17
LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES STRUCTURALES DE LA DESCRIPTION ZOOLOGIQUE DANS L'HISTOIRE DE LA NATURE DES OYSEAUX DE PIERRE BELON DU MANS * Philippe GLARDON Pierre Beloll est connu dans I'histoire de la zoologie comme un precurseur des sciences na- turelles modemes. Cet article .'Iepropose decor- riger ce point de vue partial et restrictif, en alUllysant en prulvndeur Ie texte de Be/on, dans son contexte culturel. L' examen de la comparai- son, mail essentiel de la description zoologique d' alors, permet de mettre en evidence dans "L' Histoire de la flature des Oyseaux" une per- ception de la nature propre au XVle siec.:le,qui trouve ses racines chez Aristote. Le monstre joue un rr51edeterminant dans ce qui apparaft desor- mais comme un systeme nature! a part entiere : .'I' il ne releve pas de la teratologie, son caractere extraordinaire provient du fait qu' il .'Iesitue en marge des animaux communs en empruntant des caraeteres sinutltanement aux erres aeriens, aquatiques au terrestres. En cela, il fonetionne eomme une articulation vitale elllre les grandes categories aristotelicit·nnes des erres vivants, et sont garants de I'unite du monde naturel. Summary Comparisons and monsters : stn/ctural patterns of the zoological description in L 'His- toire de la nature des oyseaux by Pierre Belon duMans. Pierre Beloll is known as a precursor ofmo- dern natural sciences. This article aims at cor- recting this partial and restrictive point of view, analysing in depth Belon' .'I text, within its cultu- ral hackground. This exam of comparison, mainst instrument to zoological description until J 7th century, authorizes to show an original per- ception of nature, which finds its roots hy Aris- tote. Monster plays an essential part in this complete natural system: ifit does not helong to teratology, monster is remarkahle through its marginal situation in the family of heings, as it simultaneously harrows characters from aqua- tic, terrestrial or aerial animals. So monster ap- pears as a vital articulation hetween large aristotelian categories, assuring unity of natural world. Mots cles Renaissance, oiseau, monstre, comparai- son, fJ'Iitaphore. Key words Renaissance, Bird, Monster, Compari- son, Metaphor. Et partout des signes, ct. ~a et Iii, des taches plus etranges encore que des signes ... (Marguerite Yourcenar, L' Oeuvre au /Ioir)

LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

  • Upload
    others

  • View
    15

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES :FIGURES STRUCTURALES DE LA DESCRIPTIONZOOLOGIQUE DANS L'HISTOIRE DE LA NATUREDES OYSEAUXDE PIERRE BELON DU MANS

*Philippe GLARDON

Pierre Beloll est connu dans I'histoire de lazoologie comme un precurseur des sciences na-turelles modemes. Cet article .'Iepropose de cor-riger ce point de vue partial et restrictif, enalUllysant en prulvndeur Ie texte de Be/on, dansson contexte culturel. L' examen de la comparai-son, mail essentiel de la description zoologiqued' alors, permet de mettre en evidence dans"L' Histoire de la flature des Oyseaux" une per-ception de la nature propre au XVle siec.:le,quitrouve ses racines chez Aristote. Le monstre joueun rr51edeterminant dans ce qui apparaft desor-mais comme un systeme nature! a part entiere :.'I'il ne releve pas de la teratologie, son caractereextraordinaire provient du fait qu' il .'Iesitue enmarge des animaux communs en empruntant descaraeteres sinutltanement aux erres aeriens,aquatiques au terrestres. En cela, il fonetionneeomme une articulation vitale elllre les grandescategories aristotelicit·nnes des erres vivants, etsont garants de I'unite du monde naturel.

SummaryComparisons and monsters : stn/ctural

patterns of the zoological description in L 'His-toire de la nature des oyseaux by Pierre BelonduMans.

Pierre Beloll is known as aprecursor ofmo-dern natural sciences. This article aims at cor-recting this partial and restrictive point of view,analysing in depth Belon' .'I text, within its cultu-ral hackground. This exam of comparison,mainst instrument to zoological description untilJ 7th century, authorizes to show an original per-ception of nature, which finds its roots hy Aris-tote. Monster plays an essential part in thiscomplete natural system: ifit does not helong toteratology, monster is remarkahle through itsmarginal situation in the family of heings, as itsimultaneously harrows characters from aqua-tic, terrestrial or aerial animals. So monster ap-pears as a vital articulation hetween largearistotelian categories, assuring unity of naturalworld.

Mots clesRenaissance, oiseau, monstre, comparai-

son, fJ'Iitaphore.

Key wordsRenaissance, Bird, Monster, Compari-

son, Metaphor.

Et partout des signes, ct. ~a et Iii, des tachesplus etranges encore que des signes ...

(Marguerite Yourcenar, L' Oeuvre au /Ioir)

Page 2: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

PomaiEf de fa T adorne eJPece de C4na,d.

Chaque ornithologue conna]'t Ie nomde Pierre Belon, que ce soit par Ie truche-ment du canard qui lui est d6di6, Ie Ta-dorne de Belon, (Tadorna ladorna, fig. 1)ou parce qu'i! a entendu parler de safameuse Histoire de fa nature des Oyseaux,volontiers consideree comme Ie point dedepart de l'ornithologie moderne. En depitde cette notoriete, ou peut-etre a caused'elle, I 'oeuvre me me de Belon est quel-que peu tombee dans l'oubli, comme sison statut "scientifique" avait dissuade lescritiques litteraires et les historiens desmentalites de se pencher sur elle. C'estcette lacune que nous voudrions tenter decom bIer, en mettant en valeur l'existenced 'une structure profonde du texte de Belon,symbolisant I 'architecture du monde telleque Ie con~oit la cosmologie de la Renais-sance.

II ne s' agit done pas de faire dans cetarticle Ie bilan de la "zoologie" du XVle

siecle, .discipline qui, de toute maniere,n'existe pas alors en tant que teUe. II nes'agit pas davantage d'une etude compa-rative entre naturalistes de cette periode,programme bien trop ambitieux dans leslimites de cet article, encore qu'un re-cours a !'inevitable Gesner ou a d'autresencore nous ait parfois paru necessaire.Nous avons prefere nous limiter a deuxfacettes de I 'ouvrage ornithologique deBelon, propres tant a nous eclairer sur sonapproche du monde vivant qu'a evoquerla perception de la nature au XVle sieclede maniere plus large. Mais ne poursui-vons pas sans avoir rappele en quelquestraits la vie du naturaliste fran~ais.

