouvriers, aux paysans, aux fonctionnaires et aux parents d'élèves.

6. Veiller à l'évaluation et à l'amélioration du programme en cours d'application.

Le maître

Les participants recommandent d'accorder au maître d'école coranique un statut particulier qui lui permette de remplir sa fonction de guide spirituel dans la société, vu qu'il est un des guides de son développement, et aussi lui garantisse une rémunération décente ainsi que le droit d'occuper d'autres postes. Aussi recommandent-ils de :

1. Donner à cet enseignant une formation qui lui permette d'employer les méthodes et moyens didactiques modernes et de façonner une personnalité musulmane harmonieuse.

2. Introduire dans les écoles normales des programmes spéciaux à l'inten­tion de ceux qui administrent les écoles coraniques et y enseignent.

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

3. Former les maîtres à initier les élèves à l'auto-instruction et à l'éducation permanente, et les former à dispenser une éducation spécifique aux populations rurales et nomades, par exemple.

4 . Apprendre aux maîtres à développer l'esprit de travail collectif chez leurs élèves et à leur donner l'occasion d'effectuer certains travaux manuels en rapport avec leur vie quotidienne.

5. Former les maîtres à éduquer les enfants en s'appuyant sur leur autorité spirituelle et morale, sans administrer de châtiments corporels.

IV. Recommandations à l 'UNESCO, à l'UNICEF, aux organisations arabes et islamiques et aux organisations non arabes

1. Aider à établir la documentation du séminaire (communications présentées, débats, visites sur le terrain) de sorte que cette documentation constitue le noyau d'une banque de données sur l'éducation de base; les organisations pourraient fournir une assistance technique, et peut-être rechercher des financements pour la mise en œuvre de la présente recommandation.

2. Aider les États islamiques à créer un organisme spécialisé chargé d'étudier les écoles coraniques sous tous leurs aspects, de les superviser et de les conseiller afin de leur permettre de rester fidèles à leur mission première et de leur donner les moyens de se développer et de se moderniser eu égard aux besoins éducatifs et culturels des Etats islamiques.A cet organisme seraient rattachés un centre de recherche spécialisé dans l'éducation de base et un centre chargé de former les enseignants et les administrateurs en tenant compte des fonctions confiées à l'école coranique. Les participants recommandent que cet organisme ait son siège au Soudan vu le grand nombre d'écoles coraniques dans ce pays, où se trouvent aussi la première université coranique et l'Institut international d'enseignement de la langue arabe aux non-arabophones, et l'orientation islamique de l'État, garantie du soutien politique dont a besoin un tel organisme.

3. Les participants tiennent à exprimer leur reconnaissance à l ' U N E S C O pour les efforts qu'elle ne cesse de déployer en vue d'aider les pays islamiques à développer et moderniser les écoles coraniques. Ils invitent l ' U N E S C O , en coopération avec les organisations arabes et islamiques, à prévoir dans leur budget

D) Recommandations

ordinaire ou extraordinaire pour les années à venir des fonds pour des projets de coopération avec les Etats membres en matière d'éducation traditionnelle, et demandent aux organisations internationales de renforcer leurs services spécialisés dans ce domaine ou d'en créer.

4 . Les participants demandent aux organisations non gouvernemen­tales de convoquer une conférence mondiale sur le concept d'éducation traditionnelle en tant que moyen d'échange culturel au plan international.

5. Les participants sont reconnaissants à l 'UNICEF de l'intérêt qu'il a porté au séminaire et lui demandent de contribuer à l'action visant à accroître le nombre des filles dans les écoles coraniques. Ils recommandent à l 'UNICEF de coopérer avec les États membres dans le domaine de l'éducation élémentaire et de fournir une assistance sanitaire en matière de santé et de nutrition ainsi que de promouvoir l'éducation sanitaire dans les établissements. Us lui recommandent en outre de coopérer avec les États membres dans le domaine de l'enseignement professionnel en les aidant à créer des écoles coraniques et à leur fournir les matériels et les moyens dont elles ont besoin.

6. Les organisations internationales, arabes et islamiques sont invitées à échanger les expériences et à organiser des missions conjointes.

7. Les participants demandent aux organisations arabes et islamiques de poursuivre les recherches sur l'utilisation des caractères arabes pour transcrire les langues nationales de certains pays d'Afrique et de publier les conclusions de ces études.

8. Les participants demandent aux organisations arabes et islamiques de contribuer à l'élaboration, à la production et à la fourniture de manuels spécialisés et des matériels didactiques et équipements nécessaires.

9. Les organisations internationales ayant participé à la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous (Jomtien, mars 1990) sont invitées à considérer les écoles coraniques c o m m e faisant partie intégrante du système d'enseignement général dans les États islamiques et c o m m e un outil efficace pour généraliser l'enseignement. Les participants leur demandent d'aider les États islamiques à élaborer et à financer des projets éducatifs visant à moderniser et développer les écoles coraniques conformément à leurs politiques en matière d'éducation.

