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277 Novembre 2015 Partenaires sécurité défense Revue de la coopération de sécurité et de défense La coopération face aux menaces sécuritaires COOPERATION TO TACKLE SECURITY THREATS

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277

Novembre 2015

Partenaires sécurité défenseRevue de la coopération de sécurité et de défense

MINISTÈREDES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

Vos contacts

DIRECTION DE LA COOPÉRATION DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSEAdresse : 57, boulevard des Invalides - 75007 ParisSite internet : www.diplomatie.gouv.fr/fr/cooperation-securite-defense

AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Bertrand de REBOUL (COL (T))Sous-directeurTél. 01.43.17.81.42

Christian PIOT (COL (T))Adjoint/programme ACTSTél. 01.43.17.80.55

Xavier CHATILLON (LCL (G))Afrique australe, orientale/ Océan indienTél. 01.43.17.93.86

Pierre de SOLAGES (LCL (T))Afrique de l’Ouest (pays côtiers)Tél. 01.43.17.88.32

Tanguy EON DUVAL (LCL (T)) Afrique centrale Tél. 01.43.17.82.42

Fabrice LESUEUR (LCL (T)) Mauritanie/Mali/Niger/Burkina Faso Tél. 01.43.17.94.04

DIRECTION

Marin GILLIER (VAE (M))Directeur de la coopération de sécurité et de défenseTél. 01.43.17.88.20

Thierry VANKERK-HOVENDirecteur Adjoint Tél. 01.43.17.88.22

CHARGÉS DE MISSION

Jean-Baptiste TROUCHE (CC (M))Pilotage/Contrôle de gestionTél. 01.43.17.83.75

Caryl TALMA (CDT (T)) CommunicationTél. 01.43.17.93.04

Vincent de CRAYENCOUR Chargé de mission/conseil et prospectiveSLE - Grands comptesTél. 01.43.17.99.32

Camille GROUSSELASBureau Colloques et AccordsTél. 01.43.17.97.69

MONDE

Erwan de GOUVELLOSous-directeur Tél. 01.43.17.94.22

Ollivier GAMBIEZ (CF (M))Proche et Moyen-OrientTunisie/Egypte/LybieTél. 01.43.17.88.85

Frédéric LECA (LCL (A)) Maroc/Algérie/Amérique latineTél. 01.43.17.83.20

Philippe BOCQUET (LCL (A)) Europe/AsieTél. 01.43.17.81.17

BUREAUX SPÉCIALISÉS

Serge MULLERChef du Bureau des Survols et Escales navales Tél. 01.43.17.87.50

Florent PRIEUR Bureau des Survols et Escales navales Tél. 01.43.17.99.57

Yoann CHAZALET Bureau des Survols et Escales navales Tél. 01.43.17.80.52

SECRÉTARIAT

Véronique SECO (ADC (T))Chef du secrétariatTél. 01.43.17.94.24

Régis GIARETTA (CCH (T))

Tél. 01.43.17.88.37

Benoît WISHAUPT (BCH (T)) Tél. 01.43.17.88.36

QUESTIONS MULTILATÉRALES ET SECTORIELLES

Pascale TRIMBACH-ROGNONSous-directeur Tél. 01.43.17.82.91

Pierre MARIE-JEANNE (COL (T))Protection civile/DéminageTél. 01.43.17.54.59

Jean-Pierre AVANNIERChargé de missionCyber/questions européennesRelations avec les partenaires européensTél. 01.43.17.65.45

Gilles BUREL (LCL (T))Section Liaison entreprises (SLE)Tél. 01.43.17.81.90

Jacques MASSON (CDT (P))Coopération technique/sécurité intérieureTél. 01.43.17.68.20

Jean-Philippe ROTH (COM DIV (P)) Coopération technique/sécurité intérieureTél. 01.43.17.68.11

Agathe VASSELIN (CRC2 (M))Sécurité maritime/soutien à la paix/G8Tél. 01.43.17.61.11

Nora ZELAZLI (CF (M)) Appui aux OR africaines/coopération internationale en AfriquePartenariats UE - Afrique/OMP/ONUTél. 01.43.17.80.68

MOYENS

Hervé-Dominique BRODA (COL (T))Sous-directeur Tél. 01.43.17.81.43

Alain JOLIY (CRC1 (A)) Chef de Bureau Juridique et FinancesTél. 01.43.17.97.80

Thomas PIRONNEAU (LCL (T)) Chef de Bureau PersonnelTél. 01.43.17.97.85

Antoine LEDOUX (CBA (T))Chef de Bureau Formation et StagesTél. 01.43.17.81.34

Eric BELLONE (CNE (T)) Chef du Bureau LogistiqueTél. 01.43.17.97.90

La coopération face aux menaces sécuritaires

COOPERATION TO TACKLE SECURITY THREATS

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35Partenaires Sécurité Défense N° 277

RÉFLEXIONS

Une renationalisation des outils de sécurité domestiques ?

C’est un fait toujours vérifié : la criminalité, le terrorisme, les prédations économiques se nourrissent des situations où l’État est absent. Toutes les guerres actuelles sont des guerres civiles, nées d’un délitement des États. Ce risque de la faiblesse appelle le renforcement des outils sécuritaires étatiques, jadis associés à des dérives autoritaires. Le débat sur la « militarisation » de la sécurité tend à s’estomper : tous les pays confrontés à des menaces armées finissent par militariser les forces de police (Afghanistan, Mexique, Colombie), ou par « policiariser » les forces militaires (Mali, Niger, Mauritanie, Israël…). Ce n’est plus le statut, mais la menace à combattre qui définira demain les forces de sécurité : la suppression de la gendarmerie de la République Démocratique du Congo

a eu pour effet la remilitari-sation de facto de la police nationale 1. Ce qui domine est le besoin accru de forces garantissant la continuité de l’action gouvernementale en tout temps et en tout lieu. Les expériences de « privatisa-tion » de la sécurité (recours à des sociétés militaires privées

en Afghanistan, privatisation de la prison d’Abou Ghraïb en Irak) ne fournissent pas d’alternative satisfaisante, pas davantage que les « polices communautaires » anglophones. Le xxie siècle verra probablement se poursuivre l’expansion des forces de sécurité « nationales » à large spectre. On en trouve un indice dans la multiplication des forces de police « robustes » (tableau ci-dessous) et des garde-côtes.

1983 Chine China Police armée populaire People’s Armed Police (中国人民武装警察部队)

1990 Roumanie Romania Gendarmerie Roumaine Romanian Gendarmerie (Jandarmeria Română)1990 Tchad Chad Gendarmerie nationale National Gendarmerie1992 Moldavie Moldavia Arme des Carabiniers Carabinier Corps (Trupele de carabinieri)1994 Cambodge Cambodia Gendarmerie royale khmère Royal Gendarmerie of Cambodia2001 Pologne Poland Gendarmerie Militaire Military Gendarmerie (Žandarmeria wojskowa)2001 Serbie Serbia Gendarmerie Gendarmerie (Žandarmerija – Жандармерија)2003 Irak Iraq Police nationale irakienne Iraqi National Police (Iraqi National Police)2004 Qatar Qatar Force de sécurité intérieure Interior Security Force (Lakhwiya)2004 Ukraine Ukraine Troupes de l’Intérieur Interior Troops

2004

France, Italie, Espagne, Portugal, Pologne, Roumanie France, Italy, Spain, Portugal, Poland, Romania

Force de gendarmerie européenne European Gendarmerie Force (EUROGENDFOR)

2008 Jordanie Jordan Gendarmerie royale Royal Gendarmerie (��������� �������� �������

)

2006 Afghanistan Afghanistan Afghan National Civil Order Police Afghan National Civil Order Police (ANCOP)2013 Mexique Mexico Gendarmerie nationale National Gendarmerie (Gendarmería Nacional)

Par-là se trouve sans doute réaffirmée la nécessité d’un service public national de la défense et de la sécurité, qui se distingue doublement des modèles décentralisés et privatisés.

1 Cité dans « La réforme des systèmes de sécurité et de justice en Afrique francophone », organisation internationale de la francophonie, Paris, 2010.

A renationalisation of domestic security tools?

It is a fact that is still true: crime, terrorism and economic predation feed on situations in which the State is absent. All the current wars are civil wars, produced by a disin-tegration of States. This risk of weakness calls for a strengthening of government security tools, formerly associated with authoritarian excesses. The debate on the “militarisation” of security is becoming blurred: all the countries dealing with armed threats end up turning their police forces into military forces (Afghanistan, Mexico, Colombia), or turning their military forces into police forces (Mali, Niger, Mauritania, Israel). It is no longer the status, but the threat to combat that will define security forces in the future: elimination of the gendar-merie in the Democratic Republic of the Congo caused the de facto re-militarisation of the national police 1. What dominates is the growing need of forces ensuring the continuity of govern-ment action at all times and in all places. The experiences of the “privatisation” of security (turning to private military companies in Afghanistan, privatising the Abu Ghraib prison in Iraq) have not provided satisfactory alternatives, any more than “community policing” in English-speaking coun-tries have. In the 21st century, we will most likely see national security forces become more widespread. We see signs of this in the increase in robust police forces (see table below) and coast guards.

As we can see, the need is clearly reaffirmed for a national public service of defence and security, which is different from both decen-tralised and privatised models.

1 Mentioned in La Réforme des systèmes de sécurité et de justice en Afrique francophone, International Organisation of La Francophonie,Paris, 2010.

Ministèredes Affaires étrangèreset du Développement international Direction de la coopération de sécurité et de défense57, boulevard des Invalides – 75700 ParisTél. : 01 43 17 94 24

E-mail : [email protected]

Site internet : www.diplomatie.gouv.fr/fr/cooperation-securite-defense

Directeur de la publication :Vice-amiral d’escadre Marin Gillier

Rédacteur en chef :Commandant Caryl Talma

Contributeurs :Monsieur Sébastien BergeonMonsieur Vincent de CrayencourCommissaire divisionnaire Nicolas DeclercqMadame Mathilde FoucrierMadame Marie JourdainMadame Cloé LaboisneContrôleur général Jean-Eric LacourMonsieur Pierre LapaqueLieutenant-colonel Jean-Philippe MaasAdministrateur en chef de 1re classe Olivier MornetLieutenant-colonel Arnaud de PampelonneMonsieur Émile PerezChef de Bataillon Edouard PerinLieutenant-colonel Jean-Philippe PlassardMadame Stéphanie RenautCommissaire Jean-Philippe RothMadame l’ambassadrice Michèle RamisCommissaire divisionnaire Charles Yvinec

Conception graphique :© Maquette DILA

Impression :DILA

Crédits photos :©MAEDI, MINDEF, MININT/DCI, Un Photo Victoria Hazou (p5), Afghanistan UN Photo UNODC Zalmai (p6), Piracy photo European union (p6), Minilab - Training Païling (p7), Alan English CPA (p7), UN Photo-Martine Perret (p13), Yemen Photo ECHO J George (p16).

Avertissement au lecteur :« En application de la loi du 11 mars 1957 (art. 41) et du code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992, toute reproduc-tion partielle ou totale à usage collectif de la présente publication est strictement interdite sans autorisation expresse de l’éditeur. »

© Direction de la coopération de sécurité et de défense ISSN : 2118.0911

Sommaire/SummaryLA COOPÉRATION FACE AUX MENACES SÉCURITAIRES COOPERATION TO TACKLE SECURITY THREATS

03 ÉDITO/Editorial

DOSSIER CENTRAL

04 Interview de Madame Michèle Ramis, Ambassadrice chargée de la lutte contre la criminalité organiséeInterview With Michèle Ramis, Ambassador in charge of combating organised crime

08 Interview de Monsieur Émile Perez,Directeur de la coopération internationale au ministère de l’IntérieurInterview of Émile Perez, Head of the International Cooperation Directorate (DCI) at the Ministry of the Interior

10 Attaché de défense – Attaché de sécurité intérieure : le continuum sécurité défense Defence attaché – Internal security attaché: the security-defence continuum

12 L’approche sécuritaire au niveau régionalThe regional security approach

14 Synergie des coopérations Synergy of cooperation

15 La dimension interministérielle dans le champ sécuritaireThe interministerial dimension in the fi eld of security

16 Crise migratoire européenne, ACTS et coordination de l’action interministérielleEuropean migration crisis, ACTS and coordination of interministerial action

17 Les organisations internationales et la dimension sécuritaireInternational organisations and the security dimension

19 Sécurité aérienne : bilan et perspectives du programme ASACAAir security: Assessment and perspectives of the ASACA programme

20 Protection civile : naissance du projet CSUPC en RCICivil protection: birth of the CSUPC project in Côte d’Ivoire

22 Projet Appui à la lutte contre la criminalité organisée en région Caraïbes (ALCORCA)Support Project for Fighting Organised Crime in the Caribbean (ALCORCA)

23 EIFORCES : Témoignage du lieutenant-colonel Philippe Plassard, Conseiller auprès du directeur général de l’EIFORCES (l’École internationale des forces de sécurité) au CamerounEIFORCES: Testimonial of Lieutenant-Colonel Philippe Plassard

FOCUS

24 L’enseignement du français en milieu militaire : un programme en expansionLearning French in a military environment: a growing programme

32 La genèse d’une coopération : l’exemple du projet « cyber »The origin of cooperation: the example of the cyber project

RÉFLEXIONS

34 La coopération de sécurité de défense du XXIe siècle (suite)Defence and security cooperation in the 21st century (continued)

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É D I TO

Les trafics illicites qui se jouent des frontières, l’accroissement exponentiel des flux migratoires, les innombrables facettes du terrorisme : le caractère protéi-forme de la menace oblige la Direction de la Coopération de Sécurité et de Défense à inscrire son action dans une approche globale, collaborative et collective.L’approche globale se traduit d’abord par la synergie des actions de défense, de sécurité intérieure

et civile, objectif porté par le décret no 2009-291 du 16 mars 2009, qui institue la DCSD. Elle se traduit aussi par la complémentarité des missions de coopération structurelle, confiées à la DCSD, et des missions de coopération opérationnelle, assurées par l’État-major des armées en matière de défense et par la Direction de la Coopération Internationale (DCI) du ministère de l’Intérieur en matière de sécurité intérieure.S’il s’agit pour la DCI de rechercher un « retour en sécurité intérieure en France », la DCSD intègre ce même impératif dans une vision plus large. Il convient d’aider les partenaires qui en expriment le souhait à bâtir des structures de sécurité étatiques qui ancreront l’effort dans la durée – d’où le nom de coopération structurelle.La dimension collaborative repose sur un réseau de spécialistes ; en 2015, ce sont 85 experts techniques internationaux et coopérants gendarmes qui mettent en œuvre quotidiennement la politique de coopération structurelle de sécurité intérieure française. La DCSD s’appuie aussi sur les compétences et l’engagement de 86 attachés de sécurité inté-rieure (ASI), dont le périmètre couvre 147 pays, ce qui en fait l’un des réseaux les plus importants du monde dans ce domaine. La dimension collaborative, c’est aussi le dialogue permanent qu’entretiennent les ASI au sein des représentations françaises avec les attachés de défense et conseillers de coopération et d’action culturelle ; c’est le dialogue permanent qu’entretiennent à Paris les ministères concernés, dans une vision transverse, et les opérateurs que sont Expertise France, Civipol et l’AFD, appelés à jouer un rôle toujours croissant.La dimension collective, enfin, est l’une des conditions de la péren-nisation de l’action de la DCSD : seule, la France ne réglera rien. Une collaboration accrue avec l’Union européenne, les Nations unies et les organisations régionales s’impose. C’est cet effort collectif qui a suscité l’organisation du conseil européen de la Valette d’octobre 2015, autour de la création d’un fonds fiduciaire d’une ampleur inédite, pour tenter de résoudre la crise migratoire qui frappe l’Europe. Directement issue du projet d’Appui à la Coopération Transfrontalière au Sahel (ACTS) conçu par la DCSD, l’idée de ce fonds, dont le périmètre géographique et thématique s’est élargi depuis, traduit la nécessité d’un traitement à grande échelle des problèmes de sécurité intérieure rencontrés par les pays de départ et de transit des flux migratoires.L’approche globale, collaborative et collective incarnée par ACTS prévaut dans les autres zones d’intervention de la DCSD, comme en témoigne le lancement du projet d’Appui à la lutte contre le crime organisé en région Caraïbes (ALCORCA), dont le but est l’instauration d’une coopération régionale en matière de police, de douane, de défense et de justice. La démonstration qu’un nouveau paradigme s’impose progressivement.

Le vice-amiral d’escadre Marin Gillier, Directeur de la Coopération de Sécurité et de Défense

É D I TO

Illegal trafficking that knows no borders, exponential growth of migratory flows and infinite kinds of terrorism combine to form an extremely complex, multiform threat. In response, the Security and Defence Cooperation Directorate (DCSD) has to work in the framework of a comprehensive, collaborative and collective approach.

The comprehensive approach first and foremost means seeking synergies in defence, internal security and civil security actions, as set out in the Decree Decree 2009-291 of 16 March 2009 that created the DCSD. It also means ensuring the complementarity of structural cooperation missions, entrusted to the DCSD, and of operational cooperation missions, which are carried out by the Joint Staff of the armed forces for defence issues and by the International Cooperation Division (DCI) of the Ministry of the Interior for internal security.

While for the DCI the aim is to achieve a “restoration of French internal security”, the DCSD incorporates this same imperative into a wider vision. Partners who so wish should be assisted in building State security structures that will provide a basis for efforts in the long-term – hence the name structural cooperation.

The collaborative aspect is based on a network of specialists. As of 2015, there are 85 international technical experts and gendarme cooperation officers implementing on a daily basis France’s internal security structural cooperation policy. The DCSD also draws on the skills and commitment of 86 internal security attachés whose remit covers 147 countries, making them one of the largest global networks in this area. The collaborative aspect also includes constant dialogue maintained by internal security attachés within French representations with defence attachés and “cooperation and cultural action counsellors”, and that is maintained in Paris, across all sectors, by the ministries concerned and the operators Expertise France, CIVIPOL and AFD, which have an ever increasing role to play.

