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N° 126Octobre 2007
Belgique-BelgiëP.P
1000 Bruxelles 11/1802
srois v de De edc ole rs B E xd ue lln e so etiainrdoo Cal ed leusnem noitamrofni'd telliueF
Bureau de dépôt Bruxelles 1N° d’agrément: P705159
CEDD - “Crystal Palace”Rue de la Borne, 14 - 1080 BruxellesTél: 02/412 56 14 - Fax: 02/412 56 11Courriel: [email protected]
La grammaire autrement (1)
2
edito edito edito edito edito edito
edito 126
La grammaire comme les mathématiques – dont seuls certains êtres dotés d'une bosse à la naissance pourraient venir à bout... - est très
souvent symbole d'ennui, d'abstraction gratuite, de règles à apprendre par cœur et à appliquer en autant d'exercices répétitifs dont
l'intérêt est loin d'être évident.
Elle rebute plus qu'elle ne développe l'attention et la curiosité. Son évocation même n'est jamais très éloignée du souvenir de la couleur
rouge (celle d'un groupe de mots à encadrer parfois, de la note négative de l'enseignant plus souvent) et du manuel d'exercices à faire à la
maison. Le rejet et l'angoisse de s'y confronter seront d'autant plus forts que la langue de l'école sera éloignée de la langue du dehors,
celle des copains, celle de la rue, celle des parents à la maison...
Afin d'éviter toute plongée dans cet enfer d'abstractions et de termes « désincarnés »; trop souvent, nous nous réfugions derrière les
règles apprises et à appliquer, sans découverte effective, sans réelle observation, ni formulation d'hypothèse ... parce que c'est comme
ça! Ouf!?...
Hélas non... parce que travailler de la sorte n'est pas adéquat... Alors que très souvent, elle n'est la langue maternelle, ni de nombreux
animateurs, ni de la plupart des enfants en edd, nous ne nous donnons pas assez le temps de la décortiquer, d'en saisir le sens, de
l'analyser, d'en faire la grammaire. Dommage... quand on sait que la grammaire ne peut avoir d'autre utilité que de permettre à chacun de
comprendre comment fonctionne la langue qu'il parle, et de se donner par son apprentissage et sa maîtrise la solidité même de son
pouvoir de communiquer.
Au moment où le décret rappelle avec insistance la nécessité pour les équipes d'encadrement d'avoir une maîtrise suffisante de la langue
française, ce temps, nous avons décidé de le proposer aux animateurs sous la forme d'une rencontre, puis d'une formation « La
Grammaire en Couleurs ». Nous avons donc fait de la grammaire, et rendues conscientes ces règles utilisées trop souvent sans le savoir...
C'est cette démarche proposée en formation au printemps 2007 que nous vous proposons de découvrir, en une première partie, dans ce
numéro de A Feuille T. Gisèle Delbe a rassemblé les textes et recueilli les témoignages qui vous sont présentés dans ce numéro et dans le
suivant. Dans un premier article, Pierre nous introduit à la démarche en la replaçant d'une part, dans les débats d'actualité au sein de la
CEDD et du secteur et, d'autre part, dans le développement des idées du pédagogue Galeb Gattegno.
Ensuite, Roslyn Young, nous parle de l'importance du tâtonnement, de la transformation progressive, et de la place prépondérante
occupée par la prise de conscience dans les apprentissages.
Par après, une première partie de l'article de Maurice Laurent – la suite au prochain numéro! - nous fait découvrir la méthode telle que
travaillée avec ses élèves de l'enseignement secondaire.
Nous vous invitons vivement à utiliser le tableau joint à ce numéro et à pointer! Idéal pour entrer dans la démarche et faire émerger la
conscience de la grammaire.
Une invitation à goûter sans crainte aux délices du fonctionnement de la langue tels que nous ne les avons rarement appréciés ...
Véronique Marissal
REMERCIEMENTS :
Nous remercions chaleureusement, tous ceux qui nous ont permis de réaliser cet A feuillet T.
Nous pensons tout particulièrement aux jeunes et aux adultes
qui nous ont confié et autorisé à publier leurs précieux témoignages.
3
Gattegno,
pour découvrir que l'apprentissage peut se faire sans douleur !
«...avant...
je me demandais bien
à quoi cela servait
de faire de la grammaire…
je croyais que c'était seulement
parce qu'il fallait avoir
des notes et
qu'il fallait apprendre
toutes les règles par cœur …
Maintenant c'est drôle,
je vois le tableau dans ma tête et
je me pose des questions …
je compare…
pour être sûre…
... maintenant...
j'aime bien...
je trouve cela même rigolo »…
Patricia, 12 ans,
Namur,
janvier 2006
Au début de l'année 2007, un débat a agité
le monde des écoles de devoirs: la ministre
allait imposer par décret aux animateurs
d'avoir une connaissance suffisante de la
langue française.
L'application d'une telle mesure est
évidemment difficile à mesurer. Mais
sachant que, par décret, nous devons
donner une priorité au public qui ne
maîtrise pas la langue française, nous ne
pouvons que saluer l'intention du
législateur. Toujours est-il que cette
obligation nous pose la question de la
maîtrise réelle du français par les
animateurs d'écoles de devoirs.
Force est de constater qu'un certain
nombre d'animateurs écrivent dans un
français laborieux et la grammaire est pour
beaucoup un cauchemar.
Cette situation est inquiétante et c'est pour
cette raison que la Coordination propose
depuis plusieurs années des formations
autour de la grammaire.
Quelques principes...
Au printemps, nous avons organisé une
formation centrée sur la démarche
pédagogique de Caleb Gattegno à travers
les outils élaborés par Chantal et Maurice
Laurent : la grammaire en couleurs, après
l'intérêt né d'un atelier de découverte initié
au cours des « petits-déjeuners ».
La richesse de la démarche nous encourage
à prolonger cette expérience à travers ce
numéro de A feuille T.
Mais, avant de vous lancer dans la lecture
des différents articles, je voudrais poser
quelques jalons qui vous permettront,
j'espère, de mieux comprendre une
démarche qui, par certains côtés, peut
paraître étrange.
Sans doute connaissez-vous tous les
réglettes Cuisenaire. Elles sont sans doute
l'outil le plus répandu de la démarche de ce
pédagogue. Mais je n'ai commencé à
comprendre l'aspect révolutionnaire de cet
outil qu'après avoir un peu exploré la
pédagogie de Gattegno qui est en dialogue
étroit avec le travail de Cuisenaire.
Comme beaucoup d'enseignants, Gattegno
a été confronté à la difficulté de son métier:
l'énergie immense que peut déployer un
enfant pour apprendre, le nombre
d'enfants par classe, les émotions qui
paralysent l'apprentissage...