Pierre Belon est ne vers 1517, pres duMans. II fit un apprentissage d'apothi-caire, et passa en cette qualite au servicede Rene du Bellay, frere du poete et eve-que du Mans, puis fut engage commepharmacien (c'est-a-dire avant tout

Page 3: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

comme herboriste) par Ie puissant Cardi-nal Fran~ois de Toumon, alors a la tete dela diplomatie de Fran~ois fer. Grace 11ceteminent protecteur, il put faire plusieursvoyages diplomatiques en Allemagne, enItalie et en Suisse. En 1546, il eut lachance d' accompagner en q ualite de natu-raliste une ambassade chargee de retablirIe contact avec Ie sultan turc, brouilleavec Ie roi de France, Cela lui permit,malgre les pirates mediterraneens, lestempetes et les pillards du desert, de visi-ter les lies grecques, la Turquie, l'Egypte,les lieux saints de la Palestine et la Syrie,A son retour, il publia Ie recit de son peri-pie: Les observations de plusieurs singu-larirez ... (Belon, 1553) et divers traitesd'histoire naturelle et d'agriculture. IImourut assassine au Bois de Boulognedans des circonstances mystcrieuses en1564, peut-etre victime de huguenots, caril s 'etait fait Ie farouche dHenseur de lacause catholique lors des guerres de reli-gion.

II n 'est peut-etre pas inutile non plusde decrire brievement notre source. Les382 pages de L'llistoire de la nature desOyseaux (1555) sont reparties en septlivres. Le premier resume les conceptsgeneraux de I 'histoire naturelle et tout ceque 1'on conna]t de I 'oiseau : anatomie,chant, comportement, reproduction, gas-tronomic, usage medical ... Les livres II aVII presl:ntent, apres une courtc explica-tion dediee au roi l-Ienri II, quelque deuxcents especes en cent quatre-vingt-deuxchapitres selon un faisceau complexe decriteres, dont essentiellement I 'habitat,les moeurs, et la taille (voir tab. 1, qui citedans l'ordre des livres un certain nombred 'especes decrites),

L 'etude de la comparaison puis desmonstres en tant qu'elements constitutifsdu discours zoologique seiziemiste devraitpermettre de mieux situer la valeur desconcepts de " genre", d'" espece " et de" signe ", trop souvent assimih~s a nospropres categories epistemologiques. OnIe sait, la nature est per~ue a la Renais-sance comme un univers de symboles s igni-fiants, ou chaque objet est porteur d'unsens secret, d'un message du createur, etest en harmonie, de pres ou de loin, avectous les autres. De la Ie fameux concept duLiber mundi, dont Ie langage participe dumystere divin et reste cache aux hommesdepuis l'episode de la tour de Babel.

Pour BeJon aussi, il est legitime que laconnaissance soit incompatible avec l'ex-hausti vi te :

L 'homme ( ... ) qui a beaucoup prati-que de bonnes choses, se proposeun arrest pour la certitude sur la co-gnoissance des choses naturelles(HO l, 21,66)(1).

Pour lu i, la di versi te des etres est lamanifestation intangible de la puissancedivine, a laquelle nous ne saurions parve-nil' :

Parq uoy dirons Iibremen t selon no-tre jugement qu'iJ est hors de Japuissance des hommes de trou vel' apeu pres plus de cinq cents especesde poisson ••, plus de trois centssortes d'oyseaux, et plus de troiscents bestes 11quatre pieds, et plusde quatre cents diversitez de ser-pents, et pi us de trois cents chosespropres a manger, issues des herbesou des arbres (Joc. cit,).

(I) Voici comment nous citerons Belon : a part Ie "v" retabli pour Ie "u" par exemple dans "Mauuis", nous respecterons}'orthographe originale. Sculs deux caraetcres ont etc ecartes : Ie .'&" ct Ie tilde "-", eomlTIe dans "sciecc".L'abreviation "HO" renvoic a Bclon (1555), "Obs." a Bclon (1553). Pour L'Histo/fc de fa flafUre des Oyseal4x,Ie nombre en chifTres romains indiLjue Ie livre, les deux nombres c·n chinres arabes renvoient au chapitre ct a lapage concernes. L'abreviation ibid. renvoie a une page differente du mcme chapitre que lacilation precCdente,foc.cit. ala mCl11e page du mGme ehapitre.

Page 4: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

C'est pourquoi son approche descrip-tive de la nature, loin de se definir commeune grille totalisante, visant a passer toutetre au crible taxonomique, est avant toutcontemplative; I'incompletude explicitede son ouvrage se revele en dernier lieuprofondement metaphorique de 1'incapa-cite humaine a dire la creation dans sonentier.

L'element cle de la description zoolo-gique dans L' Histoire de la nature desOyseaux est donc la comparaison, queI' on peut separer en deux groupes gene-raux. Le premier type est la comparaisonexterne a la nature, dom la reference n'ap-partient pas au regne animal. Parfois plai-sante, elle est choisie dan" un registre fortsimple: Ie "Morillon" (Fuligule morillon,Aythya fuligula) a "Ie bec entaille par deprofondes coches a la maniere d 'une sie(HO III, 10, 165). Le "Caniard" (Goelandmarin juvenile, I.arus marinu.l') "se sert"de ses pattes "pour avirons" (HO III, 12,168). Le "Bievre" (Harle bievre, Mergusmerganser) a dans I'estomac une cavitequi contient un "gros os inegal, en sortequ'on diroit, que comme on enferme unechandelle en la lanterne contre les injuresdu vent, que tout ainsi nature luy a faitcelIe cavite pour la conservation de l'aerentour ses poulmons ... " (HO III, R, 164).

On peut dire que Belon reste fidele alavolonte afficMe dans Les observations ...de n'user ni d'''artifice'' ni d"eleganced'oraison", sinon d'une "forme simple"(Obs., Epistre au Cardinal, 5e f.). Onrcmarquera surtout que toutes ces compa-raisons se rapportent aux domaines lespI us utili taires de la vie quotidienne.Cette uniformite est sans doute Ie fruitd'une strategie metaphorique, a mettre enrelation avec la conception finaliste de

la nature aristotelicienne, intacte a la Re-naissance :

Nature benigne et sage, n 'ayantrien omis au devoir de sa charge surIe proportionnement des membresde touts animaux, fit choses mer-veilleuses es membres de ce Plon-geon (Grebe huppe, Podicepscristatus) : car comme les Hiron-delles nommees Apodes (Martinetnoir, Apus apus), qui volent sans finpour prendre leur pasture en I' aer,n'ont que faire de sr;avoir cheminersur terre: aussi ce Plongeon estantaquatique, (oo.) a ete doue de mem-bres agiles pour l'eau, mais man-ques et imparfaicts sur la terre (HOIII, 23, 178)(2).

Suivant la terminologie d'Aristote,Belon nous explique que chaque oiseausuit son "naturel", grace aux instrumentsqui lui sont impartis :

Chascune substance animee (est)subjecte a I'execution d'un certaindevoir. ( ... ). L 'execution de ce de-voir qu'entendons es choses anl-mees, je dy plantes et animaux, estque chascune estant jouissanted'une constitution et perfectionparticuliere et propre a elle seuleauroit necessairement a employer lesfaicts, selon la nature de la mixtionqui l' a ainsi composee, sans sortirhors de la temperature des elementsqui luy sont convenables (HO Epis-tre au Lecteur, f. aiiij vo).

