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Editions du CNRS Annuaire dr /Afrique du hbrd Tome XXIV. 1985 L'IDENTITE ET LE MASQUE LES PSEUDONYMES DANS LA LITTÉRATURE DE LANGUE FRANÇAISE EN ALGÉRIE «Je est un autre » écrivait Rimbaud. En usant d'un pseudonyme pour signer une oeuvre littéraire, il est bien connu que i'auteur veut faire croire qu'il est un autre. 11 travestit son identité, lui impose un masque ; il se présente ainsi voilé au public. 11 refuse le regard d'un autre sur soi et se camoufle pour diverses motivations. Ou bien encore l'auteur ne tient à apparaître que sous un autre aspect : glorieux peut-être, par exemple pendant une guerre révolutionnaire, en prenant le nom d'un héros ancestral connu. L'auteur qui use d'un pseudonyme se retrouve pour ainsi dire en face de son double. Dans le miroir, c'est le même mais aussi l'autre qui apparaît, à la fois le même et l'autre, soit-même dans une autre identité. Le travestissement s'opère d'ailleurs de différentes façons : parfois il cache, parfois il met au contraire en valeur. Quelquefois l'auteur change de sese dans l'usage du pseudonyme ; une femme prenant un nom d'homme ou inversement. La littérature de langue française en Algérie, conime d'autres littératures, connaît ces changements de noms d'auteurs, mais ils n'ont pas été étudiés. Il arrive souvent d'ailleurs que. non informés, certains prennent des noms arabes comme étant ceux d'auteurs de souche arabo-berbère alors qu'il s'agit de Français se dissimulant sous ces noms. On répète ainsi les mêmes erreurs d'articles en articles sur ces littératures. Les dictionnaires publiés sur cette question nous sont de peu d'utilité en l'occurrence, aussi bien le Diciionnaire des changen~ents de noms de l'archiviste Jérôme que le Dictionnaire des Pseudonynes de Henry Coston (1). Celui-ci cite bien quelques noms arabes, mais ne les situe pas géographiquement. Nous remarquons, en outre, quelques fantaisies. Ainsi Hamza Boubakeur est pris pour le pseudonyme de Al Sid Cheikh Boubakeur (2), ce qui ne peut que faire sourire ceux qui connaissent l'arabe et les expressions honorifiques. (1) Paris. Publc. H. COSTON. i.1. 1961 (réirnp. 1968). t. II. 1969.'î.111, 1980. (2) Si H~hlza BOUBAKEÜR a &té recteur de I'Institrit musulman de la Mosquée de I'nris de 1967 à 1982.

Identite Masque

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  • Editions du CNRS Annuaire dr /Afrique du hbrd

    Tome XXIV. 1985

    L'IDENTITE ET LE MASQUE

    LES PSEUDONYMES DANS LA LITTRATURE DE LANGUE FRANAISE

    EN ALGRIE J e est un autre crivait Rimbaud. En usant d'un pseudonyme pour

    signer une uvre littraire, il est bien connu que i'auteur veut faire croire qu'il est un autre. 11 travestit son identit, lui impose un masque ; il se prsente ainsi voil au public. 11 refuse le regard d'un autre sur soi et se camoufle pour diverses motivations. Ou bien encore l'auteur ne tient apparatre que sous un autre aspect : glorieux peut-tre, par exemple pendant une guerre rvolutionnaire, en prenant le nom d'un hros ancestral connu.

    L'auteur qui use d'un pseudonyme se retrouve pour ainsi dire en face de son double. Dans le miroir, c'est le mme mais aussi l'autre qui apparat, la fois le mme et l'autre, soit-mme dans une autre identit.

    Le travestissement s'opre d'ailleurs de diffrentes faons : parfois il cache, parfois il met au contraire en valeur. Quelquefois l'auteur change de sese dans l'usage du pseudonyme ; une femme prenant un nom d'homme ou inversement.