ANNEXES

1. Liste des participants

2. Programme des travaux

3. Allocutions

a) Allocution du représentant de l ' U N E S C O

b) Allocution du représentant de l ' A L E C S O

c) Allocution du représentant de l 'ISESCO

d) Allocution du Ministre de l'éducation président de la commission nationale soudanaise pour l ' U N E S C O

4 . Objectifs du séminaire

5. Thèmes centraux du séminaire

6. Liste des documents

31

Annexe 1

LISTE DES PARTICIPANTS

A)

M.Zamakhshari Dhafer

M . Youssef Adam

M . Idris Diara

M . Fadjiji Kounit

M . Baba Ould Taleb Ahmed

M . Khatiri Ould Hamed

M . Loutf Mahirali

Mme.Safiya Said

B) Soudan

1. M . Ahmed Ali-Imam

2. M . Bachir al-Bakri

3. M . Hassan Ahmed Youssef

4. M . Taha Ahmed al-Makachfi

5. M . Abdelbasit Abdelmajid

6. M . Aoun al-Charif Qasim

7. M . Moubarak Qismallah

8. M . Mohamed Sharif Fadl

9. M . Youssef Al-Khalifa Aboubakr

Indonésie

Tchad

Mali

Mali

Mauritanie

Mauritanie

Fondation Aga Khan

Fondation Aga Khan

10. M . Youssef Badri

Recteur de l'Université du Coran

Président du Conseil d'administration de la Banque nationale soudanaise

Éducateur

Ministère de la santé

Ministère de l'éducation

Institut de la langue arabe pour non-arabophones

Organisation de l'appel islamique

Ministère de l'éducation

Institut d'enseignement de la langue arabe aux non-arabophones

Université Al-Ahfad pour jeunes filles

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

C) U N E S C O

U . M . Abdelwahid Abdalla Yousif chef de la section de l'alphabétisation et de l'éducation des adultes.

D) Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture ( I S E S C O )

12. M . Gabr Mustafa Aboul Naga

E) Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science ( A L E C S O )

13. M . A o u n al-Charif Qasim

F) UNICEF

14. M . Famikou Hakoumi

Bureau

M . Hassan A h m e d Youssef M m e . Safiya Saïd M . Idriss Diara M . A o u n al-Charif Qasim M . Zamakhshari Zafer

Comité de rédaction

M . Hassan A h m e d Youssef M m e . Safiya Saïd M . A o u n al-Charif Qasim M . Zamakhshari Dhafer M . Bachir al-Bakri M . Abdelwahid Abdalla Yousif M . Khatiri Ould H a m e d M . Idris Diara

Supervision

1. M . Abdelwahid Abdalla Yousif 2 . M . Youssef Abdallah al-Maghribi 3. M . Moubarak Yahya Abbas

Secrétariat

1. M . Ali Youssef Ali 2 . M.Ibrahim Slimane Al-Dsis 3. Mlle Iqbal Haj A b o u Jabr

Responsable du programme d'éducation

Président Vice -p residen te Vice-président Rapporteur Rapporteur adjoint

Annexe 2

PROGRAMME DES TRAVAUX

Première journée : Jeudi 21/1/1993

9h Séance d'ouverture

1 Oh Pause

llh — llh30 Election du Bureau (Président, vice-présidents,

rapporteur, rapporteurs adjoints)

1 lh30 - 12hl2 Adoption de l'ordre du jour

12hl2 - 12h30 Présentation des objectifs du séminaire

et de la méthode de travail

12h30 - 13h30 L a khalwa - pilier de l'enseignement général au Soudan (étude réalisée et présentée par M . A o u n al-Charif Qas im)

17h - 19h30 Présentation des études nationales (une demi-heure par étude)

D e u x i è m e journée : Vendredi 22/1/1993

8h30 - 10h30 Présentation des études nationales (suite) et des études réalisées par les organisations : - Tchad - ISESCO - ALECSO - Fondation A g a K h a n

10h30 - llh Pause

llh - 12h30 Débat général

35

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

Troisième journée : Samedi 23/1/1993

llh - 12h30

8h30 - 14h

(avec pause)

Séance de

l'après-midi

Débat général

Débat sur les thèmes centraux du séminaire :

1. Politique générale des écoles coraniques

2. Planification (éducation et développement)

3. Programme et aspects de son développement

4. Formation des enseignants

5. Administration

6. Développement et modernisation des

écoles coraniques

7. Propositions concernant la coopération

régionale et internationale

Élaboration du projet de rapport final

Quatrième journée : Dimanche 24/1/1993

8h — 12h Impression du rapport final

12h - 13h30 Présentation du rapport final et

clôture des travaux

36

Annexe 3(a)

ALLOCUTION DU REPRÉSENTANT DE L'UNESCO,

M . ABDELWAHID ABDALLA YOUSIF

Au nom de Dieu Clément et Miséricordieux

«Lis au nom de ton Seigneur qui a créé»

Monsieur le Ministre de l'éducation,

Messieurs les représentants de l'Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture, de l'Organisation arabe pour l'éducation, la culture et la science et de la Fondation A g a Khan,

Mesdames et Messieurs les participants au séminaire,

Messieurs les membres de la délégation de la République arabe syrienne,

chers hôtes,

Je voudrais d'abord vous saluer au n o m du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture ( U N E S C O ) et exprimer toute m a gratitude au Ministre de l'éducation du Soudan qui a pris la généreuse initiative d'accueillir ce séminaire et a fait le nécessaire pour qu'il se tienne dans de bonnes conditions, et aussi remercier ses collaborateurs au Ministère et tout particulièrement le secrétariat de la Commission nationale pour l'éducation, la science et la culture, des efforts méritoires qu'ils ont faits pour préparer ce séminaire.