A travers ses recherches et ses expériences
tant dans le domaine des mathématiques
que des langues, il a basé son approche sur
trois principes:
Premièrement, Gattegno a observé qu'il
est possible d'établir un "budget
énergétique" pour les apprentissages.
Or, les êtres humains ont un sens très
développé de l'économie de leur propre
énergie et sont sensibles aux prix
énergétiques qu'ils sont amenés à payer.
Dans cette approche pédagogique, il s'agit,
donc, de chercher des façons de faire
apprendre qui sont "bon marché" du point
de vue de l'effort à fournir.
Deuxièmement, Gattegno considère que
seule la conscience est éducable en
l'homme, et il fait des propositions
pédagogiques pour une éducation basée
sur la conscience.
Troisièmement, il nous propose que
l'action pédagogique dans la classe devrait,
4
Gattegno,
pour découvrir que l'apprentissage peut se faire sans douleur !
«... quand j'ai vu ce tableau avec des carrés, des couleurs, avec rien écrit dessus… j'ai d'abord eu un peu peur,
j'étais stressé… c'était nouveau… j'avais peur de pas comprendre…. surtout que d'habitude, j'aime bien
écrire, prendre des notes…
…après, j'avais dans ma tête surtout la partie des adverbes… j'étais étonné, j'ai compris, qu'il y a des
adverbes différents qui ne se terminent pas forcément par ment.»
Julien, 13 ans, Namur, janvier 2006
pour être efficace, consister en la
subordination de l'enseignement à
l'apprentissage. (Roslyn Young L'approche
pédagogique de Caleb Gattegno, publié sur
le site :
http://assoc.orange.fr/une.education.pour
.demain/index.htm)
Au contraire de nombreuses démarches
didactiques, le travail de Gattegno, dans un
premier temps ne vise pas à expliquer, ni
même à comprendre, mais bien à vivre une
situation et à travers des expériences
successives à prendre conscience des
structures et du sens qui règlent la
grammaire par exemple.
Le rôle de l'enseignant n'est pas de
chercher à transférer ses connaissances,
mais de provoquer des prises de
conscience chez ses étudiants, puisque
seule la conscience est éducable. Il dispose
d'un matériel qui a été conçu pour
permettre des prises de conscience. Il
propose des activités susceptibles de
mener aux prises de conscience
nécessaires au fur et à mesure que ses
étudiants avancent et, quand il voit que
c'est possible -quand l'occasion se
présente d'induire une prise de
conscience-, il se sert de la partie
appropriée du matériel pour effectivement
provoquer celle-ci. (idem)
Sur le terrain de la formation
Concrètement, la formatrice a affiché un
grand panneau composé de cases colorées.
Sans rien ajouter, et en laissant un temps
d'observation à chacun, elle a tracé 8 traits
au tableau, ensuite elle a prononcé la
phrase suivante: «le volcan vomit
inlassablement des épaisses fumées
noires» en pointant successivement avec
une baguette chaque trait.
Après avoir répété deux ou trois fois la
même opération, et en sollicitant chacun à
lire les mots selon le pointage exprimé,
elle a proposé à chacun de venir pointer
chacun des mots (traits) dans les cases de
couleurs comme il l'entendait sans donner
de plus amples consignes.
Enfin, après que chacun ait fait ses essais,
elle a pointé chaque mot dans les cases
colorées du tableau. Peu à peu, nous avons
c o m p r i s q u e c h a q u e p o i n t a g e
correspondait à un mot et que chaque
«style» de mot correspondait à une case.
Après quelques répétitions, elle nous a
invités à aller pointer à notre tour, à
montrer nos divergences et nos
convergences au niveau du pointage sans
rien en expliquer. Elle nous a proposé de
nouvelles phrases et, curieusement, nous
sommes tous arrivés assez rapidement à
un consensus sans débat ni explication.
Parfois la formatrice disait « je ne retiendrai
pas ce pointage » mais sur cinq jours de
formation, aucune explication n'a été
donnée. Tout au plus, quand nous étions
tous d'accord sur l'utilité d'une case,
l'avons-nous nommée pour faciliter la
communication et mettre la grammaire
que nous venions de découvrir en lien avec
nos connaissances antérieures.
Sans effort, en jouant à pointer, nous avons
d é c o u ve r t q u e n o u s u t i l i s i o n s
spontanément et avec finesse la
grammaire.
Plus précisément, les natures des mots
n'avaient aucun secret pour nous, mais
nous ne le savions pas! Mais à travers ce
tableau et cette démarche pédagogique
particul ière nous en avons tous
progressivement pris conscience.
Gattegno,
pour découvrir que l'apprentissage peut se faire sans douleur !
5
Ce que j'ai appris
sur ma façon d'apprendre?
«… à visualiser les positions
de chaque case
et ensuite,
trouver un maximum
de liens logiques
pour mémoriser …
… la nécessité de mettre en
pratique de manière régulière,
en (re)visualisant les cases…,
donner un sens aux adjectifs
et aux adverbes,
et avoir pu me rendre compte
de mes confusions,
de la nature de certains mots
par rapport
à ces deux catégories.»
Un animateur.
Avantages et particularités
Cette méthode, qui va à l'encontre de pas
mal de nos habitudes, a également cette
précieuse particularité d'être plus efficace
avec un grand groupe d'apprenants qu'en
individuel!
En effet, les prises de conscience
s'appuient beaucoup plus sur l'expérience
de différentes personnes que sur une
réflexion personnelle.
De plus, comme cette pédagogie repose
continuellement sur des prises de
conscience, elle est émotionnellement
éprouvante. Emotion qu'il est plus facile de
diluer dans un grand groupe que dans un
petit groupe, voire même en individuel.
Cette démarche autour de la grammaire a
été particulièrement approfondie par M. et
C. Laurent, qui ont publié le livre « Les
jeunes, la langue et la grammaire » en
2004 à travers l'association qui diffuse la
pensée de Gattegno en France: Une
éducation pour demain.
L'idée qui sous tend la démarche élaborée
par Maurice Laurent est la suivante : les
enfants savent parler, ils ont donc une pré-
connaissance de la grammaire.
Ils connaissent la place des mots dans la
phrase. Ils savent intervenir sur les
relations entre les mots et transformer
d'une façon adéquate. Ils savent en faire la
démonstration en exprimant leur propre
point de vue et ne se contentent pas de
répéter simplement ce qu'on leur dit.
Tout un chacun a la capacité de par le fait
qu'il parle sa langue de procéder à des
opérations linguistiques, et donc est
sensible à la grammaire de sa propre
langue.
Ils sont également capables d'abstraction,
de classifier des mots par leur sens et donc
les rattacher à un ensemble.
Ils sont sensibles à une cohérence entre
différentes familles de mots. Ils savent
évoquer des situations. Ils savent que tous
les mots ne fonctionnent pas de la même
façon.
