58
République Algérienne Démocratique et Populaire Université Ferhat Abbas de Sétif Faculté des Sciences Département de Biologie Exposé sur Méthodes d’étude des composés phénoliques Première année magister Option : biochimie et physiologie expérimentale 1

méthode d'étude des polyphenols

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: méthode d'étude des polyphenols

République Algérienne Démocratique et Populaire

Université Ferhat Abbas de Sétif

Faculté des Sciences

Département de Biologie

Exposé sur Méthodes d’étude des composés phénoliques

Première année magister

Option : biochimie et physiologie expérimentale

Proposé par Préparé par

Pr. Khanouf S. & Aitfella Radhia

ANNEE UNIVERSITAIRE 2009/2010

République Algérienne Démocratique et Populaire

1

Page 2: méthode d'étude des polyphenols

Université Ferhat Abbas de Sétif

Faculté des Sciences

Département de Biologie

Exposé sur Méthodes d’étude des composés phénoliques

Première année magister

Option : biochimie et physiologie expérimentale

Proposé par Préparé par

Pr. Khanouf & Aitfella Radhia

ANNEE UNIVERSITAIRE 2009/2010

2

Page 3: méthode d'étude des polyphenols

Sommaire

Introduction……………………………………………………………...………………………………...6

1. Nature et diversité des composés phénoliques des végétaux………………………………...7

1.1. Les flavonoïdes……………………………………………………………………………………...8

1.2. Les tannins……………………………………………………………………………….……...….13

1.2.1. Les tannins hydrolysables……………………………………………………………………13

1.2.2. Les tannins condensés…………………………………………………………………...……14

2. Méthodes d’étude des composés phénoliques………………....……………………………16

2.1. Préparation des échantillons…………………………………………………………………....16

2.2. Méthodes d’extraction des composés phénoliques…………………………………………17

2.2.1. Solubilité et extraction des flavonoïdes…………………………………………………...19

2.2.2. Solubilité et extraction des tannins…………...………………….………………………...20

2.3. Méthodes de séparation, de dosage et d’identification des composés

phénoliques…………….………………….…………………………………………………20

2.3.1. Caractérisation et dosage des composés phénoliques par leurs spectres

d’absorption en ultra violet ou en lumière visible………...................................................21

2.3.2. Dosage total des composés phénoliques par le réactif de Folin Ciocalteu……....... 23

2.3.3. Dosage des flavonoïdes……………………………………………………….……………….24

2.3.4. Dosage des tannins……………………………………………………………………………...25

2.3.4.1. Dosage des tannins condensés..….……………….……...………………………………...25

- La technique au butanol-HCl…...…………………………………...……………………………25

- La technique à la vanilline…………………………………………………………………………. 25

- Précipitation des tannins condensés par le formaldéhyde…...………………………...…….26

3

Page 4: méthode d'étude des polyphenols

2.3.4.2. Dosage des tannins hydrolysables…....…………………………………………………...26

2.3.4.2.1. Les gallotannins…...……………………………………………...……………………….26

- Par l’iodate de potassium…...………………………………………………………………………26

- Par la rhodadine...…………………………………………………………………………………….27

2.3.4.2.2. Les ellagitannins..……………...…………………………………………………………..28

- L’oxydation à l’acide nitreux……………………………………………………………………….28

- La technique au NaNO2/HCl………………………………...…………………………….….…….29

2.3.2. Identification et caractérisation des composés phénoliques par les méthodes

chromatographiques………………………………………………………………………...…….31

2.3.2.1. Chromatographie sur couche mince....…………………………………………………...32

- Caractérisation des flavonoïdes…………………………………………………………………… 33

- Caractérisation des tannins………………………………………………………….….………….. 34

2.3.2.2. Les séparations par CHLP et par électrophorèse capillaire et les couplages

CHLP/UV et CHLP/spectrométrie de masse…………………………………………..……34

Conclusion………………………………………………………………………………………………..35

Références bibliographiques…………………………..……………………………………..…….…36

4

Page 5: méthode d'étude des polyphenols

Liste des figures

Figure.1 : L’élément structural fondamental des composés phénoliques : le noyau

benzénique lié à un groupement hydroxyle.

Figure.2 : Squelette moléculaire de base des flavonoïdes avec la numérotation classique.

Figure.3 : Les principales classes de flavonoïdes.

Figure.4 : Exemples de flavonoïdes acylés, sulfatés ou prénylés.

Figure.5 : Deux exemples de tannins hydrolysables.

Figure.6 : Exemple de structure d’un tannin condensé.

Figure.7 : Schéma récapitulatif de différentes étapes de l’extraction et de l’analyse des

composés phénoliques solubles d’un matériel végétal.

Figure.8 : Spectres d’absorption de l’acide chlorogénique, de la (+)-catéchine et de la

quercétine en lumière UV.

Figure.9: Structure de la rhodanine.

Figure.10: Unité d’hexahydroxydiphenoyl (HHDP) dans la configuration S et R.

Figure.11: Formation du chromophore rouge par la réaction de l’acide ellagique avec

l’électrophile NO+.

Figure.13 : Séparation des anthocyanes de raisins par chromatographie liquide à haute

performance.

Liste des tableaux

Tableau.1 : Les principales classes de composés phénoliques.

Tableau.2 : les principales anthocyanidines des végétaux.

5

Page 6: méthode d'étude des polyphenols

Introduction

Une des originalités majeures des végétaux, réside dans leur capacité à produire des

substances naturelles très diversifiées. En effet, à coté des métabolites primaires

classiques (glucides, protides, lipides, acides nucléiques), ils accumulent fréquemment

des métabolites dits secondaires dont la fonction physiologique n’est pas toujours

évidente, mais qui représentent une source importante de molécules utilisables par

l’homme dans des domaines aussi différents que la pharmacologie ou l’agroalimentaire.

Les métabolites secondaires appartiennent à des groupes chimiques variés (alcaloïdes,

terpènes, composés phénoliques…) qui sont très inégalement répartis chez les végétaux

mais dont le niveau d’accumulation peut quelquefois atteindre des valeurs élevées.

Parmi ces métabolites, les polyphénols ou composés phénoliques, qui regroupent

plusieurs milliers de molécules, un nombre qui augmente sans cesse et qui en fait un

groupe chimique particulièrement important. La plupart d’entre eux sont caractéristiques

des végétaux, et nous n’envisageons que ceux-ci dans le cadre de ce document. Ils sont

divisés en une dizaine de classes chimiques, qui présentent tous un point commun : la

présence dans leur structure d’un moins un noyau benzénique, lui-même porteur d’un

nombre variables de fonctions hydroxyles (OH). Elles peuvent s’étendre de simples

molécules, telles que les acides phénoliques ou flavonoïdes, aux composés fortement

condensés, tel que les tannins.

Plusieurs ouvrages ont été consacrés ces quarante dernières années aux méthodes

d’analyse de ces composés phénoliques, permettant de mettre en évidence à la fois les

principales techniques modernes utilisées et les principaux résultats quant au dosage,

caractérisation et identification de ces composés. Ces nombreuses techniques ont permis

de confirmer et de préciser l’importance des composés phénoliques dans certaines

technologies liées aux activités humaines, dans les domaines industriels, de

l’environnement et de la santé humaine.

Dans ce présent document, nous traiterons essentiellement les principales méthodes

d’étude les fréquemment utilisées, à savoir, les techniques de dosage, d’identification et

de caractérisation des composés phénoliques d’origine végétale.

6

Page 7: méthode d'étude des polyphenols

1. Nature et diversité des composés phénoliques des végétauxLes composés phénoliques forment un très vaste ensemble de substances qu’il est difficile de définir simplement. L’élément structural fondamental qui les caractérise est la présence d’au moins un noyau benzénique auquel est directement lié au moins un groupe hydroxyle, libre ou engagé dans une autre fonction : éther, ester ou hétéroside (Bruneton, 1993).

Figure.1 : L’élément structural fondamental des composés phénoliques : le noyau benzénique lié à un groupement hydroxyle (Vermerris and Nicholson, 2006).

Dans la nature, la synthèse du noyau aromatique est le fait des seuls végétaux et micro-organismes. Les organismes animaux sont en effet presque toujours tributaires, soit de leur alimentation, soit d’une symbiose, pour élaborer les métabolites qui leur sont indispensables (Bruneton, 1993) et qui comportent cet élément structural (aminoacides, vitamines, pigments, toxines…etc.).

Plusieurs milliers de composés phénoliques ont été caractérisés jusqu’aujourd’hui chez les végétaux (Harborne, 1989). Ce sont des métabolites secondaires qui résultent de deux grandes voix d’aromagenèse : la voie shikimate et acétate (Macheix et al., 2005).

Les composés phénoliques peuvent être regroupés en de nombreuses classes (tableau.1) qui se différencient d’abord par :

- par la complexité du squelette de base (allant d’un simple C6 à des formes très polymérisés),

- ensuite par le degré de modifications de ce squelette (degré d’oxydation, d’hydroxylation, de méthylation…),

- et enfin par les liaisons possibles de ces molécules de bases avec d’autres molécules (glucides, lipides, protéines, autres métabolites, secondaires pouvant être ou non des composées phénoliques…).

Tableau.1 : Les principales classes de composés phénoliques (Macheix et al., 2005).