A u n o m de l ' U N E S C O , je souhaite la bienvenue à tous les participants, qu'ils viennent du Soudan ou des autres pays islamiques représentés — Indonésie, Pakistan, Mali, Tchad, Mauritanie — ou encore qu'ils représentent l ' A L E C S O et l'ISESCO ou la Fondation A g a Khan. Ils sont venus de loin nous faire part de l'expérience de leur pays respectifs en matière d'écoles coraniques. Le thème de ce séminaire revêt un intérêt majeur pour l ' U N E S C O , qui s'efforce en permanence

37

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

d'appuyer l'action des États membres visant à généraliser l'éducation

de base, considérée c o m m e l'un des droits naturels de l'être

h u m a i n . L ' U N E S C O est convaincue que les établissements éducatifs

traditionnels tels que les écoles coraniques jouent un rôle efficace

dans l'édification d'une société instruite, pourvu qu'ils bénéficient du

cadre éducatif et scientifique approprié. C e sont des établissements

uniques en leur genre, sans équivalent dans aucune autre religion ou

civilisation, par leurs objectifs, leurs méthodes, leurs liens avec la

société et leur accord avec son évolution culturelle et sociale. Il

incombe donc au m o n d e islamique de s'efforcer de mettre ces

établissements uniques et originaux au service de ses grands objectifs

éducatifs et en particulier de la généralisation de l'éducation de base

chez les enfants et de l'alphabétisation des adolescents et des adultes.

E n effet, le m o n d e islamique compte aujourd'hui plus de 60 millions

d'enfants, dont plus d'une bonne moitié de filles, qui sont privés

d'enseignement primaire.

Plus de la moitié de la population du m o n d e islamique est analphabète,

et plus du tiers des adultes du m o n d e islamique ne peuvent accéder

à l'imprimé et acquérir les compétences et les techniques nouvelles

susceptibles d'améliorer leur qualité de vie et de les aider à s'adapter

au changement social et culturel.

E n outre, des millions d'enfants musulmans ne parviennent pas au

terme des programmes d'éducation de base et beaucoup de ceux qui

sont scolarisés n'acquièrent pas les connaissances et les compétences

élémentaires.

Simultanément, le m o n d e islamique est confronté à des problèmes

préoccupants : accroissement de la charge de la dette, risques de

stagnation et de récession économique, démographie galopante,

aggravation des disparités économiques entre les pays islamiques et

à l'intérieur de ces pays, guerres, occupation, affrontements internes,

mort de centaines de milliers d'enfants, alors qu'avec l'aide de Dieu

on pourrait se prémunir contre leurs causes.

Nous s o m m e s donc en présence d'un cercle vicieux : tous ces

problèmes entravent les efforts déployés pour répondre aux besoins

d'éducation de base tandis que le fait qu'une part importante de la

population ne peut accéder à l'éducation de base empêche les sociétés

islamiques de s'attaquer vigoureusement et résolument à ces

problèmes et affaiblit leur capacité de surmonter leurs contradictions

culturelles pour réussir à moderniser et développer leur patrimoine

sous tous ses aspects, notamment l'enseignement. Certes, ce sont les

38

Annexe

mesures prises par chaque pays qui déterminent les progrès accomplis pour ce qui est de satisfaire les besoins de l'éducation de base pour tous, mais de grands dénominateurs c o m m u n s entre les pays islamiques, dont les écoles coraniques représentent un des plus forts, rendent nécessaire la coopération entre ces pays pour développer et moderniser ces écoles.

C'est la raison pour laquelle l ' U N E S C O a jugé utile de réunir, en coopération avec le Ministère soudanais de l'éducation, ces éminents spécialistes soudanais, indonésiens, pakistanais, maliens, tchadiens et mauritaniens ou appartenant à l 'ISESCO et à l ' A L E C S O , afin qu'ils échangent leurs vues sur l'école coranique idéale, de sorte que cette vénérable institution puisse contribuer efficacement à répondre, au seuil du X X I e siècle, aux besoins éducatifs fondamentaux de l'être humain, qui comprennent les moyens d'apprentissage de base que sont la lecture, l'écriture, l'expression orale et la résolution des problèmes, mais aussi les contenus fondamentaux de l'apprentissage — connaissances, qualifications, valeurs et attitudes indispensables pour survivre, développer l'ensemble de ses capacités, travailler dans des conditions décentes, contribuer efficacement au développement, améliorer sa qualité de vie, prendre les bonnes décisions et apprendre toute sa vie durant, du berceau au tombeau, c o m m e le prescrit l'islam.

Je sais bien que parler de rénover et de développer les écoles coraniques, c'est susciter chez certains appréhension, méfiance, voire hostilité. Je sais aussi que le processus de rénovation est épineux et semé d'embûches, m ê m e lorsqu'il porte sur des établissements éducatifs modernes. Q u e dire alors d'une institution aussi profondément enracinée dans le patrimoine et dans le psychisme! J'estime pourtant que la rénovation et le développement répondent aux exigences du présent ; mais cela ne signifie en aucun cas que les écoles coraniques doivent renoncer à leur mission fondamentale qui est l'enseignement et l'apprentissage du Coran.

