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Rabais sur la sécurité

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Page 1: Rabais sur la sécurité

(~ Masson, Paris. Ann Fr Anesth Reanim, 10 : 423-424, 1991 EDITORIAL

Rabais sur la s6curit6

Depuis des mois, le gouvernement a d6cid6, unilat6ralement et sans concertation, d'organiser la << maitrise des d6penses de sant6 >> et ceci en pre- nant Diverses Mesures d 'Ordre Sanitaire (DMOS) qui touchent ~ la lois l'hospitalisation publique et priv6e.

Apr6s avoir institu6 un budget global dans le Secteur Public qui a fait preuve d'inefficacit6 et de dysfonctionnement en entravant l'exercice des pra- ticiens qui, pour certains, d6courag6s, quittent les h6pitaux, les hauts fonctionnaires de l 'Etat se sont attaqu6s au Secteur Priv6. Un arrEt6 a donc 6t6 pris ~ la fin de l'ann6e 1990 concernant la r6mun6- ration des prix de journ6e pour la chirurgie ambu- latoire et des frais de salles d'op6ration (FSO) avec une s6rieuse r6vision ~ la baisse dans le seul souci de faire des 6conomies au d6triment de la qualit6 et de la s6curit6 des soins.

Quels sont les revenus d 'une clinique priv6e ? Son budget de fonctionnement provient pour l'es- sentiel d 'une part du << prix de journ6e >> couvrant les dEpenses d'h6tellerie et les soins infirmiers, et d 'autre part les frais de salles d'op6ration ou FSO qui r6mun6rent le plateau technique. Ces FSO sont repr6sent6s par la somme du coefficient chi- rurgical (Nomenclature G6n6rale des Actes Profes- sionnels, NGAP) multipli6e par une valeur uni- taire variable selon les r6gions.

L'augmentation d'activit6 des 6tablissements priv6s se situant au niveau des blocs op6ratoires, un arrEtE d u 28 d6cembre 1990 a affect6 automati- quement un coefficient r6ducteur sur t ous l e s FSO (chirurgicaux et anesth6siques). Aussit6t une lev6e de boucliers de la part de la majorit6 des repr6- sentants des 6tablissements priv6s a fait reculer le gouvernement, qui a annul6 cette d6cision et a r6agi en trouvant un syndicat non repr6sentatif de l 'ensemble de la profession de sant6 ~ savoir l 'Union de l 'Hospitalisation Priv6e (UHP) pour ratifier un protocole d'accord acceptant la diminu- tion de 40 % des FSO pour l'anesth6sie et unique- ment pour l'anesth6sie.

La lettre d 'accompagnement de l'arrEt6 stipule : << L'arrEt6 du 13 mai 1991, publi6 au JO du 17 mai 1991 est d'application imm6diate ~ compter du 19 mai 1991 >>. Ainsi, les Caisses R6gionales d'Assu- rance Maladie pour le calcul du compl6ment de salle d'op6ration affectent la cotation des actes d'anesthEsie d 'un coefficient correcteur 6gal ~t 3/5L Celui-ci s'applique h t ous l e s 6tablissements priv6s relevant de l'article L 162-22.

I1 ressort de ces nouvelles dispositions que le calcul du compl6ment afferent aux FSO se dEcom- pose donc en deux par t ies :

- - l 'une relative ~ la cotation des actes op6ra-

toires et donnant lieu ~t une r6mun6ration au taux plein,

- - l 'autre concernant la cotation des actes d'anesth6sie qui se trouve affect6e d'un coefficient correcteur de 3/5 e, minorant donc de 2/5 e la r6mun6ration de la salle d 'op6ration li6e h ces actes.