Ils savent que des mots différents peuvent
représenter la même personne, lui, il, le
garçon, Gilles, le frère de Nathalie…
Les enfants sont donc des grammairiens.
Et c'est en tenant compte de cela qu'on
enseigne la grammaire et c'est à partir de
ces bases existantes, que M. et C. LAURENT
ont élaboré un système d'enseignement
«La grammaire en couleurs» utilisable pour
les enfants du primaire et du secondaire.
Ces outils permettent donc de mettre en
évidence les relations qui unissent les mots
d'une phrase entre eux, les groupes de
mots entre eux et enfin l'implication de la
grammaire sur l'orthographe.
A partir de ce matériel, nous pouvons donc
mettre en évidence ces liens à partir de ce
que sait déjà l'enfant ou l'apprenant.
Bien entendu, il est nécessaire que l'enfant
sache parler la langue française pour que
les mots qu'on évoque aient un sens pour
lui.
Loin de nous l'idée, de vous vendre cette
démarche comme le remède universel à
tous les maux dont souffre l'école, mais,
encore une fois, c'est en sortant de nos
habitudes qu'on découvre des pistes
puissantes et efficaces.
Pierre Vandenheede
Extrait de la Thèse de Doctorat de
Madame Roslyn Young soutenue en
octobre 1990. Université de Franche-
Comté – Faculté des lettres et des
Sciences Humaines «Universaux dans
l'enseignement et l'apprentissage du
français et de l'anglais dans des
situations pédagogiques diverses - de la
pensée de Caleb Gattegno théorie et
applications – 2 tomes – Tome 1 lecture
et grammaire page 396 à 401
leur première langue.
La transformation en tant que pouvoir
mental est fondamentale également à
cette manière de travailler la grammaire.
La quasi-totalité de la grammaire de la
langue française repose sur une fondation
de transformations, ce qui implique que
l'on peut la travailler avec les élèves en se
basant sur la rétention et non sur la
mémorisation de règles. La transformation
peut être une des dimensions les plus
importantes de l'orthographe. Puisque les
élèves savent transformer – ils le prouvent
en apprenant à parler - il est utile d'en tenir
compte en travaillant la grammaire de la
langue et légitime de travailler d'abord sur
les parties de la langue française où la
transformation est audible, donc en
relation avec la langue parlée.
Si les enseignants veulent que les élèves
aient une certaine autonomie, il faut qu'ils
fournissent un outil qui les rende
autonomes, et l'outil de la transformation
que l'on peut pousser très loin et rendre de
plus en plus performant, résout, pour la
langue française, beaucoup de problèmes.
Selon Maurice Laurent il se substitue à
peut-être trois cent règles d'orthographe.
Dans ce domaine, c'est parce que je
transforme que l'inconnu devient connu. Je
le rends connu par la transformation. C'est
une démarche semblable à celle que l'on a
en mathématique ; puisqu'il n'est pas
possible d'ajouter un demi à un tiers, on
transforme le problème en trois sixièmes
plus deux sixièmes, ce qui est possible. Il
s'agit simplement de déplacer le problème.
Les enfants apprennent à se servir de
quelque chose qu'ils savent faire pour
dans le travail de grammaire avec les enfants
Analyse de l'utilisation du tableau de grammaire de Maurice Laurent
Le matériel utilisé est conçu pour une
application s'appuyant sur la dynamique
mentale. Deux aspects de cette dynamique
ret iennent not re a t tent ion p lus
particulièrement dans ce travail sur la
grammaire. Premièrement, il est basé sur
une utilisation soutenue de l'évocation;
deuxièmement il utilise constamment la
transformation comme outil.
Le fait que l'enseignant travaille tout, au
moins dans un premier temps, sur un
panneau blanc vierge de toute inscription,
indique bien que l'évocation joue un grand
rôle. Par le fait qu'ils aient appris à parler,
les élèves démontrent une sensibilité à
l'algèbre de la langue et à la langue conçue
comme un regroupement de classes.
En pointant les cases correspondant à ces
classes, ils utilisent leurs pouvoirs
d'évocation «pour meubler» le tableau et la
dynamique mentale pour rendre le
fonctionnement de la langue conscient
sous la forme que nous appelons
d'habitude sa «grammaire».
Par cette dynamique, ils se sensibilisent au
concept de classes grammaticales, là où ils
avaient auparavant un savoir-faire
fonctionnel des classes. Pointer les
substantifs dans un endroit précis, ce n'est
pas autre chose que créer une classe de
classes. De ce point de vue, l'opération est
semblable à celle qui permet de prendre
conscience des pronoms des années plus
tôt, quand les élèves ont appris à parler
6
«… je croyais
que j'aurais toujours besoin
de faire le tableau en couleurs
pour me rappeler…
mais maintenant j'arrive
même si le tableau est
en noir et blanc... »
Elodie, 11 ans, Liège,
septembre 2006
ramener le problème à du connu.
Il est évident dans ce travail utilisant le
tableau blanc de grammaire qu'il y a un
parti pris en faveur de l'analyse couplée à la
synthèse.
Le tableau présente un aspect à la fois
synthétique et analytique et avec la
possibilité pour l'élève de passer
instantanément de l'un à l'autre.
Le français n'est pas présenté de manière
linéaire, mais de manière synthétique. La
partie travaillée est toujours placée dans le
tout parce que le tableau est là. On peut
également arrêter l'analyse grammaticale
au niveau que l'on veut pour faire ressortir
ce qu'on veut alors que la synthèse reste
toujours visible.
Beaucoup d'expressions peuvent être
pointées en une case ou en plusieurs selon
le niveau d'analyse que l'on souhaite se
donner. Rien n'est figé dans cette façon de
travailler.
Un autre aspect important de la synthèse,
c'est que tout le français que possèdent les
élèves est à disposition à chaque instant,
même s'ils ne savent pas encore le pointer.
Des deux ou trois cases utilisées au début,
le travail s'étend rapidement vers les
autres.
Ce tableau permet de créer une
correspondance …
C'est une sorte de mise à jour de quelque
chose que chacun à en lui.
C'est pour cette raison que ce n'est pas
compliqué.
La grammaire devient compliquée quand
on cherche à travailler à partir de
définitions, ou à faire des exercices sans
que le chemin préalable n'ait été fait.
Quand le groupe d'élèves travaille sur deux
ou trois cases, les autres ne gênent
absolument pas, au contraire. Elles sont là
pour sécuriser d'une certaine façon parce
que les enfants savent qu'avec ce système,
on peut pointer tout le français, qu'il n'y a
pas d'autres choix, que certaines cases ne
sont pas concernées à un moment donné –
c'est clair-, et qu'à tout moment, on sait ce
que l'on choisit, mais l'on sait aussi ce que
l'on ne choisit pas. Il y a beaucoup de
catégories, mais il n'y en a pas un nombre
indéfini.
