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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques Volume 40 · numéro 2 · février 2020 Indexée dans Index Medicus/MEDLINE, DOAJ, SciSearch® et Journal Citation Reports/Science Edition Promouvoir et protéger la santé des Canadiens grâce au leadership, aux partenariats, à l’innovation et aux interventions en matière de santé publique. — Agence de la santé publique du Canada Publication autorisée par le ministre de la Santé. © Sa Majesté la Reine du Chef du Canada, représentée par le ministre de la Santé, 2020 ISSN 2368-7398 Pub. 190451 [email protected] Also available in English under the title: Health Promotion and Chronic Disease Prevention in Canada: Research, Policy and Practice Les lignes directrices pour la présentation de manuscrits à la revue ainsi que les renseignements sur les types d’articles sont disponibles à la page : https://www.canada.ca /fr/sante-publique/services/rapports-publications/promotion-sante-prevention-maladies-chroniques-canada-recherche-politiques-pratiques/information-intention-auteurs.html Dans ce numéro 27 Recherche quantitative originale La paralysie cérébrale au Canada, 2011-2031 : résultats d’une étude de modélisation par microsimulation des répercussions épidémiologiques et économiques 41 Recherche originale par méthodes mixtes Dépistage obligatoire du VIH, migration et stigmatisation liée au VIH au Canada : analyse de l’expérience d’immigrants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH dans l’Ouest canadien 51 Recherche quantitative originale Utilisation d’une échelle d’intervention pour analyser le soutien à d’éventuelles politiques de lutte contre le tabagisme de la part du grand public et d’influenceurs en matière de politiques en Alberta et au Québec 64 Aperçu Cadre des indicateurs de surveillance de la maltraitance envers les enfants 68 Autres publications de l’ASPC

Promotion de la santé et prévention des maladies …...Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 28 Vol 40, n 2,

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Promotion de la santé etprévention des maladieschroniques au CanadaRecherche, politiques et pratiques

Volume 40 · numéro 2 · février 2020

Indexée dans Index Medicus/MEDLINE, DOAJ, SciSearch® et Journal Citation Reports/Science Edition

Promouvoir et protéger la santé des Canadiens grâce au leadership, aux partenariats, à l’innovation et aux interventions en matière de santé publique.

— Agence de la santé publique du Canada

Publication autorisée par le ministre de la Santé. © Sa Majesté la Reine du Chef du Canada, représentée par le ministre de la Santé, 2020

ISSN 2368-7398 Pub. 190451

[email protected]

Also available in English under the title: Health Promotion and Chronic Disease Prevention in Canada: Research, Policy and Practice

Les lignes directrices pour la présentation de manuscrits à la revue ainsi que les renseignements sur les types d’articles sont disponibles à la page : https://www.canada.ca /fr/sante-publique/services/rapports-publications/promotion-sante-prevention-maladies-chroniques-canada-recherche-politiques-pratiques/information-intention-auteurs.html

Dans ce numéro27 Recherche quantitative originale La paralysie cérébrale au Canada, 2011-2031 : résultats d’une étude de modélisation par microsimulation des répercussions épidémiologiques et économiques

41 Recherche originale par méthodes mixtes Dépistage obligatoire du VIH, migration et stigmatisation liée au VIH au Canada : analyse de l’expérience d’immigrants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH dans l’Ouest canadien

51 Recherche quantitative originale Utilisation d’une échelle d’intervention pour analyser le soutien à d’éventuelles politiques de lutte contre le tabagisme de la part du grand public et d’influenceurs en matière de politiques en Alberta et au Québec

64 Aperçu Cadre des indicateurs de surveillance de la maltraitance envers les enfants

68 Autres publications de l’ASPC

27Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

Rattachement des auteurs :

1. Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario), Canada2. Départements de pédiatrie, de neurologie et de neurochirurgie, Université McGill, Montréal (Québec), Canada3. Division de neurologie pédiatrique, Hôpital de Montréal pour enfants, Centre universitaire de santé McGill, Montréal (Québec), Canada 4. Département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail, Université McGill, Montréal (Québec), Canada 5. Division de l’analyse de la santé, Statistique Canada, Ottawa (Ontario), Canada 6. Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, Ottawa (Ontario), Canada 7. Université d’Ottawa, Ottawa (Ontario), Canada 8. Institut de recherche Bruyère, Ottawa (Ontario), Canada 9. École de la santé publique et des populations, Université d’Ottawa, Ottawa (Ontario), Canada 10. Institut de recherche en services de santé, Ottawa (Ontario), Canada 11. Hôpital général de North York, Toronto (Ontario), Canada 12. Départements de médecine familiale et communautaire, et de médecine et Institut des politiques, de la gestion et de l’évaluation en santé, Université de Toronto, Toronto (Ontario), Canada 13. Équipe de santé familiale de l’Hôpital Toronto Western, Réseau universitaire de santé, Toronto (Ontario), Canada 14. Surveillance de la santé des populations et épidémiologie, Bureau de l’agent de santé provincial, ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, Victoria (Colombie-Britannique), Canada

Correspondance : Nana Amankwah, Division de la recherche appliquée, Centre de surveillance et de recherche appliquée, Direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques, Agence de la santé publique du Canada, 9e étage, salle 903A3, 785, avenue Carling, Ottawa (Ontario) K1A 0K9; Tél. : 613-291-3181; courriel : [email protected]

Recherche quantitative originale

La paralysie cérébrale au Canada, 2011‑2031 : résultats d’une étude de modélisation par microsimulation des répercussions épidémiologiques et économiquesNana Amankwah, M. Sc. (1); Maryam Oskoui, M.D. (2,3,4); Rochelle Garner, Ph. D. (5); Christina Bancej, Ph. D. (1); Douglas G. Manuel, M.D. (5,6,7,8,9,10,11); Ron Wall, Ph. D. (1); Philippe Finès, Ph. D. (5); Julie Bernier, M.A. (5); Karen Tu, M.D. (11,12,13); Kim Reimer, B. Sc. (14)

Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.

https://doi.org/10.24095/hpcdp.40.2.01f

Points saillants

• Un diagnostic de paralysie cérébrale s’accompagne d’un fardeau écono­mique et social considérable.

• Le nombre de nouveaux cas diag­nostiqués de paralysie cérébrale pas­sera d’environ 1 800 en 2011 à près de 2 200 en 2031.

• Le nombre de personnes atteintes de cette maladie devrait passer de plus de 75 000 en 2011 à plus de 94 000 en 2031.

• Les Canadiens atteints de paralysie cérébrale continueront d’avoir une qualité de vie réduite, une incapa­cité accrue et un besoin croissant de services de soutien, en particu­lier de soins informels.

RésuméIntroduction. Le but de notre étude était de présenter des estimations et des projections par modélisation portant sur les répercussions épidémiologiques et économiques actuel les et futures de la paralysie cérébrale au Canada sur une période de 20 ans (2011­2031).

Méthodologie. Nous avons utilisé le Modèle de santé de la population (POHEM) – Maladies neurologiques de Statistique Canada pour simuler les états pathologiques, les facteurs de risque et les déterminants de la santé à l’échelle des individus, ainsi que pour décrire et projeter les résultats en matière de santé, en particulier l’incidence de maladies, la préva­lence, l’espérance de vie, l’espérance de vie ajustée en fonction de la santé, la qualité de vie liée à la santé et les coûts des soins de santé au cours du cycle de vie des Canadiens. Les cas de paralysie cérébrale ont été relevés à partir de sources de données administratives sur la santé en Colombie­Britannique. Une cohorte représentative de la population a ensuite été utilisée pour produire les taux d’incidence et de mortalité, ce qui a permis ensuite d’établir des projections des taux d’incidence et de mortalité. L’indice de l’état de santé Health Utilities Index Mark 3 (IES3) a également été inclus dans le modèle pour tenir compte de divers états de la santé fonctionnelle, ce qui a permis de réaliser des projections sur la qualité de vie liée à la santé. Enfin, nous avons estimé les paramètres de prestation des soins et les coûts des soins de santé à partir d’enquêtes nationales canadiennes et de don­nées administratives sur la santé, puis nous les avons inclus dans les paramètres du modèle pour évaluer les répercussions épidémiologiques et économiques de la paralysie cérébrale.

Résultats. S’il est vrai que le taux brut global d’incidence de la paralysie cérébrale devrait demeurer stable, les nouveaux cas diagnostiqués de paralysie cérébrale connaîtront une hausse, passant d’environ 1 800 cas en 2011 à près de 2 200 cas en 2031. De plus, le nombre de personnes atteintes de ce trouble devrait passer de plus de 75 000 en 2011 à plus de 94 000 en 2031. Les coûts directs des soins de santé en dollars canadiens constants de 2010 s’établissaient à environ 11 700 $ pour les enfants de 1 à 4 ans atteints de paralysie céré­brale, comparativement à environ 600 $ pour ceux n’étant pas atteints de cette maladie. En outre, les personnes atteintes de paralysie cérébrale ont tendance à avoir une moins bonne qualité de vie liée à la santé pendant de plus longues périodes.

Conclusion. Les personnes atteintes de paralysie cérébrale continueront à être confrontées à des difficultés parce qu’elles nécessitent des soins médicaux spécialisés de façon continue

et ont un besoin croissant de services de sou­tien. Notre étude fournit un aperçu significa­tif des coûts à venir et des répercussions de la paralysie cérébrale et offre des données pré­cieuses qui pourraient servir à élaborer des programmes et des stratégies de santé ciblés pour les Canadiens atteints de cette maladie.

Mots‑clés  : paralysie cérébrale, fardeau économique, Canada, modélisation par microsimulation, incidence et prévalence projetées de la paralysie cérébrale

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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 28 Vol 40, n° 2, février 2020

Introduction

La paralysie cérébrale est la cause la plus courante d’incapacité motrice chez les enfants1­3. Elle désigne un groupe hétéro­gène de troubles neurologiques dont les déficiences motrices sont les caractéris­tiques principales. Les personnes atteintes de paralysie cérébrale sont souvent atteintes de comorbidités qui diminuent encore leurs capacités fonctionnelles4. Les comor­bidités associées à la paralysie cérébrale s’ajoutent aux défis individuels et fami­liaux et aux coûts financiers liés aux besoins médicaux, de réadaptation et d’éducation propres à chaque enfant.

La paralysie cérébrale est le résultat de perturbations dans le cerveau en dével­oppement, soit à un moment de la gros­sesse soit jusqu’à la petite enfance (deux ans). La paralysie cérébrale congénitale désigne les étiologies prénatales et périna­tales avant 28  jours de vie, tandis que la paralysie cérébrale postnatale désigne les étiologies de 28 jours de vie jusqu’à l’âge de deux ans. Il y a de multiples causes, sous­types cliniques, comorbidités et résul­tats fonctionnels associés à paralysie céré­brale. La diversité des schémas d’appari tion et de déficience neuromotrice, des degrés de gravité dans les domaines fonctionnels, des problèmes de santé ou maladies con­comittants, des complications secondaires et des interventions disponibles rend pra­tiquement impossible la catégorisation de la paralysie cérébrale en suivant une seule classification5.

Il n’est pas étonnant de constater que de multiples facteurs de risque sont associés à ce trouble, dans les périodes prénatale (avant le travail et l’accouchement), péri­natale (pendant le processus de nais­sance) et postnatale (après la naissance, pendant les deux premières années de vie)3­9. Ces facteurs de risque sont en par­ticulier une naissance prématurée, un retard de croissance intra­utérin, une infec­tion/inflammation intra­utérine, être de sexe masculin, la consanguinité, un acci­dent vasculaire cérébral avant l’âge de deux ans et une encé phalopathie isché­mique hypoxique. Néanmoins, le méca­nisme de causalité demeure insaisissable chez la plupart des enfants atteints de paralysie cérébrale. La plupart des enfants reçoivent le diagnostic au cours des deux premières années de vie10, mais certains diagnostics surviennent seulement à un âge plus avancé11,12.

La prévalence mondiale de la paralysie cérébrale a très peu changé au cours de la dernière décennie1­6,8,13­18. Une méta­ analyse récente a révélé que la prévalence de la paralysie cérébrale à la naissance dans les pays développés était de 2,11 pour 1 000 naissances vivantes3. Toutefois, des études fondées sur la population ont fait état d’estimations de la prévalence allant de 1,5 à environ 4 pour 1 000 nais­sances vivantes, et d’une incidence plus élevée dans certains pays où l’incidence de la consanguinité est plus élevée19­23. L’absence d’algorithmes d’identification de cas validés pour repérer la paralysie cérébrale24 dans les bases de données administratives sur la santé peut contri­buer à la variabilité de la prévalence esti­mée, car des erreurs peuvent survenir dans la classification des codes de diagnostic.

La variabilité des estimations de la préva­lence de la paralysie cérébrale, au Canada comme à l’échelle mondiale, peut aussi être attribuable aux différences observées dans les critères diagnostiques24,25 et dans les soins prénataux et périnataux offerts à diverses populations. Des études menées en Alberta26, en Colombie­Britannique27 et au Québec28 ont produit des estimations de la prévalence similaires aux estima­tions mondiales. À l’aide de bases de don­nées administratives, l’Alberta a produit une estimation de 2,57 pour 1 000  nais­sances vivantes à 8 ans26, tandis que cette estimation était en Colombie­Britannique de 2,68 pour 1 000 naissances vivantes27. Oskoui et ses collaborateurs13 ont établi une estimation à 2,30 pour 1 000 enfants à partir des données d’un registre québécois sur la paralysie cérébrale. Une étude québécoise plus récente a montré que la prévalence de la paralysie cérébrale était de 1,8 pour 1 000  enfants (intervalle de confiance [IC] à 95 % : 1,6 à 2,1) d’après les données d’un registre sur la paralysie cérébrale et de 2,0 pour 1 000 enfants (IC à 95  %  : 1,9 à 2,3) d’après les données provenant de bases de données adminis­tratives sur la santé28. Bien que ces estima­tions soient comparables, la concordance des diagnostics entre les deux sources a révélé un coefficient Kappa de 0,62 (IC à 95 % : 0,57 à 0,67), et un biais de sélec­tion a été observé pour les cas recensés dans les bases de données administratives sur la santé28. En effet, les enfants ayant un diagnostic confirmé de paralysie céré­brale et nés avant terme étaient plus sus­ceptibles que ceux nés à terme d’être inclus dans les bases de données administratives, car les enfants nés avant terme sont plus

susceptibles de recevoir des soins plus spécialisés favorisant le développement et qui mènent souvent à l’établissement du bon diagnostic et au bon code de classifi­cation de la maladie.

Un diagnostic de paralysie cérébrale est associé à un fardeau économique et social important pour les individus, les familles et la société en général. Le fardeau peut être exacerbé lorsque l’information perti­nente pour l’élaboration de politiques, de stratégies et de programmes de santé effi­caces est limitée ou inexistante. Pour mieux comprendre l’incidence, la préva­lence, les répercussions, les facteurs de risque et les comorbidités des maladies neurologiques, dont la paralysie cérébrale, ainsi que l’utilisation des services de santé qui s’ensuit et les lacunes dans ces ser­vices, le gouvernement du Canada a lancé en 2009 l’Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neuro­logiques (ENSPMN)29. L’ENSPMN englobe 13 projets de recherche et trois enquêtes natio nales visant à examiner les multiples maladies neurologiques touchant les Canadiens. L’un des projets a consisté à adapter le cadre du Modèle de santé de la population (POHEM) de Statistique Canada pour créer un nouveau modèle de micro­simulation longitudinale fondé sur la popu­lation afin d’effectuer des projections des répercussions épidémiologiques et écono­miques futures (jusqu’en 2031) de sept maladies neurologiques touchant les Canadiens. Ce modèle est appelé POHEM – Maladies neurologiques29. L’ENSPMN a pour objectif d’examiner l’incidence, la prévalence et les répercussions à venir de ces maladies neurologiques sur des péri­odes de 5, 10, 15 et 20  ans. Cet article porte sur les projections du modèle sur la plus longue période, à savoir 20 ans.

L’objectif de notre étude est ainsi de présenter des estimations et des projec­tions obtenues par modélisation et portant sur les répercussions épidémiologiques et économiques actuelles et futures de la paralysie cérébrale au Canada sur une période de 20 ans (2011­2031).

Méthodologie

POHEM – Maladies neurologiques

Le cadre du POHEM  – Maladies neuro­logiques est un modèle empirique qui uti­lise des données canadiennes sur les caractéristiques démographiques, l’incidence

29Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

de maladies et la mortalité afin de pro­duire des projections pour l’ensemble du cycle de vie des Canadiens30­34. L’unité d’analyse de base du modèle est l’indi­vidu, ou « acteur », dont le parcours de vie est simulé et modélisé en temps continu au moyen de la méthode de Monte­Carlo*.

La simulation dynamique recrée une popu lation canadienne synthétique à un moment donné dans le temps (passé et futur) et en suit le vieillissement, un acteur à la fois, jusqu’au décès de chaque acteur. Le modèle utilise des hypothèses de statu quo pour projeter les répercus­sions futures  : il suppose que l’incidence de la maladie neurologique modélisée et les facteurs de risque et de pronostic con­nexes demeureront stables tout au long de la période de projection. Il est possible d’obtenir de plus amples détails sur les méthodes et procédures utilisées par le POHEM  – Maladies neurologiques dans d’autres publications30­34.

Le processus d’élaboration du POHEM  – Maladies neurologiques est divisible en quatre étapes : (1) initialisation; (2) mises à jour annuelles; (3) validation du modèle et (4)  projection (voir tableau  1). Nous avons utilisé uniquement des sources de données canadiennes fondées sur la population pour l’initialisation du modèle et les mises à jour annuelles.

Étape 1 : initialisation

L’initialisation a commencé avec les cohortes de naissances de 1872 à 2006 que nous avons soumises au taux de mortalité observés à l’époque, comme dans d’autres modèles de santé de Statistique Canada35,36. Comme 1872 représente l’année de la cohorte de naissances la plus ancienne dans le processus de modélisation LifePaths†, elle a été utilisée pour permettre la si mulation et la génération d’un éventail complet d’âges allant des nouveau­ nés jusqu’aux aînés en 1971. Par conséquent, le modèle peut produire des totalisations transversales annuelles à partir de 1971 qui sont directement comparables aux données transversales historiques. Ce sont les taux de naissance, de décès et de migration (immigration et émigration) pro­jetés suivant les projections canadiennes habituelles (scénario de croissance moy­enne) telles qu’elles ont été estimées par Statistique Canada qui ont été utilisés pour 2007 et les années suivantes36.

Étape 2 : mises à jour annuelles du profil de santé des acteurs

Le profil de santé d’un acteur comporte six caractéristiques  : (1)  données démo­graphiques; (2) état de paralysie cérébrale; (3) état de santé; (4) présence d’un aidant naturel; (5)  coûts des soins de santé et

(6) mortalité. Le profil de santé de chaque acteur est mis à jour au fil du temps, soit lors d’un événement (p.  ex. anniversaire et date du diagnostic de la paralysie céré­brale), soit lors du changement d’année civile, selon les caractéristiques du profil. Toutes les caractéristiques ont été cal­culées et modélisées pour les individus atteints de paralysie cérébrale et pour ceux exempts de maladie neurologique.

Nous avons pris comme référence les indi­vidus exempts de maladie neurologique plutôt que les individus exempts de paralysie cérébrale pour établir la com­paraison parce que les individus atteints de paralysie cérébrale ont tendance à subir des coûts causés par d’autres comor­bidités qui sont difficiles à dissocier (voir « Comorbidité, population hypothétique et estimation des coûts »).

Paralysie cérébrale : incidence, prévalence et mortalitéNous avons appliqué les taux d’incidence de la paralysie cérébrale selon le sexe et l’âge à la population canadienne de réfé­rence du modèle au début de chaque année civile. Nous avons estimé les taux d’incidence de la paralysie cérébrale au moyen d’un algorithme d’identification des cas alimenté par des données adminis­tratives sur la santé qui ont été extraites de factures de médecins et de registres des sorties des hôpitaux en Colombie­Britannique.

TABLEAU 1 Processus de projection de la prévalence de la paralysie cérébrale, du fardeau en santé et de

l’utilisation des soins de santé au Canada à l’aide du POHEM – Maladies neurologiques

Étape de production du modèle Activité du modèle Détails sur l’étape du modèle

1 Initialisation Générer une population canadienne initiale.

Lancer un modèle prédictif en créant une cohorte synthétique de Canadiens.

Associer les cohortes de naissances aux décès, à l’immigration et à l’émigration annuels. Données démographiques observées jusqu'en 2006 et projetées jusqu'en 2031.

2 Mises à jour annuelles Mettre à jour l’incidence annuelle de la PC et d’autres paramètres du modèle.

Chaque année jusqu’en 2031, mettre à jour les caractéristiques de la population, l’incidence de la PC, l’état de santé et les coûts des soins de santé.

Chaque année, mettre à jour la cohorte synthétique pour tenir compte des changements démographiques, de l’incidence de la PC et des décès. Pour les personnes avec et sans PC, estimer l’indice de l’état de santé (IES3), l’utilisation des soins de santé (formels et informels) et les décès.

3 Validation du modèle Valider et calibrer le modèle.

Comparer la PC projetée à la prévalence observée en 2009.

Comparer la prévalence projetée à la prévalence observée de la PC selon l’âge et le sexe. Calibrer le modèle au besoin.

4 Projections Produire les projections finales pour 2011 à 2031.

Projeter l’incidence, la prévalence, la mortalité, l’indice de l’état de santé, les AVAS, les AVV avec la PC et les coûts des soins de santé, incluant les dépenses directes et les heures de soins informels, de 2011 à 2031.

Générer les tableaux des résultats à partir des projections.

Abréviations : AVAS, années de vie ajustées en fonction de la santé; AVV, années de vie vécues; PC, paralysie cérébrale; POHEM, modèle de santé de la population.

* La méthode Monte-Carlo utilise une vaste classe d’algorithmes statistiques computationnels qui s’appuient sur l’échantillonnage aléatoire répété pour obtenir des résultats numériques. L’idée fondamentale qui sous-tend cette approche est l’utilisation de la stochasticité pour résoudre des problèmes susceptibles d’être déterministes sur le principe.† LifePaths est un modèle de microsimulation longitudinale dynamique des personnes et des familles canadiennes qui simule et génère des décisions individuelles et familiales de base pour la plupart des événements discrets qui, regroupés, constituent le cheminement de vie d’une personne. LifePaths crée des cheminements de vie synthétiques de la naissance au décès qui sont représentatifs d’antécédents de la population canadienne.

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 30 Vol 40, n° 2, février 2020

On a défini un cas de paralysie cérébrale par une visite chez le médecin ou une hospitalisation pour laquelle les codes sui­vants de la Classification internationale des maladies (CIM) ont été utilisés  : (1) code G80 de la CIM­10; (2) code 340 de la CIM­9 ou (3) codes 333,71 ou 343 de la CIM­9(CM). Nous avons élaboré l’algo­rithme en tenant compte des conseils du Groupe de travail sur les maladies neuro­logiques du Système canadien de surveil­lance des maladies chroniques (SCSMC), qui est présidé par l’Agence de la santé publique du Canada.