7

Page 8: méthode d'étude des polyphenols

Il est impossible de rendre compte d’une manière exhaustive dans un espace restreint de la complexité des différents composés phénoliques présents chez les végétaux. Nous nous intéressons donc essentiellement à la structure chimique des flavonoïdes et des tannins.

1.1. Les flavonoïdes

L’ensemble des flavonoïdes, de structure générale en C15 (C6-C3-C6), comprend à lui seul plusieurs milliers de molécules regroupés en plus de dix classes (Grotewold, 2006) dont certaines ont une très grande importance biologique et technologique : les anthocyanes, pigments rouges ou bleus, les flavones et les flavonols, de couleur crème ou jaune clair, les flavanes dont les produits de condensation sont à l’origine d’un groupe important de tannins et les isoflavones qui jouent un rôle dans la santé humaine (Heim et al., 2002 ; Hendrich, 2006).

La structure d’un flavonoïde s’organise toujours autour d’un squelette 1,3- diphénylpropane C6-C3-C6 (figure.2), décrit par une nomenclature spécifique. Les deux cycles benzéniques sont nommés cycle A et cycle B. Le chaînon propyle C3 peut être complété par une fonction éther formant ainsi un cycle central, appelé cycle C.

Figure.2 : Squelette moléculaire de base des flavonoïdes avec la numérotation classique (Stalikas, 2007).

8

Page 9: méthode d'étude des polyphenols

C’est la structure de l’hétérocycle central et son degré d’oxydation (figure.3) qui permettent de distinguer les différentes classes des flavonoïdes.

Figure.3 : Les principales classes de flavonoïdes. Un (ou deux) exemple(s) précis a été donné dans chacun des cas (Macheix et al., 2005).

9

Page 10: méthode d'étude des polyphenols

Le cas extrême d’oxydation de l’hétérocycle central correspond aux anthocyanidines (figure.3), toujours présentes en milieu acide sous forme d’un cation de couleur rouge, dit cation flavylium. Au contraire, dans le cas des flavanes (flavane-3-ols comme la catéchine ; flavane-3,4-diols quelquefois dénommés leucoanthocyanes car ils peuvent donner des anthocyanes rouge sous l’action d’un acide), le cycle central est fortement réduit (Vermerris and Nicholson, 2006).

On trouve des situations intermédiaires chez les flavanones, les flavones, les flavonols et d’autres groupes. Exceptionnellement, le noyau central de la molécule peut ne pas être totalement cyclisés, cas des chalcones et molécules voisines (figure.3), ou se présenter sous forme d’un cycle ne présentant que cinq sommets, cas des aurones de couleur généralement jaune vif (Macheix et al., 2005).

A l’intérieur de chacune des classes, les variations autour du squelette chimique de base en C15 portant principalement sur trois points (Macheix et al., 2005):

- Le degré d’hydroxylation des différents cycles : ainsi, le cycle B est mono-hydroxylé chez le kaempférol ou la pélargonine, di-hydroxylé chez la quercétine ou la cyanidine (figure.3), tri-hydroxylé chez la myricétine ou la delphidine. Il en résulte des différences de spectres d’absorption donc de couleur chez les anthocyanidines et les autres pigments (tableau.2).

- Le niveau de méthylation (groupement O-CH3 à la place des seules fonctions phénoliques) : par exemple, chez les anthocyanes du vin, on rencontre la pétunidine, monométhoxylée de couleur violacée, et la malvidine, la plus abondante et di-méthoxylée de couleur mauve (tableau.2). La méthoxylation diminue l’hydrosolubilité des molécules qui, dans des cas extrêmes, sont alors présentes dans les exsudats de certains bourgeons (peuplier) ou liées à des structures lipidiques comme les cires de feuilles d’eucalyptus.

- Le niveau de glycosylation : en dehors de quelques exceptions (d’une part le groupe des flavanes et d’autre part quelques flavonoïdes excrétés dans les exsudats), les flavonoïdes des végétaux sont presque tous liés à des sucres. A ce titre, ils appartiennent au grand groupe des hétérosides, la partie phénolique représentant ici l’aglycone. D’une manière générale, l’ose est lié à la molécule phénolique par l’intermédiaire d’une liaison glycosidique C-O-C dégradable par hydrolyse acide à chaud. Cependant, dans quelque cas plus rares, comme chez la vitéxine présente dans la vigne, la liaison est de type C-C, beaucoup plus résistante (Grotewold, 2006).

Les positions et les nombre de glycosylations dépendent de la réactivité de chacun des hydroxyles phénolique. Par exemple, chez les flavonols, la position 3 de l’hétérocycle est toujours glycosylée, fréquemment la position 7 mais jamais la position 5 du cycle A. Au contraire, chez les anthocyanes, en plus de la position 3, c’est préférentiellement la position 5 qui est glycosylée (Grotewold, 2006).

10

Page 11: méthode d'étude des polyphenols

Tableau.2 : les principales anthocyanidines des végétaux (Macheix et al., 2005).

La nature des sucres se liant aux flavonoïdes est variée, allant de la plupart des oses (glucose, galactose, arabinose, rhamnose…) à des disaccharides ou de formes plus complexes. Pour la seule quercétine, on connaît au moins sept dérivés en position 3 et au total plus de 80 formes glycosylées. Des cas extrêmes montrent jusqu'à 5 positions de glycosylations sur le même squelette de flavonoïde, y compris sur le cycle B (Grotewold, 2006).

Les conséquences de la glycosylation sont multiples (Macheix et al., 2005) :

- Modification de la couleur des pigments - Forte augmentation de la solubilité dans l’eau permettant alors une plus grande

accumulation vacuolaire. - Modification des propriétés biologiques des molécules phénoliques, par exemple dans

les interactions de la plante avec les microorganismes ou dans le caractère toxique qu’elles peuvent présenter vis-à-vis de la plante elle-même.

Une complication fréquente concerne la liaison possible d’un ou plusieurs acides (malique, malonique, citrique, p-coumarique, caféique…) au sucre de l’hétéroside (figure.4). On dit alors que le flavonoïde est acylé, ce qui augmente beaucoup sa stabilité et modifie ses propriétés physicochimiques. Il est fréquent par exemple, que les anthocyanes acylés puissent s’associer entre elles, ce qui permet à la fois leur stabilisation dans l’eau et une forte augmentation de leur couleur (Brouillard et al., 1997).

11

Page 12: méthode d'étude des polyphenols

De nombreuses autres modifications peuvent également intervenir à partir du squelette C15 des flavonoïdes. Parmi les cas les plus intéressants on peut noter l’existence de formes sulfatées et prénylées (figure.4, C et D). Dans tous les cas, les propriétés chimiques sont alors fortement modifiées par la présence du groupement additionnel.

Les conséquences de ces nombreuses variations autour de la structure commune C6-C3-C6 est l’extraordinaire diversité des flavonoïdes rencontrés dans une plante donnée. A titre d’exemple on peut citer le cas des fleurs violettes du pétunia dans laquelle on a pu identifier 40 dérivés anthocyaniques différents. La couleur des différentes variétés dépend alors pour une part importante des proportions respectives de chacun de ces composés (Gonzalez et al., 2001).

Figure.4 : Exemples de flavonoïdes acylés A et B, sulfaté C ou prénylé D (Macheix et al., 2005).

12

Page 13: méthode d'étude des polyphenols

1.2. Les tannins

Historiquement, l’importance des drogues à tannins est liée à leurs propriétés tannantes, c'est-à-dire à la propriété qu’ils ont de transformer la peau fraiche en un matériau imputrescibles : le cuir. La résultante du tannage est l’établissement de liaisons entre les fibres de collagène de la peau, ce qui confère à cette dernière une résistance à l’eau, à la chaleur et à l’abrasion (Bruneton, 1993).

Cette aptitude des tannins à se combiner aux macromolécules explique qu’ils précipitent la cellulose, les pectines, les protéines ; elle explique également leur astringence, cette âpreté caractéristique : en précipitant les glycoprotéines que contient la salive, les tannins font perdre à celle-ci son pouvoir lubrifiant (Bruneton, 1993).

Selon la nature des constituants impliqués et selon le type de condensation, les tannins sont des composés plus en moins complexes pouvant encore présenter une hydrosolubilité suffisante pour être présents dans la vacuole.

Il est classique de distinguer deux grands groupes de tannins différents à la fois par leur réactivité chimique et par leur composition (Bruneton, 1993): les tannins hydrolysables et les tannins condensés.

1.2.1. Les tannins hydrolysables

Ils sont abondants chez les dicotylédones et certains arbres en sont des sources industrielles : tannins de chêne, châtaigner, tannins de Chine ou de Turquie extraits respectivement d’un arbuste du genre Rhus ou de Quercus tinctoria (Quideau, 2009).

Ils sont d’abord caractérisés par le fait qu’ils peuvent être dégradés par hydrolyse chimique (alcaline ou acide) ou enzymatique (Quideau, 2009). Ils libèrent alors une partie non phénolique (souvent du glucose ou de l’acide quinique) et une partie phénolique qui peut être de l’acide gallique (cas des gallotannins comme le tannin de chine, quelque fois appelé acide tannique), soit un dimère de ce même acide, l’acide éllagique (cas des tannins ellagiques ou ellagitannins comme ceux du châtaigner).

Une forme simple de tannins hydrolysables est le penta-galloylglucose, molécule très réactive qui est à l’origine de la plupart des formes complexes, par exemple la castalagine chez le châtaigner ou le chêne (figure.5).

