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Singapour veut former les managers du « boom » asiatique Entre MBA et Confucius, les entreprises émergentes cherchent leur modèle REPORTAGE | PAGE 3 Universum 2013 : le top 50 de l’employeur idéal Un panel de plus de 34 000 étudiants du supérieur a établi son palmarès SPÉCIAL JEUNES DIPLÔMÉS | PAGES12 À14 L ’empereur Akihito n’a pas de chance. L’ère Heisei qu’a ouverte son introni- sation, en 1990, promettait pourtant « l’accomplissement de la paix ». C’est à cette date même que le Japon a com- mencé sa descente aux enfers. En trois décennies d’après-guerre, le pays était devenu le premier exportateur de la pla- nète. Ses entreprises achetaient Hollywood et les experts prévoyaient son accession pro- chaine à la première place mondiale, humi- liant une Amérique à l’industrie dévastée. Il a suffi d’un grain de sable monétaire pour tout remettre en question. Ce seront les accords du Plaza en 1985 entre les Etats-Unis, le Japon, la RFA, le Royaume-Uni et la France qui, en voulant introduire une concertation internationale dans le contrôle des changes, provoqueront une chute brutale du dollar par rapport au yen. Ce désordre monétaire a eu un effet indirect. Il a provoqué un rapatrie- ment massif des capitaux japonais placés aux Etats-Unis, qui se sont investis dans la Bourse et dans l’immobilier, gonflant l’une des plus belles bulles de l’histoire. Drame de l’argent facile qui nourrit les spéculations les plus folles. Des propriétés du quartier chic de Ginza à Tokyo trouvaient preneur à plus de 700 000 euros le mètre carré. Les dix ans qui suivirent l’explosion de cet- te bulle ont été marqués par une croissance nulle et une déflation mortifère des prix. Le pays s’est épuisé. Il a dépensé plus de 1 000 milliards de dollars (768 milliards d’eu- ros) dans une douzaine de plans de relance sans autre effet que de gonfler une dette gigantesque dont le remboursement absor- be le quart du budget du pays. On a appelé cela la décennie perdue. La suivante n’a pas été plus joyeuse. Aussi déprimante que l’hu- meur neurasthénique des princesses impé- riales. Le total des dépenses annuelles en biens et services est aujourd’hui au même niveau qu’il y a vingt ans. Le nouveau premier ministre Shinzo Abe, vieux routier de la politique, a donc décidé de frapper fort. Son plan à lui comprend non seulement un nouvel investissement massif et des réformes structurelles de libéralisa- tion de l’économie, toutes choses déjà expéri- mentées par le passé, mais surtout une politi- que monétaire d’une agressivité sans précé- dent. Avec un objectif simple : retrouver d’ici à deux ans une inflation à 2 % contre une déflation de 0,5 % actuellement. La Banque du Japon est donc priée d’imprimer massive- ment des yens. Un effort deux fois plus important que celui, déjà très généreux, conduit par les Etats-Unis. Si cela marche, l’in- flation repart, le produit intérieur brut remonte, dopé par la consommation, et la baisse de la devise stimule les exportations, ce qui accroît les rentrées fiscales et donc la possibilité de rembourser la dette. Si ça rate. Hum… l’inflation provoque une hausse des taux d’intérêt qui fait exploser le coût d’une dette hors de contrôle. Le risque est aussi, comme en 1985, que cet océan d’ar- gent frais aille nourrir de nouvelles bulles qui, à leur tour, éclateront dans un monde bien plus connecté qu’à l’époque. Un cauche- mar au carré. C’est pour cela qu’Européens et Améri- cains scrutent avec attention la manœuvre de Shinzo Abe. Tous ont choisi le chemin du laxisme monétaire, dernière arme pour contrer la crise et redonner de l’air à des éco- nomies en train de s’asphyxier. Les Etats- Unis l’ont pratiqué largement, l’Europe si timidement qu’elle ne contente personne et semble paver la voie d’une décennie perdue à la japonaise. Mais l’Europe n’est pas le Japon et la politique économique est un art tout en équilibre et en improvisation. p Philippe Escande Lord Turner contre les « gens » de la City Par Paul Jorion CHRONIQUE | PAGE 2 Argent pas cher Discours du nouveau gouverneur de la Banque du Japon, Haruhiko Kuroda, devant la commission des finances de la Chambre basse du Parlement, à Tokyo, le 26 mars. TONU HANAI/REUTERS La révolution monétaire japonaise Poussée par le gouvernement, la Banque du Japon mobilise massivement tous ses outils pour soutenir l’économie, provoquant une nette dépréciation du yen ainsi qu’un choc de compétitivité. Objectif : renouer avec une inflation à 2 % d’ici deux ans. Un pari risqué PAGES4 ET5 GIE INFOGREFFE 338 885 718 RCS CRÉTEIL / crédit photo : corbis EXTRAIT KBIS, INFORMATIONS LÉGALES SUR LES ENTREPRISES, ACCÈS AU REGISTRE DU COMMERCE ET DES SOCIÉTÉS La source officielle LES GREFFES DES TRIBUNAUX DE COMMERCE éditorial Cahier du « Monde » N˚ 21219 daté Mardi 9 avril 2013 - Ne peut être vendu séparément

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Singapour veut formerlesmanagers du«boom»asiatiqueEntreMBAet Confucius, les entreprisesémergentes cherchent leurmodèleREPORTAGE | PAGE 3

Universum2013: le top 50de l’employeur idéalUnpanel de plus de 34000étudiantsdu supérieur a établi son palmarèsSPÉCIAL JEUNES DIPLÔMÉS | PAGES 12 À 14

L’empereurAkihiton’apasdechance.L’èreHeiseiqu’aouverte son introni-sation,en 1990,promettaitpourtant«l’accomplissementde lapaix».

C’està cettedatemêmeque le Japonacom-mencésadescenteauxenfers.

En troisdécenniesd’après-guerre, lepaysétaitdevenu lepremierexportateurde lapla-nète. SesentreprisesachetaientHollywoodet les expertsprévoyaientsonaccessionpro-chaineà lapremièreplacemondiale,humi-liantuneAmériqueà l’industriedévastée.

Il a suffid’ungraindesablemonétairepour tout remettreenquestion.Ce seront lesaccordsduPlazaen 1985entre lesEtats-Unis,le Japon, laRFA, leRoyaume-Uniet la Francequi, envoulant introduireuneconcertationinternationaledans le contrôledes changes,provoquerontune chutebrutaledudollarpar rapportauyen.Cedésordremonétaireaeuuneffet indirect. Il a provoquéunrapatrie-mentmassifdes capitaux japonaisplacésauxEtats-Unis,qui se sont investisdans la

Bourseetdans l’immobilier, gonflant l’unedesplusbellesbullesde l’histoire.Dramedel’argent facilequinourrit les spéculations lesplus folles.Despropriétésduquartier chicdeGinzaàTokyo trouvaientpreneuràplusde700000euros lemètrecarré.

Lesdixansqui suivirent l’explosiondecet-tebulleont étémarquésparune croissancenulleetunedéflationmortifèredesprix. Lepayss’est épuisé. Il a dépenséplusde1000milliardsdedollars (768milliardsd’eu-ros)dansunedouzainedeplansde relancesansautreeffet quedegonflerunedettegigantesquedont le remboursementabsor-be le quartdubudgetdupays.Onaappelécela ladécennieperdue. La suivanten’apasétéplus joyeuse.Aussidéprimanteque l’hu-meurneurasthéniquedesprincesses impé-riales. Le totaldesdépensesannuellesenbienset servicesest aujourd’huiaumêmeniveauqu’il y avingt ans.

LenouveaupremierministreShinzoAbe,vieuxroutierde lapolitique, adoncdécidéde frapper fort. Sonplanà lui comprendnonseulementunnouvel investissementmassifetdes réformesstructurellesde libéralisa-tionde l’économie, touteschosesdéjàexpéri-mentéespar lepassé,mais surtoutunepoliti-quemonétaired’uneagressivitésansprécé-dent.Avecunobjectif simple: retrouverd’iciàdeuxansune inflationà 2%contreune

déflationde0,5%actuellement.LaBanquedu Japonestdoncpriéed’imprimermassive-mentdesyens.Uneffortdeux foisplusimportantquecelui,déjà trèsgénéreux,conduitpar lesEtats-Unis. Si celamarche, l’in-flationrepart, leproduit intérieurbrutremonte,dopépar la consommation,et labaissede ladevise stimule les exportations,cequi accroît les rentrées fiscaleset donc lapossibilitéde rembourser ladette.

Si ça rate.Hum…l’inflationprovoqueunehaussedes tauxd’intérêtqui fait exploser lecoûtd’unedettehorsdecontrôle. Le risqueest aussi, commeen1985,quecetocéand’ar-gent frais aillenourrirdenouvellesbullesqui, à leur tour, éclaterontdansunmondebienplus connectéqu’à l’époque.Uncauche-maraucarré.

C’estpour celaqu’EuropéensetAméri-cains scrutentavecattention lamanœuvredeShinzoAbe.Tousont choisi le chemindulaxismemonétaire,dernièrearmepourcontrer la criseet redonnerde l’air àdes éco-nomiesen trainde s’asphyxier. LesEtats-Unis l’ontpratiqué largement, l’Europe sitimidementqu’ellenecontentepersonneetsemblepaver lavoied’unedécennieperdueà la japonaise.Mais l’Europen’estpas leJaponet lapolitiqueéconomiqueestunarttoutenéquilibreet en improvisation.p

PhilippeEscande

LordTurner contreles «gens»de laCityParPaul JorionCHRONIQUE | PAGE 2

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Discoursdunouveaugouverneur de la Banquedu Japon,HaruhikoKuroda,devant la commissiondes finances de la Chambre basse du Parlement, à Tokyo, le 26mars. TONU HANAI/REUTERS

Larévolutionmonétaire japonaise

Pousséeparlegouvernement,laBanqueduJaponmobilisemassivementtoussesoutilspoursoutenirl’économie,provoquantunenettedépréciationduyen

ainsiqu’unchocdecompétitivité.Objectif:renoueravecune

inflationà2%d’icideuxans.UnparirisquéPAGES 4 ET 5

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2 0123Mardi 9 avril 2013

AMenloPark, enCalifornie, ausiègedeFacebook,MarkZuckerbergadévoilé, jeu-di4avril, sonambitieusestratégiemobile. Et, surtout,Home,uneapplicationqu’ilserapossibled’installer commepaged’accueild’unsmartphoneAndroid,àpartirdu12avril, et quiplaceaucœurde lanavigationles «amis»Facebook.Pour lemil-liardaire, il s’agitde tirerparti de ladominationde sonréseausur lemobileendevenant lepilierdesusages, sansmettre lepieddans la fabricationdesproduits,secteurmoinsporteurque l’exploitationdesdonnéesdes«mobinautes»àdesfinspublicitaires.«SurHome, il n’yapasdepublicitépour lemoment.Mais je suissûrqu’il y enauraàunmomentdonné», expliqueM.Zuckerberg, convaincuque«Facebookgagneraplusd’argent sur lesmobilesquesur lesordinateurs».

LeLouvrechangedetêteP r o f i l | Unhommedusérail, Jean-LucMartinez,s’apprêteàdirigerlepluscélèbremuséedumonde

LordAdair Turner, qui fut jusqu’au31mars président de la Financial Servi-ces Authority, le régulateur desmar-chés financiers britanniques, a eu

l’amabilité, lors d’un entretien téléphoniquele 6février, de répondre à quelques questionsrelatives aux remarques qu’il avait faites en2009 sur « les activités financières sociale-ment inutiles» (Lemonde.fr, 29août 2009) etla nécessité d’ymettre fin, observations quiavaient provoquéune levée de boucliers danslesmilieux financiers. «La grandemasse descommentaires relatifs aux activités sociale-ment inutiles est venue de la City», confirmeLord Turner.

La violence de la réaction à ses propos n’estpas surprenante. Elle émane d’un petit cercleoù l’on révère des opinions de certains prixde sciences économiques à lamémoire d’Al-fredNobel. On se souvient ainsi de FriedrichvonHayek (récipiendaire en 1974), selon quila notion de « justice sociale est une expres-sion entièrement vide, privée de tout contenudéterminable» ou deMilton Friedman (réci-piendaire en 1976), pour qui « la notion de res-ponsabilité sociale (…) conduit immanquable-ment au totalitarisme». Remarques qui nemanquent pas de piquant quand on sait quel’un et l’autre tinrent à prodiguer leursconseils au général Augusto Pinochet.M.von

Hayek précisamême lors d’un voyage auChili : «Je préfère personnellementun dicta-teur libéral à un gouvernement démocratiquequi ne serait pas libéral. »

SelonLord Turner«les gens de la City [lequartier d’affaires à Londres]ont été horrifiésqu’[il]mette en question les activités demarchéet l’arbitragede la réglementation financière»,pour expliquer ensuite cequ’il entendpar là.

D’abord, pour ce qui touche aux activitésdemarché: «Une affirmation controversée,formulée par des économistes tel Keynes, estqu’il arrive que la taille de ces activités dépassele niveau optimal d’allocation efficiente ducapital et de l’épargne, au point de se transfor-mer en activités à sommenulle, voire à sommenégative. Ce bilan négatif s’expliqued’unepart par la ponction de ressources économi-ques réelles qu’elles opèrent, d’autre part par

l’apparitionau sein dumarché d’une instabili-té financière qui fera que ceux des interve-nants qui ne “tiennent”pas lemarché devrontse couvrir et rémunérer ceux qui le tiennent (àl’aide ici aussi de ressources réelles) pour queces derniers gèrent cette instabilité.»

Pour ce qui touche à la réglementationfinancière, Lord Turner estimeque « les petitsjeux d’arbitrage impliquent lamise au pointdemontages financiers qui permettront à uneentreprise de réduire son capital alors que safonction économique demeure inchangée. Lesentreprises apparaîtront en conséquence enmeilleure santé qu’elles ne le sont réellement. Il

va de soi que de tellesmanipulations n’aug-mentent pas la taille du gâteau et ne présen-tent, du coup, aucuneutilité sur un plan social.Il s’agit aumieux d’un jeu à sommenulle,mais en réalité, àmon sens, d’un jeu à sommenégative, puisque sontmobilisés pour ces opé-rations d’excellents esprits qui pourraientmet-tre leur talent au service de tâches plus fécon-des et plus exaltantes».

Lord Turner conclut : «Les gens de la Citynégligeaient complètement les questions fon-damentales – car il s’agit bien, ici, de questionsfondamentales – comme le volume souhaita-ble du crédit dans un pays comme le Royaume-Uni, et la question de savoir si son systèmefinancier ne contient pas un nombre excessifde créances.»

Lord Turner établit-il une différence entreles activités financières «socialement» inuti-les et celles qu’il appelle «économiquement»inutiles? La réponse se trouve dans la LionelRobbins Lecture qu’il prononça en 2010 où ilexpliquait que « l’optimalité d’un point devue social peut exiger une redistributiondesrevenus économiques» – Economics after theCrisis. Objectives andMeans, Cambridge (Mas-sachusets), TheMIT Press, 2012 –, une considé-ration apparentée à celles quimotivaientJohnMaynardKeynes autrefois : la solutiondes problèmes économiques ne peut s’énon-cer qu’en termes qui sont, eux, politiques.Keynes affirma ainsi durant les années noiresde la Dépressionque la logique économiquen’exige pas le plein-emploi,mais le vivre-ensemble, oui.

LordTurner avait fait remarquerdansunautre contexte quenotre économiedemarchéveutque chaquegénération revendeà la sui-vante le parc immobilier à desprix ridicule-ment gonflés, soulignantqu’il s’agit, avec lesprêts au logement, d’une activité financière, làaussi, «socialement inutile».

L’énoncé candidede telles vérités a bienentendumultiplié le nombrede ses ennemisau seinde la City, ce qui explique sansdoutel’insuccèsde sa candidature à la successiondeMervynKingaupostede gouverneurde laBan-qued’Angleterre. Si le petit garçonqui dit quele roi était nu avait ensuite fait carrière,soyons sûrs que cela se serait su.p

Faire juste un téléphone, ce n’est pas assezpour Facebook»MarkZuckerberg, PDGdu réseau social

LordTurneret laCity

l a c i t a t i o n

q u i z

ch ron i q u e

PaulJorionEconomiste et anthropologue

Faute

NathanielHerzberg

Le grand public ne connaissait ni sonnomni sonvisage.Unebonnepartiedumonde de la culture, même, n’avaitjamais entenduparler de Jean-LucMar-

tinez, directeur dudépartementdes antiquitésgrecques,étrusquesetromainesduLouvre.Cet-te époque est révolue. A 49ans, l’archéologueaété choisi par François Hollande pour occuperle poste le plus prestigieux du monde de laculture : président du Louvre. Depuis 2007,Jean-LucMartinezveillait, certes, sur laVictoirede Samothrace et la Vénus de Milo, deux destrois icônes du musée. Désormais, la Jocondesera elle aussi sous sa coupe, demême que ses60conservateurs, 2000employés et près de10millionsdevisiteursannuels.Enlepréférantà Sylvie Ramond, la directrice du Musée desbeaux-artsde Lyon, et à Laurent LeBon,patronduCentre Pompidou-Metz, le chef de l’Etat faitdoncunpari.

Homme du sérail, connaissant très bien lesarcanesdelamaison, Jean-LucMartinezn’enestpasmoinsunconservateuratypique. LesbeauxquartiersparisiensoùagrandisonprédécesseurHenriLoyrette,filsd’avocatd’affaires, luinelesafréquentés que sur le tard. Enfant d’immigrésespagnols, il représente, au contraire, le parfaitproduitdelaméritocratierépublicaine.ElevéaucœurdelaSeine-Saint-Denis,oùilasuivil’essen-tieldesascolarité, il est lepremierde la familleàdécrocher le baccalauréat. Après l’agrégationd’histoire,c’estencoreenbanlieueestqu’ilensei-

gnedans le secondaire. En 1993, il intègre l’écolefrançaise d’Athènes, pour laquelle il accomplitdes fouilles àDélosetDelphes.

Car,àcôtédesoncursusuniversitaired’histo-rien,Jean-LucMartinezasuivi lescoursdel’éco-le du Louvre en histoire de l’art et archéologie,discipline qu’il enseigne à l’Institut français derestaurationdesœuvresd’art, ou à l’universitéParis-XNanterre.En1997,àsonretourdeGrèce,il devient conservateur en chef du patrimoineet entre au Louvre. Il s’est aussi illustré auxavant-postes de l’aventure du Louvre-Lens.Elus locaux et mécènes lui sont devenus pres-que familiers. Le début de l’apprentissage deson nouveau métier, qui cumule, selon MarcLadreitdeLacharrière, sponsordumusée, ceuxde «scientifique, chef d’entreprise, ambassa-deur, capable d’attirer l’argent des mécènes etde séduire les politiques». Excusez dupeu.p

Dansquel pays lesprixde l’immobilieront-ils le plusbaissé pendant la crise?v LaGrèce?v L’Espagne?v L’Irlande?

L ’ancien«tigre celtique» est celui qui a connu la plus forte chute desprix après l’explosionde la bulle immobilière qui a ravagé son

secteurbancaire, sauvépar l’Etat, lui-mêmesauvépar unpland’aideeuropéen. En Irlande, les prix ont baissé demoitié depuis le secondtrimestre 2007. Ilsmontrent enfin des signesde stabilisation, selonunenotedes économistes de la banqueGoldmanSachs, SebastianGraves etKevinDaly, publiée vendredi 5avril. Les nouvelles constructions sonttombéesde 70000unités en 2007à près de zérodepuis 2010. Parcomparaison, les prix de l’immobilier ont chutéde 25%à 30%enEspagneet enGrèce. C’est aussi l’ordre de grandeur aux Etats-Unisoù,àl’inverse, les prix ont repris le cheminde la hausse. Selon leséconomistesdeGoldmanSachs, les prix irlandais auraient rejoint leurvaleurde long terme,malgrédes incertitudespersistantes à court termeen raisonde la situationdu crédit. Ils estiment aussi que l’offreexcédentairede logements pourrait se résorber endeuxàquatreannées, voiremoinsdans certaines zonesurbainesoù la constructionpourrait redémarrer.pAdriendeTricornot

l e m o t

ÉCO&ENTREPRISE A C T U

Mardi 9avrilAdeccoGrèvedes salariés d’A-decco, n˚1mondial de l’intérim,contreunprojet de changementdu systèmede rémunération.

IngénieursTop ingénieurs,Salonde recrutement, à laDéfen-se (Hauts-de-Seine).>www.saloningenieurs.comGrandes familles «Etats del’entreprise familiale», organisépar FamilyBusinessNetworkFrance à Paris-Dauphine.> http://www.fbn-france.frTravailVote solennel à l’Assem-bléenationale sur le texte dupro-jet de loi transposant l’accord surla sécurisationde l’emploi que leSénat examineraen séancepubli-que àpartir du 17avril.Social Journéed’actionscontre leprojetde loi sur la sécurisationdel’emploi.Manifestationnationaledes retraités, à l’appelde l’Unirs,pourdirenonà l’austéritéaccruedes retraités.Vietnam Lancement, àHanoï,de l’AnnéeFrance-Vietnam2013(en2014, annéeduVietnamenFrance).

Mercredi 10avrilG8Réunionà Londresdesminis-tresdes affaires étrangèrespourpréparer le sommetdes 17 et18juin (et 11).Informatique Technologie etinformatiqueprofessionnelle auCloudComputingWorld Expo, auCNITà laDéfense (et 11).>www.cloudcomputing-world.comScience Salon international desinventionsàGenève (jusqu’au 14).AustralieDate limitepourpos-tuler à l’undes «6meilleurs jobsdumonde» offerts par l’Australie.> https ://bestjobs.australia.comCriseTables rondesde l’Arbois:«Risques, crises etopportunités»,aucampusMontperrin,àAix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).>www.arbois-med.comEducation «Non‚ lesbusinessschoolsne sontpasdesimplesgar-diennesde l’économiecapitalisteclassique», séminaireorganiséparleCollègedesBernardinset l’EcoledeParisdumanagement, àParis.>www.ecole.org/fr/agendaModeMade in France, Salondela «haute-façon», auCarrousel duLouvreà Paris (et 11).>www.salonmadeinfrance.com

Jeudi 11avrilEntreprise Etats générauxdudroit de l’entreprise sur le thème«Pérennité et croissancede l’en-treprise», à Paris.> http://cnb.avocat.fr

Vieillesse Planète seniors, leSalondes seniors, à Paris, porte deVersailles (jusqu’au 13).Allemagne L’Officedes statisti-quesDestatispublie le chiffre défi-nitif de l’inflationallemandedefévrier, à sonplus basniveaudepuisplus de deuxans.Technologie LesMatins de l’In-novation: «Big data révolution:commentgérer l’innovation?»,organisépar l’Essec, auCNITde laDéfense.> https://sites.goo-gle.com/a/essec.edu/isisInnovation ForumFuturapolis«La ville de demain», à Toulouse(jusqu’au 13).

Vendredi 12avrilMode SalondesGrands, à Paris(et 13).>www.salondesgrands.comChypreValidationpolitiqueduprotocoled’accordduplande sau-vetage européen soumis auxministresdes finances de la zoneeuro àDublin, qui devra être sui-vie d’unevalidation juridique.

Samedi 13avrilOutre-mer JournéeOutre-merdéveloppement, lieud’échangesavec les acteurséconomiques,auPavillonGabriel, à Paris.>www.jomd.fr

Dimanche 14avrilVenezuelaElectionprésidentiel-le.

Lundi 15avrilBudget Premier avis duHautConseil des finances publiquessur les prévisionsmacroéconomi-quesassociées auxprincipauxtex-tes financiersdugouvernement.Energie Forummondial del’énergie àDubaï (jusqu’au 17).TourismeAudiencepréliminai-re àGrossetto (Italie) dans le pro-cès sur le naufrage le 13 janvier2012duConcordia.Résultats annuels FleuryMichon, Soitec et chiffre d’affairespour le 1er trimestre LVMH,XilamAnimationet PPR.DouxDate limite pour le dépôtd’éventuellesoffresde reprise del’abattoirde dindesdugroupeDouxàPleucadeuc (Morbihan).