Nous avons suivi les conseils supplémen­taires d’experts cliniques du Groupe de travail du SCSMC et avons défini les cas incidents de paralysie cérébrale comme survenant avant l’âge de 20 ans parce que la plupart des enfants reçoivent un diag­nostic durant la petite enfance. Nous avons ainsi supposé que l’incidence était nulle après l’âge de 20 ans. Les cas inci­dents de paralysie cérébrale s’accumulent au fil du temps pour générer les cas préva­lents de paralysie cérébrale. Les risques relatifs de mortalité propres à la paralysie cérébrale ont été appliqués aux acteurs atteints de paralysie cérébrale. Nous avons estimé les taux de mortalité selon le sexe et l’âge en utilisant la même définition de cas et les mêmes données que lors de l’estimation de l’incidence. Les taux de mortalité propres à la paralysie cérébrale ont été divisés par les taux de mortalité pour le même sexe et le même groupe d’âge au sein de la population générale, ce qui a généré le risque relatif de mortalité. Dans le POHEM – Maladies neurologiques, on a multiplié ce risque relatif de mortalité pour les personnes atteintes de paralysie cérébrale par le taux de mortalité de base de la population canadienne. Sur le fond, les taux de mortalité de la population atteinte de paralysie cérébrale en Colombie­Britannique ont donc été comparés aux taux de mortalité de la population générale (obtenus de Statistique Canada), ces derniers étant le fruit d’une combinai­son de tables de mortalité et de projections démographiques36. Dans les projections futures, le taux de mortalité de la popula­tion générale devrait diminuer progres­sivement au fil du temps, reflétant la mortalité projetée à l’aide des cohortes de naissances et du modèle de Lee­Carter, conformément aux estimations de Statistique Canada37. Cela signifie que la mortalité

‡ Puisque l’unité d’analyse de base du POHEM est l’individu, il crée une population et la fait vieillir, une personne à la fois, jusqu’au décès. Les estimations de la prévalence réalisées à l’aide du POHEM – Maladies neurologiques peuvent être considérées comme des taux parce que les calculs tiennent compte des années-personnes de temps fournies par une personne au cours de l’année civile et de l’état pathologique à la fois dans le numérateur et le dénominateur pendant le processus de modélisation.

projetée des Canadiens atteints de paraly­sie cérébrale va diminuer au même rythme que celle des Canadiens sans paralysie cérébrale. Il s’agit d’une hypothèse du modèle POHEM – Maladies neurologiques, car il intègre un paramètre qui permet une augmentation ou une diminution du ris­que relatif de mortalité chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale par com­paraison à celles qui en sont exemptes.

Au cours de la validation du modèle, la prévalence de la paralysie cérébrale proje­tée par le modèle était beaucoup plus élevée que celle observée à l’aide des don­nées administratives de la Colombie­Britannique (figure 1). Après avoir con sulté des experts cliniques au sujet de la préva­lence projetée par le modèle, un para­mètre d’ajustement a été ajouté au POHEM  – Maladies neurologiques pour supprimer un diagnostic de paralysie céré­brale chez une proportion d’individus ayant déjà été recensés dans le modèle comme des cas prévalents de paralysie cérébrale. Bien que la paralysie cérébrale soit un trouble qui dure toute la vie, les taux d’incidence observés comprenaient probablement une forte proportion de dia­gnostics faussement positifs dans la source de données administratives sur la santé, par exemple des enfants ayant d’abord reçu un code de paralysie céré­brale avant de recevoir un diagnostic dif­férent. Bien que l’erreur type et l’erreur statistique de la définition de cas n’aient pas été validées pour cette étude, la défi­nition d’un code de diagnostic unique pour la paralysie cérébrale dans les bases de données administratives a été validée dans la population du Québec et a été jugée très précise, malgré une sensibilité moindre. Parallèlement, le modèle a prédit une prévalence beaucoup plus élevée de la paralysie cérébrale et a été modifié pour tenir compte de cette différence de sensi­bilité. Étant donné que la validité des codes de diagnostic de la paralysie céré­brale dans les bases de données adminis­tratives n’a pas encore été établie28, la méthodologie de notre étude peut être considérée comme la meilleure disponible actuellement pour prédire la paralysie cérébrale à l’aide des bases de données administratives au Canada. Elle est très précise et fournit des renseignements utiles28. Des troubles neurogénétiques ont déjà été diagnostiqués ainsi, par exemple les cas de paralysie cérébrale en début de

vie38. Après ajustement (voir la figure 1), les « taux »‡ de prévalence générés par le modèle s’approchaient de ceux indiqués dans la littérature3,19­23.

État de santéL’indice de l’état de santé (IES3) est une mesure générique fondée sur les pré­férences de la qualité de vie liée à la santé qui sert à déterminer la gravité d’une mal­adie39. La qualité de vie liée à la santé est un concept qui décrit la santé des popula­tions et qui constitue un résultat plus large en matière de santé que les taux de mortalité ou l’espérance de vie pour effectuer des analyses de la santé de la population. L’IES3 mesure la santé fonc­tionnelle à di vers degrés de gravité, allant de la santé parfaite (IES3 = 1,0) au décès (IES3  = 0). Il comprend des états con­sidérés pires que la mort (indice mini­mum  = −0,36)39. Il évalue la santé fonctionnelle selon huit dimensions, à savoir la cognition, l’émotion, la mobilité, la dextérité, la douleur et l’inconfort, l’élocution, la vision et l’ouïe, et fournit une mesure valide de l’état de santé fonc­tionnelle et de la qualité de vie des per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale39,40. Des catégories d’incapacités ont déjà été validées pour cet indice  : aucune (1,00), légère (0,89 à 0,99), modérée (0,70 à 0,88) et grave (moins de 0,70)41. Il convient de souligner que les notes peuvent varier selon la source de l’évaluation, qui peut être un mandataire ou l’enfant lui­même. Une étude réalisée en 201942 fait état de notes pour l’IES3 variant entre −0,013 et 0,84 chez les enfants atteints de paralysie cérébrale. Pour les individus de 15 ans et plus atteints de paralysie cérébrale, les notes moyennes pour l’IES3 (avec erreurs types) ont été estimées à partir de l’Enquête sur les personnes ayant des pro­blèmes neurologiques au Canada (EPPNC)43.

Les moyennes ont été calculées séparé­ment pour les hommes et les femmes, ainsi que pour deux groupes d’âge : les 15 à 34  ans et les 35  ans et plus. Pour les enfants de moins de 15 ans ayant reçu un diagnostic de paralysie cérébrale, une population non couverte par l’EPPNC, les notes moyennes pour l’IES3 ont été esti­mées à partir de l’Enquête sur la participa­tion et les limitations d’activités (EPLA)44.

Les estimations ont été calculées pour les garçons et les filles combinés (c.­à­d. qu’elles ne sont pas disponibles selon le sexe).

31Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

Les répercussions de la paralysie cérébrale peuvent également être évaluées en fonc­tion des années de vie perdues en raison de la maladie, c’est­à­dire des années per­dues en raison d’un décès prématuré attribuable à une maladie. Pour calculer le nombre d’années de vie perdues, nous avons d’abord déterminé l’âge auquel les personnes atteintes de paralysie cérébrale sont décédées au cours de chaque année civile. Nous avons ensuite estimé ce nom­bre en suivant un scénario selon lequel le risque de mortalité pour les personnes atteintes de paralysie cérébrale était le même que pour celles en étant exemptes, puis nous avons recalculé l’âge de décès : le nombre d’années de vie perdues est égal à la différence d’âge au décès entre les deux calculs. Le nombre d’années de vie perdues ajustées en fonction de la

santé fournit le nombre d’années de vie en bonne santé perdues, combinant la morbidité et la mortalité. Les années de vie ajustées en fonction de la santé (AVAS) ont été estimées à partir du produit des années de vie vécues (âge au décès) mul­tiplié par l’IES3 annuel pour chaque per­sonne au cours de sa vie.

Présence d’un aidant naturelLes soins informels sont les soins non rémunérés fournis par la famille et les amis aux Canadiens ayant un problème de santé chronique, une incapacité ou des besoins liés à leur vieillissement.

Pour chaque acteur du POHEM – Maladies neurologiques, nous avons évalué la pro­babilité d’avoir un aidant naturel en fonc­tion de l’âge de l’acteur, de l’état de

paralysie cérébrale et de l’état de santé (IES3). Si la présence d’un aidant naturel a été attribuée à un acteur, des caractéris­tiques supplémentaires ont aussi été attri­buées selon des estimations empiriques de l’EPPNC et l’Enquête sociale générale (ESG)45 de 2012  : (1)  heures de soins reçues, (2)  état de santé de l’aidant et (3) dépenses directes de l’aidant.

Coûts des soins de santéNous avons estimé les coûts des soins de santé formels pour les cohortes de cas incidents et prévalents de paralysie céré­brale et établi ces coûts en utilisant des données administratives sur la santé recueillies en Colombie­Britannique et en Ontario. Les coûts des soins de santé ayant été estimés en dollars de 2010, l’inflation n’a donc pas été prise en

FIGURE 1 Comparaison des taux de prévalencea de la paralysie cérébrale observés en 2009 en Colombie‑Britannique

et des paramètres projetés, ajustés et non ajustés, par le POHEM – Maladies neurologiques

Source : POHEM – Maladies neurologiques (Statistique Canada et Agence de la santé publique du Canada).

Abréviations : max, âge maximum; min, âge minimum; POHEM, Modèle de santé de la population.

a Puisque l’unité d’analyse de base du POHEM est l’individu, il crée une population et la fait vieillir, une personne à la fois, jusqu’au décès. Les estimations de la prévalence réalisées à l’aide du POHEM – Maladies neurologiques peuvent être considérées comme des taux parce que les calculs tiennent compte des années-personnes de temps fournies par une personne au cours de l’année civile et de l’état pathologique à la fois dans le numérateur et le dénominateur pendant le processus de modélisation.

0,5

0,45

0,4

0,35

0,3

0,25

0,2

0,15

0,1

0,05

0

Taux

de

prév

alen

ce (p

our 1

00 h

abita

nts)

Groupe d’âge (années)

85 à max

80 à 85

75 à 80

70 à 75

65 à 70

60 à 65

55 à 60

50 à 55

45 à 50

40 à 45

35 à 40

30 à 35

25 à 30

20 à 25

15 à 20

10 à 15

5 à 10

1 à 5

min à 1

Prévalence projetée par le modèle (2009, non ajustée)

Prévalence observée en Colombie-Britannique (2009, non ajustée)

Prévalence projetée par le modèle (2009, ajustée)

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 32 Vol 40, n° 2, février 2020

compte dans les projections des coûts. De plus, les coûts pour les cohortes de cas prévalents et de référence ont été obtenus pour la période du 1er  avril  2009 au 31 mars 2010 en Ontario et en Colombie­ Britannique.

Nous avons examiné les coûts pour les cohortes de cas incidents en Ontario au cours de la même période. Nous avons obtenu les coûts pour les cohortes de cas incidents en Colombie­Britannique pour la période de 12 mois débutant le 1er avril de l’année de l’incidence (2006, 2007 ou 2008). Les coûts des soins de santé for­mels sont ceux couverts par les régimes provinciaux d’assurance­maladie dans les catégories suivantes  : (1)  hospitalisation de courte durée, (2)  services médicaux, (3) données sur les médicaments d’ordon­nance§, (4)  hôpitaux de réadaptation, (5) soins à domicile financés par la prov­ince de l’Ontario, (6)  résidences et établissements de soins de longue durée en Ontario et (7) appareils et accessoires fonctionnels financés par la province de l’Ontario. Les coûts comprenaient deux catégories de dépenses directes (dépenses payées par une personne, mais non rem­boursées par une assurance ou le gouver­nement)  : celles du patient et celles de l’aidant.

Comorbidité, population de référence et estimation des coûtsComme nous l’avons mentionné, les per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale présentent souvent des états comorbides. Par exemple, un enfant sur quatre atteint de paralysie cérébrale souffre d’épilepsie, un enfant sur deux a une déficience intel­lectuelle et un enfant sur quatre a un trouble du comportement, incluant un trouble du spectre autistique, et d’autres troubles musculosquelettiques4,47. Il est donc parfois difficile de déterminer si c’est la paralysie cérébrale qui a une influence sur les coûts des soins de santé, sur le recours à un aidant et sur la mortalité ou si ce sont d’autres comorbidités. Afin de résoudre ce problème, nous avons sélec­tionné une cohorte de population de référence (ne souffrant d’aucune maladie neurologique) pour déterminer les réper­cussions réelles de la paralysie cérébrale. Par exemple, si la prévalence de la comor­bidité  X était plus élevée chez les per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale

§ La Colombie-Britannique disposait de données exhaustives sur le coût des médicaments d’ordonnance pour toutes les ordonnances remises dans des pharmacies locales, quel que soit l’âge de la personne, alors que l’Ontario disposait de données exhaustives sur les personnes de 65 ans et plus et de données limitées sur les patients atteints de paralysie cérébrale qui ont un faible revenu et qui reçoivent un soutien provincial pour les traitements modifiant l’évolution de la maladie. Lorsque nous disposions des coûts des deux provinces, nous les avons pondérés en fonc-tion d’un paramètre d’entrée (75 % en Ontario, 25 % en Colombie-Britannique). La méthode utilisée pour cette analyse reposait sur le document de Wodchis et collab46.

que chez celles qui n’en étaient pas atteintes, les coûts supplémentaires des soins de santé (ou le nombre d’heures de soins) associés à cette morbidité plus élevée ont été attribués aux personnes atteintes de paralysie cérébrale. Par con­séquent, les coûts supérieurs à ceux des homologues du même âge et du même sexe mais exempts de problème neuro­logique ont été considérés comme des coûts directs supplémentaires attribuables à la maladie neurologique quelles que soient les comorbidités. Inversement, si les personnes atteintes de paralysie céré­brale utilisaient moins une ressource de soins de santé en particulier que celles exemptes de maladie neurologique, notre modèle a aussi tenu compte de cette utili­sation plus faible.

La cohorte de référence comprenait tous les individus des ensembles de données respectifs qui n’avaient pas été classés comme ayant l’une des sept maladies neu­rologiques d’intérêt pour le projet de microsimulation de l’ENSPMN, à savoir la maladie d’Alzheimer et les autres démences, la sclérose en plaques, la paralysie céré­brale, l’épilepsie, la maladie de Parkinson et le parkinsonisme, les traumatismes céré­braux et les traumatismes médullaires.

Étape 3 : POHEM – Validation neurologique

Les « taux » de prévalence de la paralysie cérébrale ont été calculés à partir d’un algorithme d’identification de cas non validé qui a été utilisé durant les études de faisabilité réalisées dans le cadre de l’ENSPMN (figure 1). Des ajustements ont ainsi été apportés pour calibrer les pro­jections de prévalence de la paralysie cé rébrale du POHEM pour les maladies neurologiques afin de les aligner sur le repère de prévalence largement accepté de 2,5 pour 1 000 naissances vivantes, qui est cité dans les revues systématiques et la lit­térature3,19­23 (voir « Étape 2 : mises à jour annuelles du profil de santé des acteurs »).

Étape 4 : projections

Nous avons projeté de multiples extrants du modèle principal jusqu’en 2031 inté­grant les cas incidents et prévalents de paralysie cérébrale au Canada, les années

de vie vécues avec la paralysie cérébrale, les années de vies ajustées en fonction de la santé, les coûts des soins de santé dont les coûts pour chacun des sept secteurs, les dépenses directes et les heures de soins informels. De plus, nous avons pro­jeté trois paramètres pour les aidants  : nombre d’heures de soins, dépenses directes et état de santé (IES3).

Résultats

D’après les projections du POHEM – Mala­dies neurologiques, le nombre d’enfants et de jeunes de moins de 20  ans qui rece­vront un nouveau diagnostic de paralysie cérébrale connaîtra une hausse, passant d’environ 1 800 en 2011 à près de 2 200 en 2031 (figure 2). Le taux d’incidence de la paralysie cérébrale va demeurer stable au cours de la période de projection, à savoir à environ 0,3 pour 1 000 enfants de moins de 20  ans. La majorité des cas incidents surviendront chez des enfants de 1 à 5 ans, car la plupart des cas de paralysie cérébrale sont diagnostiqués au cours des deux premières années de la vie d’un enfant (données non présentées).

Comme pour l’incidence, le nombre de personnes atteintes de paralysie cérébrale devrait augmenter, passant de plus de 75 000 en 2011 à plus de 94 000 en 2031, même si la prévalence n’affiche qu’une légère augmentation au cours de cette période, passant de 2,2 en 2011 à 2,4 pour 1 000  habitants en 2031 (figure  3). Cette augmentation est attribuable à la crois­sance de la population canadienne et à l’augmentation de l’espérance de vie.

En 2011, les Canadiens atteints de paraly­sie cérébrale avaient une santé fonction­nelle réduite (selon les notes pour l’IES3) par comparaison aux Canadiens exempts de maladie neurologique. La note moyenne des Canadiens atteints de paralysie céré­brale pour l’IES3 était inférieure à 0,7, qui est le seuil établi pour « l’incapacité grave » à tous les âges (figure 4). La note moyenne des Canadiens exempts de maladie neuro­logique pour l’IES3 se situait entre 1,0 et 0,8, et ce n’est qu’à l’âge de 80 ans que la note moyenne descend à moins de 0,7 pour cet indice. La différence dans la ten­dance pour l’IES3 est demeurée relative­ment stable car le modèle présuppose

33Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

qu’il n’y aura pas de changement dans les notes pour l’IES3 selon l’âge.

Compte tenu de la faible santé fonction­nelle des Canadiens atteints de paralysie cérébrale, la demande accrue de soins informels n’est pas surprenante. Une pro­portion beaucoup plus grande de per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale que de personnes exemptes de maladie

FIGURE 2 Cas incidents et taux d’incidence projetés de paralysie cérébrale,

0 à 20 ans, les deux sexes, 2011‑2031

2500

2000

1500

1000

500

02011 2016 2021 2026 2031

Cas

inci

dent

s, n

ombr

e de

per

sonn

es

1 7931 912 1 961 2 005

2 163

Taux d’incidence (pour 1 000 habitants âgés de 0 à 20 ans)Cas incidents

0,35

0,30

0,25

0,20

0,15

0,10

0,05

0,00 Taux

d’in

cide

nce

(pou

r 1 0

00 h

abita

nts

âgés

de

0 à

20 a

ns)

0,310,33 0,33 0,32

0,33

FIGURE 3 Prévalence (années‑personnes) et taux projetés de la paralysie cérébrale,

population canadienne de tous âges, les deux sexes, 2011‑2031

100 000

90 000

80 000

70 000

60 000

50 000

40 000

30 000

20 000

10 000

02011 2016 2021 2026 2031

Cas

prév

alen

ts (a

nnée

s-pe

rson

nes)

75 22679 766

89 31894 233

Taux de prévalence (pour 100 habitants)Cas prévalents (années-personnes)

Taux

de

prév

alen

ce (p

our 1

00 h

abita

nts)

0,222 0,225 0,228 0,232 0,236

84 345

0,25

0,20

0,15

0,10

0,05

0,00

neurologique reçoit des soins informels. Il en est ainsi à tous les âges (figure 5). Dans l’ensemble, les personnes atteintes de paralysie cérébrale commencent à recevoir des soins informels à un plus jeune âge. La proportion de ces personnes recevant des soins informels augmente fortement et demeure constamment plus élevée que celles des personnes recevant des soins informels mais exemptes de maladie

neurologique. Les personnes exemptes de maladie neurologique commencent à avoir besoin de plus de soins informels seule­ment à l’approche de leurs 70 ans.

Le POHEM – Maladies neurologiques pré­voit également que les personnes de plus de 35 ans recevront beaucoup plus d’heures de soins informels par semaine que les Canadiens exempts de paralysie cérébrale, c’est­à­dire 30 heures par semaine contre 18 (figure 6).

Nous avons mesuré les années de vie vécues avec une maladie et les AVAS afin d’évaluer l’impact de la paralysie céré­brale sur la qualité de vie des Canadiens. La figure 7 montre le nombre d’années de vie vécues et le nombre d’AVAS des Canadiens atteints de paralysie cérébrale et des Canadiens exempts de maladie neu­rologique en fonction de la décennie de naissance. Le modèle prévoit que les per­sonnes nées entre 2010 et 2020 seront en mauvaise santé pendant de plus longues périodes que leurs pairs sans maladie neu­rologique. Les femmes atteintes de paraly­sie cérébrale devraient perdre en moyenne environ 41 ans de vie en bonne santé, tan­dis que les hommes atteints de paralysie cérébrale devraient en perdre environ 33. Par comparaison, on s’attend à ce que les femmes exemptes de maladie neurolo­gique perdent environ 13  ans de vie en bonne santé, contre environ 11 ans pour les hommes.

Une autre différence importante entre les Canadiens atteints de paralysie cérébrale et ceux exempts de maladie neurologique est que leurs dépenses en soins de santé tendent à être plus élevées. Le tableau 2 compare les coûts totaux moyens par habitant dans le secteur des soins de santé pour les Canadiens atteints de paralysie cérébrale et ceux exempts de maladie neurologique.

La comparaison montre que les plus grands écarts de coûts se produisent avant l’âge de 15 ans. Vers l’âge de 20 ans, les écarts de coûts commencent à diminuer considérablement (ratio de 14:1) et se sta­bilisent à mesure que les individus con­tinuent à vieillir. À 30  ans, le ratio des coûts totaux des soins de santé chute à 7:1. Le modèle prévoit que les coûts totaux moyens par habitant dans le secteur de la santé demeureront stables au cours de la période de projection de

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 34 Vol 40, n° 2, février 2020

FIGURE 4 Indice moyen de l’état de santé selon l’état de paralysie cérébrale et l’âge, 2011

1

0,9

0,8

0,7

0,6

0,5

0,4

0,3

0,2

0,1

0

Moins de 1

Not

e m

oyen

ne p

our l

'IES3

Avec paralysie cérébraleSans maladie neurologique

1 à 4

5 à 9

10 à 14

15 à 19

20 à 24

25 à 29

30 à 34

35 à 39

40 à 44

45 à 49

50 à 54

55 à 59

60 à 64

65 à 69

70 à 74

75 à 79

80 à 84

85 et plus

Groupe d'âge (années)

Abréviation : IES3, indice de l’état de santé.