Rénovation et développement seraient sans doute moins difficiles si les États s'y attelaient dans le cadre d'une stratégie nationale globale. E n effet, les besoins éducatifs fondamentaux des enfants, des adolescents et des adultes sont très divers. O n doit donc y répondre par un grand nombre de systèmes différents. A cet égard, nous estimons que la stratégie actuellement suivie par le Soudan est un bon exemple en ce qu'elle offre une solution à ce problème : au Soudan, la khalwa fait désormais partie intégrante du système éducatif et c'est là l'essentiel. Voilà pourquoi nous avons choisi de nous réunir dans ce pays.

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

Nous avons également choisi le Soudan parce que les écoles coraniques y ont une histoire longue, riche et diversifiée, parce que les ulémas soudanais n'ont jamais cessé d'apporter une contribution intellectuelle d'avant-garde dans le domaine de l'éducation islamique et, enfin et surtout, parce que la khalwa dégage un surprenant charme que seul connaît celui dont les mains gardent le souvenir parfumé du «tib», qui a humecté de ses lèvres l'éponge et dont l'ardoise a été décorée de la «sharafa», celui dont les oreilles ont été bercées par le chant de voisins psalmodiant le Coran jusqu'au point du jour, en une mélopée unique.

U n m o n d e admirablement restitué par le grand poète soudanais, le grand artiste créateur, M u h a m m a d Al-Mahdi Majdhoub, dans l'avant-propos de son recueil «As-sharafa wal-hijra». O n y voit le cheikh, assis sur une peau de bête, vénérable et tranquille, dessinant artistiquement la «sharafa» sur les ardoises. Suprême récompense, m o m e n t hautement symbolique dont les élèves méritants garderont toute leur vie la mémoire. L e poète, Dieu ait son â m e , a dépeint de façon inoubliable l'atmosphère qui baigne la khalwa le jour de la Fête, avec ses murs tapissés d'ardoises ornées.

«Celui qui regarde, dit Al-Majdhoub, ne voit ni murs ni ardoises, mais les lumières, colorées et austères, accrochées dans l'ombre qui s'étire...»

«Cette atmosphère de musique et de couleurs a laissé dans m o n â m e une marque ineffaçable. Je ressentais une joie retenue, une passion innocente pour une vie pure et bonne, de couleurs, de lumières et d'inspiration. L e maître apportait le plus grand soin à son travail car Dieu aime ceux qui accomplissent bien leur tâche. Il savait l'influence bienfaisante de son savoir sur l'âme de ses élèves. Patient et reconnaissant, il n'hésitait pas à sortir avec eux pour les aider aux semailles lorsque le Nil était en crue, arrosant la vallée». Voilà, M e s d a m e s et Messieurs, l'école coranique que nous voulons : connaissances, compétences et talents. Dieu garde l'âme d'Al-Majdhoub en son infinie bonté.

Dieu nous guide vers le bien de notre nation islamique. Q u e la paix et la miséricorde de Dieu soient sur vous.

Annexe 3(b)

ALLOCUTION DU REPRÉSENTANT DE L'ALECSO,

M . AOUN AL-CHARIF QASIM

Au nom de Dieu Clément et Miséricordieux

Louanges à Dieu qui a révélé un Coran dans une langue arabe sans

défaut pour guider les hommes et leur donner des signes manifestes

et des preuves ! Que la paix soit sur notre maître et prophète

Muhammad, qui a dit : «la langue arabe n'est ni le père ni la mère

de quiconque parmi vous. Elle est une langue et celui qui la parle

est Arabe ou ce qu'il dit être».

Monsieur le Ministre de l'éducation,

Monsieur le représentant de l 'UNESCO,

Mesdames et Messieurs les participants au séminaire,

chers hôtes,

Que la paix et la miséricorde de Dieu soient sur vous !

J'aimerais tout d'abord vous transmettre les salutations du Directeur

général de l 'ALECSO, M . M u h a m m a d Al-Mili, et ses vœux de succès.

dans vos efforts pour parvenir à un modèle d'école coranique ouverte

à la modernisation et capable d'élargir sa mission éducative et

d'affermir son authenticité afin de jouer un rôle plus efficace dans

la généralisation de l'éducation de base et l'alphabétisation.

Ce séminaire, organisé à l'initiative de l 'UNESCO en coopération avec la Commission nationale soudanaise pour l'éducation, la science et la culture, revêt d'autant plus d'importance qu'il s'inscrit dans le cadre de l'action internationale pour généraliser l'éducation de base d'ici à l'an 2000. Alors qu'il ne nous reste que sept ans pour atteindre

Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

ce grand objectif, l'école coranique, sous les diverses appellations qui lui ont été données dans toutes les régions du m o n d e arabo-islamique, constitue le pilier de nos efforts c o m m u n s pour atteindre ce but. Il est clair que les efforts faits depuis cent ans pour propager l'éducation de base dans notre m o n d e arabo-islamique, soit par les puissances étrangères soit par les régimes nationaux qui leur ont succédé, n'ont touché qu'une proportion limitée de nos enfants. L'analphabétisme s'aggrave considérablement dans nos pays arabes et islamiques qui sont, d'après les critères internationaux, à la traîne des nations, eux à qui s'adressait le premier mot révélé du Coran : «Lis».