Lastly, the collective aspect is a crucial condition for the DCSD’s action in the long term, as France will resolve nothing if it stands alone. Enhanced cooperation is required with the European Union, the United Nations and regional organizations. That is the collective effort that brought about the European Council Valletta meeting in October 2015, focused on the creation of a trust fund of unprecedented size in order to attempt a solution to the migration crisis affecting Europe. The idea of this fund came directly from the “Action for Transborder Cooperation in the Sahel” (ACTS) project designed by the DCSD, of which the geographical and thematic scope has since been extended. It addresses the need for large-scale handling of the internal security problems encountered by the countries of departure and transit of migration flows.

The comprehensive, collaborative and collective approach embodied by ACTS also applies to the DCSD’s other theatres of intervention, as shown by the launch of the project supporting the fight against organized crime in the Caribbean (ALCORCA) which aims to establish regional policing, customs, justice and defence cooperation. All this shows that a new paradigm is gradually taking over.

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Partenaires Sécurité Défense N° 2774

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

INTERVIEW DE mADAME mICHèLE RAMISAmbassadrice chargée de la lutte contre la criminalité organisée

Vous êtes en charge de la lutte contre la criminalité organisée, quelles sont aujourd’hui les principales menaces en la matière ?Les menaces sont multiples et leur combinaison crée un problème de sécurité global. La criminalité organisée menace l’État de droit, les démocraties, le développement économique, la prospérité, la santé

publique et la vie humaine. Nous sommes confrontés à des groupes infra-étatiques qui menacent la stabilité des États et de nos sociétés et mettent en péril, dans certaines régions, la sécurité internationale. Ces phénomènes criminels appellent une réponse politique et pas seulement judiciaire ou policière.C’est pour cette raison que le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale publié en 2013 classe la criminalité organisée dans ses formes les plus graves en 5e position des risques et menaces affectant le territoire national et les ressortissants français.Il existe d’une part les trafics « traditionnels », portant principalement sur les drogues, les armes, les êtres humains, les migrants, les biens cultu-rels, ces phénomènes connaissant toutefois des évolutions notables : apparition de drogues synthétiques fabriquées presque partout dans le monde ; crise aiguë avec l’arrivée massive en Europe de migrants ou de réfugiés qui ont fait l’objet de trafic par les passeurs. L’on assiste d’autre part à l’émergence de nouvelles formes de criminalité : contrefaçon à l’échelle industrielle portant tant sur les biens de luxe que de grande consommation, cybercriminalité, piraterie maritime et trafic de pétrole, trafic d’espèces animales ou végétales protégées, trafic de déchets… L’industrie criminelle se renouvelle constamment avec le souci de trouver de nouveaux marchés et de passer au travers des mailles de la répression.Tous ces trafics génèrent des flux considérables d’« argent sale » qui sont blanchis via les paradis fiscaux ou dans l’économie licite et qui criminalisent et déstabilisent les économies. Enfin, on doit souligner les liens entre trafiquants de drogues et groupes terroristes ou mouvements de lutte armée, qui peuvent être plus ou moins directs. Sans omettre que l’implantation du crime organisé affaiblit les États et crée des conditions favorables à l’implantation de groupes terroristes.

COOPERATION TO TACKLE SECURITY THREATSInterview With Michèle Ramis, Ambassador in charge of combating organised crime

You are in charge of combating organised crime, what are today’s main threats in this area?The threats are many and combined they create a global security problem. Organised crime threatens the rule of law, democracies, economic development, prosper-ity, public health and human life. We are faced with infra-State groups who threaten the stability of States and of our societies, and in certain regions jeopardise international security. These criminal problems not only require a law enforcement response, but a political one as well.

That is why the White Paper on Defence and National Security published in 2013 ranked the most serious types of orga-nised crime fifth among risks and threats affecting France and its citizens.First there are “traditional” types of trafficking, princi-pally drugs, arms, human beings, migrants and cultural goods. However, they are undergoing considerable changes: the emergence of synthetic drugs manufactured almost everywhere in the world and the acute crisis with the massive number of migrants and refugees being smuggled into Europe. Second, new types of crime are emerging: counterfeiting at an industrial scale of both luxury and consumer products, cybercrime, maritime piracy and oil trafficking, trafficking of protected animal and plant species, waste trafficking, etc. The criminal industry is constantly reinventing itself in order to find new markets and ways to slip through the protective net of law enforcement.All of these types of trafficking generate consider-able flows of “dirty money” that are laundered in tax havens or in the legal economy, which criminalise and destabilise economies.

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5Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Dans certaines régions vulnérables, l’on constate une pluralité de menaces avec une accumulation de leurs effets. L’on voit également des connexions entre différents trafics et alliances entre criminels dans une approche économique du crime. La pluralité, la trans-versalité des menaces et l’interconnexion des activités criminelles entraînent un phénomène de globalisation du crime.

Ces trafics génèrent des économies parallèles qui financent des mouvements terroristes, comment lutter efficacement contre ce phénomène ?Comme je l’indiquais, les liens entre réseaux criminels et groupes terroristes peuvent prendre différentes modalités et ils sont une source de préoccupation majeure. L’on assiste en outre aujourd’hui à des actes de terrorisme à fort impact mais nécessitant des moyens financiers réduits, comme le prouvent les récents attentats commis en Europe. Dans ce cas, les terroristes se financent par de la petite et moyenne délinquance qui passe sous les seuils de vigilance.

À côté de l’action que mènent les services de renseignement, la seule réponse possible est de maintenir une action résolue contre l’offre de produits illicites, en coopération avec nos partenaires, et contre la demande de ces biens à destination des consommateurs (qu’ils soient de drogue, de marchandises de contrefaçon, de faux médica-ments ou de services obtenus de personnes que l’on sait soumises à la traite des êtres humains). Seule une réponse pluridisciplinaire et multi-acteurs peut sérieusement entraver (à défaut d’éradiquer) ces trafics. De même l’appréhension des revenus du crime par la saisie et la confiscation et la lutte contre le blanchiment d’argent sont des outils efficaces car elles affectent la rentabilité des trafics.

Les pays partenaires expriment des besoins spéci-fiques en termes de coopération, quels en sont les principaux domaines ?Les alliances sont indispensables pour lutter contre ces phénomènes transnationaux. Nous avons donc le souci de développer la coopé-ration avec nos partenaires dans les domaines où ils en expriment le besoin, en particulier :• le renforcement de l’État et la promotion de la bonne gouver-

nance pour lutter contre la corruption ;• le renforcement des capacités de la chaîne répressive – police,

douanes, justice – par la formation, l’échange d’informations et de bonnes pratiques, la coopération policière, l’entraide judiciaire.

Lastly, it is important to stress the links between drug traf-fickers and terrorist groups or armed movements, which can be direct to various degrees. It is also important to note that the establishment of organised crime weakens States and creates conditions that are conducive to the establishment of terrorist groups.In certain vulnerable regions, we have observed a multitude of threats with an accumulation of effects. We have also seen connections between different types of trafficking and alliances between criminals in an economic approach to crime. The multitude and cross-cutting nature of threats and the interconnection of criminal activities have resulted in a globalisation of crime.

These types of trafficking generate parallel economies that finance terrorist movements, how can we effectively tackle this problem?As I have said, the links between criminal networks and terrorist groups can work in different ways and they are a source of major concern. We are now witnessing acts of terrorism that have a strong impact but require limited financial means, as recent terrorist attacks in Europe have proven. In this case, terrorists are financed by petty and minor crime that fail to be detected by surveillance efforts.Besides the action being conducted by intelligence services, the only possible response is to maintain resolute action to address the supply of illicit products in cooperation with our partners and to address the demand of these consumer goods (whether they be drugs, counterfeit goods, fake medicines or services obtained from people that are known to be victims of human trafficking). Only a multi-disciplinary response from multiple actors can seriously curb these types of trafficking (if they cannot be eradicated). Also, seizing and confiscating crime proceeds and combating money laundering are effective tools because they affect the profitability of trafficking.

Partner countries express specific needs in terms of cooperation, what are the main areas in which these needs are expressed?Alliances are essential to addressing these transnational problems. We are therefore working to develop coopera-tion with our partners in the areas in which the needs are expressed, particularly:• State building and promoting good governance to fight

corruption;• Building capacity of the law enforcement chain – police,

customs, justice – through training, sharing informa-tion and best practices, police cooperation and mutual legal assistance.

Monitoring borders and identifying trafficking routes are key and it is important to stress the relevance of the ACTS project conducted by the Defence and Security Cooperation Directorate (DSCD) in the Sahel region. Strengthening the criminal response is also key. The existence of an effective and independent justice system is one of the foundations of the rule of law. That is why France, with Germany and the United Kingdom, supports in West Africa the West African

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Partenaires Sécurité Défense N° 2776

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritairesLa surveillance des frontières et l’identification des routes des trafics sont clés et la pertinence du projet ACTS conduit par la DSCD au Sahel est à souligner. Le renforcement de la réponse pénale est également fondamental. L’existence d’une justice efficace et indépendante est un des fondements de l’état de droit. C’est pourquoi la France, avec l’Allemagne et le Royaume-Uni,

soutient en Afrique de l’Ouest, le réseau des procureurs d’Afrique de l’Ouest (WACAP) créé par la CEDEAO avec le soutien de l’ONUDC, que les États de la région souhaitent transformer en un espace judiciaire plus intégré pour mieux lutter contre les menaces criminelles communes.

Comment évaluez-vous la réponse au niveau international, et comment coordonner ces actions multiples ?Certains estiment que, par exemple dans le domaine des poli-tiques contre les drogues, la communauté internationale aurait échoué faute d’avoir éradiqué le trafic et la consommation des stupéfiants. C’est oublier que les efforts mis en œuvre ont permis de limiter la hausse du nombre de consommateurs et donc le nombre de décès et que les stratégies anti-drogues, en pertur-bant les trafics et en en augmentant le coût pour les réseaux, limitent leur impact. Il faut se garder de réponses simplistes et encourager nos partenaires à se doter de politiques nationales fondées sur trois piliers : une stratégie, des outils et des alliés.

Par stratégie, j’entends la volonté politique, la définition de réponses globales et intégrées s’attaquant à tous les volets du problème. Par outils, je vise la mise en œuvre des conventions inter-nationales et les dispositifs législatifs et répressifs nationaux. Enfin, la coopération avec les partenaires et alliés est essentielle, tant sur un plan bilatéral qu’au travers des enceintes multilatérales (Nations unies, Union européenne, Interpol, GAFI, Conseil de l’Europe, G7…). L’Union européenne va conduire d’importants programmes de coopération, financés par le Fonds européen de développement, avec les organisations régionales africaines d’ici à 2020, dont une part importante sera consacrée à la sécurité.

Central Authorities and Prosecutors Against Organized Crime (WACAP) network created by the Economic Community of West African States (ECOWAS) with the support of the United Nations Office on Drugs and Crime (UNODC), which States in the region would like to see transformed into a more integrated judicial space to better tackle common criminal threats.

How can you evaluate the response at inter-national level, and how can multiple actions be coordinated?

Some people believe that, for example in the area of anti-drug policies, the international community has failed because it has not eradicated narcotic drug trafficking and consumption. They have however forgotten that recent efforts have helped curb the increase in the number of consumers and therefore the number of deaths and that anti-drug strategies, by disrupting trafficking and by increasing the cost for networks, are limiting their impact. It is important to avoid simplistic responses and encourage our partners to adopt national poli-cies that are based on three pillars: a strategy, tools and allies.

By strategy, I mean political will, the definition of global and integrated responses addressing every aspect of the problem. By tools, I mean the implementation of international agreements and legal frameworks and national law enforcement systems. Finally, cooperation with partners and allies is essential, both on a bilateral level and through multilateral forums (United Nations, European Union, Interpol, FATF, Council of Europe, G7, etc.). The European Union is going to conduct significant cooperation programmes financed by the European Development Fund with African regional organi-sations from now until 2020, and a considerable portion of them are devoted to security.

These programmes provide the opportunity for qualitative leaps in the response to criminal threats that are destabilising Africa. All these partnerships make it possible to provide coordinated responses among States, to address the capacity shortcomings of certain States and to boost political mobilisation.

Apart from institutional partnerships, work with non-govern-mental organisations is paramount. These organisations are

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7Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Ces programmes offrent l’opportunité de sauts qualitatifs dans la réponse aux menaces criminelles qui déstabilisent l’Afrique. Tous ces partenariats permettent d’apporter des réponses coordonnées entre États, à combler les déficits capacitaires de certains d’entre eux et à accentuer la mobilisation politique.

En dehors des partenariats institutionnels, le travail avec les organisations non gouvernementales est fondamental. Celles-ci sont à la fois lanceurs d’alerte, sources de proposition et élément de pression et jouent souvent un rôle complémentaire à celui des États. Enfin, le dialogue et la collaboration avec le secteur privé sont essentiels. Les entreprises peuvent être victimes de la criminalité organisée mais également acteurs de la lutte contre ces phénomènes criminels en fournissant des systèmes et équipements pour la surveillance, la prévention ou la lutte contre les trafics.

Tous ces efforts doivent être coordonnés pour constituer une réponse robuste, un maillage mondial qui laisse le moins d’angles morts et de failles possibles. C’est ce à quoi les diplomates et les différentes responsables publics s’attellent.

Comment est menée l’action globale au niveau interministériel, et quel est votre rôle en son sein ?

Il existe un continuum entre l’action des différentes institutions de l’État en charge de la lutte contre le crime organisé : Intérieur, Justice, Affaires étrangères, Économie et Finances (Douanes, Tracfin), Défense. Chaque administration a son rôle à jouer et la coordination interministérielle permet de conjuguer nos efforts tant sur le territoire français que sur le terrain, notamment au sein de nos ambassades ou de nos dispositifs de coopération. La criminalité organisée constitue une menace stratégique qui appelle des réponses politiques et la mobilisation des États au plus haut niveau. Le ministère des Affaires étrangères et du Développement international s’est doté d’un ambassadeur spécifique afin de coordonner nos efforts, de proposer et d’explorer des pistes de travail, de porter nos positions auprès de nos partenaires ou dans les enceintes appropriées et d’être un point d’entrée pour les acteurs non institutionnels, qui ont aussi une contribution à apporter.

whistleblowers, a source of proposals and providers of pressure and often play a role that complements the role of States. Finally, dialogue and collaboration with the private sector are essential. Businesses can be victims of organised crime but also active in tackling these criminal activities by providing systems and equipment for the surveillance, prevention and efforts to combat trafficking.

All these efforts must be coordinated to establish a robust response, a global protection system that has fewer blind spots and possible weaknesses. That is what diplomats and various government leaders have been working hard to do.

How is global action conducted at an interminis-terial level, and what is your role in this action?

There is a continuum between the action of different institutions of the State in charge of combating organised crime: Interior, Justice, Foreign Affairs, Economy and Finances (Customs, Tracfin), Defence. Every administration has its role to play and interministerial coordination makes it possible to join our efforts both in France and in the field, particularly in our

embassies and in our cooperation systems. Organised crime is a stra-tegic threat that calls for political responses and the mobilisation of States at the highest level. The Ministry of Foreign Affairs and International Development has a specific ambassador to coordinate our efforts, to propose and explore avenues for our work, explain our positions to our partners and in the appropriate bodies and to be a point of contact for non-insti-tutional actors, who also have a contribution to make.

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Partenaires Sécurité Défense N° 2778

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Quel regard portez-vous sur la coopération proposée par la France en matière de sécurité intérieure, notamment au profit des pays parte-naires africains touchés par la montée en puis-sance du crime organisé et de la menace terroriste ?

La coopération en matière de sécurité intérieure proposée par la France bénéficie d’une vitalité qui est notamment due à la vigueur du réseau des services de sécurité intérieure. Ce réseau couvre 153 pays. Il jouit d’une image valorisante dont est porteur notre pays à l’étranger dans sa capacité à proposer, échanger, dialoguer.L’implantation de réseaux terroristes et criminels est durable notamment dans certains États fragiles africains et constitue généralement une menace pour la stabilité régionale. Ces troubles internes majeurs conduisent à la constitution d’espaces d’instabilité dans lesquels les intérêts occidentaux comme ceux des populations locales peuvent se trouver compromis. Afin de lutter contre ces menaces, les États de l’Union européenne, et particulièrement la France, veillent à entretenir une relation historique et pérenne avec les pays africains au travers d’une coopération soutenue.

Quels sont les projets majeurs engagés/priori-tés fixées par la DCI pour combattre la menace sécuritaire croissante ?Une coopération opérationnelle efficace, source d’un retour en sécurité intérieure réel, reste l’objectif majeur de la DCI. Afin d’atteindre ce but, elle a fait preuve d’adaptabilité en ciblant rapidement, voire en anticipant, les évolutions des phénomènes criminels les plus prégnants (radicalisation, cybercriminalité, trafic d’êtres humains ou d’armes dus aux conflits …) sans négliger bien sûr les thématiques traditionnelles (terrorisme, criminalité organisée, immigration, lutte contre les stupéfiants …). La coopération de courtoisie n’a plus sa place compte tenu des enjeux auxquels nous devons faire face, la DCI a fait le choix de la coopération utile pour toutes les parties.Afin de lutter contre l’immigration irrégulière, les attachés de sécurité intérieure (ASI) disposent de deux axes de travail : l’apport d’une expertise dans le cadre du contrôle aux frontières ainsi que la lutte contre la fraude documentaire. Ainsi, la DCI mène des actions de coopération opérationnelle et technique avec les services spécialisés des pays partenaires, et a mené des actions de « sensibilisation à la fraude documentaire ». Elle développe, par ailleurs, un projet intitulé « Corne de l’Afrique ». Enfin, par le projet « Umbrella », elle participe à une action « d’appui au gouvernement tunisien dans les domaines de la gestion intégrée des frontières et de la protection interna-tionale ». Ces actions de coopération menées par la DCI sont conformes aux objectifs dictés par M. Cazeneuve : « dans le cadre de la relation de confiance, de synergie sous l’autorité des ambassadeurs, […] que tout cela converge et fasse une politique lisible et forte ».

Interview de Monsieur Émile Perez,Directeur de la coopération internationale au ministère de l’Intérieur

Interview of Emile PerezHead of the International Cooperation Directorate (DCI) at the Ministry of the Interior

How do you see the cooperation that France is offering in the area of internal security, particu-larly to benefit partner African countries affec-ted by the increase in organised crime and the terrorist threat?