    La littrature de langue franaise en Algrie, conime d'autres littratures, connat ces changements de noms d'auteurs, mais ils n'ont pas t tudis. Il arrive souvent d'ailleurs que. non informs, certains prennent des noms arabes comme tant ceux d'auteurs de souche arabo-berbre alors qu'il s'agit de Franais se dissimulant sous ces noms. On rpte ainsi les mmes erreurs d'articles en articles sur ces littratures.

    Les dictionnaires publis sur cette question nous sont de peu d'utilit en l'occurrence, aussi bien le Diciionnaire des changen~ents de noms de l'archiviste Jrme que le Dictionnaire des Pseudonynes de Henry Coston (1). Celui-ci cite bien quelques noms arabes, mais ne les situe pas gographiquement. Nous remarquons, en outre, quelques fantaisies. Ainsi Hamza Boubakeur est pris pour le pseudonyme de Al Sid Cheikh Boubakeur (2), ce qui ne peut que faire sourire ceux qui connaissent l'arabe et les expressions honorifiques.

    (1) Paris. Publc. H. COSTON. i.1. 1961 (rirnp. 1968). t. I I . 1969.'.111, 1980. (2) Si H ~ h l z a BOUBAKER a &t recteur de I'Institrit musulman de la Mosque de I'nris de 1967

    1982.

  • Il faut donc essayer de dresser un inventaire mme non exhaustif - est-il besoin de le dire ? - de ces pseudonymes arabes ou franais dans la littrature de langue franaise en Algrie crite aussi bien par des Franais d'Algrie ou non que par des Algriens de souche arabo-berbre. La dissimulation du nom vritable de i'auteur peut tre colore de nuances diverses selon les uns et les autres. C'est pourquoi il est intressant de l'tudier selon l'origine des auteurs? franais ou algrienne.

    1. -PSEUDONYMES ARABES (OU BERBERES) UTILISES PAR LES CRIVAINS FRANAIS D'ALGRIE

    ou BCRIVANT SUR L'ALGERIE Signalons pour mmoire le cas d'Europens convertis la religion

    musulmane qui changent leur prnoni lors de leur entre dans cette religion. Ainsi le peintre franais Etienne Dinet (1861-1929) qui s'appela Nasr-Eddine et qui signa avec son ami algrien Slimane Ben Ibrahim Bamer (1870-1953) un certain nombre d'ouvrages entre 1902 et 1930. Il est bien connu que le chan- gement de nom signifie alors une sorte de sacralisation, de passage d'un inonde un autre, une renaissance, le dsir en mme temps d'tre intgr la nouvelle socit (3). En Tunisie, nous trouvons par exemple le nom de Chemseddine, celui d'un Franais devenu musulman. De nos jours, Rogei Garaudy prend le prnom de Radja.

    Nous rencontrons surtout dans les revues culturelles et les journaux du temps de la colonisation en Algrie un certain nombre de noms consonance arabe qui ne sont en fait que des pseudonymes d'auteurs franais d'Algrie. Par exemple, dans La Reuue algrienne et tunisienne, littraire et arlistique la fin du sicle dernier et au dbut du XX' sicle les noms d'El Djazary, Er-Raoui, El-Feriani, Bou Yabs, etc. En lisant les articles ou les contes signCs de ces noms, on s'aperoit qu'il ne s'agit pas d'Algriens arabo-berbres.

    Parmi les ouvrages, il faut distinguer des romans e t des essais. Nous nous arrterons aussi quelques cas.

    1) Auteurs de romans

    Bou Said tait le pseudonyme de Charles Schambion, commandant le le' Bataillon d'Afrique. Il a crit Les trois divorces de Yasmina (Paris, 1896), L e Sergent de Turcos et Lalla Mounina, roman passionnel et dhuenture, de la Tripolitaine au Maroc (Paris, 1891).

    Mustapha est le pseudonyme d'un officier d'Etat-Major, Th. Lung, signant Voyage aulour de ma tente. Sou,venirs niililaires (Paris, 1874).

    Seddik-ben-El-Outa est le pseudonyme de M"' Barbaroux crivant Fils de Grande Tenle (Paris, 1902) roman de murs sur les Arabes alriens, Mesleni,

    (3) Voir notre tude: Changcrnent des noms et prCnorn maglirCbins. Approches psycho. sociologiques . Bocunlenis nord-ofnrainr (Paris, ESNA). ""14. 7 luiilet 19fiS. 10 p.

