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L’ARENA 92, QUI VERRA LE JOUR EN DÉCEMBRE 2016, AU PLUS TARD EN JANVIER 2017, AMBITIONNE D’ÊTRE L’ENCEINTE FRANÇAISE LA PLUS, ET LA MIEUX CONNECTÉE. ASSISTER À UN MATCH DE RUGBY PRENDRA ALORS UNE TOUT AUTRE DIMENSION. L’Arena 92 au stade 2.0 PAR ARNAUD BEURDELEY Partir deux heures avant le coup d’envoi d’une rencontre afin d’éviter les embouteillages, tourner en rond pour trouver une place sans prendre le risque de récupérer sa voiture à la fourrière, se rendre dans la bonne tribune correspondant à ses tickets sans faire trois fois le tour du stade, essayer à de multiples reprises (en vain !) de joindre tata Nicole assise dans la tribune opposée sans décharger la batterie de son téléphone, faire la queue à la mitemps pour commander deux bières et un jambon beurre,et rater le début de la seconde période, s’ennuyer à mourir devant une rencontre du mois de décembre disputée dans un bourbier et se concluant sur un triste 9 3, dénicher la boutique du stade pour s’offrir un souvenir du match avant de rentrer à la maison : tout ça, c’est bientôt terminé. C’est en tout cas ce que promet le stade 2.0. Et pour cause. Le stade connecté, c’est l’enjeu de demain du sport business. Ou comment transformer le spectateur en « spectacteur ». À l’heure de l’hypercorrection et du tout numérique, les stades font face à de nouveaux enjeux et aux nouvelles attentes des « fans » dans le cadre des événements sportifs. À l’heure actuelle, la France est à des années lumière de ce qui se pratique par exemple de l’autre côté de l’Atlantique. Aujourd’hui, dans l’Hexagone, aucune enceinte n’a encore le wifi (voir glossaire), seuls quelques espaces, comme des salons ou des tribunes privilégiées, sont connectés. Cette

Le Racing 92 2.0

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1/6/2015 Detaille Article

http://ejournal.midiolympique.fr/epaper/xml_epaper/Magazine/01_06_2015/pla_5934_Midi_Olympique_Magazine/xml_arts/art_29314413.xml 1/4

L’ARENA 92, QUI VERRA LE JOUR EN DÉCEMBRE 2016, AU PLUS TARD ENJANVIER 2017, AMBITIONNE D’ÊTRE L’ENCEINTE FRANÇAISE LA PLUS, ETLA MIEUX CONNECTÉE. ASSISTER À UN MATCH DE RUGBY PRENDRAALORS UNE TOUT AUTRE DIMENSION.

L’Arena 92 au stade 2.0PAR ARNAUD BEURDELEY

Partir deux heures avant le coup d’envoi d’une rencontreafin d’éviter les embouteillages, tourner en rond pourtrouver une place sans prendre le risque de récupérer savoiture à la fourrière, se rendre dans la bonne tribunecorrespondant à ses tickets sans faire trois fois le tour dustade, essayer à de multiples reprises (en vain !) dejoindre tata Nicole assise dans la tribune opposée sansdécharger la batterie de son téléphone, faire la queue àla mitemps pour commander deux bières et un jambonbeurre,et rater le début de la seconde période, s’ennuyerà mourir devant une rencontre du mois de décembredisputée dans un bourbier et se concluant sur un triste 93, dénicher la boutique du stade pour s’offrir un souvenirdu match avant de rentrer à la maison : tout ça, c’estbientôt terminé. C’est en tout cas ce que promet le stade2.0. Et pour cause. Le stade connecté, c’est l’enjeu dedemain du sport business. Ou comment transformer lespectateur en « spectacteur ».