The cooperation that France is offering in the area of internal security is strong mainly due to the vigorous network of internal security services. This network covers 153 countries. It has a positive image abroad of a country that is able to propose, exchange and conduct dialogue.

Terrorist and criminal networks can be established over the long term especially in certain fragile African States and overall are a threat to regional stability. These major internal troubles generate areas of instability in which both Western interests and those of local populations can be compromised. In order to address these threats, European Union Member States and particularly France are striving to maintain a longstanding and lasting relationship with African countries through sustained cooperation.

What are the major projects undertaken/prio-rities set by the DCI to combat the growing security threat?

Effective operational cooperation, which produces a return in terms of internal security, remains a major objective of the DCI. In order to achieve this objective, it has proven to be adaptable in swiftly targeting, and even in anticipating, evolutions of major criminal activities (radicalisation, cybercrime, trafficking of human beings or arms due to conflict, etc.) and, of course, traditional themes (terrorism, organised crime, immigration, narcotic drugs, etc.). Comity cooperation no longer has its place given the challenges we have to address. The DCI has chosen productive cooperation for all parties.

To combat illegal immigration, internal security attachés have two focuses for their work: providing expertise in border control and preventing document fraud. Therefore, the International Cooperation Directorate conducts operational and techni-cal cooperation actions with specialised services of partner countries and has conducted actions to raise awareness about document fraud. It is also developing a project entitled “Horn of Africa”. Finally, through the Umbrella project, it is taking part in an action of support to the Tunisian government in the areas of integrated border management and international protection. These cooperation actions conducted by the DCI are consistent with the objectives set out by our minister Mr. Cazeneuve: “within the framework of a relationship of trust, synergy under the authorities of ambassadors, […] that all of this converge and become clear and strong policy”.

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9Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, les ASI sont également en première ligne. En effet, comme le rappelait notre ministre lors de l’ouverture du colloque des ASI, le 1er septembre dernier, « dans les pays dans lesquels les ASI interviennent, il y a des gouvernements qui mènent une politique de lutte contre le terrorisme et dont un certain nombre d’actions peuvent inspirer la nôtre. Ensuite, il y a des signaux faibles d’évolution de comportement ou de constitution de filières de recrutement ou de propagande, parfois même d’acteurs qui sont susceptibles de passer à l’action que les ASI peuvent détecter, et qui peut justifier une coopération renforcée. Enfin, il peut y avoir aussi une porosité de la frontière entre certaines organisations du crime et le terrorisme, comme c’est le cas en Afghanistan, la traite des êtres humains, le trafic de drogue ».

Comment s’articulent les missions de la DCI et celles de la DCSD pour répondre de manière globale à la demande des partenaires étrangers ?Dans le domaine de la coopération technique qui constitue un des volets de l’action de la DCI, les ASI assurent la conduite du programme de coopération annuel, en liaison très étroite avec la DCSD qui a en charge l’aide au développement structurel. En 2014, sur les 2 060 actions de coopération technique qui ont été réalisées au bénéfice des partenaires étrangers, près de la moitié étaient assurées en partenariat avec le ministère des Affaires étrangères et sa DCSD. Les principaux domaines de ces actions concernaient la gestion démocratique des foules, la criminalité organisée et la sécurité civile.

Dans le domaine de la coopération technique, si on excepte les partenaires pratiquant l’autofinancement, la DCSD finance les stages thématiques réalisés par la DCI en écoles de police et de gendarmerie. Elle finance également l’accueil d’auditeurs étrangers – une centaine de places par an – pour des périodes plus ou moins longues en écoles supérieures de police (ENSP) ou de gendarmerie (EOGN). Vous comprendrez bien que dès lors tout doit se faire en parfaite concertation, en lien étroit, avec un dialogue permanent.

Cette dimension interministérielle vous semble-t-elle une des clés de réussite de la coopération menée par la France ?La Direction de la coopération internationale poursuit les objectifs qui lui sont confiés par le ministre de l’Intérieur, en s’assurant que son action s’inscrive en totale cohérence avec la ligne fixée par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international. Si les actions de coopération menées par la DCSD et la DCI ne se confondent pas toujours, c’est que chacune obéit à des spécificités propres, mais il n’y pas de conflit : les deux types de coopération que mène le gouvernement à l’étranger montrent un visage pluriel du rayonnement de la France. Elles se consolident et s’appuient mutuellement.

Assurément, la dimension interministérielle de la coopération est une clé de la réussite d’une France qui plus que jamais doit exporter une image d’unité et de diversité à la fois, afin de mieux protéger les populations que nous servons au quotidien.

When it comes to the fight against terrorism, international secu-rity attachés are also in the forefront. As our minister stated at the opening session of a colloquium of internal security attachés on 1 September, “in countries in which internal security attachés work, there are governments that conduct counter-terrorism policy and a number of their actions can be used as a model for our actions. Next, there are weak signs of change in behaviour and the establishment of recruitment or propaganda networks, sometimes even of the actors who are likely to take action that internal security attachés may identify, and that could justify strengthened cooperation. Finally, lines can be crossed between certain crime organisations and terrorism, as is the case in Afghanistan, human trafficking and drug trafficking”.

How can missions of the DCI and the DSCD be coordinated to meet overall demand of foreign partners?In the area of technical cooperation, which is one of the areas of action of the DCI, internal security attachés conduct an annual cooperation programme, working closely with the DSCD, which is in charge of structural development assistance. In 2014, more than half of the 2,060 technical cooperation actions that were carried out to help foreign partners were ensured in partnership with the Ministry of Foreign Affairs and its DSCD. The main areas of these actions concerned demo-cratic crowd management, organised crime and civil security.In the area of technical cooperation, not including the part-ners who are self-financed, the DSCD funds thematic training courses conducted by the DCI in police and gendarmerie colleges. It also funds visits from foreign auditors—some 100 spots a year—varying in length in national police colleges (ENSP) and national gendarmerie colleges (EOGN). Obviously all of this must be done in full cooperation, working closely, with constant dialogue.

Do you think this interministerial dimension is a one of the keys to the success of cooperation conducted by France?The DCI pursues objectives that have been set by the Minister of the Interior, by ensuring that its action is completely consistent with the lines set by the Ministry of Foreign Affairs and International Development. Although cooperation actions conducted by the DSCD and the DCI are at times separate, each complying with their own special features, they are not conflicting: the two types of cooperation that the government are carrying out abroad show a multi-faceted face of France’s outreach. They are mutually reinforcing and supportive.Clearly, the interministerial dimension of cooperation is key to a successful action by France which now more than ever should export an image of both unity and diversity in order to better protect the populations that we serve daily.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27710

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Attaché de défense – Attaché de sécurité intérieure : le continuum sécurité défensePropos recueillis auprès de Nicolas Declercq, attaché de sécurité intérieure au Liban

Defence attaché – Internal security attaché: the security-defence continuumRemarks from Nicolas Delercq, internal security attaché in Lebanon

What is your vision of the current situation in Lebanon concerning security and defence issues?

In Lebanon, the main threats from a security point of view remain terrorism, drug trafficking and financial issues (corrup-tion, money laundering). Therefore, our cooperation actions contribute to building capacity of the Directorate-General of Internal Security Forces fully engaged in counter-terrorism (recent arrests of Daesh-related terrorist cells) and regional narcotic drug trafficking (captagon).

Cooperation with Lebanon in the area of internal security and civil security is extremely active. In 2015, an example of this is French experts’ missions in Lebanon. Training courses and visits in France are also scheduled for Lebanese security forces. A number of training courses in police or gendarmerie schools were held in France along with French language courses. The main themes chosen for cooperation actions include counter-terrorism, organised crime, democratic crowd management, combating narcotic drugs, and airport security. There is a focus on training concerning judicial police and maintaining public order. A total of 90 actions are conducted every year.

The connection between security and defence is often close, how can working relations be established in the field with regard to the two respective missions?

As is the case in France, Lebanese police is in daily contact with administrative authorities, judges and emergency services. It is with these actors, and also services such as customs and associations, that there is the most interaction.

Yet, ties with members of the military are strong. Indeed, statutorily, Lebanese police officers are members of the mili-tary and they have the same basic training as their military colleagues. Also, members of the military play a major role in Lebanon. Several presidents were former Chiefs of Defence Staff and during times of unrest, it is not uncommon to see police duties given to members of the military. It is important to note that the current head of airport security is a military officer who has authority over all military staffs of the platform, including police officers.

Against this backdrop, and in compliance with the Taif Agreements which set out that the armed forces must gradu-ally disengage from all missions that are not under their remit,

Quelle est votre vision de la situation actuelle au Liban sur les questions de sécurité et de défense ?

Au Liban, les menaces princi-pales du point de vue sécuritaire restent le terrorisme, le trafic de stupéfiants et les dossiers finan-ciers (corruption, blanchiment). Ainsi, nos actions de coopération contribuent à renforcer les capa-

cités de la Direction générale des FSI pleinement engagée dans la lutte contre le terrorisme (arrestations récentes de cellules terroristes liées à Daëch) et le trafic régional de stupéfiants (captagon).

La coopération avec le Liban dans le domaine de la sécurité intérieure et de la sécurité civile est très active. En 2015, elle se décline notamment sous forme de missions d’experts français au Liban. Des stages et des visites en France sont également programmés au profit des forces de sécurité libanaises. Ainsi, de nombreux stages en école de police ou de gendarmerie ont lieu en France ainsi que des sessions d’enseignement à la langue française. Les principales thématiques retenues pour les actions de coopération portent sur la lutte contre le terrorisme, le grand banditisme, la gestion démocratique des foules, la lutte contre les stupéfiants, et la sûreté aéroportuaire. L’accent est mis sur la formation en police judiciaire et en maintien de l’ordre public. Au total, 90 actions sont réalisées chaque année.

Le lien entre sécurité et défense est souvent étroit, comment s’établissent les relations de travail sur le terrain par rapport à vos deux missions respectives ?

Comme c’est le cas en France, le policier libanais est en contact quotidien avec les autorités administratives, judiciaires, les services de secours. C’est avec ces acteurs, auxquels il faut rajouter les services tels que la douane ou encore le monde associatif, que les interactions sont les plus fortes.

Cependant, les liens avec les militaires sont forts. En effet, statutairement, les policiers libanais sont militaires et les offi-ciers de police suivent la même formation initiale que leurs collègues militaires. Par ailleurs, les militaires jouent un rôle majeur au Liban. Plusieurs présidents ont été d’anciens CEMA et, lors de périodes de troubles, il n’a pas été rare de voir des fonctions de police confiées à des militaires. Il est à noter que, actuellement, le chef de la sécurité de l’aéroport est un militaire qui a autorité sur tous les personnels militaires de la plateforme, policiers compris.

Dans ce contexte, et conformément aux accords de Taëf qui prévoient que l’armée doit peu à peu se désengager de toutes

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11Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

les missions qui ne sont pas de sa compétence, l’ASI et l’AD veillent à bien distinguer leurs actions de coopération et à proposer des thématiques ciblées qui ne souffrent d’aucune ambiguïté et sans jamais mélanger les deux publics, par exemple formation au combat en montagne pour l’AD et formation en police technique et scientifique pour l’ASI.

Au Liban, dans un projet relevant de la compé-tence de l’ASI, dans quel domaine l’AD peut-il contribuer à favoriser la mise en route du projet ?

Dans un pays de confusion entre le militaire et le civil, la coopé-ration française doit au maximum tirer des lignes claires entre des métiers différents, des bases légales différentes, des missions différentes, des expertises diffé-rentes, des publics différents.

Ainsi, cette ambassade a toujours veillé à soigneusement distinguer les actions de coopé-ration militaire et la coopéra-tion civile dans le domaine de la sécurité intérieure pour éviter d’abonder dans le sens de cette confusion. Nos actions de coopé-ration au profit des FSI s’ins-crivent toujours dans le cadre du respect de la légalité et des droits de l’homme et favorisent autant qu’il est possible de le faire des passerelles entre la police d’une part et la justice, les douanes, les collectivités locales d’autre part.

interior security attachés and defence attachés would like to made a distinction between their cooperation actions and propose targeted themes that are in no way ambiguous and never mix the two targeted groups, for example, mountain combat training for defence attachés and technical and scien-tific training for internal security attachés.

In Lebanon, in a project under the remit of the internal security attaché, in what area can the defence attaché help get the project started?

In a country where there is confusion of civilians and members of the military, French cooperation must draw the clearest lines

possible between the differ-ent jobs, different legal bases, different missions, different types of expertise, and the different target groups. That is why this embassy has always carefully sought to distinguish military cooperation from civil cooperation in the area of internal security so as not to increase this confusion.

Our cooperation actions benefitting the Internal Security Forces always comply with legal frameworks and respect human rights, and as much as possible, help build bridges between the police on one hand and justice, customs and local authori-ties on the other.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27712

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

The regional security approachRemarks from Comptroller-General Jean-Eric Lacour, regional internal security attaché

The job of regional internal security attaché for the Sahel zone mainly consists in coordinating the international security attachés’ activity in eight West African countries (Senegal, Mauritania, Mali, Niger, Burkina Faso, Chad, Cameroon and Côte d’Ivoire) and in implementing genuine combined regional actions of all or a portion of the abovementioned countries. It is often noted that “regional” actions used to be juxtaposed bilateral actions during which the countries concerned rarely met or exchanged.

This mission was facilitated by the creation in late 2014, at the initiative of the Member States, of the G5 Sahel Group, whose purpose is to establish cooperation on security and economic development between five countries in the sub-region (Mauritania, Mali, Niger, Burkina Faso and Chad). At its inception, this group was led when it comes to cooperation on internal security by the regional internal security attaché and the internal security attaché in Mauritania, the country initially taking the chair of this structure. At their meeting in May 2014 in Nouakchott, G5 interior ministers particularly laid the foundations for this cooperation that is swiftly developing. Since then, the G5 has been structured with the creation of a permanent secretariat. It is an essential channel for regional cooperation even if the regional internal security attaché involves other countries in the area (Senegal in particular) in regional cooperation.

This cooperation is mainly based on two pillars: border protec-tion and counter-terrorism. It not only concerns structural cooperation but technical and operational cooperation as well. Support of the DSCD, particularly the regional Support

L’approche sécuritaire au niveau régionalPropos recueillis auprès du contrôleur général Jean-Éric Lacour, attaché régional de sécurité intérieure

La fonction d’attaché régional de sécurité intérieure pour la zone SAHEL consiste essentiellement à coordonner l’activité des ASI au niveau de huit pays d’Afrique de l’Ouest (Sénégal, Mauritanie, Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad, Cameroun et Côte d’Ivoire) et à mettre en place de véritables actions régionales qui regroupent la tota-lité ou une partie des pays cités. En effet, il a souvent été constaté que les actions dites « régionales » consistaient en des actions bilatérales juxtaposées au cours

desquelles les pays concernés se rencontraient et échangeaient rarement.

Cette mission a été facilitée par la création fin 2014, à l’initiative des États membres, du groupe « G5 SAHEL » qui a pour vocation de mettre en place, entre cinq pays de la sous-région (Mauritanie, Mali, Niger, Burkina Faso et Tchad), une coopération en matière de sécurité et de développement économique. À l’origine, ce groupe a été « porté », en ce qui concerne la coopération en matière de sécurité intérieure, par l’ARSI et l’ASI en Mauritanie, ce pays assurant la première présidence de cette structure. La réunion en mai 2014 à Nouakchott, des ministres de l’Intérieur du G5 a été, en particulier, l’acte fondateur de cette coopération qui se développe rapidement. Depuis cette date, le G5 s’est structuré, en particulier avec la création d’un secrétariat permanent. Il s’agit d’un vecteur essentiel de coopération régionale même si l’ARSI associe d’autres pays de la zone à la coopération régionale, le Sénégal en particulier.

Cette coopération repose essentiellement sur deux piliers : la protection des frontières et la lutte contre le terrorisme. Elle concerne non seulement la coopération structurelle mais aussi la

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13Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

for Cross-Border Cooperation in the Sahel (ACTS) programme, is important to the implementation of these actions.

The mission of the regional internal security attaché consisted in seeking internal security hubs of excellence in the countries of the area of his remit to make actions regional that were initially solely bilateral. Accordingly regional actions were implemented on combating document fraud in Burkina Faso, on countering terrorism in Niger and on border management and protection in Mauritania.

Other actions are planned for 2016 in close cooperation with the ACTS project coordinator. Relations were also established with EU delegations in each of the countries and representa-tives of the UN, and UNODC in particular. The regional internal security attaché is currently working with UNODC to establish encrypted communications between G5 countries that will enable them to have genuine operational exchanges.

To establish this cooperation, the regional internal security attaché residing in Dakar receives support from the internal security attachés and the internal security services in the area of his remit. As previously pointed out, some countries have acquired professional skills in certain areas that should be shared with other countries in the sub-region. In the field of counter-terrorism, Niger, for example, created a specific service including the police, gendarmerie and civil guard services. This structure, which is particularly effective, is the only one of its kind in the zone. This is why we need to set up regional actions. It is important to also note that this service was established thanks to the JUSSEC (justice and security) project of the Ministry of Foreign Affairs and International Development.

The post of the Sahel regional internal security attaché is the only one of its kind in the network of the DCI of the Ministry of the Interior. It has an exclusively regional remit and is justified by the size, in terms of cooperation action, and the importance, in terms of security, of the sub-region. There is another post of regional attaché in the Balkans but it is combined with that of the bilateral internal security attaché in Croatia.

coopération technique et opérationnelle. L’appui de la DCSD, en particulier du programme régional ACTS (Appui à la coopé-ration transfrontalière au Sahel) est important pour la mise en place de ces actions.

La mission de l’ARSI a consisté à rechercher les pôles d’excellence en matière de sécurité intérieure dans les pays de sa zone de compétence, pour régionaliser des actions qui étaient à l’origine uniquement bilatérales. C’est ainsi que des actions régionales en matière de lutte contre la fraude documentaire ont été mises en place au Burkina Faso, contre le terrorisme au Niger et en matière de gestion et de protection des frontières en Mauritanie.

D’autres actions sont programmées pour 2016 en liaison étroite avec le coordonnateur du projet ACTS. Des relations ont été égale-ment établies avec les délégations de l’UE dans chacun des pays ainsi qu’avec les représentants de l’ONU, l’ONUDC en particulier. L’ARSI travaille actuellement avec cette dernière à la mise en place de liaisons cryptées entre les pays du G5 qui permettront à ces derniers d’avoir de véritables échanges opérationnels.