Ce tableau permet en outre de faire
vraiment beaucoup d'exercices très vite.
C'est un aspect très important dans
l'enseignement tel qu'il est présenté ici.
Combien de pages de livre faudrait-il pour
faire la multitude d'exercices qui ont été
faits…simplement en pointant. Puisque le
feed-back est immédiat, les erreurs
apparaissent tout de suite et l'enseignant
est, ou peut être, capable de proposer des
exemples qui, par opposition, lèvent
l'ambiguïté.
Les cas limites sortent extrêmement vite.
Même si l'enseignant veut maintenir la
recherche dans un cadre général, le jeu se
joue de telle façon que les contre exemples
se révèlent sans tarder.
…
Une recherche qui est particulièrement
riche est celle sur l'homonymie que les
homonymes appartiennent à une seule
classe, comme dans le cas de « l'heur » et
de « l'heure » ou à plusieurs, comme c'est
le cas pour « bas » qui peut être adjectif,
adverbe ou substantif. Sur le plan de
l'orthographe, la première ne représente
pas la même difficulté que la seconde.
On peut inventer un grand nombre de
leçons sur tous les homonymes
grammaticaux les plus courants et on peut
traiter ces problèmes par pointage.
Un mot comme « leur » peut être employé
comme adject i f, comme pronom
personnel, comme possessif.
Le mot « tout » nécessite une page dans les
livres de grammaire pour l'adjectif, le
pronom et l'adverbe.
dans le travail de grammaire avec les enfants
Analyse de l'utilisation du tableau de grammaire de Maurice Laurent
7
«… j'ai pris conscience
qu'on pouvait apprendre
sans prises de notes écrites
et tout mettre dans sa tête.»
Un animateur.
Les
classes ne demandent pas seulement la
conscience des classes, mais aussi qu'une
orthographe particulière soit attachée à
une image particulière, c'est-à-dire à une
signification particulière. Un exemple serait
le « temps » de l'horloge, le « taon »
l'insecte, « tant ». Et quand on en a trouvé
assez, un très bon jeu consiste à essayer
d'en employer trois ou quatre, différents
dans des phrases.
En français, il existe aussi de très
nombreux homonymes de constitution.
Citons comme exemple… « Jean veut » et
« j'en veux ». C'est un domaine très riche
qui nécessite un travail précis avec des
jeunes enfants qui doivent maîtriser la
séparation des mots, l'orthographe
adaptée au sens. Ces homonymes
demandent une conscience du sens très
fine. Une telle conscience et un tel contrôle
ne s'affinent qu'avec la pratique.
…
Il y a un contraste saisissant entre le fait
d'essayer de dire « c'est un adjectif » de tel
ou tel type et le fait de se demander « est-
ce que je vais le mettre dans cette case ou
dans celle-ci ? ». Quelquefois, on voit qu'il
n'y a pas vraiment de bonne réponse. On
peut mettre l'exemple étudié en un endroit
si on le voit selon une optique et ailleurs si
on le considère autrement. Cette démarche
fait que les élèves restent au contact avec
le sens de ce qu'ils disent et non avec les
mots techniques que l'on trouve dans « un
exercice grammatical ». Si on veut pouvoir
pointer ce que l'on dit, on doit d'abord dire :
l'expression des élèves entre en jeu ».
Ce n'est pas gênant de dire qu'une
expression comme « sans arrêt » peut être
pointée dans un case si on la prend en tant
qu'expression, mais dans une autre si on
décide de pousser l'analyse un peu plus
loin. Les enfants sont comme les adultes
dans ce domaine, ils ont envie de discuter
entre eux quand un cas de litige se
homonymes, qui sont à l'intérieur des
dans le travail de grammaire avec les enfants
Analyse de l'utilisation du tableau de grammaire de Maurice Laurent
présente.
….
La démarche présentée ici est différente de
celle qui consiste à se servir d'un livre. Bien
entendu, il existe des livres de grammaire,
beaucoup même. Mais les leçons sont
souvent faites d'exemples stéréotypés, si
bien que la facilité est une illusion. Si on ne
traite que des phrases comme « il mange sa
soupe », « il l'a mangée » ou « il est blond »,
« elle est blonde », il n'y a aucune difficulté.
On ne risque pas de se tromper, parce
qu'on ne traite que des phrases non
ambiguës. A ce niveau-là, on peut travailler
assez facilement.
Le défi relevé ici consiste à travailler la
grammaire à partir de toute la langue, en
prenant le risque de tomber sur des cas
difficiles.
….
Il semble clair que le meilleur moyen de
travailler avec ce système, c'est par
opposition. Pour donner un exemple,
confondre le mot « la » dans « la ferme »
(où on trouve des animaux ) et dans « la
ferme » (façon impolie de demander le
silence), c'est confondre un article et un
pronom. Cette façon de travailler permet
de créer un grand nombre d'exercices
rapidement permettant d'opposer des
situations où il risque de confusion entre
des catégories –par exemple, les articles et
des pronoms – jusqu'à ce que la distinction
se fasse. La maîtrise est atteinte quand les
élèves ne se trompent plus, quelle que soit
la difficulté de l'exercice.
C'est en travaillant de cette manière que
l'on peut parler de «grammaticalisation» …
La grammaticalisation est la démarche qui
consiste à rendre explicite ce qui est
implicite dans le fait que tout le monde
parle la langue, à extraire la grammaire de
la langue, par opposition à la démarche qui
consiste à enseigner la grammaire telle que
la voient les grammairiens. A condition de
8
«…moi, j'arrive d'un autre pays
où j'ai appris le français à l'école
mais, il y a des mots
que je confondais…
par exemple, quand j'entendais
«j'ai parlé» hé bien,
je venais pointer «je parle»…
je n'entendais pas le «é»…
j'ai compris pourquoi j'avais
des problèmes
avec le passé composé…
Ce que je préfère…
c'est quand on pointe des phrases
qu'on imagine toute seule…
des longues phrases
où je peux mettre
toutes les catégories de mots...»
Je sais que je dois d'abord
comprendre avant de savoir
pointer.
Par exemple,
pointer ma belle-mère,
c'est pas pareil
que ma belle mère,
ça veut pas dire la même chose.»
Mohamed, 14 ans, Bruxelles,
mars 2007
laquelle se trouvait cette structure est
conservée : « un chat noir, un chat gris, un
chat blanc, un chat tigré ». Le fait de varier
sur cet axe paradigmatique sans altérer ce
qui reste conserve la classe.
C'est le grand principe de la grammaire
distributionnelle qui essaie d'analyser la
langue en partant de ce genre de
transformation ».
Roslyn Young
dans le travail de grammaire avec les enfants
Analyse de l'utilisation du tableau de grammaire de Maurice Laurent
9
partir de toute la langue, on peut faire
prendre conscience aux enfants de la
grammaire qu'ils ont en eux. Il s'agit
d'abord de faire expliciter la grammaire et
ensuite de la nommer.