La "constitution", la "mixtion", termestres aristoteliciens, concernent la "fabri-cation interieure", que l'on se garderad'interpreter dans un sens cartesien avantla lettre. En fait, pour Ie philosophe grec,la nature "fabrique" chaque espece a par-

Page 5: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

tir d'un nomhre limite d"'instruments"parfaits, diversement attribues. C'estl'admiration pure qui perce ici, devantI' "excellence" de I' ouvrage naturel et la"perfection d'iceluy" (loe. dt.). Cela nousamene au second type de comparaisons, Ieplus important : si I 'espece est definiecomme un assemblage d'instruments for-mant un tout coherent, la comparaisoninterne, dont la reference appartient tou-jours au monde animal, permettra de faireressortir ce qui est propre a chaque espece,et d 'etablir cc qui la rattache aux autres.Le simple recensement de toutes lescomparaisons (tab.1) montre que chacundes six groupes (correspond ant aux livresII a VII) se trouve redessine par descomparaisons entre ses propres membres,a peu pres dans Ie meme ordre. Nean-moins les comparaisons entre les groupessont loin d'etre rares ; le tableau donneune idee visueJle de leur repartition: rapaceset oiseaux aquatiques sont plutot isol6sdes autres a la lecture horizontale, qui in-dique pour un groupe donne les empruntsque les autres y font. Ainsi pour Ie livre II,a la hauteur du "Gcrfault", la coche de lacolonne IV correspond a une comparai-son d'un oiscau du livre IV, Ie Courliscendre (Numenius arquata), avec ce rapace: "les plumes de dessus ses aelles sontpresque semblables a ceUes d'un Gerfault"(HO IV, 12,204). Ces coches sont peunombreuses; cela signifie que rapaceset oiseaux aquatiques sont surtoutcompares entre eux, dans leur grouperespectif. Ceci est capital: la classifica-tion de Belon depend done d'une hierar-chie, entre deux groupes qui restentplutat impermeables a leurs sub-ordonnes,(sauf en ce qui concerne les moinsnobles des oiseaux de proie, sOil lespies-gricches, Ie Coucou gris (Cuculuscanorl-tS) et les rapaces nocturnes) et

cinq groupes secondaires pI utot definis encreux, comme etant "moins" ou n 'etant"pas" ce que sont les deux groupes detete, no us y reviendrons. Plus on des-cend dans la hienlrchie, plus les em-prunts comparatifs se font frequentsentre les groupes. On observe entre euxune sorte de contagion, comme si chaqueespece n 'etait plus refermee sur sonidentite propre, et on tend vel's l'indis-ti nction interspeci fig ue et in tergeneriq ue.Voici ce que dit Belon des "oysillons",c 'est-a-dire des oiseaux de petite tailledecrits dans Ie dcrnicr livre;

Qui coucheroit Ie portrait d 'un oy-sillon, pourroit facilemcnt Ie fairetenir a trente atltres, moyennantqu'on lui adjoustast les couleurspropres : car touts ont quasi lesjambes, ongles, yeux, bees etplumes de mesme (HO Epistre auLecteur, f. aiiij 1'0).

Des comparaisons faisant appel ad' au-tres animaux que les oiseaux peuventmeme apparaitre dans Ie bas de I' echellehierarchique : la "poule de Guinee" (Pin-tade commune, Numida meleagris) a surIe front une "callosite" semblable a ceUede la "Giraffe" (HO V, 9,247-8). Et quiverrait la patte d'une "Perdrix blanche"(Lagopede alpin, Lagopus mutus, enlivree 'l!vernale (3) " ... diroit proprementque c'est Ie pied d'un lievre" (HO V, 17,259, d'ou son nom). Voici qui nous faitlitteralement mettre Ie doigt sur ce criterede preseance des deux premiers groupes :les rapaces, nous dit Belon, sont "nobles","de nature plus aeree". Et qui en effetdomine mieux Ie ciel (ou I 'air) attribueaux oiseaux 11 la creation du moncle que lesrapaces (4) ? II en va de meme pour lesoiseaux aquatiques, moins idealement

(3) Belan dcerit Ie Lagapede alpin en plumage d'ctc eomme une autre espece, Ie "Francolin" (HO V. 6, 240-42).(4) Aldrovandi (1599. p. 17). qui s'inspire tres largement de Befon, rcspecte la prima ute accordce aux rapaees. par

exemplc sur Ie Paon bleu (Pavo cristatlls) :(Pavo) cum Aquila lamen de dignitatis nobililatis loco certare non potest : praesertim, si volatus sub limitatcm, cor-poris rohur vim. audacicmq (. .. ) Aquila cnim rcliquis omnibus volal altius, atka ut coelum pctcrc. illudq.

Page 6: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

adequats a leur element de predilectionque les poissons, mais tout de meme pour-vus d'un "pied plat" et d'une chairaqueuse, d'ailleurs souvent malsaine, se-Ion notre naturaliste. L' oiseau, et tout etrevivant, est impregne, constitue de l'ele-ment, air, eau ou terre ou il vit. De la cesintrusions de "marques" propres aux ani-maux terrestres chez les oiseaux "de cam-pagne" du livre V, qui eprouvent de plusune irrepressible attirance pour leur ele-ment de predilection:

Tout ainsi que ceux (les oiseaux)qui hantent es eaux se nettoyent lesplumes en se lavant et chassent lavermine par I 'eau, aussi les terres-tres se vaultrent en la pouldre pourchasser les pouls et la vermined' entour eux (HO V, au Roy, 230).

On se meprendrait ainsi a ne conside-rer la comparaison dans la descriptionzoologique que comme une figure destyle. Son usage abondant, au contraire,es 1 l' ex pression di recte d' une W el tan-schauung propre au XVle siecle, selonlaquelle Ie langage, d'origine divine, a unlien consubstantiel avec les choses et lesetres qu'il ctesigne depuis la creation dumonde.

Faire une comparaison est une opera-tion ontologique qui vise a reconstituermetaphoriq uement Ie reel. L 'harmonie dela nature, fruit du genie divin, apparu1'tdans I 'ordonnance du discours qui, ensuperposant les "indices prospectifs etretrospectifs" selon l'expression dePhilippe Hamon (1981, 112), reproduitlitteralement la coherence du monde. Ondirait, dans Ie jargon linguistique, que lanature est dCpositaire d'un "metalangage"

sacre, dans lequel Ie naturaliste vientdechiffrer la structure et la justificationdu systeme qu 'il propose (5).

