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703 CABINET Infections cutanées à Herpes simplex Stephan Lautenschlager Dermatologisches Ambulatorium des Stadtspitals Triemli, Zürich Les virus Herpes simplex de type 1 et 2 (HSV-1, HSV-2), avec le virus de la varicelle et du zona, font partie du groupe des alpha-herpesviridae. Ces virus ont en com- mun, en plus de leur large distribution, une épidermo- et neurotropie, avec manifestation d’une symptomato- logie clinique variable individuellement et une phase de latence, c.-à-d. la persistance d’ADN viral pratiquement sans synthèse protéique dans les ganglions nerveux. A la phase latente, ces virus peuvent être réactivés par des facteurs déclenchants ou après affaiblissement de la ré- ponse immunitaire et donner une récidive clinique. Une manifestation plus fréquente et cliniquement plus grave est donc à prévoir en cas d’immunodéficience. Une infec- tion génitale à HSV est associée à un risque trois fois plus grand d’acquisition du VIH, raison pour laquelle un diagnostic, un traitement et un conseil revêtent une grande importance [1]. Pathogenèse et épidémiologie Les HSV pénètrent dans leur hôte par la peau ou les muqueuses dans le cadre d’une primo-infection souvent asymptomatique, et se répliquent dans les cellules épi- théliales. Les nerfs sensitifs cutanés sont également at- teints, le long desquels les virus envahissent les cellules des ganglions de la corne postérieure pour y établir une infection latente à vie. De très nombreux facteurs dé- clenchent une réactivation du virus, qui descend le long des nerfs sensitifs, avec comme résultat soit une sympto- matologie cutanée, soit une excrétion virale asymptoma- tique [2]. La primo-infection à HSV-1 se fait essentiellement par contact vertical au cours des 5 premières années de vie, elle est la plupart du temps asymptomatique. Mais occasionnellement une gingivostomatite sévère peut im- poser une hospitalisation. Une primo-infection à l’âge adulte est le plus souvent symptomatique. En Suisse, pra- tiquement les deux tiers des donneurs de sang ont des anticorps anti-HSV-1, sans différence entre les sexes. Comme la séroprévalence du HSV-1 est en diminution dans le monde industrialisé, il faut s’attendre à ce que la primo-infection à l’âge adulte augmente (fig. 1 ). Le HSV-1 peut également provoquer une infection génitale, de plus en plus fréquente depuis quelques années dans plusieurs pays, en raison des contacts orogénitaux tou- jours plus courants. Au Canada par ex., le HSV-1 est déjà présent chez les deux tiers des patients, surtout chez les jeunes femmes [3]. Stephan Lautenschlager L’auteur n’a déclaré aucun soutien financier ni d’autre conflit d’intérêt en relation avec cet article. Figure 1 Gingivostomatite herpétique dans le cadre d’une primo-infection à HSV-1 chez une patiente de 34 ans. Quintessence La séroprévalence du HSV-1 est d’env. 2 3 et celle du HSV-2 de 1 5. Les manifestations atypiques en fonction de la morphologie et de la localisation sont fréquentes. La proportion des infections génitales à HSV-1 augmente. Les récidives importantes et fréquentes sont de plus en plus contrôlées par traitement bref à hautes doses ou suppression durable. Le traitement prolongé et l’emploi de préservatifs réduisent la trans- mission aux partenaires sexuels séronégatifs. Forum Med Suisse 2013;13(36):703–708

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Infections cutanées à Herpes simplexStephan LautenschlagerDermatologisches Ambulatorium des Stadtspitals Triemli, Zürich

Les virus Herpes simplex de type 1 et 2 (HSV-1, HSV-2), avec le virus de la varicelle et du zona, font partie du groupe des alpha-herpesviridae. Ces virus ont en com-mun, en plus de leur large distribution, une épidermo- et neurotropie, avec manifestation d’une symptomato-logie clinique variable individuellement et une phase de latence, c.-à-d. la persistance d’ADN viral pratiquement sans synthèse protéique dans les ganglions nerveux. A la phase latente, ces virus peuvent être réactivés par des facteurs déclenchants ou après affaiblissement de la ré-ponse immunitaire et donner une récidive clinique. Une manifestation plus fréquente et cliniquement plus grave est donc à prévoir en cas d’immunodéficience. Une infec-tion génitale à HSV est associée à un risque trois fois plus grand d’acquisition du VIH, raison pour laquelle un diag nostic, un traitement et un conseil revêtent une grande importance [1].