L a raison de ce déséquilibre est que Yumma islamique a été coupée de son système éducatif et que d'autres systèmes ont été mis au point dans le but de lier les gens instruits à la culture occidentale, d'où la nécessité de réduire la place de la culture nationale arabo-islamique dans leur esprit et dans leur vie. Il en est résulté une dualité dans l'enseignement, l'État se préoccupant des écoles laïques et laissant les écoles coraniques aux soins et à la bonne volonté des citoyens. Si les colonisateurs ont pu négliger les écoles coraniques, c'est parce que celles-ci n'étaient plus qu'une infime partie du système éducatif islamique qui précédemment, à côté de l'apprentissage du Coran et de la jurisprudence (fiqh), enseignait tout un ensemble de connaissances religieuses et séculières. A u fil des siècles, ce système a périclité et il n'en est resté que le strict m i n i m u m , ce dont le musulman ne saurait se passer : le Coran. U n e évolution qui illustre la situation culturelle du m o n d e islamique, dont le système éducatif s'est dépouillé de tout ce qui, autrefois, étayait les études coraniques et juridiques : connaissances linguistiques, sciences naturelles et humaines, mathématiques, géographie, histoire, philosophie, physique, astronomie, géométrie, médecine, etc.

Vers le milieu du siècle dernier, le m o n d e arabo-islamique avait entrepris, au contact de l'Occident, de faire le lien entre son passé et son présent et de rendre à son système éducatif la cohésion perdue entre les connaissances religieuses et les connaissances séculières, mais l'assaut colonialiste a fait avorter cette tentative ; il l'a empêché de fonder sa renaissance sur son système éducatif traditionnel, qu'il a remplacé par un système dont nous voyons encore les traces dans notre vie aujourd'hui.

L a solution de fond à la crise de l'éducation que nous traversons consiste à achever le travail c o m m e n c é par nos ancêtres il y a cent cinquante ans, en reliant notre système coranique à notre système

Annexe

éducatif général, c o m m e l'on fait les musulmans à toutes les époques. Il faut bien reconnaître malheureusement que dans l'ensemble, on a souvent intégré le système coranique dans le système moderne selon l'approche occidentale et non selon l'approche islamique, laquelle suppose que soit préservée la mission fondamentale de l'école coranique consistant à faire apprendre le Coran et que l'expérience acquise par la société musulmane à partir de ce rôle coranique fondamental permette à l'élève musulman d'accéder - c o m m e ses prédécesseurs — à toutes les connaissances actuelles.

Cette tâche est sans doute l'objectif central de notre séminaire. L ' A L E C S O a voulu , depuis sa création en 1970, en faire l'axe principal de son activité de diffusion de la langue arabe en particulier et de la culture arabo-islamique en général. C'est pourquoi nous avons consacré de nombreuses activités aux écoles coraniques. J'évoquerai ici deux projets majeurs que nous avons lancés dans ce domaine :

1 ) L e projet de «développement des contributions des établissements d'enseignement religieux traditionnels dans le cadre de la lutte globale contre l'analphabétisme» : ce projet a commencé en 1980 par une étude d'ensemble de ces établissements coraniques dans un certain nombre de pays arabes, dont le Soudan. Il est maintenant achevé et ses conclusions, qui ont été publiées, constituent sans conteste un réel apport aux travaux de ce séminaire.

2) Le second projet entrepris dans ce domaine par l ' A L E C S O porte sur le programme des études coraniques et sa mise à profit dans l'éducation de base. L ' A L E C S O a effectué une vaste étude de ce programme dans plusieurs pays arabes et en a tiré un programme d'enseignement général intitulé, dans ses documents «Projet Lis au N o m de ton Seigneur !» C e projet a donné lieu à la production d'un manuel qui utilise le Coran c o m m e moyen d'enseignement de la langue arabe. Nous sommes heureux de rappeler que le Soudan a été le premier pays arabe à faire l'expérience de ce projet, puisque l ' A L E C S O y a organisé un stage de formation destiné à une centaine de maîtres de khalwa, en coopération avec la province de l'Est, dans la ville de Kassala, il y a deux mois (21 novembre 1992). A cette occasion, les experts de l ' A L E C S O ont familiarisé les maîtres avec la méthode «Lis» et l'Organisation espère étendre cette expérience au reste du monde arabe. Nous nous félicitons de voir ainsi l'action de l ' A L E C S O soutenir vos propres travaux dans le cadre de ce séminaire.

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

Pour conclure, je voudrais, au n o m de l ' A L E C S O , exprimer m a gratitude et m o n estime à l ' U N E S C O , au Ministère soudanais de l'éducation, à la Commission nationale soudanaise pour l'éducation, la science et la culture et aux personnes et institutions qui participent à ce séminaire, en souhaitant à tous plein succès.