FIGURE 5 Proportion de personnes ayant un aidant naturel, selon l’état de paralysie cérébrale et l’âge, 2011

90 %

80 %

70 %

60 %

50 %

40 %

30 %

20 %

10 %

0 %

Moins de 1

Prop

ortio

n de

per

sonn

es a

yant

un

aida

nt n

atur

el (%

)

Avec paralysie cérébraleSans maladie neurologique

1 à 4

5 à 9

10 à 14

15 à 19

20 à 24

25 à 29

30 à 34

35 à 39

40 à 44

45 à 49

50 à 54

55 à 59

60 à 64

65 à 69

70 à 74

75 à 79

80 à 84

85 et plus

Groupe d'âge (années)

35Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

20 ans parce qu’aucune varia tion de coûts par année n’a été présumée.

Les répercussions sur la vie d’une per­sonne atteinte de paralysie cérébrale ont également été évaluées en comparant les dépenses directes engagées par les aidants naturels de Canadiens atteints de paraly­sie cérébrale et celles d’aidants naturels de Canadiens exempts de maladie neu­rologique. L’écart le plus élevé est chez les aidants naturels de personnes de moins de 35 ans. Les dépenses directes sont près de 50  fois plus élevées chez ceux qui pren­nent soin d’une personne atteinte de paralysie cérébrale que chez ceux prenant soin d’une personne exempte de maladie neurologique (figure  8). Pour les aidants naturels de personnes de 35 à 65 ans, cet écart dans les dépenses directes est 36 fois plus élevé. Après 65  ans, les écarts dans les dépenses directes ne sont pas aussi importants.

FIGURE 6 Nombre moyen d’heures de soins informels reçus par semaine,

selon l’état de paralysie cérébrale, 2011

35

30

25

20

15

10

5

0Moins de 35 35 à 64 65 à 74 75 et plus

Avec paralysie cérébraleSans maladie neurologique

Groupe d’âge (années)

FIGURE 7 Nombre moyen d’années de vie vécues et d’années de vie ajustées en fonction de la santé, personnes atteintes

de paralysie cérébrale et personnes exemptes de maladie neurologique, selon le sexe et la décennie de naissance

Abréviations : AVAS, années de vie ajustées en fonction de la santé; AVV, années de vie vécues.

100

90

80

70

60

50

40

30

20

10

0

Anné

es d

e vi

e vé

cues

(AVV

) /

Anné

es d

e vi

e aj

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n fo

nctio

n de

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nté

(AVA

S)

Âge et décennie de naissance

1910

à 1

920

1920

à 1

930

1930

à 1

940

1940

à 1

950

1950

à 1

960

1960

à 1

970

1970

à 1

980

1980

à 1

990

1990

à 2

000

2000

à 2

010

2010

à 2

020

1910

à 1

920

1920

à 1

930

1930

à 1

940

1940

à 1

950

1950

à 1

960

1960

à 1

970

1970

à 1

980

1980

à 1

990

1990

à 2

000

2000

à 2

010

2010

à 2

020

Femmes Hommes

Années de vie vécues (avec paralysie cérébrale)

Années de vie ajustées en fonction de la santé (avec paralysie cérébrale)

Années de vie vécues (sans paralysie cérébrale)

Années de vie ajustées en fonction de la santé (sans paralysie cérébrale)

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 36 Vol 40, n° 2, février 2020

TABLEAU 2 Moyenne projetée des coûts totaux par habitant dans le secteur des soins de santéa, population canadienne atteinte

de paralysie cérébrale et population exempte de maladie neurologique, les deux sexes, selon l’âge, 2011 et 2031

Groupe d’âge (ans)

Coûts totaux en soins de santé ($) Ratio des coûts (paralysie cérébrale c.

sans maladie neurologique)

Population atteinte de paralysie cérébrale Population exempte de maladie neurologique

2011 2031 2011 2031

Moins de 1 an 30 497 30 353 1 900 1 899 16:1

1 à 4 11 666 11 671 564 564 21:1

5 à 9 10 129 10 140 484 484 21:1

10 à 14 10 108 10 149 463 463 22:1

15 à 19 9 765 9 771 702 701 14:1

20 à 24 8 471 8 489 854 851 10:1

25 à 29 7 615 7 607 1 066 1 068 7:1

30 à 34 8 599 8 580 1 215 1 227 7:1

35 à 39 7 203 7 185 1 216 1 225 6:1

40 à 44 8 678 8 654 1 305 1 308 7:1

45 à 49 9 322 9 324 1 575 1 574 6:1

50 à 54 10 915 10 903 1 998 1 996 5:1

55 à 59 13 868 13 983 2 514 2 513 6:1

60 à 64 14 158 14 151 3 204 3 207 4:1

65 à 69 17 248 17 263 4 129 4 132 4:1

70 à 74 20 498 20 516 5 168 5 174 4:1

75 à 79 19 302 19 371 6 343 6 348 3:1

80 à 84 21 344 21 343 7 546 7 550 3:1

85 et plus 23 555 24 141 9 197 9 177 3:1

a Les coûts totaux des soins de santé regroupent les coûts liés au médecin, à l’hôpital de soins de courte durée et de réadaptation, aux médicaments d’ordonnance, aux soins à domicile provin-ciaux, aux appareils et accessoires fonctionnels, aux soins de longue durée et aux dépenses directes des personnes atteintes de la maladie et des proches aidants. Les coûts ont été estimés en dollars canadiens constants de 2010 (sans inflation ni actualisation).

Comme pour les autres paramètres du POHEM – Maladies neurologiques, la ten­dance en matière de dépenses directes en 2011 ne devrait pas changer d’ici 2031, en raison des hypothèses de statu quo utili­sées dans le processus de modélisation.

La figure 9 illustre également que les coûts totaux des soins de santé associés à la vie avec une paralysie cérébrale vont aug­menter constamment au cours des 20 pro­chaines années, tandis que le coût des soins non liés à la paralysie cérébrale demeurera stable au cours de la même période.

Analyse

Le POHEM – Maladies neurologiques offre des projections des répercussions épidé­miologiques et économiques de la paraly­sie cérébrale sur une période de 20  ans. Même si le modèle suppose que l’inci­dence de la paralysie cérébrale selon l’âge et le sexe demeurera constante au cours de la période de projection, il prévoit une

augmentation du nombre de Canadiens atteints de paralysie cérébrale, qui passera de plus de 75 000 en 2011 à plus de 94 000 en 2031. Comme la paralysie cérébrale est un problème de santé chronique, il sera sûrement nécessaire d’accroître le nombre de services de soutien offerts à long terme pour compenser l’augmentation du nom­bre de personnes atteintes.

En outre, le POHEM  – Maladies neuro­logiques tient compte du fait que les per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale ont tendance à vivre de plus longues périodes avec une moins bonne qualité de vie liée à la santé (comme en témoignent les notes plus faibles pour l’IES3) que leurs homo­logues exemptes de maladie neurologique. Bien que la caractéristique principale de la paralysie cérébrale soit une déficience motrice non progressive, on observe qu’une déficience cognitive, des difficultés d’ali­mentation, des convulsions, une déficience visuelle et une mobilité réduite sont des troubles qui lui sont couramment associés et qui peuvent progresser au fil du temps.

Nous avons constaté qu’en moyen ne, les femmes atteintes de paralysie cérébrale perdent environ 41  ans de vie en bonne santé par comparaison avec les Canadiennes exemptes de maladie neurologique. Les hommes atteints de paralysie cérébrale en perdent quant à eux 33. L’écart dans les AVAS entre les hommes et les femmes est largement attribuable aux différences en matière d’espérance de vie, car les femmes vivent plus longtemps en moins bonne santé (figure 7).

Le fait de vivre de longues périodes en mauvaise santé et en incapacité fonction­nelle peut alourdir le fardeau des per­sonnes touchées et de leur famille, ainsi que celui du système de soins de santé.

Les coûts totaux des soins de santé pour l’ensemble des catégories pour les Canadiens atteints de paralysie cérébrale augmente­ront d’environ 33 %, contre moins de 1 % pour les coûts non liés à la paralysie céré­brale. De plus, on s’attend à ce que les personnes atteintes de paralysie cérébrale

37Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

FIGURE 9 Coûts totaux des soins de santé (millions de $) des personnes

atteintes de paralysie cérébrale, par année

1200

1000

800

600

400

200

0

2011 2016 2021 2026 2031

Coût

s tot

aux

des s

oins

de

sant

é (m

illio

ns d

e $)

Coût habituel des soins Coût des soins liés à la paralysie cérébrale

Année

et leur famille engagent des dépenses directes importantes. À mesure que les soins médicaux et les traitements pro­gressent, un nombre croissant d’enfants atteints de paralysie cérébrale atteignent l’âge adulte. Toutefois, la prestation de services de santé et de programmes spé­cialisés tend à ne pas suivre le rythme des besoins des familles et des individus, ce

qui complique la transition de l’enfance à l’âge adulte14,48,49.

Comme les personnes atteintes de paraly­sie cérébrale reçoivent moins de services de soins de santé lorsqu’elles atteignent l’âge adulte, leur demande de soins infor­mels augmente, et les parents et les mem­bres de leur famille interviennent souvent

pour fournir un soutien financier et les soins re quis. Comme nous l’avons men­tionné dans notre étude, les aidants des personnes atteintes de paralysie cérébrale fournissent beaucoup plus d’heures de soins informels par semaine et engagent beaucoup plus de dépenses directes que les parents ou les amis des personnes exemptes de cette maladie. L’impact éco­nomique de la perte de revenus pour les aidants naturels est également une ques­tion qui exigera plus d’attention au cours des 20  prochaines années à mesure que les répercussions de cette maladie seront évaluées.

Forces et limites

Notre étude fournit des renseignements importants qui renforcent notre compré­hension de cette maladie neurologique complexe. Les projections du POHEM  – Maladies neurologiques peuvent aider à planifier les futurs programmes et straté­gies de santé destinés aux Canadiens atteints de paralysie cérébrale.

Les résultats actuels du POHEM  – Mala­dies neurologiques sont liés à l’hypothèse qu’il n’y aura pas de changement dans l’incidence de la paralysie cérébrale selon l’âge et le sexe, la mortalité relative ou la santé fonctionnelle (IES3). Par consé­quent, les principaux facteurs de la préva­lence, de l’incidence et du coût futurs de la paralysie cérébrale dérivés du POHEM – Maladies neurologiques sont fondés unique­ment sur les changements démographiques projetés de la population canadienne. Toutefois, de futures itérations du modèle pourraient évaluer d’autres scénarios, comme l’actualisation des coûts ou les variations de l’incidence ou de la mor­talité relative pour déterminer leur impact sur l’avenir de la paralysie cérébrale au Canada.

Bien que l’incidence, la mortalité et les coûts aient été calculés à partir de don­nées administratives provinciales cana­diennes, l’algorithme de définition des cas visant à identifier les personnes atteintes de paralysie cérébrale n’avait pas été validé au moment de la mise en œuvre. Dans les évaluations initiales, les taux de prévalence projetés par le modèle étaient particulièrement plus élevés que les taux observés. Par conséquent, un paramètre a été inclus dans le POHEM – Maladies neu­rologiques pour supprimer l’identification à la paralysie cérébrale de certains cas

FIGURE 8 Dépenses directes moyennes (par habitant) d’aidants naturels de personnes atteintes de paralysie cérébrale et de personnes exemptes de maladie neurologique, par groupe d’âge sélectionné, 2011

6000

5000

4000

3000

2000

1000

0min à 35 35 à 65 65 à 75 75 à max

Avec paralysie cérébraleSans paralysie cérébrale

Groupe d'âge (années)

Dép

ense

s di

rect

es m

oyen

nes

des

aida

nts

($ p

ar a

nnée

)

5563,87 $

1499,83 $

4809,41 $

454,18 $

4091,54 $

113,19 $

4212,39 $

83,76 $

Abréviations : max, âge maximum; min, âge minimum.

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 38 Vol 40, n° 2, février 2020

prévalents pour un sous­ensemble d’ac­teurs. Un tel paramètre tient compte d’un éventuel diagnostic erroné, qui se produit parfois et « dissimule  » la paralysie céré­brale38. Dans une récente étude cana­dienne, on a comparé une définition de la paralysie cérébrale fondée sur une base de données administratives et celle d’une approche fondée sur un registre. Cette étude a permis de constater que 41 % des cas inscrits dans la base de données administratives ne figuraient pas dans le registre et que 34 % des cas saisis dans le registre ne figuraient pas dans la base de données administratives28. Par conséquent, une définition plus nuancée de la paraly­sie cérébrale pourrait être nécessaire si on utilise des données administratives pour saisir l’incidence et les coûts associés à cette maladie. Par ailleurs, une combinai­son de méthodes, notamment des codes de la CIM et des diagnostics de paralysie cérébrale inscrits dans des dossiers médi­caux ou scolaires, comme en fait état une étude réalisée en 201950, peut être utilisée plus en profondeur afin de réduire les erreurs dans l’identification des cas de paralysie cérébrale.

Des études réalisées par Finès et ses col­laborateurs30, Manuel et ses collabora­teurs31, Amankwah et ses collaborateurs32

et Hennessy et ses collaborateurs51 traitent en profondeur des limites des modèles de microsimulation POHEM – Maladies neu­rologiques, notamment de l’application des données sur l’incidence et la mortalité obtenues d’une province à l’ensemble du pays, des coûts des soins de santé de deux provinces, des incertitudes liées aux erreurs de modélisation de type I et II et des ajustements apportés pour réduire les effets de ces limites.

Conclusion

Les résultats de notre étude montrent que les Canadiens atteints de paralysie céré­brale continueront à avoir une qua lité de vie réduite, une incapacité accrue et un besoin croissant de services de soutien, en particulier de soins informels. Les dépenses en soins de santé, en particulier les dépenses directes, devraient demeurer éle­vées au cours des 20 prochaines années. Les personnes atteintes de paralysie céré­brale ont tendance à avoir une espérance de vie normale. Elles sont donc confron­tées à des défis constants parce qu’elles ont un besoin permanent de soins médi­caux spécialisés, de services d’éducation

adaptés, d’aide au développement et de soutien général à la vie autonome. En outre, les coûts indirects associés à la perte de productivité et de revenus pour les personnes et la société, ainsi que les limitations professionnelles, doivent être pris en compte. Il faudra peut­être accor­der plus d’attention aux besoins des per­sonnes atteintes de paralysie cérébrale dans les différentes étapes de leur vie si les services et les programmes de soins de santé dont elles ont besoin ne sont pas adaptés ou ne sont tout simplement pas offerts.

Remerciements

Cette étude a obtenu le soutien de l’Institut de recherche en services de santé, qui reçoit une subvention annuelle du minis­tère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario (MSSLD).

Conflits d'intérêts

MO est un chercheur sur le site dans le cadre des essais cliniques de la maladie d’Aran­Duchenne effectués par Roche, Biogen et Cytokinetics, ainsi qu’un ancien membre du comité de surveillance des données et de la sécurité d’Avexis.

Contributions des auteurs et avis

NA, MO et RG ont contribué à la concep­tion, à la rédaction, à l’interprétation de l’analyse et à l’examen critique de l’article. MO a fourni une expertise spécialisée en matière de contenu sur la paralysie céré­brale, tandis que RG, CB, DGM, RW, PF, JB, KT et KR ont contribué à l’acquisition de données, à la modélisation par micro­simulation et à la relecture de l’article.

Les opinions, les conclusions et les résul­tats présentés dans cet article sont ceux des auteurs, ne correspondent pas néces­sairement à ceux du gouvernement du Canada, et sont indépendants des sources de financement. Aucune approbation de l’Institut de recherche en services de santé ou du MSSLD de l’Ontario n’a été prévue ni ne devrait être supposée. Certaines par­ties de cet article reposent sur des don­nées et des renseignements compilés et fournis par l’Institut canadien d’infor­mation sur la santé. Toutefois, les analy­ses, les conclusions, les opinions et les déclarations qui y sont formulées sont celles des auteurs et ne reflètent pas

nécessairement celles de l’Institut cana­dien d’information sur la santé.

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41Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

Rattachement des auteurs :

1. Université de Calgary, Calgary (Alberta), Canada2. San Patten and Associates, Halifax (Nouvelle-Écosse), Canada 3. Université de l’Alberta, Edmonton (Alberta), Canada 4. Université de Lethbridge, Lethbridge (Alberta), Canada 5. HIV Edmonton, Edmonton (Alberta), Canada 6. HIV Community Link, Calgary (Alberta), Canada

Correspondance : Aniela M. dela Cruz, Faculté des sciences infirmières, Université de Calgary, PF2230, 2500 University Drive N.W., Calgary (Alberta) T2N 1N4; tél. : 403-210-7484; courriel : [email protected]

Recherche originale par méthodes mixtes

Dépistage obligatoire du VIH, migration et stigmatisation liée au VIH au Canada : analyse de l’expérience d’immigrants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH dans l’Ouest canadienAniela dela Cruz, Ph. D. (1); San Patten, M. Sc. (2); Inusa Abdulmalik, M. Sc. (3); Jean Harrowing, Ph. D. (4); Marc Hall, M. Sc. (1); Arfan R. Afzal, Ph. D. (1); Tsion Demeke Abate, M. Éd. (5); Andrea Carter, B.N.M. (6); Peggy Spies, M.A.P. (5); Sipiwe Mapfumo, M. Sc. (6); Vera Caine, Ph. D. (3)

Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.

Points saillants

• Les personnes provenant de pays où le VIH est endémique, ce qui englobe la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne, sont sur­représentées dans les données nationales de surveillance du VIH au Canada.

• Cette étude pilote fournit de nou­velles connaissances sur les expé­riences d’immigrants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH dans une province de l’Ouest canadien.

• Cette étude offre de nouvelles pers­pectives sur les recoupements entre la culture, les déterminants sociaux, le VIH, la stigmatisation et les répercussions possibles sur la cas­cade de soins contre le VIH et le bien­être mental pendant la migra­tion et lors de l’établissement au Canada.

• D’autres travaux de recherche sont requis, en particulier une recherche interventionnelle, afin de réduire la stigmatisation pendant l’examen médical aux fins de l’immigration (EMI) canadien et d’assurer une meilleure participation à la cascade de soins contre le VIH.

Résumé

Contexte. Dans cette étude pilote à méthodes mixtes, nous avons examiné les recoupe­ments entre la politique canadienne actuelle en matière d’immigration, le dépistage obligatoire du VIH effectué pendant l’examen médical aux fins de l’immigration (EMI) et la stigmatisation effective et intériorisée liée aux immigrants d’Afrique subsaharienne séropositifs qui vivent dans une province de l’Ouest canadien. Nous mettons l’accent sur les résultats qualitatifs obtenus dans le cadre de cette étude.

Méthodologie. À l’aide de l’Internalized HIV Stigma Scale (IHSS), nous avons recueilli des données auprès de huit immigrants d’Afrique subsaharienne infectés par le VIH vivant dans une province de l’Ouest canadien. Nous avons ensuite réalisé des entrevues semi­dirigées auprès de sept de ces huit participants. Compte tenu du petit échantillon, les données des entrevues ont été synthétisées en utilisant une analyse descriptive. Les données qualitatives ont été examinées au moyen d’une analyse comparative constante.

Résultats. L’analyse des données qualitatives a permis de dégager les thèmes principaux suivants : détresse émotionnelle liée au VIH pendant l’EMI, expériences variées relative­ment au processus de dépistage du VIH pendant l’EMI et manque de cohérence en matière de mise en relation avec les soins médicaux, le soutien psychosocial et la participation à la cascade de soins contre le VIH.

Conclusion. Les résultats de cette étude pilote ne sont pas généralisables à l’ensemble de la population d’immigrants vivant avec le VIH au Canada. Cependant, nous avons cons­taté que les expériences de stigmatisation intériorisée et effective liées au VIH pendant l’EMI peuvent avoir des répercussions sur la participation à long terme à la cascade de soins contre le VIH au cours du processus de migration et d’établissement au Canada. Il est souhaitable de réaliser d’autres études auprès de cette population afin d’examiner les recoupements entre le dépistage obligatoire du VIH (actuellement effectué pendant le pro­cessus d’immigration), la migration, l’établissement au Canada, la culture, la stigmatisa­tion et la participation à la cascade de soins contre le VIH.

Mots‑clés : VIH/sida, immigrants, Afrique subsaharienne, Canada, migration, immigration, cascade de soins contre le VIH, examen médical aux fins de l’immigration

https://doi.org/10.24095/hpcdp.40.2.02f

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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 42 Vol 40, n° 2, février 2020

Introduction

Environ 63 110  personnes vivent avec le VIH au Canada1,2. Même si les ressortis­sants de pays où le VIH est endémique – notamment la plupart des pays d’Afrique subsaha rienne – sont surreprésentés dans les données nationales de surveillance du VIH1,2, on en sait très peu sur les expé­riences des immigrants d’Afrique subsaha­rienne vivant avec le VIH au Canada. Par ailleurs, bien que plusieurs études en population aient été menées dans le cen­tre du Canada, l’information sur les immi­grants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH dans l’Ouest canadien est limitée, et ce, malgré un nombre croissant de nouveaux cas d’infection à  VIH chez les immigrants provenant de pays où le VIH est endémique3.

La plupart des immigrants doivent subir un examen médical aux fins de l’immi­gration (EMI) dans le cadre du processus de demande d’immigration au Canada. Le dépistage du VIH est devenu obligatoire en 2002, et ce sont des médecins désignés par le gouvernement fédéral canadien qui effectuent les EMI. Ces médecins sont soit des praticiens qui vivent au Canada, soit des ressortissants étrangers vivant dans d’autres pays4.

Selon les travaux précurseurs de Goffman5, la stigmatisation renvoie au concept com­plexe de déviance et aux perceptions de la société envers des personnes considérées comme étant différentes des normes socié­tales. La stigmatisation liée au VIH a été conceptualisée de différentes façons dans la littérature6. La stigmatisation intériori­sée est définie comme «  l’acceptation, chez une personne vivant avec le VIH, de croyances et de sentiments négatifs asso­ciés au VIH à son égard » 6,p.4. La stigma­tisation effective désigne «  les actes de discrimination manifestes, comme l’exclu­sion ou la violence physique ou psycho­logique (ces actes peuvent être imputables à l’identité ou à l’appartenance réelle ou perçue d’une personne à un groupe stig­matisé) »7, p.1. La stigmatisation intériori­sée liée au VIH est associée à une mauvaise observance du traitement médi­camenteux contre le VIH, à une faible par­ticipation à la cascade de soins contre le VIH et à des résultats défavorables sur le plan social et sur le plan de la santé8­13.

Au Canada, la population immigrée, com­parativement à la population non immigrée,

est susceptible de se heurter à des obsta­cles considérables en ce qui concerne l’obtention de résultats favorables sur le plan social et sur le plan de la santé14,15, ce qui entraîne des inégalités en matière de santé. Il est particulièrement important de comprendre la stigmatisation intériorisée liée au VIH chez les immigrants infectés par le VIH, car les politiques d’immigration ainsi que les expériences de migration et d’établissement au Canada peuvent influer sur leur participation à la cascade de soins contre le VIH. Il existe très peu de travaux de recherche sur les expériences des can­didats à l’immigration concernant l’EMI, la stigmatisation liée au VIH, la migration, l’établissement au Canada et l’accès à des services de santé spécialisés pour le VIH. Plus spécifiquement, peu de travaux de recherche portent sur les expériences de stigmatisation vécues pendant le dépistage obligatoire du VIH effectué dans le cadre de l’EMI. La recherche sur la façon dont la stigmatisation influe sur la participation à la cascade de soins contre le VIH pendant la migration et l’établissement au Canada est également limitée.