À l’heure de l’hypercorrection et du tout numérique, lesstades font face à de nouveaux enjeux et aux nouvellesattentes des « fans » dans le cadre des événementssportifs. À l’heure actuelle, la France est à des annéeslumière de ce qui se pratique par exemple de l’autre côtéde l’Atlantique. Aujourd’hui, dans l’Hexagone, aucuneenceinte n’a encore le wifi (voir glossaire), seulsquelques espaces, comme des salons ou des tribunes privilégiées, sont connectés. Cette

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première est imminente. « Bordeaux est depuis le 23 mai le premier stade connecté de France (enwifi gratuit, NDLR). L’enceinte du Stade de France le sera début 2016 et Nice juste après, àtemps pour l’Euro 2016, expliquait récemment dans les colonnes du journal « Les Échos »Alexandra Boutelier, directeur général délégué du Consortium Stade de France, en charge desopérations et du développement pour Vinci Stadium. Cet investissement de plusieurs millionsd’euros par stade n’était pas prévu à l’origine mais il est devenu incontournable. Nous espérons lerentabiliser par les applications pour smartphones qui seront déployées fin 2015. »

100 % WIFILa France compte aujourd’hui environ 70 millions de téléphones mobiles dont la moitié serait dessmartphones. Et près de dix millions de Français utilisent chaque jour les réseaux sociaux. En2012, huit des vingtcinq plus gros « social landmarks facebook » (endroits où les gens seconnectent le plus) étaient des enceintes sportives, comme le Staples Center de Los Angeles, leTokyo Dome City ou le Camp Nou de Barcelone… L’enjeu est donc immense, pharaonique. C’estce qu’a bien compris Jacky Lorenzetti. Le président du RacingMetro 92, dont l’Arena 92 uneenceinte sportive et culturelle d’une nouvelle génération, actuellement en construction au cœur duquartier de La Défense, devrait faire de ce lieu le fleuron des stades français. « Jacky Lorenzetti adécidé d’investir lourdement sur cette partielà afin d’offrir à l’Arena une couverture wifi à 100 % etune couverture connexion simultanée à 50 %, ce qui est déjà très important, explique RolandCubin, directeur des projets chez Stadome, filiale en charge de l’Arena. D’autres l’ont fait à 25 %,mais on estime qu’à l’avenir ce sera insuffisant. À partir de là, nous avons dimensionné le wifi desorte que 50 % des spectateurs puissent télécharger une vidéo en même temps. En Europe, cesera probablement le stade le plus connecté. En France, c’est une certitude. L’Arena ne sera passimplement un stade, ce sera une salle multimodale. L’enceinte va accueillir des spectacles, desconcerts, des séminaires, des bureaux et des matchs de rugby. Le but n’est pas simplement dedonner une connexion internet aux spectateurs. Le but est de renforcer le spectacle, d’accroîtrel’émotion, d’accroître la convivialité et le partage et de permettre à tout le monde de communiquerensemble. »

AVEC UN ÉCRAN DE 2 400 M2Pour atteindre son objectif, Jacky Lorenzetti n’a pas lésiné sur les moyens. Environ 500 bornes wifi seront installées pour proposer la meilleure connexion possible. Et l’Arena pourra se vanterd’offrir à ses spectateurs le plus grand écran géant du monde. Avec 1 860 m2, celui des DallasCowboys (NFL) faisant actuellement référence, ressemblera presque à une tablette. D’autant plusque la projection HD, choisie par les responsables parisiens, proposera une qualité d’imageinégalée sur 2 400 m2.

Jacky Lorenzetti aime souligner que son stade sera au cœur du Manhattan français. Une façoncomme une autre de rappeler que le rêve américain ne sera pas si loin. L’Arena 92 aura un goûtd’ « americain way of life ». Le MetLife Stadium, enceinte des Giants de New York, informe sesspectateurs en direct via leur mobile des conditions de trafic sur les principaux axes menant austade, ainsi que des conditions d’utilisation des transports en commun. Le Cowboys Stadium, auTexas (plus grand stade couvert du monde), organise durant l’événement des quizz sur twitter, dustyle : « Qui sera le prochain marqueur ? ». Les gagnants apparaissent sur l’écran géant et se

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voient offrir des cadeaux. Des exemples parmi tant d’autres qui ont inspiré les responsables del’Arena 92.