Qu' en est-il au niveau de I' espece? Engeneral, Belon commence par demontrerIe bien-fonde de l'attribution d'un oiseaua son groupe, par une ou plusieurs compa-raisons qui l'y incorporent. Sa taille estevaluee entre deux especes proches : la"Cane de mer" (Bernache cravant, Brantabernicla) a une "corpulence moyenneentre une aye et une Cane" (HO Ill, 9,166). On remarque ensuite, specialementsi I 'espece est peu connue ou si son appar-tenance a tel groupe ne semble pa<; mani-feste, un redoublement de comparaisons,comme pour mieux I' enserrer dans lesmailles de la classification. C'est Ie caspour les bernaches, hotes hivernaux dulittoral fran~ais :

Leur bee est longuet, comme celuyd'un Onocrotalus (Pelican sp.) ouBievre (Harle bievre, Mergus mer-ganser), c'est a dire qu'i! n'estlarge comme en I 'Oye (Oie cen-dree, Anser anser), Cane (Canardcolvert, Anas platyrhynchos?)(6)ou Morillon (Fuligule morillon, Ay-thya fuligula), ains pointu commeen la Piette (Harle piette, Mergusalhellus). ( ... ) Les deux costez descuisses sont ainsi madrees commeen I 'Oye, et la queue blanche pardessous : les jambes sont noires. Ausurplus des moeurs sont appro-chantes de celle de I' Oye : mais lavoix en est plus obscure (HO III,11,167)(7).

Cette derniere phrase est importante.Elle individualise l'espece, qu'une trop

(5) Voir Gagnon (1984). La comparaison va en se rarefiant au cours du XVlle siec1c pour laire place a la grille serreedes mensurations. encore I.res peu repanducs au X VIe siecle. Cela est sans doute a metlre en relation avec la celebreidee de Galilee pour qui la nature pcut clre exprimce en langage mathcmatique; la description zoologique tend aussia devcnir une science exacte.

(6) Belon parle des "Canards et Canes" sans les specifier (HO Ill, 6.160-61). Le Canard colvert ctait certes deja bienconnu a j·cpoquc. mais I 'illustration de ce chapitre montre un Canard chipeau (Anas ,I'trepera).

(7) La bernache ne semble pas avoir ctc Mcritc par les Anciens. La scule refcrence que donne Beion sont les hypothe-tiqucs "Niuae peri:iUmenae", "Canards au collier blanc" d' Aristophanc (Les Oiseaux. vcrs 1148).

Page 7: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

•.-1:"donrn Gnc, PIJi/orne/a, Lu/cinia) & L1Ciolaen Latin,Roflinol en FranfO.Js.

longue serie de comparaisons aurait puas simileI' trop completement, et noyerparmi ses voisines. Cela equivaudrait anier I' acte de creation, a retomber dansl'indistinction anarchique du chaos origi-nel, "I 'antique cahos, en quel estoient feu,air, mer, terre, tous les elemens en refrac-taire confusion" ( Rabelais, Quart Livre,XVII). Deux forces opposees, I 'une pour-rait-on dire centripete et I' autre centri-fuge, assemblent et isolent donc lesespeces.

Mais Belon ne decrit pas tous lesoiseaux avec autant de comparaisons,phenomene dont on se fera une idee enconsultant Ie tableau. Certaines ne sontpratiquement pas decrites, et servent pres-que exclusivement de references, commesi elles s'imposaient d'elles-memes al'esprit. Ce sont 1"'Aigle" (Aigle royal,

Aquila chrysaetos), Ie "Milan" (Milannoir, Milvus migrans), I"'Oye" (Oie cen-dree, Anser anser). la "Cane" (Canard col-vert, Anas platyrhynchos?), Ie "Heroncendre" (idem, Ardea cinerea), la "Poule"(Poule domestique, Gallus gallus), la"Perdrix franche" (Perdrix rouge, Alecto-ris rufa), Ie "Cochevis", (Cochevis huppe,Galerida cristata), l'''Alouette'' (Alouettedes champs, Alauda arvensis), 1"'Etour-neau", (Etourneau sansonnet, Sturnus vul-garis), Ie "Merle" (Merle noir, Turdus me-rula), Ie "Rossignol" (Rossignol philomele,Luscinia megarhynchos, fig. 2) et Ie "Pin-son" (Pinson des arbres, Fringilla coe-lebs).

Cette liste donne un eventail d' espccestres presentes dans la sensibilite de l'epo-que, grace aux pohes contemporains,Ronsard, par exemple, que Belon connalt

Page 8: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

et admire, et parce que les Anciens, sanslesquels il n'y a pas de savoir possible, lesont decrites sans equivoque (8).

Du point de vue ecologique, on trouveaussi dans la liste des indices sur l'abon-dance des especes, assez connues pourpouvoir s'imposer clairement a chacun.Ainsi Ie Heron cendre devait etre tres re-pandu alors, lui qui fut persecute au pointqu'il frola l'extinction au debut du XXesiecle, avant de se reprendre, suite a uneprotection severe (9).

Ces especes ne servent cependant pasque de simples objets de comparaison. Sitous les naturalistes du XVle siecle yrecourent, ce n'est pas seulement par sou-ci de clarte ou d'erudition : la conceptionde la nature est en jeu ici, nous I' avans d it.Et nous pouvons maintenant preciser lanotion essentielle d'espece "noble" oudominante, si incompatible avec notremode de classification.

Plusieurs expressions sont revelatricesa cc titre. I' Aigle royal est appele "vrayeAigle" (HO 1, 3,87) (10), laPerdrix rougeest dite "franche" (HO V, 14,255). Plusloin, Belon ecrit : "Aristote fait mentionde trois espcces de merles : mais Ie noirest la principale" (HO VI, 28,320). Quantau Rossignol philomele, Ie naturalistel'estime "Ie plus noble de touts les petitsoyseaux, et de genre Ie plus legitime" (HOVII. 1,335)(11).

Les especes fondamentales, prototypi-ques, se clistinguent par une caraeteristi-que assez difficile a saisir dans I 'esprit

scientifique moderne, definie par cestraits de purete, de legitimite qui les auto-risent a servir de references. On diraitqu'elles jouissent en quelque sorte d'unsurerolt de nature a l'interieur de leurgroupe respeetif. On se trouve donc devantun systeme hierarchique a tous les ni-veaux : on I'a vu, les rapaces dominenttous les autres oiseaux, tandis qu'au seinde chaque groupe, on trouve une, ou par-fois pI usieurs especc~ dominatrices a leurechelon. Cette organisation du monde na-turel est d'importance pour Ie naturaliste :il y voit autant d'indices tangibles que IeCreateur livre a I'homme sur I 'architec-ture du monde.

Mais on ne saurait ignorer la porteesociologique d'une telle classification desetres. Sa hierarchie reflete et garantitcelIe de la societe humaine : la monarchiefait partie de I'ordre naturel des choses,elJe est bel et bien de droit divino II y auraittout un parallele a faire entre Ie schema dela societe monarchique et sa representa-tion metonymique par la communauteaviaire chez Belon, naturaliste qui fut, onIe sait, tres proche de la cour (12).

Tous les caracteres substantiels attri-bues aux animaux sont virtuellementcontenus clans les especes fondamentales.II se prodllit bel et bien un echange de sub-stance entre 1'espece comparee et sa refe-rence. "Conferer", que Belon utilise pour"comparer", impliqlle un transfert d' attri-buts de l'espece prototypique a celle queIe naturaliste tente de classer. Mieux queclans Ie "comme", neutre a nos yeux, puis-

(8) On pourrait multiplier les exemples concernant les espcces de references. Revenons seulement 11l'Oie eendree :chez Gesner (1555, p.133), Ie Grebe huppe est "paulo minore ansere". Turner, cite par Gesner (ibid .. p. 158), recourtaussi 11l'Oie cendree 11propos du Fou de Bassan (Sula bassana) : " .. .paulo minor. ramen VOLe er forma per omniaansere refert. ( ... ) nidularur in mari seorieo, in rupibus exeelsis".