Objectifs

Voici notre question de recherche  : com­ment les immigrants d’Afrique subsaha­rienne vivant avec le VIH dans une province de l’Ouest canadien intériori sent­ ils et perçoivent­ils la stigmatisation liée au VIH vécue pendant l’EMI?

Les objectifs de cette étude pilote explo­ratoire étaient 1) de mesurer la stigmatisa­tion liée au VIH chez des immigrants de l’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH à l’aide de l’Internalized HIV Stigma Scale (IHSS)16 et 2)  d’explorer comment ces immigrants d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH ont vécu la stigmatisa­tion liée au VIH pendant l’EMI.

Nous avons analysé les résultats de notre étude selon la perspective théorique de l’intersectionnalité17 et selon la théorie sociale critique18. Nous avons recueilli des données sur la façon dont le dépistage obligatoire du VIH des candidats à l’immi­gration, leur statut juridique, la stigmatisa­tion et la culture influent sur les disparités sociales et les disparités en matière de santé au sein de cette population.

Méthodologie

Dans cette étude pilote à méthodes mixtes, nous avons recueilli des données

quantitatives, à la fois des données socio­démographiques et cliniques et des don­nées tirées de l’IHSS16. Nous avons également recueilli des données qualita­tives, au moyen d’entrevues semi­dirigées. Nous avons recruté les participants auprès d’organismes communautaires et de cli­niques de VIH au moyen d’un échantil­lonnage dirigé. Étant donné la nature exploratoire de notre étude, nous ne visions pas une taille d’échantillon apte à détecter des différences statistiquement significatives.

Les critères d’inclusion suivants ont été utilisés : personne de 18 ans ou plus; diag­nostic confirmé d’infection à VIH; dépis­tage obligatoire du VIH dans le cadre de l’EMI canadien (s’applique aux immi­grants arrivés au Canada après 2002) et capacité de comprendre et de parler l’anglais. Chaque entrevue a duré environ une heure, et une rétribution de 25 $ a été versée. Nous avons offert cette rétribu­tion, modeste (66 % de plus que le salaire horaire minimum dans cette province), pour souligner l’expertise des membres de la communauté, particulièrement les per­sonnes d’expérience, et pour témoigner de l’importance des personnes impliquées dans la recherche communautaire.

L’approbation éthique a été obtenue de trois comités universitaires d’éthique de la recherche, soit ceux de l’Université de Calgary (REB15­0471), de l’Université de l’Alberta (PR00000056579) et de l’Université de Lethbridge (HSRC2015­035).

L’IHSS est le premier instrument reconnu qui permet une mesure multidimension­nelle de la stigmatisation intériorisée liée au traitement et à d’autres aspects de l’infection à VIH chez des personnes diversifiées sur le plan sociodémogra­phique vivant avec le VIH en Amérique du Nord. Il s’agit d’un instrument de mesure en 28 points portant sur la stigma­tisation intériorisée liée au VIH composé de quatre sous­échelles (stéréotypes, pré­occupations relatives à la divulgation de la séropositivité, relations sociales et acceptation de soi)16.

En raison du petit échantillon de notre étude pilote (N = 8), les données quanti­tatives ont été retenues pour une analyse descriptive seulement. Le volet qualitatif de l’étude a fourni des données riches, et les résultats présentés ici sont axés sur ces données qualitatives.

43Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

* Un demandeur du statut de réfugié qui souhaite immigrer au Canada peut présenter une demande de parrainage privé. Le parrainage est généralement effectué par un groupe de citoyens canadiens qui sont prêts à parrainer et à appuyer le candidat au cours du processus de demande et d’établissement, conformément à la politique actuelle (https://www.canada .ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/publications-guides/guide-programme-parrainage-prive-refugies.html).

TABLEAU 1 Caractéristiques des participants (N = 8)

Variables Fréquence (n)

Sexe

Homme 4

Femme 4

Immigration au Canada

Avant 2010 1

Entre 2010 et 2014 5

Après 2014 2

Revenu annuel ($)

< 10 000 2

10 000 à 25 000 3

25 000 à 40 000 2

> 40 000 1

Nombre d’années d’études terminées

5 à 8 1

9 à 10 0

11 à 13 2

14 et plus 5

Relation

En couple 4

Pas en couple 4

Comportement sexuel

Homme ayant des relations sexuelles avec des femmes 4

Femme ayant des relations sexuelles avec des hommes 3

Autre 1

Dépistage du VIH effectué pendant l’EMI canadien

Oui 8

Séropositivité inconnue avant l’EMI canadien

Oui 3

Non 5

Diagnostic de sida

Oui 5

Non 3

Prise de médicaments contre le VIH

Oui 8

Résultat connu de la dernière numération des lymphocytes T‑CD4

Oui 3

Non 3

Données manquantes 2

Abréviation : EMI, examen médical aux fins de l’immigration.

Les membres de l’équipe de recherche ont interviewé les participants à l’aide d’un guide d’entrevue semi­dirigée. Ce guide comprenait des questions sur la stigmati­sation liée au VIH, le dépistage du VIH durant le processus d’immigration, l’expé­rience de la stigmatisation et la participa­tion à la cascade de soins contre le VIH pendant l’EMI, la migration et l’éta­blissement au Canada. Les entrevues ont été enregistrées sur bande audio puis transcrites.

Nous avons analysé les données qualita­tives conformément aux approches décrites par Corbin et Strauss20. Bien que l’étude n’ait pas été réalisée à l’aide d’une méthode de recherche fondée sur la théo­rie ancrée, l’équipe de recherche a analysé les données qualitatives selon un proces­sus itératif d’analyse et de collecte de données. Les concepts concernant la stig­matisation liée au VIH ont été définis par les chercheurs, en équipe. Ces concepts ont ensuite été regroupés dans de grandes catégories portant sur la stigmatisation liée au VIH et l’EMI canadien, puis ils ont été évalués au moyen d’une analyse com­parative cons tante afin d’en dégager les tendances, les similitudes et les dif­férences19,20. L’équipe de recherche a prin­cipalement analysé les données par codage ouvert19,20, en mettant surtout l’accent sur les événements, les actions et les interactions.

Résultats

Caractéristiques de l’échantillon

Le VIH est un sujet très délicat et stigma­tisé parmi les immigrants d’Afrique subsa­harienne au Canada21,22 et, comme s’y attendait l’équipe de recherche, le recrute­ment de participants s’est avéré difficile. En travaillant avec des intervenants et des collaborateurs œuvrant auprès de cette population, en particulier des cliniques de VIH et des organismes de lutte contre le sida, et grâce à de multiples efforts, l’équipe de recherche a réussi à recruter huit participants qui ont répondu au son­dage de l’IHSS, dont sept ont accepté de participer à une entrevue de suivi indivi­duelle approfondie avec un chercheur. Le statut juridique des participants variait  : certains vivaient au Canada à titre de demandeurs du statut de réfugié, d’autres

à titre de réfugiés pris en charge par le gouvernement et d’autres à titre de rési­dents permanents parrainés*.

Le tableau 1 présente les principales carac téristiques des participants.

En raison du petit échantillon (N = 8), les résultats quantitatifs ont été analysés de façon descriptive afin de fournir un contexte aux résultats qualitatifs. Le tableau  2 indique le nombre de partici­pants vivant de la stigmatisation «  la

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 44 Vol 40, n° 2, février 2020

plupart du temps  » ou «  tout le temps  » pour chaque thème de l’IHSS. Nous avons constaté que la plupart des participants (5/8) vivaient une forte stigmatisation intériorisée liée au VIH sur le plan de l’ac­ceptation de soi.

Expériences relatives à l’EMI des immigrants infectés par le VIH

Les principales catégories thématiques sui­vantes se sont dégagées de l’analyse qua­litative des données recueillies en entre vue :

• détresse émotionnelle liée au VIH pen­dant l’EMI;

• expériences variées relativement au processus de dépistage du VIH pen­dant l’EMI;

• manque de cohérence en matière de liaison avec les soins médicaux et le soutien psychosocial;

• participation à la cascade de soins con­tre le VIH.

Détresse émotionnelle liée au VIH pendant l’EMI

Certains participants, en particulier les demandeurs du statut de réfugié au moment de l’entrevue, se sont dits très inquiets et craignaient que leur séroposi­tivité ne compromette leur capacité de migrer au Canada ou d’y demeurer légale­ment. Un participant a fait remarquer que bon nombre de ses compatriotes expatriés avaient déjà obtenu la résidence perma­nente ou étaient même devenus citoyens canadiens, alors qu’il attendait toujours. Ce participant croyait que sa séropositivité avait contribué aux retards dans le traite­ment de sa demande d’immigration :

Je pense que le VIH m’a causé des ennuis. Oui, j’ai toujours été positif, mais quand je vois que le VIH semble être un obstacle à ce que je devienne

TABLEAU 2 Nombre de participants vivant une stigmatisation intériorisée liée au VIH

« la plupart du temps » ou « tout le temps » selon chaque thème de l’IHSS (N = 8)

Thème nStéréotypes 3

Préoccupations relatives à la divulgation de la séropositivité 2

Relations sociales 1

Acceptation de soi 5

Source : Sayles et collab.16

Abréviation : IHSS, Internalized HIV Stigma Scale.

citoyen ou résident permanent cana­dien, c’est vraiment là que ça me stresse... Le VIH retarde peut­être mon immigration... (P100) [traduction]

Après avoir reçu son premier diagnostic d’infection à VIH au cours de l’EMI, un participant s’est dit inquiet des effets sur sa famille et sur le processus d’immi­gration pour lui­même et ses enfants :

Tous les sentiments positifs que je res­sentais, le bonheur, l’excitation, l’espoir que j’avais de venir au Canada, tout a disparu d’un seul coup... quand la médecin m’a dit que j’étais séropositif mais que le VIH n’affecterait pas mon processus d’immigration... je ne la croyais pas... c’est pour ça que j’avais le sentiment que ça ne touchait pas seulement moi, mais ma famille et mes enfants aussi... que c’était comme une punition pour mes enfants... j’étais très inquiet... (P104) [traduction]

Après avoir reçu un diagnostic d’infection à VIH, un autre participant s’est dit inquiet au sujet de ses enfants :

Je pense que je n’ai jamais été aussi stressé de ma vie. C’est la première fois que je comprends vraiment ce que c’est, le stress... Ma famille et mes enfants souffrent à cause de mon diag­nostic de VIH... (P100) [traduction]

Un participant craignait que les personnes qui le parrainaient ne veuillent plus appuyer son immigration si elles décou­vraient qu’il était séropositif :

Le gouvernement du Canada a la responsabilité de protéger les citoyens canadiens. Le médecin qui effectuait l’EMI m’a dit que je devais aviser les personnes qui me parrainent de cette... situation, et que ce sont elles qui décideraient si j’allais venir au Canada quand même ou non. J’avais peur... je ne sais pas ce qui va se passer. Je ne

sais pas si je vais être malade, je ne sais pas si les personnes qui me par­rainent vont vouloir que mon enfant et moi restions avec elles... (P107) [tra duction]

Un participant a décrit la situation para­doxale qu’il a vécue : il a appris qu’il était accepté en tant qu’immigrant au Canada et a reçu un diagnostic positif de VIH en même temps :

Quand la médecin de l’immigration m’a dit que j’étais séropositif... je ne pouvais pas lui parler, je tremblais tel­lement j’étais en colère. Tout a dis­paru... obtenir ce visa pour venir au Canada, c’est spécial pour nous, les Africains, vous savez [...]. J’ai attendu environ dix ans pour partir... Après avoir reçu mon diagnostic de VIH... plus rien ne m’intéressait. Ma femme me demandait pourquoi je n’avais pas l’air content et ce qui n’allait pas. (P104) [traduction]

Trois participants ont parlé du trauma­tisme d’avoir reçu un diagnostic positif de VIH pour la première fois pendant leur EMI. Certains ont même pensé au suicide après avoir appris leur diagnostic :

Je me demandais juste... comment je pourrais me suicider? C’est à ça que je pensais. Oui, je crois que j’y ai pensé à un moment donné. C’est à ça que je pensais. Je ressentais de la solitude... Je pleurais à cause de ça... parfois j’essayais... je pensais à me suicider. (P106) [traduction]

Un autre participant a décrit son désespoir lorsqu’il a appris qu’il était séropositif :

... J’avais l’impression que je ne méri­tais pas de vivre, que ce serait peut­être mieux si je mourais... J’étais vraiment stressé et je n’avais jamais été stressé avant... (P100) [traduction]

Expériences variées relativement au processus de dépistage du VIH pendant l’EMI

Les participants devaient décrire le dépis­tage du VIH effectué pendant l’EMI. Les participants ont parlé de la mesure dans laquelle ils ont donné leur consentement éclairé pour le dépistage du VIH. Quatre des participants n’ont pas été informés que l’EMI comprenait un dépistage obliga­toire du VIH. Les participants ont déclaré qu’aucun service de counseling préalable

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Recherche, politiques et pratiques

au dépistage du VIH ni aucun renseigne­ment sur l’EMI n’ont été fournis. Les par­ticipants ont mentionné qu’ils souhaitaient désespérément quitter leur pays et qu’ils étaient prêts à satisfaire à toutes les exi­gences médicales, sans remettre en ques­tion ce qu’on leur demandait.

Cinq participants savaient qu’ils étaient séropositifs avant l’EMI. Un des partici­pants qui l’a su au cours de l’EMI a décrit que la nouvelle avait été dévastatrice :

J’ai été voir la médecin de l’immigra­tion avec ma femme et mes enfants... elle a finalement laissé sortir ma femme et mes enfants, mais elle m’a demandé de rester. Une fois les autres sortis, elle m’a dit que j’étais séropositif... tout le bonheur, l’excitation, l’espoir que j’avais de venir au Canada, tout a dis­paru en un instant. (P104) [traduction]

Les interactions des participants avec les médecins désignés étaient différentes selon que l’EMI avait eu lieu au Canada ou à l’étranger. Sur les sept participants qui ont accepté d’être interviewés, trois ont subi l’EMI au Canada et quatre l’ont subi avant d’arriver au Canada (au Botswana, au Soudan, en Ouganda et au Zimbabwe). La plupart des participants qui ont subi l’EMI au Canada estimaient que le médecin désigné et les autres pro­fessionnels de la santé offraient des soins avec compassion, empathie et respect. En revanche, les participants qui ont subi l’EMI à l’étranger ont mentionné des sou­cis et des problèmes liés à la protection de la vie privée et à la confidentialité, ainsi qu’un sentiment d’être jugé par le méde­cin de l’EMI. Une participante a fait la remarque suivante :

Le problème, c’est la façon dont on reçoit nos résultats. Ils ne sont pas vraiment... à l’aise de nous annoncer la nouvelle. (P102) [traduction]

Un participant qui a subi l’EMI au Botswana s’est vraiment senti jugé :

On dirait que celui qui effectuait mon examen avait peur de moi... comme si j’étais sale. C’était... comme si j’étais déjà mort. (P106) [traduction]

Les participants ont reçu divers types de conseils après leur diagnostic d’infection à VIH. Un participant était tellement sous le choc après avoir reçu son diagnostic qu’il lui a été impossible de bien se souvenir des conseils qu’on lui avait donnés :

On m’a dit que le VIH faisait partie de la vie, que je devais rester calme... mais c’est comme si mon esprit n’était plus là... je venais d’apprendre que j’avais le VIH. C’est comme si j’avais perdu la tête. Je n’entendais pas ce que le médecin de l’immigration disait. Je n’ai rien entendu. (P106) [traduction]

Manque de cohérence en matière de liaison avec les soins médicaux, le soutien psychosocial et la participation à la cascade de soins contre le VIH

Les participants ont signalé qu’ils avaient été aiguillés vers de nombreux spécialistes aux fins de suivi après le dépistage du VIH effectué dans le cadre de l’EMI; ils ont également mentionné une grande variété de liaisons en matière de soins et de soutien. Les participants ont également reçu des conseils divergents sur la façon de gérer leur infection à VIH au Canada et sur la divulgation de leur séropositivité à d’autres personnes.

Un seul participant a mentionné s’être fait expliquer par le médecin désigné com­ment le système de soins de santé fonc­tionnait et comment les soins liés au VIH devaient se poursuivre après son arrivée au Canada :

Le médecin de l’immigration m’a expliqué comment le système fonc­tionnait au Canada... lorsqu’ils savent que vous êtes séropositif, ils vous con­tactent dès que possible pour vous prendre en charge... ils ouvrent votre dossier, ils s’assurent de vous trouver un spécia liste du VIH, un médecin de famille... Ils m’ont dit tout ça. (P101) [traduction]

Une participante savait qu’elle était séro­positive et suivait un traitement lorsqu’elle a subi l’EMI. Après qu’elle en ait informé le médecin désigné, celui­ci ne s’est pas renseigné sur son degré de participation à la cascade de soins contre le VIH et ne l’a pas non plus avisée des lois canadiennes concernant la non­divulgation de la séro­positivité. La participante a mentionné que le médecin désigné de son pays d’origine n’avait fourni qu’une ordonnance à court terme de médicaments contre le VIH et qu’il n’avait offert aucun conseil sur la façon de poursuivre le traitement après son arrivée au Canada :

Oui, on m’a prescrit des médicaments pour deux mois, pour que je puisse au

moins en prendre en attendant de voir un médecin ici au Canada... C’est tout ce qu’ils m’ont donné. (P105) [traduction]

Une autre participante a également sig­nalé que le médecin désigné ne lui avait pas parlé du système de santé au Canada, des lois relatives à la non­divulgation de la séropositivité ou de la façon d’accéder aux soins liés au VIH au Canada. C’est sa tante établie au Canada qui a facilité la liaison avec des soins spécialisés liés au VIH :

Quand je suis arrivée, ma tante était au courant de ma situation, alors c’est elle qui s’est adressée aux employés de cette clinique et leur a dit  : «  Ma cousine est nouvelle dans ce pays et elle a besoin d’aide. » C’est comme ça que j’ai su que je devais y aller, oui, c’est seulement ma tante qui m’en a parlé. (P102) [traduction]

Plusieurs participants ont reçu des con­seils concernant la divulgation de leur séropositivité à leur partenaire. Un seul participant a dit avoir reçu des conseils précis sur les lois canadiennes en matière de non­ divulgation de la séropositivité :

Le médecin de l’immigration m’a dit que si j’avais une relation avec une personne, je devais tout lui dire, y com­pris que j’ai le VIH... Je trouve que c’est difficile d’en parler... alors je me tiens à l’écart des gens. (P106) [traduction]

Cinq participants ont déclaré qu’ils n’avaient pas entamé leur traitement con­tre le VIH avant leur arrivée au Canada. Au Botswana, un participant s’est fait dire par le médecin désigné ayant posé le diag­nostic qu’il allait bien parce que sa numération des lymphocytes  T­CD4 était supérieure à 200. Un participant dont la numération des lymphocytes T­CD4 dépas­sait 200 a déclaré qu’il n’était pas admis­sible à une thérapie antirétrovirale abordable en Ouganda. Un ami a rassuré ce partici­pant en lui disant que le traitement contre le VIH serait offert gratuitement au Canada :

Les traitements sont très bien dans ce pays et ils sont gratuits, alors ne t’inquiète pas. On s’occupera de toi. (P100) [traduction]

Analyse

Les résultats de cette étude pilote ont per­mis de recueillir d’importants éléments

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 46 Vol 40, n° 2, février 2020

d’information sur les expériences de can­didats à l’immigration issus d’Afrique sub­saharienne qui sont infectés par le VIH et qui vivent dans une province de l’Ouest canadien. Ces résultats portent sur les recoupements entre la politique cana­dienne actuelle en matière d’immigration, notamment le dépistage obligatoire du VIH pendant l’EMI, un counseling adé­quat et approprié avant et après le dépistage du VIH, en particulier à propos de la participation à la cascade de soins contre le VIH, la stigmatisation liée au VIH, en particulier la stigmatisation intéri­orisée chez les candidats à l’immigration et la stigmatisation effective dans le sys­tème d’immigration et enfin les disparités dans la participation à la cascade de soins contre le VIH.

La plupart des candidats à l’immigration qui souhaitent migrer au Canada et s’y établir doivent subir un EMI, réalisé par un médecin désigné autorisé au Canada ou à l’étranger. L’EMI comprend un dépis­tage et une évaluation de la santé phy­sique et mentale, et le dépistage du VIH est obligatoire. L’exception réglementaire, sous forme de politique de dépistage obli­gatoire du VIH chez les immigrants23, p.128 pendant l’EMI, et les répercussions d’ordre éthique d’une telle politique pu blique ont été abordées ailleurs23,24. Le dépistage du VIH, dans le cadre de l’EMI, est devenu obligatoire en 2002; il s’agit du seul test qui a été ajouté à l’EMI dans les 50 dernières années23,24. Dans le contexte de l’EMI, on réalise le dépistage du VIH afin d’atténuer les risques pour la santé publique des Canadiens et de réduire le fardeau sur les systèmes canadiens de santé et de services sociaux. Selon la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés25, on peut refuser l’entrée au Canada à un candidat à l’immigration s’il est considéré comme représentant un ris­que potentiel pour la santé et la sécurité publiques des Canadiens ou comme un fardeau possible pour le système de santé canadien.

Parfois le dépistage confirme un diagnos­tic déjà connu de VIH, parfois il s’agit du premier diagnostic reçu par les immi­grants, les réfugiés ou les travailleurs étrangers temporaires. Il est important de tenir compte des conséquences du dépistage du VIH chez les candidats à l’immigration, en particulier ceux qui sont vulnérables (p.  ex.  les réfugiés) ou qui courent un risque élevé de préjudice s’ils sont renvoyés dans leur pays d’origine en

raison de leur séropositivité. De nom­breuses personnes infectées par le VIH dans des pays d’Afrique subsaharienne sont sujettes à de multiples vulnérabilités, comme le fait de revivre des traumatismes passés21,26, ou n’ont pas accès au traite­ment contre le VIH21,26.

Bien que l’objectif principal du dépistage obligatoire du VIH pendant l’EMI soit de déterminer le risque pour la santé pub­lique ou le fardeau excessif pour le sys­tème de santé, le gouvernement du Canada doit également tenir compte des répercussions sur les droits de la personne associées au dépistage obligatoire du VIH effectué pendant le processus d’immigra­tion. Certains candidats (p. ex. les deman­deurs de la catégorie «  regroupement familial » et les demandeurs du statut de réfugié) séropositifs pour le VIH ne peu­vent pas être refusés pour motifs sani­taires27, mais d’autres candidats peuvent l’être.