ImpôtDébutde l’envoi des for-mulairesd’impôt sur le revenuaux contribuables.GazRapport de la Commissionde régulationde l'énergie remisaugouvernementpourprésenterles coûts deGDFSuez.Etats-UnisDate limite légaled’adoptiond’unbudget de com-promisde financementde l’Etat.

«Manquementàunerèglemorale,deconduite;actionconsidéréecom-memauvaise», selonlesdiction-naires, lemot,employédès leXIIesiècledanslesensd’«actiondefaillir», apouroriginelatine falle-re:«tromper»,«décevoir»ou«trahir».Cemanquementaudevoirpeutêtresanctionnéparunepeine…loindecellequeJérô-meCahuzacpourraitsusciter,à levoirsedébattredanssesmenson-ges.Parolesd’experts:«Ilne fautpasqu’unefaute individuellepro-duiseunecrisegénéraledurégi-me»,pourledéputé(PS) Jean-ChristopheCambadélis,poursuiviensontempsdanslecadredel’af-fairedelaMNEF. Jean-MarcAyrault, condamnépoursaparten1997,metenavantl’«exigenced’exemplaritéfaceà lafaute»desonex-ministredubudget.«Lesfautes,politiqueetmorale,de Jérô-meCahuzacexigent lasanctionlaplusferme», adéclaré lepremiersecrétaireduPartisocialiste,Har-lemDésir, condamnéen1998pourreceld’abusdebienssociaux.Afustiger lemoral,onenoublie-raitpresquelelégal: lessommesquedoitM.Cahuzac.Unegoutted’eausi l’onencroit lapropositiondeloid’amnistiefiscaledéposéele28marspardesdéputésUMP,qui«permettraitderapatrierenquel-quesmois130à150milliardsd’eu-ros». Etquiontcherchéàrattrapercettefauteendéposant, le4avril,unepropositiondeloi instituantundélitdeparjure.p

Pierre Jullien

Agenda

Les banquiers de Londres«ont été horrifiés

que jemetteenquestion les activitésdemarché et l’arbitragede la réglementation

financière»LordAdair Turner

ex-présidentde la Financial ServicesAuthority

JACQUES DEMARTHON/AFP

FRED TANNEAU/AFP

Jean-LucMartinez, en août2011, auMuséedu Louvre, à Paris. MIGUEL MEDINA/AFP

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30123Mardi 9 avril 2013A C T U ÉCO&ENTREPRISE

Singapour, les limitesd’unmodèle

Antoine Reverchon

(à Singapour)

Dans les dix ansà vingt ans àvenir, les patronsdes dizai-nes de milliers d’entrepri-ses privées créées en Chine

pendant les réformes lancées parDeng Xiaoping en 1992 devront cha-cunse trouver…unsuccesseur.

C’est lemêmedéfi que les entrepri-ses françaisesnéespendant les «tren-te glorieuses» ont dû relever dans lesannées 1980. A ceci près, observeAndré Chieng, président de la sociétéde conseil Asiatique européenne decommerce, que « la politique de l’en-fantuniqueet l’absencedetraditiondetransmissionhéréditaire», enlimitantles candidats «naturels» à la succes-sion,créentunbesoindeformationdedirigeants, y compris pour des firmesdevenuesdesmultinationales.Enfait,c’esttoutel’Asieémergentequiestà larecherche des managers qui permet-tront à leurs entreprisesd’affronter laconcurrencemondialisée.

Des doyens et présidents d’univer-sitésoud’écolesdegestioneuropéen-nes et asiatiques ont planché sur cesujet lors d’un séminaire organisé aucampusdel’Essec,àSingapour,à lafindefévrier.Carrienneditqueles«busi-ness schools» occidentales, qui ontfait de l’Asie une terre de mission aucours des deux décennies précéden-tes, soient les mieux placées pourrépondreà cettedemande.

Il y a quinze ans, le Singapore Eco-nomicDevelopment Board, le «com-missariat au plan» de la cité-Etat,avaitlancéunprogrammedesubven-tions destiné à inciter les meilleuresuniversités technologiques et demanagement occidentales à venirs’installer dans l’île. MassachusettsInstituteofTechnology,Insead,Essec,Harvard… L’objectif était, en pariantsur l’économiede la connaissance, defaire d’une ville sans ressources enmain-d’œuvreou en produits agrico-lesetminiers,uneplate-formeincon-tournable dans les réseaux mon-diaux de l’industrie financière, de lalogistique,destechnologiesdel’infor-

mation et des biotechnologies. Endépassantl’étapedes«usinestourne-vis» qui s’ouvraient alors partoutdans les pays voisins pour fabriquerordinateurs et téléviseurs.

Pari réussi : en 2012, Singapour estla quatrième place financière et ledeuxièmeportdumonde. Lapartdesbiotechnologies dans les exporta-tions a dépassé celle de l’industrieélectronique, pour atteindre 25%.Pourtant, ce sont les derniers dollarsdeceprogrammequiontétéaccordésà l’Essec, présente dans l’île depuis2005, pour construire un nouveaucampus dont l’ouverture est prévuepour2014.Carlesplanificateurssinga-pouriensont changéde stratégie.

Laprioritéestauxcerveaux«natio-naux». « Je pense que la clé pourdemeurer compétitifs réside dansnotrecapacitéàdévelopperunepopu-lationquipourras’épanouirdansuneplanètemondialisée.Celasignifieéqui-per nos étudiants des compétencesrequisesauXXIesiècle, du savoir et desvaleurs qui les rendront adaptablestoutaulongdeleurvie», expliquait, le

26février à l’Essec, Heng Swee Keat,ministre singapourien de l’éduca-tion. Et d’ajouter : «Le vieux modèle,où les économies émergentes devai-ent juste copier et adapter lesmeilleu-res pratiques des économies dévelop-pées, n’aplus cours».

Pour le ministre, la formation desmanagers singapouriensne doit pluss’appuyer sur la méthode des étudesde cas d’entreprises occidentalesissus du passé, mais sur l’analyseinterdisciplinaire des contexteslocaux. «Une université véritable-mentmondiale n’est pas la juxtaposi-tionde campus identiques les unsauxautres, mais au contraire l’institutiondecampuscomplémentairescapablesd’incorporer les caractéristique-clésdechacunede leurs implantations.»

Ce n’est pas Pierre Tapie, le direc-teur de l’Essec, qui le démentira: «Letravail de recherche que nous effec-tuons ici sur les modes de manage-ment et de gouvernance des entrepri-ses asiatiques –en réalité très diffé-rents d’un pays d’Asie à l’autre– doitnourrir le contenu de nos enseigne-ments, y compris en France. Nousdevons rester capables d’apporter desréponsesauxquestionsdesentreprisesmondialisées sur le basculement de larichesse mondiale entre Occident etOrientqui est en trainde seproduire.»

Si la demandedes entreprises asia-tiquesétait jusqu’ici lamêmequecel-le des multinationales occidentales–l’apprentissagedes«meilleurespra-tiques» mondiales, en fait américai-nes–, elle est aujourd’hui de formerdesmanagers aptes à comprendre etgérer les réalités locales : pas seule-ment les goûts des consommateurs(l’Asie représentera les deux tiers desclasses moyennes de la planète et60% de la consommation mondialeen 2020), mais aussi les comporte-ments des salariés, des partenaireséconomiques, des institutions socia-les et politiques. Et en Asie les grou-pes, occidentaux comme asiatiques,souhaitent pour cela recruter descadres asiatiques formés par desenseignants et des chercheurs asiati-ques, ajoute Jean-Pierre Choulet, res-ponsable des services carrière descampus français et singapourien del’Essec.

«En Asie, explique Ta-Wei Chao,directeurAsie de l’Institutd’étudeset

de recherches sur la négociation del’Essec, les relations entre les salariésd’uneentreprisenesontpaspurementprofessionnelles, elles s’apparentent àcelles d’une famille. On y suit moinsdes règles ou des procédures que destraditions, la loyautéyestplusassuréepar ces liens sociaux que par la rému-nération. Dans une entreprise améri-caine, un cadeau de 25 dollars[19,5euros] àun client est considérécomme de la corruption ; dans uneentreprise chinoise, il est considérécommeune injure.»

Toutefois, Arijit Chatterjee, profes-seur associé à l’Essec, «ne croit pasqu’il existe un modèle asiatique demanagement ou de gouvernance desentreprises. Le management est unediscipline jeune, née dans lesannées1930 à partir de la sociologie :àce titre, elle doit se nourrirde contex-tes plutôt que de concepts.Or, lamon-dialisationn’apasrendulaterreplate.Elle a rendu nécessaire la compréhen-sionde la géographiedes cultures, descivilisationset des inégalités.»

Tai-Wei Chao note d’ailleurs que lemanagement chinois est lui aussi encrise. «Les changements sociaux ontété si radicauxet si rapides qu’il existeaujourd’hui de fortes tensions entreles dirigeants et les jeunes. D’autantque, produits de la politique de l’en-fant unique, ceux-ci n’ont pas connude grandes fratries, et ont tendance,par leur individualisme,à remettre enquestion la recherche du traditionnelconsensusnégocié.»

Au final, les managers asiatiquesconstatent, comme leurs homolo-gues occidentaux, que leurs «recet-tes» ne marchent pas lorsqu’il s’agitde se confronter à une économie cer-tesmondialisée,maisquin’enestpaspour autant simplifiée, tant elle restemarquée par les réalités locales. Lemanagement de la mondialisationreste à inventer.p

«Lemanagement doitsenourrir de contextesplutôt quede concepts»

Arijit Chatterjeeprofesseur associé à l’Essec

L’AsieémergenteàlarecherchedemanagersL’entréed’entrepriseschinoisesouencoreindiennesdanslebaindelamondialisationrequiertdenouvellescompétences.

Singapourseveutlehavredes«businessschools»quiinventerontunmodedegestionnourridespratiqueslocales

L’Essec, à Singapour,le 4avril.

ORE HUIYING POUR «LE MONDE»

L e gouvernementvousaide si vousêtesBlanc,mais pas si vous êtesd’ici».Mark Phooi, fondateurde

FirstMedia, devenue le plus importantgroupementd’unedizained’agencesdedesignbasées à Singapour, Taïwan,Bangkok, Shanghaï etKuala Lumpur,avec 100salariés, rapportequ’«il y amêmeune chansonquidit que si vousquittez Singapourpour inventerquel-que chose, le gouvernementvousaccueilleraenhérosà votre retour». Etde citer le casde son compatrioteSimWongHoo, fondateurdeCreativeTech-nologies et inventeurde la carte sonSoundBlaster.

Car la recherchede l’harmonie socia-le etpolitique, dansuneville où lepou-voir colonial britanniquea longtempsjouédes rivalités entre les trois commu-nautésqu’il y avait réunies – lesChinois(77%), lesMalais (14%) et les Indiens(8%) –, a étouffé,dansuncarcandecivis-mediscipliné, toute créativité.

S’ils ont réussi à faire de leur ville unaimantpour les gestionnairesde fortu-

ne, les chercheursde renomméemon-diale et lespetits géniesde l’informati-que, les dirigeants singapouriens sesontaperçusde la fragilitéde cemodèleoffshore: unparadis fiscal peut, sou-dain, êtremis aubande la communau-té internationale, les voisins chinois,indiensetmaintenant indonésiens,sont capablesd’attirer cerveauxet capi-tauxoccidentaux,dansdes pays à lacultureplus attrayanteque l’austèreSingapour,dirigéedepuis l’indépendan-ce en 1965par lemêmeparti et lamêmedynastiedepremiersministres.

MédiasauxordresA l’heured’Internet, les Singapou-

riens apprennent,malgrédesmédiasauxordres, que, si la corruptionn’exis-tepas dans leurpays, c’est parce que lescadresduParti d’actionpopulaire(80députés sur 87) et leurs famillessontà la tête des fondsd’investisse-mentsprivés et des cabinetsd’avocatssansqui rienne se fait. Quant auxministres, leur rémunérationest ali-

gnée sur les revenusdes 3%des diri-geantsd’entrepriseprivée lesmieuxpayés de l’île…

Mais le passage inédit d’une circons-criptionà l’oppositionauxélectionsde2011 a sonné l’alarme. Confrontéà la cri-se économiquemondiale, le gouverne-ment a annoncé envrac une révisionàla baisse de l’immigrationprofession-nelle pourpromouvoir ses proprescitoyensdans les emplois qualifiés, l’at-tributiond’un logement à chaquefamillemal logée victimede la flambéeimmobilière, le doublementde l’aidesociale auxménages à bas revenus, desinvestissementsdans la santé et l’édu-cation, la taxationdes voitures de luxeet…une réductionde 30%des salairesdesministres. La cité-Etat sembledéci-dée à investir dans le capital humainde sapopulation. En 2011, l’école crééeparMark Phooi en 2006pour formerdes «designpreneurs» à son image aobtenu la reconnaissanceofficielle desondiplôme.p

A.R.

Page 4: Le Monde 20130409_ECO

Depuislafindedécembre2012, lenouveaupremierministre,ShinzoAbe,aengagéunenouvellepolitiqueéconomique.Objectifdeces«Abenomics»:fairesortir l’Archipeldedeuxdécenniesderetourpériodiqueencrisedéflationniste.Lepremierrésultattangible,maisinsuffisant,estleviragedepolitiquemonétaireimposéàlaBanqueduJapon,quiapermisladépréciationduyen

L’économiejaponaisetentelarelanceàtoutprix

ÉCO&ENTREPRISE D O S S I E R

PhilippeMesmer

Tokyo, correspondance

Les «Abenomics»,comme on appel-le les réformeséconomiquesengagées par lepremier ministrejaponais ShinzoAbe,deviendront-

ellesles«Abemagics»ensortantleJapon d’un enfer économique quidure depuis plus de vingt ans? Laquestion continue de faire débatdansl’Archipel,où,depuissonarri-vée au pouvoir à la fin de décem-bre2012,M.Abeaengagéunepoliti-que économique axée sur la relan-ce par l’investissement public etl’assouplissementmonétaire.

Les mesures, destinées à relan-cer la croissance et à sortir le paysde la déflation, sont multiples. Legouvernement a déjà décidé d’unbudget supplémentaire de

13100milliards de yens (106mil-liards d’euros) pour l’exercice2012, clos à la fin demars. Il a aug-mentél’enveloppeallouéeauxtra-vaux publics pour l’exercice 2013de16%,à5290milliardsdeyens.Ala différence des plans de relancetraditionnels, l’objectif n’est passeulement de financer des tra-vaux d’infrastructures mais desoutenir l’investissement et l’in-novation, notamment au traversde partenariats entre entrepriseset universités.

Dans lemême temps, la Banquedu Japon (BoJ) a changéde gouver-neur. Le 21mars, Masaaki Shira-kawa a été remplacé parHaruhikoKuroda, plus proche des idées deShinzoAbeenmatièred’assouplis-

sementmonétaireetquis’estenga-gé à porter, par tous les moyens,l’inflation à 2% en deux ans alorsque les prix ont reculé en févrierpour le quatrième mois consécu-tif. La contractionaétéde0,3%parrapport à février2012.

Le gouvernement a égalementengagéune réflexion surunenou-vellestratégiedecroissance.Atten-due en juin, elle pourrait se tradui-re par des réformes structurelles,notamment des conditions del’emploi, avec l’introduction deplusde flexibilité.

L’administration Abe a aussichoisi de lancer le Japon dans desnégociations sur le libre-échange.Tokyo va participer à celles sur lepartenariat transpacifique, uncadre promu par les Etats-Unis etqui réunitplusieurspays riverainsdu Pacifique. Le Japon a engagé, le25mars, des discussions avecl’Union européenne pour unaccorddelibre-échangeetapartici-pé à la fin du mois de mars à unepremièresériedepourparlersavecla Corée du Sud et la Chine sur unsujet similaire.

Cet activisme coïncide avec laforte baisse du yen et la hausse dela Bourse de Tokyo, amorcées ennovembre2012, et égalementavecunetimidereprisede l’activi-té. Après deux trimestres decontraction, le produit intérieur

brut (PIB) est reparti à la hausse,de 0,2% en glissement annuel,entre octobre et décembre2012. Sibien que M.Abe peut se targuerd’avoir déjà redonnéun semblantde confiance dans une économiequi en a besoin.

Il bénéficie d’une image favora-ble auprès des entreprises, dontune partie a répondu favorable-ment à son appel lancé en faveurd’unehausse des rémunérations.

Les Japonais semblent moinssombres. Le 12mars, l’indice deconfiance des consommateurs

s’établissait à 44,3points, en haus-sepourledeuxièmemoisconsécu-tif et proche des 44,4 pointsatteintsen juin2007, avant la criseditedes «subprimes».

L’indice Tankan de confiancedes entrepreneurs, calculé par laBoJ, montrait, en mars, un signedesensibleamélioration,s’établis-sant à – 8 pour la période janvier-mars, contre – 12 au trimestrepré-cédent. Difficile de dire si cela vadurer, tant les mesures annon-cées continuent de susciter desdébats. Dans une étude publiéeau début de mars, l’institut derecherche Daiwa estimait que les«Abenomics» avaient « le poten-tiel pour favoriser le redressementde l’économie».

Au contraire, estimait fin marsYasushi Iwamoto, de l’universitéde Tokyo, dans l’hebdomadaireéconomique Diamond, « la politi-queéconomiquedeShinzoAben’a,pour but, que de susciter desespoirspar lebiaisd’unassouplisse-ment monétaire. Mais ces espoirsne sont fondés sur aucune réalitééconomique. Ils vont engendrerunebulle qui sedégonflera lorsqueles attentes seront déçues.»

La prudence reste demise pourla troisième économie mondiale,qui reste confrontéeàunendette-mentmassif, dépassant les 200%duPIB, dont la résolutionne sem-ble pas être la priorité du gouver-nement même s’il ne devrait pasrevenir sur la hausse d’ici à 2015de 5% à 10% de la taxe sur laconsommation.

Demême, ladernièrepériodedecroissancedurable,quoiquemodé-rée, vécue par le Japon, s’est termi-

«Lapolitiqueéconomique

dugouvernementn’apour seul butquede susciterdes espoirs»Yasushi Iwamotouniversitéde Tokyo

Lesraisonsd’unchômagebas

Des traders de la Boursede Tokyo suivent, sur l’écran

de télévision, le premierministre ShinzoAbelors d’une séance

de la commissiondu budgetà la Chambre basse

duParlement, le 12février.TONU HANAI/REUTERS

L ’appel lancé le 5février par le pre-mierministre ShinzoAbe en faveurd’unehaussedes rémunérations

des salariéspour soutenir sapolitiquederelancea euuneffet certain.Mêmesi lesgrands industrielshésitent, beaucoupd’entreprises, essentiellementde ladistri-butionet des services, ont répondu favo-rablementà cet appel, enpromettantdesaugmentationsdes traditionnelsbonussemestriels.Mais aucunene s’est enga-géeà élever le salaire debase.

La question reste délicate etmême lessyndicats ne veulent pas en rajouter.Car pour eux, le problème est intime-ment lié à la garantie de l’emploi. En casde difficultés, ils préfèrent que les tra-vailleurs conservent leur poste plutôtqu’ils ne soient licenciés parce qu’ils coû-tent trop chers.

Cettephilosophie expliqueenpartiele faible niveaudu chômage au Japon.Malgréplus de vingt annéesde difficul-tés économiques,marquéespar plu-

sieurs épisodes de récession, le chômages’établissait à 4,3%en février2012. Sonpic a été atteint en juillet2009, à 5,6%. Leplus bas l’a été en 1968, à 1%. Et la tendan-ce est à la stagnation.

PrécaritéLors de crises, les grandes entreprises

japonaisesdisposent deplusieurs varia-bles d’ajustementqui leur permettentdelimiter les licenciements, au demeurantcoûteuxcompte tenude la législationenvigueur. Elles peuvent réduire les rému-nérations, en commençantpar celles desdirigeants. En 2009, conséquencede lacrise des subprimes, le salairehoraire abaisséde 8,1%.

Les grands groupeshésitent égale-ment à recourir aux licenciementspourdesquestionsd’image. «Les grandesentreprisespeuventalors apparaître com-memal gérées ou incapables demainte-nir l’emploi», observeMasamiNomura,de l’université duTohoku, et ce,même si

de tellesmesures sont aujourd’huimoinsmal acceptées.

Les entreprisespeuvent aussi jouersur les heures supplémentaires, souventimportanteset sur les postesd’intérimai-res, contractuelsou àduréedéterminée.Et en 2011, 35,1%des actifs occupaientdetels emplois précaires.

Liée à la précarité, uneautre raisonaufaibleniveaude chômageest la situationde l’emploides femmes.Malgréunehaus-se régulière, seules 48,2%des femmesdeplusde 15ans étaient engagées en2011sur lemarchédu travail, contre 71,2%deshommes.Cette situationdécoule enpar-tiede la politiquedesgrandes entreprisesqui assurent–mêmesi cela tendàdimi-nuer – à leurs employés à tempspleinun«salaire familial», calculépourqu’il aitlesmoyensde subvenir à tous les besoinsdu foyer.Demême, 54,7%des femmesétaient employées sous contratprécaire,contre 19,9%deshommes.

Dans lemême temps, la baissede la

populationactive entraîne, aujourd’hui,unepénuriedemain-d’œuvrequidevientproblématique, aupoint de retar-der la reconstructiondes zonesdévas-téespar le séismedu 11mars 2011 et lamise enœuvredesmesures de soutien àl’économiedugouvernementAbe. Leratio offre d’emploi-demandeursd’em-ploi était à 0,85 en janvier et février, cequi signifie qu’il y avait 85offres pour100chômeurs.

Dans cette situation, l’Archipelhésite àouvrir sesportes à l’immigration.A la findes années 1980, il avait autorisé lesBrési-liensdescendantsde Japonais ayant émi-gré audébut duXXesiècle, à venir tra-vailler au Japon. Récemment, il a fait demême,demanière très limitée, pouraccueillir, chaqueannée, quelques centai-nesd’aides-soignantsdes Philippines etd’Indonésie.Mais la réflexionporteaujourd’huidavantage sur l’emploidespersonnesâgées et des femmes.p

Ph.Me.

4 0123Mardi 9 avril 2013

Page 5: Le Monde 20130409_ECO

D O S S I E R ÉCO&ENTREPRISE

A uteurde LaGrandeTransforma-tiondu capitalisme japonais (Pres-ses de SciencesPo, 2011), Sébas-

tien Lechevalier est présidentde la Fon-dationFrance-Japon (ffj.ehess.fr) etmaî-tre de conférencesà l’Ecole des hautesétudes en sciences sociales (EHESS). Ilanalyse le changementdepolitiqueéco-nomiqueau Japon, et ses leçonspourl’Europe.

Jeudi 4avril, lesmesures annoncéespar le nouveaugouverneurde la Banquedu Japon (BoJ)HaruhikoKurodaont per-mis au yende baisser à sonplus basniveaudepuispresquedix-huitmois. LaBoJ vadoubler ses achatsmensuelsd’obligations sur lemarché, et elle se don-nedeuxans pour atteindreunobjectifd’inflationde 2%.

Lanouvellepolitiquemonétaire japo-naise réussit à produireun choc favora-ble et attendupar les acteurs économi-quesnippons. Cependant, analyseM.Lechevalier, au-delà duvirage imposéà la BoJ, la politique économiquedunou-veaugouvernementne constituepas glo-balementune franche rupture avec cel-lesmenéespar le passé.

A-t-on raisonde considérerque le nouveau gouvernementjaponais prendun virage économiquehistorique?