  • UIDENTIT ET LE MASQUE 387

    roman d'tudes algriennes (supplment de l'illustration le 29 octobre 1898) et des pices historiques: La Rgence d'Alger (Alger, 1913), Le Coup duentail (Alger; 1914). Le pseudonyme est masculin tandis que l'auteur est une femme.

    Sidi Floucoun est galement le pseudonyme d'un Franais signant Contes d'amour et lgendes, suivies des Prceptes d'Alla Verdi (Paris, 1897). L'auteur est cens tre un Arabe.

    Benta Djebel, pseudonyme d'une Franaise Berthe Durand-Thiriot, signe un roman Simple histoire de Zineb la Naliat (Paris, 1935).

    Dans le domaine potique, mentionnons par exemple le pseudonyme qu'avait pris Emmanuel Robls pour signer Villes (dans Forge en 1947) et Bord du monde (dans Simoun en 1955 et Algria, printemps 1962) : Brahim Louari, qui tait le nom de son jardiner (4). 2) Auteurs d'essais

    Bou el Haqq, signifiant le Pre la Vrit ou le possesseur de la Vrit, est le pseudonyme d'un Franais signant La Crise (Blida, 1873).

    Mohamed Ben Barca, crivant Choses d:4lgrie (Evreux, 1891), est celui d'un Franais, lieutenant de spahis. Certains continuent de le prendre, par erreur, pour un Arabe. Il est d'ailleurs crit sous le nom de Muhamed Ibn Berakah dans Charles Tailliart (5) qui n'a pas d voir le livre. De mme dans d'autres bibliographies.

    Roland Elissa-Rhais, signant Dans l'intrt de ma France (Paris, 1931) opuscule e n marge de l'Exposition coloniale , est le pseudonyme de Jacob Rayniond Amar du nom de son pre (qui divora) : il reprenait le pseudonyme trs connu de sa mre crivant de 1919 1930. Il signa aussi par la suite Roland Rhas des articles dans Alger rpublicain.

    Lhaoussine Mtouggui et le pseudonyme d'un universitaire franais prenant un nom berbre pour signer Vue gnrale de l'histoire berbre (Alger, 1954) en vue de faire accrditer une thse berbriste trop appuye (6).

    Citons encore un certain Belabbas publiant un ouvrage de satires : Debout les Maures! Et la charge ... (Cavaillon, 1931). 3) Quelques cas mritent attention

    lsabelle Eberhardt (1877-1904). d'origine russe, ayant vcu en Algrie une vie mouvemente et &tant morte tragiquement dans l'inondation de Ain Sefra en

    ( 4 ) Meritionnons pour la 'l'unisie Edmond M.4tiIIS qui signait I

  • 1904, aimait s'habiller en arabe et circuler ainsi cheval dans les tribus (7). En ce qui concerne le pseudonyme, elle aimait signer ses lettres du prnom masculin Mahmoud Essadi ou encore Si Mahoud au point que des correspondants ont pris l'auteur pour un homme: elle signait cependant aussi Isabelle Ehnni, tant marie avec Slimane Ehnni (8).