Le médecin désigné effectuant l’EMI devrait diriger tous les candidats qui obti­ennent un résultat positif au dépistage du VIH vers un traitement et des soins appro­priés. Dans notre étude, les participants n’ont pas tous fait état des mesures de soins appropriées pendant le processus de dépistage du VIH. Ils ont décrit une peur réelle concernant leur séropositivité et les répercussions possibles sur leur demande d’immigration. Cette peur de vivre avec le VIH ou de commencer une thérapie anti­rétrovirale a entraîné une détresse émo­tionnelle importante lors du diagnostic, certains participants ayant même pensé au suicide. Les participants ont signalé un manque de soutien émotionnel immédi­atement après avoir reçu leur diagnostic de VIH.

Enfin, plusieurs participants ont indiqué avoir retardé le traitement du VIH. Les lig­nes directrices sur le traitement du VIH et la mise en œuvre de la thérapie antirétro­virale sont complexes28, mais les partici­pants de notre étude n’ont pas mentionné avoir eu des discussions approfondies sur les options de traitement et de soutien avec le médecin désigné qui a effectué l’EMI.

Le gouvernement du Canada fournit aux médecins désignés des renseignements sur les principales politiques et procé­dures liées à l’EMI, dont le dépistage obligatoire du VIH4. L’Agence de la santé

publique du Canada décrit les éléments de counseling approprié (pré­test et post­ test)4,27,29. Il existe des lignes directrices sur le counseling adapté à l’âge, au sexe et à la culture avant et après le dépistage du VIH, mais les participants ont signalé avoir vécu des expériences de counseling différentes au cours du processus de dépistage de l’infection à VIH dans le cadre de l’EMI. Par ailleurs, en fonction de l’information qui est présentement dispo­nible, il nous est impossible de déterminer le niveau de formation qui est fourni aux médecins désignés autorisés pour mener l’EMI au Canada ou à l’étranger.

Un counseling adéquat et approprié avant et après le dépistage du VIH est essentiel lorsqu’on veut obtenir des résultats favor­ables sur le plan social et sur le plan de la santé chez les personnes vivant avec le VIH ainsi que chez les personnes présen­tant un risque d’infection à VIH30,31. En outre, un counseling adéquat est consi­déré comme une passerelle vers la cas­cade de soins contre le VIH, dans laquelle les gens sont informés et peuvent faire des choix éclairés concernant le dépistage, le diagnostic, le traitement médical, les soins et le soutien continus liés au VIH30,31.

Le counseling préalable au test de dépis­tage du VIH ne demande pas beaucoup de temps31. Dans le cadre de ce type de coun­seling, il faut renseigner la personne sur ses droits en lien avec le dépistage du VIH, le processus, les résultats possibles ainsi que les soins et le soutien offerts en guise de suivi. Dans la mesure du possi­ble, le counseling devrait être offert dans la langue parlée par le candidat à l’immi­gration. Les normes actuelles en matière de counseling préalable au test de dépis­tage du VIH comprennent, à tout le moins, les renseignements suivants  : les modes de transmission du VIH et de prévention, une description de la procédure du test de dépistage, la confidentialité concernant le test de dépistage du VIH, les rapports et le traitement des dossiers, la signification des résultats au test de dépistage du VIH, y compris la possibilité qu’un résultat soit faussement positif ou faussement négatif, la nécessité d’informer toute personne à risque d’infection si le résultat au test est positif et enfin la nécessité d’obtenir le consentement du patient pour le test de dépistage.

Nos résultats indiquent que les partici­pants n’ont peut­être pas reçu un counseling

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Recherche, politiques et pratiques

adéquat ou approprié avant le test de dépistage du VIH. Il est également impor­tant de noter que plus de la moitié des participants ont déclaré ne pas avoir été informés qu’un test de dépistage du VIH était un élément obligatoire de l’EMI. Dans le cadre d’une approche de la santé publique fondée sur les droits de la per­sonne, les gens doivent être informés et en mesure de donner leur consentement pour le test de dépistage du VIH31.

Les instructions canadiennes en vigueur pour l’EMI indiquent qu’un counseling ultérieur au test de dépistage du VIH n’est pas obligatoire pour les candidats à l’immigration qui obtiennent un résultat négatif31 mais qu’il l’est pour ceux dont le résultat est positif. Dans ce dernier cas, les patients doivent être aiguillés vers un spé­cialiste du VIH pour un counseling, une mesure de la charge virale, une numéra­tion des lymphocytes T­CD4 et une théra­pie antirétrovirale, selon les besoins27,31. De plus, les médecins désignés doivent remplir un formulaire que les candidats à l’immigration doivent signer pour con­firmer qu’ils ont reçu un counseling ultéri­eur au test de dépistage du VIH27,31. Plusieurs participants de notre étude n’ont pas reçu de counseling adéquat après le test de dépistage du VIH. Par exemple, un participant a déclaré qu’on ne lui avait pas dit comment obtenir des soins contre le VIH après l’EMI ou après son arrivée au Canada. Ce participant s’en est remis à des membres de sa famille établis au Canada pour accéder à des soins spéciali­sés liés au VIH. Aucune des personnes interrogées ne se rappelait avoir signé le formulaire confirmant que le counseling ultérieur au test de dépistage du VIH avait été fourni. Cette situation met en évidence une déconnexion problématique entre le processus d’EMI et la mise en relation avec des soins et un soutien liés au VIH, surtout compte tenu des engagements stratégiques énoncés par le gouvernement du Canada à l’égard de la cible de traite­ment 90­90­90 de l’ONUSIDA pour aider à mettre fin à l’épidémie mondiale du sida32.

Les personnes vivant avec le VIH au Canada doivent être informées des réper­cussions médicolégales associées à la transmission du VIH sans divulgation de la séropositivité33. La criminalisation de la non­divulgation de la séropositivité est une question complexe33. La Cour suprême du Canada a établi que «  les personnes vivant avec le VIH ont une obligation de divulguer leur statut VIH à un­e partenaire

sexuel­le avant une activité sexuelle qui pose un risque important de lésions cor­porelles graves »33,p.3,34 . Compte tenu de la complexité des lois canadiennes sur la non­divulgation de la séropositivité, les résultats de notre étude montrent que les participants ont reçu peu de renseigne­ments relativement à leur obligation légale de divulguer leur séropositivité à un parte­naire sexuel. De plus, les participants ont déclaré avoir reçu ces renseignements de façon plus ou moins détaillée, ce qui est aussi préoccupant dans le contexte d’une perspective fondée sur les droits de la per­sonne. Si les personnes infectées par le VIH ne connaissent pas les lois du pays dans lequel elles s’établissent, en l’occur­rence le Canada, elles risquent d’avoir des ennuis juridiques.

Le rôle du médecin désigné relativement à l’EMI a déjà été remis en question23,24. Nous proposons que le médecin désigné effectuant l’EMI joue un rôle clé en favori­sant la participation des candidats à l’immigration à la cascade de soins contre le VIH avant la migration et pendant le processus de migration; qu’il informe les candidats à l’immigration de la manière dont ils pourront participer à la cascade de soins contre le VIH une fois établis au Canada et enfin qu’il informe le candidat séropositif des répercussions médicolégales de la non­divulgation de la séropositivité.

Au lieu d’effectuer uniquement le dépis­tage du VIH pour satisfaire aux exigences des politiques d’immigration, le médecin désigné pourrait servir de puissant cataly­seur et favoriser la participation des can­didats à l’immigration à la cascade de soins contre le VIH pendant le processus de migration et d’établissement au Canada. Le médecin désigné effectuant l’EMI pour­rait également s’assurer que la personne comprend les options en matière de soins et de soutien liés au VIH pendant le pro­cessus de migration et d’établissement au Canada. En s’appuyant sur les résultats de notre étude, il est difficile de dire de quelle façon les participants se sont engagés dans les soins liés au VIH entre le moment de leur diagnostic et celui de leur aiguil­lage vers un spécialiste du VIH.

Les données tirées de l’IHSS indiquent que les expériences des participants ont contribué de façon importante à la stigma­tisation intériorisée associée à l’accepta­tion de soi. L’examen des données tirées de l’IHSS et des expériences des participants

soulève des questions sur la relation entre la stigmatisation intériorisée liée au VIH et les structures institutionnelles comme les politiques, les lignes directrices de pra­tique clinique pour le dépistage obli gatoire du VIH pendant le processus d’immigra­tion, les pratiques des fournisseurs de soins de santé et le contexte social de la migration et de l’établissement au Canada.

Les participants ont également fait état de divers degrés de stress émotionnel et de stigmatisation intériorisée liée au VIH : le stress lié à la migration transnationale et à l’établissement, c’est­à­dire au processus d’immigration, et le stress associé à l’annonce du diagnostic de VIH ou à la gestion de la maladie liée au VIH pendant le processus de migration vers le Canada. La détresse émotionnelle ressentie par les participants ayant reçu un diagnostic de VIH pour la première fois pendant l’EMI était importante. Plusieurs d’entre eux ont déclaré avoir vécu un traumatisme après avoir reçu leur diagnostic de VIH, et avoir eu des réactions de l’ordre du choc, de l’incrédulité, de la dépression, des idées suicidaires et de la colère35­38.

Les participants ont dit avoir été préoccu­pés et stressés par l’incidence négative que pourrait avoir leur séropositivité sur leur demande d’immigration au Canada. Bien que les demandeurs du statut de réfugié ne puissent pas être refusés uniquement en raison d’un diagnostic de VIH, la stigmatisation intériorisée était évi­dente, liée à une peur intense d’expulsion que plusieurs demandeurs ont décrite.

Les immigrants constituent une fraction importante de la société canadienne. Il est primordial que le Canada, en tant que pays d’accueil, assure la santé et le bien­être des immigrants, y compris de ceux qui sont infectés par le VIH. Représentant environ 20 % de la popula­tion canadienne totale, les immigrants jouent un rôle vital dans la croissance démographique globale du Canada et ils contribuent également à combler les pénu ries de main­d’œuvre, à renforcer l’économie nationale et la stabilité démo­graphique à long terme39,40. Nos résultats montrent que les immigrants vivant avec le VIH peuvent se heurter à des obstacles en ce qui concerne l’obtention de résultats favorables sur le plan social et sur le plan de la santé en raison de la stigmatisation intériorisée liée au VIH, de la stigmatisa­tion effective et de la possible diminution

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 48 Vol 40, n° 2, février 2020

de leur participation à la cascade de soins contre le VIH pendant le processus de migration et d’établissement au Canada. Les inégalités sur le plan de la santé et sur le plan social au sein de cette population peuvent l’empêcher de participer pleine­ment et de façon significative à la société canadienne.

Dans le cadre de l’EMI, plusieurs partici­pants ont dit avoir vécu une réelle stigma­tisation. Notre étude révèle qu’il y a eu des occasions manquées de la part du médecin, lors de la relation médecin­patient, à encourager le patient à partici­per à la cascade de soins contre le VIH sans porter de jugement. Certains partici­pants ont mentionné avoir eu des interac­tions empreintes de compassion avec le médecin effectuant l’EMI, tandis que d’autres ne l’ont pas mentionné. Même si les médecins désignés effectuant l’EMI sont des omnipraticiens et pas nécessaire­ment des spécialistes des maladies infec­tieuses, ils constituent un relais essentiel pour les candidats à l’immigration au Canada. En effet, ils incarnent même le premier point de contact avec le système canadien de santé et de services sociaux et pourraient donc à ce titre jouer un rôle clé en matière de prestation de soins empreints de compassion pendant l’EMI et en matière de soutien aux candidats séropositifs à participer à la cascade de soins contre le VIH avant la migration et pendant le processus de migration et d’établissement au Canada.

Nos résultats indiquent qu’il est néces­saire d’examiner de façon approfondie les expériences des immigrants séropositifs au cours du processus canadien d’EMI en matière de participation à la cascade de soins contre le VIH.

Points forts, limites et possibilités

Cette étude pilote exploratoire comporte plusieurs limites. Premièrement, l’échan­tillon était petit (N = 8) et ne comprenait que des immigrants de pays d’Afrique subsaharienne. Par conséquent, les résul­tats de l’étude ne sont pas généralisables à d’autres populations immigrées vivant au Canada avec le VIH.

Deuxièmement, tous les participants ont été recrutés dans une province de l’Ouest canadien. D’autres études devraient inclure des participants qui migrent et s’établis­sent partout au Canada. Bien que les soins

de santé soient financés par l’État dans l’ensemble du pays, les systèmes de santé, notamment la prestation des services, l’accès aux services de soins liés au VIH et le soutien offert aux nouveaux arrivants, varient selon les provinces et les terri­toires. Ces écarts peuvent avoir une inci­dence sur la stigmatisation intériorisée liée au VIH et sur la cascade de soins con­tre le VIH vécues par les immigrants séropositifs.

Troisièmement, en raison du petit échan­tillon, les auteurs n’ont pas été en mesure de réaliser une analyse comparative entre les sexes à partir des données de l’étude pilote, ce qui aurait permis d’examiner les tendances à la stigmatisation pour les hommes, pour les femmes et pour les per­sonnes qui s’identifient comme transgenre.

Malgré ces limites, les résultats de cette étude sont un catalyseur pour explorer de manière approfondie les expériences des candidats à l’immigration au cours du dépistage obligatoire du VIH, la stigmati­sation intériorisée et effective pendant l’EMI, et la façon dont les facteurs sys­témiques peuvent avoir un impact sur les inégalités sur le plan de la santé et sur le plan social chez les immigrants vivant avec le VIH, dans le contexte du processus de migration et d’établissement au Canada. Grâce à la compréhension de ces proces­sus sociaux, nous pouvons trouver des solutions conduisant à de meilleurs résul­tats sur le plan social et sur le plan de la santé chez les migrants vivant avec le VIH au Canada.

Enfin, il est important de répondre aux besoins psychosociaux et de santé men­tale de toutes les personnes qui vivent avec le VIH, dont les immigrants. Les résultats de notre étude montrent l’impor­tance cruciale d’améliorer le bien­être des immigrants des pays d’Afrique subsahari­enne vivant avec le VIH au Canada. De nombreux migrants subissent des trauma­tismes importants en raison de déplace­ments, de conflits armés, de violence et de violations des droits de la personne41. Les résultats de l’étude indiquent que les can­didats à l’immigration peuvent avoir besoin d’un soutien psychosocial accru étant donné les effets potentiels impor­tants sur leur santé mentale et leur bien­être que peut avoir la conjonction de leurs traumatismes passés, de leur infec­tion à VIH, de leur classe sociale et de leur culture. Il faut donc réaliser d’autres

études pour comprendre la santé mentale et le bien­être des immigrants qui vivent avec le VIH dans toutes les régions du Canada.

Conclusion

D’après les résultats de notre étude, il existe des disparités quant à la manière dont les médecins désignés par le gouver­nement effectuent le dépistage obligatoire du VIH dans le cadre de l’EMI au Canada et à l’étranger. Malgré les lignes directrices normalisées à l’intention de ces médecins concernant le dépistage du VIH, les par­ticipants ont fait état d’expériences très diffé rentes. Parmi les principaux thèmes soulevés, mentionnons la détresse émo­tionnelle liée au VIH, la variabilité des expériences relatives au test de dépistage du VIH pendant l’EMI ainsi que manque de cohérence en matière de mise en rela­tion avec les soins médicaux, le soutien psychosocial et la participation à la cas­cade de soins contre le VIH. Une analyse approfondie est donc nécessaire, car la participation à la cascade de soins contre le VIH est susceptible d’être compromise par des méthodes incohérentes de coun­seling dans le cadre du dépistage du VIH et par la stigmatisation liée au VIH qui en découle.

Notre étude fournit des données sur les expériences d’immigrants d’Afrique sub­saharienne vivant avec le VIH dans l’Ouest canadien. La disponibilité des soins, des traitements et du soutien liés au VIH est variable selon les provinces du Canada. Il est important de comprendre le contexte social des immigrants infectés par le VIH et les répercussions possibles de ce contexte sur la participation à la cas­cade de soins contre le VIH. Il faudrait donc réaliser d’autres études auprès de cette population afin d’examiner les recoupements entre le dépistage obliga­toire du VIH (actuellement effectué pen­dant le processus d’immigration), la migration, l’établissement au Canada, la culture, la stigmatisation et la participa­tion à la cascade de soins contre le VIH.

Remerciements

Nous tenons à remercier les participants qui ont contribué à la cette étude pilote, particulièrement pour le courage dont ils ont fait preuve en nous faisant part des expériences difficiles et douloureuses liées au VIH qu’ils ont vécues dans leur pays

49Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

d’origine et en tant que nouveaux arriv­ants au Canada. Nous tenons également à remercier la Faculté des sciences infir­mières de l’Université de Calgary, qui a financé ce projet au moyen du Fonds de dotation.

Conflits d’intérêts

Il n’y a aucun conflit d’intérêts financier ou autre. Aucun des auteurs n’a tiré un avantage indu de cette étude.

Contributions des auteurs et avis

Il s’agit d’un projet de recherche commu­nautaire, et tous les auteurs ont collaboré à l’élaboration, à la rédaction et à la révi­sion du manuscrit. Plusieurs auteurs se sont chargés de certaines sections du manuscrit. A.  dela  Cruz, V.  Caine, S.  Patten et J.  Harrowing ont rédigé les grandes lignes du manuscrit et ont déve­loppé les idées principales, tout en sollici­tant la participation des autres coauteurs et en discutant avec eux pour obtenir leurs commentaires. A.  dela  Cruz, V.  Caine, S. Patten, J. Harrowing, M. Hall et A. R. Afzal ont dirigé l’analyse des données et la syn­thèse des résultats, tout en sollicitant la participation des autres coauteurs et en discutant avec eux pour obtenir leurs commentaires.

Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteurs et ne correspondent pas néces­sairement à ceux du gouvernement du Canada.

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51 Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiquesVol 40, n° 2, février 2020

https://doi.org/10.24095/hpcdp.40.2.03f

Rattachement des auteures :

1. Laboratoire de recherche PLACE (Policy, Location, and Access in Community Environments), École de santé publique, Université de l’Alberta, Edmonton (Alberta), Canada2. École de santé publique, Université de l’Alberta, Edmonton (Alberta), Canada

Correspondance : Candace I. J. Nykiforuk, School of Public Health, 3-300 Edmonton Clinic Health Academy, 11405-87 Ave, Edmonton (Alberta) T6G 1C9; tél. : 780-492-4109; courriel : [email protected]

Recherche quantitative originale

Utilisation d’une échelle d’intervention pour analyser le soutien à d’éventuelles politiques de lutte contre le tabagisme de la part du grand public et d’influenceurs en matière de politiques en Alberta et au QuébecKrystyna Kongats, M.P.H. (1); Jennifer Ann McGetrick, M. Sc. (1); Kim D. Raine, Ph. D. (2); Candace I. J. Nykiforuk, Ph. D. (1)

Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.

Points saillants

• Des recherches antérieures ont démontré que les interventions sous forme de politiques et au sein des milieux contribuaient grande­ment à la réduction, à l’échelle de la population, de la consommation du tabac (à fumer et sous ses autres formes).

• La compréhension des attitudes des influenceurs et du grand public est essentielle, car la mise en place de politiques efficaces sera difficile si leur appui est faible et sera facile si leur appui est vigoureux.

• Cette étude fait état de données récentes sur les attitudes des influ­enceurs et du grand public, dans deux provinces canadiennes, envers les politiques de lutte contre le tabagisme à l’échelle de la popu lation.

• Ces données vont être utiles à la définition, par les promoteurs de la santé, des secteurs des politiques où l’appui est unanime (c.­à­d. les potentielles « victoires rapides ») et des secteurs où l’appui est faible ou inégal.

Résumé

Objectif. Évaluer, dans deux provinces canadiennes, l’appui du grand public et d’influen­ceurs en matière de politiques vis­à­vis de politiques de lutte contre le tabagisme à l’échelle de la population.

Méthodologie. En 2016, nous avons mis en œuvre le sondage Prévention des maladies chroniques auprès d’un échantillon d’influenceurs (n = 302) et d’un échantillon aléa­toire de la population (n = 2400) en Alberta et au Québec (Canada). Les participants ont exprimé leur degré d’appui vis­à­vis de diverses politiques de lutte contre le taba­gisme, au moyen d’une échelle de type Likert dont les réponses ont été regroupées sous forme de pourcen tages favorables nets. Le degré de soutien a ensuite été analysé à l’aide du codage de chaque politique au moyen de l’échelle d’intervention du Nuffield Council on Bioethics, afin de mieux définir le degré d’intrusion qu’elle représente par rapport aux libertés individuelles.

Résultats. Si les influenceurs comme le grand public ont évalué comme «  extrême­ment » ou « très » positives une grande majorité des politiques de lutte contre le taba­gisme, l’avis des influenceurs en Alberta et au Québéc a divergé sur plus de la moitié des politiques, l’appui ayant été plus marqué au Québec. Les influenceurs comme le grand public ont exprimé un soutien solide à plusieurs politiques de lutte contre le taba­gisme très intrusives (c.­à­d. les politiques ciblant les enfants et les jeunes et les nou­veaux produits associés au tabagisme comme les cigarettes électroniques), malgré des effets escomptés sur les libertés individuelles. Ils ont fait preuve d’un soutien moins important aux politiques fiscales de lutte contre le tabagisme (c.­à­d. la taxation), mal­gré l’efficacité prouvée de telles politiques.

Conclusion. Dans l’ensemble, les influenceurs et le grand public se sont montrés très favorables à des politiques plus restrictives de lutte contre le tabagisme. Cette étude révèle quelles politiques reçoivent un appui unanime dans les deux groupes de popula­tion (de potentielles « victoires rapides » pour les défenseurs de la santé). Elle indique aussi pour quels sujets des efforts supplémentaires de sensibilisation sont nécessaires afin de mieux faire comprendre les avantages des politiques antitabac pour la santé des populations.

Mots‑clés : politique en matière de santé, lutte contre le tabagisme, opinion publique, con­naissances, attitudes et croyances, échelle d’intervention du Nuffield Council, recherche par enquête, études sur la population, Canada

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Introduction

Malgré l’objectif fixé dans le cadre de la Stratégie canadienne sur le tabac de réduire à moins de 5 % la consommation de tabac d’ici 20351, la prévalence de

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 52 Vol 40, n° 2, février 2020

l’usage de la cigarette a récemment aug­menté de manière significative, passant de 13 % en 2015 à 15 % en 20172. L’impact négatif de la consommation abusive de tabac est inégal au Canada  : il est lié à diverses inégalités sociales et sanitaires1, avec un taux de tabagisme plus élevé chez les minorités sexuelles, les jeunes adultes et les Autochtones1. Des interventions glo­bales en termes de politiques et portant sur les différents milieux sont nécessaires pour induire des changements substan­tiels à l’échelle des populations3 et pour réduire les inégalités4 en matière de con­sommation abusive de tabac. Bien que l’amélioration de l’accès aux différents traitements d’abandon du tabagisme (p. ex. la thérapie de remplacement de la nico­tine) se soit avérée avantageuse sur le plan individiuel5, l’incidence de tels pro­grammes de santé paraît dérisoire par rap­port aux résultats d’approches appliquées aux milieux et stratégiques d’ordre supéri­eur6. On estime par exemple qu’une hausse de 50  % des taxes sur le prix actuel des cigarettes (hors taxe sur la val­eur ajoutée) réduirait de 18  % la préva­lence du tabagisme sur une période de 40  ans, alors qu’au cours de la même pério de, les traitements d’abandon du tabagisme fondés sur des données pro­bantes (p.  ex. les pharmacothérapies) ne rédui raient le tabagisme que de 4 %6.