Les praticiens de l'enseignement nous
disent que la difficulté pour les enfants ne
réside pas dans la notion de possession, de
démonstration ou de l'indéfini. Devant une
phrase comme « ma sœur », les enfants
savent reconnaître la notion de possession.
Ils sont souvent incapables, par contre, de
dire si « ma » est un adjectif ou un pronom.
Ils n'ont pas de critères à ce niveau-ci de
l'analyse. De ce qui précède le lecteur doit
pouvoir constater aussi que le tableau est
conçu à favoriser l'acquisition de critères.
Il est utile de préciser peut-être qu'un
instituteur qui commence avec une classe
d'enfants de sept ou huit ans n'introduit
pas d'emblée le tableau de grammaire en
entier. Il commence avec quelques cases
dessinées au tableau en fonction des
difficultés rencontrées. Quelques cases
permettent un travail sur le groupe
nominal. D'autres sur l'accord des verbes.
Au fur et à mesure que les problèmes se
présentent, l'instituteur peut ajouter des
cases, les modifier, créer des intersections
là où c'est nécessaire.
Une phrase comme « à la gare » ne pose
pas de problème, alors que « au marché »
en pose. Alors il faut créer une intersection
qui permette de pointer ces mots de façon à
respecter le fait que « au » devrait se
pointer en deux endroits à la fois. Parmi les
enfants, il peut y avoir discussion et
consensus sur ce fait. Le tableau final pour
chaque classe se construit au fur et à
mesure des besoins.«…la force du groupe
dans le rythme d'apprentissages
de chacun…
cela m'a fort étonné.
Souvent, on dit qu'on apprend
plus vite en individuel…»
Un animateur.
Il y a une prise de conscience qui est
importante pour pouvoir travailler avec ce
jeu ; c'est que lorsqu'on conserve une
structure, une suite de mots et qu'on
substitue un mot à un autre dans cette
structure, alors la classe du mot dans
De la grammaire implicite à la grammaire explicite (1)
Première initiation, en classe, au
processus de grammaticalisation,
avec « le panneau des catégories de
mots » de Maurice Laurent et
Christiane Laurent
1. Remarques liminaires.
1.1. Une activité grammaticale du type de
celle proposée ci-dessous ne peut et doit
être envisagée qu'après que les élèves
soient parvenus à un certain niveau
d'expression orale : il s'agit là de structurer
et de préciser ce que l'on serait déjà
capable d'exprimer et / ou de comprendre
dans le but de l'améliorer et de l'étendre.
Il s'agira ensuite, simultanément, de mieux
saisir en soi le passage de la pensée globale
à son expression verbale.
1.2. Nous avons comme objectifs
prioritaires pour la conduite de la classe la
pratique d'un enseignement différencié et
celle de l'évaluation formative continue.
Afin que ces objectifs ne restent pas des
vœux pieux mais fassent partie intégrante
de la réalité de la classe en action, nous
avons créé, expérimenté et mis au point
des outils adéquats : le « panneau muet
des catégories de mots » considéré plus
loin en constitue le pilier central.
1.3. Nous avons simultanément comme
objectifs prioritaires pour les élèves qu'ils
continuent d'utiliser toutes leurs facultés et
les nombreuses sensibilités à la grammaire
qu'ils démontrent avoir développées
lorsqu'ils se sont appropriés leur première
langue, celle de leur milieu, sensibilités
sans lesquelles ils n'auraient pu apprendre
à parler. (C. Gattegno, L'univers des bébés)
Le panneau blanc, prévu pour que l'on
puisse y écrire, comprend neuf rectangles
dont la bordure est colorée : il existe une
intersection entre le rectangle rouge et le
jaune, une autre entre le brun et le bleu.
Le panneau présenté aux élèves ne
comporte aucune terminologie.
Comme ind iqué, ces rectang les
correspondent aux catégories de mots.
L'utilisation d'un pointeur, ou d'une
baguette fine, permet d'associer, dans
l'ordre temporel, chaque mot de n'importe
quel énoncé, proposé par le maître ou un
élève, à l'un des rectangles.
Simultanément à ce pointage, les mots de
l'énoncé peuvent être redonnés oralement
par la personne qui pointe, afin que toute
ambiguïté soit exclue.
Par exemple, l'énoncé suivant, « Le volcan
furieux vomit inlassablement sa lave et
crache d'épaisses fumées. », sera pointé
ainsi : Jaune (Le), vert (volcan), violet
( fur ieux) , orange (vomit) , b leu
(inlassablement), jaune (sa), vert (lave),
noir, case de gauche (et), orange (crache),
jaune (d'), violet (épaisses), vert (fumées).
Le panneau muet comprend aussi une
plage vide, dont la fonction est la suivante :
y seront placés les mots ou groupes de
mots ayant perdu, pratiquement, tout rôle
fonctionnel, et qui, en conséquence, ne
sont pas « analysables », comme dans
certains gallicismes :
Il y a du beurre dans la soupe.
C'est elle qui viendra.
C'est ce tableau que je veux.
Elle s'en ira ce soir… .
Les couleurs employées sont totalement
arbitraires.
La place relative des rectangles, les uns par
rapport aux autres, ne l'est pas.
En dessous des noms, sont placés les
déterminants, et à leur droite les adjectifs,
constituants les plus fréquents du groupe
nominal.
Na tu r e l l emen t en de s sous de s
10
«…pour apprendre,
j'ai besoin d'y trouver du plaisir…
Avec cet outil,
je me suis amusée et la
grammaire est devenue
compréhensible pour moi.»
Une animatrice.
11
De la grammaire implicite à la grammaire explicite (1)
déterminants du nom se trouvent les
prépositions, et, est rendue apparente une
intersection entre ces deux catégories, qui
marque la fusion de l'une avec l'autre, et
qui correspond aux déterminants
prépositionnels :
Elle revient du Pérou.
Elle ira au marché.
Elle pense aux autres.
Elle rentre des Antilles…
Les pronoms surmontent les constituants
déjà cités du groupe nominal, auquel ils se
substituent la plupart du temps.
La deuxième moitié du panneau est
essentiellement occupée par les verbes,
que jouxtent de près les adverbes.
L'intersection entre les pronoms et les
adverbes permet de rendre compte du fait
que certains mots jouent à la fois le rôle de
pronoms et d'adverbes : Elle revient de
Sicile. / Elle en revient. / Elle va au marché.
/ Elle y va. / A quel moment viendras-tu ? /
Quand viendras-tu ?