Pour mettre en place cette coopération, l’ARSI, en résidence à Dakar, s’appuie sur les ASI et les SSI de sa zone de compétence. Comme cela a été souligné, des pays ont acquis dans certains domaines un professionnalisme qui mérite d’être partagé avec les autres pays de la sous-région. Ainsi, en matière de lutte contre le terrorisme, le Niger, par exemple, a créé un service spécifique qui regroupe les forces de police, de gendarmerie et la garde civile. Cette structure, particulièrement performante, est la seule de cette nature dans la zone. D’où la nécessité de mettre en place des actions régionales. Il convient d’ailleurs de noter que ce service a été mis en place grâce au projet JUSSEC (justice et sécurité) du MAEDI.

Le poste d’ARSI SAHEL est le seul de cette nature au sein du réseau de la direction de la coopération internationale du minis-tère de l’Intérieur. Il a une vocation exclusivement régionale et est justifié par l’ampleur, en termes d’actions de coopération, et l’importance, en termes de sécurité, de la sous-région. Il existe un autre poste d’attaché régional dans la zone des Balkans mais il se cumule avec celui d’ASI bilatéral en Croatie.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27714

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Pouvez-vous nous décrire votre parcours et votre fonc-tion au sein de la DCSD ?Entré dans la police il y a un peu plus de 20 ans, j’ai un parcours clas-sique effectué au sein de la Sécurité publique. Ce n’est qu’en 2008 que je me suis lancé dans une orientation internationale, d’abord en direction centrale, puis pendant quatre ans en tant qu’attaché de sécurité intérieure

à Jakarta, en Indonésie. À mon retour en France, il y a un an, j’ai pris mes fonctions à la DCSD.Bien qu’œuvrant au sein de cette direction, je demeure un personnel du ministère de l’Intérieur, effectuant un rôle de liaison permanente entre la Direction de la coopération internationale et la DCSD, soit entre le ministère de l’Intérieur et le MAEDI. C’est un rôle de facilitateur pour l’ensemble des dossiers communs, que ce soit en matière de stratégie, de financements, ou de personnels dédiés sur le terrain, ce qui me donne une mission transversale de conseil. Par ailleurs, j’ai en charge un certain nombre de dossiers propres, notamment le suivi des FSP.

À travers votre rôle, quels sont les avancées et les axes d’amélioration constatés dans la relation entre ces deux directions ?On sait que la coopération internationale en matière de sécurité intérieure prend de plus en plus d’importance, que des sujets qui auparavant relevaient clairement d’un ministère ou de l’autre sont désormais étroitement imbriqués. Dans ce cadre, la relation entre les deux directions est devenue essentielle, afin de ne pas disperser les efforts, d’avoir une action cohérente et commune. Les buts sont les mêmes, les stratégies pour y parvenir différentes mais complémentaires.Les cultures organisationnelles des deux directions paraissent parfois très différentes, mais l’écoute et l’ouverture d’esprit, des deux côtés, sont des outils puissants, et mon parcours au sein des deux ministères permet souvent de lever les ambiguïtés et d’avancer avec succès sur des dossiers qui paraissaient difficiles avant dialogue.

Inscrire des projets structurants dans le temps tout en étant en mesure de faire face à la menace immédiate : n’est-ce pas là toute la difficulté d’une coopération globale ?C’est très précisément le challenge d’un poste comme celui que j’occupe : la temporalité est une notion très prégnante dans les dossiers de l’une et l’autre direction. Alors que le ministère de l’Inté-rieur se doit d’être dans une réactivité immédiate, afin d’apporter une réponse satisfaisante à des événements graves et des évolutions rapides de la menace, le MAEDI travaille, lui, sur des projets à plus long terme, qui demandent du recul, des moyens différents.Toutefois, chacun reconnaît l’importance du travail de l’autre, peut s’appuyer dessus, et lorsque le dialogue est constructif, c’est l’ensemble de la coopération qui trouve en cohérence, et la sécurité qui se renforce.

Synergie des coopérationsTémoignage du commissaire Jean-Philippe Roth (DCSD)

Synergy of cooperationTestimonial of Commissioner Jean-Philippe Roth (DSCD)

Can you tell us about your career and your job at the DSCD?I joined the police force just over 20 years ago and have had a conventional career in Public Safety. It was only in 2008 that I started work in an international capacity, first in the central administration, then for four years as an internal security attaché in Jakarta, Indonesia. When I returned to France a year ago, I took up my duties at the DSCD.

Although I am working in this directorate, I am still a member of staff of the Ministry of the Interior, playing a role of perma-nent liaison between the DCI and the DSCD, in other words between the Ministry of the Interior and the Ministry of Foreign Affairs and International Development. It is a role of facilita-tor for all of our common areas of work, whether concerning strategy, funding, or staff working in the field, which gives me a cross-cutting mission of advising. Also, I have my own issues to work on, for example monitoring priority solidarity funds.

Through your role, what are the progress and areas of improvement you have noted in the relationship between these two directorates?We know that international cooperation on internal security is becoming increasingly important and that issues which formerly were clearly the responsibility of either one ministry of or the other are now closely intertwined. In this context, the relation-ship between the two directorates has become essential so that our efforts do not become too spread out and so that we have coherent and common action. The goals are the same; the strategies to achieve them are different but complementary.

Organisational cultures of the two directorates seem at times very different, but the interest and open-mindedness of both sides are powerful tools, and my experience in the two ministries often makes it possible to eliminate ambiguities and to move forward successfully on issues that seemed difficult before dialogue.

Establishing long-term structural projects and being at the same time able to address imme-diate threats: isn’t that the most difficult chal-lenge of global cooperation?

That is precisely the challenge of a post such as mine: time is a very relevant notion in the areas of work of any directorate. The Ministry of the Interior must be immediately respon-sive in order to address serious events and rapid changes in threats effectively, whereas the Ministry of Foreign Affairs and International Development is working on long-term projects which require an objective approach and different means. However, everyone recognises the importance of everyone else’s work, can count on each other, and when dialogue is constructive, it is the whole of cooperation that is aligned, and security that is reinforced.

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15Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Comment la DCSD a é t é a m e n é e à proposer le projet ASECMAR aux parte-naires africains ?La sécurité maritime dans le Golfe de Guinée s’étant dégradée, la France a souhaité renforcer sensible-ment son effort de coopé-ration dans ce domaine. La maîtrise des pays bénéfi-ciaires sur l’ensemble de leurs espaces maritimes

répond à des enjeux de souveraineté, économiques, sociaux et environnementaux. Le concept d’action de l’État en mer est éminemment interdisciplinaire et donc interministériel.

Quels sont les fondamentaux de ce FSP mobilisateur ?Il vise avant tout à améliorer l’exercice de la souveraineté des États côtiers sur leur zone de responsabilités et s’articule autour de trois composantes : organisation publique et réglementation, formation et entraînement et enfin coopéra-tion régionale. Il est ouvert à 15 pays d’Afrique de l’ouest et d’Afrique centrale et aux deux organisations sous-régionales, la CEDEAO et la CEEAC. Il dispose d’un budget de 1 200 000 € et s’achèvera en juillet 2016.

Quels sont les résultats constatés à ce stade du programme ?Au Bénin, Côte d’Ivoire et au Togo, une aide à l’élaboration de la stratégie nationale de sécurité maritime et de décrets sur l’AEM a été apportée et s’est concrétisée rapidement par leur adoption. En Guinée et au Togo nous avons aidé à la mise en place d’une autorité nationale chargée de l’AEM et d’un fonds national de sécurité maritime.

Des audits techniques, par exemple, pour la mise en place d’un sémaphore en RDC ou encore la création d’une gendarmerie maritime au Togo, et des séminaires AEM ont également été réalisés à la demande des pays concernés et ont permis des réalisations concrètes.

Comment voyez-vous se poursuivre ces efforts engagés, plus particulièrement en inter-administrations ?Grâce en particulier à la tenue d’ateliers thématiques regroupant des représentants de l’ensemble des administrations concernées, délivrés au sein du nouvel Institut supérieur maritime interré-gional d’Abidjan (ISMI), dédié aux cadres moyens et supérieurs.

la dimension interministérielle dans le champ sécuritaireTémoignage d’Olivier Mornet, Administrateur en chef de 1re classe des affaires maritimes, coordonnateur régional ASECMAR.

The interministerial dimension in the field of securityTestimonial of First Class Chief Administrator of Maritime Affairs Olivier Mornet, Regional Coordinator of the Gulf of the Guinea Maritime Security Sector Reform (ASECMAR) project

How did the DSCD decide to propose the ASECMAR project to African partners?As maritime security in the Gulf of Guinea has worsened, France wanted to considerably beef up its cooperation efforts in this area. Helping beneficiary countries to manage all of their maritime spaces addresses sovereignty, economic, social and environmental issues. The concept of State action at sea is prominently inter-disciplinary and there-fore interministerial.

What are the basic principles of this proactive Priority Solidarity Fund project?First and foremost, it aims to improve coastal States’ exercise of sovereignty in their area of responsibilities on the basis of three components: government organisation and regulations, education and training and lastly regional cooperation. It targets 15 West and Central African countries and two sub-regional organisations, the Economic Community of West African States (ECOWAS) and the Economic Community of Central African States (ECCAS). It has a budget of €1,200,000 and will be completed in July 2016.

What progress has the programme made at this stage?In Benin, Côte d’Ivoire and Togo, assistance in crafting the national maritime security strategy and decrees on State action at sea was provided and was rapidly implemented in concrete terms through their adoption. In Guinea and Togo, we helped to establish a national authority in charge of State action at sea and a National Maritime Security Fund.

Technical audits, for example, with regard to the setting up of a semaphore in the Democratic Republic of the Congo and the creation of a maritime gendarmerie in Togo, and State action at sea seminars were also conducted at the request of the countries concerned and made concrete action possible.

How can these efforts be pursued, more parti-cularly in an inter-administration framework?For example, by holding thematic workshops involving repre-sentatives of all of the administrations concerned to be given in the new Inter-regional Maritime Security Institute of Abidjan (ISMI) for mid-and senior-level officials.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27716

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Crise migratoire européenne, ACTS et coordination de l’action interministérielleLa gestion de la crise migratoire que traverse l’Europe est une priorité politique et humaine, qui donne lieu à une mobilisation exceptionnelle. Mobilisation de l’ensemble des pays membres de l’Union européenne, mobilisation de tous les services concer-nés au sein de chaque pays. Parmi les réponses formulées, la Commission européenne a fait sienne une idée proposée par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international, dans le cadre du projet d’Appui à la coopération transfrontalière au Sahel (ACTS) : celle de la création d’un Fonds fiduciaire d’ampleur capable de mettre en œuvre des solutions globales à la crise migratoire. Des solutions que le projet ACTS entend proposer dans le champ sécuritaire et dans le champ du développement, fidèle au continuum dessiné par le sommet de l’Élysée en décembre 2013 et devenu l’un de ses principes fondateurs.Pour identifier ces solutions, une meilleure coopération intermi-nistérielle dans les pays partenaires est bien entendu nécessaire, aux niveaux central et décentralisé, mais aussi en France, pour mieux faire correspondre les besoins exprimés par le partenaire avec ce que la France est en mesure d’offrir. Pour cette raison, un dialogue permanent est assuré entre les ministères (MAEDI, Défense et Intérieur), à Paris, qui se traduit au sein des postes par un échange quotidien entre attachés de défense, attachés de sécurité intérieure et conseillers de coopération. Les opérateurs ad hoc (AFD, Expertise France, Civipol), sollicités en permanence, complètent ce dispositif. Un comité de pilotage réunissant les représentants de ces entités se tient régulièrement pour valider les grands axes de la politique à conduire.Dans les pays partenaires, les comités de suivi nationaux constituent la meilleure illustration de cette coordination interministérielle. Ces comités, réunis sous la présidence du ministre de l’Intérieur de chaque pays, comprennent les direc-teurs généraux de tous les services concernés : police, douane, justice, éducation, santé, agriculture et représentants de la société civile. Toutes les dimen-sions doivent être prises en compte, pour mieux définir les contours d’une solution globale, expérimentée dans un premier temps dans la zone du Liptako Gourma mais qui pourrait être étendue, à terme, à d’autres zones sensibles d’Afrique. Un élar-gissement que le Fonds européen contribuera large-ment à favoriser.

European migration crisis, ACTS and coordination of interministerial actionManagement of the migration crisis that Europe is experienc-ing is a political and human priority which has generated exceptional mobilisation of all the European Union Member States and all the services concerned in each country. One of the responses has been an idea the European Commission has adopted as its own that was proposed by the Ministry of Foreign Affairs and International Development in the frame-work of the Support for Cross-Border Cooperation in the Sahel (ACTS): setting up a trust fund that is large enough to implement comprehensive solutions to the migration crisis. The ACTS project intends to propose these solutions in the security and development fields, in keeping with the continuum established at the Elysée Summit in December 2013 and which has become one of its founding principles.To identify these solutions, better interministerial coopera-tion in partner countries is of course necessary at central and decentralised levels, but also in France, to better match the needs expressed by partners with what France is able to offer. That is why permanent dialogue is ensured between ministries (Foreign Affairs and International Development, Defence and the Interior) in Paris, which for posts means daily communication between defence and internal security attachés and cooperation advisers. Ad-hoc agencies (French Development Agency-AFD, Expertise France, Civilpol) are constantly consulted and provide additional support to this system. A steering committee bring-

ing together representatives of these bodies meets regularly to validate the major thrusts of policy to be conducted.

In partner countries, national monitoring committees reflect this interministerial coordination most effectively. These committees, chaired by the Minister of the Interior of each country, include heads of the directorates-general of all the services concerned: police, customs, justice, education, health, agriculture and representatives of civil society. All the dimensions must be considered to better define the main lines of a compre-hensive solution, tested initially in the Liptako Gourma region, but that can be extended in time to other sensi-tive areas in Africa. And the European Development Fund will play a significant role in making this happen.

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17Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

les organisations internationales et la dimension sécuritaireInterview de Pierre Lapaque, Représentant du bureau régional de l’ONUDC pour l’Afrique de l’Ouest et du centre.

La stratégie de l’ONUDC pour le Sahel est effec-tive depuis bientôt deux ans. Quels sont les axes prioritaires qui articulent l’action de l’ONUDC au Sahel ?Dans le cadre de la stratégie de l’ONU pour le Sahel et au vu des défis de la région, l’ONUDC a mis en œuvre un programme qui repose entre autres sur les piliers suivants :• renforcement de la législa-

tion sans laquelle les services opérationnels ne peuvent arrêter les criminels et la coopération internationale qui permet aux pays d’agir ensemble aux plans opérationnels et judiciaires pour s’opposer aux menées de la criminalité internationale organisée et du terrorisme ;

• renforcement des contrôles aux frontières (air, mer et terre) dans une approche axée sur le renseignement, notamment en zone désertique, afin d’intercepter autant de marchandises illicites que possible, mais aussi pour recueillir des informa-tions pertinentes utilisables dans les enquêtes ultérieures ;

• amélioration de l’accès à la justice, de la protection des victimes et des témoins, du droit à un procès équitable et des conditions de détention sont des éléments qui contri-buent à la réconciliation, la stabilisation et la réinsertion.

Quels sont les liens que l’ONUDC entretient avec les partenaires internationaux ?Le but de notre stratégie est de soutenir un cadre d’action collective. Celui-ci met l’emphase sur l’ensemble de la région, en liant les acteurs nationaux, régionaux et internationaux, toujours sur la base d’une appropriation nationale. Même si revient aux gouvernements la responsabilité principale de s’attaquer aux défis de la paix et de la sécurité dans la région, le rôle de la communauté internationale est de soutenir les pays membres pour relever ces défis, qui ont un impact bien au-delà de la bande sahélienne.

Comment un projet de coopération tel que le programme ACTS peut-il trouver sa place dans la stratégie globale engagée par l’ONU au Sahel ?En parfaite adéquation avec les priorités de la stratégie de l’ONU pour la région, le programme ACTS représente un exemple de la traduction de la théorie stratégique à l’action sur le terrain, ce qui est essentiel pour accompagner la région dans un développement durable et améliorer la sécurité pour toutes les populations.

International organisations and the security dimensionInterview of Pierre Lapaque, Representative of the UNODC Regional Office for West and Central Africa.

UNODC’s strategy for the Sahel has been effec-tive for soon-to-be two years. What are the priority areas that UNODC’s action in the Sahel is based on?As part of the UN strategy for the Sahel and given the chal-lenges in the region, UNODC has implemented a programme based on, among other things, the following pillars:• Reinforcing legislation without which operational ser-

vices cannot stop criminals and international cooperation that enables countries to act together at operational and judicial levels to counter action of international organised crime and terrorism;

• Shoring up border control (air, sea and land) in an approach focused on intelligence, especially in desert areas, in order to intercept as many illicit goods as possible, but also to collect relevant information that can be used in subsequent investigations;

• Improving access to justice, protecting victims and wit-nesses and ensuring the right to a fair trial and impro-ved conditions of detention are factors that contribute to reconciliation, stabilisation and reintegration.

What are the ties that UNODC maintains with international partners?The purpose of our strategy is to support a framework for collective action. It focuses on the entire region by linking national, regional and international actors, always on the basis of national ownership. Although it is the main responsibility of governments to tackle the challenges of peace and security in the region, the role of the international community is to support member countries to meet these challenges that have an impact well beyond the Sahelian strip.

How can a cooperation project such as the ACTS programme find its place in the UN’s overall strategy in the Sahel?Perfectly in line with the priorities of the UN strategy for the region, the ACTS programme represents an example of how strategic theory has been translated into action in the field, which is essential to supporting the region with sustain-able development in mind and improving security for all the populations.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27718

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Témoignage de Sébastien Bergeon,Conseiller politique du RSUE pour le Sahel

Quels sont les principaux défis sécuritaires au Sahel ?Les défis sécuritaires dans cette région sont multiples et de nature régionale :• le terrorisme qui prend ses racines dans la radicalisation d’une partie de la jeunesse des États sahéliens ;• les trafics de drogue, d’armes et d’êtres humains qui puisent leurs sources dans le manque de perspectives

socio-économiques des populations locales ;• la migration, qui par les déplacements non contrôlés, peut

engendrer des heurts entre populations locales. Les migra-tions au Sahel ont pour origines la fuite des conflits (Boko Haram, affrontements intercommunautaires au nord du Mali et dans le sud de la Libye), les crises (alimentaires) mais sur-tout l’espoir d’un avenir meilleur au-delà des “frontières” ;

• enfin, trop souvent oubliés, les affrontements entre les agri-culteurs et les éleveurs qui subissent les aléas du change-ment climatique.