Pathogenèse et épidémiologie

Les HSV pénètrent dans leur hôte par la peau ou les muqueuses dans le cadre d’une primo-infection souvent asymptomatique, et se répliquent dans les cellules épi-théliales. Les nerfs sensitifs cutanés sont également at-teints, le long desquels les virus envahissent les cellules des ganglions de la corne postérieure pour y établir une infection latente à vie. De très nombreux facteurs dé-clenchent une réactivation du virus, qui descend le long des nerfs sensitifs, avec comme résultat soit une sympto-matologie cutanée, soit une excrétion virale asymptoma-tique [2]. La primo-infection à HSV-1 se fait essentiellement par contact vertical au cours des 5 premières années de

vie, elle est la plupart du temps asymptomatique. Mais occasionnellement une gingivostomatite sévère peut im-poser une hospitalisation. Une primo-infection à l’âge adulte est le plus souvent symptomatique. En Suisse, pra-tiquement les deux tiers des donneurs de sang ont des anticorps anti-HSV-1, sans différence entre les sexes. Comme la séroprévalence du HSV-1 est en diminution dans le monde industrialisé, il faut s’attendre à ce que la primo-infection à l’âge adulte augmente (fig. 1 ). Le HSV-1 peut également provoquer une infection génitale, de plus en plus fréquente depuis quelques années dans plusieurs pays, en raison des contacts orogénitaux tou-jours plus courants. Au Canada par ex., le HSV-1 est déjà présent chez les deux tiers des patients, surtout chez les jeunes femmes [3].

Stephan Lautenschlager

L’auteur n’a déclaré aucun soutien financier ni d’autre conflit d’intérêt en relation avec cet article.

Figure 1Gingivostomatite herpétique dans le cadre d’une primo-infection à HSV-1 chez une patiente de 34 ans.

Quintessence

• La séroprévalence du HSV-1 est d’env. 2⁄3 et celle du HSV-2 de 1⁄5.

• Les manifestations atypiques en fonction de la morphologie et de la localisation sont fréquentes.

• La proportion des infections génitales à HSV-1 augmente.

• Les récidives importantes et fréquentes sont de plus en plus contrôlées par traitement bref à hautes doses ou suppression durable.

• Le traitement prolongé et l’emploi de préservatifs réduisent la trans-mission aux partenaires sexuels séronégatifs.

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L’infection à HSV-2 est généralement transmise par voie sexuelle et sa localisation est généralement anogénitale. Ces infections sont moins fréquentes au niveau des mains (fig. 2 ), des fesses et des cuisses, très rarement orofa-ciales. Mais en principe ces deux types de virus peuvent provoquer des manifestations n’importe où sur la peau. Le plus grand facteur de risque de contamination par le HSV-2 est le nombre de partenaires sexuels, les femmes étant significativement plus souvent infectées que les hommes. Plus des deux tiers des contaminations se font par une excrétion virale asymptomatique. Les primo-in-fections à HSV-2 sont pour la plupart asymptomatiques, surtout si une infection à HSV-1 s’est déjà produite à un autre endroit (infection dite initiale) [4, 5]. La séropréva-lence du HSV-2 chez 1000 donneurs de sang en Suisse est de 15%, mais nettement plus élevée dans les groupes

à risque et atteint 43% chez les porteurs d’une infection à VIH [6]. Ce qui fait qu’en moyenne 1 adulte sur 5 est infecté par le HSV-2.Les infections aussi bien à HSV-1 qu’à HSV-2 ont de fortes chances de récidiver. Le risque de récidive géni-tale est 4–5 fois plus élevé pour le HSV-2 [7]. Les mani-festations cliniques du HSV-1 et du HSV-2 sont présen-tées au tableau 1 .