13

Page 14: méthode d'étude des polyphenols

1.2.2. Les tannins condensés

Les tannins condensés sont des oligomères ou des polymères de flavane-3-ols (éventuellement de flavane-3,4-diols) dérivés de la (+)-catéchine ou de ses nombreux isomères (figure.6). Contrairement aux tannins hydrolysables, ils sont résistants à l’hydrolyse et seules des attaques chimiques fortes permettent des les dégrader.

Ainsi, par traitement acide à chaud, ils se transforment en pigments rouges et, pour cette raison, les formes dimères ou oligomères sont dénommées proanthocyanidines. Les proanthocyanidines dimères présentent déjà une affinité pour les protéines et des propriétés tannantes, mais ces deux paramètres augmentent avec la taille moléculaire des polymères qui sont formés par adjonction de nouveaux monomères aux dimères initiaux (Macheix et al., 2005).

L’enchainement des différentes unités constitutives se fait soit de manière linéaire grâce à des liaisons C-C, soit par des ramifications grâce à des liaisons C-O-C conduisant à des structures de plus en plus complexes qui restent cependant solubles dans l’eau des vacuoles (figure.6).

Les tannins condensés sont très abondants dans certains organes végétaux, consommés ou utilisés par l‘homme, par exemple de nombreux fruits (pomme, prune, fraise…) et des boissons fermentés ou non (thé, cidre…). Dans tous les cas, la matière première végétale de part, les traitements technologiques et les conditions de conservation du produit influencent fortement la capacité tannante donc ses propriétés organoleptiques (Macheix et al., 2005).

Figure.5 : Deux exemples de tannins hydrolysables (Macheix et al., 2005).

14

Page 15: méthode d'étude des polyphenols

Figure.6 : Exemple de structure d’un tannin condensé (Macheix et al., 2005).

2. Méthodes d’étude des composés phénoliques

15

Page 16: méthode d'étude des polyphenols

2.1. Préparation des échantillons La préparation des échantillons est une étape d’une importance capitale préalable à tout type d’analyse fiable. Plusieurs méthodes de préparation des échantillons ont été développées afin de déterminer la fraction phénolique dans une large gamme de types d’échantillons. Les trois principales matrices contenant en l’occurrence ces composés, les plantes, les aliments et les solutions liquides (incluant les fluides biologiques et boissons), nécessitent une élaboration détaillée de la préparation de leurs échantillons (Stalikas, 2007).

Les procédures de préparation des échantillons d’analyses des polyphénols peuvent considérablement varier ; à partir de la simple ultrafiltration dans le cas des différents échantillons liquides, jusqu’aux celles les plus compliquées, telle que l’hydrolyse des glycosides et les étapes d’extraction/purification. La problématique liée au choix des procédures de prétraitement est due à la grande variabilité des composés phénoliques et leurs nombreuses propriétés, notamment, leur polarité, acidité, nombre des groupements hydroxyles et des noyaux aromatiques, leur concentration, et la complexité de la matrice (Vermerris and Nicholson, 2006).

Par conséquent, il est important de choisir convenablement une méthode optimale de prétraitement en accord avec les structures chimiques et les propriétés physicochimiques des composés. La méthode la plus communément décrite inclut deux ou plusieurs étapes de préparation des échantillons. Ces étapes visent à renforcer la sensibilité et la sélectivité, mais en même temps à réduire le nombre d’erreur via l’introduction des interférents et d’artefacts, et augmenter l’efficacité de la méthode (Vermerris and Nicholson, 2006).

Les plantes étant solides sont généralement soumises à un broyage ou une homogénéisation ; les quelles peuvent être précédés par un séchage ou par une lyophilisation. Le matériel végétal est soumis par la suite à une extraction. C’est la principale étape de récupération et d’isolation des composés phénoliques bioactifs à partir du matériel végétal (Stalikas, 2007).

2.2. Méthodes d’extraction des composés phénoliques

16

Page 17: méthode d'étude des polyphenols

L’objectif de l’extraction est de libérer les composés phénoliques présents dans des structures vacuolaires par rupture du tissu végétal et par diffusion. La présence d’un ou de plusieurs cycles benzéniques hydroxylés chez tous les composés phénoliques est responsable de certaines propriétés communes utilisées pour les extraire à partir du matériel végétal. Cependant, il faut noter que ces propriétés peuvent s’exprimer différemment selon la complexité de la molécule concernée, et le nombre de groupement hydroxyles portés par chacun des cycles benzéniques.

L’extraction solide-liquide et liquide-liquide sont les techniques les plus communément utilisées pour l’extraction des polyphénols à partir des plantes naturelles, essentiellement à cause de leur facilité, efficacité et leur large gamme d’application (Stalikas, 2007).

Figure.7 : Schéma récapitulatif de différentes étapes de l’extraction et de l’analyse des

composés phénoliques solubles d’un matériel végétal. Les détails de chaque phase sont donnés dans le texte.

La plupart des phénols simples présents dans la vacuole peuvent aisément être extraits par des alcools comme le méthanol, éthanol, et l’acétone (figure.7). Cependant, les acides phénoliques extrêmement polaires (acide benzoïque, cinnamique) peuvent ne pas être

17

Page 18: méthode d'étude des polyphenols

entièrement extraits par ces solvants organiques pures, des mixtures d’alcool-eau ou acétone-eau sont recommandées. Les solvants les plus apolaires (dichlorométhane, chloroforme, hexane, benzène) conviennent à l’extraction des composés superflus non polaires (les huiles et la chlorophylle), ou de certains flavonoïdes apolaires, par exemple ceux liés aux stérols, ou ceux présents dans les exsudats de bourgeons ou sur les tissus externes foliaires (Vermerris and Nicholson, 2006).

Comme les polyphénols sont facilement oxydables, il est recommandé de travailler à une température de 0 à 4˚C, et d’assurer une protection en ajoutant un agent réducteur (acide ascorbique ou métabisulfite de soduim) au milieu d’extraction. L’adjonction d’un inhibiteur des glucosidases, enzymes pouvant encore fonctionner en milieu alcoolique ou acétonique, permet par ailleurs d’éviter l’hydrolyse d’hétérosides phénoliques fragiles lors de l’extraction (Macheix et al., 2005).

D’autres facteurs, tel que le pH, température, le ratio volume échantillon-solvant, et le nombre et l’intervalle de temps des étapes d’extraction individuelle, jouent également un important rôle dans la procédure d’extraction (Macheix et al., 2005).

Les formes condensées de composés phénoliques posent également des problèmes d’extraction. Si les tannins sont encore correctement extraits par des mélanges acétone/eau, ce ne peut être le cas pour les phénols insolubilisés au niveau des parois pecto-cellulosiques, et dans la cutine ou la subérine. On peut alors avoir recours à des hydrolyses chimiques (acides ou alcalines) ou enzymatiques (par exemple sous l’action d’estérases d’origine bactériennes) des parois cellulaires, permettant de libérer les composés phénoliques avant de la analyser et de les doser.

Dans les cas extrêmes comme celui de la lignine, l’extraction n’est possible qu’après dégradation oxydative (par exemple sous l’effet du peroxyde d’hydrogène) qui va entrainer une dépolymérisation et une solubilisation progressive. Il est alors bien évident que les analyses ne portent plus sur les composés natifs, mais sur leurs produits de dégradation (Macheix et al., 2005).

Après l’élimination de l’alcool par évaporation sous vide, il est ensuite nécessaire de purifier l’extrait global ainsi obtenu, d’abord en éliminant les pigments chlorophylliens et caroténoïdes (extraction à l’éther de pétrole), puis en extrayant les composés phénoliques avec un solvant de polarité intermédiaire comme l’acétate d’éthyle. La plupart des phénols se retrouvent alors ce solvant, qu’il est ensuite aisé d’éliminer sous vide afin de transférer finalement dans le méthanol, la fraction phénolique correctement purifiée. Cette fraction sera ensuite utilisée pour des analyses qualitatives et quantitatives (Vermerris and Nicholson, 2006).

Ainsi, bien que le schéma général des différentes étapes d’extraction, de caractérisation, et de dosage (figure.7) soit valable pour la majorité des composés phénoliques, il devra

18

Page 19: méthode d'étude des polyphenols

quelque fois être modifié pour être mieux adapté à leur nature chimique, leur solubilité, et leur degré de liaison avec d’autres constituants végétaux.

2.2.1. Solubilité et extraction des flavonoïdes

Si en règle générale, les hétérosides sont hydrosolubles et solubles dans les alcools, bon nombre d’entre eux ont une hypersolubilité plutôt faible (rutoside, hespéridoside…). Les génines sont, pour la plupart, solubles dans les solvants organiques apolaires ; lorsqu’elles ont en moins un groupe phénolique libre, elles se dissolvent dans les solutions d’hydroxydes alcalins (Grotewold, 2006).

Les flavonoïdes lipophiles des tissus superficiels (Bruneton, 1993) des feuilles (ou des frondes) sont directement extraits par des solvants moyennement polaires (dichlorométhane…) ; il conviendra de les séparer ensuite des cires et des graisses extraites simultanément (on peut certes laver au méthane mais la sélectivité de ce solvant n’est pas absolue).