    Elissa Rhas (1876-1940). de son nom de jeune fille Rosine Boumendil, ne Blida, signa de son pseudonyme douze romans et recueils de contes et nouvelles entre 1919 et 1930, auxquels il faut ajouter des contes et nouvelles disperses dans des priodiques jusque vers 1935. 11 serait trop long de tirer ici compllement au clair (si tant est que cela soit possible) l'iinbroglio de son cas. A-t-elle ou non crit seule ses livres? (9). 11 est certain qu'elle a eu besoin d'un secrtaire, vu son instruction qui tait peu pousse mais qui tait tout de mme relle. Raoul-Robert Tabet, son neveu, a fait fonction de scribe, mais Elissa Rhais possdait de sa famille juive un don rel de conter. Peut-tre peiit-on avancer qu'elle n'aurait pu publier si le neveu n'avait pas t l pour mettre parfaitement en forme et corriger. Quant Raoul-Robert Tabet il ne serait peut-tre pas devenu crivain si sa tante ne lui avait pas servi de source fconde d'histoires merveilleuses et romanesques, de lgendes, de contes, l'un et l'autre ajoutant encore aux in t r ipes passionnolles et aux amours frustres el interdites. Il importe d'ajouter que les ditions Plon ont prsent ds le dbut Elissa Rhais comme une Arabe musulmane. alors qu'elle tait juive, et que le contrat pour plusieurs iomans (il y en eut huit) devait aussi sous-entendre une littrature genre Mille et Une vui ils et forte coloration exotique, ce que le public de I'poque attendait (10). Les quatre autres romans parus chez Fayard et Flam- marion n'ont pas ce caractre exotique. Dans le cas d'Elissa Rhais la dissimu. lation e t l'ambigut furent peu ordinaires et pour elle et pour Raoul-Robert Tabet (qui tait aussi, selon Paul Tabet, son amant). S'ils ont crit ensemble oii si l'apport de Raoul-Robert a t trs important (secrtaire-ngre) ou dtermi- nant, i l eut mieux valu alors qu'ils mettent leurs deux noms comme auteurs.

    Abdallah Chamba tait le pseiidonyme de Franois Aiigiras (1925-1971). 11 publiait sous ce masque Le Vieillard el l'enfai~l (Paris, 1954) et Le Voyage des

    (7) Sur !e travestisnie propos d.1. EBERHARDT rail. Franqoise dEAL'RO\.FE. Lo Cuuronnr dc .sol>lc (Paris. Flnmmarion. 19681. pp. 318-320.

    (SI Voir Raeul STEPllhY . liral>?lle ERERH.4RDT 01, IO r~,lalii>!z d:! Sahorn. Paris. Flaniniarinti. 1930. prface de Victor NARGVERIITE: RenP-l.ouis DOYO , < c La iiie li-ogiqt~c da la boti,i noniade 8 , . 1ii.6rdanr ,\les Jouniaitrrs d'l. EPERVdRDT (Paris, [.a Connaissance. 192S) et Inhrtunes i i t ivi.escs d'une errante pifebdant ;lu pqus des snb!cs c l . EBERHARDT (Paris. Sorlot. 19441.

    (9) 1,e livre de Paul TABET (fils de Raoul-Rol>crt TARET). Elisao RH413 (Paris. Grassft. 1964). liresent6 comme s< inman i> dans cenaines ditions et sans i-e terme dans d'aiirros .- ce qiii est inquitant, entend d,-oiler le i6le capital joiiri. par son pre dans cette crearion lirt6raiir. \lais il icut trop prouver.

    \'air notre &tude sur Elissa RHAS in LC dJo8hwb dans i ' int@!~ai)~ / m n ~ o i ~ (Ai~-en-P~.ovence. RO:\JM. Edisud. 1985. pp. 47-80),

    (101 Cne critique parue dans In Rerue bleue (19?0l. titve: .. Cne nouvelle forme d'exotiime. >lm Elissa RWS ,P. l~ i i rnne FAbUE faisant pal.ler une Algrienne musulmane ci.it : I I y R une vieille jiiire. ancienne femnie de iahbin. qui se fait passel. gour une Arabe et raconte d'une munire fiiussc des hisruires sur notre race et iios traditions > S . tant dnnn qu'en France on aimp IPS mauresques de tautr conditions i v (On'erilolc 1930. IJaris. Grasset. 1930. p. 13).

  • I;IDENTITE ET LE MASQUE 389

    moris (Paris, 1958) o le rcit avait des rsonances autobiographiques. L'auteur tait n Rochester (USA) d'un pre franais et d'une mre polonaise migre. Il utilisait un nom arabe pour raconter les relations homosexuelles d'un jeune Arabe et d'un vieux colonel franais en retraite dans le sud algrien. On a cru longtemps qu'il s'agissait de tel ou tel romancier franais connu ; parfois on l'a cit comme tant un auteur algrien de langue franaise. En effet, beaucoup s'interrogeaient sur l'identit de l'auteur. Par la suite, Franois Augiras a sign de son vrai nom d'autres aiuvres qui n'avaient pas pour cadre le sud algrien (Il 11.