De quelles façons l’UE appréhende t-elle ces défis ?L’UE a adopté une Stratégie pour le Développement et la Sécurité au Sahel en 2011 et un Plan d’Action Régional en 2015, dans lesquels les questions de sécurité sont largement développées aux côtés de celles, indissociables, du développement.L’UE dispose de trois missions PSDC sur le terrain sahélien : EUTM Mali et EUCAP SAHEL au Niger et au Mali. Ces missions dispensent, dans le cadre d’un mandat très précis, du conseil et de la formation aux forces de sécurité et de défense des États dans lesquels elles sont déployées.Enfin, et en plus des programmes indicatifs nationaux, l’UE a signé un Programme indicatif régional en juillet dernier à Abuja, dont le, premier pilier est consacré aux questions de paix et de sécurité. Il convient de noter que la CEDEAO et l’UEMOA n’englobent pas tous les États du Sahel et traitent aussi des États côtiers pour lesquels se rajoutent les problématiques de sécurité maritime.À ce titre, l’UE travaille à la définition d’un cadre de coopération spécifiquement sahélien avec les États de la stratégie Sahel de l’UE qui se sont regroupés depuis 2014 au sein de l’organisation régionale “G5 Sahel”.

Pensez-vous que le G5 Sahel soit le niveau adéquat pour relever ces défis ?Le G5 est perçu comme le bon format et la bonne échelle pour traiter des questions spécifiquement sahéliennes et améliorer la coordination des politiques de développement et de sécurité des cinq États.N’étant pas un ordonnateur des programmes régionaux du FED, la réelle plus-value du G5 Sahel est de coordonner et de mettre en cohérence les activités de coopération régionales des États sahéliens et de s’en faire l’avocat auprès des partenaires techniques et financiers, africains et européens.À cet égard, l’Union européenne s’est engagée à apporter tout son soutien au Secrétariat permanent du G5 Sahel.

International organisations and the security dimensionTestimonial of Sébastien Bergeon, EUSR Sahel Political Adviser

What are the main security challenges in the Sahel?Security challenges in this region are many and regional in nature:• Terrorism that is rooted in the radicalisation of a portion

of young people in Sahelian countries.• The trafficking of drugs, arms and human beings that have

their sources in the lack of socio-economic possibilities for local populations.

• Migration, which through unmonitored displacements can generate problems among local populations. The reason behind migration in the Sahel is to flee conflicts (Boko Haram, sectarian clashes in northern Mali and southern Libya), crises (food) but also hope for a better future across the “borders”.

Finally, an issue that is too often forgotten, confrontations between farmers and livestock breeders that are suffering from the vagaries of climate change.

In what ways has the EU dealt with these challenges?The EU adopted a Strategy for Security and Development in the Sahel in 2011 and a Regional Action Plan in 2015 in which security questions are extensively developed along with those of development, which are inextricably linked. The EU has three CSDP mission in the Sahel: EUTM Mali and EUCAP SAHEL in Niger and Mali. These missions provide advice and training under a very specific mandate to security and defence forces of the States in which they are deployed. Lastly, and in addition to the National Indicative Programmes, the EU signed a Regional Indicative Programme last July in Abuja whose first pillar is devoted to peace and security questions. It is important to note that ECOWAS and WAEMU do not include all the Sahel countries and also deal with coastal countries, which have maritime security problems as well. In this regard, the EU is working to define a specifically Sahelian cooperation framework with countries of the EU’s Sahel strategy that have been grouped together since 2014 in the G5 Sahel regional organisation.

Do you think the G5 Sahel is the appropriate level for meeting these challenges?The G5 is seen as the right format and the right scale to deal with the specifically Sahelian questions and to improve the coordination of development and security policies of the five countries. Not being an authorising officer of EDF regional programmes, the real added value of the G5 Sahel is coordi-nating and aligning regional cooperation activities of Sahelian countries and promoting them to African and European technical and financial partners. In this connection, the European Union has committed to providing its full support to the G5 Sahel Permanent Secretariat.

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19Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Sécurité aérienne : bilan et perspectives du programme ASACAPropos recueillis auprès du commissaire divisionnaire Charles Ivinec, attaché de sécurité intérieure et chef de la CRASAC.

Quels ont été les constats ayant engagé la mise en place d’ASACA ?La première raison du lancement du projet ASACA (Appui à la sûreté de l’aviation civile en Afrique) est l’accroissement incontestable du risque d’actions terroristes visant l’aviation civile sur le continent africain.Les évaluations réalisées par la France, tant sous l’autorité de la Direction générale de l’aviation civile que sous celle de la Cellule régionale d’assistance à la sûreté de l’aviation

civile (CRASAC), assistée par les conseillers sûreté immigration en poste dans 18 États africains ont permis de mettre en évidence d’importantes déficiences dans ce domaine.Cette analyse est confirmée par l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale) qui à l’issue de son dernier cycle d’audits a évalué le taux moyen de non-conformité des pays de l’Ouest africain à 65,84 %.

Pouvez-vous nous développer la finalité et les étapes de ce programme, ainsi que votre mission en son sein ?Trois constats majeurs identifiés :• une perception pour le moins insuffisante de la part des auto-

rités des pays partenaires de l’importance de la sûreté de l’aviation civile ;

• une difficulté de ces États à traduire dans leurs législations natio-nales et dans les textes spécifiques régissant la sûreté les dispo-sitions des conventions internationales dont ils sont partie ;

• le manque de formation des personnels œuvrant sur les plateformes.

Les actions majeures engagées ont été la rédaction de textes conformes aux règles internationales, la mise en place d’équipes locales d’ins-tructeurs et d’inspecteurs chargés de la mise en œuvre des règles et de la formation des agents. La CRASAC a également contribué à la formation de près de 3000 agents de sûreté.

Quels enseignements tirez-vous de ce dispositif ?Force est de constater que le bilan demeure décevant, puisqu’en 2015 seul un aéroport (Abidjan, Côte d’Ivoire) est conforme aux normes de l’OACI, sur les 22 situés dans la zone de compétence de la CRASAC.

La difficulté d’appropriation par les partenaires africains semble être au cœur du constat. Partageant la même analyse, les experts de l’OACI, de l’UE et des autres États actifs sur le continent africain considèrent que les modalités des programmes de soutien doivent être impéra-tivement révisées pour obtenir des résultats concrets et durables. La pratique du saupoudrage consistant à mener des actions ponctuelles et limitées sur de nombreux États doit désormais être proscrite. Il y a donc lieu de sélectionner avec rigueur les pays en prenant en compte leur réelle volonté de progresser et de mettre en œuvre des projets de soutien plus globaux étalés sur plusieurs années, formalisés par des protocoles contraignants à l’égard des partenaires.

Air security: Assessment and perspectives of the ASACA programmeRemarks from Divisional Commissioner Charles Ivinec, Internal security attaché and head of the Regional Civil Aviation Security Assistance Unit (CRASAC)

What were the observations that led to the esta-blishment of the ASACA?The first reason behind the launch of the Support to Civil Aviation Security in Africa (ASACA) project is the undeniable increase in the risk of terrorist actions targeting civil aviation in Africa. Evaluations conducted by France, both under the authority of the Directorate-General of Civil Aviation and the Regional Civil Aviation Security Assistance Unite (CRASAC), assisted by immigration security advisers posted in 18 African States highlighted significant shortcomings in this area. This analysis was confirmed by the International Civil Aviation Organisation (ICAO), which, at the end of its last audit cycle, evaluated the average rate of non-compliance of West African countries to be 65.84 %.

Can you explain to us the purpose and the stages of this programme, and your mission in it?Three major points were identified:• A flawed perception of the authorities of partner countries of

the importance of civil aviation security ;• The difficulty these States have in translating provisions of inter-

national agreements to which they are party into their national legislation and in the specific texts governing aviation security ;

• The lack of training for staff working on the platforms.

The major actions undertaken were the drafting of texts pursuant to international rules, the setting up of local teams of instructors and inspectors in charge of implementing rules and the training of agents. CRASAC also helped train nearly 3,000 security agents.

What lessons have you learned from this programme?It is important to note that the assessment remains disappointing since in 2015 only one airport (Abidjan, Côte d’Ivoire) complied with the ICAO standards out of the 22 located in the area of CRASAC’s remit.

African partners’ ownership was a core problem. Sharing the same analysis, experts from ICAO, the EU and other States active in Africa consider that the modalities of the support programmes must be revised to achieve concrete and sustainable results. The practice of conducting one-off and limited actions in a number of States (spreading resources too thin) must no longer be allowed. Therefore it is important to carefully choose countries taking into account their real desire to progress and implement more comprehensive support projects over several years, formalised by binding agreements with regard to partners.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27720

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Protection civile : naissance du projet CSUPC en RCIAvec la fin des événements qui ont marqués la République de Côte d’Ivoire durant près d’une décennie et le retour à la stabilité, le gouvernement ivoirien a décidé de relancer le plan de modernisation de la protection civile qui visait à assurer une couverture de l’ensemble du pays en moyens de secours.

Dans le cadre de la Réforme du secteur de la sécurité (RSS) et du processus de Démobilisation, désarmement, réinsertion (DDR), il a donc été décidé de créer un service de pompiers civils et d’ouvrir sur l’ensemble du territoire 30 centres de secours d’urgence de la protection civile (CSUPC) dans les 30 régions. Conformément à la loi de décentralisation de 2003, les CSUPC ont été placés sous la gestion conjointe de l’État et des collectivités territoriales. Ils ont vocation à compléter la couverture qu’assure le Groupement de sapeurs-pompiers militaires (GSPM) sur les villes d’Abidjan, Yamoussoukro, Bouaké, N’zianouan et Korhogo. Dans le but de coordonner l’action des CSUPC, 4 antennes régionales de protection civile devraient également voir le jour.

En novembre 2013, avec l’appui de l’Autorité pour le désar-mement, la démobilisation et la réintégration (ADDR), des tests physiques, médicaux et académiques ont été organisés et ont abouti à la sélection de 1 500 hommes et femmes issus des ex-combattants. Cet effectif, après une formation de reso-cialisation, a suivi une formation technique initiale générique lui permettant de remplir les missions de base dévolues aux sapeurs-pompiers.

La Direction de la coopération de sécurité et de défense, forte de l’expérience guinéenne des Unités de protection civile (UPC), a voulu dès le début s’impliquer très fortement dans ce projet structurant, qui participe au règlement de la problématique DDR tout en assurant le renforcement de l’État dans une de ses fonctions régaliennes essentielles : la protection des personnes, des biens et de l’environnement.

Civil protection: birth of the CSUPC project in Côte d’IvoireWith the end of the events the Republic of Côte d’Ivoire experienced for nearly a decade and a return to stability, the Ivorian Government decided to revitalize the civil protection modernisation plan that aimed to provide the entire country coverage of emergency services.

Within the framework of the Security Sector Reform (SSR) and the Disarmament, Demobilization and Reintegration (DDR) process, it was decided to create a civil fire service and to open 30 emergency services and civil protection centres (CSUPC) in 30 regions throughout the territory. Pursuant to the decentralisation law of 2003, the CSUPC were placed under the joint management of national and local governments. They provide additional coverage to the services provided by the Military Firefighters (GSPM) in Abidjan, Yamoussoukro, Bouaké, N’zianouan and Korhogo. With the aim of coordinat-ing action of the CSUPC, 4 Regional Civil Protection Branches are also set to open.

In November 2013, with the Support for the Disarmament, Demobilization and Reintegration Authority (ADDR), physical, medical and academic tests were organised and a group of 1,500 male and female veterans was selected. After complet-ing a re-socialisation training course, this group attended a generic technical basic training course to learn how to fulfil basic firefighter duties.

The DSCD, with its substantial Guinean experience concerning the Civil Protection Unit (CPU), has wanted since its inception to be very involved in this structuring project, which is helping to resolve the DDR problem and strengthen the State in one

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21Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

L’action de la DCSD principalement porte sur 3 domaines :• le conseil avec la mise en place de 2 coopérants, l’un auprès

du ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et l’autre auprès du Directeur général de l’Office national de la protection civile (ONPC) qui appuient les autorités ivoiriennes dans la définition des objectifs stratégiques à atteindre, la rédaction des textes réglementaires indispensables, la défi-nition des cursus de formation, des plans d‘équipement des CSUPC, la création d’un cadre intégré de gestion de crise et la structuration d’une chaine de commandement ;

• l’appui matériel avec la mise à disposition d’équipements pour assurer la formation des agents ;

• un très fort soutien à la constitution d’un noyau d’encadre-ment référent. Ainsi entre 2014 et 2015, ce sont plus de 150 agents qui auront été formés dans les domaines du secours aux victimes et de l’incendie pour occuper les fonctions de chef d’équipe et de chef d’agrès. Par ailleurs, des bourses de stages ont été accordées afin de permettre de suivre le stage de formation initiale d’officier, au sein de l’Institut supérieur d’études de protection civile (ISEPC) de Ouagadougou.

En parallèle de cette coopération centralisée, des actions ont été menées auprès des services départementaux d’incendie et de secours français afin de soutenir l’action de l’ONPC. Ainsi le Bataillon des marins-pompiers de Marseille par l’intermédiaire de l’association BMPMonde et principalement le SDIS 42 ont fait don de plusieurs centaines d’équipements de protection individuels, ainsi que l’Organisation internationale de protection civile (la DCSD a financé une partie des transits).

Concomitamment avec la mise en œuvre de ces actions très concrètes, un important travail de sensibilisation des poten-tiels bailleurs de fonds a été effectué. L’objectif vise à appuyer l’action du gouvernement ivoirien en mobilisant d’importantes ressources dans des délais relativement brefs permettant de traduire rapidement sur le terrain l’émergence d’un corps de secours efficace. L’Union européenne devrait prochainement valider un financement de 10 millions d’euros pour mettre sur pied 10 CSUPC, consacrant l’excellent travail de persuasion de nos deux coopérants et montrant s’il en était besoin la confiance que l’Union européenne accorde à l’expertise française dans le domaine des secours.

of its essential sovereign duties: the protection of people, property and the environment.

Action of the DSCD mainly concerns three areas:• Providing advice with the implementation of 2 cooperation

officers, one working for the Minister of State, Minister of the Interior and Security and the other working for the Director-General of the National Office for Civil Protection (ONCP), who support Ivorian authorities in defining strate-gic goals to meet, drafting crucial regulatory texts, defining training courses, CSUPC equipment plans, creating an inte-grated framework for crisis management and structuring a chain of command;

• Providing material support with the provision of equipment to ensure the training of agents;

• Providing very strong support for the building of a core standard structure. From 2014 to 2015, more than 150 agents have been trained in the areas of providing fire and emergency services to victims to fulfil the duties of team leader and the person in charge of the gear. In addi-tion, scholarships were granted to attend an officer basic training course in the Institute for Civil Protection Studies (ISEPC) in Ouagadougou.

Alongside this centralised cooperation, actions were conducted in the French Departmental Fire and Emergency Services in order to support the ONCP’s actions. Thus the Battalion of Navy Figherfighters of Marseille via the BMP Monde Association and mainly the 42nd Departmental Fire and Emergency Service donated several hundred pieces of individual protection equip-ment, as well as the International Civil Defence Organisation (the DSCD financed a portion of the transport).

Concomitantly with the implementation of these very concrete actions, considerable work to raise the awareness of potential donors has been done. The objective is to support Ivorian government action by raising significant resources relatively swiftly so that an effective emergency corps could be seen in the field as quickly as possible. The European Union is set to validate €10 million in funds shortly to set up 10 CSUPC thanks to the excellent advocacy on the part of our two cooperation officers and showing (if there was a need) the confidence that the European Union has in French expertise in the area of emergency services.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27722

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

Projet Appui à la lutte contre la criminalité organisée en région Caraïbes (ALCORCA)Combattre en amont des fluxLe crime organisé aux Caraïbes mêle trafic de stupéfiants, d’armes et d’êtres humains. L’impunité est omniprésente, et les institutions suscitent la méfiance de la part des citoyens, tandis que la situation locale se dégrade. La région est ainsi devenue la troisième au monde la plus meurtrière en termes d’homicides, et le manque de perspective régionale dans les politiques menées sur le continent a conduit non pas à un tarissement des flux mais à leur déportation dans la région caribéenne. Celle-ci, impréparée à lutter contre eux, manque de moyens et de coordination entre États. Le projet-FSP mobilisateur ALCORCA, lancé ce mois-ci, s’attaque à cet espace de rebond, en amont des flux illicites vers l’Afrique de l’Ouest, et propose un outil de concertation et d’échange régional.

Un outil FSP qui permet une coopération régionale déterminanteLes pays de la zone possèdent des moyens inégaux, des pratiques diverses, des procédures parfois incompatibles. ALCORCA, coor-donné par un ETI et piloté par la DCSD, se propose de les harmo-niser. Le but est de conduire la République Dominicaine, Haïti, la Jamaïque, le Mexique et Cuba à travailler de manière multilatérale via l’instauration d’une plateforme d’échanges sur les questions structurelles liées à ces questions et à répondre à leurs besoins en termes de renforcement de leurs capacités nationales et régionales en matière de police et de contrôles maritimes, aériens et doua-niers et en matière judiciaire à travers des ateliers et formations. L’outil FSP-mobilisateur permet une coordination régionale sans laquelle toute lutte contre la criminalité organisée est condamnée à n’avoir qu’un succès limité et permet, grâce à son caractère pluriannuel, de disposer du temps nécessaire à l’évaluation des besoins des partenaires, au lancement des formations régionales dès 2016 en coordination avec les autres bailleurs sur zone, et à conduire les pays partenaires à prendre in fine le contrôle de la plateforme. Doté d’un budget de 1 million d’euros, il s’étendra sur les trois années à venir.