« Nous allons développer une application unique qui regroupera tous les services de l’Arena,explique encore Roland Cubin. Une application qui permettra sans bouger de son siège decommander une bière, de précommander un teeshirt à récupérer en sortant par exemple,d’accéder à du contenu exclusif qui pourrait être une interview de l’entraîneur juste avant le match.Sur cette application, tout est envisageable et envisagé. Un exemple ? Sur une faute sifflée parl’arbitre, on pourrait très bien mettre à disposition du spectateur une explication pour mieuxcomprendre la décision. Les spectateurs pourront aussi recevoir de l’information en direct sur lesplaces de parking disponibles et même être guidés pas à pas jusqu’à leur siège en tribune.L’application nous permettra de rester en veille auprès des fans et des spectateurs même endehors des événements. »

« Ne rien manquer et ne manquer de rien », telle pourrait être la devise de cette future Arena.Vous l’aurez compris, l’idée est d’accéder à une multitude de services via son smartphone ou satablette. Objectif : captiver le spectateur avant, pendant et après le spectacle. Que ce soit àl’occasion d’un concert ou un match de rugby. Faire en sorte qu’il reste le plus longtemps possibleau cœur de l’enceinte et qu’il consomme. « Dans la façon d’utiliser ces services, il faut êtreinnovant pour que cela se révèle un jour réellement rentable, admet Roland Cubin. L’applicationArena sera gratuite, accessible à tous. Derrière celleci, il y a aussi la volonté d’accroître la forcede vente. Elle va doper l’attractivité. C’est de cette façon que l’on va rentabiliser. Évidemment, ilfaudra trouver le bon mélange entre la publicité et les ventes. »

SPECTATEURS OU INTERNAUTES ?Si la recette est éprouvée de l’autre côté de l’Atlantique, force est de s’interroger sur ce modèle.Estil applicable en France où le comportement de consommation du public est radicalementdifférent ? À trop vouloir offrir de nouveaux services, les spectateurs ne se transformerontils pasen de simples internautes, les yeux rivés sur leurs smartphones ou autres tablettes, étrangers à cequi se passe sur la pelouse ? Si tel devait être le cas, le stade 2.0 rendrait le sport accessoire. Leschants de supporters et autres bandas seraient alors relégués au rayon des vieilleries. « Leconsortium est sensible à cette problématique, répond Roland Cubin. Nous avons visité beaucoupde salles ou de stades aux ÉtatsUnis où la connectivité pollue le spectacle et l’ambiance. Celarelève de la culture américaine. Ce n’est pas notre but. On ne veut pas être dans le « push » (voirglossaire). Notre « fan expérience » (voir glossaire) n’est pas basée làdessus. Notre but pourcette application est de venir enrichir le spectacle plutôt que de le polluer. Il s’agit donc de trouverle juste milieu pour offrir du service, du contenu, renforcer l’expérience, permettre aux spectateursde jouer ensemble. Parce que toutes les notions de « big game » (voir glossaire), dès lors que lessmartphones sont connectés, sont envisageables. On pourrait faire voter les spectateurs en directpour l’homme du match, ou imaginer un jeu en partageant le stade en deux ou plusieurs équipes.Cela ne doit pas devenir trop oppressant et être un frein au spectacle vivant. »

ET SI INTERNET POLLUAIT LE JEU…Le risque existe. En offrant de l’internet illimité, le spectateur pourra être tenté de consulter ses

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mails ou son compte en banque au beau milieu d’un match de rugby. « Si on s’aperçoit quel’accès internet pollue trop le jeu, nous sommes capables de limiter, voire bloquer, l’accès à wifipendant les événements si cela nous apparaissait nécessaire, rétorque Roland Cubin. C’est unepossibilité. Nous ne sommes pas là pour donner de l’internet à tout le monde juste pour donner del’internet. Il faut créer de l’ambiance, de la convivialité, et du lien. L’application sera utiliséedifféremment en fonction du spectacle. Si c’est un concert, il s’agira de favoriser « la fanexpérience » et de mettre le public en lien avec la star. Si c’est du « Business to business » (voirglossaire), ce sera pour permettre de travailler dans de bonnes conditions. Et si c’est du rugby, cesera pour aider le jeu et la convivialité. » En décembre 2016, au plus tard en janvier 2017, l’Arena92 sera inaugurée. Pour cet événement, le président Lorenzetti rêve toujours d’une rencontreentre les Barbarians du RacingMetro 92 et les All Blacks. Alors, à vos smartphones.