Les hétérosides peuvent être extraits, le plus souvent à chaud, par de l’acétone ou par des alcools (éthanol, méthanol) additionnés d’eau (20 à 50% selon la drogue est fraiche ou sèche). Il est possible de procéder ensuite à une évaporation sous vide et, lorsque le milieu ne contient plus que de l’eau, de mettre en œuvre une série d’extractions liquide-liquide par des solvants non miscibles à l’eau : par de l’éther de pétrole qui élimine chlorophylle et lipides ; par du diéthylether qui extrait les génines libres ; par de l’acétate d’éthyle qui entraine la majorité des hétérosides. Les sucres libres restent dans la phase aqueuse avec, le cas échéant, les hétérosides les plus polaires (Markham and Bloor, 1998).

Les anthocyanosides sont solubles dans l’eau et les alcools, insolubles dans les solvants organiques apolaires. L’extraction est, classiquement, réalisée par un alcool (méthanol, éthanol) additionné d’une faible quantité (0.1-1%) d’acide chlorhydrique. Pour éviter l’estérification du carboxyle libre des anthocyanidines acylés par un diacide, et surtout pour empêcher leur désacylation, il convient d’utiliser préférentiellement d’autres acides (acétique, tartrique…) et d’opérer à basse température. Les solutions d’anthocyanidines sont très instables et ne peuvent être conservés que sous atmosphère inerte, au froid et à l’abri de la lumière (Grotewold, 2006).

Industriellement, il est possible de préparer des extraits anthocyaniques par différents procédés. Le plus ancien est une extraction en milieu aqueux en présence du dioxyde de soufre suivie de la régénération des anthocyanosides par acidification. Parmi les procédés les plus récents on peut citer l’ultrafiltration sur membrane de cellulose et la fixation/élution sur résines échangeuses d’ions (Bruneton, 1993).

2.2.2. Solubilité et extraction des tannins

19

Page 20: méthode d'étude des polyphenols

Les tannins se dissolvent dans l’eau sous forme de solutions colloïdales, mais leur solubilité varie selon le degré de polymérisation. Ils sont solubles dans les alcools et acétone. Les solutions aqueuses ont une stabilité variable selon la structure, généralement modérée. Ainsi, lors de extraction par de l’eau bouillante (exemple dans les conditions d’une décoction) un tannin comme la géraniine est décomposé en 30 minutes en acide gallique, acide ellagique, et corilagine (=1-galloyl 3,5- acide hexahydroxydiphénique glucose).

Les formes dimères et oligomères des esters galliques et HHDP du glucose sont également assez instables. Comme tous les phénols les tannins réagissent avec le chlorure ferrique ; ils sont précipités de leurs solutions aqueuses par les sels de métaux lourds et par la gélatine (Bruneton, 1993).

L’extraction des tanins est, en règle générale, réalisée par un mélange d’eau et d’acétone (on évite le méthanol qui provoque la méthanolyse des depsides galliques). Un rendement optimal est obtenu avec les tissus frais ou conservés par congélation ou lyophilisation car, dans les drogues sèches, une partie des tannins est irréversiblement combinée à d’autres polymères. Après élimination de l’acétone par distillation, la solution aqueuse est débarrassées des pigments et des lipides par un solvant (ex : dichlorométhane). Une extraction de cette solution aqueuse par l’acétate d’éthyle permet de séparer les proanthocyanidols dimères et la plupart des tannins galliques. Les proanthocyanidols polymères et les tannins galliques de masse moléculaire élevée restent dans la phase aqueuse (Bruneton, 1993).

2.3. Méthodes de séparation, de dosage et d’identification des composés phénoliques

Les méthodes de séparation, de dosage et d’identification des composés phénoliques ont fait des progrès spectaculaires au cours de ces quarante dernières années, grâce en particulier à l’utilisation quasi systémique de la chromatographie liquide à haute performance (HPLC) et des détecteurs à barrette de diodes permettant l’analyse des spectres d’absorption en ultraviolet et le couplage de la HPLC avec les techniques physicochimiques modernes (spectrométrie de masse, résonnance magnétique nucléaire…).

Plusieurs ouvrages ont été consacrés aux méthodes d’analyse des composés phénoliques des végétaux. Chaque groupe important de composé phénolique, y compris ceux des tannins, y est traité par un spécialiste, ce qui a permis de mettre en évidence à la fois les principales techniques modernes utilisées et les principaux résultats quant à l’analyse et au dosage de ces composés. La quasi-totalité des publications scientifiques concernant les composés phénoliques font appel à une ou plusieurs de ces techniques, et il est tout a fait impossible de les rappeler ici dans le détail.

20

Page 21: méthode d'étude des polyphenols

2.3.1. Caractérisation et dosage des composés phénoliques par leurs spectres d’absorption en ultra violet ou en lumière visible 

Tous les composés phénoliques absorbent en UV et certains d’entre eux (anthocyanine, flavonols, chalcones, aurones, mélanines…) absorbent également dans le visible, et participent alors à la coloration des organes végétaux (fleurs, fruits…) et des produits qui en dérivent. Le spectre d’absorption résulte de la présence combiné du (ou des) cycle (s) benzénique (s), des fonctions hydroxyles (phénoliques) portées par ce (s) cycle (s), et des différentes doubles liaisons présentes dans la molécule (Macheix et al., 2005).

D’innombrables travaux ont été consacrés à la détermination du spectre d’absorption des composés phénoliques, et à son utilisation pour les caractériser et les doser, dans la mesure où ils ont été préalablement séparés par chromatographie. Quelques exemples significatifs peuvent être donnés (figure.8) :

Le spectre d’absorption de l’acide chlorogénique (max= 328mn, avec un épaulement marqué aux environs de 300nm) est représentatif des nombreux esters naturel des acides hydroxycinnamiques, celui de la (+)-catéchine (maximum à 280nm) va se trouver chez

les tannins condensés, celui de la quercétine (max= 375nm, avec un deuxième maximum vers 265nm) est représentatif de nombreux flavonols et de leurs dérivés glycosylés, celui des anthocyanes montre une absorption significative vers 500nm, ce qui explique leur couleur rouge naturelle (Macheix et al., 2005).

Le dosage des composés phénoliques utilise très fréquemment leur spectre d’absorption, soit dans le visible pour les anthocyanes, soit dans l’UV pour la plupart des autres composés, en choisissant pour chacun d’eux la longueur d’onde d’absorption maximale (Geirer, 1985). C’est sur ce principe que fonctionnent la plupart des détecteurs qui équipent les appareils de chromatographie, qu’il s’agisse de chromatographie classique sur colonne ou de chromatographie liquide à hautes performance. La concentration du composé phénolique en solution est déduite en utilisant la loi classique de Beer-Lambert qui lie cette concentration C en mol/L à densité optique DO mesurée sur le spectre d’absorption :

DO = C d

Où est le coefficient d’extinction du composé considéré à la longueur d’onde utilisée pour la mesure, et d représente la longueur de la cuve de mesure (en cm). A titre d’exemple en solution éthanolique, est égale à 18500 pour l’acide chlorogénique à 328nm, à 3000 pour la (+)-catéchine à 280nm, à 24500 pour la quercétine à 364nm, et à 29500 pour la malvidine en milieu acide à 515nm (Macheix et al., 2005).

21

Page 22: méthode d'étude des polyphenols

Figure.8 : Spectres d’absorption de l’acide chlorogénique, de la (+)-catéchine et de la quercétine en lumière UV (Macheix et al., 2005).

Pour un squelette chimique donné, par exemple celui des flavonoïdes, les variations des spectres d’absorption sont en fonction des modifications chimiques : hydroxylation, méthylation, glycosylation, et condensation avec d’autres molécules, phénoliques ou non. De plus, les caractéristiques physicochimiques du milieu sont également des causes de modifications profondes des spectres d’absorptions : pH, teneurs en métaux, interférence avec d’autres composés (Grotewold, 2006).

Les anthocyanes sont particulièrement sensibles en pH qui est un des éléments de détermination de leur couleur. Ces différentes propriétés et leurs conséquences sur les spectres d’absorption sont largement utilisés pour caractériser les divers groupes de composés phénoliques, soit sur le chromatogramme sur papier ou sur couche mince, soit en solution après que les composés aient été préalablement séparés (Markham and Bloor, 1998).

22

Page 23: méthode d'étude des polyphenols

2.3.2. Dosage total des composés phénoliques

Il n’existe aucune méthode permettant de doser de manière satisfaisante et simultanée l’ensemble des composés phénoliques présents dans un extrait végétal non purifié. Néanmoins, une estimation rapide (et souvent très fortement sur évaluée) de la teneur en phénols totaux peut être obtenue par différentes méthodes, en particulier par utilisation du réactif de Folin-Ciocalteu, ou le bleu prussien.

Par le réactif de Folin-Ciocalteu (FC)

L’utilisation du réactif de FC est la méthode la plus utilisée pour déterminer la quantité totale des composés phénoliques. Cette technique a été initialement développée par Folin et ses collègues en étudiant le métabolisme des protéines chez l’être humain.

Folin et Denis ont rapporté sur une méthode colorimétrique de détection des acides aminés tyrosines dans des hydrolysats de protéines (Folin and Denis, 1915). Cette technique repose sur la réduction du mélange phosphotungstiate (WO4

2-)- phosphomolybdate (MoO4 2-) par les groupements hydroxyle phénoliques des tyrosines, conduisant à la formation de complexes colorés bleu que l’on peut alors doser par colorimétrie en utilisant le spectrophotomètre.