Support Project for Fighting Organised Crime in the Caribbean (ALCORCA)

Combating the flows upstreamOrganised crime in the Caribbean involves the trafficking of drugs, arms and human beings, impunity is ubiquitous and institutions generate mistrust on the part of citizens, while the local situation is becoming worse. As a result, the region has become the third deadliest in the world in terms of homicides and the lack of regional consideration in policies conducted on the continent has not led to a drying up of flows but rather to their relocation in the Caribbean region. This region is not prepared to combat them and there is a lack of means and coordination between States. The proactive Priority Solidarity Fund project ALCORCA, launched this month, is dealing with this area, upstream of illicit flows to West Africa, and provides a tool for working together and exchanging on a regional level.

A Priority Solidarity Fund tool for decisive regional cooperation

Countries in the area have unequal means, a wide range of practices, and procedures that are not always compatible. ALCORCA, coordinated by an international technical expert and steered by the DSCD, has offered to harmonise them. The purpose is to help the Dominican Republic, Haiti, Jamaica, Mexico and Cuba work multilaterally via the introduction of a forum for exchange on structural questions related to these issues. It also aims to help them meet their needs in terms of building their national and regional capacities in the area of police and maritime, air and customs controls and in judicial matters through workshops and training courses. The proactive Priority Solidarity Fund tool allows for regional coordination without which any work to fight organised crime is destined to have only limited success. Thanks to its multi-year nature, it provides the necessary time to assess partners’ needs and launch regional training courses starting 2016 in coordination with other donors in the area. It also enables partner countries to eventually take control of the forum. With a budget of €1 million, it will be implemented over the next three years.

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23Partenaires Sécurité Défense N° 277

D O S S I E R : la coopération face aux menaces sécuritaires

EIFORCES : Témoignage du lieutenant-colonel Philippe Plassard,Conseiller auprès du directeur général de l’EIFORCES (l’École internationale des forces de sécurité) au Cameroun

En quoi l’EIFORCES est-elle un modèle de coopé-ration pertinent ?Partant d’un constat des Nations unies sur les lacunes capacitaires des forces de polices d’Afrique francophone déployées dans un cadre « opération de main-tien de la paix », la France et le Cameroun ont entamé des réflexions dès 2005 sur la réalisa-tion d’un centre dédié en charge de former les unités de police

constituées et des experts de la sécurité pour les opérations de la paix.Pris en compte par le Cameroun et soutenu par la France depuis son origine et officiellement crée par décret présidentiel en 2008, cette école poursuit un triple objectif à savoir contribuer au renforcement de la stabilité régionale, améliorer la gouvernance sécuritaire des pays participant au projet, promouvoir des standards communs au sein des forces de police et de gendarmerie déployées dans le cadre des opérations de paix.Au bilan et depuis sa création, l’EIFORCES a formé dans le domaine de l’ordre public 265 stagiaires en unité de police constituée (UPC), 180 formateurs en ordre public et 110 commandants d’unité (en provenance de 21 pays dont le Cameroun). Dans le domaine des formations supérieures, 100 stagiaires ont participé au brevet supérieur de sécurité et diplôme d’état-major, 178 aux stages thématiques et 19 en stages spécialisés (PHP, NEDEX). Une première formation dans le domaine judiciaire s’est déroulée en avril 2015 avec 20 stagiaires et 7 formateurs.

Selon vous, comment reconnaît-on un projet de coopération réussi ?Un projet de coopération réussi est un projet où chacun sait se positionner et où le coopérant joue son vrai rôle de conseiller permettant au pays hôte de s’approprier les expertises prodiguées.Pour cela, il convient au préalable de bien définir d’un commun accord l’objectif final recherché. Une convention vient alors formaliser les actions à conduire par chacune des parties impliquées fixant les objectifs à atteindre.

Comment envisagez-vous vos fonctions auprès du DG de l’EIFORCES ?Je conseille le directeur général sur tous les domaines liés à la montée en puissance de cette école internationale. Que cela soit dans le domaine préparatoire aux différents stages, l’enseignement supérieur et fondamental voire la recherche.Je dirai qu’il y a aussi un élément très important à prendre en compte au-delà de l’aspect scolaire, c’est le facteur humain. Il s’agit, comme l’on dit en Afrique, d’être ensemble et de partager les savoir-faire et savoir-être dans leur globalité.

EIFORCES: Testimonial of Lieutenant-Colonel Philippe PlassardAdviser to the Director-General of the International School for Security Forces (EIFORCES) in Cameroon

How is EIFORCES a relevant model for cooperation?Building on the United Nations observations about the capac-ity shortcomings of the police forces in Francophone Africa deployed in the peacekeeping operation framework, France and Cameroon began discussions in 2005 on the creation of a centre devoted to training formed police units and security experts for peacekeeping operations.Taken on by Cameroon and supported by France since its incep-tion and officially created by presidential decree in 2008, this school has pursued a triple objective: to help strengthen regional stability, to improve security governance of countries participat-ing in the project and to promote common standards in police and gendarmerie forces deployed in peacekeeping operations.At the time of the assessment and since its creation, EIFORCES has trained in the area of public order 265 trainees in formed police units (FPUs), 180 public order trainers and 110 unit commanding officers (from 21 countries including Cameroon). In the area of higher training, 100 trainees have earned a higher certificate in security and a staff college diploma, 178 in thematic courses and 19 in specialised courses (PHP, NEDEX). A judicial basic training course was conducted in April 2015 with 20 trainees and 7 trainers.

In your opinion, how can we recognise successful cooperation?A successful cooperation project is one in which every participant knows their role and in which the cooperation officer plays a genuine role of adviser enabling the host country to own the expertise provided.To do that, it is important to jointly agree beforehand on a clear definition of the final objective sought. Therefore an agreement formalises the actions to be conducted by each of the parties involved setting the objectives to be met.

How do you see your duties at the EIFORCES Directorate-General?I advise the Director-General on all the areas related to the growing role of this international school, whether that means in preparatory work in the different stages, higher and basic education and training and even research.I would say that there is also a very important element to take into account beyond the education aspect: the human factor. That means, as we say in Africa, being together and sharing expertise and knowing how to treat others in general.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27724

FOCUS

LEARNING FRENCH IN A MILITARY ENVIRONMENT: A GROWING PROGRAMMEAt a time when 55% of blue helmets are deployed in Francophone Africa, only 15% of contingents speak French. The problems caused by this situation are communication based. The fact that soldiers do not understand one another and the local population negatively affects peacekeeping operations (PKOs).

This problem is compounded by the fact that speaking French is losing ground, even in the countries with a Francophone heritage. In Senegal in certain schools, French has partially been overtaken by regional languages to facilitate the learning of students who do not have a full command of French.

Commander Anh Kiêt 1, Vietnamese trainee at the War College, class of 2015-2016

In 2014 I discovered courses for learning French as a foreign language via the French Embassy in Vietnam, in Hanoi. The objective of these courses was to acquire the level of French needed to be able to attend military training in France—the bar was high for a commanding officer who didn’t speak a word of French! After I was chosen, I attended a six-month intensive French course in a group of seven officers taught by a French woman studying to earn her Master’s degree. She used an “inter-hero” method to teach our course. The long hours devoted to grammar and conjugating verbs were offset by activities and cultural visits throughout the course, ranging from French cooking classes to karaoke nights. In six months, I went from level A1 to level B2. After the course I was chosen to attend a training course at the War College starting September 2015, preceded by a five-month language course on site.

1 Names have been changed.

L’enseignement du français en milieu militaire : un programme en expansion

Alors que 55 % des casques bleus sont déployés en Afrique francophone, seuls 15 % des contingents parlent français. Les difficultés engendrées par cette situation sont de nature communicationnelle. En effet, les incompréhensions entre soldats mais aussi avec la population locale nuisent au déroulement des opérations de maintien de la paix (OMP).

D’autant plus que la francophonie perd du terrain, même dans les pays avec un héritage francophone. Au Sénégal, dans certaines écoles, le français est ainsi partiellement supplanté par les langues régionales pour faciliter l’apprentissage d’élèves ne maîtrisant pas totalement le français.

Si le nombre total des francophones augmente, au total près de 274 millions de personnes selon les estimations de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en 2014, la surface géogra-phique de cet espace est de plus en plus restreinte.

Commandant Anh Kiêt 1, stagiaire vietnamien à l’École de Guerre, promotion 2015-2016

C’est en 2014 que j’ai découvert les cours de FLE grâce à l’ambassade de France au Vietnam, à Hanoï. L’objectif de ces cours était d’acquérir un certain niveau de français pour pouvoir suivre une formation militaire en France – la barre était haute pour un commandant sans aucune connaissance en français ! Après une sélection, j’ai suivi six mois de cours intensifs dans un groupe de sept officiers encadrés par une étudiante française en master. Nos cours étaient organisés autour de la méthode « Inter-héros ». Les longues heures consacrées à la grammaire et la conjugaison étaient tout de même compensées par des activités et sorties culturelles organisées tout au long de la formation, variant de cours de cuisine française à des soirées karaoké. En l’espace de six mois, j’ai progressé du niveau A1 au niveau B2.

Au terme de cet apprentissage, j’ai été sélectionné pour suivre une formation à l’École de guerre à la rentrée de septembre 2015, précédée d’un stage linguistique de cinq mois sur place.

1 Les noms ont été modifiés.

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25Partenaires Sécurité Défense N° 277

FOCUS

Although the total number of French speakers has increased to nearly 274 million people according to estimates of the International Organisation of La Francophonie (OIF) in 2014, the geographic surface area covered by French speakers is becoming smaller.

That is why the DSCD has made French one of its priorities. As a result, since 2005, the number of countries that issued requests to take part in this programme rose from 70 to 111 in 2014, which represents an increase of 59%.

In addition to PKOs, learning French meets multiple goals. First, it is a considerable asset for the career of members of the military who learn French, since they can have access to opportunities abroad that are better paid and more gratifying professionally.

Francophile and French-speaking top officials and officers learn the language, culture and the way that the Francophone area works. Thus the International Organisation of La Francophonie (OIF) supports the dissemination of the international mine action standards in the French language. They also become familiar with the values defended by the Francophone area, which is an alternative to a uniform vision.

“We reaffirm the specific nature of La Francophonie, based on the French language and the values that it promotes: cultural diversity, multilingualism, peace, democracy, the rule of law, human rights, gender equality, sustainable devel-opment, education and soli-darity”, Kinshasa Declaration issued by the Heads of State at the Francophonie Summit in 2012.

Lieutenant-Colonel Luis Fernando, Mexican trainee at the War College, class of 2015-2016

For me, learning French represented a unique opportunity to participate in a UN peacekeeping operation (PKO) in French-speaking territory in Africa. Mexico’s decision to participate in UN PKOs dates back to September 2014 and since 25% of operations are conducted on French-speaking territory in Africa, Mexico is aware of the importance of French to the smooth running of operations. Moreover, French is essential within the Mexican armed forces, as it is the second leading language spoken. Learning French would help me advance in my military career. These two things motivated me to begin my training at the Alliance française in Mexico, attending intensive beginner classes before going to the Regional Training Centre for Joint Forces in Rochefort (CIFR) then a course before entering the War College. When I return to Mexico, I will be able to join UN troops in Africa.

C’est pourquoi la Direction de la coopération de sécurité et de défense a fait de l’enseignement du français une de ses priorités. Ainsi, depuis 2005, le nombre de pays ayant émis des demandes pour prendre part à ce programme est passé de 70 à 111 en 2014, soit une augmentation de près de 59 %.

Outre les OMP, l’apprentissage du français répond à de multiples objectifs. D’abord, c’est un atout important pour la carrière des militaires qui en bénéficient, puisqu’ils peuvent avoir accès à des opportunités à l’étranger, mieux payées et plus gratifiantes professionnellement.

Les officiers et élites francophones et francophiles sont alors sensibilisés à la langue, la culture, au mode de fonctionnement de la zone francophone. Ainsi, l’OIF soutient la diffusion des normes internationales de déminage humanitaire en langue française. Ils sont également familiarisés avec les valeurs défendues par la zone francophone, alternative à une vision uniforme.

« Nous réaffirmons la spécificité de la Francophonie, fondée sur la langue française et les valeurs qu’elle promeut : la diversité culturelle, le multilinguisme, la paix, la démocratie, l’État de droit, les droits de l’Homme, l’égalité entre les hommes et les femmes, le développement durable, l’éducation et la solidarité » Déclaration de Kinshasa par les chefs d’État réunis au Sommet de la Francophonie en 2012.

Lieutenant-colonel Luis Fernando, stagiaire mexicain à l’École de Guerre, promotion 2015-2016

L’apprentissage du français représentait pour moi l’oppor-tunité unique de participer à une opération de maintien de la paix (OMP) de l’ONU en territoire francophone en Afrique. La décision du Mexique de participer aux OMP des Nations unies date de septembre 2014 et puisqu’un quart des opérations se déroule en territoire francophone africain.Le Mexique est conscient de l’importance du français pour le bon déroulement des opérations. De plus, le français est primordial au sein de l’armée mexicaine, étant la deuxième langue la plus employée. Son apprentissage me permettrait ainsi un avancement dans ma carrière militaire. Ce sont donc ces deux motivations qui m’ont amené à débuter ma formation à l’Alliance française de Mexico, suivant des cours de niveau débutant de façon intensive avant d’être reçu au Centre interarmées de formation de Rochefort (CIFR) puis un stage de pré-scolarité à l’École de guerre. Une fois de retour au Mexique, je serai en mesure de rejoindre les troupes de l’ONU en Afrique.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27726

FOCUS

Au-delà des liens avec la France, l’enseignement du français répond à une logique francophone. Ainsi, le français est une des langues des organisations multilatérales (l’Union africaine, les Nations unies ainsi que l’Union européenne). L’utilisation du français couvre également une zone très importante en Afrique.

La DCSD s’inscrit dans cette approche à long terme. L’enseignement du français permet de maintenir une relation stable durable avec l’armée locale à travers le coopérant militaire sur place, l’attaché de défense (AD), mais aussi les forces de police et de gendarmerie des pays partenaires par l’intermédiaire de l’attaché de sécurité intérieure (ASI). Même si pour le moment la coopération en matière de Sécurité intérieure pour l’enseignement du français est inférieure par rapport à celle menée avec la défense, la DCSD fait face à une demande grandissante.

Les individus formés au français sont alors plus susceptibles d’appréhender les intérêts et positions de la zone francophone en matière stratégique, politique et de diplomatie économique, ce qui fait d’eux des interlocuteurs privilégiés.

Cette coopération ne se limite pas seulement à l’Afrique, même si elle constitue un partenaire historique. De ce fait, près de la moitié de ces formations bénéficient aux autres continents. Ainsi le nombre de pays latino-américains en demande pour ce programme est passé de 16 en 2012 à 23 prévus en 2016, avec de nouveaux partenaires comme le Suriname depuis 2015.

La méthode « En avant ! », un outil pédagogique adapté

À l’initiative du ministère des Affaires étrangères et du Développement international et de l’Organisation internationale de la Francophonie, la méthode de français « En avant ! » a été conçue en 2010 pour les militaires non-francophones, d’abord destinée au continent africain et à l’Océan Indien avant de s’étendre à l’ensemble des professionnels de la paix à travers le monde.

Conçue par Caroline Mraz, une experte en français professionnel, en étroite collaboration avec des offi-ciers français en poste à l’étranger, « En avant ! » offre les moyens d’acquérir les compétences et qualités requises à l’apprentissage du français dans un contexte militaire. Les apprenants sont toujours actifs et confrontés à la réalisation de tâches profession-nelles et à des situations fictives, mais empruntés à des contextes réels. La vie au régiment, les devoirs du soldat, les opérations de maintien de la paix (OMP), l’accueil de réfugiés, la violence contre les femmes en situation de guerre et les enfants soldats sont des thèmes récur-rents aux exercices d’application permettant à l’apprenant de développer rapidement ses capacités de réflexion, de communication et de rédaction. Ces compétences sont indispensables à la réalité quotidienne du milieu militaire et aux situations

In addition to links with France, learning French conveys a Francophone approach. French is one of the official languages of multilateral organisations (African Union, United Nations and European Union). The use of French also covers a very significant area in Africa.

The DSCD adheres to this long-term approach. Learning French helps maintain a stable lasting relationship with the local armed forces via military cooperation officers on site, defence attachés, but also the police and gendarmerie forces of partner countries via internal security attachés. Although cooperation on internal security for teaching French is currently less than cooperation conducted with defence, the DSCD is working to meet growing demand.

Individuals who have learned French are more likely to under-stand the interests and positions of the Francophone area in terms of strategy, policy and economic diplomacy, which makes them preferred interlocutors.

This cooperation is not limited to Africa alone, although it is a longstanding partner. That is why nearly

half of these courses benefit other continents. The number of Latin American countries requesting this programme has increased form 16

in 2012 to 23 planned for 2016, with new partners such as Suriname

involved since 2015.

The “EN AVANT !” method, an effective teaching tool

At the initiative of the French Ministry of Foreign Affairs and International

Development and the International Organisation of La Francophonie, the

French “En Avant !” method was developed in 2010 for non-French-speaking members of

the military. It was first developed for Africa and the

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27Partenaires Sécurité Défense N° 277

FOCUS

auxquelles sont confrontés les apprenants, que ce soit dans la caserne ou sur le théâtre d’une opération. « En avant ! » permet une progression du niveau A1 au niveau B1 du Cadre européen commun de référence (CECR) au moyen d’une série d’activités attrayantes et ludiques instrui-sant les apprenants sur des savoir-être, savoir-faire et connaissances indispensables à la vie militaire professionnelle et quotidienne. Ainsi, 3 niveaux d’apprentissage ont été développés. Le niveau débutant (A1) aborde la vie à la caserne. Le niveau intermédiaire (A2) traite de la mise en place de missions spécifiques sur le terrain. Le niveau avancé (B2) est lui centré sur les OMP.

Depuis 2012, près de 10 000 exemplaires ont été distribués sur le continent africain, mais également en Asie et en Europe de l’Est.

Que ce soit dans le cadre d’une action de coopération multi-latérale ou en école de formation en territoire francophone, la maîtrise du français est essentielle à la compréhension des objectifs et enjeux de sécurité et de défense. La méthode « En Avant ! » répond à ces attentes, garantissant ainsi les outils de communication nécessaires aux actions militaires à travers le monde dans un cadre spécifiquement militaire.