Les conjonctions touchent aux constituants
du groupe nominal et aux verbes, puisque
les unes, les conjonctions de coordination,
réunissent aussi bien des groupes
nominaux ou des éléments des groupes
nominaux que des phrases, et que les
autres permettent d'enchâsser une phrase
suite de verbe ou une phrase complément
de phrase ... :
… un œil noir et une mine triste…
une face jeune mais ridée…
Parce qu'il apprécie ta bonne humeur, il
aimerait bien que tu viennes…
Quant aux interjections et à la plage vide,
leur emplacement n'a en vérité aucune
importance.
La taille relative des rectangles, elle aussi,
a son importance, mais qui ne se justifiera
que plus tard, lorsque sera considéré le
problème de la mise en parallèle de la
g rammai re e t de l ' o r thographe
grammaticale.
Le panneau des catégories de mots se
place verticalement sur un rebord prévu
en-dessous du tableau.
De dimensions suffisantes (140 cm x 125
cm), il permet de travailler dans un premier
temps avec tout le groupe-classe, sans
qu'aucun métalangage ne soit nécessaire
et sans qu'aucune explication ou définition
ne soient données.
2. Simulation d'une première leçon
avec le panneau muet des catégories
de mots : les prises de conscience
fondamentales.
Imaginons d'abord la situation. Le panneau
muet est installé.
Assis sur des chaises, les élèves lui font
face, sans aucun matériel : ils doivent tous
pouvoir venir au tableau rapidement pour
pointer des énoncés.
Dans toute la suite, pointer signifiera
exactement : toucher, à l'aide d'un
pointeur, dans l'ordre temporel, un à un, les
rectangles qui correspondent aux
catégories grammaticales auxquelles
appartiennent les mots de la phrase
considérée, tout en redonnant oralement
les mots au fur et à mesure du pointage.
A ce stade, tables, papiers et crayons sont
totalement inutiles: seule la présence des
élèves est indispensable.
C'est la première fois qu'ils vont travailler
de cette manière, et qu'ils ont l'occasion de
découvrir le panneau.
Le maître, sans aucune explication
préalable, va donner oralement une
première phrase dont il est sûr qu'elle sera
comprise de tous les participants.
Avec des élèves francophones[1] de six à
huit ans, cette phrase sera courte et les
catégories de mots concernées ne seront
que trois ou quatre :
Les chats miaulent ou Julie porte des
lunettes… pourraient convenir.
Avec des préadolescents, des adolescents
ou des adultes francophones, il est possible
de commencer avec une phrase telle
qu'el le comprenne au moins un
représentant de chaque catégorie de mots.
Avec des élèves de dix à douze ans pourra
être proposée une phrase moins étoffée:
Ce panneau muet, l'avez-vous bien
regardé?
Nous simulerons ici une première leçon
avec de tels élèves sur la base de cette
phrase.
Une fois la phrase donnée oralement, le
maître va la reprendre tout en pointant
chaque mot dans sa catégorie.
Seront donc successivement touchés le
rectangle jaune, le vert, le violet, le brun,
l'orange, le brun, le bleu et l'orange.
Ce après quoi, pointant de nouveau, mais
sans parler, il pourra demander aux
participants de retrouver dans l'ordre les
mots de la phrase, sans accepter aucune
modification. Il demandera alors: Qui
saurait redonner la phrase tout en la
pointant?
Le maître cédera alors le pointeur à un
volontaire que le groupe pourra
éventuellement aider s'il hésite.
«…c'était la première fois
que je voyais quelqu'un animer
un atelier en tenant compte
des rythmes tant collectifs
qu'individuels, en faisant émerger
toutes les erreurs,
en ne donnant jamais ni réponse,
ni opinion, ni jugement.
Il y avait un climat de confiance
et de respect
où tout le monde se retrouvait.
Il y avait de l'émulation,
mais pas de compétition.
Pour une fois,
je ne me suis pas sentie, ni nulle,
ni honteuse,
même si après,
je me suis rendue compte
que mon pointage
n'était pas correct.».
Une animatrice.
12
Le groupe de mots « 01 » est une reprise
d'une partie de la phrase de base.
A partir de là, nous allons multiplier les
énoncés à pointer en leur faisant
progressivement subir un certain nombre
de transformations.
L'objectif est de placer les élèves dans une
situation de réflexion et de recherche pour
les amener à établir peu à peu des critères
personnels conscients dont ils se serviront
pour choisir quel rectangle associer à tel ou
tel mot.
Dans la majorité des cas, ces critères ne
seront au début ni les mêmes pour tous, ni
les critères qui satisfont à la grammaire.
Là n'est pas le plus important. Ce que nous
voulons, c'est que la curiosité, le besoin de
trouver, de comprendre, de savoir, soient à
l'œuvre et que cet état de recherche
maintienne la présence des élèves à l'étude
en cours, qu'ils fassent des conjectures, les
infirment ou les confirment, soient
mentalement actifs…
Et pour qu'il en soit ainsi, il est impératif de
respecter et de prendre en compte la
diversité des stratégies mentales.
Dans les énoncés « 01 » à « 10 », on fait
varier en premier lieu les déterminants, qui
se substituent l'un à l'autre : ce, le, un, des,
quelques, deux, plusieurs, une.
Nous voulons d'abord amener la prise de
conscience que tous les mots qui peuvent
commuter avec le premier, ce , se pointent
comme lui dans le même rectangle, le
jaune.
Nous voulons ensuite donner l'occasion de
comprendre qu'il faut faire passer au
second plan dans ce jeu un certain nombre
de sensibilités qui conduiront plus tard à
distinguer facilement dix sous-catégories
dans celle des déterminants : déterminants
articles définis, définis prépositionnels,
indéf in is, part i t i fs , déterminants
possessifs, démonstratifs, indéfinis,
exclamatifs, interrogatifs, numéraux
cardinaux.
Nous voulons surtout que soit perçue la
relation forte qui existe entre les « mots
jaunes » et les « mots verts »…
Dans ces énoncés aussi, les noms se
De la grammaire implicite à la grammaire explicite (1)
Il pourra aussi poser des questions comme:
Qui se souvient du ou des mots qui ont été
pointés dans ce rectangle ?,
Où ont été pointés le quatrième et le
sixième mot ?
L'avant-dernier mot ?
Tous ces exercices, que les élèves trouvent
faciles et auxquels ils contribuent
volontiers, ont comme objectif de leur
permettre d'associer, dans le contexte
d'une phrase, quelques mots et quelques
rectangles colorés, associations auxquelles
ils pourront ensuite se référer.
Pour le moment, il ne s'agit que d'un
exercice de rétention, qui consiste à
introduire ce qui est arbitraire et ne peut
être découvert par les élèves.