Cette méthode a été modifiée par Folin et Ciocalteu. La modification consiste par l’addition du sulfate de lithium et de brome au réactif phosphotungstate phosphomolybdate à la fin de la période d’ébullition, suivie par un refroidissement et une dilution. L’addition du lithium prévient la formation du précipité qui peut interférer dans la quantification de l’intensité de la coloration (Folin and Ciocalteu, 1927).

Le réactif qui en résulte, dénommé ainsi Folin-Ciocalteu, est utilisé pour déterminer la quantité des tyrosines et tryptophanes présente dans les hydrolysats de protéines, mais également celle des phénols dans une large gamme de sources. Le protocol de cette méthode est comme suit (Vermerris and Nicholson, 2006) :

1. Diluer un aliquote d’échantillon 10:1 avec l’eau (9 parts d’eau pour une part d’échantillon). Ceci n’est pas nécessaire si la quantité de phénols est faible.

2. Ajouter 2 ml de la préparation fraiche 2% (w/v) du carbonate de sodium (anhydre) à 0.1 ml de l’extrait (dilué si nécessaire).

3. Mixer vigoureusement au Vortex.

4. Laisser 5 min à part.

5. Pendant le mélange au Vortex ajouter 0.1 ml d’une dilution 1:1 du réactif de Folin-Ciocalteu.

6. Laisser l’échantillon au minimum 30 minutes, sans pour autant dépasser une heure.

7. Lire l’absorbance au spectrophotomètre à 750 nm.

23

Page 24: méthode d'étude des polyphenols

La méthode colorimétrique basée sur le protocole développé par Folin et Ciocalteu permet de déterminer la concentration des composés phénoliques solubles, tel que les anthocyanidines, ainsi que celle des composés phénoliques complexes tel que les tannins condensés et hydrolysables (Vermerris and Nicholson, 2006).

Cette méthode est très sensible mais malheureusement peu spécifique, car beaucoup d’autres composés réducteurs peuvent interférer, en particulier l’acide ascorbique. Il est donc vivement recommandé de ne l’utiliser que sur des extraits suffisamment purifiés, et de réaliser des témoins négatifs (Vermerris and Nicholson, 2006), par exemple à l’aide d’un deuxième dosage après avoir enlevé les phénols de l’extrait (par adsorption sur du polyvinylpyrrolidonne insoluble). Par différence, on peut avoir alors une bonne approximation de la teneur de l’extrait en phénols que l'on exprime alors à un composé de référence (par exemple en équivalents d’acide chlorogénique, ou gallique).

La valeur obtenue n’en est pas pour autant très satisfaisante, car elle reste très globale et ne donne aucune indication sur les différents composés présents dans l’échantillon, en sachant que chacun d’entre eux peut réagir de manière différente dans la réaction colorée (Macheix et al., 2005 ; Grotewold , 2006).

Dans les quelques rares cas où un composé phénolique est très fortement majoritaire dans un matériel végétal donné (par exemple l’acide chlorogénique du tubercule de pomme de terre, les acides hydoxycinnamiques des feuilles de pécher, les anthocyanidines du raisin rouge), on peut avoir une estimation approximative et rapide de la teneur du matériel à partir du spectre d’absorption (en UV ou dans le visible) de l’extrait global. Mais, en dehors de ces exceptions, il est impossible de tirer des conclusions qualitatives et quantitatives précises de la seule étude du spectre d’absorption d’un extrait global de végétal (Macheix et al., 2005).

2.3.3. Dosage des flavonoïdes

La teneur totale en flavonoïdes des extraits végétaux peut être estimée par la méthode du trichloride d’aluminium (AlCl3). La quercétine est utilisée comme composé de référence afin de réaliser la courbe d’étalonnage (Vermerris and Nicholson, 2006). 10 mg de quercétine sont dissoutes dans 80% d’éthanol et diluée en 25, 50 et 100 μg/ml. Les solutions standards diluées (0.5 ml) sont séparément mélangés avec 1.5 ml de 95% éthanol, 0.1 ml de 10% trichloride d’aluminium, 0.1 ml de 1M d’acétate de potassium et 2.8 ml de l’eau distillé.

Après incubation à température ambiante pendant 30 minutes, l’absorbance est mesurée à 415 nm. La quantité de 10% de trichloride d’aluminium est substituée par la même quantité en eau distillée dans le blanc. De manière similaire, 0.5 ml des extraits éthanoliques végétaux réagissent avec le trichloride d’aluminium afin de déterminer la concentration des flavonoïdes (Lamaison and Carnet, 1990 ; Huang et al., 2004).

24

Page 25: méthode d'étude des polyphenols

2.3.4. Dosage des tannins

Scalbert et ses collaborateurs, ont décrit différentes méthodes de détermination des concentrations des tannins condensés et hydrolysables (proanthocyanidines) dans différents extraits de bois (Scalbert et al., 1989). Les tannins sont complexes et hétérogènes: en plus de la distinction entre les tannins condensés basés sur les flavonoïdes et les tannins hydrolysables basés sur l’acide gallique, chaque groupe révèle une large variabilité chimique qui peut infecter l’efficacité de différentes techniques analytiques. L’interférence des composés non tannins chimiquement apparentés, tel que les flavonoïdes, peuvent dans certains cas influencer les résultats (Vermerris and Nicholson, 2006).

2.3.4.1. Dosage des tannins condensés

La technique au butanol-HCl Cette technique est une méthode colorimétrique qui implique le clivage oxydatif des proanthocyanidines au sulfate ferreux. Au 0.5 ml de l’extrait aqueux de la plante est ajouté 5ml de la solution acide du sulfate ferreux (77 mg de FeSO4.7H2O dissoute dans 500 ml de 2:3 HCl/n-butanol). Les tubes sont couverts et placer dans un bain marie à 95°C pour 15 min. L’absorbance est déterminé à 530 nm.

La concentration des proanthocyanidines est exprimée en équivalents de la cyanidine (utilisée comme standard). Le coefficient d’extinction moléculaire εmol qui est utilisé pour convertir les valeurs d’absorbance en concentrations est égal à 34700 l. mol -1. cm-

1(Vermerris and Nicholson, 2006).

La technique à la vanillineCette technique est une méthode colorimétrique alternative qui repose sur des réactions avec la vanilline sous des conditions acides. 2 ml d’aliquote de la solution de vanilline fraichement préparés (1g/100 ml) dans 70% d’acide sulfurique sont ajoutées à 1 ml de l’extrait aqueux de la plante. Le mélange est incubé 20°C au bain marie et après exactement 15 min. L’absorbance est déterminée à 500 nm.

La concentration des proanthocyanidines est exprimée en équivalents de (+)-catéchine. Cette technique est spécifique aux flavonols. Par conséquence, en utilisant cette technique afin de déterminer la concentration des tannins condensés, les flavonols monomériques largement distribués, tel que la catéchine et l’épicatéchine, peuvent erroné les résultats (Hagerman and Butler, 1989).

Précipitation des tannins condensés par le formaldéhyde

25

Page 26: méthode d'étude des polyphenols

Cette troisième technique a pour but de précipiter les proanthocyanidines de l’extrait par le formaldéhyde. En premier lieu, la quantité totale des composés phénoliques est déterminée en utilisant le réactif Folin-Ciocalteu décrit auparavant. Un demi d’équivalent molaire du phloroglucinol est ajouté à tous les équivalents d’acide gallique de l’extrait. 2 ml du mélange de l’extrait végétal/phloroglucinol sont ajoutées à 1 ml de la solution 2:5 HCl /H2O, et à 1 ml de la solution aqueuse du formaldéhyde (13 ml de 37% du formaldéhyde dilué dans 100 ml d’eau).

Après une incubation d’une nuit à température ambiante, les composés phénoliques non précipités sont estimés dans le surnageant par la méthode Folin-Ciocalteu. Le précipité contient les proanthocyanidines et une quantité inconnue du phloroglucinol, qui peut toujours être précipité quantitativement (Vermerris and Nicholson, 2006).

2.3.4.2. Dosage des tannins hydrolysables

2.3.4.2.1. Les gallotannins

Par l’iodate de potassium

Les gallotannins, peuvent être quantitativement détectés par la technique à l’iodate de potassium. Cette méthode a été initialement décrite par Haslam, et basée sur la réaction de l’iodate de potassium (KIO3) avec les esters galloyl, qui produit un intermédiaire rouge puis un composé jaune à la fin. La concentration de l’intermédiaire rouge peut être mesurée spectrophotométriquement à 550 nm.

La réaction est accomplie initialement par l’addition de 1.5 ml de la solution saturé d’iodate de potassium à 3.5 ml de tannin, suivie par 40-min d’incubation à 0°C (Haslam, 1965). L’intermédiaire rouge ne doit pas tourné, il est important que le temps et la température de la réaction soient réguliers. Bate-Smith recommande d’exécuter la réaction à 15°C jusqu’à ce l’absorbance maximale soit atteint sans tenir compte du temps (Bate-Smith, 1977).

La formation du précipité (qui résulte de l’absence de groupements hydroxyles libres sur les résidus pentagalloyl) peut être évitée par le changement du solvant de la réaction. Le mélange acétone/eau 20% (v/v) ou le méthanol au dessus de 10% (v/v) induisent généralement une faible précipitation par rapport à la présence seulement d’eau. La concentration des tannins hydrolysables est exprimée par les équivalents d’acide tannique (Vermerris and Nicholson, 2006).