Les connaissances, les attitudes et les croyan ces du grand public et des influen­ceurs (personnes élues ou professionnels embauchés ou nommés et disposant de pouvoirs juridiques, d’une autorité ou de la possibi lité d’exprimer un avis par rap­port aux di vers processus stratégiques à l’œuvre au sein des gouvernements, com­missions scolaires, milieux de travail ou médias)7 jouent un rôle considérable dans l’évolution des programmes politiques7. Si les influenceurs sont considérés en général comme détenteurs d’un pouvoir réel sur l’action gouvernementale, ceux ayant été élus sont sensibles, en partie, aux opin­ions de leurs électeurs et peuvent donc s’avérer particulièrement sensibles aux enjeux qui suscitent la controverse au sein de la population8. Ainsi, un appui impor­tant de la population a contribué au suc­cès de plusieurs projets législatifs de lutte contre le tabagisme9,10, alors que, comme l’ont souligné Chen et ses collaborateurs11, un moindre appui du grand public a rendu les décideurs plus sensibles aux intérêts de l’industrie du tabac12. À l’échelle inter­nationale, des équipes de recherche ont récemment examiné le soutien de la

population envers certains types particuli­ers d’interventions de lutte antitabac (campagnes médiatiques contre le taba­gisme13 et mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes14 aux États­Unis), ainsi que l’appui envers les politiques antitabac au sein de certains groupes de population (fumeurs au Canada15, adoles­cents à Hong Kong11 et adultes aux États­Unis16, en Finlande17 et en Malaisie18).

En contexte canadien, bien que quelques études aient porté sur les connaissances, les attitudes et les croyances des influen­ceurs et du grand public en lien avec des initiatives précises7,19,20, nous avons cons­taté un manque de données probantes évaluant le point de vue des deux groupes au sujet d’un large éventail de politiques de lutte contre le tabagisme. Or il est important de disposer de données récen­tes sur le point de vue de chacun de ces groupes, car les recherches antérieures ont démontré que les conseillers straté­giques sur les questions de santé avaient tendance à sous­estimer le degré d’appui du grand public envers la législation anti­tabac21. Cette interprétation erronée de la situation pourrait avoir limité la prise de mesures21.

En  2009, l’Alberta Policy Coalition for Cancer Prevention (plus tard renommée l’Alberta Policy Coalition for Chronic Disease Prevention [APCCP]) a mis au point le sondage Prévention des maladies chroniques (PMC) pour évaluer les con­naissances, les attitudes et les croyances des influenceurs et du grand public vis­à­vis des politiques publiques destinées à la prévention des maladies chroniques au Canada. Entre 2009 et 2016, l’étude a été réalisée six fois, dans le but d’examiner l’appui envers les politiques antitabac. Les données obtenues contribuent au travail des promoteurs de la santé publique qui œuvrent à réduire la présence de ce facteur de risque comportemental mortel.

L’étude de 2016 visait à évaluer l’appui du grand public et des influenceurs envers les politiques de réduction des méfaits liés au tabac à l’échelle de la population dans deux provinces canadiennes, l’Alberta (province de l’Ouest canadien composée essentiel­lement d’anglophones) et le Québec (pro vince de l’Est canadien composée essentiellement de francophones). Nous souhaitions comparer les tendances en matière d’appui non seulement entre influenceurs et grand public, mais aussi

entre régions. Pour nos analyses des don­nées de cet échantillon, nous avons utilisé l’échelle d’intervention du Nuffield Council on Bioethics (NCB) à titre de cadre d’évaluation du point d’équilibre entre la liberté individuelle et les avantages pour la collectivité de chacune des politiques étudiées22. Les recherches sur l’accepta­bilité des politiques ont montré une forte corrélation entre l’incidence d’une mesure/ intervention sur le libre­choix de la per­sonne et l’acceptation de la mesure/intervention23. Dans les pays comme le Canada où règne le néolibéralisme et où les valeurs indivi duelles prennent le pas sur les valeurs collectives ou communau­taires24, l’angle d’analyse qui oppose la liberté à l’esprit collectif a son importance, car la tension entre ces deux tendances peut déterminer le degré de soutien quant à l’adoption de politiques publiques axées sur la santé. De plus, étant donné qu’il caractérise les interventions comme plus ou moins restrictives par rapport aux liber tés individuelles, ce cadre d’évalua­tion a permis de repérer les différences et de comprendre les points communs entre les différents mécanismes psychosociaux à l’œuvre à l’échelle de la population. La littérature pertinente ayant utilisé cette échelle d’intervention pour proposer et évaluer des politiques de santé publique a porté sur la santé au travail25, les mala­dies infectieuses26, l’hygiène alimentaire pu blique27­30, l’activité physique31, la con­sommation d’alcool32 et la lutte contre le tabagisme33.

Dans un contexte où la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme a été renou­velée1, notre étude apporte des données probantes récentes sur les attitudes rela­tivement aux différentes politiques anti­tabac dans deux provinces du Canada. Les résultats mettent en évidence quelles ten­dances en matière d’interventions straté­giques antitabac sont les plus susceptibles de recueillir un large appui, ce qui peut contribuer à établir des priorités straté­giques dans les initiatives à mettre en œuvre en matière de promotion des poli­tiques publiques axées sur la santé.

Méthodologie

Sondage Prévention des maladies chroniques

Le sondage PMC a pour but la compréhen­sion des connaissances, des attitudes et des croyances des influenceurs et du

53Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

grand public en matière de politiques pub­liques axées sur la santé relatives aux principaux facteurs de risque modifi­ables34. Les résultats présentés ici reposent sur le sondage PMC de 2016, réalisée en anglais et en français et évaluant la faveur remportée par divers types de politiques publiques axées sur la santé comme moy­ens de lutter contre le tabagisme en Alberta et au Québec. Nous voulions aussi comparer les tendances en matière d’ap­pui des influenceurs et celles du grand public, ainsi que d’une région à l’autre. Les participants devaient indiquer leur soutien vis­à­vis de différentes politiques publiques de lutte contre le tabagisme sur une échelle de type Likert en quatre points, allant de l’opposition à l’appui (1  =  s’oppose fortement, 2  =  s’oppose quelque peu, 3  =  appuie quelque peu, 4 = appuie fortement). Les politiques de réduction du tabagisme fondées sur des données probantes incluses dans l’étude ont été mises au point en collaboration avec une équipe d’experts de l’APCCP ayant des connaissances et une expéri­ence pointues en matière de lutte contre le tabagisme, afin qu’elles soient conformes aux recommandations natio nales déjà en place.

Le bureau d’éthique pour la recherche de l’Université de l’Alberta a approuvé cette étude (Pro00046150 et Pro00044424).

Répondants

Un échantillon d’influenceurs a été invité par courriel à participer à une étude en ligne composée de 29  éléments relatifs aux politiques antitabac. Cet échantillon a été constitué à partir de données pub­liques (en particulier les coordonnées de personnes figurant dans les sites Internet d’organismes tels que l’Assemblée législa­tive de l’Alberta et l’Assemblée nationale du Québec, la fédération des commissions scolaires de chacune des deux provinces, les répertoires de médias de chacune des deux provinces et la base de données Orbis répertoriant les entreprises, afin de connaître les entreprises comptant plus de 500  employés puis de chercher sur leur site Internet respectif les coordonnées du chef de la direction, des cadres supérieurs en ressources humaines et des cadres supérieurs chargés de la santé et de la sécurité).

Nous avons utilisé une définition d’en­semble d’«  influenceur en matière de

politiques » ciblant trois principaux groupes : les acteurs gouvernementaux à l’échelle municipale ou provinciale, en raison de leur pouvoir décisionnel; les leaders non gouvernementaux des milieux scolaires et professionnels, en raison de l’incidence des politiques sur l’amélioration de la santé dans ces environnements clé35 et enfin les représentants des médias, en rai­son de l’influence qu’exerce leur interpré­tation des politiques sur la formation de l’opinion pu blique et des programmes lég­islatifs36. Cette définition large d’« influen­ceur  » était en phase avec l’objectif que nous avions : offrir une vue d’ensemble à l’échelle de la population des points de vue des influenceurs indépendamment de leur contexte.

La base d’échantillonnage des influen­ceurs était composée de tous les législa­teurs provinciaux élus de l’Alberta et du Québec, des hauts fonctionnaires provin­ciaux de niveau sous­ministériel, des maires, présidents de conseil municipal et hauts fonctionnaires municipaux, des membres et présidents des commissions scolaires, des cadres supérieurs d’entre­prises de plus de 500  employés et des rédacteurs en chef et journalistes traitant des questions de santé pour des organes de presse écrite.

De toutes les tentatives de contact effec­tuées auprès des membres de la base d’échantillonnage recensée, 115  courriels se sont avérés non livrables (33 en Alberta, 82 au Québec), 61 réponses con­tenant une adresse courriel de remplace­ment nous ont indiqué de communiquer avec une autre personne (20 en Alberta, 41 au Québec) et 25  courriels ont donné lieu à des refus directs (18  en Alberta, 7  au Québec). Un énoncé en matière d’éthique indiquant la nature volontaire et confidentielle de la participation figurait à la première page de l’étude. Par leur choix de poursuivre au­delà de l’énoncé et de répondre à l’enquête, les participants accordaient leur consentement tacite.

Une version réduite de l’enquête (compre­nant 13 des 29 politiques de lutte contre le tabagisme) a été proposée au grand pu blic, dont l’échantillon a été formé par composition aléatoire de numéros de télé­phone (puis stratification selon le sexe, le milieu de résidence [urbain ou rural] et l’âge, au niveau des ménages, de façon à ce que l’échantillon soit pondéré propor­tionnellement à la population canadienne

dans les deux régions visées). Des experts de l’APCCP et de l’équipe du projet COALITION sur les politiques Policy Opportunity Windows – Engaging Research Uptake in Practice (POWER UP!) ont choisi, par consensus, les politiques à retenir dans la version réduite de l’étude. Les critères de sélection étaient le caractère opportun et la pertinence des politiques dans le contexte en vigueur de promotion de la lutte contre le tabagisme de chacune des deux provinces  : autrement dit, les questions stratégiques retenues étaient d’actualité ou sur le point de l’être dans le cadre de processus décisionnels en cours dans chacune des deux provinces au moment de l’étude.

Une entreprise de sondage professionnelle a réalisé l’enquête auprès du grand public au moyen d’interviews téléphoniques assistées par ordinateur. Nous avons demandé au prestataire contractuel de l’étude d’effectuer 2 400 interviews auprès de 400  participants dans chacune des villes ou zones suivantes  : Calgary, Edmonton, Montréal, Québec, le reste de l’Alberta et le reste du Québec. Dans le cas des interviews auprès des ménages clas­sées comme « non menées », il y a eu des refus, des interviews partielles, des pro­blèmes de barrière linguistique, des répon­dants mineurs et des répondeurs. Les participants potentiels étaient informés du fait que leur participation était libre. Un consentement verbal a été obtenu avant le début de l’enquête téléphonique. Aucune mesure incitative n’a été prise auprès de participants. Enfin, des caractéristiques individuelles ont été recueillies dans les deux groupes­échantillons.

Démarche d’analyse

L’analyse de l’ensemble des réponses de la population générale, des influenceurs et de chacune des deux provinces au sujet des diverses politiques de lutte contre le tabagisme s’est faite au moyen de l’ob­tention de pourcentages favorables nets (PFN)37. On calcule le PFN en soustrayant le pourcentage de répondants qui «  s’op­pose fortement  » ou «  s’oppose quelque peu » à une politique du pourcentage de répondants qui « appuie quelque peu » ou «  appuie fortement  » une politique. La mesure qui en résulte varie sur une échelle continue de +100 à − 100 et s’interprète facilement (un pourcentage positif indique un avis favorable et un pourcentage négatif indique un avis

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 54 Vol 40, n° 2, février 2020

défavorable). Afin de comparer de façon cohérente le degré d’appui accordé par chaque groupe­échantillon aux diffé rentes politiques de lutte contre le tabagisme, nous avons interprété qualitativement les PFN au moyen des sept échelons de Roselius37 (voir tableau  1). Nous avons opté pour ce cadre de comparaison des degrés d’appui en raison du fait que les PFN constituent des statistiques descrip­tives et non de cause à effet.

En outre, toutes les politiques se sont vu attribuer un code selon leur niveau sur l’échelle d’intervention du NCB. L’objectif consistait à évaluer les politiques en fonc­tion de leurs avantages pour la société par rapport à une éventuelle perte de libertés individuelles22. L’échelle du NCB évolue de l’intervention la moins intrusive à la plus intrusive, selon les niveaux suivants : ne rien faire; fournir des renseignements; offrir le choix; orienter les choix en modi­fiant la politique par défaut; orienter les choix par des mesures incitatives; orienter les choix par des mesures dissuasives; restreindre les choix; éliminer les choix22. Trois codeurs ont classé chaque politique de lutte contre le tabagisme incluse dans le sondage PMC à partir d’une liste de codage détaillée38. Tout désaccord entre les codeurs a été réglé par un consensus et la consultation de la chercheure principale.

À cette étape, nous nous sommes rendu compte que les politiques ne correspon­daient pas toutes exactement aux niveaux de l’échelle d’intervention du NCB. Nous avons donc créé une catégorie supplémen­taire, que nous avons appelée « réorienter l’action gouvernementale  ». Ce niveau a permis de rassembler les politiques axées sur des interventions modifiant le mode d’action du gouvernement plutôt que les libertés individuelles directement (p.  ex. poursuites contre les fabricants de produits

du tabac afin d’obtenir une indemnisation pour les personnes qui ont subi un préju­dice causé par les produits du tabac).

Résultats

Le taux de réponse au sondage PMC  de 2016 a été de 5,1 % des 5 926 influenceurs invités (n = 302; 174 en Alberta et 128 au Québec) et de 7,4  % des 32 580  mem­bres du grand public invités (n = 2 400; 1 200 en Alberta et 1 200 au Québec). Le ta bleau  2 présente les caractéristiques indi viduelles des répondants. Les influen­ceurs ayant participé à l’enquête se sont avérés être principalement des hommes d’un certain âge, mais ce profil correspond à la constitution générale du groupe des dirigeants stratégiques du Canada39,40.

Les répondants du grand public ont été choisis au sein des ménages de façon à refléter les profils de leur province.

Les influenceurs comme le grand public ont exprimé un avis « légèrement », « très » ou « extrêmement » favorable au sujet de toutes les politiques, à l’exception d’une seule, au sujet de laquelle les influenceurs de l’Alberta ont exprimé un avis neutre. Le niveau que les codeurs ont le plus cour­amment attribué aux politiques de lutte contre le tabagisme incluses dans le son­dage PMC était «  éliminer les choix  » (n = 12/29), tandis que le niveau le moins courant était « orienter les choix par des mesures incitatives » (n = 1/29) (voir le tableau 3).

Les éléments de l’enquête auprès de la population générale se sont vu attribuer les mêmes niveaux que ceux de l’enquête auprès des influenceurs (voir le ta bleau 4). Cependant, la version réduite destinée au grand public ne comprenait pas les po litiques classées dans les catégories

« restreindre les choix », « offrir le choix » et « fournir des renseignements ». La poli­tique ayant remporté l’appui le plus élevé (PFN = 94,2 : « extrêmement favorable ») dans l’ensemble du groupe des influen­ceurs a été « mettre pleinement en appli­cation la législation actuelle sur la réduction du tabagisme  », une politique de niveau «  orienter les choix en modi­fiant la politique par défaut ». La politique ayant remporté l’appui le plus faible (PFN = 29,1  : «  légèrement favorable  ») chez les influenceurs a été « poursuivre en justice les fabricants de produits du tabac afin d’obtenir une indemnisation pour les personnes qui ont subi un préjudice causé par les produits du tabac et la dépendance à la nicotine  », une politique de niveau « réorienter l’action gouvernementale ».

Considérés séparément, les influenceurs de l’Alberta et du Québec ont exprimé des degrés d’appui différents envers 15 des 29 politiques de lutte contre le tabagisme. Les deux politiques pour lesquelles la dif­férence d’appui a été le plus marquée (une différence d’appui de deux niveaux sur l’échelle d’intervention) étaient :

• exiger que les cigarettes et les autres produits du tabac aient une forme, une taille, une couleur et des filtres uni­formisés (les Québécois s’y sont mon­trés « extrêmement favorables », et les Albertains, « légèrement favorables »);

• poursuivre en justice les fabricants de produits du tabac afin d’obtenir une indemnisation pour les personnes qui ont subi un préjudice causé par les produits du tabac et la dépendance à la nicotine (les Québécois s’y sont mon­trés « très favorables », et les Albertains ont exprimé un avis « neutre »).

Au sein de la population générale des deux provinces considérée dans son ensemble, la politique à laquelle les répondants se sont montrés le plus favo­rables a été le renforcement des procé­dures visant à empêcher la vente illégale à des mineurs, une politique de niveau «  éliminer les choix  » (PFN = 86,5  : « extrêmement favorable »). À l’opposé, la politique qui a remporté le plus faible appui dans l’ensemble de la population générale était l’augmentation des taxes sur le tabac de plus de 1,00 $ par paquet de 25  cigarettes, une politique de niveau « orienter les choix par des mesures dis­suasives  » (PFN  =  41,9  : «  légèrement favorable »). La politique suivante pour ce

TABLEAU 1 Interprétation qualitative du niveau de réponses favorables,

d’après la méthode du pourcentage favorable net de Roselius37

Interprétation qualitative Fourchette de pourcentage favorable net

Extrêmement favorable +100 à +71,5

Très favorable +71,4 à +42,9

Légèrement favorable +42,8 à +14,3

Neutre +14,2 à −14,1

Légèrement défavorable −14,2 à −42,7

Très défavorable −42,8 à −71,3

Extrêmement défavorable −71,4 à −100,0

55Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

qui est de l’appui le plus faible était du même ordre et consistait en une augmen­tation des taxes sur le tabac de 1,00 $ ou moins par paquet de 25 cigarettes (PFN = 43,6 : « très favorable »).

Les répondants du grand public de l’Alberta et du Québec ont exprimé un degré d’ap­pui différent au sujet de deux politiques seulement (contre 15 chez les influenceurs) :

• interdire la cigarette dans tous les véhicules automobiles, une politique de niveau «  éliminer les choix  » (les Albertains étaient « légèrement favora­bles  » à la mesure, alors que les Québécois y étaient « très favorables »);

• augmenter les taxes sur le tabac de plus de 1,00 $ par paquet de 25 ciga­rettes, une politique de niveau «  ori­enter les choix par des mesures dissuasives  » (les Albertains étaient « légèrement favorables » à cette option, alors que les Québécois y étaient « très favorables »).

Dans l’ensemble, les influenceurs et les membres du grand public n’ont exprimé un degré d’appui différent qu’au sujet de deux politiques :

• interdire l’utilisation des pipes à eau (narguilés) dans tous les lieux publics où la consommation de tabac est interdite, une politique de niveau « éliminer les choix » (les influenceurs s’y sont montrés « extrêmement favo­rables », tandis que la population géné­rale s’y montrait « très favorable »);

• augmenter les taxes sur le tabac de plus de 1,00 $ par paquet de 25 ciga­rettes, une politique de niveau «  ori­enter les choix par des mesures dissuasives » (les influenceurs s’y sont montrés « très favorables », tandis que la population générale s’y montrait « légèrement favorable »).

Analyse

L’un des principaux défis de l’adoption de mesures en santé publique consiste à tenir

compte des tendances qui opposent la défense des libertés individuelles et la promotion d’une santé optimale à l’échelle de la population22. Les résultats de nos recherches illustrent la tension entre ces deux tendances  : ils révèlent en effet di vers degrés d’appui envers les politiques de lutte contre le tabagisme fondées sur des données probantes lorsqu’elles res­treignent les libertés individuelles. D’après nos résultats, la population générale et les influenceurs étaient «  extrêmement  » ou «  très » favorables à la majorité des poli­tiques de santé publique destinées à la lutte contre le tabagisme incluses dans le sondage PMC. Ce résultat est prometteur, car il suggère, parmi les intervenants gou­vernementaux et non gouvernementaux, ainsi que chez les citoyens, un degré d’acceptation global élevé des interven­tions stratégiques et destinées à différents milieux visant la réduction de la consom­mation de tabac, notamment à fumer. Nos constatations mettent en évidence les politiques antitabac qui, au cours du

TABLEAU 2 Caractéristiques des influenceurs et des membres du grand public de l’Alberta et

du Québec ayant participé au sondage Prévention des maladies chroniques de 2016

Caractéristiques individuelles

Alberta Québec

Influenceurs % (n)

Membres du grand public % (n)

Influenceurs % (n)

Membres du grand public % (n)

Sexe

Masculin 70,9 (107) 49,2 (591) 67,6 (73) 46,7 (560)

Féminin 29,1 (44) 50,8 (609) 32,4 (35) 53,3 (640)

Âge

18 à 45 ans 9,6 (15) 32,9 (390) 25,7 (28) 34,8 (415)

46 ans et plus 90,4 (141) 67,1 (797) 75,3 (81) 65,2 (776)

Scolarité

Jusqu’au postsecondaire – 20,5 (244) – 18,8 (224)

Postsecondaire – 79,5 (944) – 81,2 (966)

Revenu du ménage

< 70 000 $ – 36,6 (383) – 52,8 (564)

≥ 70 000 $ – 63,4 (663) – 47,2 (504)

Scolarité

Jusqu’au secondaire/école de métiers – 57,7 (685) – 48,2 (573)

Études universitaires – 42,3 (503) – 51,8 (617)

Secteur

Gouvernement provincial 19,2 (30) – 10,2 (11) –

Autorité municipale 24,4 (38) – 55,6 (60) –

Milieu professionnel 23,1 (36) – 24,1 (26) –

Commission scolaire 14,7 (23) – 3,7 (4) –

Média 6,4 (10) – 2,8 (3) –

Autre 12,2 (19) – 3,1 (4) –

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 56 Vol 40, n° 2, février 2020

TABLEAU 3 Pourcentage net des influenceurs de l’Alberta et du Québec qui se sont montrés favorables aux options

en matière de politiques de lutte contre le tabagisme, d’après le sondage Prévention des maladies chroniques de 2016

Options en matière de politiques de lutte contre le tabagisme

Total Alberta Québec

PFN %

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%

Éliminer les choix

Interdire la vente de la cigarette électronique aux mineurs (18 ou 19 ans, selon l’âge légal de la province)

92,6 9,9 91,1 9,2 94,7 10,9

Interdire de fumer dans tous les espaces publics extérieurs là où les enfants sont présents (par exemple : terrains de jeu, parcs, terrains de sport, plages)

91,4 7,6 86,6 5,7 98,3 10,2

Augmenter les pénalités aux marchands qui vendent des produits du tabac aux mineurs

84,9 7,6 86,7 4,6 82,3 11,7

Renforcer les procédures pour prévenir la vente illégale aux mineurs (par exemple, contrôle obligatoire de l’identité des personnes de moins de 25 ans, formation des employés, aucun employé de moins de 18 ans, etc.)