Puis un autre élève volontaire viendra
pointer des énoncés comparables à ceux du
corpus ci-dessous, donnés au fur et à
mesure par le maître :
01 ce panneau muet
02 le panneau muet
03 un panneau muet
04 un film muet
05 des films muets
06 quelques films muets
07 deux garçons muets
08 plusieurs garçons muets
09 une carte muette
10 une carte routière
11 une grande carte
12 de grandes cartes
13 de grandes filles
14 de belles filles
15 de beaux paysages
16 de remarquables paysages
17 des paysages plats
18 des paysages accidentés
19 des accidents désastreux
20 un désastre immense
21 un désastre inattendu
22 des comportements inattendus
23 des idées inattendues
24 un bonheur inattendu
25 une réflexion inattendue
26 une réflexion intense
27 une intense réflexion
28 une douleur intense
29 une douleur insupportable
30 une douleur collective
31 une peur collective
32 une pensée collective
33 une pensée populaire
34 une démocratie populaire
35 une jeune démocratie
36 une jeune femme brune
37 une jeune fille détendue
38 une jeune fille ennuyée
39 une ennuyeuse journée
40 une décision ajournée
41 une journée passionnante
42 une histoire passionnante
43 un ami passionnant
44 une amie passionnée
45 un garçon passionné
46 un jeune garçon passionné
47 un jeune garçon amusant
48 un jeune garçon amusé
49 un texte amusant
50 un regard amusé ...
«…maintenant
que j'ai les liens,
le sens de la nature des mots,
j'ai amélioré mes stratégies …
je me sens
comme un chercheur,
et surtout,
qui trouve, lui seul,
la solution.
Cela a augmenté
ma confiance en moi…
Je me dis
que je pourrais peut être
apprendre de nouvelles choses,
comme les maths,
dont j'ai toujours eu peur.»
Un animateur.
13
substituent l'un à l'autre : panneau, film,
garçon, carte.
La possibilité est offerte de prendre
conscience du fait que ce qui est vrai pour
les déterminants l'est aussi pour les noms :
tous les mots qui commutent avec panneau
sont aussi des « mots verts ».
Des hésitations, des doutes vont être
perceptibles, des erreurs vont être
commises, que nous pouvons en partie
simuler sur la base de notre expérience.
Il s'agit en classe de les interpréter et d'en
tenir compte immédiatement, autrement
dit, d'offrir de nouveaux énoncés afin
qu'hésitations, doutes et erreurs
disparaissent.
Imaginons que dès le pointage de l'énoncé
« 02 » du corpus précédent, l'élève qui
pointe hésite à placer le dans les
déterminants, ce qui n'aurait rien
d'étonnant, car aucun critère ne peut
encore véritablement être établi avant
qu'au moins deux mots de même nature
n'aient été placés dans la même case :
mettre le dans le même rectangle que ce ne
peut être qu'un essai, que seul le maître
pourra accepter comme correct ou
incorrect. Il est donc possible de demander
à un autre élève qui pense deviner la
solution et veut intervenir de pointer.
Mais il est possible aussi de se servir d'un
corpus annexe au corpus général, les
énoncés ne comprenant plus qu'un
déterminant et un nom, propres à mieux
forcer les prises de conscience désirées:
ces énoncés, limitant le nombre de
questions possibles à se poser, permettent
de focaliser l'attention sur l'étude d'un seul
point.
Puis l'on reviendra, le problème ayant été
réglé, à l'énoncé à propos duquel on avait
hésité.
Imaginons maintenant que l'énoncé « 10 »
du p remie r co rpus so i t po in té
correctement, (Dét + N + Adj), et qu'un
élève pointe le « 11 » de la même manière.
Cela pourrait signifier par exemple qu' il
pense, puisque l'ordre «jaune / vert /
violet» n'a jamais jusque-là changé, qu'il
doit demeurer le même.
Là encore, nous allons tout de suite utiliser
un corpus annexe. Nous choisirons d'abord
des noms et des adjectifs tels que l'adjectif
puisse indifféremment être placé avant ou
après le nom. On demandera de pointer
d'abord le déterminant et le nom, puis d'y
adjoindre l'adjectif.
La prise de conscience pourra ainsi être
amenée, du fait que l'ordre des mots dans
les énoncés n'est pas un critère fiable dans
le jeu en train d'être joué, que la solution se
trouve ailleurs, un ailleurs à découvrir.
Mieux peut-être, que les « mots violets » se
rapportent aux « mots verts », les
De la grammaire implicite à la grammaire explicite (1)
01 ce crayon
02 ce garçon
03 cette fenêtre
04 ce panneau
05 le panneau
06 le garçon
07 le crayon
08 un crayon
09 deux crayons
10 des crayons
11 trois crayons
12 mon crayon
13 leurs crayons
14 notre classe
15 notre panneau
16 deux panneaux
17 ces panneaux
18 des panneaux
19 plusieurs panneaux
20 quelques panneaux
21 quel panneau !
22 quel panneau ?
01 une carte
02 une carte magnifique
03 une carte
04 une magnifique carte
05 une plage
06 une plage magnifique
07 une plage
08 une magnifique plage
09 une rue
10 une rue nouvelle
11 une rue
12 une nouvelle rue
13 un mur
14 un mur haut
15 un mur
16 un haut mur ...
précisent, les complètent, les qualifient, et
qu'ils ne peuvent en conséquence exister
que si les « mots verts » sont là au
préalable...
Dans les énoncés « 12 » à « 35 » du premier
corpus, plusieurs noms commutent : carte,
fille, paysage, accident, désastre,
comportement, idée, bonheur, réflexion,
douleur, peur, pensée, démocratie.
Le choix n'est pas dû au hasard. Nous
voulons qu'à terme, la classe des noms soit
perçue comme contenant tous les êtres,
autrement dit tout ce qui existe que l'on
sait nommer, étiqueter en français : les
êtres animés et inanimés du monde
sensible autour de nous bien sûr, mais
aussi d'autres êtres comme les émotions,
les sentiments, les idées, les idéaux…
Dans les énoncés « 40 » à « 48 », les
adjectifs non plus n'ont pas été choisis au
hasard : ajourné, passionnant, passionné,
amusant, amusé.
Nous donnons ici un signe, qui sera ou ne
sera pas perçu, que cette classe de mots en
contient de nombreux qui font penser à des
verbes, les participes passés et présents
employés comme adjectifs.
Durant la leçon, il se peut aussi qu'un mot
d'un énoncé pose un problème de
compréhension, comme par exemple
ajournée dans l'énoncé « 40 ».
14
Vous pouvez insérer gratuitement vos différentes annonces de manifestations,
activités sportives et/ou culturelles, formations diverses, offres d'emploi, etc...
dans le prochain numéro de "A Feuille T"
Ne tardez-pas: envoyez-nous votre courrier.
Un logo, une illustration, une photo de qualité correcte seront les bienvenus.
PPEL • RAPPEL • RAPPEL • RAPPEL • RAPPEL • RAP
Lorsque la classe démontre une bonne
maîtrise, pointer de tels énoncés est si
facile et si rapide qu'il n'y a plus de défi
intellectuel.