Par la rhodanine

26

Page 27: méthode d'étude des polyphenols

Malgré les changements réalisés par Bate-Smith du protocole original, la sensibilité au temps et à la température de la technique à l’iodate, aussi bien que la réactivité croisée avec les éllagitannins, ont un impact négatif sur la reproductibilité de la méthode. Inoue et Hagerman ont développé la méthode à la Rhodanine (2-thio-4-ketothiazolidine) qui réagie avec les groupements hydroxyle vicinales des acides galliques pour produire à la fin un complexe rouge détecté spectrophotométriquement à 520 nm (figure.9).

Cette réaction est spécifique à l’acide gallique, et peut être ainsi utilisée pour la détection des gallotannins. Ceci requière une hydrolyse des gallotannins avant la réaction à la rhodanine. Les tannins sont extraits à partir des plantes dans 1 ml 70% (w/v) d’acétone/eau par 100 mg de matière sèche via la centrifugeuse à 4°C. L’extrait est ensuite filtré. Le filtrat contenant les tannins est recueilli dans une ampoule à verre. Le reste ou l’agrégat sur le filtre est alors lavé avec 5 mL 2N d’acide sulfurique, puis ajouté à l’ampoule. Celle ci est fermée hermétiquement et congelée, puis chauffée à 100°C pendant 26 h pour pouvoir d’hydrolyser les gallotannins (Inoue and Hagerman, 1988).

Figure. 9: Structure de la rhodanine (Vermerris and Nicholson, 2006).

Le contenu de l’ampoule est dilué dans l’eau pour un volume final de 50 ml. 1 ml de l’échantillon est utilisé pour la technique. Dans cette fraction 1.5 ml de 0.667% (w/v) rhodanine/méthanol est ajouté. Après exactement 5 minutes, 1 ml de 0.5N KOH est ajoutée. L’eau est ensuite ajoutée après 2.5 minutes pour un volume final de 25 ml. L’absorbance est déterminée à 520 nm après 5 à 10 minutes d’incubation. Le standard est produit par la réaction de l’acide gallique dans 0.2N d’acide sulfurique avec la solution de rhodanine (Vermerris and Nicholson, 2006).

Hagerman et Butler ont soutenus que cette technique est plus appropriée que celle d’iodate de potassium pour la détermination des tannins hydrolysables, bien qu’il fût admis que la technique à la rhodanine est sensible à n’importe quel ester d’acide gallique, incluant ceux des composés non tanniques (Hagerman and Butler, 1989).

2.3.4.2.2. Les ellagitannins

27

Page 28: méthode d'étude des polyphenols

Les ellagitannins se caractérisent par la présence des esters d’ hexahydroxydiphénoyl (HHDP) avec un polyol tel que le glucose (figure.10). L’hydrolyse acide des ellagitannins libère des unités d’HHDP, qui formeront spontanément des acides ellagiques. La quantification des acides ellagiques reflèterait donc, la quantité des ellagtannins présente dans l’échantillon (Vermerris and Nicholson, 2006).

Figure. 10 : Unité d’hexahydroxydiphenoyl (HHDP) dans la configuration S et R (Vermerris and Nicholson, 2006).

L’oxydation à l’acide nitreux

La concentration de l’acide ellagique peut être déterminée via une réaction d’oxydation avec l’acide nitreux. Il existe deux méthodes qui ont été décrites respectivement par Bate-Smith, et par Wilson et Hagerman (Bate-Smith, 1977 ; Wilson and Hagerman, 1990).

Les ellagitannins peuvent être isolés des plantes par l’extraction de tissus lyophilisés et broyés dans de l’acide sulfurique 2N (5-10 mg de l’échantillon/ml d’acide), suivit par une congélation dans la neige carbonique/bain contenant du 2-propanol, fermé hermétiquement, puis chauffé à 100°C pendant 10 heures dans des ampoules à verre.

Après hydrolyse, les ampoules sont mises à température ambiante, ouvertes, refroidies dans un bain glacé pendant 10 minutes, puis filtrés a travers une membrane à filtre. Le reste sur le filtre (contenant l’acide ellagique) est ensuite lavé par plusieurs volumes d’un solvant de lavage bien frais (acétone/H2O/HC1 concentré 70:30:1 v/v/v) et séché à l’air.

Lorsque le reste est séché, l’échantillon et le filtrat sont transférés dans un tube à essai et dissous dans 10 ml de pyridine. Le matériel non dissous est enlevé pour une seconde filtration. Les échantillons sont filtrés à travers un filtre à fibre de verre soutenu par un deuxième filtre à verre pour éliminer les agrégats insolubles. Le filtrat final est analysé pour détecter l’acide ellagique (Wilson and Hagerman, 1990).

Scalbert et al, ont résumés la méthode de Bate-Smith: dans un tube fermé avec un bouchon à vise au téflon, 0.2 ml de l’extrait aqueux de plante (1 ml si n’est pas

28

Page 29: méthode d'étude des polyphenols

extrêmement concentré) sont mélangés à 1.8 ml de 1:1 méthanol/eau (1 ml de 9:1 méthanol/eau si l’échantillon n’est pas concentré) et 0.16 ml d’acide acétique aqueux 6% (v/v). Le nitrogène bouillonne dans la solution pendant quelque secondes, après lesquelles le tube est fermé et incubé à 25°C au bain marie pendant 100 minutes (Scalbert et al., 1989).

Un produit bleu se forme durant la réaction, lequel est quantifié en fonction de l’absorbance déterminé par le spectrophotomètre à 590 nm. La concentration des esters d’HHDP est exprimé par les équivalents du 4,6-hexahydroxydiphenoyl-glucose avec

εmol= 2169 l. mol-1.cm-1 (Vermerris and Nicholson, 2006).

La technique au NaNO2/HCl

Wilson et Hagerman ont décrit une méthode spectrophotométrique alternative pour quantifier l’acide ellagique. Cette technique possède trois avantages par rapport à celle développé par Bate-Smith (Wilson and Hagerman, 1990) :

1) Elle est insensible à l’acide gallique, qui peut surestimer la quantité des ellagitannins.2) Elle est plus sensible et beaucoup plus pratique, car l’oxygène n’interfère pas dans la

réaction.

Pour maximiser la formation du produit final de couleur rouge via la technique développée par Wilson et Hagerman, (l’échantillon contenant) l’acide ellagique est dissout dans un volume de 2.1 ml de la pyridine.

Un volume de 0.1 ml d’HCl concentré est ensuite ajouté, et le mélange est amené à 30°C. Après qu’un volume de 0.1 ml de NaNO2 1% (w/v) est ajouté, le mélange est rapidement

remuer, et l’absorbance est aussitôt après lu à 538 nm (A538, t0). Le produit rouge se décompose lorsque l’échantillon est incubé plus que le temps nécessaire. Après 36 minutes à 30°C, le produit rouge atteint le maximum de concentration, et l’absorbance

(A538, t36) est ainsi enregistrée (Wilson and Hagerman, 1990).

La concentration de l’acide ellagique dans l’échantillon est en fonction de la différence

entre A538, t0 et A538, t36. Les cuvettes doivent être en verre ou en quartz car la pyridine risque de dissoudre les cuvettes en plastique. La technique est également sensible à la présence des résidus de détergeant, ce qui nécessite l’utilisation de nouveau tube à verre à chaque analyse (Wilson and Hagerman, 1990).

Cette technique est basée sur la formation de NO+ électrophile (figure.11), qui peur réagir avec les résidus d’acides ellagique (A) sur deux sites, l’un via une réaction de substitution (B), et l’autre par une addition qui produit un nitrosyle dienone (C). Ce composé peut se décomposé pour former la quinine oxime (D), qui sous des conditions alcalines forme le produit final rouge (E).

Lorsque l’acide ellagique, phloroglucinol, acide hydroxycinnamique, et phénol sont sujet à ce type d’analyse, un produit marron-jaune apparaît. Ces derniers n’interfèrent

29

Page 30: méthode d'étude des polyphenols

aucunement dans la détection spectophotométrique de l’acide ellagique (Vermerris and Nicholson, 2006).

Figure.11 : Formation du chromophore rouge (E) par la réaction de l’acide ellagique avec l’électrophile NO+ (Vermerris and Nicholson, 2006).

2.3.2. Identification et caractérisation des composés phénoliques par les méthodes chromatographiques

30

Page 31: méthode d'étude des polyphenols

Dans la section précédente, plusieurs méthodes de dosage des composés phénoliques (des flavonoïdes et tannins) ont été décrites. En général, ces méthodes ne fournissent pas assez d’informations sur leur composition chimique spécifique. Afin de caractériser l’ensemble de ces composés phénoliques, une variété de méthodes de séparation et d’identification existe. Avant l’introduction de la chromatographie liquide à haute performance (CLHP), les séparations chromatographiques sur papier, sur couches minces ou sur colonnes avaient été largement développées pour l’analyse des composés phénoliques, ainsi que les séparations par électrophorèse sur papier (Markham and Bloor, 1998). Ces techniques gardent encore un certain intérêt pour réaliser une première approche qualitative concernant un matériel végétal inconnu. La combinaison de trois paramètres permet en effet de multiples séparations (Macheix et al., 2005) :

- d’abord la nature des supports chromatographiques (cellulose du des couches minces, silice, polyamide…),

- ensuite celle des solvants d’élution (pH, large gamme de polarité depuis l’eau très polaire jusqu’au benzène fortement apolaire)

- et enfin les propriétés chimiques des composés phénoliques eux même qui permettent leurs révélations caractéristiques sur les chromatogrammes.