(9) Belon fournil parfois quelques renseignements trl's precieux sur certaines espcces: 11propos du Pluvier dore (Plu-via lis apriearia) "I'on en apporte sOllvent des contrees de la Beausse ell si grande abondance, comme aussl desautres lieux labollrables, que si olll'entreprcndroil, en lrollveroit au marc he 11charger charrcllcs" (HO V, 18,260).

(10) Aigle legitime: gnesios chez Arislote (Hisruire des animaux IX, 32), " ... verum solumque incorruprae originis" chezPline (Hisruire narurelle X, 3).

(11) Chez Aristotc : Hisroire des animaux IX, 19. Sur Ics grivcs : ibid. 20. Sur Ie rossignol : ibid. IX, 51.(12) A not~r qu'ArislOte cst beaucoup moins attache it distinguer des espcces dominanles. it part l'Aigle royal. Sur les

rapports classification/societe, voir par exemple Levi-Strauss (1962).

Page 9: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

q u' il articule toujours la comparaison,cette idee apparait dans d' autrcs expres-sions : Ie "de" d'appartenance: Ie "Caniard"(Goeland marin, Larus marinus juvenile)ales "pieds <-l'une "Cane" (HO III, 12,168). Le "Proyer" (Bruant proyer, Embe-riza calandra) "est quasi couvert deplumes d' Alouette (Alouette des champs,Alauda arvensis) ou de "Linote" (Linottemelodieuse, Acanthis cannabina)" (HOV, 20, 266). Dans les verbes "tenir de" ou"retirer a" : Ie "Verdier" (Verdier d 'Europe,Carduelis chloris) tient quelques enseignesde celuy du Proyer" (HO VII, 22, 365). La"Poulette d'eau" (Poule d'eau, Gallinulachloropus) "porte Ie plumage de la cou-leur d'un Rasle (RfUe d'eau, Rallus aqua-ticus), retirant toutesfois a la Poule d'eau(Foulque macroule, Fulicula atra)" (ROIll, 24,181).

Tout a I'oppose de I'espece noble, unoiseau est "bastard" quand il se reduit a unagregat de marques d'emprunt, sans au-cun trait propre. La "Poule d'eau" ne sedistingue justement que paree qu 'elle vitpres de I'eau. Sinon, elle n'est que I'addi-tion de caracteres de la poule domestique,a laquelle Belon la compare sur septpoints (!), dont certains, purement arbi-traires, ne sont justifies que par la neces-site d'assimiler I'une a I'autre : la "Pouled 'eall" a "une tache blanche dessus lateste, en I'endroit ou une Poulle pone lacreste" (loc. cit.), et "sa langue est plusmalle que celle d'une Paulle" (ibid.,182)(13).

La demarche est identique quand il s'agitd' identi fier des oiseaux inconnus des

Anciens, susceptibles par la d'echapper a1'ordonnance mise en place: on les mai-trise d' em blee en les affublant du nomd'un!,; espece incontestablement connue,accole au nom de leur pays d'origine. Ain-si normalises, ils deviennent "Poulle deGuinee" (Pintade commune, Numidameleagris, HO V, 9, 246), "Coc d'Inde"(Dindon sauvage, Meleagris gallopavo,HO V, 10, 249)(14), "Perdris de Grece"(Perdrix bartavelle, Alectoris graeca, HOV, 13,255), "Perdris de Damas" (Franco-lin noir, Francotinusfrancotinus'1, HO V,16,258)(15), "Pie de Bresil", (Cassique ados j:lUne, Cacicus cela, HO VI, 9, 292),Merle de Bresil (Tangara sanglant, Phlo-gothraupis sanguinolenta, HO VI, 27,319), ct ainsi de suite.

De plus, I'identite des instrumentsimplique des similarites ethologiques.Le "Guespier" (Guepier d'Europe,Me rops apiaster) "prend sa pastured' Avettes (abeilles) et Guespes en volanten l'aer a la maniere des Irondelles" (HOIV, 27, 224). La grande "Irondelle"(Martinet noir, Apus apus) a des mouve-ments identiques a ceux d'un dauphin:

Comme nous estimons Ie Daulphin(oo.) estre Ie plus viste des poissons,aussi pretendons que ceste especed'Irondelle est Ie plus soubdain desoyseaux : toustefois maintenons IeDaulphin nager aussi viste en l'eaude mer, que ceste Irondelle vole enI' aer. L' un nage sans secousse deses pinnules, ou aelles de poisson:I' autre vole sans baure des siennes(HO VII, 33,378)(16).

(13) L'oiseau n'es! que mentionne chez Aristote (Hisloire des animallx VIII, 3, et IX, 35).(14) Voici ccoque Beion dil de eel oiseau :

Ccux qui pensent que Ics Cocs d'tnde u'ayent este cogneuz des Anciens se sont trompez. Car Varro, Colummelleet Pline monstrcnt evidemment qu 'ils eSlOient des leur temps aussi communs es metairics romaines qu 'ils sont main-tenant es nostres. (HO V. 10. 24R).(Vanon : Res ruslica HI, 9, 18. Columelle : De re rustica VIII, 2, 2. Pline : Histoire nalurelle X, 26). II sembleque Belon ait interprete une des diverses appellations de Ia Pintade commune (Numida meLeagris) comme celIe du"Coc d'lnde".

(15) D'aprcs ta description et son habitat seton Belon, il pourrait s'agir du Francolin noir (Francolinusfrancolinus).(16) La comparaison des mouvements dans I'air el dans I'eau cst traditionnelle : Aristote, De La marche des animaux X

el XVI. La question passionna aussi Uonard De Vinci, (1954. I, pp.415 et4IR).

Page 10: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

On Ie constate, la similitude anatomi-que et ethologique de deux animaux en-traine une assignation parallele. Chaqueetre est a sa place dans son element, gracea la prevoyance de la nature "maistresseouvriere" (Ioc. cit.), et trouve son homo-logue dans les autres elements, par un effetde symetrie analogique que mentionneJean de Lery (1580, XII, p.169) : "il y adans la mer toutes les especes d 'animauxqui se voyent sur terre". Ce principeessentiel de la zoologie depuis I' Antiqui-te n'est pas explicitement aborde dansL' Histoire de fa nature des Oyseaux OU ilest neanmoins preponderant: c'est lui quiexplique Ie nombre eleve d'appellationsidentiques entre les faunes aviaire etaquatique :

II Y a ( ... ) un poisson nomme Pavo,qui a prins son nom du Paon (HO V,2, 235).

Le Corbeau (Grand corbeau, Cor-vus corax) a donne son nom a unpoisson, qui a nom Corvus, et Cora-cinus, pource qu'il ales ailes noires(HO VI, 1,279).