Non.A l’exceptionde la politiquemonétaire, il faut relativiser la nouveau-té de cette politique: prônerdes réfor-mes structurelles tout en laissant filer lesdéficits budgétaires est une stratégiemaintes foismise enœuvredepuis lesannées 1990. En cettematière, je ne voisriendenouveauà l’Est.

En revanche, unevraie rupture sesitue enmatièremonétaire, par la pres-sion exercée sur la Banquedu Japon afinqu’elle adopteunobjectif d’inflation.Orce changementdepolitiquemonétaire apermisune fortedépréciationduyen–qui devrait se poursuivre– et c’était sansdoute le principal objectif visé, davanta-ge qu’un retour de l’inflation.

Ce qui est impressionnant– et exagéré

– est que le débat économiquese polari-se au Japonuniquement sur le tauxdechangeduyen.Mettre fin à l’envoléeduyen, c’est à la fois la préoccupationdel’hommede la rue et la principale reven-dicationdupatronat. Au stade actuel, leniveauduyenn’en fait pas pour autantune armede combatpour les exporta-tions, puisqu’il est seulement revenuàsonniveaude 2009.

Il serait donc exagéré de parlerd’«Abenomics»?

Oui! Le succès de cette expressionexa-gérée est un joli coupmarketing. C’estparadoxalement lemoins économistedetous les premiersministres japonaisdepuis vingt ansqui donne sonnomàunepolitiqueéconomique. Cependant, ilfaut reconnaîtreque cequi est récompen-sé – y compris parunepopularitépersis-tante –, est la volonté de changer l’ordredespriorités, et de créer d’abordun chocmonétairepour regonfler l’économieaprès l’envolée duyenet le dramedeFukushima. L’ajustementbudgétaire etles réformesde compétitivité sont repor-tés à plus tard. La «vision» est dans cetenchaînement.C’est la leçonque l’Euro-pepourrait retenir.

Commentune voixmonétairehétérodoxe a-t-elle ainsi pu se faireentendre dans l’Archipel?

Des économistesont pesé dans ledébat, commeKoïchiHamada, profes-seur émérite à Yale [Connecticut], etd’autres de ses confrères – telsMotoshi-ge Ito et Takatoshi Ito, de l’universitédeTokyo. Ce dernier a depuis longtempscri-tiqué l’absenced’objectifs d’inflationparla Banquedu Japon.

Cette évolution a été possible parl’échec des politiquesmenées face à lacrise. Au cours des années 1990 – ladécennie perdue –, des hausses d’im-pôts (taxe sur la valeur ajoutée, TVA) etdes restrictions budgétaires ont été déci-dées aumoindre signe de reprise,notamment en 1995-1996, étouffantl’embellie dans l’œuf. Dans les années

2000, le Japon – devenu beaucoupplusouvert, concurrentiel et intégré au com-merce régional etmondial – a d’abordprofité du boomchinois pour exportermassivement des biens d’équipementet bénéficié de la conjoncturemondiale.Dans lemême temps, il est devenubeau-coupplus sensible à la conjoncturemon-diale, ce dont témoigne la récession quia suivi le «choc Lehmann»: la crise despays développés.

Cela révèle la principale faiblesse de cenouveaumodede croissance,mais aussid’«Abenomics». D’unepart, la contribu-tionde la consommationest trop faible.D’autrepart, l’une des grandes faiblessesde la politiqueactuelle est denepasavoir comprisque la principale causedela déflationpersistante est la stagnationdes salaires. Cela impliqueunevéritablepolitiquedes revenus. C’est la principaleleçonque l’onpeut tirer, enEurope, del’expérience japonaise.

Unehausse possible de la TVApourrait-elle relancer l’inflation?

Ladécisionde remonter le tauxdeTVA, actuellement très faible (5%!), estunedes causesde la chutede l’anciengouvernement. L’actuel est plusprudentsur ce sujet, dumoins jusqu’auxélec-tions sénatorialesde cet été.Mais si l’in-flationdoit revenir, ce sera avant toutparladévaluationduyen et la haussequi endécouleraduprixdes importations.

Pour rétablir, à terme, les comptespublics, tout autre levier possibleque laTVAsera préférépar ce gouvernement.Eneffet, imposer la consommationestincroyablement impopulaire au Japon.Aumoinsdepuis les années 1980et l’in-fluenced’une réforme fiscale à la RonaldReagan, le présidentdes Etats-Unis de1981 à 1989, l’aversionà l’impôt est trèsforte, à unpoint étonnantdansunpayssi civique. Et d’autantplus que l’épargnedesménages finance àun tauxd’intérêtridicule la gigantesquedette de l’Etat(240%duproduit intérieurbrut).p

Proposrecueillis parAdriende Tricornot

néeen2008.Commencéeen2002,elle avait dépassé, en durée, le«boom Izanagi», période de fortehausse du PIB entre les Jeux olym-piquesdeTokyode1964etl’exposi-tionuniverselled’Osakaen 1970.

Mais elle n’avait pas atteint lamêmeampleur.Al’époque,lacrois-sance moyenne annuelle dépas-sait les 10%. Cette fois, la période aétémarquéeparunelégèreamélio-rationdes financespubliquessousl’impulsion du premier ministreJunichiro Koizumi, en poste de2001 à 2006, et d’une plus grandelibéralisation de l’économie dontl’illustration fut la privatisationdes services postaux. Ces annéesont représenté une éclaircie aprèsune décennie difficile, conséquen-ce du dégonflement de la bulle dela findes années 1980.

A la fin de 1989, l’indice Nikkeiavait atteint les 38915points, troisfois sa valeur de 1986. Le Japonvivaitalorsleparoxysmed’unebul-lespéculativealimentéeparunlais-ser-faire généralisé, à commencerpar celui duministèredes financesetdesonhomologueducommerceinternationalet de l’industrie.

La politique monétaire étaitaccommodante,avecuntauxdirec-teur à 2,5% et la finance se libérali-sait. Les entreprises et les particu-liers ont alors profité d’un accèsfacilité au crédit pour accumulerdes actifs, au Japon comme àl’étranger, vite surévalués.

Le dégonflement, provoquéparl’impact de la première guerre duGolfe notamment et surtout de laremontée des taux à 4,75%, a eudes conséquences désastreuses.Les banques se sont retrouvéesconfrontées au problème descréances douteuses dont le mon-tant atteignait 9000milliards deyens en 1995. Plusieurs ont faitfaillite.

L’économie réelle a été dure-ment touchée, à commencerpar lesecteurdubâtimentetdestravauxpublics. A la suite du scandale des«Jusen»,desétablissementsdecré-dit au particulier, les promoteursse sont retrouvés avec 6410mil-liards de yens de pertes. Les entre-prisesontmultiplié lesrisutora, lesrestructurationsaccompagnéesdelicenciements.

Du début du dégonflement dela bulle à 2002, la croissanceannuelle moyenne n’a pas dépas-sé 1,6%, contre 3,3% dans lesannées 1980. Le chômage est pas-sé de 2% à 5,5%, le travail précairea augmenté, les prix de l’immobi-lier ont chuté et la déflation s’estinstalléedurablement.

Désireuxdesesortirdesdifficul-tés, legouvernementamisenplace12plansde relance endixans, pourun total d’environ 140000mil-liardsdeyens.Pour les financer, il aaugmentélataxesurlaconsomma-tion en 1997. Conjuguée à la criseasiatique, cette augmentation a euégalement des conséquences trèsnéfastes sur l’activité.

Mais, contrairement à l’idéedominante d’une «décennie per-due», le Japon s’est transformé,organisantuneprofonderestructu-rationdusecteurbancaireet adap-tant son économie aux exigencesde lamondialisationnaissante.

Il a égalementmultiplié les ini-tiativespour relancer l’activité, enmargedesplansderelance.LaBan-que du Japon, indépendante en1998,aainsiabaissésontauxdirec-teur jusqu’à s’engager, en 2001,dans la politique des taux zéro,dited’«assouplissementquantita-tif»,quis’est traduiteparuneaug-mentation dumontant des réser-ves des banques à 35000mil-liardsdeyens,uneémissionmassi-ve de monnaie et la hausse desachatsdebonsduTrésor japonais.Elle n’en est sortie qu’enmars2006, avec le retour d’unelégère haussedes prix.

Lacriseducrédithypothécaireàrisque, qui a éclaté aux Etats-Unis,amisfinàcettepériodedecroissan-ce, sans avoir d’impact significatifsur le secteur bancaire nippon.Concentrées sur la résolution duproblème des créances douteuses,dont l’ampleur les a incitées à laplusgrandeprudence, les banquesjaponaises ne sont guère entréesdanslejeudessubprimesetbénéfi-ciaientd’importantes liquidités.

Cependant, la crise a alimentéune forte remontée du yen, consi-déré comme une valeur refuge, etaffecté les industriels japonais,dont les principaux débouchés –Chine,Etats-Unis,Unioneuropéen-ne – ont connu de fortes baissesd’activité. En 2009, le Japon a cédé

àlaChinelaplacededeuxièmeéco-nomiemondiale, même si, en ter-mesde PIBpar habitant, l’Archipelreste très largement au-dessus desongrandvoisin.

C’est dans ce contexte que leJapon a été frappé par la triplecatastrophe du 11mars 2011 – séis-me, tsunami, accident nucléaire –qui a durement touché son écono-mie tout en perturbant l’approvi-sionnement de nombreux indus-triels,commeAppleouPSA,dépen-dantdefournisseursnippons.Mal-gré une relance rapide de l’outilindustriel – 80% des sites de pro-ductiondesrégionssinistréesfonc-tionnaient en juin2011 commeavant la catastrophe –, beaucoupdesociétésontchoisidediversifierleurs sources d’approvisionne-ment.Etlareconstructionamobili-sédes financementspublicsàhau-teur de 2 289milliards de yens(18,4milliardsd’euros).

Dans le même temps, la haussedu yen a pesé sur la compétitivitédes entreprises nippones, parailleursconfrontéesàlamontéeenpuissance des rivaux, essentielle-ment sud-coréens comme Sam-sung– voiredépasséespareux.

Tousces facteurssontà l’origined’un mouvement de délocalisa-tionetdefusionsetacquisitionsdela part des groupes japonais. Lesrapprochements réalisés hors duJaponont atteintunniveau recorden 2012, pour un total de 7330mil-liardsdeyens.

Mêmes’ilstraduisentunevolon-té de gain de compétitivité, ilsreprésentent également une pertepotentielle pour les exportationsde l’Archipel. Tout cela est à l’origi-ne d’un retour – du jamais-vudepuis 1980–audéficit durabledela balance commerciale, observédès décembre2011. En février2012,il a atteint 777,4milliardsdeyens.

Tous ces facteurs compliquentl’action de l’administration Abe,qui a tout fait pour maintenir ladynamique positive jusqu’auxélections sénatoriales de juillet etqui bénéficie toujours d’une cotede popularité à plus de 60%.Même financée, la mise enœuvrede sa politique est compliquéeparune pénurie de main-d’œuvre,conséquence de la baisse de lapopulation active depuis 1998.YokoTakeda,del’institutderecher-che Mitsubishi, considère ainsique « les travaux prévus pour lebudget supplémentaire 2012 nepourront pas commencer avantl’exercice2014».

Demême, les mesures décidéesen matière d’assouplissementmonétaire suscitent des craintes.Le 4avril, la BoJ a annoncéunnou-vel élargissement des produitsconcernésparsonmassifprogram-med’achatd’actifs.Dequois’inter-roger sur l’équilibre financier del’établissement central quand lestaux remonteront.

Enfin, le succès de la politiquemenée dépend de la reprise chezles partenaires commerciaux duJaponet reste soumis à l’évolutiondes tensions géopolitiques, avec laChinenotamment.p

Pour sortirdesdifficultés,

12plansde relanceont été engagés

endix ans

L’après-Fukushimaamobilisé

des financements publicsde 2289milliards de yens(18,4milliardsd’euros)

«Unevraieruptureenmatièremonétaire»SébastienLechevalier,présidentde laFondationFrance-Japon

La bulle, le krach et la déflation

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40 000

35 000

30 000

25 000

20 000

15 000

10 000

5 000

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1971 1975 1980 1985 1990 1995 2012201020052000

Cours du yen en dollar et variation de l’indice nikkei

Evolution de la dette publique, en % du PIB

Source : Bloomberg

Source : Natixis

Le yen en dollar(échelle de gauche)

Indice nikkei(échelle de droite)

Krach boursier,immobilieret bancaire Changement

de gouvernement

Dérégulationfinancière

et bulle immobilièreet boursière

0,0110

0,0130

0,0120

0,0100

Mars20132012

Décembre Mars

10 395,18

0,010619

Cours du yen en dollarsur un an

120

115

110

105

100

95

90

1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2013

Productivité et salaire réel par tête, base 100 en 1998

Production par tête

Salaire réel par tête(déflaté par le prix à la consommation)

50123Mardi 9 avril 2013

Page 6: Le Monde 20130409_ECO

6 0123Mardi 9 avril 2013

50%

Lesmille firmes lesplus innovantesauraient investi plusde600mil-liardsdedollars (469milliardsd’eu-ros) en rechercheetdéveloppe-

mentpour la seuleannée2011, cequi cor-respondàuneaugmentationdeprèsde10%par rapportà l’annéeprécédente,selonunrapportpubliéparBooz&Com-panyenoctobre2012.

Ces investissementsmassifs sontnéces-sairespourassurer ledéveloppementdenouveauxproduitset services,mais ilssont loind’être suffisants. Les spécialistesde la stratégien’ontdecessede rappelerauxdirigeantsd’entreprisequ’unebonneconnaissancedesbesoinsdes consomma-teursainsiqu’unegestionefficacedespro-cessusd’innovationen internesontdeuxconditionsnécessairesà leur succès.

Pourtant, lesorganisationsqui remplis-sentces critèresne sontpas toujourscou-

ronnéesde lauriers.Moinsd’untiersdesinnovationsenmoyenneseraientcom-mercialisées,et cellesqui le sontne réussis-sentpas toujoursà s’imposer, loinde là.Certainsproduits similaireset dequalitécomparableconnaissentmêmedesdesti-nées radicalementdifférentes.

InterdépendancesAinsi, lamultinationaleaméricaine

Amazona introduit avec succèssa liseuseélectroniqueKindle, tandisqu’unproduitéquivalent lancéplus tôtpar l’entreprisejaponaiseSony, la SonyReader,n’apasconnulemêmeengouement.De lamêmefaçon, legroupeaméricainAppleestparve-nuà imposer son lecteurmultimédia,l’iPod,alorsquecertainsde ses compéti-teursavaientauparavant commercialisésans succèsdes telsproduits.Commentexpliquercesdifférences?

SelonRonAdner,professeurdestraté-gieà laTuckSchoolofBusiness (universitédeDartmouthdans leNewHampshire)etauteurdu livreTheWide Lens:ANewStra-tegy for Innovation (www.thewidelens-book.com), les entreprisesqui réussissentsontcellesquiprennentencomptenonseulement lesbesoinsdes consomma-teurs,maisaussi les caractéristiquesdel’écosystèmedans lequelelles évoluent.Ses recherchessur les stratégiesd’innova-tiondes entreprisesmettentenavant lesinterdépendancescroissantesentre lesentrepriseset leurspartenaires (fournis-seurs,distributeurset revendeurs). Eneffet, pourque les consommateurspuis-sentutiliserunnouveauproduit, il est sou-ventnécessairequecespartenaires l’intè-grentà leurspropresproduitset servicesavant samise sur lemarché.Si cesder-niersnesontpasprêts à s’adapter, l’inno-

vationrisqued’échoueret ce, quellequesoit laqualitéduproduitproposé. Si Ama-zonetAppleont réussi, c’est grâceà laqua-litéde leuroffre,maisaussiparcequeleursdirigeantsont compris l’importanced’assurer l’accèsauxcontenusdisponiblesgrâceà leursproduits, cequinécessitaitunecoordinationpréalableavec les four-nisseursdeces contenus.

Les entreprisesnepeuventdoncpas secontenterdecomprendre leurenvironne-ment.Une foisqu’ellesontanalysé leurécosystèmeet l’accueilqu’il est suscepti-blede réserverauxnouveauxproduits surlesquelselles travaillent, ellesdoiventréfléchirà la stratégieàadopterpour s’as-surer le soutiende leurspartenaires. Siellesomettentde le faire, elles courent lerisqueque leurmyopie les condamne,dans lemeilleurdes cas, àunevictoireà laPyrrhusenmatièred’innovation.p

JulienDupont-Calbo

Dailymotion, c’est fran-çais?» SolomonHykes agrandientreParisetBor-deaux, mais vit dans la

SiliconValleydepuis trois ans. «Ici,tout ce qui n’est pas californien[comme] Paris ou NewYork, c’estpareil», sedéfend,d’un rire, le créa-teurfranco-américaindedotCloud,start-up florissante du cloud com-puting, l’hébergement à distancedesdonnées informatiques.

Le jeunehommede29ansvituncontede fées.AprèsunpassageparYCombinator, le prestigieux incu-bateur californien qui a mis surorbite le site de location d’apparte-ments AirBnB ou celui de partagede fichiers Dropbox, SolomonHykes a levé plus de 10millions dedollars (7,8millions d’euros) poursa petite entreprise. Il s’est mêmetrouvé un «parrain» de prestige:Jerry Yang, le cofondateur deYahoo!. Tout cela n’est qu’un«immense coup de bol», résumecelui qui a débuté sa carrière com-meconsultantensécuritéinforma-tique–surTwitter, ilsedéfinitcom-me un «PDG-hacker» –, avant derejoindreune filialede la sociétédetélédiffusionfrançaiseTDF.

En 2007, à force d’installer deslogiciels sur des serveurs, il se ditqu’ilya«quelquechoseà fairepourrégler automatiquement ce problè-me».LevoilàquiseretrouveàMon-trouge (Hauts-de-Seine), à la têted’une petite SARL. A l’époque, lecloud computing n’est pas encorel’aimant à investisseurs qu’il estdevenu. «Nous étions en avanced’une vague, et je n’étais pas tou-jours très clair sur le projet nonplus…», avoue-t-il. M.Hykes et sonassociépersévèrentetpostulentauY Combinator. Perdu. Ils peaufi-nent le dossier. Gagné. Paul Gra-ham, l’investisseur à l’origine duconcept, leurpayelebilletpourSanFrancisco «pour dix minutes d’en-tretien». M.Graham est convaincupar lamotivationde l’équipe.

Les Français refont le voyageavec leurs valises. Et découvrent lesystème du Y Combinator. Deux

foisparan, lesquelquesdizainesdestart-up sélectionnées ont troismois pour se mettre en ordre debataille.Enéchangede5%à10%deleur entreprise, le duo reçoit20000dollars. Assez pour louerunemaison àMountainView, prèsdusiègedeGoogle,etnourrirdepiz-zasuneéquipequi travailledur.

Succès instantanéTroismois plus tard, il faut pas-

ser devant les investisseurs. Pouréviter la désillusion, M.Hykes suitles conseils de Peter Thiel, l’associéde M.Graham: «La structure, leréseau,lesressourceshumaines,l’ar-gent…Celanesertàriensi leproduitn’intéressepersonne.» Il trouvesonmarché: les autres développeursdu programme, qui ont besoind’un lien technique avec les héber-geurs. A la fin du trimestre, lamoi-tiéde lapromoest cliente.

Arrive le «DemoDay», au quar-

tier général du Y Combinator – unbâtiment sans âme aumilieu d’unparc industriel. Chaque start-up atrois minutes pour convaincre lescentaines d’investisseurs présents.Chez dotCloud, le «pitch» est touttrouvé:«Regardez,vosfuturesstart-up nous ont confié la stabilité deleursapplications!»

Lorsde la fêtequi suit, les dollarset les cartes de visite valsent demain en main. Eux en profitentpour organiser un premier tour detable de 800000dollars auprèsd’une dizaine de business angels –investisseurs –, dont Ron Conway(qui avait découvertGoogle et Pay-Pal)et JerryYang.Depuis2005,plusde1milliarddedollarsontétéinves-tis lors de ces «bals de promo».Après la fête, le travail reprend. Enjanvier2011, dotCloud s’installe àSan Francisco. Le succès arrive ins-tantanément, ou presque. Nouvel-le levéede fondsdèsmars2011.«Ce

n’était pas prévu mais nous rece-vions cinq propositions par jour.»La start-up récupère 10millions dedollars auprès de deux fonds d’in-vestissement réputés. Jerry Yangentre au conseil d’administration.Les Français profitent de l’effet demodepour proposer gratuitementleur solution aux développeurs, letemps de la découverte. «C’est laconquêtedel’Ouest.Lemarchégros-sit vite, et ce sont eux qui déclen-chent ensuite les achats», précisel’hommed’affairesbarbu.

La tactique paye. DotCloudcompte 21 salariés, et des dizainesdemilliersdeclients.Lechiffred’af-faires, lui, n’est pas public. En Cali-fornie, la société de Solomon bai-gne «dans un tissu conçu pour sonexpertise». L’inconvénient, c’estque SolomonHykes a l’impressionde faire les Jeux olympiques toutel’année:«Onnepeutpasdéconnec-ter sanspartir d’ici.»p

ch ron i q u e

JulieBattilanaProfesseure associée

à la Harvard Business School

l e c h i f f r e

PourquoiAmazonaréussi làoùSonyaéchoué

e n b r e f

Lespaysansroumainset l’USArmy

BourseLes sociétéscotées sur FacebookPour le régulateurde laBourseaméricaine, communiquersurles réseauxsociauxne créepasdedistorsiond’information.LaSecuritiesandExchangeCom-missionavaitouvertuneenquê-teaprèsun«post» deReedHas-tingssur Facebook. LepatrondeNetflixs’était réjouide laperfor-mancede sonservicedevidéoàlademande,quiavait atteint lemilliarddevues tous lesmois.Le titre avaitbondi enBourse,suscitantdes interrogations.

4GSFR travaillesa communicationL’Internetmobile trèshautdébit est au cœurd’unebatailleentre lesopérateurs. SFR rappel-le qu’il avait été le premierà«avoir ouvert la 4G, finnovem-bre2012». BouyguesTélécom,lui, n’hésitepas àdire qu’ildéploie son réseauplus rapide-mentque le pionnier.

TélécommunicationsRecord deminutespassées sur SkypeLesutilisateursde Skypepas-sent, chaque jour, 2milliardsdeminutes sur ce service detéléphoniepar Internet rache-téparMicrosoft en 2011.Un record, s’est félicité Skypesur son blog,mercredi 3avrilprécisant que c’était le tempsqu’il fallait pour «faire 225foisl’aller-retour sur la Lune»,«tourner autour de la Terre845fois»ou «voyager surMars5400fois».

C’est le pourcentaged’internautesaméricainsqui regarderont,en2014, la télévisionpardenouveauxcanauxdedistribution.Selon l’institut eMarketer,mêmes’ils conservent jusqu’à pré-sent leur abonnementau câble, les téléspectateursont déjàprisl’habitudede regarder leursprogrammespréféréspar l’intermé-diaired’une télévisionconnectée à Internet, d’un iPadoud’unordinateur. En2017, 145millionsd’Américains regarderont, cha-quemois, des programmessur cesnouveauxappareils, contre106millionsen2012. Les grandsopérateursdu câble commeCom-cast ontdequoi être inquiets.

Mirel Bran

Bucarest, correspondant

Ledrapeauétoiléde l’OncleSamflotteau-dessusd’unchampdecol-zaà l’entréedeDeveselu.Cepetitvillagede laRoumanieprofonde, à

30kilomètresde la frontièreroumano-bul-gare, s’enorgueillitd’avoirété choisi en2011par l’arméeaméricainepoury instal-ler l’unde sesboucliersantimissilesdesti-nésàdéfendre l’Europe.

Les 3000paysansducruétaientdéjàaccoutumésà laprésenced’uniformessurleurs terres. En 1952, laRoumanie, alorsalliéede l’Unionsoviétique, yavaitconstruitunebasemilitaireetunaéro-portqui accueillait, dans lesannées 1980,48avionsdechasseMig-21etunecentainedepilotes, fiertéde l’arméeroumaine.Maisaprès la chutedu régimecommunis-te en 1989, labasemilitaireperdpeuàpeudesonéclatet fermesesportesen2002.