Clinique

Herpès orofacialSi une primo-infection à HSV-1 est symptomatique, elle donnera surtout une gingivostomatite avec de multiples ulcérations tapissées de fibrine, dans la bouche, sur les lèvres et parfois aussi périorales. Une atteinte du palais dur aide à faire la distinction clinique avec l’herpangine à virus de Coxsackie. Il y a parallèlement des lympha-dénopathies douloureuses, une hypersalivation, une forte fièvre avec malaise général. Alors que la température baisse après 3–4 jours, les lésions ne régressent qu’après 2–3 semaines. Lors de la primo-infection, il se produit assez souvent une auto-inoculation du virus à un autre endroit (par ex. génital ou digital). Chez les adolescents, la primo-infection se manifeste souvent aussi par une pharyngite ulcéreuse.La forme récidivante est déclenchée par plusieurs fac-teurs (par ex. exposition UV, fièvre, règles, traumatisme local et stress prolongé). Le bord des lèvres est le plus souvent touché, mais n’importe quel endroit du corps peut l’être, surtout le visage et le cou. Les infections du nez (fig. 3 ), du menton et des joues totalisent cepen-dant moins de 10% de toutes les manifestations oro-faciales. Une tension prodromale est souvent ressentie à l’endroit de la récidive, avec prurit ou fourmillement. Une excrétion orale de virus, asymptomatique, est fré-quente et peut être cause de la transmission du virus. Une complication, surtout sur une peau eczémateuse, est l’expansion superficielle de l’infection ou l’eczéma herpétique (fig. 4 ), qui exige un traitement antiviral systémique en urgence. Certains patients réagissent 1–2 semaines après un herpès labial par un érythème ex-sudatif multiforme (érythème polymorphe), qui n’est que rare après un herpès génital.

Herpès génital

Primo-infectionLa primo-infection génitale à HSV-2 est la plupart du temps asymptomatique. Dans la très rare forme symp-tomatique, après 3–10 jours de période d’incubation, des vésicules apparaissent en groupes sur la peau ou la muqueuse érythémateuse, qui éclatent rapidement pour donner des érosions ou ulcérations superficielles. Chez l’homme, le gland, le prépuce ou le pénis sont le plus souvent atteints, les foyers au niveau des fesses, du pé-rinée, de la cuisse ou de l’anus étant plus rares. Les femmes présentent généralement des lésions symé-triques vulvaires, périnéales et dans 80% des cas aussi cervicales. Les ganglions lymphatiques inguinaux sont presque toujours sensibles à la pression et agrandis.

Tableau 1Manifestations cliniques du HSV-1 et du HSV-2.

HSV-1 HSV-2

Gingivostomatite +++ (+)

Lésions génitales ++ +++

Autres téguments +++ +++

Kératoconjonctivite +++ (+)

Rétinite + (+)

Œsophagite ++ +

Pneumonie ++ +

Hépatite ++ +

Encéphalite (adultes) +++ +

Encéphalite (nouveau-nés) + ++

Myélite + ++

Erythème polymorphe +++ +

+++ = très fréquent, ++ = moyennement fréquent, + = occasionnel, (+) = très rare

Figure 2Infection à HSV-2 récidivante au niveau de l’index (herpetic whitlow).

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Les femmes surtout souffrent déjà au début de l’infec-tion de symptômes généraux d’allure grippale, mais pouvant aussi comprendre ceux d’une méningite asep-tique. La complication de la dysurie et de la radiculo-myélite peut être la rétention urinaire, imposant la pose d’une sonde sus-pubienne. Une proctite herpétique, qui typiquement ne récidive que rarement, peut être pré-sente surtout chez les homosexuels. La plupart des pa-tients ressentent leur herpès génital comme une mala-die stigmatisante, dont ils subissent un important stress psychosocial.

Herpès génital récidivantQuelque 20% des patients séropositifs pour HSV-2 ont des récidives caractéristiques avec vésicules génitales groupées sur fond érythémateux. Ces récidives sont plus discrètes et brèves que la primo-infection. D’autres 20% ont une évolution parfaitement asymptomatique, mais peuvent cependant aussi transmettre leur infection. Les 60% restant présentent des symptômes non caractéris-tiques, qu’ils ne peuvent pas reconnaître comme herpé-tiques sans consultation [8, 9]. Ces manifestations sou-vent atypiques vont d’une sensation de brûlure locale à prurit, érythème localisé, œdème, petites fissures, éro-sions isolées (fig. 5 ) et douleurs abdominales basses tensionnelles peu claires, récidivantes [10]. Il faut éga-lement penser à une éventuelle forme herpétique en pré-sence d’une urétrite séreuse récidivante sans découverte d’autres germes, surtout avec une importante méatite (fig. 6 ) [11]. Les ulcères génitaux isolés sont égale-ment souvent dus au HSV-2 dans le monde occidental. Du fait que l’ensemble des téguments peut être atteint, il faut également penser à une infection à HSV en cas de localisations atypiques. En général, tous les séro -positifs HSV-2 peuvent excréter leurs virus sans aucun symptôme avant, après ou totalement indépendamment d’une récidive symptomatique [12]. Cette excrétion virale asymptomatique est plus fréquente dans l’année suivant la primo-infection, plus fréquente aussi avec le HSV-2 qu’avec le HSV-1 [13, 14].