II y a un poisson qui a prins son nomde la Tourtrelle (Tourterelle desbois, Streptopelia turtur) : car il estainsi cendre sur Ie dos, et sembleavoir les aelles estendues commeelles de la Toutrelle. Les LatinsI 'ont nomme Pastinica (HO VI, 20,310)(17).

Ne concluons pas trop vite a la pauvre-te lexicale de I 'histoire naturelle prece-dant la nomenclature binaire devant cereseau d'homonymes. Sans doute faut-itbien plutot y voir Ie dessein de faire res-sortir une preuve supplementaire de l'uni-te universelle.

Qu'en est-it maintenant des monstreschez Belon ? Lc sujet est vaste, et il

convient d'emblee de Ie rectuire au cadrede cet article: au sens etymologique, Iemonstre existe pour etre montre (de mons-trare). Ainsi a la Renaissance, Ie termeenglobe aussi bien les cas teratologiques,homme ou animal presentant des malfor-mations anatomiques comme Ie surnom-bre au Ie defaut de membres au d 'organes,que les etres, dragons, monstres marinspar exemple, etonnants de par leur aspectnaturel. Or ce sont ces derniers seulementqui preocc upent Belon.

Ajoutons que, pour une raison metho-dologique cette fois, nous ne discuteronspas la question de la rationalite de ses cri-teres de jugement (tel monstre est-il"plausible" biologiquement ou non ?).Vne telle problematique nous semble nonseulement futile, mais surtout anachroni-que, car eUe ne peut aboutir qu'a un ver-dict sous la forme d'un jugement devaleur.

Jean Ceard (1977) I' a tres bien demon-tre, Ie monstrueux est omnipresent dansl'horizon du XVle siecle. Ses apparitionssont toujours motivees, manifestations dela colere divine, punition, presage d'unmalheur proche, demonstration de la puis-sance creatrice de la nature. Ce dernierpoint nous replonge au coeur de notresujet : outre la part assez large faite aufantastique dans Ie but d'emerveiller, etde satisfaire a l'exigence d'une culturemythologique sans laqueUe on n'eut puparler d'erudition a l'cpoque, Ie mons-trueux se justifie aussi chez Belon par safonction organisatrice au sein du discoursclassificateur.

Le meilleur exemple en est la "Souri-chauve" (fig. 3). Dans son article surBelon, Jean Ceard (1971, p.134) ecrit :"c'est avec beaucoup d'hesitations" qu'il(Belon) "se decide a compter la chauve-souris parmi les oiseaux". A notre sens,

Page 11: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

NrBcris en Gi'f'C,Vc!pcrtifi'J en Lrttin,Souris clJt1uflC en FratJCoys,lonalt l1ufll R,mfpcn,ulc,qua[i Mus perm.uNs.

Belon ne se montre pas ici trouble par uncas difficile. A Ie lire, on dirait aucontraire qu'il s'efforce de se demarquerdes indecis, et q u' il pretend apporter lacle de cette enigme :

Long temps qu' on a mis en doute, as~avoir si la Sourichauve devoit es-tre mise au nombre des oyseaux, ouau reng des animaux terrestres. Par-q uoy ayants trouve lieu a propos en-tre noz oyseaux de nuict, nous asemble bon de ne passer oultre sansen faire quelque petit disc ours : carla voyant voler, et avoir aelles, l'a-vons advouee oyseau (HO II, 39,146).

Nul embarras dfi aux moeurs ou a lamorphologie de cet animal n 'est percepti-ble chez lui. II sait parfaitement, pour

avoir lu Aristote et Pline (18), "qu'ellealaicte ses petits" (HO II, 39, 146) ; maisil conna:Lt aussi leur mode de reproduction"pour en avoir tranche une vingtaine despregnantes" (ibid.). Il semble meme ren-cherir sur sa nature dueIle, en accumulantles comparaisons entre eUe et la souris:

( ... ) elle mange aussi la chair pen-dente au plancher, et la chandelle, ettelles autres choses grasses, se res-sentant quelque chose de la naturedes Souris. ( ... ) Celles qui se 10-gent en 1a grande Pyramide d 'E-gypte, portent la queue longuecomme font les Souris, et rendentles crotes aussi dures, et de mesmefa~on (ibid., 147).

Enfin son "anatomie" est "comme celIed'une Souris" (ibid., 148). Puis, au fil de

Page 12: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

la description, 1'accent est porte sur sonaspect extraordinaire, on glisse insensi-blement vel'S Ie monstrueux ; couleursinistre, "Ies Chauvesouris sont quasi aus-si noires que les Rats, ayants les aureillesbeaucoup plus grandes, dont y en a qui enont quatre" (loc. cit). Tendance au gigan-tisme, nombre anormal de membres oud'organes, ce sont bien 130 les attributs dumonstre qu'enumera Ambroise Pare (1575),de meme que les elements incongrus:"elles ont Ie bec bien grand, les naseaux ala maniere d'un veau (loc. cit.), voire ter-rifiants : ses maschoueres entournees depoi I long, et noir, bien garnies de dentsjusqu'au nombrc de trente et quatre ( ... ) "(loc. cit.).

Belon aborde finalement la descriptiondes ailes etonnantes de la chauve-souris,"faictes de membranes qui ne contiennentpoint de sang" (loc. cit.), et de ses pattes,presentant d'etranges similitudes avec lamain humaine :

Elles ont cinq doigts en chasquepied, assez bien munis d' onglescrochus, ayants une paulme ouvertees pieds de derriere, ressemblant a.une main (loc. cit.).

C'est la une de ces bizarreries inexpli-cables, qui appellent I 'homme a. sereconnaltre partout dans la nature, I 'obli-gent a voir son image dans Ie miroir deI'animalite, rappels permanents de sa si-tuation precaire au sein de la profusionfoisonnante des etres vivants.

Plus que jamais ici, verbe et matiere nefont qu'un. On assiste dans ce passage a lacontamination de 1'ecriture par Ie mons-trueux. Toute la puissance vitale de la natures 'empare des mots comme elle Ie fait des"instruments", pour les combiner a sa fan-taisie. Trait essentiel de la litterature sei-ziemiste, ce pMnomene fonctionne commeprincipe generateur de I'ecriture rabelai-

sienne, lieu par excellence ou Ie motconnait une capacite de croissance, d'ex-pansion incontrolee tout-a.-fait analogueau processus de developpement des etresvivants, et descriptible en termes de gene-ration, de fecondite, de proliferation.

Dans la perspective plus etroite du dis-cours attache a l'histoire naturelle, la figuredu monstre a une action unificatrice sur lastructure formee cette fois par 1'ensemblede la communaute animale, et non plusseulement a I'interieur de l' ordre aviaire,comme les especes prototypiques. BeJonattribue ainsi une place charniere a la"Sourichauve" (dernier chapitre du LivreII) ; nous sommcs montes d'un degre dansI'echelle qui apprecie la valeur des signesmis 11 la dIsposition des hommes pour lesaider a. interpreter Ie mondl:. En souli-gnant emphatiquement Jes caracteres in-solites de la chauve-souris, BeJon en faitun animal mirabilis, devant etre rcmarquecomme porteur de sens hypersignifiant.Gesner (1555, p.734) resume parfaitementla position ambivalente, en pone-a.-faux desespeces "a. double nature" :

Vespertilio animal est mediae interavem et murem speciei, ut muresalarus dici possit. ( ... ) Vituli mariniet vespertiliones, quoniam amhi-gunt, illi cum aquatilibus et terres-tribus, hi cum volucrihus etpedestribus, ideo participes et utro-rumque : et neutrorum fuisse (19).