    Youcef Khader a sign six romans policiers dit& par la SNED Alger de 1970 1972 (12). 11 s'agissait de romans d'espionnage sur la guerre isralo- arabe o le hros est un Algrien, lieutenant sans peur et sans reproche, qui n'a aucuii regard pour les femmes, contraitement la pratique courante dans ce genre littraire. Les clichs abondent, le racisme affleure, mme aprs les interventions correctrices de l'diteur, les bons sont d'un ct, les mkchants de I'autre. On a cach le vritable noni de l'auteur : nous ne le dvoilerons donc pas. Mais cet auteur a bien voiilu dire qu'il tait Franais, nialgr le pseudonynie arabe, et membre dc la Socit des Gens de Lettres de France, ayant crit, en effet, plusieurs romans sous son nom vritable.

    Mina Boumedine a sign un roman de type pornographique L'Oiseau dans la niain (Paris, 1973). La mode tant l'obsession du texte et du sexe, l'ouvrace rpond sans doute cette attente. Quelques-uns ont lou ce ilon du paroxysme mditerranen N (13), reprsent, parait-il, par la Rpudiation de Boudjedra pour le mSme critique. L'diteur Relfond a fait passer I'auteur pour une Algrienne, comme Plon l'avait fait pour Elissa Rhais (elle. pour une Arabe musulniane). Gr, on voit mal coinment une Algrienne pourrait crire aujourd'hui un pareil texte. L'inceste est prsent, de mme que les citations de mystiques musulmans (Ristanii, Hallaj, etc). Mais l'accumulation langagires de termes argotiques et de nologismes invraisemblables dans le domaine de la sexualit dbride permettait de douter de l'identit de l'auteur. Nous pouvons dire maintenant que celui-ci (ou celle-l) est de nationalit franaise et non algrienne. Est-ce un homme :' Est-ce une femme ?

    Quelles sont les fonctions de ces pseudonymes arabes des auteurs non algriens ? On peut dire qu'au tenips de la colonisation il y avait l comiiie une appropriation. une mainmise sur le noin et l'identit, paralllement i la main-mise sur la terre. L'auteur en prenant iiri noni arabe ou berbre veut faire croire qu'il esr du milieu. de la socit dont il parle. qu'il en connat les us et coutiimes, !es murs . Le nom indigne . arabe n. fait couleur locale, authcntiqiie . L'auteur peut mme se periiiettre de parler comme s'il tait iin de ces Arabes. Il entend donc authentifier >) son ron;ari (mi son texte dans iiiie revue) en se rebaptisant avec un pattronyme alsrien.

    ( i l ) Voir le dcii icr Francois .AV!LK\Z dnr.s I1csipr.r; iParis:. no !8. printsmpr 19PZ. KI,. 25-15, 112: Voir notre Bihlii~,crapliic. ntithiidiqiic rr

  • On entend aussi piquer la curiosit des lecteurs, en pensant que parmi ceux-ci certains se laisseront prendre : ( 1 Tiens un Arabe qui crit! On augmente mme le plaisir en prenant un nom masculin lorsqu'il s'agit d'un crivain femme. Il y a l comme un transfert de personnalit qui serait presque passible d'une psychanalyse. Qu'Isabelle Eberhardt s'habille en homme et signe Mahmoud peut donner lieu divers commentaires (14). De mme pour Mina Boumedine faisant croire que les turpitudes tales et multiplies sont le fait d'une Algrienne. L'auteur franais a mme le piquant d'utiliser le nom du mystique musulman de Tlemcen : Boumedine ! Et l'diteur va jusqu' nous donner des informations sur le lieu de naissance et l'itinraire de cet auteur soi-disant algrien, qui signe d'un prnom fminin : Mina.

    La dissimulation de l'identit est parfois une volont de tromper le lecteur sur un plan politique; en adoptant une identit berbre, par exemple pour Mtouggi, on espre mieux fonder une thse.