Diagnostic

Détection du virusChez tous les patients ayant une suspicion clinique d’infection à HSV exigeant un traitement, il faut si pos-sible confirmer le diagnostic par une méthode de détec-tion virale avec typisation [15]. Cette démarche ne doit toutefois pas retarder la mise en route adéquate du trai-tement. Il y a de très nombreuses méthodes de détec-tion, et la séquentialisation du génome viral après ampli-fication enzymatique (réaction en chaîne de polymérase, PCR) remplace de plus en plus la culture cellulaire comme standard or. Le dosage de l’antigène viral par anticorps spécifique (immunoassay enzymatique ou immunofluo-rescence), plus avantageux, a une sensibilité un peu moins bonne.

Mise en évidence des anticorpsAvec des symptômes cliniques, l’examen sérologique a une importance limitée et ne permet que de faire la dis-

Figure 4Eczéma herpétique chez un patient de 29 ans ayant une dermatite atopique.

Figure 3Patient de 33 ans ayant une infection à HSV-1 du nez.

Figure 5Patiente de 39 ans ayant des érosions récidivantes discrètes sur une infection à HSV-2.

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tinction entre primo-infection et récidive. Avec la tech-nique de dosage des anticorps spécifiques du type, il est possible poser le diagnostic d’infection latente à HSV-1 ou HSV-2 en l’absence de lésion, chez le patient ou sa partenaire sexuelle. Les craintes qu’une recherche d’anticorps positive pourrait avoir des répercussions psychiques négatives chez les personnes sans aucune symptomatologie clinique, émises au départ, n’ont pas pu être confirmées [16]. Malgré l’importance de la mise en évidence des anti-corps spécifiques du type chez les partenaires et les pa-tients ayant d’autres maladies sexuellement transmis-sibles, la sérologie spécifique du type a certaines limites. Il faut en moyenne 8 semaines pour que les anticorps soient produits contre la glycoprotéine G du HSV-2, et plus encore pour celle du HSV-1. L’absence d’anticorps

anti-HSV-2 n’exclut en outre pas un herpès génital à HSV-1.

Traitement et prévention

La forme du traitement de l’Herpès simplex est fonction de la fréquence et de la gravité des récidives, mais aussi de la disposition du patient à suivre l’option thérapeu-tique qui lui est proposée. Le but de ce traitement est la disparition plus rapide des lésions et douleurs, de même que la diminution de la fréquence des récidives. Malgré l’efficacité prouvée des analogues nucléosidiques contre les infections à HSV, en l’état actuel des connaissances ces substances ne permettent pas de prévenir l’établis-sement d’une infection latente chez l’être humain.

Herpès orofacial Le traitement des infections à HSV orofaciales est multi-modal, et en plus du traitement virostatique il comporte des mesures analgésiques et locales. En principe, les formes de traitement antiviral topiques ou systémiques peuvent être distinguées des stratégies thérapeutiques aspécifiques et symptomatiques. L’automédication a une grande importance chez les patients ayant un herpès labial récidivant. La très grande majorité utilise des spé-cialités topiques, très nombreuses sur le marché, mais pratiquement aucune étude n’en a prouvé l’efficacité clinique.