Indian Ocean before being used for all professionals working for peace worldwide.

Developed by Caroline Mraz, an expert in teaching business French, in close collaboration with French officers posted abroad, “En Avant !” offers the means to acquire the skills and qualities needed to learn French in a military context. Learners are always active and have to perform work-related tasks and deal with simulated situations based on real contexts: life in a regiment, a soldier’s duties, peacekeeping operations (PKOs), dealing with refugees, violence against women in armed conflict and child soldiers are recurrent themes in practice exercises enabling learners to quickly develop their abilities to think critically, communicate and write. These skills are crucial in the day-to-day lives of members of the military and situations they are faced with, whether it be in the barracks or a theatre of operations. “En Avant !” helps learners progress from level A1 to level B1 of the Common European Framework of Reference for

Languages (CEFR) through a series of attractive and fun activities instructing learners on how to treat other people and teaching expertise and knowledge that are essential to professional mili-tary daily life. Three levels of learning have been

developed. The beginner level (A1) addresses life in the barracks; the intermediate level (A2) deals with setting up specific missions in the field; and the advanced level (B2) is focused on PKOs.

Since 2012, nearly 10,000 copies have been distributed in Africa, but also in Asia and in Eastern Europe.

Whether it is part of multilateral cooperation action or in training school on Francophone territory, mastering French is essential to understanding defence and security issues and objectives. The “En Avant !” method meets these expecta-tions, thereby providing the necessary communication skills for military actions throughout the world in a specifically military framework.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27728

FOCUS

L’essor de l’enseignement du français en ÉthiopieAberra Tariku, adjoint au coopérant en charge de l’enseignement du français près l’ambassade de France en Éthiopie, reconnaît que ce pays est un exemple particulièrement parlant pour illustrer la coopération en matière d’enseignement du français à l’étranger. Depuis plus d’un siècle, la coopération franco-éthiopienne s’est déjà beaucoup développée. Sur le plan de l’éducation, dès 1907, une Alliance française ouvre ses portes à Addis-Abeba. En 1947, c’est au tour du lycée franco-éthiopien, puis d’une école de maîtres et une faculté d’aménagement urbain d’être inaugurés.Dans les années 1970-1980, la dictature du Derg se rapproche de l’URSS et suspend toute coopération, ce qui entraîne une grande rupture dans la formation en français de l’armée éthiopienne et renforce la difficulté pour les francophones de communiquer avec la génération n’ayant pas appris cette langue.« C’est en 1999 que débute de nouveau réellement la coopération pour l’enseignement du français en milieu militaire. L’Éthiopie est le seul pays d’Afrique à disposer d’un coopérant spécialement dédié au français. » – Aberra TarikuLa Direction de la coopération de sécurité et de défense traite avec différents organismes partenaires pour l’enseignement du français. En découlent des modes d’apprentissages différents en fonction des besoins et des objectifs de l’Éthiopie. Elle s’appuie d’abord sur des organismes existants comme l’Alliance française ou les Instituts français sous forme de vacations pour donner des cours de français aux militaires éthiopiens.Ainsi, avec le soutien de l’Agence Campus France 1, des étudiants en Master de Français langue étrangère (FLE) sont envoyés chaque année dans des pays coopérants pour enseigner le français aux officiers. En 2015, 54 postes sont proposés dont deux en Éthiopie à l’École militaire et l’École d’ingénierie dans le cadre de ce « programme bourse FLE ».

1 Agence française pour la promotion de l’enseignement supérieur, l’ac-cueil et la mobilité internationale, spécialisée dans la gestion des pro-grammes de mobilité étudiante.

The rising popularity of learning french in EthiopiaAberra Tariku, deputy cooperation officer in charge of French language education at the French Embassy in Ethiopia, recognises that this country is a particularly striking example of cooperation on teaching French abroad. For more than a century, French-Ethiopian c o o p e ra t i o n has developed considerably. When it comes to education, in 1907, the Alliance fran-çaise opened its doors in Addis-Ababa. Then in 1947, a French-Ethiopian lycée and a school for teachers and a school of urban planning were inaugurated.

In the 1970s and 1980s, Ethiopia’s Derg dictatorship moved closer to the USSR and suspended all cooperation, which caused a major break in training in French of the Ethiopian armed forces and made it harder for French speakers to communicate with the generation who had not learned French.

“It was in 1999 that cooperation actually began again concern-ing teaching French in a military environment. Ethiopia is the only African country to have a cooperation officer who is specifically responsible for the French language.” Aberra Tariku

The DSCD works with different partner organisations when it comes to teaching French; from them the different ways of teaching are determined based on needs and objectives of Ethiopia. It mainly turns to existing bodies such as the Alliance française or Instituts français to recruit temporary teachers to give French courses to Ethiopian members of the military.

Thus, with support from the Campus France 1 agency, students studying for their Master’s degree in teaching French as a foreign language (FLE) are sent every year to cooperating countries to teach French to officers. In 2015, some 54 posts were offered, two of them in Ethiopia in the Military College and the Engineering College under this FLE scholarship programme.

More targeted, shorter missions, often lasting two weeks to three months, are sometimes necessary. These volunteers, most often former members of the military, go to Ethiopia with funds provided by the General Association of Retired Volunteers (AGIR) to provide their expertise and to prepare students to attend the top French and national military schools as well as regionally oriented national schools (ENVRs).

1 French Agency for the Promotion of Higher Education, Internation-al Student Services and International Mobility, specialised in managing student exchange programmes.

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29Partenaires Sécurité Défense N° 277

FOCUS

Des missions plus ciblées et plus courtes, souvent entre deux semaines et trois mois, sont parfois nécessaires. Ces volontaires, le plus souvent anciens militaires, partent grâce à l’Association générale des intervenants retraités (AGIR) pour apporter leur expertise et préparer les apprenants à intégrer des grandes écoles militaires françaises ou nationales ou encore des Écoles nationales à vocation régionale (ENVR).

Dans une logique de transmission, des formateurs éthio-piens sont également préparés au Cours international de français de Rochefort (CIFR) à enseigner le français dans leur pays d’origine.

Cette offre de formation est mise en place sous forme de stage. Elle peut bénéficier aux professeurs vacataires locaux (stage pédagogique de formateur long ou court) ou aux officiers identifiés pour suivre une scolarité dans une école militaire française, EFO, CFCU ou DEM (stage linguistique de terminologie militaire).

La synergie entre ces différents organismes permet de répondre aux différents besoins en formation en français de l’Éthiopie et créer un lien fort entre les apprenants, futurs dirigeants, et la zone francophone. Cela représente une réelle opportunité professionnelle pour les élèves qui peuvent ainsi avoir accès à des formations au sein d’écoles militaires françaises comme l’école spéciale militaire de Saint-Cyr ou l’École de guerre, dans les ENVR en Afrique ou encore pour rejoindre les troupes de casques bleus en vue de la participation aux opérations de maintien de la paix. En effet, l’Éthiopie est le premier pays d’Afrique et le troisième au monde à fournir des casques bleus.

La particularité de la coopération avec l’Éthiopie réside également dans le fait qu’elle touche de nombreux milieux d’enseignement différents. Non seulement l’armée, mais aussi la Police fédérale et l’école des officiers de Police avec lesquelles la collaboration

Jean-Loup Rose, a student in the FLE master’s programme, went to Ethiopia for nine months this year to teach at the Police University College in Sendafa and the Defence Engineering College in Debre Zeit.

“Teaching French as a foreign language in Ethiopia was a very good experience; but you must be very motivated to do it. The structures are not yet fully adapted. For example other scholarship recipients and I had to travel hours from one teaching site to another. It is important to get past the material problems because the students were very nice, respectful and dedicated.

I think the challenge is communication with the Ethiopian armed forces, which were in an uncomfortable situation after the military dictatorship. Ethiopia is the most stable country in this part of Africa with a rapidly growing economy and population and teaching French in this region of Africa will help us establish a special relationship with top members of the military.”

With a transfer of responsibilities in mind, Ethiopian trainers are also instructed in the International French Course in Rochefort (CIFR) to teach French in their home countries.

This training is given as a course. Local temporary teachers can attend (long or short trainer courses) or officers who have been identified to attend a course: French military school, officer training school (EFO), unit commander training courses (CFCU) or staff college diploma (DEM) (language course in military terminology).

Synergy among these different bodies can help meet the differ-ent French training needs of Ethiopia and create strong ties between learners, future leaders and the Francophone area. This is a real professional opportunity for students who can also have access to training courses in French military schools such as the Saint-Cyr Special Military School and War College, in the ENVR in Africa or to join the blue helmets with a view to their participation in peacekeeping operations. Ethiopia is the leading country in Africa and the third leading in the world providing blue helmets.

The distinctive feature of the cooperation with Ethiopia is also the fact that it concerns many different education environments, not only the armed forces, but also the federal police and the

Jean-Loup Rose, étudiant en master de FLE, est parti enseigner en Éthiopie pour neuf mois cette année, à l’Université de police à Sendafa et à l’École d’ingé-nieur de Debre Zeit.

« Enseigner le FLE en Éthiopie a été une très bonne expérience ; mais il faut faire preuve d’une grande motivation. En effet, les structures ne sont pas encore forcément adaptées. Les autres boursiers et moi avons dû faire des heures de transport pour relier les différents sites d’ensei-

gnement. Il faut passer outre les difficultés matérielles car les élèves présents sont très agréables, respectueux et impliqués.

Pour moi, l’enjeu est bien la communication avec l’armée éthiopienne, mise à mal après la dictature militaire. L’Éthiopie est le pays le plus stable et en développement économique et démographique rapide dans cette zone de l’Afrique et l’enseignement du français permet d’avoir un contact privilégié avec les élites militaires. »

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Partenaires Sécurité Défense N° 27730

FOCUS

date seulement de deux ans et permet aux agents de sécurité intérieure de s’enrichir d’une deuxième langue vivante.

Quant aux ingénieurs en armement de Debre Zeit, l’apprentissage du français peut leur permettre d’accéder à des formations en France. Les élèves, durant leur cycle de quatre ans et demi peuvent béné-ficier de cours de français sur la base du volontariat depuis 2002.

Mais cette coopération n’a pas fini de progresser. Un des regrets d’Aberra Tariku et de Jean-Loup Rose est que l’apprentissage du français ne fasse pas partie du curriculum des élèves militaires mais soit seulement une option sur la base du volontariat. C’est un facteur influant sur la motivation et le nombre de militaires et agents de sécurité intérieure apprenant le français en Éthiopie. La coopération doit continuer à s’approfondir pour maintenir les liens entre l’Éthiopie et la zone francophone.

Captain Michael Kebede began learning French in Ethiopia 17 years ago, at a time when French-Ethiopian military cooperation was taking shape. Today he is an instructor at the military academy. Knowing French marked an important turning point in his career and he is now fully dedicated to it.

“After having taken French courses since 1998, I took advantage of the opening of a language centre in Addis Ababa in 2002, where courses were offered after a very strict internal selection in the armed forces, to receive intensive training in French. The objective for Ethiopia was to send officers on peacekeeping missions in Africa, to be trained in France or in ENVRs. Several of my comrades of this first class were sent to Benin or Senegal for this purpose.

I then supplemented my training in French by earning a Master’s degree in teaching French as a foreign language in Addis Ababa. Afterwards I attended several training courses for CIFR trainers and could perfect my training in the Saint-Cyr Special Military School. I am one of the fifteen Ethiopians who were able to attend this school since 1928 and the only one still living today. I then completed a training course at the School of the Application of Transmissions (ESAT), near Rennes.

In my professional career, I have often served as an inter-preter and instructor, for example, for Ethiopian airborne troops in Djibouti, among French troops and also at official events involving the French Embassy and Ethiopia.

Learning French was a genuine springboard and forged a strong connection for me with France and Francophone Africa. I am working on the design of a manual in Amharic, French and English and am planning to start a doctorate in military history in French!”

police officers academy with whom we have been working for just two years and enables international security agents to acquire a second language.

Learning French has enabled weapon engineers in Debre Zeit to access training programmes in France. During their four-and-a-half-year cycle students have been able to attend French courses on a voluntary basis since 2002.

But this cooperation is not about to stop. One of Aberra Tariku and Jean-Loup Rose’s regrets is that learning French is not part of the military students’ curriculum but only an option that is chosen on a voluntary basis. That is a factor influencing the motivation and the number of members of the military and internal security agents learning French in Ethiopia. Cooperation must continue to deepen in order to maintain the ties between Ethiopia and the Francophone area.

Le Capitaine Michael Kebede a commencé à apprendre le français en Éthiopie il y a dix-sept ans, au moment où la coopération militaire franco-éthio-pienne prend forme. Aujourd’hui instructeur à l’aca-démie militaire, la connaissance du français a été un tournant important dans sa carrière et il s’y consacre pleinement.

« Après avoir suivi des cours de français depuis 1998, j’ai profité de l’ouverture d’un centre de langues à Addis-Abeba en 2002, dont les cours étaient proposés après une sélection interne à l’armée très stricte, pour y suivre une formation intensive en fran-çais. L’objectif pour l’Éthiopie était d’envoyer des officiers en mission de maintien de la paix en Afrique, en formation en France ou dans les ENVR. Plusieurs de mes camarades de cette première promotion sont d’ailleurs partis

au Bénin ou encore au Sénégal dans ce but.

J’ai ensuite complété ma formation en français par un master de FLE à Addis-Abeba. Par la suite, j’ai suivi plusieurs stages pour formateurs au CIFR et ai pu parfaire ma formation à l’ESM de Saint-Cyr. Je suis un des quinze Éthiopiens ayant pu y accéder depuis 1928 et le seul encore vivant aujourd’hui. Puis, j’ai suivi une formation à l’École supérieure et d’appli-cation des transmissions (ESAT), près de Rennes.

Dans ma carrière professionnelle, j’ai souvent servi d’inter-prète et d’instructeur comme ce fut le cas pour les troupes aéroportées éthiopiennes à Djibouti, au milieu de troupes françaises ; ou encore lors d’événements officiels entre l’ambassade de France et l’Éthiopie.

En définitive, l’apprentissage du français a été un véritable tremplin et m’a donné un lien fort avec la France et l’Afrique francophone. Je travaille même à la conception d’un manuel en langues amharique, française et anglaise et projette de débuter un doctorat en histoire militaire en français ! »

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31Partenaires Sécurité Défense N° 277

FOCUS

L’apprentissage de la langue française, relai de la diplomatie de défense en Argentine

Propos recueillis auprès du lieutenant-colonel Arnaud de Pampelonne, attaché de défense en Argentine

Dans le cadre des orientations minis-térielles, la diplomatie de défense en Argentine consacre un volet de son action au rayonnement de la langue française en milieu militaire.Les actions concrètes d’enseignement de la langue française auprès des personnels de la Défense présentent un double intérêt : faire rayonner la langue, la pensée et la culture fran-çaise et permettre un meilleur soutien des pays partenaires aux différentes opérations de maintien de la paix sur

les théâtres francophones, notamment en Afrique.Ces actions d’influence d’apprentissage de la langue française développées par l’attaché de Défense et le coopérant régional trouvent un précieux relais dans le réseau des Alliances fran-çaises déployées dans l’ensemble des pays de l’Amérique latine, notamment en Argentine. Nombreux sont les stagiaires argentins qui souhaitent maîtriser notre langue dans le but d’être dési-gnés pour partir sur les théâtres d’opération francophones au premier desquels figure la MINUSTAH 1. L’entretien d’un vivier actif permet ainsi d’envoyer des officiers argentins de qualité en France pour participer aux échanges validés lors des réunions d’état-major dans les domaines suivants : formation, expertise, entraînements et équipements.L’enseignement du français se concrétise à travers quatre actions distinctes :• la réalisation de cours de français au sein du centre argentin

de maintien de la paix, deux à trois fois par semaine avec un professeur local ;

• le financement de trente bourses à l’Alliance française de Buenos Aires permettant d’offrir aux militaires des trois armées et aux civils de la Défense des cours de qualité tout au long de l’année ;

• l’inscription de quinze stagiaires aux examens DELF organisés par l’Alliance française de Buenos Aires, au profit de militaires des trois armées ;

• la mission d’enseignement d’un mois d’un intervenant de l’association AGIR qui assure durant sa présence au centre argentin de maintien de la paix un stage de français technique, stage mutualisé avec le centre de maintien de la paix de la gendarmerie argentine.

Il reste à souligner la plus-value de la présence permanente d’un coopérant à vocation régionale, officier supérieur français, inséré dans les forces armées argentines, notamment au centre argentin de maintien de la paix (CAECOPAZ), qui permet sans nul doute, d’apporter en Argentine et dans les nombreux autres pays visités (Bolivie, Chili, Colombie, Équateur, Guatemala, Mexique, Paraguay, Pérou, Salvador, Uruguay) une dynamique d’influence dans le cadre de l’apprentissage de la langue française dans les secteurs de la défense et une expérience opérationnelle des gestions de crise dans le cadre des opérations de maintien de la paix.

1 Mission des Nation unies pour la Stabilisation en Haïti.

Learning French, a facilitator of defence diplomacy in ArgentinaRemarks from Lieutenant-Colonel Arnaud de Pampelonne, Defence attaché in ArgentinaConsistent with ministerial guidelines, defence diplomacy in Argentina devotes a component of its outreach action to the French language in a military environment.Concrete actions to teach French to defence staff have a dual purpose: spreading knowledge of the French language and culture and enabling better support of partner coun-tries to different peacekeeping operations in Francophone theatres, especially in Africa.These actions to exert influence through teaching French developed by the defence attaché and the regional coopera-tion officer have found valuable facilitators in the Alliances françaises deployed in all Latin American countries, particu-larly Argentina. Many Argentine trainees wish to learn our language in order to be appointed to work in Francophone theatres of operation, the most popular being MINUSTAH 1. Maintaining an active pool makes is possible to send high quality Argentine officers to France to take part in exchanges that are validated during military staff meetings in the following areas: courses, expertise, training and equipment.Teaching French entails four different actions:• French courses in the Argentine peacekeeping centre,

twice or three times a week with a local teacher;• Funding for thirty scholarships at the Alliance française

of Buenos Aires providing members of the military of the three armed forces and defence civilians high quality courses throughout the year;

• Registering fifteen trainees to take the exams for a diploma in French language studies (DELF) given by the Alliance française of Buenos Aires, for members of the military of the three armed forces;

• A one-month teaching assignment for a member of the AGIR Association who while at the Argentine gendarme-rie peacekeeping centre teaches a technical French train-ing programme, a joint programme with the Argentine gendarmerie peacekeeping centre.