L’arrivéeaupouvoirduprésidentpro-américainTraianBasescuen2004changeladonne. Favorableàunpartenariat straté-giqueavec les Etats-Unis, le chefde l’Etatsigneen2011unaccordprévoyant l’instal-lationàDeveseludufameuxbouclieranti-missile.Malgré lesprotestationsdeMos-cou,peudisposéàvoirdesmissilesaméri-cains s’installerauxanciennes frontièresde l’Unionsoviétique, laRoumanieouvrelargementsesportesà l’arméeaméricai-ne, qui compteaujourd’huiquatrebasesmilitairessur son territoire.«LechoixdeDeveselupermettaitd’offrir des facilitéstechniqueset logistiques»,expliqueConstantinHlihor,professeurà l’universi-ténationale roumainededéfense.

L’arrivéedesAméricainssuscite l’en-thousiasmedespaysansdeDeveseluquienattendentmontsetmerveilles. Environ420millionsdedollars (328millionsd’eu-ros)devraientyêtre investispour rajeunirlabasemilitaireet construire l’infrastruc-turenécessaire. En2013, l’USArmyvainjecter265millionsdedollarspourmoderniser l’aéroportet asphalter les rou-tesdéfoncéesduvillage. Enoutre, les pay-sansvontbénéficierd’unsystèmedecana-lisationsquin’existaitpasdans leur com-mune.L’eau courantedevraitdéjàprodui-reunepetite révolutiondans cemodestevillage.«Lespremières routes serontprêtesaumoisdemai,assure lemaire, IonAli-man.D’ici-là, nousauronsaussiune sta-tiond’épurationdes eauxquialimenterale villageeneaupotable.»Unconsortiumde37sociétésaméricaineset roumainesaétécréé en2012pourgérer les travaux.«Cepartenariatvaaider les autoritésamé-ricainesàpiloter le chantier», affirmeSer-giuMachidon, sondirecteur roumain.

Mais leprojet rencontredesopposantsparmi lespaysans. Si lesplusoptimistessontpersuadésque l’arrivéedesAméri-cains leurpermettrade trouverunemploi, lesmoins convaincusontpeurque laprésencedemissilesn’expose le vil-lageàdesmenaces terroristes.«Ils ont tuéBenLadenetmaintenant ils s’installentcheznous,déclareGheorgheMarinel, agri-culteur. Il y adequoi s’inquiéter,non?»p

l a l e t t r ed e b u c a r e s t

ÉCO&ENTREPRISE I N N O V A T I O N

SolomonHykes,sur le toitdu siège

de dotClouddans le quartier

d’affairesde San FranciscoenCalifornie, endécembre2012.

MARJORY CURTY

UnFrenchyau«YCombinator»RaressontlesFrançaisqui,commeSolomonHykes, lefondateurdedotCloud,sontpassésparleplusprestigieuxdesincubateursdestart-upcalifornien

Page 7: Le Monde 20130409_ECO

Lavilledevientunjeu(vidéo)T E S T | AvecIngress,quis’appuiesurlesprincipesdujeuderôleetdelagéolocalisation,

GoogleinventeunmoyenludiquederécupérerdesdonnéesprécieusesEmirats arabes unisPréparer l’après-pétroleDepuis 2007, les Emiratspoussent leurs citoyens à créer leur entrepri-se. L’enjeu est important: il s’agit d’inciter la populationàquitter legiron confortable et bienpayédes entreprisespubliques, voire un chô-mageplutôt généreux (14%des actifs sont sans emploi).Pour le pays, il s’agit d’anticiper l’après-pétrole en créantun secteurpri-vé autonome. Le gouvernement local a doncmis enplaceun fonds d’in-vestissement, leKhalifa Fund, qui a financé 375projets de créationd’en-treprise à hauteurde 147millionsd’euros et qui doitmaintenant attein-dreunevitesse de croisièrede 42millionsd’euros deprêts par an.> GulfBusiness

AustralieLe «McDonald’s de la salade» fait florèsLa petite chaîne australiennede restauration Sumo Salad fête ses10 ans. Ses deux fondateurs ont démarré leur concept de «salad bar»dans la capitale Sydney et règnent désormais sur près d’une centainede points de vente enAustralie, enNouvelle-Zélande, etmême àDubaï ou Singapour.Pourtant, personne ne donnait cher de leur idée née il y a dix ans,raconte Luke Baylis, l’un des fondateurs. A l’époque, lemarché de larestauration rapide enAustralie était dominé par les géants du fast-foodMcDonald’s et KFC. Il semblait alors illusoire de proposer desmenus légers et équilibrés de sandwichs et salades.Les deux créateurs, alors âgésde 25ans, ont pourtant faitmouche: troismois après l’ouverture, les clients faisaient la queue chaque jour devantleurpremier «salad bar». Leur chiffre d’affaires atteint, aujourd’hui,60millions d’euros.> Startupsmart.com

Avec «Courrier international»

18%

Laurent Checolaet JulienDupont-Calbo

Observer des passantsmarcher dans la rue levisage penché sur leursmartphone, c’est du

quotidien. Les voir courir en grou-pe, portable à la main, c’est déjàplus étrange.

Ingress a pour ambition detransformer les villes enungigan-tesque terrain de jeu vidéo grâce àla géolocalisation. Conçu par lesingénieurs de Google pour lessmartphones fonctionnant sousAndroid, le principe de «réalitéalternée» d’Ingress est simple: ilfaut accomplir dans lemonde réeldes quêtes virtuelles – collecter del’énergie, des objets ou conquérirles bases ennemies.

Pour télécharger l’applicationgratuite et pouvoir jouer, il fautd’abord demander un code, quel’on reçoit après quelques joursd’attente. Ensuite, c’est la plongéedansununiversdescience-fiction.Pour schématiser, une équipe descientifiques remarque l’appari-tion d’une force étrange capablede modifier les comportementsdes individus. L’humanité se divi-se alors entre les « éclairés »,

convaincusdesbienfaitsdela«for-ce», et les «résistants», qui racon-tent que cette force est d’origineextraterrestre etmaléfique…

Une fois son camp choisi, il fautprendre ses baskets et sonmobilepour arpenter les rues à la recher-che d’objets ou d’énergie supplé-mentaires, en suivant les informa-tionsfourniesparlacartefuturiste(mais construiteàpartirdeGoogleMaps) qui apparaît à l’écran. Avecun petit côté gadget à la JamesBond.Lebut, c’estde trouveret fai-remainbasse sur les «portails»deceuxd’en face. Pour ce faire, il faut

être à moins de 50mètres de lacible. Et donc sortir de son canapé.

Bien souvent, il faut semettre àplusieurs pour avoir une chancededétruirelesprotectionsdespor-tails, baptisées «résonateurs». Lesjoueurspeuvent se coordonnerencommuniquant sur un espace dediscussion, chacun devant pren-dre part à la bataille globale entreles deux clans. Comme un jeu derôle grandeur nature à l’échellemondiale.

En ce moment, les résistantscontrôlent 56%du globe, les éclai-rés 44%. Onpeut accéder à unpla-nisphère faisant apparaître leslocalisations des quelque500000joueurs. La plupart d’en-tre eux sont des citadins améri-cains oueuropéens.

En France, des groupes se sontconstitués, par exemple à Lyon ouà Paris. Pour se donner plus dechance,certainsrivalisentd’imagi-nationpourrallongerl’autonomiede leur smartphone, durementmise à l’épreuve avec l’usage per-manentetobligatoireduGPS.Ain-si, ils transportent des batteries desecours ou se baladent avec unordinateurportablegonflé àbloc…

Avec Ingress, Google effectueun premier pas dans le jeu géolo-calisé. D’autres s’y étaient déjàessayés, dans unemoindremesu-re, transformant l’environne-ment en châteaux à conquérir ouenmonstres virtuels à combattre.En 2010, l’éditeur américainBooyah avait ainsi sorti MyTown,un «Monopoly géolocalisé» qui

revendiquait alors 2millionsd’inscrits.

Cen’estpas lapremière fois quelagéolocalisationrejointla«gami-fication»,procédéconsistantàuti-liser les ressorts ludiques du jeuvidéo dans d’autres domaines.Foursquare, l’un des services degéolocalisationdes plus réputés, amis en place un système de «bad-ges»venantrécompenserl’utilisa-teurenfonctiondeslieuxqu’ilvisi-te, comme il gagnerait des pointsdansun jeuvidéo. L’aspect récréa-tifpermetd’atténuer le côté rebu-tantde lagéolocalisation: la trans-mission de sa position en tempsréel. Car, si Ingress est une réelleexpérimentation ludique, c’estaussi un moyen discret de récol-ter des données sur ses utilisa-teurs et leur environnement.

Depuis le lancementennovem-bre2012, les joueurs envoient desphotos demonuments ou de sitesremarquables de leur ville auxdéveloppeursdu jeu, qui les trans-forment ensuite en portails. Desinformations souvent précieusespourquiveutorienterlesinternau-tes vers les «bonnes adresses», àproximité.

Un service qui vaut de l’or :selonlesiteaméricainAllThingsD,Google a déjà inclus dans son jeudes espaces publicitaires et nouédes partenariats avec certainesmarques américaines, commedessociétésde locationdevoitures oude boissons… Encore faudrait-ilsavoir si ces marques sont «éclai-rées» oupas.p

I N N O V A T I O N ÉCO&ENTREPRISE

LesAméricains consacrent 18%du tempsqu’ils passent avec leursmartphoneenmain sur Facebook, soit environ 30minutesparjour. La société américaineFlurry analyse les pratiquesdeplusd’unmilliardde «mobinautes»dans lemonde: selonelle, lesapplications représentent80%de l’usage.A euxseuls, les jeuxreprésentent32%de l’activitédesmobinautes.

MargheritaNasi

Après deux décades dans les organisa-tions non gouvernementales, VictorFerreiras’est lancé, endécembre2012,dans les réseaux sociaux. Mais pas

n’importe lesquels. Ce seraitmêmeune formed’aboutissementdesacarrièreassociative.«Deplus enplusdepersonnes sontprêtes àmodifierleurs habitudes pour contribuer à une sociétéplus humaine, expliqueM.Ferreira. Et elles ontdeuxbesoins: savoir ce qu’elles peuvent faire, etavoir une visibilité.» C’est l’objectif de Newma-nity, son Facebookpas comme les autres.

A priori, Newmanity ressemble à un réseausocial lambda. L’inscription y est gratuite, et ilconvientde se construireune«communauté»en contactant des personnes en fonction deleurscentresd’intérêt.Maisilsuffitdelirequel-ques intitulés de messages échangés sur leréseau pour en saisir la spécificité. Les stagess’intitulent «mettre à l’œuvre le développe-ment durable dans une PME», ou « jardinerautrement en combinant écologie, économie etabondance». Côté événements,vous tomberezsurune«semainepour lesalternativesauxpes-ticides» ; et l’annuaire recense exclusivementles professionnels du développement person-nel et durable.

«Newmanity est un outil qui permet la ren-contreautour de la solidarité, de l’écologie etdubien-être personnel dans une dynamique loca-le», résumeM.Ferreira. La plate-formecompte

près de 10000membres. «On commence àprendre», se félicite-t-il.

Depuis un peu plus de trois ans, les réseauxsociaux solidaires pointent le bout de leur nez.Newmanity,maisaussiKoom,Tinkuy,LesVégé-taliseurs, Planète-Attitudeou encore SustainA-tWork.«Lecontextedecriseestporteur : l’écono-mie collaborative se développe.Unmouvementde fond est en train de déboulonner le systèmeétabli», affirme Jérôme Lhote, le créateur deKoomquisouhaite«aiderlesgensqui lesouhai-tent à agir en termes écologiques» avec unréseau social qui repose sur le principe des«nudges». Des «coups de pouce» qui sont, enréalité, des défis lancés aux internautes. A cha-que fois, l’idée est de faire évoluer lesmentali-tés.Parexemple, imprimerrectoverso, faireducovoiturage ou aider un chômeur dans sarecherched’emploi.

Modèle économique difficileTous ces réseaux ne connaissent pas une

issue heureuse. «Deux se sont lancés et n’exis-tent plus : ReWorld et Envimotion», citeM.Lho-te, qui explique ces échecs par un problèmede«forcedetraction: lacapacitéàamenerdumon-de qui dépend aussi de la capacité à nouer despartenariats».Etpointeégalementdesdifficul-tés dans l’élaborationdu concept et dumodèleéconomique. «Certains ne sont pas clairs : il y ades sites qui se lancent et on ne sait pas com-ment ils font pour vivre. C’est peut-êtreunoublimais comme je les suis au quotidien…», s’alar-meDamienBoyer, fondateurde Tinkuy.

Pourde tels sites, il n’existepasmillemaniè-res de gagner de l’argent, ou aumoins d’être àl’équilibre financier. Soit les utilisateurs paientun abonnementde quelques euros, soit c’est lapublicitéqui faitofficedeBonSamaritain.Maisdansce cas, il fautunecertaineaudience…Or, laplupart de ces réseaux sont « étanches».«Aucun de ces réseaux ne s’est radicalementgreffé sur Facebookalorsqu’ils ygagneraiententermesd’utilisateurs», regrettePierre-YvesSan-chis, fondateurdeComeen,uneagenceencom-munitymanagement spécialisée dans le déve-loppementdurable. Ce dernier déplore aussi lamultiplicationdeces réseaux, contre-producti-veàsonavis,carelle«dilue lacommunautésen-sible à ces thématiques. D’où la difficulté pources sites, qui, en se multipliant divisent leurpublic, de nouer des partenariats avec desmar-ques»quipourraient jouer lesmécènes.

A priori, la situation devrait vite évoluer.PourVictorFerreira, laFrancefiniraparressem-blerauxEtats-Unisavecnonpasunemultiplici-té de petits réseaux sociaux éthiques, mais unou deux grands acteurs dans le domaine, com-me le sont, outre-Atlantique, Causes ou Jumo.De son côté, Jérôme Lhote suggère la fusion deces plates-formes. «Pour l’instant, ces sites sontcomplémentaires. Tinkuy se situe sur l’échangedebonsplans,Koomestplutôtsurl’actioncollec-tive.Maisest-cequ’àunmomentilnefaudrapass’uniraulieud’avoirplusieursréseauxquiavan-cent chacun tranquillement à son rythme?»Cela permettrait également aux internautesvolontairesde savoir à quel saint se vouer.p

L’utilisateurd’Ingress arpenteles rues à la recherched’objetsoud’énergie supplémentaires,en suivant les informationsfournies par la carte futuriste

qui apparaît à l’écran. DR

FilièreUn groupe de travail pour le jeu vidéoLesministèresde l’économienumériqueetde la cultureont installéungroupede travail consacréau soutiende la filière françaisedu jeuvidéo.Lesparticipants (Bercy, la RuedeValois, le Syndicatnationaldu jeuvidéo, le Syndicatdes éditeurs logiciels de loisirs etUbisoft) ontpourmissionde renforcer la compétitivitéet l’attractivitédu secteur.SelonBercy, unpointd’étapeest prévuen juin. Le groupedoit conclureses travauxavant la finde l’étépourpouvoirmodifier, le cas échéant, lescontoursdu crédit d’impôt jeuvidéodans laprochaine loi de finances.

RapportDix-neuf gestes pour la «culture d’innovation»Attirer les talents étrangers, sensibiliser les élèves de tout âge à la créa-tiond’entreprise, rendre obligatoireun stage enPMEpour les élèvesdes grandes écoles, apprendreun langage informatiqueet l’anglais dèsl’école primaire, favoriser lamobilité des chercheurs entrepublic et pri-vé, constituer des fonds d’investissement capables de financer la crois-sancede grosses start-up… Leprésidentdupôle de compétitivité Syste-matic (informatiqueet automatique), Jean-LucBeylat, et le directeur duGenopoled’Evry, Pierre Tambourin, ont dévoilé, vendredi 5avril, lesrésultatsde lamission sur l’innovationqui leur avait été confiéepar legouvernement. Le duo souhaite faire émergerune culture d’innova-tionqui permettra à long termedemaintenir, voire de renforcer, lacompétitivitéde la France.

Propriété intellectuellePSA, roi des brevetsA la peine, PSApeut aumoins se féliciter d’avoir conservé sa place denuméroun français du dépôt de brevets, avec 1348trouvailles déposéesen2012, selon le palmarèsde l’Institutnational de la propriété intellec-tuelle. Le Commissariat à l’énergie atomiquearrive deuxième, suivi parSafran.Anoter la forteprogressiondeGeneral Electric, passéde la47eplace en 2011 à la 10e en 2012 (275brevets).

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Des«Facebook»pourchanger lemondeNewmanity,Koom,Tinkuy…Plusieursréseauxsociauxsolidairessontapparus

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70123Mardi 9 avril 2013

Page 8: Le Monde 20130409_ECO

8 0123Mardi 9 avril 2013

Alorsquecertainspayseuro-péens sont en récession, laFrance, elle, ne connaîtqu’une stagnation de sonéconomie. On pourraits’en réjouir, mais ce résul-

tatn’estobtenuquegrâceàuneaugmen-tation très importante du déficit public(il a atteint 4,8% de notre produit inté-rieurbrut–PIB)etdenotreendettement(90% du PIB). Cette débauche de fondspublics, de liquidités et d’aides de toutesnatures est-elle à lamesuredes résultatsconstatés: près de 3,2millions de chô-meurs, une croissance économique ato-ne,unpouvoird’achat enberne?

En réalité, nous nous sommes misdans une situation où nous cumulonsles handicaps: pas de croissance, maisaussi plus de dettes et plus de déficits. Avouloir faire les choses à moitié, on nerécolteaucundesavantages,mais laplu-part des inconvénients. On ne veut pasêtre rigoureux pour ne pas aggraver lasituation de l’économie, mais enmêmetempsonaugmentequandmême forte-ment les prélèvements sociaux. Celasignifie que l’on choisit de privilégierl’augmentationdes recettes fiscales afinde diminuer les déficits au lieu de dimi-nuer les dépenses. En oubliant que cesprélèvements supplémentaires ont, cer-tes,uneffet,maisilest toujoursmoindreque prévu, car les cibles potentiellesadoptent autant que faire se peut desstratégiesd’évitementde l’assiette fisca-le. Et même quand les transferts se fontde manière effective – il arrive que lescontribuables pris en otage ne puissentpas réagir à temps–, les agentséconomi-ques reçoivent le message suivant: lestempsvontêtredurs,etilvautmieuxfai-redeséconomies,cequiadeseffetsnéga-tifs sur les décisions d’investissement etde consommation, et donc unmoindrerendement des recettes fiscales à venir(TVA, impôt sur le revenudespersonnesphysiques, impôt sur les sociétés).

Il est vrai qu’il est plus facile de s’atta-quer au chantier des recettes qu’à celuides dépenses, surtout quand on invo-que à l’appui la justice fiscale. Mais laFrance ne peut rester avec un taux deprélèvements obligatoires (de 46% en2013) parmi les plus élevés des pays del’Organisation de coopération et dedéveloppement économiques, tout enflirtant avec un sommet pour le pour-centage de dépenses publiques par rap-port au PIB (plus de 56%). On taxe troples ménages et les entreprises – 65mil-liards d’euros d’impôts en plusentre2011 et 2012 – et en même tempson laisse filer les dépenses.

Or,cequiestprélevésurlesagentséco-nomiques pour aller dans les caisses del’Etatneproduitpaspourl’économiedeseffetsaussifavorables. Ilyadespertesenligne: les services fiscauxontun coût, etil y a des fraudes et des réclamations;l’Etat redistribue la majeure partie desfonds collectés demanière parfois aveu-gle : l’argent peut aussi bien servir àpayer les intérêts de sa dette, à aiderfinancièrementunpaysenvoiededéve-loppement ou à intervenir militaire-ment surun théâtred’opérations.

L’Etat est lemoinsbienplacépour fai-re fructifier l’argent supplémentairequ’il prélève. Il investit peu – ce sont lescollectivités territoriales qui jouent cerôle dans l’investissement public –, et ilretire aux agents économiques desmoyens financiers qui pourraient êtreemployés de manière plus efficace. Parexemple,pourréaliserdestravaux,doncpayerde la TVA, donnerde l’activité auxentreprises du bâtiment qui vont payerdes impôtset verserdes salaires.

On ne peut avoir durablement un

niveau record d’impôts et de taxes touten ayant un niveau très élevé de dépen-ses publiques, car celles-ci ne peuventêtre financées que grâce à ceux-là et ontun effet d’éviction sur les dépenses pri-véesqui,elles,ontuneffetplusdirectsurl’économie.

Pour pouvoir diminuer le niveauactuel de prélèvements obligatoires, quidissuadelesagentséconomiquesdepro-duireetdes’enrichir, ilfautarrêterdefai-resemblantdes’attaquerauchantierdesdépensespubliques. Il serait alors possi-ble d’envisager certaines réformes quiproduiraientdes économiesmassives etrécurrentes et laisseraient aux agentséconomiques des moyens financiersplusimportantspourinvestiretconsom-mer. Envoici quelques-unes.

–Diminuer le nombre des échelonslocaux d’administration. Ouvrons ledébatsurlafusiongénéraliséedesdépar-tements et des régions, la suppressiondes communesoudes intercommunali-tésavec,danscecasdefigure,leregroupe-mentdebonnombredepetites commu-nes, l’intégration définitive au sein descollectivités territorialesde tous ces syn-dicats intercommunaux, sourcesde sur-coûtsévitables.

– S’interroger sur les missions del’Etat. Quelles sont les missions qu’il nepeut assumer lui-même? Quelles sontcelles qu’il peut déléguer à un moindrecoût? Quelles sont celles qu’il peut etdoitabandonner?Quelssontlesorganis-mespublicsetinstitutionsquineprodui-sent pas de résultats économiques ousociauxetqu’il fautfusionnerousuppri-mer? Le nombre de fonctionnaires doitbaisser demanière très nette, au fur et àmesuredesdépartsàlaretraitenonrem-placésen totalité.

–Améliorer la productivité de l’admi-nistration et la mesure de ses résultats,notammentavec l’utilisation systémati-que desmoyens électroniques, numéri-ques et à distance. Après tout, le coûtd’un service administratif peut êtremesuréetcomparéàceluid’uneentrepri-se privée. Il faut viser la productivité deces services, qui sera profitable tant auxusagersqu’auxfinancespubliques.

–Le chantier desdépenses sociales estde loin le plus épineuxet touchedeprèsles choix politiques. Mais, à tout lemoins, on a ledevoirde s’assurerque lesservicesrenduset lesaidesdonnéessontconformes aux cahiers des charges, etqu’il n’yapasde fuitesoude fraudes.

On ne pourra pas tout réaliser enmêmetemps,mais,plutôtquedemettredes rustines là où il y a des fuites, dispo-sons ces éléments sur la place publiqueet arrêtons un programme pluriannueldemise enœuvre. Et, si nécessaire, tran-chonsces choixpar référendum.p

La première des priorités retenues par leConseil européendes 14 et 15mars est celled’une consolidation budgétaire «compati-bleaveclacroissance».Derrièrelescompro-mispropresaulangagediplomatique, ilestdifficile de comprendre comment les Etats

européenspourraientmener de front la réductiondeleurdéficitbudgétaire et lemaintiendesmargesde lacroissancesur l’ensemblede la zone.

Ainsi, la France, comme la plupart de ses partenai-reseuropéens,afourniuneffortbudgétairesansprécé-dentendeuxans,enréduisantdeprèsdelamoitiésondéficit public structurel. Cet effort, qui était rendunécessaire après la hausse massive des déficits en2009-2010, est cependant directement responsablede la dégradationmarquée de sa situationmacroéco-nomiquedepuis la fin de 2011. La hausse des prélève-mentsadécouragél’investissementprivé,alorsquelabaisse des dépenses publiques a affecté la demandeintérieure.Lesblocagesstructurelsentravantl’activitééconomique du pays et la perte de confiance desagents économiques n’ont pas permis au secteur pri-vé de compenser l’effet dépressif de l’effort de réduc-tiondesdéficits.