Finalement, la difference entre lachauve-souris, Ie castor, Ie veau marin etles monstres "extra - ordinaires" est de de-gre, non de nature. Le monstre "accidentel"est un amalgame anarchique d' instru-ments, pur produit de III fantuisie natu-relle. Ainsi Ie lion aquatique de Gesner(1558, p. 558), inadapte a la vie marine:

Nul/is ad natandum aptis praedi-tum, ( ... ) quatuor pedes habebat,

Page 13: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

non mutilatos nee imperfeetos, utvitelus marinus, non memhruilismediis junetos veluti fiher et anas,sed perfectos in ungues et digitosdivisos.

Pourtant il a Ie corps couvert d' ecailles(squamas in toto corpore, loe. cir.), qui Ierendent aussi inquietant que Ie "Serpentaclle" dont Belon s'est "trouve a veoir descorps embaumez, et touts entiers" (Obs.II, 70, f.133 rO, fig. 4).

De tels etres sont souvent condamnes 11disparaltre sans engendrer. Mais peu im-porte s'ils ne sont pas viables : ils survi-

vront dans Ie discours, leur existence serareconduite dans la litterature. Leur ultimeraison d'exister est de posseder une effi-cacite rhetorique, de provoquer l'etonne-ment, et, par Hi, d'edifier l'esprit humain.

Tous ces etres hors du commun fasci-nent par leur" inq uietante etrangetc". Ilspervertissent I' urdre etabl i, Ie remettenten question en apparaissant dans cettezone trouble, ce lieu strategique ou senouent les rapports entre les etres vivants.Leur valeur unificatrice nalt de leur pou-voir desorganisateur, qui conforte dansson identite chaque espece confinee a unenature unique.

Page 14: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

Ce tableau recense les especes qui servent au moins une fois de reference a Belon dansses descriptions ethologiques ou morphologiques (similitudes entre bees, ou pattes, alluregenerale, plumage). Chaque I en regard d'une espece indique que celle-ci a servi dereference. La colonne ou se trouve Ie I indique dans quellivre la comparaison est faite.Etant donne leur nombre, nous n 'avons pu que mentionner et non citcr toutes les compa-raisons. L'interet du tableau est done avant tout statistique : emergence et repartition desespeces de reference, nombre de comparaisons internes et externes aux livres par exemple.

Chap. Espeee de reference: nom de Belon Livreset noms seientifiques

II III IV V VI VII

Livre III Vautour eendre. (Vautour moine. III I I

Aegypius monachus)III Aigle royal (Aquila chrysaetos) III II III I IV Aigle noire (Aigle royal juvenile?) IVI Gerfault (Faueon gerfaut. Falco I I

rusticolus)IX Buse (B. variable (Buteo buteo) IX Bondree (B. apivore. Pernis apivorus) IXIV Sacre (Faueon sacre. Falco cherrug) IIIXVI Autour (A. des palombes. II

Accipiter gentilis)XVII Faucon (F. pelerin. Falco peregrinus) IIIlXXI Espervier (Epervier d·Europe. 1II

Accipiter nisus)XXII Lanier (Faucon lunier. Falco hiarmicus) I IXXIII Crecerclle (Faucon ereeelle. I

Falco tinnunculus)XXIV Pie-griesehe (Pie-gricche I

grise. Lanius excubitor)XXVI Milan royal (Milvus milvus) IIII III IIXXVII Milan noir (Milvus migrans) IIXXX Hibou (H. grand-due. Bubo bubo) IIXXXII Chuhuant (Chouette hulolle.Strix alueo) IXXXIII Chevesque (Chouette cheveche,I I

Athene noctua)XXXIV- - Hulote (Hibou petit-due.Otus scops) II I- - Dues (Hiboux. terme generique) I I

- Rapaces (terme generique) I II I I

Livre IIII Cygne (C. tubercule. Cygnus olor) IIII Pelican (P. blanc. Pelecanus III

onocrotalus)III Oye (non specifiee) III III I I

I(Oie cendree. Anser anser ?) III III IVI Cane ou canard (Canard colvert. III II II

Anas plaryrhynchvs?) III IIIVII Cormorant (Grand cormoran. II

Phalacrocorax carbo)VIII Bicvre (Harle bievre. Mergus merganser) IIX Morillon (Fuligule morillon. II II

Aythya fuiigula)XI Cane de mer (Hctnache eravant. II

Branta bernicla)XII Caniard (Goeland marin juvenile. I

Larus marin us)XIII Mouette cendree (Goeland argente.

III

Larus argentatus)

Page 15: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

XIV Grande mouette blanche (Mouette Irieuse, Larus ridibundus)

XVI Piette (Harle pielle, Mergus a/bel/us) IIXXI Sarcelle (S. d'hiver, Anas crecca) IIXXV - Poulle d'eau (Foulque macroule, III I

Fulica atra)- Plongeons (Grebes, tenne generique) !I

Livre IVI Grue (G. cendrce, Crus grus) I III Heron cendre (Ardea cinerea) II I III IIIIV BUlOr (B. etoile, Bowuru.l· stel/aris") I I IIVI Aigrette (A. garzette, Egretta garzetta) IIX Cigogne (C. blanche, Ciconia ciconia) IIXI Pie de mer (Hultrier-pie, I

Haematopus ostralegus)XII Courlis (C. cendre, Numenius arquata) II II IXV Chevalier rouge (Chevalier I

gambette, Tringa totanus)XVII Vanneau (V. huppe, Vanel/us vanel/us) IIXIX Rasle noir (Rale d 'eau, Ral/us III

aquaticus)XXI Becassine (B. des marais, I

Gal/inago gal/inago)XXV Martinel peseheur (Martin pecheur, II II

Alcedo atthis)XXVII Merops (Guepier d'Europe, Merops I

apiaster)

Livre VII Paon (P. bleu, Pavo cristatus) I I I I IIII Ostarde (Outarde barbue, Otis tarda) IIIIV Canepetiere (Outarde Canepetiere, III II