Il convient de rapidement en faire surgir de
nouveaux.
Mais il faut simultanément et sans arrêt
que le maître opère des choix parmi les
directions possibles, toujours multiples,
dans lesquelles continuer le travail.
Il n'existe pas de progression préétablie
meilleure qu'une autre.
(Suite dans A Feuille T 127)
De la grammaire implicite à la grammaire explicite (1)
Là aussi, un corpus annexe peut être
utilisé, offrant des synonymes ou des
antonymes, (01 à 09), plutôt que soient
données des explications seulement.
01 une décision ajournée
02 une décision retardée
03 une décision remise
04 une décision reportée
05 une décision différée
06 une décision annulée
07 une décision modifiée
08 une décision appliquée
09 une décision maintenue ...
«…moi, le pointeur,
j'en avais pas une bonne opinion.
Cela me rappelait la baguette
que les professeurs utilisaient
par la passé…
j'ai eu tout de suite peur…
petit à petit, lorsque la formatrice
m'a convié à venir pointer…
j'ai senti que c'était différent.
Cela m'aidait à structurer le temps
et l'ordre des mots;
et le groupe pouvait me suivre.
Et puis, je pouvais revoir
mon pointage dans ma tête
même après avoir intercalé
de nombreux pointages…»
Un animateur
15
Quoi de plus normal que la lumière...
Pourtant, pensez que l'éclairage public n'a
fait son apparition à Bruxelles qu'au 18ème
siècle.
Avant, sitôt la nuit tombée, la rue devenait
un domaine étrange où « tous les chats
sont gris ».
La lumière, au contraire, rehaussait le
prestige d'une rue ou d'un événement.
L'expression « chapelle ardente » avait tout
son sens, des gravures illustrent les
véritables pièces montées qui ont été
cons t ru i tes pour Char les Qu in t
notamment.
Lumières qui fascinent comme les feux
d'artifice, ou qui inquiètent, comme les
incendies ou le bombardement de
Bruxelles par Louis XIV.
S
Mais, peu à peu, la lumière prendra une
couleur plus « normale », même si elle
reste attachée à l'idée de fête, de
réjouissance...
Ceci étant dit, la lumière est, depuis
toujours le résultat d'une prouesse
technique et d'un savoir faire.
Les journées du patrimoine ont été
consacrées à cette question.
Les Archives de la ville de Bruxelles ont
organisé pour l'occasion une exposition qui
retrace l'évolution de l'éclairage public
dans notre capitale.
L'intérêt de cette exposition repose sur
deux piliers, d'une part la possibilité de voir
des images d'archives « en vrai », de l'autre
de se rendre compte que la lumière est
réellement porteuse de l'histoire d'un lieu.
Bruxelles n'est pas une ville anodine dans
l'histoire européenne, même si elle ne
bénéficie pas de l'aura des grandes
capitales, la révolution industrielle
marquera de son empre in te le
développement de notre ville.
L'éclairage public fera son entrée très tôt à
Bruxelles à travers le gaz et c'est
seulement dans les années '20 que
l'électricité supplantera définitivement le
gaz.
La guerre 40-45 marquera également un
tournant dans l'histoire de la lumière car il
s'agissait alors de rester le plus possible
dans l 'obscurité pour éviter les
bombardements...
A travers des documents d'archives, cette
exposition retrace l'évolution de la lumière
jusqu'à nos jours. Il est particulièrement
intéressant de constater que c'est à partir
d'affiches, de gravures, de lettres de
réclamation ou d'autorisation officielle que
l'on construit l'histoire.
Cette exposition, assez petite, outre le
sujet à la fois étrange et passionnant nous
propose, entre les lignes, une leçon de
pratique historique.
C'est peut-être d'ailleurs là que réside le
principal intérêt de cette exposition pour le
public avec lequel nous travaillons.
àA FEUILLE T
6.2 € seulementpour 1 an
Virement sur le compte
001-1917334-11
Renseignements:Véronique MARISSAL
Tél. 02 412 56 14
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Editeur responsable: Francis MAIRESSE, Président. Conception: studiogoor 02.538 34 25
16
Le CTL – La Barricade asbl
est à la recherche de volontaires
pour son centre de documentation
scolaire à destination d'enfants
du primaire et du secondaire :
aide aux tri, classement de la
documentation et accompagnement des
jeunes dans leurs travaux de recherche.
Contact : CTL – La Barricade asbl,
66 chaussée de Haecht, 1210 Bxl,
02/219.69.96
de l'objet insolite fait appel à l'attention, à
l'importance de poser un choix dans la
mesure où il faut choisir un seul objet avec
un budget limité. Le marchandage ensuite
demande un certain bagou... même si cela
ne fait pas nécessairement partie des
compétences que nous sommes sensés
développer...
Dans un second temps, la recherche et la
formulation d'hypothèses nous permet de
mettre l'imagination au service de la
compréhension et de transcrire le tout afin
d'être compris par des personnes
extérieures.
Elle nous permet une triple prise de
conscience: notre environnement évolue
au fil du temps, il n'y a pas « petite »
histoire, l'histoire se construit à partir
d'indices et de déductions comme une
enquête policière.
Activité
La Rue des Tanneurs est à deux pas du
vieux marché, place du jeu de balle... une
belle occasion de faire de l'histoire
appliquée! Le lieu regorge de trouvailles et
chiner pourra devenir un véritable plaisir!
Objectif
Les enfants sont rassemblés par groupe de
trois avec un budget de 5 € par groupe.
Ensuite les enfants sont invités à
rechercher un objet insolite, voire même
totalement inconnu au vieux marché et à
l'acheter.
Sur base de cette récolte, les enfants
tentent de découvrir l'histoire de l'objet à
partir des indices qu'il contient ou en
interrogeant leur entourage. L'activité peut
être étalée sur plusieurs jours, de manière
à rendre la recherche plus passionnante.
La consigne principale est que la
description qui sortira de leur plume soit
réaliste... pas question de faire appel aux
martiens pour le coup.
Pour clôturer l'activité, vous prenez une
photo de l'objet et vous nous envoyez la
définition que nous publierons dans A
feuille T!
Compétences exercées
Les compétences visées dans cette activité
sont multiples. Tout d'abord la recherche
S
Info pratiques
Du halo au réseau
La lumière dans la ville
Archive de la ville de Bruxelles
Rue des Tanneurs 65 – 1000 Bruxelles
Du 7/9 au 31/12 2007
Entrée gratuite
Du lundi au vendredi de 8 à 16h
et le samedi de 14 à 18h
Visite guidée sur demande
Info: 02/279 53 20
Avec le Soutien du Service de la Jeunesse de la Communauté Française, de la COCOF et de l'Orbem.