En dix-huit mois, l’économie française est entréedans une spirale récessive, avec un ralentissementtrès net de l’activité. Ce ralentissement, qui s’est déjàtraduit par la disparition de près de 100000emploisen2012,devrait sepoursuivre, lesautoritéseuropéen-nes estimant que la croissance française devrait êtrepratiquementnulle en 2013 (+0,1%). Il a surtout com-pliqué l’effort de réductiondesdéficits en conduisantaudécrochagedesfinancespubliquesparrapportauxtrajectoiresbudgétaires fixées.

Les exemples espagnol et italien montrent que laréduction des déficits est un processus qui peut êtreutile s’il permet de rationaliser l’intervention publi-que, mais certainement déstabilisateur s’il est menésans prendre en compte l’état du secteur privé. Carc’est toujours la hausse de l’activité du secteur privéquipermetdecompenserlabaissedesdéficitspublics.

Les économies d’Europe du Sud ne sont toujourspasparvenuesà se stabiliser, près de quatre ans aprèss’être engagées dans la voie de la réduction des défi-cits. Les politiques d’austérité ne permettent pas uneréductionsignificativedesdéficits et s’accompagnentd’une hausse trèsmarquée des ratios d’endettementpar rapport au produit intérieur brut. Si l’on peut seféliciter – à l’instar duministre allemand des affairesétrangèresdansLeMondedu8février–des«premiersrésultats» des politiques de réduction des déficits, enl’espèce la «confiance retrouvée» desmarchés finan-ciers, il fautbienconstaterquecesbonnesperforman-ces boursières n’ont guère eu, jusqu’à présent, d’inci-dencesur l’économie réelle.

Par conséquent, la baisse des déficits publics doits’inscriredans laduréeetdans le cadred’unestratégie

globale qui permet une relance de l’activité du privé.Elle suppose une approche graduelle qui dépasse leseul cadrecomptabledonnépar leniveaudesdéficits.

Au lieu de prétendre poursuivre des objectifs parnature incompatibles – la réduction des déficits et lesoutienàl’économieenpériodedecrise–, il fautenga-ger une réflexion élargie à l’échelle française et euro-péenne sur le séquençagede la réductiondes déficits.Pour franchir un palier supplémentaire en directionde l’équilibre budgétaire, certaines réformes structu-relles – notamment la rationalisationdu système fis-cal, l’amélioration de l’efficacité de la dépense publi-queet lamise enœuvred’unepolitiquede compétiti-vité à lamesure du choc industriel que subit l’écono-miefrançaise–sontpréalablementnécessairesauren-forcementde la compétitiviténationale.

Lerééquilibragedescomptespublicsnepourraêtresoutenable que s’il s’inscrit dans un temps long. Or,dans la durée, l’économie française a besoin, pourmaintenir notre rang économique, notre pouvoird’achatetnotreinfluenceinternationale,d’investisse-ments conséquents dans les domaines de l’innova-tion, de l’éducation, de la formation professionnelle,des infrastructures, ainsi que dans la restructurationdutissu industriel.

Comptetenudescontraintesdedéficit,c’estverslesfinancementshorsbudgetquelegouvernementfran-çais semble devoir se tourner. L’épargne des Françaisestabondante, les seulsdépôtsdans lesbanques (horsplacementsboursiers)etlesavoirsconfiésauxcompa-gniesd’assurancesdépassant les 3000milliardsd’eu-ros.Unnouvelempruntnationalpourraitêtreunedesoptions les plus réalistes pour combler le déficit definancementde cesdépensesd’avenir.

Mais nous ne pourrons faire l’économie d’uneréflexionplus large sur l’organisationmêmedenotresystèmefinancier,quiparaîtdeplusenplusdéconnec-té des besoins de long terme de notre économie. Ledéveloppementdenouveauxcircuits financiers sem-ble prioritaire pour drainer l’épargne nationale verslesdépensesd’avenir.

Demanièrepluspolitique, lespouvoirspublicsdoi-vent parvenir à mobiliser le secteur bancaire pourqu’il contribue davantage au financement de cesdépenses. Les banques commerciales bénéficient defacilités de financement sans précédent auprès de laBanquecentraleeuropéennemaispréfèrentaccumu-lerdes liquiditésdanslenouveaucadreréglementaireditBâleIIIplutôtquedecontribueraufinancementdel’investissementde long terme. Compte tenudes res-trictions budgétaires qui pèseront durablement surnotre économie et de l’ampleur des investissementsnécessaires, ledéblocagedecesressources financièresfaitpartie intégranted’unemise enœuvredurabledela stratégiede réductiondesdéficitspublics. p

Jean-LouisDalbera

Cadre et formateurdans le secteur bancaire

ÉCO&ENTREPRISE I D É E S

Pour poursuivre ce débat sur leWeb>«Mettons fin à la tyranniede l’austérité!», Jean-JacquesOhana,présidentde Riskelia, et SteveOhana, professeur de financeà l’ESCPEurope.

Marquonsunepause

CartographieducerveauParNateBeelerLedessinde «Courrier International» parudans «TheColumbusDispatch» auxEtats-Unis.©[email protected]

C’est toujours lahausse de l’activitédu secteur privé qui permet de compenser

la baisse desdéficits publics

Le coût d’un serviceadministratif

peut êtremesuréet comparéà celui d’une

entreprise privée

Attaquons-nousenfinauchantierdesdépensespubliques

Obamadévoile un projet de cartographiedu cerveau.«Laissez tomber ce côté-là [le lobe droit].» Vousn’avez qu’àmettre: «Ici, il y a des dragons.»

Réductiondesdéficits:stopouencore?

¶Romain Perez

estle coordinateurdu pôle ECO-FIde Terra Nova.

RomainPerezTerra Nova

¶Jean-Louis Dalberaa occupé différentesfonctions de cadreet de directiondans le secteurbancaire; il est

formateur en droit,finances publiques,fiscalité, finance,

et économieau Centre

de formationde la profession

bancaire et au Centrenational

de la fonctionpublique territoriale.

Page 9: Le Monde 20130409_ECO

90123Mardi 9 avril 2013I D É E S ÉCO&ENTREPRISE

Fragilités chinoises

Depuis combien de temps les supporteursdu PSG n’avaient pas connu une telle lies-se?Mardi2avril, tous lesbarsdelacapitaleont explosé de joie lorsque BlaiseMatuidi

ainscrit lebutégalisateurcontrelepuissantFCBarce-lone.Pour lapremière foisdepuis 1995, lePSGatteintles quarts de finale de la Ligue des champions. Il estloin le tempsde la disette, quand l’ancienpropriétai-re, le fonds Colony Capital, serrait les cordons de laboursed’une équipe aubordde la relégation.DepuisqueleQatararepris lePSGilyadeuxans, l’argentcou-le à flots dans les caisses du club, qui s’est payé lesmeilleurs joueurs dumonde.

La générosité du Qatar fait aussi la joie de Canal+.Avec 3,7millions de téléspectateurs, soit plus de lamoitiéde sesabonnés, la chaînepayantea enregistrélaplusgrosseaudiencedesonhistoire,tousprogram-mes confondus.Uneoccasionde revanche.Depuis lelancement, il y ahuitmois, debeInSport (unechaîneconcurrente… également financée par le Qatar), lesCassandresn’ontcessédeprédireladécadenceinéluc-table deCanal+.

Il est vrai que lachaîneqatariedonnedufil à retor-dreàlafilialedeVivendi,quirégnait jusque-làenmaî-tredans la télévisionpayante. Championnatde foot-ball français (Ligue 1), espagnol (Liga), NBA (le cham-pionnat de basket des Etats-Unis), Ligue des cham-pions…, beIn Sport a dépensé quelque 400millionsd’euros pour ravir une partie des prestigieuses com-pétitions de Canal+. Sur la Ligue des champions,Canal+nediffuseplusque13matchs,contre133aupa-ravant.Même chose pour la Ligue 1, où elle neprocè-deplusqu’àdeuxretransmissionssur lesdixmatchshebdomadaires.

Lesabonnés s’y retrouvent-ils?Oui, affirmeCanal,chiffresd’audienceàl’appui.Car,si l’offreestplusres-treinte, elle est aussi meilleure, martèle la chaînepayante. En Liguedes champions,Canal+ disposedupremier choix, autrementdit des plus belles rencon-tresqui appartenaient jusqu’en2012 à TF1.Dans l’an-cienneconfiguration,lachaînepayanteauraitdûpro-grammer Real Madrid-Galatasaray, et non PSG-Barça. En Ligue 1, Canal+ choisit les plus grandsmatchsduPSG,del’Olympiquelyonnaisetdel’Olym-piquedeMarseille.Les factures,plutôtsalées,nesontdoncpastropdifficilesàavaler.Canal+apresquedou-blé lemontantdesprixde la Liguedes champions, etacquitte 420millions d’euros par an pour deuxmatchs de Ligue 1 par semaine, quand beIn Sportdébourse 150millionspourhuit rencontres.

Mais que signifient les records d’audience? Pasgrand-chosepourCanal+, quinevendpasdepublici-té sur lesmatchs. Seul compte le nombre d’abonnés.Or, depuis plusieurs années, la tendance est à la bais-se. Le phénomène est antérieur à l’arrivée de beIn

Sport. Entre2008 et 2010, Canal+ et ses déclinaisons,Décalé, Sport et Family, facturées 36eurosparmois àl’abonné,ontperdu243000clients,soitunebaissede3,8%. Depuis, le groupene communiqueplus sur cetindicateur mais uniquement sur ses «abonne-ments»,quiagrègentleschaînesdugroupe,maisaus-si le bouquet CanalSat, et Canal Play Infinity (l’offredevidéoà lademande). La situationne s’est pas amé-liorée pour autant. En 2012, 80000clients ont déser-té. Signal d’alerte : la semaine dernière, Raphaël deAndréis, recruté il y a à peine plus d’un anpour gérerl’activitépayante, est retournéchezHavas.

Mais Canal+ veut visiblement remonter la pente.PlusquestiondelaisserbeInSportchassersursester-res.Aprèsavoir insuffisammentsurenchéri,Canal+a

rouvertlesvannes.PourconserverlaprestigieusePre-mier League anglaise de football, la chaîne a quasi-ment triplé samise, passant de 24 à 63millions d’eu-rospar an, selonL’Equipe. La chaîne s’est aussi empa-rée de la formule 1, dont TF1 n’avait plus vraimentenvie. L’intérêt pour Canal+? Montrer aux fans desport qu’elle est toujours une référence. Suivre surtoute une saison les péripéties d’un championnat,racontersonhistoireetentretenir le suspensesursesaléas et ses rebondissements, est le principal servicequ’une chaînepayantedoit rendre à ses abonnés.

Même si le sport n’est pas l’unique argument deCanal+, c’est le seulgenredeprogrammeendirect, etdoncparnaturerare,uniqueetexclusif.Unavantagedetailleà l’heuredupiratageetdesbouleversementstechnologiques. Canal+ est incontournable sur PSG-Barça, alors que le téléspectateur a l’embarras duchoix pour regarder un film: salle obscure, locationdevidéo,DVD, chaîne gratuite, chaîne cinémaet sur-tout, désormais, vidéo à la demande.

Dans ce contexte, Canal+ ne doit pas rater larenégociationduchampionnatdeFrancederugby, leTop14, remisenjeuen2013etdontlaperteseraitdra-matique. Le bras de fer promet d’être intense : beInSportrêvedediffusercetteprestigieusecompétition.

En attendant, Canal+ tente d’affaiblir l’image debeInSport.Pourseplaindredesinvestissementspha-raoniques des Qataris, il a fait appel à son meilleurallié, le cinéma français, dont il est le principal pour-voyeurde fonds. Le 7eart est alléplaider la causede lachaîne auprès de parlementaires de tous bords.Canal+ attend-il de cette agit-prop un geste du gou-vernement?Passûr,enrevanche,qu’il tireunelarmeau téléspectateur. p

l i r e a u s s i

c h r o n i q u e

PSG-Barça, cache-misèredeCanal+?

Elleestmince,grande,blondeauxyeuxbleus. Lui, richissime héritier, portenéanmoinsun jean troué. Elle le croi-se dans un avion entre Zurich et Lon-

dres. Il laséduiten luimontrantdesphotosdeson chien. Ainsi débute la «love story» quiconduira Margarita Bogdanova à devenir la«tsarine», propriétaire d’un des plus grandsgroupes de négoce aumonde, Louis-Dreyfus,etde l’OlympiquedeMarseille.

«Vous y croyez, vous, à cette histoire de ren-contre dans un avion?» Cette interrogationsceptique, Elsa Conesa, journaliste aux Echos,l’aentenduesouventaucoursdesonenquête.L’affaireseraitplussimplesi,commel’ontsug-gérécertains,l’orphelinerusseétaituneprosti-tuée de luxe placée par le KGB sur la route deRobertLouis-Dreyfuspourmettre lamainsurl’empirefamilial…Maisnon.Telestbienlepre-mier mérite de cette biographie consacrée à«la fortune la plus secrète de France» : il casselamachine à fantasmes.Oubliez les contes defées et James Bond. Le véritable parcours deMargaritaLouis-Dreyfusqu’a reconstituéElsaConesaestplus étonnantencore.

Ce parcours, c’est celui d’une jeune fille deLeningrad(aujourd’huiSaint-Pétersbourg)éle-vée par son grand-père et décidée à s’évaderd’URSS. Elle y parvient grâce à un premiermariageavecunSuisse-Allemanddont elle sesépareauboutd’unanetdemi.

Sa rencontre, des années plus tard, avecRobert Louis-Dreyfus, surnommé«RLD», fait

d’elle une femme riche. Elle aurait pu resterdans l’histoire comme l’épouse du capitained’industrie, la mère de famille, la potiche.Mais, en juillet2009, l’héritier du groupeLouis-Dreyfus, redresseur d’Adidas et repre-neur de l’OM,meurt d’une leucémie à 63ans.Surprise: sa veuvenese laissepasoublier.

Un à un, elle affronte les prétendants quis’approchent du géant des matières premiè-res promis à ses enfants, raconte Elsa Conesa.Obsédéepar le risquedeperdre le contrôle dela maison, la novice se révèle soudain «uneredoutable régente, brutale, obstinée, aussidéterminée dans l’assaut qu’elle fut discrètedans son rôled’épousemodèle».

Ces combats épiques, en particulier celuicontre Jacques Veyrat, le brillant managerdont «RLD» avait fait son dauphin, consti-tuent lemorceaude bravouredu livre. Incon-nue, s’appuyant sur des alliés improbables, lapoupée russe, toujours accompagnée de sonpetitchien,ferrailleavecdescadorsdumondedes affaires. Et l’emporte! La plongéedans lescoulisses du capitalisme se transforme alorsenunebrillante leçonde stratégiemilitaire.p

Denis Cosnard

Margarita Louis-Dreyfus : enquête sur la fortunela plus secrète de France, d’Elsa Conesa, Grasset,264pages, 18,90euros.

Comment négocier aumieux son départEpreuveouopportunitéde rebond, vivre – en la contrôlant – sa rupture avec sonentreprise est un exercicenormal.Mais autant l’anticiper. L’ouvrage fournit quel-ques clés – et des témoignages– qui permettront au candidat audépart de se situerdans le jeudepouvoir auquel sonposte le conduit à participer et de réussir sa sépara-tion «dans lesmeilleures conditionsmatérielles»,pourmieuxpréparer son rebond.> Je veux quittermon entreprise. Comment décider et négociermondépart

> deMaurice Bercoff et Bertrand Reynaud, Seuil, 176p., 16¤.

Une intrigue de tailleLes complotsvisantà affaiblir lepouvoir royal, par l’intermédiairede leursministres–Concinisous LouisXIII,MazarinsousLouisXIV–, en leprivantdeses recettes fiscalesnemanquèrentpas auXVIIesiècle. Jeand’Aillon,docteurenscienceséconomiques, faitdecette intriguepolicièreau tempsde la Frondeuneœuvrede«pédagogie fiscale» endémontant lemécanismedecollectede la taille, principal impôtde l’ancien régime.> Les enquêtes de Louis Fronsac : LaMalédiction de la Galigaï

> de Jean d’Aillon, J’ai lu, 606p., 8¤ (première édition chez Flammarion en 2012).

Aucours de la prochainedécennie, lacroissancechinoisedevrait ralentir demanièreprobablement sévère. Cen’est pas là le point de vued’étrangers

malveillants,mais celui dugouvernementchinois. Laquestion est de savoir si ce ralentisse-ment se ferademanièredouce oubrutale.De laréponse à cette questiondépend l’avenir de laChine et d’unebonnepartie dumonde.

L’undesdocuments discutés lors duChinaDevelopmentForum,qui s’est tenudu23 au25mars à Pékin, rédigépar des économistesduCentrede recherche et de développementduConseil d’Etat, s’intitulaitPerspectivesà dix ans:déclindu tauxde croissancepotentielle et débutd’unenouvelle périodede croissance. Son argu-ment était que la croissance chinoisepasserad’un taux annuel de plusde 10%entre2000et2010à6,5%entre2018 et 2022, tauxd’ailleursobservédepuis le deuxième trimestrede 2010.

Voici quelques-unesdes raisonsqui pous-sent les auteurs à établir cette prévision. Toutd’abord, le potentiel d’investissementdans lesinfrastructures s’est «nettement contracté» : lapart d’investissementdans les actifs fixes estpasséede 30%à 20%au cours de la dernièredécennie.

Deuxièmement, le rendementde l’actif a chu-té et la surcapacité a explosé. Le «coefficientmarginalde capital» – quimesure la croissancegénéréeparunniveaudonnéd’investissement– a atteint 4,6 en 2011, soit sonplus hautniveaudepuis 1992. Les investissements chinois génè-rentune croissanceplus faible qu’auparavant.

En troisième lieu, la croissancede lamain-d’œuvredisponible a nettement chuté.

Quatrièmement, l’urbanisation continue

d’augmenter,mais est enphase dedécéléra-tion. Enfin, les risquesaugmententdans lesfinancesdes gouvernements locaux et dansl’immobilier.

Des tendances établies depuis longtempssont en train de s’inverser. L’investissementfixe a atteint 49%du produit intérieur brut(PIB) en 2011,mais devrait tomber à 42% en2022, alors que la part de la consommationdevrait passer de 48% à 56%. La part de l’indus-trie devrait baisser de 45% à 40%du PIB, tan-dis que celle des services passera de 45% à 55%.L’économie sera emmenée par la consomma-tion, pas par l’investissement. Du côté de l’of-fre, le principal facteur de baisse de la croissan-ce est l’effondrement de la progression dustock de capital, consécutif à la chute de l’inves-tissement.

Onpeut avoir une visionoptimistede ce bas-culement. Selon les donnéesduConferenceBoard, un think tank canadien spécialisé dans larechercheet l’analyse économique, le PIBchinoispar tête (à parité de pouvoir d’achat) estaumêmeniveauque celui du Japonen 1966 etcelui de la CoréeduSuden 1988. Ces paysontensuite connu respectivementsept etneufannéesde croissanceultrarapide. Par rapportauxniveauxaméricains (autremesure dupotentiel de rattrapage), la Chine se trouve aupointoù en étaient le Japonen 1950et la CoréeduSuden 1982. Cela suggèreunpotentiel sup-plémentairede croissance. Le PIB chinoispartête est tout juste supérieur au cinquièmeduniveauaméricain. Il semble, donc, avoir une lar-gemargedeprogression.

Mais un certainnombred’éléments s’oppo-sent à cette visionoptimiste. Comme l’a sou-vent souligné l’ancienpremierministreWen Jia-bao, la croissance chinoisea été «déséquilibrée,non coordonnée et nondurable». C’est parfaite-ment exact sur plusieurs aspects,mais le plussignificatif est la dépendancevis-à-vis de l’inves-tissement, nonpas seulement commesourcede capacité supplémentaire,mais commesour-

cede demande.Des tauxd’investissementenhaussepermanentene sont pas soutenables,car les retours dépendent, en définitive, d’unsurcroît de consommation.

Et c’est là que se fait jourune visionbeau-couppluspessimiste. Comme l’amontré l’expé-riencedu Japon, il est extrêmementdélicat depasserd’une économieà fort investissementetà forte croissance àune économieà faible inves-tissementet faible croissance. J’y vois aumoinstrois risques.

Toutd’abord, si la croissance attendue tombedeplus de 10%à, disons, 6%, le tauxd’investis-sementnécessairedans le capital productif s’ef-fondrera: avec un coefficientmarginalde capi-tal d’unniveau constant, la baisse serait de 50%à30%duPIB. Si elle intervenait demanière rapi-de, cette baissepourrait, à elle seule, provoquerunedépression.

Deuxièmement, la forte hausse du crédits’est accompagnéed’une dépendance vis-à-visde l’immobilier et d’autres investissementsaux rendementsmarginauxen baisse. En par-tie pour cette raison, la baisse de la croissancese traduira probablement par une augmenta-tion demauvaises dettes, notammentdans lesecteur des investissementsopérés en vertu del’idée que la croissance passée allait se poursui-

vre. La fragilité du système financier pourraitfortement s’accentuer, en particulier dans le«secteur bancaire fantôme» en rapide dévelop-pement.

Troisièmement, il n’y a guèrede raisonde s’at-tendreàunebaisse du tauxd’épargnedesména-ges. En conséquence, soutenir la hausse envisa-géede la consommationexigeun rééquilibragedes revenus endirectiondesménages auxdépensdes grandes entreprises, y comprisdesentreprisesd’Etat. C’est tout à fait possible: lapénurie croissantedemain-d’œuvreet la haus-sedes tauxd’intérêtpourraient contribuer sansheurts à ce résultat.Mais,mêmesi c’était le cas,il existeun risque évidentdevoir la baissedesbénéficesqui en résulterait, accélérer l’effondre-mentde l’investissement.

L’intentiondugouvernementchinois est,bien entendu, deprocéder endouceurà la tran-sitionvers une économiemieuxéquilibrée et àcroissanceplus faible. C’est loind’être impossi-ble. Le gouvernementdisposede tous les leviersnécessaires. Par ailleurs, l’économie continuedeprésenterun fort potentiel.Maisparvenir à unebaissedu tauxde croissance sansprovoqueruneffondrementde l’investissementet unedésor-ganisation financière est beaucoupplusdiffici-le quene le laisse entendren’importequelmodèled’équilibregénéral.

Il est facile de trouverdes exemples d’écono-miesqui ont longtempsenregistré d’excellen-tes performancesmais qui ont ensuite échoué ànégocier leur inévitable ralentissement. LeJaponen estun.

La Chinepeut échapper à ce destin, enpartieparce qu’elle recèle encoreun énormepotentielde croissance.Mais les risquesdedérapage sontélevés. Je nepensepas qu’unaccident de grandeampleur suffise à enrayer totalement l’émer-gencede la Chine.Mais la décennieà venir pour-rait s’avérer beaucoupplus cahoteuseque cellequi vient de s’écouler.p

(Traduit de l’anglais par Gilles Berton)

Entre2008 et 2010, la chaîne et sesdéclinaisons, Décalé, Sport et Family,

facturées 36 eurosparmoisà l’abonné, ont perdu 243000clients,

soit unebaisse de 3,8%

a n a l y s e

l e l i v r e

Ducontedeféesauxrèglementsdecomptes

MartinWolf

Sandrine CassiniEco & entreprise

Comme l’a souventsouligné l’ancienpremier

ministreWen Jiabao,la croissance enChinea été «déséquilibrée,

non coordonnéeetnondurable»

Cettechronique

deMartinWolf,éditorialisteéconomique,est publiée

enpartenariatexclusif avecle «FinancialTimes»©FT

Page 10: Le Monde 20130409_ECO

10 0123Mardi 9 avril 2013

Le 13mars 2013, la chambre sociale dela Cour de cassationa rendu, defaçon inattendue, trois arrêts favora-bles aumaintiend’avantagesparti-

culiers accordés aux cadres au travers d’ac-cords d’entrepriseoude branche, voire dedécisionsunilatérales d’employeurs.