    On note parfois aussi une volont d'ironiser sur les noms arabes. Ainsi pour l'auteur qui signait Bou Yabs.

    Youcef Khader signait ses romans policiers d'un nom algrien pour se faire diter la SNED, paraissant intgr et esprant tre davantage lu. D'autres auteurs trangers utilisaient les pseudonymes de Nedjma Ramen et de Djamel Eddine, par exemple, pour signer des articles sur Mouloud Feraoun dans El Moudjahid. Cessant d'tre perus comme auteurs trangers, ils taient ainsi mme de faire passer 1) plus facilement leurs textes. Une autre Franaise signait Nora Allem des nouvelles dans Alger rpublicain en 1964.

    Pour Jacob-Rayond Amar, dit Roland Rhais, utiliser le pseudonyme connu de sa mre pour signer en 1931 une brochure du nom de Roland Elissa-Rhas tait sans doute un moyen de valoriser sa plume. Mais c'tait aussi une faon de rcuprer son identit de fils face Raoul Tabet, tout la fois neveu, secrtaire et peut-tre CO-auteur de Elissa Rhais. Il crivait au nom et avec le nom de la mre. De nos jours c'est Paul Tabet qui crit son roman Elissa Rhai's au nom de son pre, fidle, lui. dit-il, au rcit que lui en fit celui-ci.

    Le colonis durant la priode coloniale devait sans doute trouver un peu amre cette appropriation du nom par l'tranger: C'est pour mieux nous avoir ! devait-il penser devant ce vol et de cette falsification. Non seulement ils parlent mal de nous dans leurs romans, mais encore ils se senrent de nos noms pour le dire ! Telle devait tre une raction possible. Il est vrai qu' cette poque quelques romanciers algriens mmes avaient tellement intgr la manire de voir et d'tre de l'autre qu'ils avaient intrioris, en effet, les critiques des colonisateurs contre la socit domine.

    On ne sait plus qui est qui, et l'identit elle-mme est donc fausse, jusqu'au jour o les masques les mieux ajusts tombent , comme l'crivait Jean

    (14) Voir Denise BR4HIhlI. Reqiiieni pour Isabelle. I'aris, I'ublisud. 1983. 179 p.

  • Amrouche dans L'ternel Jugurtha )) (15). Le jeu des masques a fait long feu n, crivait-il encore la fin de l'anne 1954 (16).

    Prudence, mimtisme, mystification, supercherie, dsir momentan de s'intgrer, main-mise sur ce qui appartient l'identit profonde, tous ces masques un jour tombent e t chacun est contraint de se dvoiler et de se montrer le visage nu. Mais enfin la supercherie aura pu jouer un temps et engager le lecteur dans une certaine lecture des romans, se persuadant peut-tre qu'il lit une criture dite fminine , alors que l'auteur est un homme, ou inversement, se convaincant de l'authenticit du rcit, alors que l'auteur est un tranger. Les critiques ont cru longtemps qu'Elissa Rhas tait arabe et musulmane; l'un d'eux par exemple s'tonne qu'elle s'intresse tellement aux Juifs (cf. son roman Les Juifs ou la fille dzlazar), elle Arabe (alors qu'en ralit elle tait juive).

    Christian Dedet, propos de Mina Roumdine, parlait des potes

  • Jugurtha (18). ct de Zorro, Khroutchev, Mystre, etc. On passait par l'imaginaire un autre monde, celui des hros et des guerriers invincibles, jusqu' l'indpendance en 1962 o les masques tombaient et o il fallait encore affronter les ralits quotidiennes de l'aprs-guerre. Quelques-uns ont nanmoins conserv leur nom de guerre acquis dans les maquis.