En effet, parmi les multiples propriétés des composés phénoliques, certains ont des applications directes en chromatographie (Geiger, 1985) :

- d’une part celles du (ou des) groupement(s) phénolique(s) porté(s) par le cycle benzénique : caractère d’acide très faible conduisant à des phénolates, absorption et fluorescence en lumière ultraviolette permettant un repérage aisé sur les chromatogrammes, oxydation aisée et complexation avec des métaux (Fe3+, Al3+…), permettant également une bonne révélation (réactif de Neu, AlCl3, et nitrate d’argent…). Le réactif de Benedikt permet quant à lui de mettre en évidence les o-diphénols (composés présentant deux fonctions phénols adjacentes).

- D’une part celles liées au cycle benzénique, souvent associées à des réactions colorées permettant de visualiser les composés phénoliques : réaction de nitrosation en présence du nitrite de Na, formation de sel de diazonium, réaction de condensation avec les aldéhydes. Dans ce dernier cas, la vanilline en milieu chlorhydrique réagit avec le noyau A de certains flavanes pour donner des dérivés de couleur rouge utilisés pour la révélation ou le dosage de ces composés. Il en est de même du 4-diméthylaminocinnamaldéhyde (DMACA) qui donne une couleur bleu intense avec les flavanols simples et bleu verts avec les formes polymérisées.

2.3.2.1. Chromatographie sur couche mince (CCM)Malgré ces utilisations limitées comme méthode d’analyse depuis 1960, la chromatographie sur couche mince (CCM) reste encore en vogue dans l’analyse des composés phénoliques, et jouent un rôle distinct dans leur détermination au sein des

31

Page 32: méthode d'étude des polyphenols

produits naturels. Elle est particulièrement utile pour l’identification rapide des substances pharmacologiquement actives des extraits de plantes avant toute analyse détaillée par des techniques instrumentales, au raison de ses grandes capacités de traitement des échantillons (Stalikas, 2007).

La CCM repose principalement sur des phénomènes d'adsorption : la phase mobile contient un ou plusieurs solvants, qui progresse le long d'une phase stationnaire fixée sur une plaque de verre ou sur une feuille semi-rigide de matière plastique ou d'aluminium. Après que l'échantillon ait été déposé sur la phase stationnaire, les substances migrent à une vitesse qui dépend de leur nature et de celle du solvant (Vermerris and Nicholson, 2006).

Les principaux éléments d'une séparation chromatographique sur couche mince sont:

• la cuve chromatographique : un récipient habituellement en verre, de forme variable, fermé par un couvercle étanche.• la phase stationnaire : une couche d'environ 0,25 mm de gel de silice ou d'un autre adsorbant est fixée sur une plaque de verre à l'aide d'un liant comme le sulfate de calcium hydraté, l'amidon ou un polymère organique.• l'échantillon : environ un microlitre (μl) de solution diluée (2 à 5 %) du mélange à analyser, déposé en un point repère situé au-dessus de la surface de l'éluant.• l'éluant : un solvant pur ou un mélange : il migre lentement le long de la plaque en entraînant les composants de l'échantillon.

La valeur de Rf (retarding factor) est le rapport entre la distance de migration des composes et celle du solvant de migration. Ce Rf est directement détectable si les différentes substances isolées sont colorées naturellement, ou à l’aide de révélateurs afin de les transformer en taches colorées. Les Rf des substances non identifiée sont comparés avec ceux de composés de référence. Cependant, deux substances différentes peuvent avoir le même Rf, une caractérisation plus poussée est nécessaire afin de les identifier, notamment par une analyse spectrométrie de masse.

La CCM permet un contrôle aisé et rapide de la pureté d'un composé organique lorsque les conditions opératoires sont connues, Si l'analyse, réalisée avec divers solvants et différents adsorbants, révèle la présence d'une seule substance, on peut alors considérer que cet échantillon est probablement pur. De plus, étant donné que la chromatographie sur couche mince indique le nombre de composants d'un mélange, on peut l'employer pour suivre la progression d'une réaction. La chromatographie sur couche mince est également la technique habituellement employée pour rechercher le meilleur solvant, avant d'entreprendre une séparation par chromatographie sur colonne.

Dans la plupart des cas, CCM des composés phénoliques utilise de la silice comme phase stationnaire et la plaque est développée avec une combinaison du 2-(diphénylboryloxy) éthylamine et polyéthylène glycol ou avec du AlCl3. La détection est essentiellement

32

Page 33: méthode d'étude des polyphenols

accomplie en utilisant la lumière UV à 350-365 nm ou 250–260 nm (Macheix et al., 2005).

Caractérisation des flavonoïdes Si plusieurs réactions colorées permettent de mettre en évidence génines et hétérosides dans les extraits bruts, l’étude préliminaire de ces extraits par une analyse en CCM peut se faire (Bruneton, 1993):

- Directement : chalcones et aurones sont habituellement directement visibles sur les chromatogrammes. En présence de vapeurs d’ammoniac les taches passent à l’orange ou rouge ;

- Par examen en lumière ultraviolette avant et après pulvérisation de trichlorure d’aluminium, avant et après exposition aux vapeurs d’ammoniac : la nature et les changements de fluorescence observés donnent des renseignements utiles sur le type de flavonoïde présent ;

- Après pulvérisation d’une solution à 1% de l’ester du 2-aminoéthanol et de l’acide diphénylborique (Naturstoff Reagenz A), suivie d’un examen en lumière ultraviolette puis dans le visible (on peut améliorer la sensibilité en pulvérisant en plus une solution méthanolique à 5% de polyéthlèneglycol 400) ;

- Après pulvérisation du chlorure ferrique, d’anisaldéhyde, d’acide sulfanilique diazoté… ou d’autres réactifs généraux des phénols ;

- Par utilisation de réactions ou de propriétés plus en moins spécifiques ;

Réaction avec la poudre de magnésium en milieu chlorhydrique (flavanone et dihydroflavonols) ou avec le zinc dans le même milieu (flavonoïdes stricto sensu),

Réaction des dihydrochalcones, après action du borohydrure de sodium, avec la 2,3-dichloro-5,6-dicyano-1,4-benzoquinone.

Caractérisation des tanninsEn CCM, les tannins sont révélés par examens en fluorescence en UV et par plusieurs réactifs. Avec les sels ferriques les tannins galliques et ellagiques donnent des colorations et des précipités bleu-noir et les tannins condensés des précipités brun verdâtres.

33

Page 34: méthode d'étude des polyphenols

Les tannins galliques donnent une coloration rose avec l’iodate de potassium (l’acide gallique libre est coloré en orange par ce réactif). Les tannins ellagiques sont colorés par l’acide nitreux en milieu acétique (d’abord rose, la coloration vire au pourpre puis en bleu) et les tannins sont colorés en rouge par la vanilline chlorhydrique (Bruneton, 1993).

2.3.2.2. Les séparations par CHLP et par électrophorèse capillaire et les couplages CHLP/UV et CHLP/spectrométrie de masse

La chromatographie liquide à haute performance (CHLP) est, de très loin, la technique la plus performante et la plus utilisée pour la séparation et le dosage des composé phénoliques comme en témoignent les excellentes séparations déjà obtenues (figure.13) il y’a plus de quarante ans (Wulf and Nagel, 1978 ; Moller and Harrmann, 1982). Elle ne demande qu’une faible quantité d’échantillon végétal, et permet de combiner en une seule opération rapide et reproductible les analyses qualitatives et quantitatives d’un extrait phénolique complexe, ce qui a permis l’étude de matériaux végétaux très variés (Pietta et al., 2003 ; Sakakibara et al., 2003).

Les séparations sont basées sur les polarités respectives des phases stationnaires utilisées, du solvant d’élution et des composés phénoliques concernés, en particulier leur degré d’hydroxylation, de glycosylation et de méthylation. A partir de ces principes généraux, deux approches analytiques sont possibles (Macheix et al., 2005) :

- D’une part, la chromatographie de composés phénoliques non polaires sur une phase stationnaire de silice avec élution par un solvant apolaire de composition constante (par exemple le mélange héptane-éthanol),

- d’autre part, ce qui est le plus utilisé dans le monde des composés phénoliques, la fixation de ces composés sur une phase dite inversée (par exemple de la silice sur la quelle on a préalablement greffé des chaines aliphatiques apolaires) suivie de leur élution par un mélange de solvants (fréquemment eau/acide acétique/acétonitrile ou eau/méthanol) dont on fait varier la composition donc la polarité avec le temps de l’analyse.

Les composés élués sont généralement repérés en sortie de colonne par leur absorption en lumière visible pour les anthocyanes (vers 520nm) et en ultraviolet (280, 325 ou 360nm) pour tous les autres phénols ; ils apparaissent alors sous forme de pics sur les chromatogrammes (figure.13).

La surface de chacun des pics est proportionnelle à la concentration du composé, qui est alors dosé à la longueur d’onde choisie pour l’analyse par référence à des composés témoins obtenus commercialement ou à partir d’analyses antérieures.

Grace aux progrès de l’informatique et de la microélectronique, les détecteurs dits à barrette de diode permettent d’obtenir simultanément des réponses pour toutes les longueurs d’onde du spectre, ce qui conduit à une première étape de caractérisation de chacun des composés séparés, en comparant leurs spectres d’absorption avec celui de témoins (Macheix et al., 2005).