81,4 7,6 80,6 5,2 82,5 10,9

Interdire la vente de la cigarette électronique là où la vente des produits du tabac est interdite

79,9 10,9 74,5 9,8 87,5 12,5

Contrôler activement l’interdiction existante de la cigarette électronique contenant de la nicotine afin que ces produits illégaux et non approuvés ne soient pas disponibles au Canadaa

76,8 14,2 71,1 12,6 85,0 16,4

Interdire l’utilisation du narguilé (aussi appelé houka) dans tous les espaces publics où l’usage du tabac est interdit

75,8 20,5 73,9 12,1 79,3 4,7

Interdire la cigarette électronique dans tous les espaces publics où la consommation du tabac est interditea

69,9 11,9 63,4 12,1 78,8 11,7

Interdire de fumer dans tous les lieux de travail, y inclus les sites extérieursa

66,7 8,6 60,0 8,0 75,9 9,4

Interdire de fumer dans toutes les installations d’habitation en groupe (actuellement, il est permis de fumer dans des salles désignées)a

59,0 7,9 48,1 6,9 74,1 9,4

Interdire tout produit du tabac aromatisé, y inclus la cigarette au menthola

53,0 16,9 42,5 16,1 67,6 18,0

Interdire de fumer dans tous les véhicules motorisésa 51,1 7,9 37,4 6,3 70,4 10,2

Restreindre les choix

Réglementer rigoureusement la promotion de la cigarette électronique, y inclus l’interdiction du marketing utilisant des personnes et des modes de vie célèbres, déclarations nonconfirmées par rapport à la santé, promotion au détail, marketing ciblé vers les jeunes et co-marquage de la cigarette électronique avec une marque traditionnelle de cigarette

79,1 14,6 73,7 12,6 86,8 17,2

Exiger que les marchands de tabac obtiennent une licence spéciale pour la vente de produits du tabaca

44,9 12,3 52,3 10,9 34,5 14,1

Orienter les choix par des mesures dissuasives

Augmenter le prix des cigarettes jusqu’à 1 $ le paquet de 25 cigarettes

59,4 16,9 58,4 14,4 60,8 20,3

Augmenter le prix des cigarettes de plus de 1 $ le paquet de 25 cigarettes

52,2 18,2 46,2 16,7 60,8 20,3

Orienter les choix par des mesures incitatives

Subventionner 100 % des coûts des traitements pour arrêter de fumer, y inclus la thérapie de remplacement de la nicotine (TRN)a

44,4 8,3 35,0 6,3 57,9 10,9

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57Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

processus de transformation des politiques visant l’atteinte des objectifs de réduction du tabagisme, offriraient des «  victoires rapides »1.

Nous avons par exemple constaté que les influenceurs et la population générale étaient favorables aux politiques de lutte contre le tabagisme ciblant les enfants et les jeunes, ainsi qu’aux politiques ciblant la réglementation de la cigarette

électro nique. Les influenceurs et la popu­lation générale étaient en effet « très favo­rables  » à l’interdiction d’utiliser les cigarettes électroniques dans tous les lieux publics où la consommation de tabac est interdite et «  extrêmement favorables  » à l’interdiction de la vente de cigarettes électroniques aux mineurs. Ces résultats pourraient revêtir un intérêt particulier pour les promoteurs de politiques pub­liques axées sur la santé en Alberta, car la

province n’avait pas encore, en avril 2019, adopté de lois spéifiques sur la réglemen­tation de la cigarette électro nique41,42. Le degré élevé de soutien des répondants de l’Alberta envers la réglementation de la cigarette électronique dans la province constitue en effet une occasion pour les défenseurs de la santé publique de tirer parti de la situation et de plaider pour des interventions sous forme de politiques et dans différents milieux.

TABLEAU 3 (suite) Pourcentage net des influenceurs de l’Alberta et du Québec qui se sont montrés favorables aux options

en matière de politiques de lutte contre le tabagisme, d’après le sondage Prévention des maladies chroniques de 2016

Options en matière de politiques de lutte contre le tabagisme

Total Alberta Québec

PFN %

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%

Orienter les choix en modifiant la politique par défaut

Appliquer pleinement la législation en vigueur liée à la réduction du tabagisme

94,2 8,3 91,4 6,9 98,3 10,2

Exiger que la cigarette électronique soit visuellement différente de la cigarette ordinaire

86,3 17,9 84,7 17,2 88,5 18,8

Exiger que tout produit du tabac soit vendu dans un paquet normalisé et sans éléments promotionnels sauf la marque, les risques pour la santé, la liste des ingrédients nocifs et des émissionsa

64,1 13,2 55,0 13,2 76,6 13,3

Exiger la normalisation de la forme, grandeur, couleur et des filtres des cigarettes et autres produits du tabacb

53,2 17,9 35,2 16,7 78,6 19,5

Interdire, aux points de vente, les panneaux qui affichent le prix et la disponibilité des produits du tabac

50,6 12,9 44,7 12,6 58,6 13,3

Offrir le choix

Fournir des programmes de conseils et de soutien aux personnes qui veulent arrêter de fumer

93,7 6,0 90,4 4,0 98,3 8,6

Exiger des options de soutien fournies par l’employeur, telles que le counselling ou la thérapie de remplacement de la nicotine, dans tout lieu de travail où il est interdit de fumera

33,3 9,6 16,5 9,2 56,5 10,2

Fournir des renseignements

Mettre en œuvre des campagnes d’éducation pour le public concernant les conséquences de l’usage du tabaca

75,5 7,9 64,4 6,3 91,3 10,2

Déployer des campagnes de dénormalisation de l’industrie du tabac qui éduquent le public sur les pratiques trompeuses de l’industriea

67,3 12,9 50,6 11,5 90,8 14,8

Réorienter l’action gouvernementale

Réaffectation, par le gouvernement, de 100 % des nouveaux revenus attribués au tabac directement aux programmes de prévention des maladies chroniques et aux programmes de santé et bien-être

84,8 8,3 81,5 6,9 89,6 10,2

Actionner les compagnies de tabac afin de recouvrer les coûts des soins de santé suite aux pratiques de marketing trompeuses et négligentes telles que cibler les jeunes, mentir au sujet des effets sur la santé, lutter contre les lois, etc.a

46,8 11,6 31,6 9,2 68,8 14,8

Actionner les compagnies de tabac dans le but d’indemniser les personnes lésées par les produits du tabac et addictées à la nicotine (le recours collectif des fumeurs du Québec)b

29,1 12,3 12,3 10,9 52,7 14,1

a Indique une différence qualitative d’un niveau entre le soutien indiqué par les influenceurs de l’Alberta et ceux du Québec.b Indique une différence qualitative de deux niveaux entre le soutien indiqué par les influenceurs de l’Alberta et ceux du Québec.

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 58 Vol 40, n° 2, février 2020

TABLEAU 4 Pourcentage net des membres du grand public de l’Alberta et du Québec qui se sont montrés favorables aux options

en matière de politiques de lutte contre le tabagisme, d’après le sondage Prévention des maladies chroniques de 2016

Options en matière de politiques de lutte contre le tabagisme

Total Alberta Québec

PFN %

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%PFN

%

Données manquantes

%

Éliminer les choix

Renforcer les procédures pour prévenir la vente illégale aux mineurs (par exemple, contrôle obligatoire de l’identité des personnes de moins de 25 ans, formation des employés, aucun employé de moins de 18 ans, etc.)

86,5 0,3 84,3 0,3 88,6 0,3

Interdire la vente de la cigarette électronique aux mineurs (18 ou 19 ans, selon l’âge légal de la province)

80,5 1,7 79,6 1,8 81,4 1,7

Interdire de fumer dans tous les espaces publics extérieurs là où les enfants sont présents (par exemple : terrains de jeu, parcs, terrains de sport, plages)

78,4 0,3 72,6 0,3 84,3 0,3

Interdire l’utilisation du narguilé (aussi appelé houka) dans tous les espaces publics où l’usage du tabac est interdit

64,4 14,0 60,7 6,8 68,7 21,2

Interdire la cigarette électronique dans tous les espaces publics où la consommation du tabac est interdit

64,4 2,3 63,5 2,7 65,2 1,8

Interdire de fumer dans tous les lieux de travail, y inclus les sites extérieurs

59,4 0,5 51,2 0,7 67,5 0,4

Interdire tout produit du tabac aromatisé, y inclus la cigarette au menthol

50,7 1,9 44,8 1,8 56,7 1,9

Interdire de fumer dans tous les véhicules motorisésa 46,5 1,2 36,3 1,2 56,7 1,2

Orienter les choix par des mesures dissuasives

Augmenter le prix des cigarettes jusqu’à 1 $ le paquet de 25 cigarettes

43,6 2,3 43,6 1,8 43,5 2,7

Augmenter le prix des cigarettes de plus de 1 $ le paquet de 25 cigarettesa

41,9 2,0 39,2 1,8 44,7 2,1

Orienter les choix par des mesures incitatives

Subventionner 100 % des coûts des traitements pour arrêter de fumer, y inclus la thérapie de remplacement de la nicotine (TRN)

61,7 1,3 55,6 1,3 67,8 1,2

Orienter les choix en modifiant la politique par défaut

Exiger que tout produit du tabac soit vendu dans un paquet normalisé et sans éléments promotionnels sauf la marque, les risques pour la santé, la liste des ingrédients nocifs et des émissions

57,9 2,6 53,4 2,0 62,5 3,2

Action gouvernementale

Actionner les compagnies de tabac afin de recouvrer les coûts des soins de santé suite aux pratiques de marketing trompeuses et négligentes telles que cibler les jeunes, mentir au sujet des effets sur la santé, lutter contre les lois, etc.

55,7 1,6 47,8 1,6 63,6 1,7

a Indique une différence qualitative d’un niveau entre le soutien indiqué par les membres du grand public de l’Alberta et ceux du Québec.

Dans le cadre de notre analyse, nous avons utilisé l’échelle d’intervention du NCB pour évaluer l’appui envers les poli­tiques selon leur degré d’atteinte aux li bertés indivi duelles. Selon le NCB, pour que la population l’accepte, une approche plus intrusive exige des preuves plus sol­ides (selon lesquelles la perte de liberté sera compensée par un effet réel de l’intervention)22. Autrement dit, moins les interventions stratégiques et destinées aux

milieux sont intrusives, plus elles sem­blent acceptables23. Néanmoins, nous avons constaté un soutien considérable tant chez les influenceurs qu’au sein du grand public envers certaines politiques restric­tives se trouvant au niveau supérieur de l’échelle d’intervention (c.­à­d. « éliminer les choix »).

Le degré d’appui élevé envers les poli­tiques qui «  restreignent  » les options ou

en «  éliminent  » témoigne peut­être du succès des nombreuses politiques restric­tives qui ont été prises à l’égard du taba­gisme au Canada43. L’appui pourrait aussi être lié au fait que les répondants étaient ou non fumeurs, une variable prédictive que nous n’avons pas mesurée. Cepen­dant, une récente enquête canadienne a révélé un appui élevé, même chez les fumeurs, envers des politiques de lutte contre le tabagisme qui iraient au­delà des

59Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

approches législatives actuelles, de nom­breux Canadiens regrettant d’avoir com­mencé à fumer, souhaitant arrêter ou prévoyant d’arrêter15.

Le niveau de scolarité atteint pourrait aussi être un facteur prédictif de l’appui envers les politiques antitabac15. La grande majorité des personnes qui ont participé à notre enquête avaient terminé des études postsecondaires, ce qui pour­rait avoir eu un effet sur le degré élevé d’appui envers les politiques restrictives de lutte contre le tabagisme.

Selon les résultats du sondage PMC de 2016, le degré d’atteinte que portent aux libertés individuelles les politiques pub­liques axées sur la santé n’est qu’un des éléments ayant une incidence sur les atti­tudes par rapport à la lutte contre le taba­gisme. Bien que nous ayons constaté un appui élevé envers les politiques cor­respondant aux niveaux les plus élevés de l’échelle d’intervention, le plus faible appui exprimé l’a été envers les politiques qui «  orientent le choix par des mesures dissuasives  » (un des niveaux intermédi­aires de l’échelle d’intervention), en par­ticulier chez les répondants du grand public. Les membres de la population générale qui ont répondu à notre enquête ont exprimé l’appui le plus faible envers les politiques d’augmentation des taxes sur les paquets de cigarettes (les PFN ont été de 43,6 et de 41,9 pour les deux poli­tiques proposées). Il s’agit d’un résultat étonnant dans la mesure où la majorité des répondants n’étaient probablement pas fumeurs (en effet, la prévalence du tabagisme au Canada était de 15  % en 20172, et les participants issus du grand public qui ont formé l’échantillon étaient issus d’une sélection par composition alé­atoire de numéros de téléphone). Les non­fumeurs n’auraient pas été directement touchés par de telles politiques. Le faible degré d’appui envers les politiques fis­cales pourrait indiquer que les préférences en matière de politiques ne sont pas uniquement guidées par l’intérêt person­nel44, mais aussi par des croyances socia­les profondément enracinées propres aux milieux politiques néolibéraux (c.­à­d. où l’on a une préférence marquée pour la non­intervention de l’État).

De plus, certaines stratégies classées au niveau de la «  réorientation de l’action gouvernementale  » (p.  ex. les poursuites contre les fabricants de produits du tabac

afin d’obtenir une indemnisation pour les personnes qui ont subi un préjudice causé par les produits du tabac et la dépendance à la nicotine) figuraient aussi parmi les moins populaires chez les influenceurs, en particulier en Alberta. Ce faible soutien constitue un défi pour les promoteurs de la santé publique qui œuvrent à réduire le tabagisme, d’autant plus que les poli­tiques fiscales (qui entrent aussi dans cette catégorie) ont fait leurs preuves comme moteurs de transformation des comportements3. D’après les résultats de l’enquête, les promoteurs de la santé pourraient avoir à consacrer leurs efforts de sensibilisation aux effets positifs sur la santé publique des mesures fiscales de réduction de la consommation de tabac. Une des approches qui contribue à aug­menter l’appui envers les politiques fis­cales de réduction du tabagisme consiste à affecter les recettes fiscales supplémen­taires à un soutien direct des initiatives axées sur la santé. Par exemple, il a été constaté que les fumeurs sont plus sus­ceptibles d’appuyer l’imposition de taxes sur les produits du tabac si les taxes sont consacrées au financement de projets de santé plutôt que transférées dans le bud­get général finançant d’autres priorités44.

Dans l’ensemble, les influenceurs et le grand public ont indiqué un degré compa­rable d’appui envers la grande majorité des politiques de lutte contre le tabagisme proposées dans le sondage PMC de 2016. Deux mesures présentaient une différence de popularité notable, soit l’interdiction des narguilés dans les lieux publics où le tabac est interdit et l’augmentation des taxes sur le tabac de plus de 1,00  $ par paquet de 25  cigarettes. Dans les deux cas, les influenceurs ont exprimé un appui plus important que les membres de la population générale. Notons que si les influenceurs prennent le risque d’adopter une politique malgré un faible appui de la population, cela n’empêche pas la modi­fication des comportements. On a en effet constaté que l’appui envers une politique augmentait au fil du temps à la suite de l’adoption de la loi pertinente14,23.

Les membres du grand public en Alberta et au Québec ont exprimé un degré com­parable d’appui envers la majorité des politiques (11/13)  : il s’agit d’un résultat étonnant, car les recherches antérieures avaient démontré que les fumeurs du Québec appuyaient de façon plus mar­quée les politiques de lutte contre le taba­gisme que les fumeurs albertains15. Les

influenceurs de l’Alberta et du Québec se sont montrés, au contraire, en désaccord sur plus de la moitié des politiques (15/29). Les Québécois influents se sont notamment montrés « extrêmement favor­ables » aux deux politiques du niveau de «  l’information  » (comme les campagnes visant à dénormaliser l’usage du tabac et à éduquer le grand public aux pratiques trompeuses de l’industrie du tabac), alors que les Albertains influents n’y étaient que « très favorables » (les PFN ont été de 90,8 et de 91,3 au Québec, contre 50,6 et 64,4 en Alberta). Bien que les mesures « informatives » se trouvent tout en bas de l’échelle d’intervention du NCB, c’est­à­dire qu’elles sont les moins intrusives, les politiques de ce niveau n’ont pas été les plus populaires chez les Albertains influ­ents. C’est également une surprise, car, par le passé, ce gouvernement provincial a plutôt été partisan des politiques les moins interventionnistes45. Il est cepen­dant possible que les campagnes « d’infor­mation » visant l’industrie du tabac soient perçues comme plus interventionnistes que les documents sur l’abandon du tabac présenté comme un choix individuel. Contrairement à l’opinion en matière de politiques en Alberta, l’opinion au Québec est généralement favorable à l’intervention de l’État, par exemple au moyen de la tax­ation et de l’affectation de fonds46. On définit l’Alberta depuis un certain nombre d’années comme « un État démocratique néolibéral à parti politique unique, gou­verné par les conservateurs  » 45,p.258  [tra­duction], tandis que le Québec a un passé de social­démocratie à syndicats forts, où l’État est plus présent47. Il n’est donc pas étonnant que, par rapport aux politiques au sujet desquelles l’avis des influen­ceurs divergeait d’une province à l’autre (15/29), les Québécois influents aient exprimé un avis plus favorable dans 14 des 15  cas. La tradition politique spéci­fique (interventionnisme ou non de l’État) à chacune des deux provinces pourrait expliquer les différences dans le degré d’appui.

Points forts et limites

Le sondage PMC était limitée par son échantillon transversal et mixte, à la fois choisi (influenceurs de politiques) et aléa­toire (grand public), ce qui a empêché une interprétation longitudinale ou de cause à effet des résultats. Nous avons plutôt cal­culé les valeurs du PFN, une mesure élaborée pour les études de marché (où les répondants plus motivés constituent

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 60 Vol 40, n° 2, février 2020

généralement la norme) afin de faciliter la prise de décisions à propos d’initiatives commerciales37. De façon similaire, nous avons utilisé les valeurs du PFN pour mieux comprendre les points de vue des influenceurs et du grand public afin d’orienter les mesures de promotion. Le faible taux de réponse à l’enquête a con­stitué également une limite, comme dans bon nombre d’enquêtes similaires menées auprès de professionnels48,49. D’ailleurs, on observe une baisse globale de la par­ticipation aux enquêtes dans leur ensem­ble50. Le faible taux de réponse a rendu difficile, entre autres, l’analyse de l’appui aux politiques par sous­groupe d’influen­ceurs. Bien que des travaux de recherche aient démontré que la diminution des taux de participation aux enquêtes ne fausse pas nécessairement les résultats51,52, nous avons utilisé diverses stratégies visant à réduire le biais de non­réponse, comme les appels et les courriels de suivi répétés (selon le groupe de participants), pour nous assurer d’obtenir le plus grand échantillon possible.

Notre examen ciblé de l’appui des influen­ceurs et du grand public à l’égard des poli­tiques éventuelles de lutte contre le tabagisme dans deux provinces cana­diennes constitue l’un des points forts de cette recherche. À notre connaissance, peu d’études menées en contexte cana­dien ont examiné l’acceptabilité des inter­ventions contre le tabagisme à la fois selon les intervenants gouvernementaux et non gouvernementaux et selon le grand public7,19,20. Bien que notre enquête ait été réalisée en 2016, nos constatations four­nissent encore, au moment de la rédaction de cet article, l’aperçu le plus à jour des opinions des influenceurs et du grand public sur l’acceptabilité des politiques de lutte contre le tabagisme en Alberta et au Québec. Bien qu’il soit possible que les opinions des participants aient changé depuis 2016, des études antérieures indiquent que l’appui à l’égard des poli­tiques de lutte contre le tabagisme tend vers une plus grande acceptabilité avec le temps23,53,54. Par conséquent, il se peut que les niveaux de soutien du sondage PMC de 2016 suivent une tendance similaire. Les prochains cycles du sondage PMC tire­raient profit de l’ajout d’autres variables individuelles pouvant avoir une influence sur les niveaux de soutien (p. ex. le fait de fumer ou non), ainsi que de l’exploration des tendances en matière de soutien au fil du temps, notamment une mise à jour en

2019 sur les différentes politiques de lutte contre le tabagisme.

Un autre point fort de cette étude a été l’élaboration de la liste de codage de l’échelle d’intervention38, un premier effort notable pour accroître la capacité d’interprétation des niveaux de l’échelle d’intervention du NCB appliquée à des études sur les politiques publiques axées sur la santé. Ce travail a contribué à amé­liorer la transparence de nos observations et a conduit à la création d’une nouvelle catégorie visant à «  réorienter l’action gouvernementale  ». Nous pensons que d’autres chercheurs pourraient trouver la liste de codage que nous avons élaborée fort utile pour interpréter l’échelle d’intervention du NCB, en particulier pour comprendre les enjeux éthiques des différ­entes politiques publiques axées sur la santé qui n’entrent pas dans les catégories de l’échelle d’origine. L’utilisation de plus­ieurs codeurs dans le processus d’analyse a permis d’accroître la rigueur du codage.

Un dernier point fort de notre étude réside dans le fait que les options en matière de politiques présentées aux répondants ont été examinées en détail par un groupe d’experts composé de membres d’orga­nismes communautaires, de prati ciens et de chercheurs dans le domaine de la lutte contre le tabagisme, qui les a jugées opportunes et fondées sur des données probantes, ce qui accroît la pertinence de nos conclusions et leur application dans le cadre d’initiatives politiques.