Traitement épisodiqueUn traitement virostatique systémique par aciclovir, vala-ciclovir ou famciclovir fait disparaître plus rapidement les lésions qui sont en outre plus discrètes. Bien que les meilleures caractéristiques pharmacocinétiques des nouveaux virostatiques (valaciclovir, famciclovir) ne donnent qu’une amélioration à peine perceptible des effets ci-dessus, leur posologie est plus agréable pour le patient, ce qui améliore sa compliance. Le traitement virostatique par voie orale s’étend généralement sur 5–7 jours pour les primo-infections à HSV-1 (tab. 2 ). Contrairement à l’herpès génital, dans lequel l’efficacité d’un traitement antiviral systémique (par aciclovir, fam-ciclovir ou valaciclovir) est bien documentée surtout dans les primo-infections et les récidives fréquentes, les résul-tats sont beaucoup moins parlants pour l’herpès labial. Ce qui explique aussi les schémas thérapeutiques par-tiellement différents de ceux de la forme génitale [17]. Le traitement de 5 jours anciennement recommandé pour l’herpès labial est de plus en plus remplacé par un traitement bref (short-course) [17]. Il a pu être démontré que 2 × 2 g de valaciclovir sur 1 jour accéléraient signi-ficativement la cicatrisation et qu’un traitement de plus longue durée n’apportait aucun bénéfice supplémentaire [18]. Ce schéma de traitement permet également d’aug-menter le pourcentage de lésions prévenues (aborted lesions). Un effet significatif peut également être obtenu par une dose unique de 1,5 g de famciclovir [19]. Ce trai-tement bref à hautes doses est au moins aussi bon que les schémas traditionnels et bien toléré. Ce schéma de traitement plus simple facilite la compliance des patients et permet en outre de réaliser quelques économies.

Figure 6Patient de 46 ans ayant une méatite douloureuse et peu d’écoulement séreux.

Tableau 2Schéma de traitement de l’herpès labial (orofacial).

1. Virostatiques

a) Primo-infection

Aciclovir (Zovirax®) 15 mg/kg PC 5 par jour p.o. pendant 5 jours

Valaciclovir (Valtrex®) 1 g 2 par jour p.o. pendant 7 jours

Famciclovir (Famvir®)* 500 mg 2 par jour p.o. pendant 7 jours

b) Infection récidivante

Aciclovir (Zovirax®) 200 mg 5 par jour p.o. pendant 5 jours

Valaciclovir (Valtrex®) 500 mg 2 par jour p.o. pendant 5 jours ou 2 g 2 sur 1 jour

Famciclovir (Famvir®)* 500 mg 2 par jour p.o. pendant 7 jours ou 1,5 g en dose unique

2. Analgésiques, antiphlogistiques

Acide acétylsalicylique

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (par ex. diclofénac, indométacine)

3. Topiques antiseptiques et astringents

a) Phase aiguë Badigeons, gels, pâtes

b) Stade de cicatrisation Topiques émollients (par ex. Bepanthen® onguent, Betadine® onguent, Fucidin® onguent)

* Dans le Compendium Suisse des Médicaments (édition 2013), seul l’herpès génital est enregistré comme indication à un traitement systémique par Famvir® chez les immunocompétents.

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Remarque générale: malgré la mise en route rapide du traitement systémique (si possible dans les 24 heures suivant la manifestation des premiers symptômes), l’effet obtenu sur le raccourcissement de l’excrétion virale et la durée de guérison est moins bon pour une récidive que pour une primo-infection à HSV. Avec cet effet minime seulement et l’évolution généralement sans problème de l’herpès labial, un traitement systémique n’est pas jus-tifié pour la très grande majorité des patients souffrant d’un herpès labial récidivant. Dans les primo-infections par contre, en cas d’importantes souffrances et chez les patients immunosupprimés, de même qu’en cas de com-plication (eczéma herpétique, érythème polymorphe), le traitement systémique doit être mis en route le plus rapi-dement possible. Un traitement virostatique suppresseur de l’herpès labial récidivant (aux mêmes doses que pour l’herpès génital) peut être envisagé si les récidives sont très fréquentes ou subjectivement très gênantes, chez les patients ayant un érythème polymorphe herpétique ou les immunosupprimés souffrant d’un herpès labial récidivant [17].