34

Page 35: méthode d'étude des polyphenols

Figure.13 : Séparation des anthocyanes de raisins par chromatographie liquide à haute performance :Les pics 1 à 4 correspondent respectivement aux 3-glucosides de la delphidine, de la pétunidine, de la péonidine et de la malvidine. Les pics 5 et 6 sont ceux de la malvidine 3-glucoside acylée avec l’acide acétique et l’acide p-coumarique respectivement (Wulf and Nagel, 1978).

Le degré initial de purification de l’extrait végétal, les conditions chromatographiques elles-mêmes (figure.13), et le type de détection utilisé en sortie de colonne orientent fréquemment une analyse CLHP vers une classe de composé phénolique (acides phénolique, flavonols, anthocyanes, coumarines…). Cependant, les progrès réalisés dans les différents domaines permettent maintenant d’envisager une analyse simultanée de la plupart des composés présents dans un extrait végétal (Sakakibara et al., 2003).

A coté de la CLHP, une autre technique de séparation performante des composés phénoliques est l’électrophorèse capillaire (EC) développée depuis une quinzaine d’années pour ce type de molécules (Tomas-Barberan, 1995), et dont la sensibilité est dix fois supérieure à celle de la CLHP. La séparation est dans ce cas influencée par de nombreux paramètres dont la taille de la molécule, le nombre, la position, et le pK des groupement hydroxyles, le degré et la nature des glycosylation, le pH et la concentration

35

Page 36: méthode d'étude des polyphenols

du tampon d’élution, etc. Elle conduit donc à des séparations différentes de celles obtenus par CHLP et trouve de très belles applications dans la séparation des nombreux glycosides des flavonoïdes (Markham and Bloor, 1998).

En plus de la qualité des séparations obtenues, un des intérêts majeurs de la séparation des polyphénols par CHLP ou EC concerne l’automatisation possible des analyses, qui peuvent être couplé en série, d’une part avec la détection et le dosage de chacun des composés en UV, et d'autre part avec la spectrométrie de masse qui donne des informations sur leur structure chimique. Ces approches peuvent maintenant réalisées en routine pour la séparation des acides phénoliques, des flavonoïdes et de la plupart des autres composés phénoliques (Sakakibara et al., 2003 ; Pietta et al., 2003 ; Swinny et al., 2003).

Conclusion

Bien que les grandes lignes concernant la nature des principales classes de composés

phénoliques et les voies majeurs de biosynthèse aient été connues dès la fin des années

36

Page 37: méthode d'étude des polyphenols

1960-1970, des avancés spectaculaires ont été obtenues depuis cette période grâce à

l’amélioration des techniques dans des domaines variés.

Les progrès des techniques analytiques et des approches moléculaires ont aujourd’hui

permis de confirmer et de préciser la diversité et l’importance de ces composés

phénoliques végétales. Ils constituent des éléments essentiels dans les interactions des

plantes avec leurs environnements biologiques et physique (relations avec les bactéries,

les champignons, les insectes, résistance aux UV), mais participent aussi fortement aux

critères de qualité (couleur, astringence, amertume…) qui orientent le choix de l’homme

dans la consommation et l’utilisation de végétaux et des produits qui en dérivent par

transformation.

La reconnaissance des polyphénols comme antioxydants mais également anti-

inflammatoires et antimicrobiens naturels est maintenant bien acquise, et elle est pour une

part à l’origine du regain d’intérêt que l’on porte à ces composés dans le domaine de la

nutrition et de la pharmacologie. Des études remarquables ont déjà été obtenus pour

certains composés mais beaucoup de travail reste cependant à faire dans ce domaine car

les approches sont souvent restées globales en ne prenant compte que l’ensemble des

composés présents dans un extrait ou dans un aliment issu du monde végétal.

Il sera essentiel à l’avenir de préciser la composition qualitative et quantitative de chacun

des composés phénoliques, afin de les tester individuellement. Cela doit permettre

d’abord de comprendre le mode d’action de chacun d’eux, et ensuite d’évaluer les

éventuels effets de synergie ou d’antagonisme, ainsi que leur biodisponibilité.

Références bibliographiques

Bate-Smith EC ; 1977. Astringent tannins of Acer species. Phytochemistry 16 : 1421-1426.

37

Page 38: méthode d'étude des polyphenols

Brouillard R, Figueiredo P, Elhabiri M, and Dangles O ; 1997. Molecular interactions of phenolic compounds in relation to the colour of fruit and vegetables. Phytochemistery of Fruit and Vegetables, Clarendon Press, Oxford p29-49.

Bruneton J ; 1993. Pharmacognosie phytochimie plantes médicinales. TEC et DOC, Lavoisier p211-338.

Chebil L, Humeau C, Falcimaigne A, Engasser JM, and Ghoul M ; 2006. Enzymatic acylation of flavonoids. Process Biochemistry 41: 2237–2251

Folin O and Denis W ; 1915. A colorimetric method for the determination of phenols (and phenol derivatives) in urine. J Biol Chem 22 : 305-308.

Folin O, and Ciocalteu V ; 1927. Tyrosine and tryptophan determinations in proteins. J Biol Chem 73 : 627-650.

Geirer H ; 1985. The identification of phenolic compound by colour reactions. In : the biochemistry of plants phenolics. Lea PJ eds, Claredon press, Oxford p45-56.

Gonzalez E, Fougerousse A, and Brouillard R ; 2001. Two diacylated malvidin glycosides from Petunia Hybrida flowers. Phytochemistry 58 : 1257-1262.

Grotewold E, 2006. The Science of Flavonoids. Springer p1- 269.

Hagerman A, and Butler LG ; 1989. Choosing appropriate methods and standards for assaying tannin. J Chem Ecol 15 : 1795-1810.

Harborne JB ; 1988. The flavonoids advanced in reaserche since 1980, Chapman and Hall, New York p621.

Harborne JB ; 1989. Plant phenolics. Methods in plant biochemistry. Academic press, London 1 : 522.

Haslam E ; 1965. Galloyl esrers in the Aceraceae. Phytochemistry 4 : 495-498.

Heim EK, Tagliaferro AR, and Bobilya DJ ; 2002. Flavonoid antioxidants : chemistry, metabolism and structure-activity relationships. J Nutr Bioch 13 : 572-584.

Hendrich AB ; 2006. Flavonoid-membrane interactions : possible consequence for biological effects of some polyphenolic compounds. Acta pharma Sinica 27 : 27-40.

Huang DJ, Lin CD, Chen HJ, and Lin YH ; 2004. Antioxidant and antiprolifirative activities of sweet potato (Ipomoea batatas) constituants. Bot Bull Acad Sin 45 : 179-186.

Inoue KH, and Hagerman A ; 1988. Determination of gallotannin with rhodanine. Anal Biochem 169 : 363-369.

Lamaison JLC and Carnet A ; 1990. Teneurs en principaux flavoinoides des fleurs de Crataegeus mongyna Jacq et de Crataegeus laevigata (Poiret D.C) en fonction de la végétation. Pharm Acta Helv 65 : 315-320.

38

Page 39: méthode d'étude des polyphenols

Macheix JJ, Christian JA, and Allemand J ; 2005. Les composés phénoliques des végétaux. Un exemple de métabolites secondaires d’importance économique. Collection biologie, presses polytechniques et universitaires, Romandes p1-192.

Markham K, and Bloor S ; 1998. Analysis and identification of flavonoids in praxtice. In : Flavonoids in health and disease. Rice-Evans C, Packer L eds, New York p1-34.

Moller B, and Herrmann K ; 1982. Analysis of quinic acid esters of hydroxycinnamic acids in plant material by caplillary gas chromatography and high performance liquid chromatography. J Chromatogr 241 : 371-379.

Pietta P, Gardana C, and Pietta A ; 2003. Flavonoids in herbs. In : Flavonoids in health and disease. Rice-Evans C, Packer L eds, New York p43-69.

Quideau S ; 2009. Chemistry and Biology of an underestimated class of bioactive plant polyphenols Ellagitannins. World Scientific Publishing p1-367.

Sakakibara H, Honda Y, Nakagawa S, Ashida H, and Kanazawa K ; 2003. Simultaneous determination of all polyphenols in vegetables, fruit, and teas. J Agric Food Chem 51: 571-581.

Scalbert A, Monties B, and Janin G ; 1989. Tannins in wood: comparison of different estimation methods. J Agric Food Chem 37 : 1324-1329.

Stalikas CD ; 2007. Extraction, separation, and detection methods for phenolic acids and flavonoids. J Sep Sci 30 : 3268 – 3295.

Swinny E, and Markham K ; 2003. Application of flavonoid analysis and identification techniques: isoflavones (phytoestrogens) and 3-deoxyanthocyanins. In: Flavonoids in health and disease. Rice-Evans C, Packer L eds, New York p97-122.

Tomas-Barberan FA ; 1995. Capillary electrophoresis: a new technique in the analysis of plant secondary metabolites. Phytochem Anal 6 : 177-192.

Vermerris W and Nicholson R ; 2006. Phenolic compound biochemistry. Springer p7-15.

Wilson TC, and Hagerman AE ; 1990. Quantitative determination of ellagic acid. J Agric Food Chem 38 : 1678-1683.

Wulf LW, and Nagel CW ; 1978. High pressure liquid chromatographic separation of anthocyanins of Vitis vinifera. Ann J Enol Vitic 29 : 42-49.

39