En l’espèce, laCourde cassationaeuàjugerde situationsdans lesquelles les cadresbénéficiaientd’unmeilleur financementpar l’employeurdecotisationsàuneassu-rance-santécomplémentaire,oubiend’unrégimeexclusifdeprévoyancecomplémen-tairemaladie-invalidité.C’est aunomdel’égalitéde traitementdans l’emploique ceslitigesavaientété initiéspardes salariésnon-cadres, qui s’estimaientmoinsbien traités.

Certainesdécisions antérieures de laCourde cassation expliquentque cescontentieuxne surgissentquemaintenant.Lahaute juridictionavait en effet posé enprincipe, le 20février 2008, qu’unedifféren-cede catégorieprofessionnellene justifiepas en soi une différencede traitement – enl’occurrence l’attributionde tickets-restau-rant au seul personnelnon-cadre.

Lamêmesolution avait été choisie le1er juillet 2009àproposde l’attributiond’une indemnitéde congéspayés: «La seu-le différencede catégorieprofessionnelle nesaurait en elle-même justifier, pour l’attribu-tiond’unavantage, unedifférencede traite-ment entre les salariésplacés dans une situa-tion identiqueau regarddudit avantage.»Les responsabilitésplus importantesconfiées aux salariés cadres ne constituentpas à elles seulesun critère pertinentper-mettant l’octroi de cet avantage.Mêmesolution toujours dansundes arrêts du13mars 2013, enmatièred’indemnitéconventionnellede préavis

Critèresguère convaincantsLa cour d’appel deGrenoble, dansun

arrêt du 13décembre 2012, a appliqué cetterègle àune «complémentaire-santé» enconsidérantque «la situationde tous lessalariés d’une entreprise est strictementidentique, aucune catégorie de salariés nepouvantprétendre avoir davantagedebesoins en ce domaine [des frais de santé]du seul fait de la nature de son contrat detravail, duposte occupé oude sondegré deresponsabilité».

L’affaireparaissaitdonc entendue.Mais,à la surprisegénérale, laCourde cassationa

abandonné, le 13mars 2013, son syllogismeenaffirmantqu’«en raisondesparticulari-tés des régimesdeprévoyance couvrant lesrisquesmaladie, incapacité, invalidité, décèset retraite – qui reposent surune évaluationdes risques garantis en fonctiondes spécifici-tés de chaque catégorieprofessionnelle,pren-nent en compteunobjectif de solidarité etrequièrentdans leurmise enœuvre la garan-tie d’unorganismeextérieurà l’entreprise –,l’égalitéde traitementne s’appliquequ’en-tre les salariés relevantd’unemêmecatégo-rieprofessionnelle». Voilà donc la prévoyan-ce retranchéede l’égalité de traitement!

Toutefois, les critères utilisés ne sontguère convaincants: l’évaluationdes ris-quespermettant la tarificationde l’assuran-ce complémentaire est réalisée par lesactuairespourune brancheouune entre-prise donnée et nonpar catégories, audemeurant très difficilement identifiables.Pis, l’inégalité de traitement est justifiéepar la solidarité,mais cet objectif ne peutexpliquer la différencede régimeentrecatégories! Enfin, la gestiond’un régimeparunorganismeassureur – qui garantit,sansplus, les engagementsde l’employeur–ne justifie en rien le caractère catégorielde l’assurance.

Lespartenaires sociauxvont ouvrir, enjuillet2013, des négociations sur les complé-mentaires-santé.Ne serait-cepas l’occasiond’expliquerpourquoi les cadres bénéfi-cient demeilleures prestations, dansunpays où toutes les statistiquesmontrentque les disparités d’espérancedevie enbon-ne santé entre les catégories socioprofes-sionnelles sont parmi les plus importantesen Europe?p

ch ron i q u e

FrancisKesslerMaître de conférences

à l’universitéParis-I-Panthéon-Sorbonne

AnneRodier

Comment traire une vacheet fabriquerdubeurre?»Ceslogandel’entreprisefami-liale, la laiterie Gautier, à

Lisieux dans le Calvados, a, parado-xalement, guidé Emmanuel Gau-tier, 41 ans, vers le secteur… de lafinance. Aujourd’hui, ce gérant defonds solidaires se revendique«banquier par vocation».

Il avait 5ans lorsque la laiterie,accrochée à sa terre normandedurant quatre générations, de 1870à 1980, a été vendue à un groupecoté en Bourse, le groupe PaulRenard, à son tour racheté dans letourbillon de la financiarisation del’économie des années 1980. Bienau-delà d’un douloureux souvenirde paradis perdu, ce passé, qu’ilraconte dans Le Royal Lisieux (éd.Charles Corlet, 2012), sera détermi-nant dans ses choix professionnels.

Son aventure a commencé unweek-end de 1998, alors qu’ilchinait dans une « foire-à-tout»,autrement dit un vide-greniers, àCormeilles (Eure). «J’y ai trouvé unpot à lait gravé “Gautier”», se sou-vient-il. Il s’interroge alors sur lestraces de l’entreprise familiale etconstate rapidement que rien n’aété gardé. C’est sur Internet, auprèsdecollectionneurs,qu’ilvareconsti-tuer un siècle d’entrepreneuriatdéveloppé selon un modèle écono-miquede«circuit court» au serviced’une région: la Normandie.

«Quand j’ai commencéà retracernotre histoire, en récoltant les éti-quettes du camembert à l’effigie duPèreGautier, les photos de la beurre-rie, celles des goûteurs de beurre ettantd’autres, j’étais fierde l’entrepri-sefamiliale,mais jen’aipasvulerap-port avec ce que je faisais à la ban-que», s’étonne-t-il. Pourtant, l’en-quêtequ’ilmènesur lamaisonGau-tier va, dès lors, accompagner sesprojets de gestionnaire de fondsdans sa volonté de réconcilier lafinance avec l’économie dite «réel-le».«Si j’ai vouluêtrebanquier, c’estpour être à la confluence des dimen-sions humaine, technique et socia-le», reconnaît-il.

Diplôméd’unmasterde financesappliquées et d’un DEA en micro-économie, Emmanuel Gautier tra-vaille depuis 1994dansune banqued’investissements, où il gère l’épar-gne salariale, les fonds d’investisse-ments socialement responsables etles fonds d’épargne solidaires. Endix ans, il a constitué 900millionsd’euros de fonds solidaires.

Dès ses débuts, à une époque oùlesépargnantsinvestissaientvolon-tiers sur des fonds sans se préoccu-

perdes liens avec l’économie réelle,lui, au contraire, va rechercher latransparence: le contenudesporte-feuilles, le retour financier surinvestissementet l’impactsur l’em-ploi. «Mes clients me confient del’épargne avec laquelle ils veulentque la banque finance l’économieréelle.Si j’aiunemission,c’estdedon-ner de la transparence pour rétablirla proximité entre le créateur devaleurs et l’investisseur et, ce fai-sant, responsabiliser ce dernier. A lalaiterie, on connaissait nos fournis-seurs», souligne-t-il.

Les souvenirs l’ont poussé à redé-couvrir «ce qu’était l’entreprise auXIXesiècle et la création de richessesdanslagouvernancefamiliale».Tou-tefois, il se défend de prôner unevision passéiste de la finance. Sonproposestderetrouverdansl’entre-preneuriatd’hier lesvaleurspasséespar pertes et profits de lamondiali-sation, pour savoir comment réta-blir le lienentrefinanceetéconomieréelle dans un système globalisé, etdévelopperunmodèlederedistribu-tion lepluséquilibrépossible,«sansse raconter d’histoire» précise-t-il.«Quand le capital est éloignéde l’en-treprise, il ne reste au dirigeantqu’une responsabilité financière. Ilfautdoncrecréerde laresponsabilitépar la proximité afin de pouvoir res-taurer le long terme dans la démar-che entrepreneuriale», dit-il.

De l’épargne salariale à l’investis-sement socialement responsable,EmmanuelGautiertentedemainte-nir ce cap en travaillant à la visionglobalede l’entreprise.p

Il fautsauverlesoldatcadre

e n b r e f

e n s i t u a t i o n

MargheritaNasi

Après dix-huit ans à des postes dedirecteur de la communicationinternationaleetenvironnementa-le dans desmultinationales, Corin-

neSaurel est agacée: elledoit toujours réglerles «décalages culturels entre les différenteséquipes». En 2008, elle décide de suivre lemaster en management interculturel deParis-Dauphineoù elle a «acquis les bases dedécryptage socioculturel». La notion detemps,parexemple,estinterprétéedifférem-mentselon lescultures.«LesFrançaisprivilé-gient le contenuet oublient souvent les délaissur le retour. Alors que dans lemonde anglo-saxon, la “deadline”, les règles à suivre, l’em-portentsur lecontenu», détaillecellequidiri-ge aujourd’hui le cabinet Cultures &Strate-gy, où elledéveloppe les capacitésdesmana-gersà travailleravecdifférentescultures.

Martine Parnotte, directrice des ressour-ces humaines du groupe MOM (Materne-MontBlanc), faitpartiedesesclients.Legrou-pe crée une usine de production aux Etats-Unis. «On y développe la même technologieque sur notre site de production Materne,donconpensaitque leschosesallaientsefairerapidement. Mais on a vite été confrontés àdesproblématiques interculturellesdemana-gement», raconteMmeParnotte.

Unexemple? Les documentsde travail necorrespondentpas aux attentes des supervi-seurs américains. «Derrière lemêmemot, secachentdesréalitésdifférentes:unecheck-listfrançaise,uneprocéduresurlaqualiténepeu-vent pas être transposées telles quelles. Nousnous sommes rendu compte que les attentesdes superviseurs américains étaient d’unautre ordre et nous avons retravaillé notreapproche de management et tous les sup-portsdetravail.»Unevingtainedepersonnesdu groupe MOM, membres du comité dedirection,managersetchefsdeprojetinterve-nant sur la filiale américaine, ont donc suiviune formation auprès de Cultures &Strate-gy. Si les équipes ont apprécié la dimensionculturelle, la DRH est séduite par l’approchepratiquede l’apprentissage,«laphaseopéra-tionnelle, où on a, par exemple, travaillé surl’adaptation de nos procédures à la cultureaméricaine». Rien à voir avec les formationsclassiques à l’expatriation, «où on passe lescadresà lamoulinetteetoùoncibleplus laviepersonnelle des expatriés que le quotidien deleur travail»,estimeMmeParnotte.

Depuis quelques années, le marché de laformation interculturelle innove. «L’ancien-ne imagede l’expatriéaévolué:onnedéploie

plus le tapis rouge au manager qui part àl’étranger.Aveclesnouveauxmoyensdecom-munication, vous n’avez pas forcémentbesoindevousdéplacerdevotretourparisien-neduquartierdeLaDéfense[Hauts-de-Seine]pourmettreenplacedesprojetsenChineetenInde», explique Frédéric Dubois, directeurgénéral de TerresNeuves, institut d’acclima-tationetdemanagementinterculturels.

StéphaneWaller,directeurducabinetMel-tis, ne dit pas autre chose: «L’intercultureln’est pas que géographique. Dans les carriè-res, les passages transversaux sont devenuscoutume:onestfinancier,puisRH,puisànou-veau financier. Les cartes sont brouillées, ilfaut développer son potentiel d’ouverture etd’écoute.» Les formations suivent cette évo-lutiondumarché,etlemanagementintercul-turelest entraindesupplanter les anciennesformationspourexpatriés.

FrédéricDubois l’a constatédans son cabi-net:ilyaquelquesannéesencore,TerresNeu-ves s’occupait surtout de formations expa-triation. Aujourd’hui, l’activité du cabinet seconcentreà70%surlemanagementintercul-turel. «Les déplacements sont devenus troponéreux et les entreprises françaises capitali-sent sur les ressources locales. Si avant onaccompagnait les expatriéset leurs conjoints,aujourd’hui on forme des collaborateurs quiréalisent des missions ponctuelles dans lepays en travaillant sur la dynamique globaleet multiculturelle», poursuit M.Dubois. «Lemanagement à la française est valable dansdesorganisationshiérarchiques.EnAustralie,par exemple, le manager est, au contraire,considéré commeun simple collaborateurdel’entreprise», explique-t-il.

CorinneSaurel partage ce constat.Marchéde niche il y a encore quelques années, lemanagement interculturel est aujourd’huiplusprisé,mêmesi la dirigeantedeCultures&Strategy regrette qu’on ne mette l’accentsur ces formationsque «quandon est sur ducontrat commercial ou de la fusion-acquisi-tion». Autre bémol: ces formations se déve-loppentaussiparceque«lechampest investipar les seniors au chômage qui capitalisentsur leur expérience. Mais il leurmanque par-fois l’approchesocioculturelle.Ontrouveaus-si des consultants qui donnent des conseilssansavoirjamaisfaitd’opérationnel,c’esttou-jours délicat», estime MmeSaurel. Domaineendéveloppement, l’interculturel doit enco-re se structurer.p

ÉCO&ENTREPRISE M A N A G E M E N T

«Si j’ai voulu êtrebanquier, c’est pourêtre à la confluencedesdimensions

humaine, techniqueet sociale»

EmmanuelGautier,de l’entreprise familialeà la financesolidaireEcrire l’histoire industrielleduXIXesiècle

pour tenterdecomprendrecomment remettrel’économieauservicede l’hommeauXXIesiècle

Santé au travail

Le «droit de retrait» exercépar les salariés touche tous les secteursEn2010, 12%des salariés ont déclaré avoir volontairement interrompuleur travail ou refuséune tâchepourpréserver leur santé ou leur sécuritéau cours des douzederniersmois, selon les derniers chiffres publiésmer-credi 3avril par leministèredu travail. C’est la première fois, cette année,que l’enquête Sumer, quimesuredepuis prèsde vingt ans l’expositionauxrisquesprofessionnels des salariés en France, a interrogé les Français surleur recours au «droit de retrait»,mis enplacepar les loisAurouxen 1982.47983salariés ont été questionnéspar 240médecinsdu travail de jan-vier2009 à avril2010.En termes d’activités, tous les secteurs sont concernés.Mais ce sont les sala-riés de la productionet distributiond’énergie (17%), du transport (15%) etdu secteurde la santé (15%) qui sont les plus exposés. Les salariés les plusépargnés sont ceuxdu secteur financier (6%). Les ouvriers (16%) sont deuxfois plus nombreuxque les cadres (8%) à avoir exercé ce retrait, les hom-mes (13%) davantageque les femmes (11%).«Lamoitié des salariés ayantinterrompuou refusé une tâchedisent l’avoir fait dans le cadred’une démar-che collective», précise l’étude.p

«L’interculturel n’estpas que géographique.Dans les carrières, lespassages transversauxsontdevenus coutume»

StéphaneWallerdirecteurdu cabinetMeltis

Lessociétés forment leurs futursexpatriésaumanagement interculturelLemarchédelaformationinnoveentravaillantsurunedynamiqueglobale,

carlescadressontdavantageenvoyésàl’étrangerpourdesmissionsponctuelles

ROCCO

Page 11: Le Monde 20130409_ECO

110123Mardi 9 avril 2013

l e c l i g n o t a n t

L’ISR continue de progresserL’investissementsocialement responsable(ISR), qui appliqueà lagestion lesprincipesdudéveloppementdurable, continuedeprogres-ser enFrance. Selon l’observatoireNovethic,les encoursdes fonds ISRont augmentéde29%en2012, à 149milliardsd’euros.Mais ladécélérationestmarquéepar rapportà 2011(+69%). Plusde lamoitiédesencourssontdéte-nuspardes assureurs.Plusque jamais, l’ISR«àla française» estdominépar les investisseursinstitutionnels (72%desencours).Malgré lavigueurde l’épargnesalariale ISR (+30%), lesparticuliersne représententplusque28%dumarché, contre30%en2011.p JérômePorier

Immobilier

Les tauxdes crédits denouveauorientés à la baisseLes tauxdes crédits immobiliers ont reculé enmars. Le courtierACE annonceun repli de0,05%sur toutes les durées deprêt,avecun tauxmoyende 2,70%sur 15ans, 2,95% sur 20ans et3,25% sur 25ans. «Certaines banques, qui avaient remonté leurstauxenmars, les ont de nouveaubaissés enavril, annulant lahaussedumois précédent», expliqueHervéHatt, directeurgénéral deMeilleurtaux.com.En avril, les tauxdes créditsimmobiliersne devraientpas remonter. «C’est l’undesmoispharespour la productionde crédit, notammentparce qu’il y abeaucoupde salons consacrés à l’immobilier, expliqueMaël Ber-nier, directricede la communicationd’Empruntis.com.Unebanquequi déciderait de remonter ses taux semettrait automa-tiquementhors-jeu, au risque deperdre des parts demarchéimportantespar rapport à ses concurrents.»p

Fiscalité La nouvelle taxe à 75% sera plus rentableque la précédenteEn raisond’un tauxplus élevé, lanouvelle versionde la taxe à75%, perçuepar les entreprises sur la fractiondes salairesdeplusde 1milliond’euros, devrait rapporterdeux foisplus que lataxe initialementprévue.D’après lesdernières estimationsdeBercy, elle devrait procurer 500millions d’eurospar anà l’Etat.Matignonaprécisé que toutes les entreprises seront concer-néespar cettenouvelle taxe, y compris les clubsde football.

A R G E N T ÉCO&ENTREPRISE

e n b r e f

Agnès Lambert

Ce n’est désormais unsecret pour personne: lesmeilleurs placementssans risque du marché

sont le LivretA et le Livretdedéve-loppement durable (LDD) et leur1,75% de rendement net. Les parti-culierspeuventyplacerrespective-ment jusqu’à 22 950 euros et12000euros. De quoi suffire à lagrandemajoritédes épargnants.

Pourtant, certains d’entre euxont parfois besoin de placer beau-coup plus sur une courte période,parexempleàl’occasiond’unhéri-tage ou de la vente d’un bienimmobilier.Une solution consistealors à se tourner vers les livretsbancaires,quipermettentd’inves-tir jusqu’àplusieursmillionsd’eu-ros.Leurrémunérationvariesensi-blement d’un établissement àl’autre. Mieux vaut donc, pourobtenir le meilleur taux, faire letourdumarché.

Mais ne vous bercez pas d’illu-sions: leniveautrès faibledestauxd’intérêtdemarché, couplé à la fis-calité sur les intérêts, rend l’exerci-ce difficile. D’autant que les ban-quesmultiplient les offres promo-tionnelles avec des taux élevéspour attirer de nouveaux clients.Pour vous y retrouver, nous avonsdonccalculécequerapporteraient,selon votre tranche d’imposition,100000euros placés durant unan, surdixde cesproduits.

«Nous sommes attentifs à laconcurrence, mais nous cherchonsavant toutà recruterdesclientsquiinvestirontplustarddansdel’épar-gne longue, plutôt que des clientsexclusivement intéressés par lespromotions sur le livret bancaire»,explique Pascal Donnais, le prési-dent de Fortuneo, qui propose untaux de 4% brut sur quatre moisjusqu’à 100000euros pour touteouverture d’un livret avant le24avril.

La meilleure offre du momentest sansconteste celledesbanquesdesdeuxconstructeursautomobi-les Renault et Peugeot. Le livretZesto de RCI Banque rapporte

5,50%brutsurquatremois jusqu’à75000euros, puis 2,20%ensuite.

De son côté, PSA Banque, quivient de se lancer dans la courseavec le livret Distingo, s’est alignésur son concurrent. «Au-delà d’untaux très avantageux, Distingo s’il-lustre par les valeurs qu’il véhicule:les dépôts servirontdirectementaufinancement de l’économie réellepar l’intermédiaire de notre activi-té automobile», indiquait Jean-Baptiste de Chatillon, membre dudirectoire de PSA Peugeot Citroënlors du lancement du livret, le7mars. Reste que c’est surtout leniveau élevé de la rémunérationquidevrait attirer les clients.

Maigre rémunérationAu-delàdesoffrespromotionnel-

les, les taux standards des livretsbancairessontleplussouventcom-pris entre 1,25% et 2% brut, soitpresqueplus rien, une fois déduitela fiscalité. Car ces livrets sont sou-mis à la fois aux contributionssocialesàhauteurde15,5%etàl’im-pôt sur le revenu. Autrement dit,plus vous êtes imposé dans unetranche élevée du barème de l’im-pôt sur le revenu, plus votre gainsera faible. Ainsi, 100000eurosplacéspendantunansurunlivretà

1,25%, ne rapportent que 512eurosd’intérêts après impôts et prélève-ments sociaux pour un contribua-ble imposé dans la tranchemargi-nale la plus élevée, à 45%. Soit untaux net de 0,50%, ne permettantmême pas de préserver son patri-moinecontre l’inflation.

Conscientes de voir leurs nou-veaux clients filer dès la fin de lapériodedepromotion, les banquesproposent aussi des offres spécifi-ques à leurs clients fidèles. «Nousréalisons régulièrementdesoffresàtaux “boosté” pour nos clients, soitsur leursnouveauxversements, soitsur les encours existants pour lesinciter à rester fidèles», confirmeSophieClout, chef deproduit épar-gne bancaire chez BforBank. Al’inverse, la politique de Boursora-ma consiste à proposer à tous sesclients, anciens ou nouveaux, lemêmetauxsurl’ensembledessom-mesdéposéessur le livret,actuelle-ment rémunéréà 1,90%brut.

A noter que les banques deréseaux ne participent pas à cetteguerredestauxsurleslivrets.Nom-bre d’entre elles proposent cepen-dant des comptes sur livrets cou-plés à un LDD: lorsque ce dernierest au plafond, l’épargnant peutplacer quelques milliers d’euros

supplémentaires à un taux supé-rieuràceluidulivretclassiquedelabanque.

Livret Cerise chez LCL, Codebisau Crédit agricole ou encore Tri-plex au Crédit mutuel Centre EstEurope fonctionnent sur ce princi-pe. D’autres établissements com-me BNP Paribas et Société généra-le proposent des livrets bancairesdotés d’un bonus de fidélité pourlesclientsylaissantfructifierleursdépôtsdans la durée.p

MieuxqueleLivretA, lePEL

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Au-delàduplafondduLivretAetduLDD, lesproduitsbancairesconstituentunebonnealternative.Maisentre lesmultiplesoffres, il estdifficiledes’y retrouver

U nplacement sans risque,dont le rendement estsupérieurà celui du

LivretA tout en étant garanti etpouvant accueillir jusqu’à61200euros? Cetteperle rareexiste: il s’agit dupland’épargne-logement (PEL). Accessible à tous,mêmeauxmineurs, dans tousles réseauxbancaires, le PEL rap-porte, en effet, 2,50%brut, soit2,11%après prélèvementssociauxet n’est imposéqu’à par-tir de la douzièmeannée.

Ces caractéristiquesen font,aujourd’hui,une alternativesérieuse auLivretA, dont le tauxs’élève à 1,75%. Plus précisément,la rémunérationdu PEL est fixéedéfinitivementà l’ouverture:elle ne fluctuepas dans le tempscommec’est le caspour leLivretAou le Livret dedéveloppe-mentdurable.Ainsi, tous les PELouvertsdepuis le 1eraoût 2003rapportent2,50%brut.

Depuis la réformede l’épargne-logement, entrée en vigueur le1ermars 2011, le tauxduPEL est,en effet, revu chaqueannée enfonctionduniveaudes tauxdemarché.Mais le niveauactuel de2,50% constitueunplancherau-dessousduquel la rémunéra-tionnepeut pas baisser.«Le PELconstitueunebonne solutionpourplacer son épargneà condi-

tiond’avoir unhorizond’investis-sementd’aumoins deuxans,expliqueFlorenceCorne, respon-sablemarketing épargne classi-que à LaBanquepostale.Car, encas de retrait avant ce délai, lesintérêts sont recalculés au tauxdu compte épargne logement[CEL], actuellementà 1,25%.»