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Annexe 3(c)

ALLOCUTION DU REPRÉSENTANT DE L'ISESCO M . GABR MOUSSA ABOUL NAGA

Au nom de Dieu Clément et Miséricordieux

Monsieur le Ministre de l'éducation,

Monsieur le représentant de l ' U N E S C O ,

Monsieur le Secrétaire général de la Commission nationale soudanaise pour l'éducation, la science et la culture,

Mesdames et Messieurs les représentants des délégations,

Mesdames et Messieurs les ambassadeurs et les représentants des

missions diplomatiques,

C'est avec une très grande joie que je prends la parole devant cette auguste assemblée. A u n o m du Directeur général de l'ISESCO, M . Abdelaziz bin Othman al-Twaijri, j'ai l'honneur de vous souhaiter le plus grand succès dans cette rencontre régionale. Je prie le Très-Haut pour qu'il entoure vos travaux de Sa bienveillance.

Mesdames et Messieurs,

Dieu a voulu que l'ISESCO impose son existence dans un monde multiculturel, et m ê m e un monde où les cultures fusionnent ; on ne peut voir dans cela qu'une grâce du Très-Haut et le résultat des efforts consentis par les croyants de la communauté de M u h a m m a d — qu'il soit béni - à quelque pays qu'ils appartiennent. La République du Soudan a d'ailleurs été l'un des premiers pays islamiques à soutenir l'action de l'ISESCO dans ses domaines de compétence. J'aimerais saisir cette heureuse occasion d'exprimer m a profonde gratitude à l ' U N E S C O , représentée par son bureau régional, pour nous avoir conviés à un tel événement. Notre reconnaissance sincère va également au Ministère soudanais de l'éducation qui n'a pas ménagé

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

ses efforts pour nous accueillir. Cette invitation ne fait d'ailleurs que confirmer les liens, anciens et profonds, entre l 'ISESCO et l ' U N E S C O , de m ê m e que la convergence de nos domaines de compétence respectifs témoigne, s'il le fallait, de l'intérêt que portent nos deux organisations aux besoins de nos peuples dans le m o n d e arabo-islamique et de leur c o m m u n e sensibilisation à ces besoins.

E n participant à cette réunion régionale sur les écoles coraniques dans ce pays hospitalier, l ' ISESCO entend montrer l'importance particulière qu'elle accorde à ce sujet, et dont témoigne l'inclusion de ce sujet dans ses plans triennaux successifs depuis sa fondation . Dans ce domaine l ' ISESCO a une philosophie particulière dont elle vous fera part à travers une étude effectuée en collaboration avec son représentant à cette réunion. Enfin, j'aimerais réitérer m e s remerciements pour la généreuse invitation qui nous a été faite ; nous espérons qu'elle annonce une coopération fructueuse entre l ' U N E S C O et l ' ISESCO. E n l'occurence, je souhaiterais souligner toute l'importance des rapports entre nos deux organisations, en dépit de nos différences. Notre Prophète n'a-t-il pas dit de la diversité qu'elle était une bénédiction pour la communauté ?

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Annexe 3(d)

ALLOCUTION DE M . ABDEL BASIT SALEH SABDARAT

Ministre de l'éducation, Président de la Commission nationale pour l ' U N E S C O ,

lors de la séance d'ouverture du séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

Au nom de Dieu Clément et Miséricordieux

C'est pour moi un grand honneur et un grand plaisir d'assister à votre auguste assemblée, qui réunit une élite de spécialistes islamiques de l'éducation. Les uns résident ici, les autres sont venus de loin dans leur seconde patrie, le Soudan, de pays où luit le soleil de l'islam afin de participer à ce séminaire, de l'enrichir de leurs expériences et de leurs recherches. Je m e réjouis de l'occasion qui m'est donnée de m'adresser à vous à cette séance d'ouverture et de vous souhaiter la bienvenue au n o m du Soudan, de son gouvernement et de son peuple. E n leur n o m et en m o n n o m propre, je vous remercie d'avoir bien voulu accepter l'invitation.

J'aimerais également exprimer toute m a gratitude à l ' U N E S C O , qui organise ce séminaire, pour sa contribution efficace et soutenue aux efforts déployés au Soudan en faveur de l'éducation, de la généralisation et de la rénovation de l'éducation de base des enfants et des adultes, qui constituent l'un des thèmes de ce séminaire. Je voudrais aussi dire combien nous apprécions le travail de son bureau régional pour les États arabes au Soudan.

Mesdames et Messieurs,

J'éprouve une grande satisfaction en constatant que la ville de Khartoum a été choisie pour accueillir ce séminaire, dont l'importance n'échappe pas à l'État, représenté ici par le Ministre de l'éducation. E n effet, le sujet qui nous réunit aujourd'hui est l'un des axes de notre orientation islamique, qui centre sur l'éducation en général et l'éducation religieuse et spirituelle en particulier l'édification de la société musulmane, où la khalwa joue un rôle important. La khalwa

Séminaire régional ifWcperts sur les écoles coraniques

occupe d'ailleurs une grande place dans le patrimoine islamique au Soudan. C'est à elle que revient le mérite d'avoir diffusé l'appel islamique et implanté la langue arabe dans notre peuple, ce qui nous a donné la force de résister aux tentatives du colonialisme pour effacer l'identité islamique et la civilisation arabe. L a khalwa a aussi conquis une place à la hauteur de sa mission et est devenue un élément à part entière du système éducatif et un ressort essentiel de la généralisation de l'éducation de base des enfants et des adultes. Elle est non pas une solution de fortune imposée par le manque de moyens, mais le choix de groupes sociaux qui continuent à préférer l'enseignement religieux. Pour lui permettre d'accomplir sa mission, des ponts ont été jetés entre elle et les autres établissements d'enseignement. Les possibilités d'admission et les filières ont été multipliées. E n outre, nou avons institué l'égalité des chances entre diplômés des khalwa qui ont appris le Coran et diplômés des universités pour les nominations à des postes de fonctionnaires.