Conclusion

Alors que le gouvernement du Canada renouvelle son engagement à l’égard de la politique de lutte contre le tabagisme, laquelle vise à réduire considérablement le fardeau du tabagisme au sein de la pop­ulation1, il est important d’examiner les niveaux d’appui des influenceurs et du grand public aux éventuelles interven­tions, afin de sélectionner stratégiquement les initiatives et activités de lutte anti­tabac. D’après les recherches que nous avons effectuées, les répondants consi­dèrent presque toutes les politiques pro­posées de lutte contre le tabagisme comme «  extrêmement  », «  très  » ou « légèrement » favorables, même les poli­tiques qui restreignent fortement ou sup­priment les libertés individuelles. Les politiques jugées particulièrement favo­rables sont celles qui renforcent la

réglementation des nouveaux produits du tabac (p.  ex. les cigarettes électroniques) afin qu’elle soit aussi stricte que la régle­mentation actuelle des produits du tabac, ainsi que les politiques qui visent les enfants et les jeunes. Notre étude fournit d’autres renseignements sur certains des obstacles que les promoteurs de la santé peuvent rencontrer dans l’optimisation des politiques de lutte contre le tabagisme. Par exemple, bien que la taxation des produits du tabac ait été l’une des poli­tiques les plus efficaces pour réduire l’usage du tabac6, nous avons constaté qu’il s’agissait de l’une des interventions les moins appuyées. Nous avons égale­ment constaté de nombreuses différences relativement aux niveaux de soutien entre les influenceurs de l’Alberta et ceux du Québec, ces derniers manifestant un appui plus marqué à la plupart des politiques. Pour que le Canada atteigne sa nouvelle cible de réduction du tabagisme à moins de 5 %, les promoteurs de la santé dev­ront définir des stratégies aptes à sur­monter les obstacles à l’adoption de politiques efficaces et à réduire les méfaits du tabagisme grâce à des stratégies de choix du contenu diffusé mettant en relief les avantages pour la santé de la popula­tion. Malgré les légères différences de niveau de soutien observées dans notre étude, nous avons constaté que les influ­enceurs et le grand public se sont montrés favorables, en général, à la grande majo­rité des politiques de lutte contre le taba­gisme. Ces niveaux de soutien favorables sont positifs et devraient encourager les promoteurs de la santé à réclamer des mesures législatives plus vigoureuses en matière de politiques et d’interventions de lutte contre le tabagisme afin d’atteindre les objectifs du Canada pour 2035.

Remerciements

Ces travaux ont reçu le soutien du Partenariat canadien contre le cancer dans le cadre du projet Connaissances et actions liées pour une meilleure préven­tion (COALITION) sur les politiques, Policy Opportunity Windows – Engaging Research Uptake in Practice (POWER UP!). Mme Nykiforuk a également reçu du soutien dans le cadre de sa chaire en santé publique appliquée des Instituts de recher­che en santé du Canada, en partenariat avec l’Agence de la santé publique du Canada et Alberta Innovates  – Health Solutions (2014­2019; CPP 137909). Les auteures remercient les partenaires de l’Association pour la santé publique du

61Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

Québec pour leur appui dans la réalisation de l’enquête. Elles souhaitent également remercier Hannah Faye Mercader pour sa précieuse contribution au projet.

Conflits d’intérêts

Les auteures déclarent n’avoir aucun con­flit d’intérêts.

Contributions des auteures et avis

Mmes Nykiforuk et Raine ont dirigé la con­ception du projet et obtenu son finance­ment. Mme Nykiforuk a dirigé l’élaboration et l’exécution de l’enquête et en a super­visé l’analyse. Mmes McGetrick et Kongats ont effectué l’analyse. Mme  Kongats a rédigé le manuscrit avec le soutien édito­rial critique de Mmes McGetrick, Nykiforuk et Raine.

Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteures et ne correspondent pas néces­sairement à ceux du gouvernement du Canada.

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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 64 Vol 40, n° 2, février 2020

Rattachement des auteurs :

Centre de surveillance et de recherche appliquée, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario), Canada

Correspondance : Wendy Hovdestad, Centre de surveillance et de recherche appliquée, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario) K1A 0K9; tél. : 613-799-0921; courriel : [email protected]

Points saillants

• Le Cadre d’indicateurs de la mal­traitance envers les enfants vient compléter d’autres cadres d’indica­teurs publiés par l’Agence de la santé pu blique du Canada et pré­sente des données sur les résultats et les facteurs de risque et de pro­tection de la violence envers les enfants, aux échelles individuelle, familiale, communautaire et sociétale.

• Le tiers (34,1 %) de la population canadienne âgée de 15 ans et plus a été victime d’au moins un type de maltraitance durant l’enfance.

• La violence physique est le type de maltraitance le plus répandu (27,4  %), suivie de l’exposition à la violence entre partenaires intimes (10,6 %) et de l’abus sexuel (8,1 %).

• Des facteurs présents chez les pa rents tels que la maladie men­tale, la consommation de sub­stances et le fait d’avoir été victime de violence familiale peut exposer les enfants à un risque plus élevé de maltraitance.

Résumé

Le portefeuille de la santé du gouvernement du Canada effectue la surveillance de la vio­lence envers les enfants en tant que problème de santé publique depuis les années 1990. L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) publie aujourd’hui le Cadre d’indica­teurs de la maltraitance envers les enfants, qui prend place aux côtés d’autres cadres publiés par l’ASPC, comme le Cadre d’indicateurs de surveillance du suicide. Fondé sur un examen de la portée de revues de la littérature et de méta­analyses, ce cadre, avec l’outil interactif de données en ligne, présente des indicateurs de résultats et des facteurs de risque et de protection de la maltraitance envers les enfants, selon le sexe, l’âge et diverses variables sociodémographiques, aux échelles individuelle, familiale, communau­taire et sociétale. Il va constituer une ressource précieuse en lien avec un problème qui affecte au moins un adulte canadien sur trois.

Mots‑clés : maltraitance envers les enfants, violence physique, exposition à la violence conjugale, négligence, violence psychologique, abus sexuel

Introduction

La maltraitance envers les enfants est un problème de santé publique qui a des effets immédiats et à long terme sur la santé physique et mentale1. Les données de surveillance sont essentielles à la mise en œuvre de politiques et de programmes visant à prévenir et à contrer la maltrai­tance envers les enfants. L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) est res­ponsable de la surveillance nationale de la maltraitance envers les enfants, que ce soit la violence physique, l’exposition à la violence entre partenaires intimes, la négligence, la maltraitance psychologique ou la violence  sexuelle2. L’ASPC recueille actuellement des données sur la maltrai­tance envers les enfants à partir de don­nées administratives provenant d’agences de protection de l’enfance, d’enquêtes auprès d’informateurs substituts et d’en­quêtes par autodéclaration.

Le Cadre des indicateurs de surveillance de la maltraitance envers les enfants (CISME) réunit les données disponibles sur la mal­traitance envers les enfants ainsi que sur les facteurs de risque et de protection aux échelles individuelle, familiale, communau­taire et sociétale, afin d’appuyer la recher­che et l’élaboration de politiques. Le CISME, publié pour la première fois dans ce numéro de Promotion de la santé et pré­vention des maladies chroniques au Canada, sert de complément à d’autres cadres d’in­dicateurs publiés par l’ASPC, à savoir des Indicateurs de surveillance du suicide (ISS), des Indicateurs des maladies chroniques au Canada (IMCC), du Cadre d’indicateurs de surveillance de la santé mentale posi­tive (CISSMP) et du Cadre d’indicateurs de l’activité physique, du comportement sédentaire et du sommeil (APCSS).

Méthodologie

Le CISME a été élaboré à l’aide d’une méthode d’examen de la portée3. Les

Aperçu

Cadre des indicateurs de surveillance de la maltraitance envers les enfantsAimée Campeau, M.A.; Shazmeera Qadri, M.S.P.; Farah Barakat, B.A.; Gabriela Williams, M. Sc.; Wendy Hovdestad, Ph. D.; Maaz Shahid, M. Sc. en santé publique; Tanya Lary, M.A.

https://doi.org/10.24095/hpcdp.40.2.04f

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recherches d’articles ont ciblé en priorité les revues systématiques, les méta­ analyses et les analyses documentaires qui traitent des risques et des facteurs de protection liés à tout type de mauvais traitements infligés aux enfants. Les références figu­rant dans les articles consultés ont été examinées afin de trouver d’autres références. Les articles pertinents publiés en anglais entre 2004 et 2016 et divers rap­ports d’organismes de santé publique

65Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

Recherche, politiques et pratiques

(comme l’Organisation mondiale de la santé) ont été consultés. La liste initiale d’environ 45 à 50 indicateurs a été rac­courcie grâce à des consultations avec des experts en surveillance de la maltraitance envers les enfants ainsi qu’avec les minis­tères participant à l’Initiative de lutte con­tre la violence familiale, de manière à ce que la liste finale soit pertinente et puisse être mise en œuvre dans le cadre d’une approche en santé publique.

Résultats

Les données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2014 indiquent que plus du tiers (34,1 %) de la population âgée de 15 ans et plus a subi au moins un des types sui­vants de maltraitance durant l’enfance  : violence physique ou sexuelle par un adulte ou exposition à la violence par les parents ou les tuteurs (tableau 1). Parmi les trois types de maltraitance subie durant l’enfance, la violence physique était la plus fréquente (27,4 %), suivie de l’exposi­tion à la violence entre partenaires intimes (10,6 %) et de la violence sexuelle (8,1 %).

En raison du contexte familial dans lequel la majorité de la maltraitance infligée aux enfants se produit, les facteurs de risque et de protection sont axés sur les caracté­ristiques parentales ou familiales plutôt que sur les caractéristiques des enfants. Des facteurs comme la maladie mentale des parents, la toxicomanie et l’expérience antérieure de violence familiale peuvent exposer les enfants à un risque supérieur de maltraitance.

Conclusion

Les expériences vécues durant l’enfance sont un important déterminant social de la santé4. Le CISME fournit des données probantes sur les contextes et les facteurs de risque et de protection pour aider à cibler les stratégies de prévention et de lutte contre la maltraitance envers les enfants.

Le CISME est un document évolutif qui sera révisé périodiquement et mis à jour à mesure que de nouvelles données seront disponibles. Un outil interactif en ligne sur l’Infobase de la santé publique du gouvernement du Canada fournira une ventilation des indicateurs selon le sexe, l’âge, la pro vince ou le territoire et le statut vis à vis de l’immigration.

Les lacunes en matière de données indi­quées dans ce cadre, particulièrement à

l’échelle communautaire et sociétale, vont être comblées grâce à l’élaboration en cours de données, au moyen d’enquêtes et de données administratives.

Conflits d’intérêts

Les auteurs déclarent n’avoir aucun con­flit d’intérêts.

Contributions des auteurs et avis

AC, SQ, GW, MS et WH ont contribué à la conception et la conceptualisation du tra­vail, ainsi qu’à l’acquisition, l’analyse et l’interprétation des données. FB, WH et TL ont contribué à l’interprétation des données et à la rédaction et la révision du manuscrit.

Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteurs et ils ne correspondent pas néces­sairement à ceux du gouvernement du Canada.

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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 66 Vol 40, n° 2, février 2020

TABLEAU 1

CADRE DES INDICATEURS DE SURVEILLANCE DE LA MALTRAITANCE ENVERS LES ENFANTSSTATISTIQUES RAPIDES, CANADA, ÉDITION 2019

GROUPE D’INDICATEURS MESURES DES INDICATEURS DERNIÈRE ESTIMATIONSOURCE DE DONNÉES

(ANNÉE)

RÉSULTATS

Maltraitance dans l’enfancea % de la population âgée de 15 ans et plus qui déclare avoir été victime, avant l’âge de 15 ans, de l’un ou l’autre de ces trois types de violence durant l’enfance : violence physique ou sexuelle de la part d’un adulteb et/ou exposition à la violence commise par les parents ou les tuteurs

34,1 % ESG–Victimisation (2014)

% de la population âgée de 15 ans et plus qui déclare avoir été victime, avant l’âge de 15 ans, de violence physique de la part d’un adulteb

27,4 % ESG–Victimisation (2014)

% de la population âgée de 15 ans et plus qui déclare avoir été victime, avant l’âge de 15 ans, de violence sexuelle de la part d’un adulteb

8,1 % ESG–Victimisation (2014)

% de la population âgée de 15 ans et plus qui déclare avoir été exposée, avant l’âge de 15 ans, à de la violence commise par les parents ou les tuteurs

10,6 % ESG–Victimisation (2014)

Mauvais traitements à l’égard des enfants déclarés par la police

Incidence de la violence familiale déclarée par la police contre les enfants de 0 à 17 ans

233 par 100 000 enfants

DUC (2016)

Placement hors du foyer % des enfants de 14 ans et moins placés en famille d’accueil 0,5 % Recensement de 2016

Blessures dues à des mauvais traitements infligés à un enfant – service d’urgence

Proportion des visites au service d’urgence pour des blessures causées par des mauvais traitements infligés à des enfants sur le total des cas dans le SCHIRPT, population de 0 à 17 ans

146,5 par 100 000 cas au service d’urgence

SCHIRPT (du 4 janvier 2011 au 6 juin 2018)

Homicides d’enfants Nombre d’homicides d’enfants de 0 à 17 ans commis par un membre de la famille, par année, selon les données déclarées par la police (% de tous les homicides d’enfants)

0,4 par 100 000 enfants (47,4 %)

Enquête sur les homicides (2007–2016)

RISQUE INDIVIDUEL ET FACTEURS DE PROTECTION (PARENT/FOURNISSEUR DE SOINS)c

Violence familiale antérieure % des adultes ayant des enfantsb à la maison qui déclarent avoir subi, avant l’âge de 16 ans, l’un ou l’autre de ces trois types de violence durant l’enfance : violence physique, violence sexuelle ou exposition à la violence commise par les parents/tuteurs à la maison

48,1 % ESCC–Santé mentale (2012)

% des adultes ayant des enfantsb à la maison qui indiquent avoir eu une interaction avec un organisme de protection de l’enfance avant l’âge de 16 ans au sujet de difficultés à la maison

4,1 % ESCC–Santé mentale (2012)

Maladie mentale % des adultes ayant des enfantsb à la maison qui ont présenté des symptômes correspondant à un trouble de l’humeur ou d’anxiété au cours des 12 derniers mois

5,7 % ESCC–Santé mentale (2012)

Stress % des adultes ayant des enfantsb à la maison qui déclarent que la plupart de leurs journées sont assez ou extrêmement stressantes

27,2 % ESCC–Composante annuelle (2017)

Consommation d’alcool ou de drogues

% des adultes ayant des enfantsb à la maison qui déclarent avoir consommé 5 boissons alcoolisées ou plus (4 ou plus pour les femmes) à une même occasion 12 fois et plus au cours des 12 derniers mois

19,3 % ESCC–Composante annuelle (2017)

% des adultes ayant des enfantsb à la maison qui présentent des symptômes d’abus de drogues ou de dépendance aux drogues, au cours des 12 derniers mois

0,7 % ESCC–Santé mentale (2012)

Soutien social % des adultes ayant des enfantsb à la maison qui ont l’impression de bénéficier d’un niveau élevé de soutien social

94,6 % ESCC–Santé mentale (2012)

Résilience En cours d’élaboration – capacité d’adaptation parentale

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Recherche, politiques et pratiques

GROUPE D’INDICATEURS MESURES DES INDICATEURS DERNIÈRE ESTIMATIONSOURCE DE DONNÉES

(ANNÉE)

RISQUES FAMILIAUX ET FACTEURS DE PROTECTION

Relations familiales % des parents/tuteurs d’enfants âgés de 1 à 9 ans qui font état de caractéristiques associées à un fonctionnement familial de niveau élevé

91,1 % EJC–PMR (2010–2011)

% des élèves de la 6e à la 10e année qui sont d’accord ou tout à fait d’accord avec l’énoncé selon lequel ils obtiennent l’aide et le soutien émotionnels dont ils ont besoin dans leur famille

64,8 % HBSC (2013–2014)

% des élèves de la 6e à la 10e année qui sont d’accord ou tout à fait d’accord avec l’énoncé selon lequel ils se disputent souvent avec leurs parents

21,7 % HBSC (2013–2014)

Stabilité de la dynamique familiale

% des enfants de 1 à 9 ans qui sont parfois ou souvent exposés à des adultes ou à des adolescents qui se battent, qui frappent ou essaient de blesser d’autres personnes à leur domicile, selon la déclaration du parent ou du tuteurd

2,6 % EJC–Enfant (2010–2011)

En cours d’élaboration – présence d’un fournisseur de soins temporaire non biologique à la maison (p. ex. partenaire du parent)

Éducation des enfants % des enfants de 1 à 9 ans qui subissent parfois, souvent ou toujours un châtiment physique comme forme de discipline, selon la déclaration du parent ou du tuteurd

0,5 % EJC–Enfant (2010–2011)

En cours d’élaboration – faible sensibilisation du fournisseur de soins aux besoins des enfants ou aux stades de développement des enfants

Fardeau des fournisseurs de soins

% des adultes ayant des enfantsb à la maison qui déclarent que les soins à des membres de la famille sont le principal facteur de leur stress quotidien

18,1 % ESCC–Composante annuelle (2016)

En cours d’élaboration – besoins spéciaux d’un enfant qui peuvent accroître le fardeau du fournisseur de soins de l’enfant

Grossesse précoce % des premières naissances vivantes chez les mères de moins de 20 ans 5,3 % SEC-BDN (2015)

Revenu du ménage % de la population âgée de moins de 18 ans dans des familles économiques vivant sous le seuil de faible revenu, après impôts

7,4 % ECR (2016)

RISQUES COMMUNAUTAIRES ET FACTEURS DE PROTECTION

Disponibilité et accessibilité des services

En cours d’élaboration – services communautaires pour les parents et les familles

Environnement social % des parents/tuteurs d’enfants de 1 à 9 ans qui font partie d’organismes bénévoles (groupes scolaires ou religieux, associations communautaires ou ethniques)

33,9 % EJC–PMR (2010–2011)

En cours d’élaboration – instabilité résidentielle ou appauvrissement du quartier

Environnement physique En cours d’élaboration – proximité des points de vente d’alcool

RISQUES SOCIÉTAUX ET FACTEURS DE PROTECTION

Politique publique favorisant la santé

En cours d’élaboration – systèmes de soutien officiels pour les familles

Normes culturelles et sociales En cours d’élaboration – croyances sociales/culturelles concernant les châtiments physiques comme moyen disciplinaire pour élever et éduquer les enfants

Inégalités En cours d’élaboration – droits des enfants

Abréviations : DUC, Déclaration uniforme de la criminalité; ECR, Enquête canadienne sur le revenu; EJC–Enfant, Enquête sur les jeunes canadiens – questionnaire de l’enfant; EJC–PMR, Enquête sur les jeunes canadiens – questionnaire de la personne la mieux renseignée; ESCC–Composante annuelle, Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes – Composante annuelle; ESCC–Santé mentale, Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes – Santé mentale; ESG, Enquête sociale générale; HBSC, Comportements de santé des jeunes d’âge sco-laire; SCHIRPT, Système canadien hospitalier d’information et de recherche en prévention des traumatismes; SEC-BDN, Statistiques de l’état civil – Base de données sur les naissances (sauf le Québec).Remarque : « En cours d’élaboration » désigne les mesures pour lesquelles la source de données n’est pas disponible à l’heure actuelle ou pour lesquelles d’autres recherches sont nécessaires pour déterminer une mesure prometteuse et une source de données.a Les estimations de ce cadre d’indicateurs ont été calculées d’une manière conforme à celles du rapport de Statistique Canada intitulé La violence familiale au Canada : un profil statistique, 20155, à l’aide d’une version légèrement différente de la base de données. Toutes les réponses positives à toutes les questions sur la maltraitance durant l’enfance ont été comptées comme des signes de maltraitance. Par contre, les règles d’analyse originales du Questionnaire sur les violences subies dans l’enfance (CEVQ)6 prennent en compte toutes les réponses positives, sauf pour deux sous-types de violence physique (les moins graves) et l’exposition à la violence entre partenaires intimes si celle-ci s’est produite moins de trois fois.b Un adulte est défini comme une personne de 18 ans et plus; un enfant est défini comme une personne de moins de 18 ans.c Les caractéristiques parentales, et non les caractéristiques des enfants, ont été considérées comme des facteurs de risque ou de protection pour la maltraitance des enfants. Cette approche repose sur une perspective de santé publique selon laquelle les facteurs de risque parentaux peuvent représenter les résultats potentiels de la maltraitance des enfants (comme la toxicomanie prénatale ou la violence).d Dans l’EJC–Enfant, il est confirmé au début du questionnaire que la personne qui répond à ces questions est la personne la mieux renseignée (PMR) au sujet des questions. Le terme « parent/tuteur » est utilisé ici pour simplifier.

Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada Recherche, politiques et pratiques 68 Vol 40, n° 2, février 2020

Autres publications de l’ASPC

https://doi.org/10.24095/hpcdp.40.2.05f

Les chercheurs de l’Agence de la santé publique du Canada contribuent également à des travaux publiés dans d’autres revues et dans des livres. Voici quelques-uns ayant été publiés en 2019.

Alatab S, Sepanlou SG, Ikuta KS, […] Badawi A, et al. The global, regional, and national burden of inflammatory bowel disease in 195 countries and territories, 1990–2017: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2017. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2019. pii: S2468­1253(19)30333­4. doi:10.1016/S2468­1253(19)30333­4.

Burstein R, Henry NJ, Collison ML, […] Badawi A, et al. Mapping 123 million neonatal, infant and child deaths between 2000 and 2017. Nature. 2019;574:353­358. doi:10.1038/s41586­019­1545­0.

Mirza A, Forbes JD, Zhu F, Bernstein CN, Van Domselaar G, Graham M, et al. The multiple sclerosis gut microbiota: a systematic review. Mult Scler Relat Disord. 2019. doi:10.1016/j.msard.2019.101427.

Muraca GM, Liu S, Sabr Y, et al. Episiotomy use among vaginal deliveries and the association with anal sphincter injury: a population­based retrospective cohort study. CMAJ. 2019;191(42):E1149­58. doi:10.1503/cmaj.190366.

Pourshams A, Sepanlou SG, Ikuta KS, […] Badawi A, et al. The global, regional, and national burden of pancreatic cancer and its attrib­utable risk factors in 195 countries and territories, 1990–2017: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2017. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2019;4(12):934­947. doi:10.1016/S2468­1253(19)30347­4.

Safiri S, Sepanlou SG, Ikuta KS, […] Badawi A, et al. The global, regional, and national burden of colorectal cancer and its attributable risk factors in 195 countries and territories, 1990–2017: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2017. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2019;4(12):913­933. doi:10.1016/S2468­1253(19)30345­0.

Tonmyr L, Lacroix J, Herbert M. The public health issue of ACEs in Canada. In: Asmundson GJ, Afifi TO, editors. Adverse childhood experiences: using evidence to advance research, practice, policy, and prevention. London (UK): Elsevier; 2020:185­208.

Young I, Greig J, Wilhelm BJ, Waddell LA. Effectiveness of food handler training and education interventions: a systematic review and meta­analysis. J Food Prot. 2019;82(10):1714­1728. doi:10.4315/0362­028X.JFP­19­108.

69Vol 40, n° 2, février 2020Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada

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