A titre d 'exemple, le calcul du compl6ment de salle d'op6ration peut 6tre d6compos6 comme suit :

- - valeur unitaire du FSO : 17,41 F, - - coefficient de l'acte op6ratoire ~ la N G A P :

K 50, - - coefficient de l 'acte d'anesth6sie h la

N G A P : K 25. Le compl6ment facturable et remboursable par

les Caisses ~ compter du 19 mai 1991, s'6tablit h : 17,41 F x K 50 = 860,50 F 17,41 F x (K 25 x 3/5 e) = 261,15 F soit un

compl6ment s'61evant h 1 131,65 F. Pourquoi pas 20 % des FSO chirurgicaux ou

12 % de la totalit6 ? Ce qui reviendrait au mEme. Non, << haro sur le baudet >>, c'est sur l'anesth6sie que doivent porter les Economies. Tout ceci au d6triment du plateau technique et de la s6curit6 des malades au bloc op6ratoire.

Le temps n'est pas si loin oO notre consultation 6tait m6pris6e et l 'anesth6sie de l 'appendicectomie avec ses dix jours de surveillance postop6ratoire honor6e comme la visite du m6decin traitant en salle d'op6ration. Dans le priv6, les anesth6sistes se sont battus h travers les syndicats et avec le soutien de leurs Maitres pour obtenir une IEgitime r6mun6ration ; ce combat a abouti en 1983 au CS et K 25 comme coefficient anesth6sique minimum au lieu de K 15.

A l 'H6pital, la r6forme des Etudes mEdicales et de l 'Internat a mis sur un pied d'6galit6 tous les sp6cialistes anesth6sistes ou chirurgiens. Dans le m6me temps sont apparus des appareils de surveil- lance de plus en plus performants et de plus en plus chers tandis que la r6glementation a impos6 les salles de r6veil, 616ments essentiels de la s6cu- rit6 postop6ratoire imm6diate. La salle de r6veil 6tant le prolongement du bloc op6ratoire, son financement tant en personnel qu 'en materiel se ferait ~ partir des FSO d'anesthEsie. Mais de nom- breuses directions de cliniques ne l 'entendaient pas de cette oreille et beaucoup d'Etablissements sont encore aujourd'hui d6pourvus de salles de r6veil dignes de ce nom, ce qui entraine des situations conflictuelles entre m6decins anesth6sistes et direc- tions, au d6triment de la plus 616mentaire s6curit6 des patients. Pourtant, les recommandations de la SFAR 6ditEes en juin 1989 pr6cisent : << Dans cer- tains 6tablissements, le manque de personnel et / ou de mat6riel ne permet pas h l 'heure actuelle le

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respect de l 'ensemble de ces recommandations. En pareil cas la SFAR recommande au m6decin anes- th6siste de l '6tablissement un plan permettant terme, et au plus tard le 1 er janvier 1993, la mise

disposition du personnel e t / ou du mat6riel re- quis ~.

Les m6decins anesth6sistes pensant trouver avec ces r6centes recommandations un argumentaire irr6futable pour obtenir enfin une dotation en mat6riel e t / ou en personnel, devront attendre des jours meilleurs. En effet, si en th6orie le gestion- naire d'6tablissement ne f a r pas d'affectation sp6- cifique des recettes, en pratique il sera difficile d 'obtenir des investissements pour le secteur anes- th6sique dans la mesure oO les ressources de cette sp6cialit6 sont en diminution de 40 %. L'aust6rit6 impose pour l 'anesth6sie un retour ~ la case d6par t : K 2 5 x 3/5 = K 1 5 . Moins 4 0 % sur les FSO d'anesth6sie c'est :

- - la d6valorisation de notre sp6cialit6, - - des menaces graves qui p6sent sur la s6curit6

des malades. Alors messieurs les Ministres, avez-vous le droit,

sous pr6texte de maltrise des d6penses de sant6 en g6n6ral, de jouer uniquement avec la s6curit6 anesth6sique des malades au bloc op6ratoire ?

A. BENICHOU Service d'Anesth6sie

Clinique Sainte-Marthe 15, rue du Minage

16007 Angoul6me Cedex

B . D o GRi~S

Pr6sident de la Soci6t6 Franqaise d'Anesth6sie et de R6animation