Mesdames et Messieurs,

Q u e ce séminaire se tienne au Soudan est pour moi un grand sujet de fierté. Il vise en effet à renforcer, par votre intermédiaire, les liens qui nous unissent aux pays que vous représentez, car vous pouvez faire connaître à vos concitoyens les changements qu'a entraînés au Soudan la révolution du Salut dans la conscience des fils loyaux de cette nation. Cette révolution a été l'expression de la volonté du peuple soudanais, de son authentique orientation islamique et de son attachement à l'application de la Loi divine, en harmonie avec un sentiment national qui refuse la fragmentation et la discrimination. Je prie la direction de ce séminaire de permettre aux participants de s'informer des grands changements qui ont affecté le contenu m ê m e de la vie dans notre pays : un éveil islamique fondé sur la fraternité, la tolérance, la solidarité entre musulmans et non musulmans et la promotion des valeurs morales ; la construction des bases du développement qui a permis un bond de productivité dans l'agriculture et l'industrie grâce auquel la révolution a assuré la stabilité et la sécurité et garanti des moyens d'existence à tous les groupes sociaux victimes de la pauvreté ; la transformation de nos liens culturels et de nos contributions à l'humanité en un grand patrimoine susceptible de servir d'exemple aux pays voisins ; enfin l'enracinement politique fondé sur la consultation, le consensus et le rassemblement. E n matière d'enseignement, nous avons déclenché une révolution dont

Annexe

on n'aurait m ê m e pas pu se douter. Nous avons jeté des bases intellectuelles fécondes pour l'action et porteuses d'espérance, en vue de l'édification d'un présent plus décent et d'un avenir plus ouvert fondé sur l'Islam et la paix.

Mesdames et Messieurs,

Pour finir, je voudrais saisir cette occasion d'adresser tous mes remerciements à M . Abdelwahid Abdalla Yousif, représentant du Directeur général de l ' U N E S C O , en le priant de transmettre mes salutations au Directeur général de l ' U N E S C O , M . Federico Mayor. M e s remerciements vont aussi à l ' A L E C S O et à l 'ISESCO pour leur participation aux travaux de ce séminaire et le rôle qu'elles jouent aux côtés de l ' U N E S C O dans le renforcement de l'action éducative c o m m u n e et l'instauration d'une coopération internationale plus vaste. Je remercie aussi tous ceux qui nous ont honorés de leur présence en leur souhaitant plein succès dans ce grand travail scientifique auquel nous sommes associés et qui est centré sur un rééxamen d'ensemble de la mission et de la fonction de la khalwa au Soudan. Puissiez-vous passer le plus agréable des séjours à Khartoum. Q u e Dieu nous éclaire tous et bénisse notre action.

Annexe 4

OBJECTIFS DU SÉMINAIRE

I. Objectif general

L'objet général d u séminaire est de procéder à un échange d'informations et d'expériences sur les divers types d'écoles coraniques des pays islamiques participants.

II. Objectifs subsidiaires

1. Étudier des modèles d'écoles coraniques dans les Etats participants.

2 . Examiner les insuffisances et les points forts de ces écoles en tant qu'établissements éducatifs qui jouent un grand rôle dans la généralisation de l'éducation de base.

3 . Prendre connaissance des principaux éléments d'innovation dans les écoles coraniques, eu égard aux exigences de leur environnement social.

4 . Convenir d 'un modèle d'école coranique qui préserve la mission fondamentale de l'école - apprentissage du Coran, enseignement des principes de la religion m u s u l m a n e - tout en permettant aux élèves de s'initier à certaines sciences modernes qui les préparent à la vie pratique.

51

Annexe 5

THEMES CENTRAUX DU SÉMINAIRE

1. Politique générale en matière d'écoles coraniques

Il ressort des études présentées que les politiques des États participants en matière d'écoles coraniques diffèrent d'un État à un autre. Quels doivent-être les principaux fondements de ces politiques et comment est-il possible de les intégrer dans le cadre d'une politique générale de l'éducation ?

2. Planification

— L a planification de l'éducation englobe-t-elle les écoles coraniques ? Quelle place occupent-elles dans le plan national en matière d'éducation ? Quelle place occupent-elles dans le plan national de développement ?

— Quelle est la part des écoles coraniques dans les ressources consacrées à l'éducation ? C o m m e n t accroître leurs ressources par le travail productif ? Les contributions volontaires ?

3. Programme

Le programme général des écoles coraniques poursuit quatre objectifs :

a) enseignement de la lecture et de l'écriture ;

b) apprentissage du Coran ;

c) enseignement des bases authentiques de la religion islamique et formation des élèves à la prière ;

d) développement d'un esprit propice au travail collectif chez les élèves et possibilité pour eux d'effectuer certains travaux manuels en rapport avec leur vie scolaire.