Otis tetrax)VI Francolin (LagopCde alpin, Lagopus I II III I

mutus, en plumage estival)VII Coc (Coq domestiquc, Cal/us gal/us) III II III III IIII 11 IIX Poule de la Guinee (Pilllade I

commune, Numida meleagris)XI Coe de bois (Grand tetras, Tetrao I

urogal/us)XII Faisan (F. de Cloehide, Plasianus II II

co/chicus)XIII Perdrix de Grce (P. Bartavelle, I

Alectoris graeca)XIV Perdrix franehe (P. rouge, II II III II I

A/ectoris rufa)XV Perdrix grise (Perdix perdix) I IIXX Caille (C. des bIes, Coturnix coturnix) I I IIXVII Perdrix blanche (Lagopcde alpin, "Lagopus mutus, plumage hivernal)XVIII Pluvier (P. don~, P/uvialis apricaria) III " IXXI Proyer (Bruant Proyer, Emberiza I I

calandra)XXII Cochevis (C. huppc, Ca/erida cristata) I I I II II IXXIII Alouettc (A. des champs, A/auda II HIlI I II

arvensi.nXXVI Becasse (B. des bois, Sc%pax II III I

rustico/us)

Livre VII Corbeau (Grand Corbeau, Corvus corax) II III Corneille (C. noire, Corvus I

corone corone)V Chouca (CIl. des tours, Corvus monedu/a) IIVIII Pie (P. bavarde, Pica pica) I I II

Page 16: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

X Huppe (H. faseiee, Upupa epops) I IXI Loriot, (L. d'Europe, Oriolus oriolus) IXlII Pic verd iaulne (P. vert, Picus viridis) " I I IXVII Torehepot (Sittelle lOrehepot, II

Silta europaea)XVIII Tercou (Torcol fourmilier, lynx I II

rorquilla)XIX Ramier (Pigeon ramier, Columba palumhus)1 I I III IXX Tourterelle (T. des bois, II I

StrepropeLia turtur)XXII Pigeon fuyard (P. Colombin I

Columba oenas)XXIII Pigeon domestique (P. biset, I

Columba Livia) I

XXVI Merle au collier (M. a plastron, I II ITurdus torquatus)

XXVIII Merle (M. noir, Turdus merula) II II II IIIl IIXXIX Etourneau (E. sansonnet, Srurnus I I I III II

vulgaris)XXX Paisse solitaire (Aeecnteur alpin, I

Prunella collar is)IXXXI Grande grive (Grive draine, I

TurdllS viscivorus)

IXXXIII Mauvis (Grive mauvis, Turdus iliacus) IIIXXXIV Litorne (Grive litorne, Turdus pi/aris) II

Pigeon ou Colombe (terme gcncrique) I I I III I 1II

Livre VIII Rossignul (R. philomele, Luscinia I II III III IIII

me!?arhynchos)

" Fauvctle brune (F. a tete noire, IISylvia atricapilla) I

V Roytelet (Troglodyte mignon, I III ITroglodytes troglodytes)

VII Souleie (Roitelet huppe, Regulus I IIregulus)

VIJI Rossignol de muruille (Rougequeue II IInoir, Phoenicllrus ochruros)

IX Gorgcrouge (Rouge gorge, IErithacus rubecula)

X Lavandiere ecndrce (Bergeronnelle 1IIgrise, Motacil/a alba)

XI Bergcrelle iaulnc (Bergeronnctte Iprintanicre, Moracilla flava)

XIV Serin (S. cini, Serinus serinus) I IIXV Tarin (T. des aulnes, Cardue/is spinus) I IIXVI Linolle (L. mclodieuse, Acanthis II

cannahina)XVII Bouvreuil (B. pivoine, Pyrrhula I

pyrrhula)XVIII Traquet (T. tacier, Saxicola rubetra) IXIX Moineau de ville (Moine au I [ II II

domestique, Passer domesticus)XXI Friquet (Moineau friquet I

Passer montanus)XXII Verdier (Carduelis chloris) I IIIXXIII Bruant (B. jaune, Emheriza citrinel/a) ITXXIV Mesange (M. charbonniere, Pams major) I IT IJIIXXVI Mesange bleue (Parus caeruleus) I IXXVJII Pinson (P. des arbres, I III III

Fringilla coelehs)XXIX Montain (Pinson du Nord, III

Fringilla montifringilla)XXXIV Grande Hirondclle (Martinet noir, T 1I! II

Apus apus)

Page 17: LES COMPARAISONS ET LES MONSTRES : FIGURES …sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/pdf/az1990n2a3.pdf · les comparaisons et les monstres : figures structurales de la

ALDROVANDI U. tI599-1603) : Ornithologiae, Hoc est de avibus }jisroriae libri XII ad Clementem VIII,F. de Franciscis edit., Bologne, 3 vol. in-f'.BELON P. (1553) : Les observations de plusieurs singularitez et choses memorables, trouvees en Grece,Asie, iudee, E[!,ypte, Arabie et autre.l· pays estranges, redigees ell trois livres par Pierre Belon du Mans,G. Corrozet edit., Paris, in-4°, ]2 ff., 210 ff. pagines au 1'°,2 ff.BELON P. (1555) : L' Histoire de la nature des Oyseaux, avec leurs descriptions et naif\ portraicts, rerirezdu naturel escrite en sept livres, G. Corrozet edit., Paris, in-4°, 28 ff., 382 p.CEARD J.(1971) : "Pierre Belon zoologiste", in: Actes du col/oque Renaissance Classicisme du Maine,(Le Mans ]971), Paris 1975, A. G. Nizet edit., pp.129-140.CEARD 1. (1977) : La nature et les prodiges. L' insolite au XVle siecle en France, Droz edit., Geneve,512 p.DELAUNA Y P. (] 926): L'aventureuse existence de Pierre Belon rlu Mans, E. Champion edit., Paris, 1926,]75 p.DELAUNA Y P. (1926) . Pierre Belon naturalisre, Monnoyer edit. Le Mans, 270 p.DUBOIS C.-G. (1970) : My the et langage au XVle siecle, Ducros edit. Bordeaux, 172 p.}-OUCAULT M. (1966) : Les mots et les choses. Vne archeologie des sciences humaines, Gallimard edit.,Paris, 400 p.GAGNON F.-M. (1984) : "Portrait du castor. Ana10gie et representation", in : Voyages: recits et ima[!,i-naire, Actes de Montreal, edit. B. Breugnot, Paris, Seattle, Ttibingen, 497 p.GESNER C. (1555-1558) : Hisroria Animalium Uber Ill, qui est de Avium natura, et Liber 1111, qui est dePiscium et Aquatilium animantium natura, Christopher Froschuerum edit., Zurich, 2 vol. in-f".HAMON P. (1981): Introduction a I'analyse du descriptif, Hachette edit., Paris, 2~1 p.LERY J. de (1580) : Hisroire d'un voyage fait en la terre de Bresil autrement £lit Amerique, A. Chappuisedit., Geneve, in 8°, 382 p.LEVI-STRAUSS C. (1962) : La pensee sauvage, PIon edit., Paris, 395 p.PELLEGRIN P. (1982) : La classification des animaux chez Aristote. Statut de la Biologie et unite deI' AristotiLisme, Les Belles Lettres edit., Paris, 220 p.RONDELET G. (1558) : Hisroire entiere des poissons avec leur portrait au naif, M. Bonhomme edit., Lyon,2 vol. in-f".VINCI L. de (reed. 1954) : Carnets, Gallimard edit., Paris, 1954,2 vol.