Unproduit à redécouvrirAutre contrainteduPEL, l’épar-

gnantdoit y effectuerdes verse-ments réguliers, d’aumoins540eurospar an.Mais cemon-tant devrait convenir à denom-breux foyers. Rappelons, enfin,que le PELpermet, aprèsunepha-se d’épargnede quatre ansmini-mum,de demanderunprêt épar-gne-logementdont les condi-tions sontprédéfinies et dont l’oc-troi permet d’obtenir, enplus,uneprimed’Etat.

Autantd’arguments quidevraient inciter les épargnants àredécouvrir ce produit. Les ban-quesde réseau lemettentd’ailleurs en avant: la Sociétégénérale offre ainsi uneprimede45eurospour touteouvertured’unPEL et d’unCELd’ici à la findumois d’avril.

Quantauxparticuliersayantouvertunpland’épargne-loge-ment il y ades années, ils sont,pour laplupart, encoremieux

lotis. Eneffet, ces PELcontinuentde fructifier indéfinimentpourlesplansouverts avant la réformedu1ermars2011, avecdes rende-mentssupérieursà ceuxenvigueuraujourd’hui.Mais,pourlesgénérationsplus récentes, laduréedevieduPELestdésormaislimitéeàquinzeans.

Reste qu’il n’est pas possibled’effectuerdenouveauxverse-ments surun PELdeplus de dixans et qu’aprèsdouze ans lesgains sont imposés aubarèmedel’impôt sur le revenu. Se posealors la questionde l’intérêt ounonde conserver ceproduitd’épargneplutôt qued’en ouvrirunnouveau. Pour cela, ilconvientde calculer son rende-mentnet en fonctiondu tauxbrut duPEL et de votre tranchemarginaled’imposition.

Evidemment, toutvadépendrede sonannéed’ouverture.Pourdes contribuablespercevantmoinsde 2000eurosd’intérêtsdans l’année (et optantpouruneimpositionforfaitaire à 24%), lesPELouverts entre1986et 1994rap-portentencore 2,80%netd’impôtet de contributionssociales, ceuxouverts entre1994et 1997, 2,32%,mais ceuxsouscrit entrejuillet1999et juin2000, 1,58%.Soitmoinsque leLivretA.p

A.La.

Des taux élevés... mais demaigres gains à l’arrivée

... 14 % ... 30 % ... 41 % ... 45 %... payant moinsde 2 000 euros

d’intérêts dans l’année

Source : Cyrus Conseil

*Après prélèvements sociaux, impôt et CSG déductibleLes offres promotionnelles des banques brouillent les pistes pour qu'il soit difficile, sinon impossible,de les comparer. Niveau du taux boosté, courte période sur laquelle il est appliqué... Ces critères entrent en ligne de compte.Les calculs de Cyrus Conseil montrent ainsi qu'un taux standard de 2 % au Crédit Municipal vaut mieux qu'une promotionà 3,50 % sur très courte période chez ING Direct.

Livret d'épargne Distingo (PSA Banque)

Pour 100 000 euros placés sur un an

Livret Zesto (RCI Banque)

Livret BforBank (BforBank)

Livret d'épargne (Cetelem)

Livret + (Fortuneo)

Livret Solidarité (Crédit Municipal de Paris)

Livret Epargne Orange (ING Direct)

Livret d'épargne Monabanq (Monabanq)

Compte sur livret (Boursorama Banque)

Livret Cortal Consors (Cortal Consors)

2 154 €

1 993 €

1 957 €

1 803 €

1 424 €

1 406 €

1 361 €

1 353 €

872 €

1 694 €

1 568 €

1 540 €

1 419 €

1 120 €

1 106 €

1 071 €

1 064 €

686 €

1 379 €

1 276 €

1 253 €

1 154 €

911 €

900 €

871 €

866 €

558 €

1 264 €

1 170 €

1 148 €

1 058 €

835 €

825 €

799 €

794 €

511 €

1 830 €

2 154 € 1 694 € 1 379 € 1 264 € 1 830 €

1 694 €

1 663 €

1 532 €

1 210 €

1 194 €

1 156 €

1 149 €

756 €

Intérêts nets* pour unparticulier imposé dans la tranche à…

Page 12: Le Monde 20130409_ECO

12 0123Mardi 9 avril 2013 ÉCO&ENTREPRISE S P É C I A L J E U N E S D I P L Ô M É S

AnneRodier

Attirer lesmeilleurs», ce pourraitêtre le mantra des entreprisesqui attendent, chaque annéedepuis 2002, le classement Uni-

versumdes employeurs préférés des étu-diants des grandes écoles et, pour ladeuxième année, d’un panel plus res-treint d’étudiants des universités. Ce pal-marès, dont LeMonde publie les résultats2013enexclusivité,aétéréaliséeninterro-geantplusde34000étudiants.Ilestassor-tid’unesériedequestionspourmieuxsai-sir les attentes des futures recrues : leursaspirations? Leur secteur préférépourunpremier emploi ? La caractéristique del’emploi est-elle, à leurs yeux, la plusattractive?

Les étudiants français sont pourtantrelativement prévisibles dans la désigna-tion de leur employeur préféré. LVMH etEADSsont, ainsi, depuisplusieursannées,toujoursentêtedupodium«grandeséco-

les»et le choixdesuniversitairesestassezsemblablepuisqu’ilsaccordent, en facultéd’ingénieur,ladeuxièmeplaceàEADSder-rière Thales et, en ce qui concerne le com-merce, la deuxième place également àLVMH, devancé par L’Oréal, qui a gagnédeuxmarches depuis 2012.

La finance et l’automobile touchésLesecteurdel’aérospatialetdeladéfen-

se fait égalementtoujours figurede favoripuisqueEADSet Thalesn’ontpasquitté letop5cesdernièresannées.DassaultAviati-on gagne une place chaque année depuis2010 et Safran s’est littéralement envoléen 2013. C’est dans ce secteur que les ingé-nieurs des grandes écoles disent préféreravoir leur premier emploi, tout commelesuniversitairesd’ailleurs.

Ernst&Young, premierdes quatreplusgrands groupes d’audit financier (lesautres sont KPMG, PwC et Deloitte), est,comme les trois dernières années, tou-joursdans le top10.

Enfin, certaines entreprises ont claire-

ment gagné en attractivité, comme Goo-gle auxdépens d’Apple.

Mais leprincipal enseignementde cetteédition 2013 est lié au contexte économi-que.Lacrisecommenceàêtreressentieparles jeunes diplômés, particulièrement lesuniversitaires. «Jusqu’en 2013, la sécuritéde l’emploi était un des derniers critèresretenuspar lesétudiants,plusattentifsauxpossibilitésdedéveloppementde carrièreàl’international.Mais aujourd’hui, ce critèreest très important (54%) pour les étudiantsen université de commerce ainsi que pourles futurs ingénieurs (37%)», note AurélieRobertet, directriceFranced’Universum.

Danslesgrandesécolesaussi, lastabilitéde l’emploiestdeplusenplusaucœurdespréoccupations,mêmesi lepremierobjec-tif de carrière reste, pour tous les profils etloindevanttouslesautrescritères, l’équili-breentrevieprivéeet vieprofessionnelle.

Conjoncture économique oblige, « lesecteurpublicest legrandgagnantdecetteédition Universum», ajouteMmeRobertet :EDF, GDF Suez, le CEA, DCNS, la SNCF, la

RATP, La Poste tirent leur épingle du jeu.Enrevanche, c’est la sérienoirepourdeuxsecteurs: la financeet l’automobile.D’unepart le secteurbancairedévisse complète-ment,«car ilestassociéà laprisederisqueset aux scandales financiers», commenteMmeRobertet. Pas unebanquen’échappeàla baisse d’appréciation des étudiants.D’autre part, PSA Peugeot Citroën etRenault sont sévèrement décotés dans lepalmarès, tout comme BMW et Volvo.«Les étudiants sontmoinsattentifsau sec-teur qu’à l’entreprise elle-même et auxvaleursqu’elleporte», expliqueMmeRober-tet. Les plans sociaux et les restructura-tions érodent la confiance des étudiants,ternissent l’imagede l’entreprise, et dimi-nuent son attractivité.

Unmauvais écho de l’entreprisediffusésur les réseaux sociaux par un stagiairedéçu fait aussitôt le buzz parmi les étu-diants.Laréférenceprofessionnelle,labon-ne imagede l’entreprise,quivontvaloriserlecurriculumvitae, restentdesvaleursfor-tesauprèsde tous les étudiants.p

34160étudiantsinterrogésLe sondageUniversum2013donne le classementdesemployeurspréférés des étu-diantsde 119grandes écoles etuniversités.Entredécembre2012 etfévrier2013, l’institut de sonda-ge international, spécialisédans lamarqueemployeur, ainterrogé27444étudiantsdegrandes écoles (14705 en écolesde commerce et 12739 en écolesd’ingénieurs) et 5304 étudiantsd’université, 48%d’hommeset52%de femmes. Lamoyenned’âge est de 21,6ans engrandeécole et 22,6anspour lesuniver-sitaires.Unquestionnaire semi-assisté comprenant 130nomsd’entreprisesest proposé auxétudiants, invités à désignerleur top5 «employeurs».

LesecteurpublicdeplusenplusattractifEnexclusivité,«LeMonde»publie leclassementUniversum2013desemployeurspréférésdesétudiantsdesgrandesécoles

etdesuniversitésquipréparentauxmétiersd’ingénieursetauxprofessionscommerciales

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4,01 %3,90 %3,79 %3,78 %3,76 %

3,70 %3,59 %3,32 %3,27 %3,22 %

3,13 %3,00 %2,94 %2,91 %2,87 %

Publicis GroupeUbisoftPernod RicardSociété généraleTF1

PPRAdidas FranceIKEAVeolia EnvironnementMorgan Stanley

France TélévisionsBain & CompanyGroupe Yves RocherSonyLagardère

Electronic ArtsClubMéditerranéeDecathlonH&MFnac

3,67 %3,56 %3,53 %3,51%3,43%

3,41%3,27%3,11%3,10%3,07%

3,05%2,93%2,85%2,82%2,76%

2,75%2,72%2,60%2,55%2,48%

General ElectricCEAElectronic ArtsSiemensOrange

DanoneSonyDecathlonBNP ParibasDCNS

CapgeminiBCGMichelinDaimler/Mercedes-BenzSchlumberger

Ernst & YoungMcKinsey & CompanySchneiderAir liquideCoca-Cola

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Air FranceErnst & YoungMcKinsey & Company

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Merci à tous les étudiants denous avoir élu pour la 10e annéeconsécutive dans le Top 10des employeurs les plus attractifset 1er cabinet d’audit*.Vous êtes à la recherche de défisstimulants ? Nous vous offronsl’environnement de travail idéalpour débuter votre carrière.

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Ernst & Young,cabinet préférédes étudiants

S P É C I A L J E U N E S D I P L Ô M É S ÉCO&ENTREPRISE

Propos recueillis parFrançois Desnoyers

PourJeanPralong,pro-fesseuràRouenBusi-ness School, enFran-ce,si lesjeunesdiplô-méss’engagentenco-re aujourd’hui, ce

n’est plusquede façonponctuelle.Pour un projet précis et non pourune entreprise. Car, à leurs yeux,s’ils ne quittent pas leuremployeur, ce sera lui qui, tôt outard, se séparerad’eux.

La crise économique actuellemodifie-t-elle le rapport desjeunes diplômés à l’entreprise?

Dans un pays où le taux de chô-mage des jeunes actifs dépasse les25% de la population active, leslignes bougent. Et ceux qui arri-vent sur le marché du travail avecundiplômeressententunréelscep-ticismevis-à-vis dumondede l’en-treprise. On peut même parler dedésenchantement.

Aux temps du plein-emploi, ily a quarante ans, les attentesétaient moindres. Les salariésétaientpeusélectifsaumomentdechoisir l’entreprise où ils feraient,souvent, toute leur carrière profes-sionnelle. Aussi, les cadres étaient

moins soumis à l’évaluation deleurperformance: ilsn’avaientpasle sentiment d’être surveillés parleursmanageurs. C’est le contraireaujourd’hui. L’époqueoù les entre-prisesétaientvuescommeuneldo-radoestbien révolue.

Ce scepticismepeut-ils’accompagnerd’un certainpragmatismedans la façon des’engager dans son entreprise?

Oui, c’est une réalité. Car lesambitions demeurent grandes enmatière de réussite professionnel-le. Mais dans le même temps, lemondedanslequellesjeunesdiplô-més évoluent est plus dur et pluscomplexe.Cepragmatismeconsis-te àse dire : « Je devrais attendrebeaucoupdemonentreprise,maisjesaisquecelan’estpaspossible. Jevais donc aller là où les chosesseront lesmoinsnégatives.»

La grande nouveauté, c’est queces jeunes cadres assument le faitque cemondedu travail nepourrapas répondre à toutes leurs atten-tes. Ils saventdans lemême tempsqu’ils sont dans l’obligation d’ytrouver leurplace.Donc ils y vont.

Que se passe-t-ilaprès l’embauche?

Cela va souvent un peu mieuxauboutd’uneoudeuxannées.Deséléments légitimes de satisfactionsuccèdent alors aux inquiétudesdes premiers temps. Les jeunescadres identifient ainsi peu à peules projets intéressants, les collè-gues sympas… Ils peuvent aussireconnaître les qualités de leursmanageurs,êtrereconnaissantsdeleur soutien. Leur vision est doncplusnuancée,moinsunivoque.

La notiond’engagement dansl’entreprisepeut-elle alors avoirdu sens pour les jeunes cadres?

L’engagement peut certes exis-ter,mais il ne seraque très localiséet court-termiste. Un jeune diplô-mé ne dira pas : «C’est super, jesuis chezDanone!»Mais : « Je suiscontentdecequejefaisdanslepro-jetX chezDanone!»

Non qu’il ne puisse être heu-reux dans son entreprise,mais enagissant ainsi, il témoigne de saprudence et de son anticipationd’éventuellesdifficultés futures.

Rester trente ans dans unemême structure n’est pas, pourlui, une hypothèse crédible. Il luiest donc très difficile de s’engageret de s’attacher sur le long terme.

Les jeunes diplômés anticipentdoncune rupture. Sera-t-elle,dans leur esprit, à l’initiativede l’entreprise, avec un plande sauvegardede l’emploi, parexemple, ou de leur propre fait?

La fin de la relationqu’ils antici-pent est, pour eux, surtout liéeàunevolontéde l’entreprise. Ceuxquivontresterseront,à leursyeux,«sauvés». Dès lors, il est difficilepour les jeunes cadres de croire enleurentreprisesur le longterme.Etcelapeutd’ailleurs êtremal vécu.

Certes les jeunes diplômés peu-vent se dire que l’entreprise pourlaquelle ils travaillentprésentedesatouts, que la politique qui y estmenéechercheàlesfidéliser.Ilyena d’ailleurs qui offrent de bonnesrémunérations, formentbien, pro-posentdesperspectivesdecarrièreintéressantes. Tout cela est sédui-sant et, en même temps, les pre-miers concernéspartentduprinci-pequ’ilne fautpas s’attacher.

Cesjeunescadresveulentpréve-nir le désenchantement qu’ils nemanqueraient pas d’éprouver encasderupture.Onestlàdanslescé-nario d’une histoire d’amour oùl’onprendsesdistancespourespé-rer unemoindre déception en casde séparation.

Cemoindre attachement à l’en-treprise, cette «volatilité» en ter-mede recherched’emploi sont-ils une façonpour les jeunescadres de reprendre lamain?

Le fait de partir de sa propre ini-tiative permet en effet de repren-dre du pouvoir. De ne pas vivreavecuneépéedeDamoclèsau-des-sus de la tête. C’est une tactiquequi permet d’éviter ce jour où l’onvientvousdirequevotrecollabora-tionavecl’entreprises’achève.Cet-te «volatilité» peut être la consé-quencedesignauxqu’oncroitper-cevoir chez un manageur et quel’on va avoir tendance à surinter-préter. Signifient-ils que le tempsdudépartestvenu?Cen’estde faitpeut-êtrepas du tout le cas.

Les jeunes diplômés qui refu-sent de s’attacher àune entrepriseappliquent aussi une stratégiecommunément admise parmi lescadres, qui veut que la mobilitésoit lameilleurefaçondefairepro-gresser sa carrière.

Or les récentes enquêtes quenousavonsmenéesmontrentquece n’est pas toujours le cas : ceuxqui réussissent le mieux sur l’en-semblede leur vieprofessionnellesont au contraire les cadres quisont restés au sein d’une mêmestructure.

Comment les entreprisesréagissent-elles face à cesjeunes diplômésplus instables?

Leur comportement apparaîtparadoxal. Elles communiquentbeaucoupsurleurdésirdefidéliserlescadres.C’estunepréoccupationaffichéeparbiendesdirectionsdesressources humaines qui ont l’im-pression que les jeunes diplôméssont perpétuellement sur ledépart. Les entreprises cherchentdonc à garder ces recrues, à valori-ser leur capitalhumain…

Mais aux échelons plus opéra-tionnels de la société, les mana-geurs ou les personnes chargéesde gérer les potentiels humainsont des discours beaucoup plusdurs. Ils rappellent à leurs équipeslesperformancesqu’onattendd’el-les et ne se placent pas dans desstratégiesde fidélisation.

Lemanque d’engagementdes jeunes cadres sembleen partie résulter d’un déficitde compréhension entrel’entreprise et ces nouveauxarrivants…

C’est précisément l’un des grosdéfisdesservicesdegestiondesres-sources humaines dans les annéesà venir : retrouver une capacité dedialogue avec les salariés de façonsimple et crédible. Il faut leur fairedes promesses réalistes, mêmes sielles n’apparaissent pas ambitieu-ses. Il faudra donc passer d’un dis-cours «politique», de système,àun discours plus individualisé etplus sincère.p

ProfilJeanPralongestpsychologueetdocteurensciencesdegestion.Il enseigne lagestiondes res-sourceshumainesàRouenBusi-nessSchooloù il est titulairedela chaire«nouvelles carrières».Ses travauxportent sur les com-portementsau travail et lesnou-velles formesde carrières.

L’étudedes tendancesactuel-les conduitàs’intéresserauxévolutionsprofessionnellesdelagénération«Y»– lesperson-nesnéesdepuis la findesannées 1970–ouauxartistes.

Il est l’auteur, avecLoïcCadin,FrédériquePigeyreet FrancisGuerin,deGestiondes ressour-ceshumaines: pratiqueset élé-mentsde théories (Dunod, 2012).Dernièrepublication: «Nouvel-les organisations,nouvelles car-rières?» dans l’ouvragecollectifLaGestiondes carrières, coordon-népar FrançoiseDany, LaetitiaPiheletAlainRoger (Vuibert,2013, 254pages, 27euros).

«L’engagementdesjeunescadresestlocaliséetcourt-termiste»Dansunentretienau«Monde», lepsychologue JeanPralongexplique les raisonsdudésenchantementdesdiplômés.

Néde lacrise, ce refusdes’attacher lesconduitsàdévelopperune«volatilité»professionnellequ’ils jugent indispensable

Avec 25,7% des actifs demoins de 25ans au chô-mage en France, « la vigi-lance est de mise pour

2013, car lemarché de l’emploi descadres s’est fragilisé, et les entrepri-ses ont l’intention de recrutermoins de débutants qu’aupara-vant», notait, à l’automne 2012, ledirecteur général de l’Associationpour l’emploi des cadres (APEC),Jean-Marie Marx. 2013 sera, pourles jeunes diplômés, «une annéeparticulièrementdifficile».

La situation n’est pas homogè-ne. Elle est plus favorable pour lesdiplômés des écoles d’ingénieurs,«même s’il peut y avoir un tasse-ment dans les rémunérations, noteJean-François Giret, directeur del’Institut de recherche sur l’éduca-tionà l’universitédeBourgogne. Ilssont relativement épargnés par lesphénomènes de déclassement qui,dans d’autres filières, conduisentparfois des bac +5 à occuper desemploisdeniveaubac+3.»Leschif-fres de l’APEC le confirment. Dans

l’année suivant l’obtention de leurdiplôme, les sortants des écolesd’ingénieurs étaient, en avril2012,80%àêtreenposte,contre72%desdiplômés des écoles de commerceet de gestion et 69% de ceux del’université. «Les diplômés d’écolesaccèdent plus rapidement en nom-bre et en proportion à un premieremploi et à un premier poste decadre», indique Pierre Lamblin,directeur du département étudesetrecherchedel’APEC.Leurrecrute-mentse fait plus souventenCDI.

DisparitésEn période de crise, les recru-

teursprivilégientlesprofilsqui lesrassurent. « Ils estiment souventqu’ils pourront plus facilementintégrer un jeune diplômé sortantd’école», poursuit-il. L’image et laréputationd’uneformation, lafor-ce de certains réseaux, expliquentévidemment aussi la prééminen-ce des écoles sur l’université. «Etmême si l’université progresse enlamatière, les élèves d’écolesappa-

raissent davantage préparés audécryptage du marché de l’em-ploi», poursuitM.Lamblin.

Cependant, pour M.Giret, il estnécessaired’apporterdesnuancesà cette opposition classique,notammentdanslesfilièresécono-miques. «Les taux d’accès à l’em-ploi cadre varient sensiblementselon les écoles de commerce, indi-que-t-il. Et de l’autre côté, on peuttrouver d’excellents diplômes dansles instituts d’administration desentreprises. Surdesniches, certainsd’entre eux bénéficient d’une fortereconnaissance auprès desemployeurs.»

Dans la grisaille ambiante dumarché de l’emploi, M.Giret veutaussi voir un «petit coin de cielbleu» : «Au bout de quatre ans, lestaux d’emploi et la part desemploisenCDIsontsimilairesquel-le qu’ait été la conjoncture d’en-trée», indiqueuneétudede l’Inseemenée par Mathilde Gaini, AudeLeducet AugustinVicard.p

F.De.

ISABEL ESPANOL

2013, annéede lavigilanceLesmoisàvenirserontparticulièrementdifficiles

pourlesjeunesdiplômésentrantsurlemarchédutravail

Page 14: Le Monde 20130409_ECO

14 0123Mardi 9 avril 2013 ÉCO&ENTREPRISE S P É C I A L J E U N E S D I P L Ô M É S

Elodie Chermann

Il est venu jouer au football, ilest reparti avec un stage. Ins-crit en sixièmeannée de com-merce international, marke-

tingetcommunicationàl’universi-tétechniqued’EtatdeMoscou-Bau-man,Anatolij Sorokaaparticipéaudernier Challenge du monde desgrandes écoles et universités, quis’est tenu le 2juin 2012, à Paris. Unévénement sportif où les grandsgroupes viennent dialoguer avecles4500étudiantsfrançaisetétran-gersqui s’affrontent sur lapiste.

«Quand les recruteurs convo-quent des jeunes diplômés à desentretiensclassiques,ilsontsouventl’impressiond’assisteràundéfilédeclones, formatés par le costard-cra-vate», sourit le parrain de l’opéra-tion, StéphaneDiagana, championdumonded’athlétismeetdiplôméde l’ESCP Europe. «Il suffit de sortir

du cadre traditionnel pour que lespersonnalités se révèlent.»Des ren-contres-métiers en short et bas-kets, des fanfares, un concours depom-pomgirls, riende tel pour fai-re tomber les masques. «Avant,j’avais tendance à considérer cesgrands groupes comme inaccessi-bles, distants et froids, témoigneClaire Bouleau, 25ans.Mais à cetteoccasion, j’ai rencontré des salariésd’Alcatel-Lucent, de CGI et de GDFSuez, avec qui le courant est trèsbien passé. L’ambiance décontrac-téea faciliténos échanges.»