A ces objectifs généraux, certaines écoles ajoutent d'autres matières pour répondre aux besoins socio-économiques. E n tout état de cause, l'apprentissage du Coran demeure l'objectif premier des écoles

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Séminaire régional d'experts sur les écoles coraniques

coraniques dans tous les États islamiques. Quelles que soient les matières que propose le programme, elles insistent toutes sur l'aspect théorique, sans accorder une place suffisante au développement des aptitudes pratiques.

- N e faudrait-il pas élaborer un nouveau programme qui, tout en conservant les objectifs actuels, favoriserait l'équilibre entre les connaissances théoriques et les aptitudes pratiques ?

- N e faudrait-il pas faire en sorte que les élèves des écoles coraniques, en particulier les plus âgés d'entre eux, aient raisonnablement accès à des matières devenues essentielles à notre époque telles que la science, la technologie, les mathématiques et les sciences de l'environnement ?

- C o m m e n t mettre à profit la souplesse qui permet actuellement aux élèves de passer d'une classe à une autre en fonction de leurs aptitudes intellectuelles ?

- N e faudrait-il pas ajouter quelques activités favorisant l'épanouissement des aptitudes personnelles de l'enfant (la créativité, le sens de l'initiative, la ténacité, la curiosité, les talents manuels, les relations sociales, les aptitudes artistiques et physiques, etc.) ?

- C o m m e n t construire un programme qui réponde aux besoins et aux aptitudes des divers groupes d'âge et des divers milieux géographiques ?

- C o m m e n t assurer une bonne transition entre l'école coranique et les cycles ultérieurs du système scolaire ?

4. Formation des enseignants

Rares sont les maîtres des écoles coraniques qui reçoivent la formation dont a besoin un enseignant à notre époque, bien que beaucoup possèdent des qualités pédagogiques et une mémoire remarquables, sans parler de leur droiture, de leur modestie et de la foi en leur mission.

- C o m m e n t pourrait être assurée cette formation ?

5. Administration

L a conception de l'administration présente des aspects de centralisation qui demanderaient à être clarifiés eu égard aux relations entre les écoles coraniques et telle ou telle direction ou tel ou tel

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Annexe

ministère, de façon à prévenir les conflits de compétences. A u niveau interne,.l'administration de l'école relève uniquement du cheikh (le maître) et de ses auxiliaires.

- C o m m e n t faire participer efficacement les parents et la communauté à l'administration de l'école ?

- Serait-il possible de créer une structure administrative regroupant un certain nombre d'écoles de chaque région, qui se verrait confier la responsabilité de l'organisation, du développement et du finacement de ces écoles ?

6. Rénovation et modernisation

- Les participants ont estimé que certains aspects de l'école coranique ont besoin d'être rénovés et développés pour répondre aux besoins de l'époque actuelle, sans que soit pour autant affectée la vocation fondamentale de ces écoles, à savoir l'apprentissage du Coran et l'enseignement des principes de l'Islam. Quels sont ces aspects et comment moderniser l'école coranique ?

- Les études présentées ont montré que tous les États islamiques participants ont à des degrés divers modernisé leurs écoles coraniques mais que des obstacles s'opposent à la généralisation de cette modernisation ; quels sont ces obstacles ?

7. Propositions de coopération

Il faudrait que les États islamiques coopèrent entre eux, d'une part, et avec les organisations régionales et internationales, d'autre part, afin de permettre aux écoles coraniques de participer efficacement à la généralisation de l'éducation de base, vu que la Conférence mondiale sur l'éducation pour tous (Jomtien, mars 1990) a adopté une vision large de l'éducation de base, accordé une importance particulière au rôle de l'éducation dans le développement économique et social et dans le changement social et souligné la nécessité de relier connaissances, aptitudes pratiques et valeurs afin de garantir à chacun un niveau de vie décent et la capacité de contribuer au développement de sa société.

Annexe 6

LISTE DES DOCUMENTS

1. «La khalwa, pilier de l'enseignement général au Soudan» (en arabe et en anglais) - Aoun al-Charif Qasim

2. «Le rôle des écoles coraniques dans la généralisation de l'éducation de base en Indonésie» (en arabe et en anglais) - Dhafer Zamakhshari

3. «Les écoles coraniques en Mauritanie» (en arabe) — Khatiri Ould H a m e d

4. «Les madrassa et les écoles coraniques au Mali» (en français, avec résumé en arabe)

5. «Le rôle des écoles de mosquée dans la généralisation de l'enseignement au Pakistan» (en arabe et en anglais) — Abdelaziz Khan

6. «Le projet coranique d'alphabétisation au Pakistan» (en anglais) - Anwar Farouk Yasadouzai

7. «Le rôle des écoles coraniques dans la généralisation de l'enseignement primaire au Tchad» (en français) — Youssef A d a m

8. «Les écoles coraniques au Yémen» (en arabe et en anglais) - A h m e d Naji A h m e d

9. «Le centre de formation d'institutrices» (en anglais) - Loutf Mahirali et Safiya Said

Imprimé par les ateliers de

VUNESCO, 1994