It is important to stress the added value of the permanent presence of a regional cooperation officer, a senior French officer, working in Argentine forces, notably at the Joint Training Centre for Peacekeeping Operations of Argentina (CAECOPAZ), which has clearly provided Argentina and many of the other countries visited (Bolivia, Chile, Colombia, Equator, Guatemala, Mexico, Paraguay, Peru, El Salvador, Uruguay) momentum for exerting influence when it comes to teaching French in defence sectors and operational expe-rience in crisis management in peacekeeping operations.

1 United Nations Stabilization Mission in Haiti.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27732

FOCUS

La genèse d’une coopération : l’exemple du projet « cyber »Témoignage du lieutenant-colonel Jean-Philippe Maas, attaché de sécurité intérieure adjoint en Algérie

La naissance d’un projet de coopération technique structu-rant en Algérie : le soutien au renforcement des moyens de lutte contre la cybercriminalité mis en œuvre par la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN)La cybercriminalité n’est pas pour l’instant en Algérie un phénomène de délinquance

très développé. Car pour l’instant une certaine forme de prudence, pour ne pas dire de crainte sociétale, à l’utilisation de ce moyen de communication et d’échange, régule les possibilités des criminels. De plus un système bancaire encore en développe-ment, rend difficile les paiements avec des moyens modernes. Néanmoins çà et là apparaissent les premières infractions (intrusions, menaces) qui ont obligé les services de sécurité à se développer face à ce phénomène émergent.

Comment est né le projet « cyber » au profit de la DGSN ?Nous avons suivi d’abord avec intérêt la rapidité de l’essor des moyens mis en œuvre par la DGSN, largement suivis par ailleurs par la Gendarmerie nationale algérienne (GNA), mais de manière non concurrentielle ; la GNA ayant surtout comme objectif d’augmenter ses moyens de lutte anti-terroriste.En effet dès 2012 des structures significatives ont été mises en place au sein de la police judiciaire de la DGSN.Ainsi le Service central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication « SCLCTIC » a été créé en tant que structure de police judi-ciaire à vocation opérationnelle, dépendant directement de la Direction de la police judiciaire algérienne (aux compétences calquées sur l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information française et à compétence nationale), avec des sections spécialisées (cyber-terrorisme, hacking et atteintes aux systèmes, escroqueries et fraudes, contrefaçons, pédopornographie, atteintes aux personnes, à la vie privée, usurpation d’identité et violation à la loi de protec-tion des données personnelles), mais avec peu de moyens.Parallèlement, la DGSN se dotait au sein de sa sous-direction de police scientifique d’un département spécialisé d’exploita-tion de preuves informatiques, pour répondre aux réquisitions concernant l’analyse de matériels numériques (ordinateurs, disques durs, mémoires).

Comment ont été définis les besoins ?Deux affaires de cybercriminalité impactant directement les intérêts de la France en Algérie (ciblant un groupe privé et un établissement scolaire français en Algérie) nous ont alerté sur les limites capacitaires d’investigation et de résolution de ces affaires techniquement complexes (notamment dès lors que les fournisseurs d’accès étaient hors de l’Algérie).

The origin of cooperation: the example of the cyber projectTestimonial of Lieutenant-Colonel Jean-Philippe Maas, Deputy internal security attaché in Algeria

The creation of a structuring technical cooperation project in Algeria: support for beefing up the means to fight cybercrime implemented by the Directorate-General for National Security (DGSN). Cybercrime is not currently a very developed crime in Algeria. The fact that for the time being people are a bit reluctant if not afraid to use this means of communication and exchange regulates criminal possibilities. Moreover a still developing banking system makes payment with modern means difficult. However the first offences are being seen (interfer-ences, threats) and have made it necessary to develop security services in the face of this emerging problem.

How was it decided to conduct the cyber project to help the DGSN?We have been following with interest the rapid increase in means being implemented by the DGSN, which are also implemented by the Algerian National Gendarmerie (GNA), but in a non-competitive way. The GNA especially focuses on increasing its counter-terrorism means.

Since 2012, significant structures have been established in the judi-cial police by the DGSN. The Central Service for Fighting Crime linked to the Information and Communications Technology (SCLCTIC) was created as the operational judicial police structure depending directly on the Algerian Judicial Police Directorate (with a remit based on the corresponding French Centrak Office (OCLCTIC) and national remit), with specialised sections (cyber-terrorism, hacking and attacks on systems, scams and frauds, counterfeiting, child pornography, damage to people or to private life, identity theft and violating the law on personal data protection), but with few means.

At the same time, the DGSN has acquired a specialised depart-ment in computer evidence in the forensic sub-directorate to respond to requisitions concerning the analysis of digital material (computers, hard discs, memories).

How were needs defined?Two cybercrime cases directly impacting France’s interests in Algeria (targeting a private group and a French school in Algeria) alerted us to the investigation and resolution capacity limitations of these technically complex cases (including when access providers were outside Algeria).

Moreover, in a meeting between the head of the DSCD of the Ministry of Foreign Affairs and International Development and the DGSN in 2014, specific needs in terms of demand for training support were expressed on the basis of this simple observation:

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33Partenaires Sécurité Défense N° 277

FOCUS

Par ailleurs à la faveur d’une rencontre entre le directeur de la coopération de sécurité et de défense du MAEDI et le DGSN en 2014, des besoins précis de demande d’appui en formation ont été exprimés sur la base d’un constat simple : l’unité de lutte contre la cybercriminalité de la DGSN n’est pas aussi performante que souhaité. Un soutien de la France avait été aussi demandé pour lui permettre de se rapprocher de standards européens notamment en rejoignant le cercle fermé du « G7 H24/7 » (créé dans le cadre du Conseil de l’Europe, convention de Budapest, article 37) constitué de points focaux nationaux capables de répondre en urgence aux sollicitations dans le cadre de l’assistance policière.

À partir de ce constat a été décidée en commun la mise en œuvre d’une mission d’audit des moyens de la DGSN, conduite par deux experts de l’OCLCTIC

en décembre 2014 (office devenu depuis sous-direction au sein de la police judiciaire française) dont la chef d’office. Avec la DPJ a été établie une feuille de route.

Quel est le contenu décidé ?

Cette feuille de route définit, pour les deux années à venir, les missions d’accompagnement nécessaires en Algérie mais aussi de stages en immersion professionnelle ou de formation technique, comme celui que suit en ce moment un cadre supérieur de la DGSN (Investigation en cybercri-minalité) à Vincennes.

Quelles sont les perspectives de cette coopération ?

Cette coopération est effective. En effet, 6 actions auront été mises en œuvre dans ce domaine à la fin de l’année 2015. Surtout, grâce au soutien de la France, la DGSN aura obtenu toutes les validations internationales nécessaires pour rejoindre le réseau du G7 (H24/7), qui lui permettra ultérieurement d’intégrer le système Europol/Interpol dans ce domaine. Une visite également soutenue par la France permettra en octobre 2015 aux Algériens de prendre la mesure du développement du centre européen de Cybercriminalité à EUROPOL (EC3) et d’y étudier les possibles extensions opérationnelles vers l’Algérie.

Des premiers signes opérationnels très encourageants se sont fait déjà ressentir. C’est ainsi que lors des attentats de Charlie Hebdo en France en janvier dernier, des demandes immédiates directes entre services opérationnels ont permis des levées de doute quant à l’utilisation d’une page « face-book », de déstabilisation.

the DGSN cybercrime unit is not as effective as hoped. France’s support was also requested to enable Algeria move closer to European standards, particularly by joining the closed G7 24/7 network (created in the framework of the Council of Europe, Budapest Convention on Cybercrime, Article 37) made up of national focal points that are able to respond urgently to police assistance requests.

Based on this observation, it was jointly decided to have a mission to audit DGSN means conducted by two OCLCTIC experts in December 2014 (this office has since become a sub-directorate in the French judicial police) including the head of the office. A road map was established with the Judicial Police Directorate.

What did it contain?

This road map sets out for the next two years the support missions needed in Algeria but also the stages of professional immersion and technical training, like the one a DGSN senior official is participating in right now (Cybercrime Investigation) in Vincennes.

What is the outlook of this cooperation?

This cooperation is effective. In fact, six actions will have been implemented in this area by the end of 2015. Most notably, thanks to France’s support, the DGSN will have obtained all of the international validations needed to join the G7 24/7 network which will subsequently help it join the E u r o p o l / Interpol system in this area. A visit also supported by France in October 2015 will enable Algerians to take stock of the development of the European Cybercrime Centre in EUROPOL (EC3) and to study possible opera-tional expansions towards Algeria.

The first very encouraging operational signs are already been seen. That is why at the time of the Charlie Hebdo terror attacks in France last January, immediate direct requests between operational services made it possible to remove any doubt with regard to the use of a destabilising facebook page.

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Partenaires Sécurité Défense N° 27734

RÉFLEXIONS

La coopération de sécurité et de défense du XXIe siècleLe xxie siècle s’ouvre sur des bouleversements inédits dans l’histoire de l’humanité. Les outils d’analyse prospective font largement défaut pour anticiper des évolutions qui, à bien des égards, restent indéchiffrables. Les utopies contraires du choc des civilisations et de la fin de l’Histoire ne doivent pas leur succès à leur valeur prédictive (aucune d’elles ne se réalisera), mais au fait qu’elles sont vraies ensemble : le xxie siècle tracera certainement son chemin entre des mouvements contraires d’intégration et de fragmentation des sociétés humaines. Cela ne suffit pas à prédire l’avenir : on tentera d’esquisser ici, prudemment, des tendances nouvelles qui s’annoncent comme déterminantes pour l’avenir de la coopération de sécurité et de défense. Le numéro précédent de PSD explorait deux premières pistes (« Une coopération plus globale pour des risques systé-miques » et « Les normes attachées à la sécurité : vers des géocultures ») ; en voici deux autres.

Le retour de l’État-Nation, régulateur de la mondialisation ?On a beaucoup parlé, au siècle dernier, d’un double dépas-sement de l’État-Nation : « par le haut » (intégration multi-latérale) et « par le bas » (retour des identités régionales et communautaires, interconnexion des sociétés civiles..). Le xxie siècle voit s’accomplir un mouvement inverse : sur fond d’inquiétude identitaire s’exprime une demande de retour de l’État-Nation, de durcissement des frontières, de réassigna-tion de « limites » rassurantes et symboliques. Qui d’autre que l’État peut réguler les délocalisations, le dumping social, les évasions fiscales, les excès de la finance ? Et combattre physiquement les « marchés » criminels (de la drogue, du pétrole, du trafic d’organes…) ? Les êtres humains n’ont de droit que par leur attachement à un État : les peuples sans territoires sont vulnérables (Tziganes, Kurdes…), la finance « off shore » est rarement philanthrope. La Nation restera, pour longtemps, le cadre essentiel de la solidarité, le « seul bien des pauvres » (Jaurès), le refuge des exclus de la mondialisation. Symptomatiquement, le nombre d’États ne cesse d’augmenter : le besoin d’enracinement et d’identité ne semble pas devoir fléchir au xxie siècle.

La mondialisation aboutit donc paradoxalement à un besoin de réaffirmation du cadre national : l’État-Nation doit assurer non seulement la protection de sa population et de son territoire – c’est la condition même de son existence et de sa souveraineté – mais aussi le maintien de son pacte national. Les outils de sécurité deviennent des expressions de solidarité et des garanties d’égalité.

La coopération de sécurité de défense du XXIe siècle (suite)

Defence and security cooperation in the 21st century (continued)Defence and security cooperation in the 21st century

The start of the 21st century has seen unprecedented upheavals in the history of humanity. For the most part, forecasting tools are not able to anticipate evolutions which in many respects remain impossible to decipher. The opposing utopias of the clash of civilisations and the end of history do not owe their success to their ability to predict (neither of them will happen) but to the fact that they are true together: the 21st century will most likely forge its path somewhere between movements of integration and fragmentation of human societies. There is not enough information to predict the future, but we will cautiously attempt to outline the new trends that could be decisive for the future of defence and security cooperation. The previous issue of the Partneaires sécurité défense review explored the two main paths (“More global cooperation to address systemic risks” and “Security standards: a move towards geocultures”); and here are two others.

Return of the Nation-State, a possible regulator of globalisation?

In the 20th century, there was often talk of moving past the Nation-State in two ways: “top to bottom” (multilateral integra-tion) and “bottom to top” (return of regional and community identities, interconnection of civil societies). In the 21st century, people would like to see the opposite happen: against a back-drop of concern about identities, we have seen requests for a return to the Nation-State, stronger borders and the reassign-ment of reassuring and symbolic limits. Who other than the State can regulate relocations, social dumping, tax evasions and financial excesses? To physically combat criminal markets (drug, oil, organ trafficking)? Human beings only have rights through their attachment to a State: peoples without territo-ries are vulnerable (Roma, Kurds); off shore finance is rarely philanthropic. For a long time to come, the Nation will be the essential framework for solidarity, the “only property of poor people” (Jaurès), a haven for people who are excluded from globalisation. Symptomatically, the number of States continues to rise: the need for finding a place of residence and identity shows no signs of weakening in the 21st century.

Globalisation has therefore paradoxically generated a need to reaffirm a national framework: the Nation-State must not only protect its population and its territory—that is the very condi-tion of its existence and its sovereignty—but also to maintain its national pact. Security tools are becoming expressions of solidarity and guarantees of equality.

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35Partenaires Sécurité Défense N° 277

RÉFLEXIONS

Une renationalisation des outils de sécurité domestiques ?

C’est un fait toujours vérifié : la criminalité, le terrorisme, les prédations économiques se nourrissent des situations où l’État est absent. Toutes les guerres actuelles sont des guerres civiles, nées d’un délitement des États. Ce risque de la faiblesse appelle le renforcement des outils sécuritaires étatiques, jadis associés à des dérives autoritaires. Le débat sur la « militarisation » de la sécurité tend à s’estomper : tous les pays confrontés à des menaces armées finissent par militariser les forces de police (Afghanistan, Mexique, Colombie), ou par « policiariser » les forces militaires (Mali, Niger, Mauritanie, Israël…). Ce n’est plus le statut, mais la menace à combattre qui définira demain les forces de sécurité : la suppression de la gendarmerie de la République Démocratique du Congo

a eu pour effet la remilitari-sation de facto de la police nationale 1. Ce qui domine est le besoin accru de forces garantissant la continuité de l’action gouvernementale en tout temps et en tout lieu. Les expériences de « privatisa-tion » de la sécurité (recours à des sociétés militaires privées

en Afghanistan, privatisation de la prison d’Abou Ghraïb en Irak) ne fournissent pas d’alternative satisfaisante, pas davantage que les « polices communautaires » anglophones. Le xxie siècle verra probablement se poursuivre l’expansion des forces de sécurité « nationales » à large spectre. On en trouve un indice dans la multiplication des forces de police « robustes » (tableau ci-dessous) et des garde-côtes.

1983 Chine China Police armée populaire People’s Armed Police (中国人民武装警察部队)

1990 Roumanie Romania Gendarmerie Roumaine Romanian Gendarmerie (Jandarmeria Română)1990 Tchad Chad Gendarmerie nationale National Gendarmerie1992 Moldavie Moldavia Arme des Carabiniers Carabinier Corps (Trupele de carabinieri)1994 Cambodge Cambodia Gendarmerie royale khmère Royal Gendarmerie of Cambodia2001 Pologne Poland Gendarmerie Militaire Military Gendarmerie (Žandarmeria wojskowa)2001 Serbie Serbia Gendarmerie Gendarmerie (Žandarmerija – Жандармерија)2003 Irak Iraq Police nationale irakienne Iraqi National Police (Iraqi National Police)2004 Qatar Qatar Force de sécurité intérieure Interior Security Force (Lakhwiya)2004 Ukraine Ukraine Troupes de l’Intérieur Interior Troops

2004

France, Italie, Espagne, Portugal, Pologne, Roumanie France, Italy, Spain, Portugal, Poland, Romania

Force de gendarmerie européenne European Gendarmerie Force (EUROGENDFOR)

2008 Jordanie Jordan Gendarmerie royale Royal Gendarmerie (

)

2006 Afghanistan Afghanistan Afghan National Civil Order Police Afghan National Civil Order Police (ANCOP)2013 Mexique Mexico Gendarmerie nationale National Gendarmerie (Gendarmería Nacional)

Par-là se trouve sans doute réaffirmée la nécessité d’un service public national de la défense et de la sécurité, qui se distingue doublement des modèles décentralisés et privatisés.

1 Cité dans « La réforme des systèmes de sécurité et de justice en Afrique francophone », organisation internationale de la francophonie, Paris, 2010.

A renationalisation of domestic security tools?

It is a fact that is still true: crime, terrorism and economic predation feed on situations in which the State is absent. All the current wars are civil wars, produced by a disin-tegration of States. This risk of weakness calls for a strengthening of government security tools, formerly associated with authoritarian excesses. The debate on the “militarisation” of security is becoming blurred: all the countries dealing with armed threats end up turning their police forces into military forces (Afghanistan, Mexico, Colombia), or turning their military forces into police forces (Mali, Niger, Mauritania, Israel). It is no longer the status, but the threat to combat that will define security forces in the future: elimination of the gendar-merie in the Democratic Republic of the Congo caused the de facto re-militarisation of the national police 1. What dominates is the growing need of forces ensuring the continuity of govern-ment action at all times and in all places. The experiences of the “privatisation” of security (turning to private military companies in Afghanistan, privatising the Abu Ghraib prison in Iraq) have not provided satisfactory alternatives, any more than “community policing” in English-speaking coun-tries have. In the 21st century, we will most likely see national security forces become more widespread. We see signs of this in the increase in robust police forces (see table below) and coast guards.

As we can see, the need is clearly reaffirmed for a national public service of defence and security, which is different from both decen-tralised and privatised models.

1 Mentioned in La Réforme des systèmes de sécurité et de justice en Afrique francophone, International Organisation of La Francophonie,Paris, 2010.