Entre deux épreuves sportives,Anatolij s’est intéressé à SchneiderElectric. «J’ai exposé en détail mescompétences, mes motivations etmes centres d’intérêt», raconte-t-il.Lamayonnaise a pris tout de suite.Rentré en Russie quelques joursplus tard, le jeune homme a eu labonne surprise de recevoir une-maildudépartementdesressour-ces humaines. Après plusieurs

entretiens, il aatterri auservicedesachatsàMoscou.«Au-delàdescom-pétencestechniquesacquisesàl’éco-le,noussommessensiblesausavoir-être des candidats: passion, ouver-ture d’esprit, franchise, culture durésultat», insiste Pascal Humbert,directeur recrutement et mobilitépour l’Europe. «Des qualités quepossèdent beaucoup d’athlètes duChallenge. Nous en avons intégréprès de 150 en stage ou en contratd’apprentissage sur les trois derniè-res éditions. » Fidèle au rendez-vous depuis cinq ans, GDF Suez aembauché, en 2012, 550 jeunesdiplômés dans l’Hexagone. «Pour-tant, nous peinons à susciter desvocations parmi les ingénieurs», sedésole René Rozot, directeur recru-tementetmarqueemployeur.

D’où l’intérêt de multiplier lesinitiativespourgagnerenvisibilitéet en attractivité. Dans le cadre del’opération «Vis mon job», qui sedéroule jusqu’au 18avril, CGI pro-

poseparexempleà 38étudiantsdese glisser, le temps d’une journée,dans la peau d’un de ses collabora-teurs. En plus de sponsoriser leSolarDecathlon–une compétitionbiennale ouverte aux étudiants du

monde entier, et dont le but est deconcevoiretdeconstruireunemai-son solaire autonomeen énergie –,Schneider Electric organise leconcours «Go Green in the City»,qui invite les futurs ingénieurs à

proposer des solutions énergéti-ques dans cinq domaines urbains:le résidentiel, l’université, le com-merce, l’eauet l’hôpital.

D’autres entreprises usent del’événementiel avec parcimonie.Comme Lagardère. «Pendant quel-quesannées,nousavonscarrémentcessé de communiquer auprès desjeunes diplômés, raconte ChristianGuet, DRH adjoint. Résultat, ils nefaisaient plus du tout le lien entrenosmarques – ParisMatch, Elle, LeJournal du dimanche, Europe 1,Hachette…–et legroupe.Enpartici-pantauChallenge,nousavonsgrap-pillé, en cinqans, dix places au clas-sementUniversumdes100entrepri-ses préférées des étudiants d’écolesdecommerce.»

Maislegroupedemédiasdemeu-re loin derrière LVMH, L’Oréal,Apple,etc.«Aujourd’hui, lanotorié-té ne suffit plus à attirer de nouvel-lesrecrues, insisteLaurenceChavot-Villette,directricegénéraleducabi-

netdeconseilenrecrutementQua-tre Vents. Seules les enseignes quifont l’effort de dépoussiérer leursmodesde communicationgagnenten sympathie.»

Cependant, gare aux discoursmarketing déconnectés des prati-quesmanagérialesdeterrain.Rom-puesaux techniquesde communi-cation, les nouvelles générationsaccordent une place primordiale àlasincéritéetauxvaleursdel’entre-prise. «L’environnement de travailet la qualité des rapports humainspèsentbeaucoupdans leurdécisiondepartirouderester», insistePatri-ce Roussel, directeur de recherchesenmanagementà l’universitéTou-louse I.C’est ce que confirme l’en-quête sur «Les valeurs des Françaisen entreprise » réalisée enfévrier2012parOpinionWayetBar-retts Values Center. Les étudiantssedisenttrèsattachésàl’apprentis-sage continu, à la communicationouverteet…à la confiance.p

«Lanotoriéténe suffit plusà attirer de

nouvelles recrues»Laurence Chavot-Villette

directricedu cabinet de conseilen recrutementQuatreVents

Un salaire mensuel, cinqsemaines de congéspayés annuels… Ceconfort-là, Claire ne l’a

jamais connu. Son master enfinanced’entrepriseenpoche,cet-teToulousainede 25ans a roulé sabosse en Australie pendant deuxans, puis s’est tournée vers l’inté-rim. Et ne le regrette pas le moinsdu monde. «Après mon expatria-tion, je ne savaispasdu tout cequeje voulais faire : partir m’installerdéfinitivement à l’étranger ouposermes valises enFrance. L’inté-rim me laisse le temps de trouverma voie et d’affiner mon projetprofessionnel.»

Claire n’est pas un cas isolé.D’après une enquête réalisée parl’Association pour l’emploi descadres (APEC) et l’Observatoire dutravail temporaire enfévrier 2009, 30% des jeunesdiplômés ont déjà expérimentéau moins une fois l’intérim. Parnécessité, souvent. Par choix aus-si, parfois.

En sortant de Polytech’Nantes,Julien,22ans, avite fait ses calculs.«Entre la prime de précarité et lescongés payés, un intérimairegagne presque 20% de plus qu’uningénieur lambda dans une boîtede prestations de services», affir-me-t-il. Alors, quand Adecco lui aproposé,débutjanvier,unrempla-cementdecongématernitéà l’Ins-titutderadioprotectionetdesûre-ténucléaireàFontenay-aux-Roses(Hauts-de-Seine), il n’a pas hésitéune seconde. «J’engrange de l’ex-périence sans me retrouver piedset poings liés à une entreprise.»

De même que certains patronsse servent volontiers des emploisprécaires pour trier leurs futuresrecrues, nombre de jeunes diplô-méspréfèrentainsitester lesprati-quesmanagérialesd’uneentrepri-seavantde s’y engageraupointdes’y poser. «Au début des années1970, les Français étaient persua-désqu’obtenirunbondiplômeetsedévouer corps et âme à leur travailsans jamais se plaindre les prému-niraient du chômage», analyse lesociologue Louis Chauvel. «Or, augré des vagues successives defusionsetderestructurations,beau-coup se sont retrouvés sur le car-reau. Iln’estdoncpasétonnantqueles jeunessedéfientaujourd’huidumodèledu salariat traditionnel.»

Pour ne pas subir le même sortque leursaînés, ils tententde limi-

ter au maximum le poids du liendesubordinationpourêtredavan-tage « entrepreneurs d’eux-mêmes». «Comme les indompta-bles“sublimes”auXIXesiècle», rap-pelle Dominique Glaymann,maî-tre de conférences à l’universitéParis-Est-Créteil, en évoquant cesouvriers très qualifiés qui s’arrê-taientdetravaillerquandbonleursemblait et n’hésitaient pas àchanger de patron sans autre for-mede procès.

TremplinEdouard, 25ans, en est l’un des

digneshéritiers.Diplôméde l’Eco-le desdirigeants et créateursd’en-treprise, il n’est pasprêt à sacrifiersa liberté sur l’autel de la sécurité.Inscrit dans une agence d’intérimdepuis septembre2012, il a com-mencé par effectuer des petitsboulots alimentaires, comme ladistribution du courrier dans unebanque.

Puis il a décroché deux mis-sions consécutives de cadre dansla finance, chez General Invest-ment Banking d’abord, chez BNPParibas Securities Services ensui-te.«Pendant les périodesde caren-ce, j’en profite pour me reposer etm’adonner à ma passion, le pokeren ligne, quimepermet de bouclermes fins de mois difficiles. SignerunCDI? Paspour l’instant», décla-re-t-il. «J’évolue dans un domaineassez répétitif. Au bout de trois ouquatremois, on a fait à peu près letourde la fonction…Etpuis, quandon a passé dix-huit ans d’affiléesur les bancsde l’école, onn’estpasforcément prêt à s’enfermer dansla routine.»

Sauf que le CDI demeure tou-jourslanormedel’emploienFran-ce. Certes un recruteur taxeramoins vite d’instabilité un jeuneen CDD ou en intérim qui multi-plie les expériences qu’un salariéqui démissionne parce que sonposte ne lui plaît pas.

N’empêche, un travail tempo-raire n’est pas censé se prolongerdemanière…indéterminée.«Com-ment faire un emprunt et acheterune maison lorsqu’on n’a aucunevisibilité sur l’avenir?», s’interro-ge ainsi Mathieu, un architecteurbaniste de 26ans en contrat desix mois chez Aéroports de Paris.«Pourmoi, l’intérima surtout unevocation de tremplin. Sur le longterme, rien de tel qu’un CDI.»p

E.C.

Del’artd’apprivoiser les jeunestalentsLesentreprisesmultiplient lesévénements–sportifs, techniques, écologiques–adresséesauxnouveauxdiplômés.

Maiscesderniers,deplusenplusrompusauxtechniquesdecommunication,s’intéressentd’abordà lasincéritédesdiscours

Tester lesemployeursavantdes’engager

UnCDI,maispastoutdesuite,pournepastoutsacrifiersurl’auteldelasécurité

Page 15: Le Monde 20130409_ECO

150123Mardi 9 avril 2013

Lapauseautravail,unehistoireencreuxSi lesouvriersontimposé,par l’usage, letempsderepos, ilenvatoutautrementpoursoninscriptiondansla loi.

Aujourd’hui,cesmomentsparticipentactivementàlavieenentreprise

H I S T O I R E ÉCO&ENTREPRISE

AnneRodier

Les ouvriers se lèvent à 4heuresdumatinetvontdesuiteàl’ate-lier, ils le quittentà8heuresdusoir. Ils ont des intervalles derepos de trois heures en tout,convenablement divisés, à

quoi il faut ajouter aumoins une heure detolérance qu’ils se procurent par leurs fré-quentes sorties, en dehors des heuresréglées;desortequ’iln’yapasplusdedouzeheuresde travail effectif», relate, en 1843, lenotaire Crouzet, inspecteur du travail ducantondePrivas, enArdèche (Ardèche, Ter-re d’histoire, de Michel Riou et Michel Ris-soan,EditionsLaFontainedeSiloe, 2008).

Cette «heure de tolérance» n’est autreque l’ancêtre de la pause au travail : cesminutes prises pour grignoter, pour souf-fler quand les turbines s’arrêtent puis, àune époque plus récente, pour la pausecigarette.Ce temps informeloù se chevau-chent vie et travail, où les salariés seconfient,négocient,réinvententl’entrepri-se,estaussivieuxquel’existencedutravaillui-même. Les historiens ne peuvent pasendater lanaissance. L’histoirede lapauses’estécriteencreux.Lessociologuesdutra-vail l’ont peu étudiée, car elle a longtempsété considérée comme «hors champ» dumonde du travail. Elle s’est imposée parl’usage, puis dans les négociations socialeset enfin dans la loi, où elle ne cesse d’évo-luer jusqu’à récemment.Depuisunedirec-tive européennede 1993 et la loi Aubry du19janvier 2000, tout travailleur dont letemps de travail journalier est supérieur àsix heures bénéficie d’un temps de pausede vingt minutes consécutives pourvaquer à ses occupations personnelles.Gareauxcontrevenants!Quatrearrêtsren-duspar laCourdecassationle20févrierenprécisaientencore ladéfinition.

Lapauseadonc laissé sa trace, indirecte-ment, au fil des négociations sur le tempsdetravail.Car la limitationde la journéedelabeur a incité les entreprises à encadrer lapause,pourl’excluredutravaileffectif.Ain-si, l’«heuredetolérance»évoquéepar l’ins-pecteurCrouzet renvoie à la loi du 22mars1841 sur la réduction du temps de travaildes enfants: «Il est certain que les enfantsne sauraient être reçus dans les fabriquesselon la nouvelle loi, [car] il y aurait un chô-magedequatreheurespar jourdans lapar-tie de l’atelier confiéeà leurs soins», écrit-il.Eneffet, cette loi exige«que laduréemaxi-male de huit heures de travail effectif pourles enfants de 8 à 12ans soit divisée par unrepos», rappelle Norbert Olszak, historiendu droit du travail, professeur à l’Ecole dedroitde la Sorbonne (Paris-I).

La pause des travailleurs s’insère dansl’organisation de travail, en premier lieupour des raisons d’hygiène et de santé, àuneépoqueoùl’amplitudehoraireestpar-ticulièrement grande. Elle recouvre sur-tout la collation, parfois l’habillement et latoilette. L’utilisation des temps de pausevarie selon les lieux et les activités. «Letempsdepauseprévuparlesusagesestnoti-fié dans les règlements d’atelier», indiqueJean-Pierre Le Crom, directeur de recher-ches au CNRS, qui cite la thèse de XavierLavolesur«L’évolutiondesrapportsdetra-vail dans la Loire-Inférieure [Loire-Atlantique] au XIXesiècle» : «En 1843, chezBureaujeune,lapauseestdetrenteminuteslematin; en 1872, les ateliers de bonneteriedeM. A.Charpentier font état d’un délai dequinzeminutes pour l’entrée dans les ate-liers.»Maisonest loinde lapause-café,deséchanges informels sur l’organisation dutravail ou la préparation des grèves!… Lapause,commelediraquelquesannéesplustard Frederick Taylor (1856-1915), est alorsun temps «nécessaire à la récupération»(The Principles of Scientific Management,1911), riend’autre.

C’est encoreaunomde l’hygièneetde lasanté que la pause entre dans la loi. «Deuxdécrets du 10mars 1894 et du 20novembre1904 interdisent la prise de repas desouvriers sur le lieu de travail, à la fois pourdes raisons d’hygiène et pour éviter que lesouvriers n’écourtent trop leur repos», indi-que Xavier Vigna, historien du travail etmaître de conférences à l’université deBourgogne. «La première guerremondialejouera un rôle d’accélérateur», ajoute-t-il.Ellevaàlafoisélargirlanotiondepausejus-qu’à ce qu’elle est devenue aujourd’hui, etébaucher son environnement physique:

des espaces, intégrés au lieu de travail ouau contraire isolés, équipéspour se restau-rer, se reposeret enfin se…poser.

«Dans le double objectif d’augmenter laproduction d’armements et d’améliorer laconditionouvrière,AlbertThomas,ministredel’armementde1916à1917,incitelesentre-prises à construire des cantines d’usine»,expliqueM.Vigna.Descantinescollectivesavaientdéjàété crééesen 1870pardegran-des entreprises familiales, comme lescimenteriesLafargeoulespapeteriesMon-tgolfier, dans une approche productivisteet paternaliste. La création de ces cantinescollectives«étaitunmoyendesurveiller lesouvriers,cequ’ilsboiventbiensûr,maisaus-si ce qu’ils disent», ajoute-t-il. Dès lors, lapausen’estplusseulementassociéeaucas-se-croûte et au repos des muscles, maisappréhendée comme un moment d’ex-pression libredes travailleurs.

L’arrivée enmasse des femmes dans lesusines, pendant que les hommes sont aufront, marque la naissance des aires derepos. Après les salles de «casse-croûte»néesavecledécretdu10juillet1913,unecir-culaireministériellede janvier1917 instau-releschambresd’allaitementet lescrèchesdans les usines de guerre. La loi Engeranddu 5août 1917 les rend obligatoires danstoutes les entreprises qui emploient plusd’une centaine de femmes. En principe,elles le sont toujours, et les femmesdispo-sent d’une heure pour l’allaitement selonl’articleL1225-30ducodedutravail,préciseM.Olszak.

Traditionnellement considérée comme

un arrêt de l’activité, la pause devient pro-gressivement une partie intégrante de lajournée de travail et un enjeu de pouvoir.«Au XXe siècle, les conditions de travailn’ont plus seulement été fixées par les usa-ges ou les règlements d’atelier, mais, outreles textes législatifs et réglementaires, pardes conventions collectives de branche etaussi des accords d’entreprise», indiqueM.Le Crom. De nombreux décrets publiésaprès la loi du 21 juin 1936 sur la semainedes 40heures conduisent à fixer les pério-des de pause par profession et par catégo-rieprofessionnelle.

Dépendant d’abord du seul bon vouloirde l’employeur, les modalités de pausesont désormais négociées, donnant lieuparfois à quelques surprises: ainsi, alorsquedesmèresdefamilleavaientprisl’habi-tudedelaisserleursenfantsàdesnourricesetdecumuler lesheuresdepaused’allaite-ment en fin de trimestre, cet usage n’a pasétépérennisépar les textes!

Maislareconnaissancedelapauseparledroit «signe l’abandon de sa gestion auto-nome», analyse le sociologue Manuel

Boutet(Histoireetsociétés,revueeuropéen-ned’histoire sociale, n˚9, 2004). L’enjeuestde contrôler le contenu de la pause. Lesouvriers s’efforcent de conserver ce qu’ilsconsidèrent comme un espace d’autono-mie et d’affirmation de leur identité, tan-disque lesmanagersveulent se frayeruneplace dans cet entre-temps, décrit NicolasHatzfelddansLaPausecasse-croûte,quandles chaînes s’arrêtent à Peugeot-Sochaux(2002).

M.Boutet, qui a passé quatorze semai-nessurleschaînesdemontageduconstruc-teur automobile entre1996 et 1998, racon-te la tentative vaine de l’employeur detransformer la pause en espace-temps de«management surmesure»par lamise enplace d’une cafetière pour «reprendre lecontrôle social de l’équipe par le chef sousl’autorité de la hiérarchie ou d’une aire dereposattenante au bureau du chef d’équi-pe». Dans les faits, les ouvriers se disper-sent pour se retrouver par affinités (âges,originesethniques,ateliers) en fonctiondeleur histoire dans l’entreprise (anciennecamaraderied’atelieroudegrèves).

La pausen’est pas une «planque»,maisle rendez-vous des activités qui accompa-gnent le travail, analyse M.Boutet. C’estaujourd’huiunlieuetunmomentd’échan-ged’expériencesetde résistances.p

> Sur Lemonde.fr «A l’heure de la pause»,webdocumentaire de Stéphane Le Gall-Vili-ker coproduit par AGAT Films&Cie et Lemon-de.fr. A retrouver en exclusivité dans la nou-velle zone édition abonnés duMonde.fr.

1814Loi sur le reposdominical (abrogéeen1880puis rétablie en1906).

22mars1841La loiinstitue la duréede8heuresde travail effec-tif pour les enfants de 8à 12ans, diviséepar«unrepos». Pour les enfantsde 12 à 16ans, 12heuresmaximalesdiviséespar«des repos».

1894-1904Deuxdécrets interdisent lerepasdes ouvriers surle lieude travail pourdes raisonsd’hygiène etpour éviter que lesouvriersn’écourtenttrop leur repos.

5août 1917 La loi rendles chambresd’allaite-mentobligatoiresdansles entreprisesemployantplus d’unecentainede femmesetinstitueuneheurepourallaiter.

25avril 1919 Journéede travail de 8heurespourun total hebdoma-dairede 48heures.

21juin 1936Semainede40heures: applica-tionde la loi parprofes-sions et par catégoriesprofessionnelles. Lafixationd’unhorairecollectif dans chaqueentreprise conduit àmieuxencadrer lespériodesdepause.

23novembre1993Directive communau-taire sur le tempsde tra-vail, complétée en 2003par la directiven˚2003/88/CE, qui pré-voit que «tout tra-vailleur bénéficie, aucas où le tempsde tra-vail journalier est supé-rieurà six heures, d’untempsdepause».

13juin 1998La loi surl’aménagementet laréductiondu tempsdetravail, qui s’appliqueau 1er janvier 2000ou2002 selon la taille del’entreprise, précise ladéfinitiondu tempsdepause.

Une circulaireministériellede janvier1917 instaure

les chambres d’allaitementdans lesusines de guerre

Dates

Danslesarchivesdu«Monde»|«Pausespipi»àheuresfixes

Longtemps, les ouvrierspréféraient aller

au café du coin plutôtqu’aux cantines d’usine,

comme ici, dans les années1910. ALBERT HARLINGUE/ROGER-VIOLLET

En 1995, àQuimperlé (Finistère), les sala-riés des établissementsBigard défen-dent le droit d’aller librementaux toilet-tes. Après s’êtremis en grève contre lavolontéde la directiond’imposer des«pausespipi» à heures fixes accompa-gnées depénalités financières en cas demanquement, ils ont repris le travailaprès l’abandondespénalités.

Unpasdetrop

Y Chaqueépoque a le conflitpharequ’ellemérite. En 1973,

les Lip, à Besançon, inauguraient vingtannéesde lutte pour l’emploi. En 1995,àQuimperlé, les Bigard, la deuxièmeentreprisede viande en France, défen-dent le droit d’aller librement aux toi-lettes! Ne riez pas! Car cette affairede«pauses pipi» à heures fixes imposéespar la directionn’est, hélas, pas dérisoi-re. Cen’est ni unebourded’entrepriserétrogradeni une résurgenceduXIXesiècle.Mais elle est l’aboutisse-

ment logiqued’uneévolution inquié-tante.Un conflit de la productivité.Unconflit de cette finde siècle.

EnarrivantàQuimperlé, onattendZola.On trouveun laboratoire.Sur16hectaresaubordde lavoie rapide, lesétablissementsBigard rutilent. Toutestneuf,propre, silencieux.Seuleunenoriadecamions frigorifiques rappellequ’onestdevantune immensebouche-rie. Selon tous les critèresmodernesdegestion, c’estmêmeuneréussite exem-plaire. Parti de rienen 1968, LucienBigard, 72ans, autodidacteet fierdel’être, abâti sonempireseul, sansaction-nairesextérieurs, sansendettement (…).

Il y a cinqans, le vieuxchefduperson-nela été remplacéparun jeunedirec-teurdes relationshumainespénétrédetoutes les techniquesdumanagement.Flexibilité,horairesà lacarte, utilisationhabilede toutes les ressourcesde lajurisprudenceet recoursmassif auxintérimaires, toutestmisau servicedelaproductivité.Unpeu trop, justement.

Danssacourseéperdueà lacompétitivi-té, LucienBigardaoubliéqueses sala-riésétaientdeshommes (…). Deprogrèstechniqueen innovationsociale, lasituationempired’annéeenannée (…).

L’institution, cet été, de «pauses toi-lettes» àheures fixes dans certains ate-liers, assorties de pénalités financièresen cas demanquement,n’était, danscette logique, qu’unpetit pas deplus.Ces pauses étaient destinéesofficielle-ment à sanctionnerdes abus constatéset, accessoirement, à accroître la pro-ductivitéqui, selon la direction, aurait«baissé de 10%depuis sixmois».

Unpas deplus.Unpas de trop. AQuimperlé, on le dit avec humour, l’af-fairedes «pauses toilettes» a été «lagoutted’eau qui a fait déborder levase». «Cen’est pas le tout d’avoir unebelle usine.Onaunedignité. Si l’entre-prise en est là, c’est aussi grâce ànous»,explique le responsabledu syndicatmaison,Droit et Liberté, qui, pasplusque la CGT, n’a accepté le coupde force

estival de la direction. Les 250grévistesont accepté de reprendre le travailaprès l’abandon,par LucienBigard, despénalités financières, d’ailleurs illéga-les.Mais l’affairen’est pas terminée.Les «pauses toilettes» à heures fixesseront expérimentéesunmois dansdeuxateliers, et on fera le point. Entre-temps, les syndicats sontdécidés àutili-ser toutes les voies légalespour faireannuler lamesure.

Ladirectionn’amêmepas réaliséquecettedécisionconstituaitune régres-sionsocialeetunepremièreenFrance.Exaspérépar la «campagne»organiséecontre lui, brandissant la lettreanony-med’un facétieux (oud’une facétieuse)signant«UrémieVespasienne», LucienBigardmauditpêle-mêle lapresse, lessyndicatset l’administrationsociale,quiontexploitécette«petitehistoire»(sic)pourarriverà lui arracher les35heu-respar semaine!p

VéroniqueMaurus«LeMonde» du 14août 1995 (extraits).

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16/LEMONDE/MARDI 9 AVRIL 2013 REPRODUCTION INTERDITE

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Page 17: Le Monde 20130409_ECO

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Page 18: Le Monde 20130409_ECO