Herpès génitalLes options thérapeutiques sont les mêmes pour l’her-pès génital, mais à des doses différentes (tab. 3 ) [20, 21]. La grave évolution de la primo-infection justifie un traitement antiviral le plus rapidement possible (avant de recevoir les résultats du laboratoire). Selon l’importance des récidives, le traitement est épi-sodique, suppresseur ou uniquement par topiques aspé cifiques. Un traitement topique par médicaments anti viraux ne présente aucun avantage clinique démon-trable. Dans l’herpès génital récidivant, les traitements brefs ont des résultats comparables à ceux des traite-ments standards [22]. Un traitement épisodique pen-dant 1–5 jours, mis en route par le patient lui-même dans les 24 heures suivant l’apparition de symptômes, peut abréger de 1–2 jours la durée de l’épisode [23–26]. La résistance n’est pas modifiée par ces traitements brefs à hautes doses. Si les récidives sont fréquentes (>6/an) et la sympto-matologie est très gênante, un traitement peut être en-visagé sur 6–12 mois, qui supprimera env. 80% des récidives et aura un effet plus marqué sur la morbidité associée à l’herpès génital [27]. Ce traitement prolongé diminue également la transmission aux partenaires sexuels non infectés et aux nouveau-nés lors de l’accou-chement [27]. Du fait qu’une diminution de la charge virale du VIH a aussi pu être documentée, le traitement prolongé par analogues nucléosidiques semble égale-ment réduire la transmission de ce virus [28, 29]. En raison de son coût et de la réponse légèrement meilleure, la préférence est accordée au valaciclovir pour la sup-pression prolongée [30]. Le tableau 3 présente des exemples de traitements locaux symptomatiques.Les conseils de prévention d’une transmission donnés au patient font partie de son traitement. Il n’y a encore aucun vaccin efficace sur le marché [31]. Ce qui fait que la prévention se limite à l’abstinence de rapports sexuels (y c. oraux) pendant les phases symptomatiques et jusqu’à 1–2 semaines après la guérison, à l’utilisation de préservatifs en latex [32] et éventuellement au trai-tement antiviral prolongé. Aucune de ces mesures ne donne une protection complète (fig. 7 ). Le traitement suppresseur par valaciclovir diminue la transmission de 50% [33].

Tableau 3Traitement de l’herpès génital.

A) Primo-infection

1. Virostatiques

Aciclovir (Zovirax®) 200 mg 5 par jour p.o. pendant 5–10 jours

ou 3 400 mg p.o.

Valaciclovir (Valtrex®) 500 mg 2 par jour p.o. pendant 5–10 jours

Famciclovir (Famvir®) 250 mg 2 par jour p.o. pendant 5–10 jours

2. Analgésiques, antiphlogistiques

Acide acétylsalicylique

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (par ex. diclofénac, indométacine)

3. Topiques antiseptiques et antiphlogistiques

3.1 Phase aiguë Bains de siège ou compresses avec solutions iodées (par ex. povidone iodée, dilution 1:25), tannins (par ex. Tannosynt® liq, dilution 1:1000), application de teintures (vert brillant 0,5% aqueux, solution de pyoktanin) ou ZnSO4 en solution (0,05%)

3.2 Stade de cicatrisation Topiques émollients (par ex. Bepanthen® onguent, Betadine® onguent, Fucidin® onguent)

B) Infection récidivante

1. Eventuellement traitement local purement symptomatique

2. Traitement épisodique si <6 récidives par an

Aciclovir (Zovirax®) 200 mg 3 /j p.o. pendant 5 jours ou

800 mg 3 /j p.o. pendant 2 jours

Valaciclovir (Valtrex®) 500 mg 2 /j p.o. pendant 3–5 jours ou

2 g 2 /j sur 1 jour

Famciclovir (Famvir®) 125 mg 2 /j p.o. pendant 5 jours ou 1 g p.o. en dose unique

3. Traitement suppresseur (sur au moins 6–12 mois) si >6 récidives par an ou forts gênantes

Aciclovir (Zovirax®) 400 mg 2 /j p.o.

Valaciclovir (Valtrex®) 500 mg 1 /j p.o.;

évt si >10 récidives: 250 mg 2 /j p.o.

Famciclovir (Famvir®) 250 mg 2 /j p.o.

Figure 7Infection à HSV-2 du pubis malgré utilisation de préservatifs.

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La nouvelle classe des inhibiteurs de l’hélicase-primase, initialement portée aux anges, a régressé récemment en raison d’effets indésirables peu spécifiés. Les nou-veaux résultats sont attendus avec grande impatience, car leur mécanisme d’action est totalement différent de celui des analogues nucléosidiques, et ils permettraient de traiter les souches qui sont résistantes à ces analo-gues [34].

Correspondance:Prof. Stephan LautenschlagerChefarzt, Dermatologisches Ambulatorium des Stadtspitals TriemliHerman Greulich-Strasse 70CH-8004 Zürichstephan.lautenschlager[at]triemli.stzh.ch

RéférencesVous trouverez la liste complète et numérotée des références sous www.medicalforum.ch.