    Nous en tenant ici la littrature de l'Algrie en langue franaise, il faut mentionner d'abord cette dtestable habitude de placer souvent le prnom aprs le patronyme, trompant ainsi les lecteurs. Le cas de Kateb Yacine est bien connu. On trouve l'auteur class la plupart du temps Yacine dans les dictionnaires et mme dans des bibliographies labores par des Algriens (19). Parfois, on trouve la moiti du nom simplement : Ben; d'autres fois le prnom seul : Amine, Areski, Assia. Celle-ci signait un roman policier insipide God el la Mnit (Paris 1973); son patronyme est Dridi; elle est originaire de Tbessa. Amine signe un recueil de pomes Colporteur (Alger, 1980) et un autre Les Mains de Fatma (Alger, 1982), occultant son nom, alors que le catalogue de la SNED le donnait ouvertement : Khan. Parfois, l'auteur lui-mme crit son nom avec des variantes : Kouriba, Koriba, Koribaa, avant de le stabiliser. II existe galement des auteurs ou des diteurs mal renseigns ou fantaisistes : ainsi autrefois dans un petit manuel de lecteur en franais au Maghreb nous trouvons un pome de Jean Amrouche sign Maxula Rads. I'auteur de la petite anthologie ayant pris pour le nom de l'auteur le nom du lieu o habitait Amrouche (prs de Tunis) et qui situait son pome. Yessad sur un recueil est crit Yassad sur un autre. Ces mutilations, occultations, mauvaises lectures ou erreurs contribuent garer le lecteur et masquer, volontairement ou non, l'identi.

    1) Les pseudonymes se retrouvent assez souvent dans les signatures de terles de fiction: nouvelles, romans, pomes.

    Abdelkader Hadj Hamou signait Fikri son essai dialogu avec Kobert Randau Les Compagnons du jardin (Paris, 1933) (20). Mohammed Sifi est le pseudonyme de Ali Belhadj qui avait crit en 1942 Souvenirs d'enfance d'un bledard (indit). Belqacem Tedjini signe Louise et Justin de Chersoux en 1938 un recueil de contes marocains Autour de la mda (Tanger, 1938). Mohammed Bekboucha de Tlemcen emploi bien son nom en tte de ses uvres potiques, mais aprs la mort de son oncle il fait ajouter un k n, comme dans le nom de son oncle Bekkhoucha. La rectification est porte I'Etat-civil en 1962 (21). Noureddine Aba emploie pour son premier recueil en 1951 le noni de Abaoud Aba. Mohammed Haddadi, pour son premiei recueil de pomes en 1954, se cache sous le nom de Djim Laforge. Le pote Ahmed Chanii, pendant la guerre de

    (18) CI. notre 'tude cite Changement des noms... . Dorunimis nord.oficoins. Voir aussi pour la Tunisie : Paul MARTI. Folklore tunisien. I.'anoniastiquc des noms propres de personnes ,>, Ifeoue des Eludps islamiques. 1936. cahier IV. pp. 428.132.

    (19) La plus belle perle est le nom dc K4TF.R pinc sous la lettre R (= Racine IKatob) dans le Cmpouiiloi(no13, janvier 1959. i f Dictionnaire des contemporains. II). s1ot.s que dans le cornnienlaire de la longue notice on mentionne bien KATEB Yacine.

    (20) Abdeiltader HADJ HAhlOU axait deux adresses dans Alper. rune sous ce noni et l'aiitre soiis le nom de FIKRI: cf. LES ildresses du 7bul Alger (Alger. Capek. 19%%. pp. 63 et 101).

    (21) Iuous remercions Abderrakim I

  • L'IDENTIT ET 1.E MASQUE 393

    libration, signait Tank du nom du gnral qui avait travers le fameux dtroit. Abdelhamid Batar est le pseudonyme de Tahar Baki. Reda Falaki qui a crit Le Milieu el la marge (Paris, 1964) est le fils de Hadj Hamou. Henri Kra a comme patronyme Cachin (issu d'une union mixte, il est le petit-fils de Marcel Cachin, minent membre du Parti communiste franais). Kra est l'quivalent de Chra. le col de l'Atlas qui domine la ville de Blida. Mohammed Dib signait Diabi son premier pome dans Les Lettres (Genve, 1946) mais ce n'tait pas un pseudonyme. Jamel Amrani mettait le nom de Jamil Kabab la fin de ses pomes dans Faiza (Tunis) en novembre 1962. Mohammed Benmebkhout est le patro- nyme de Hamid Skif, connu sous ce dernier nom comme pote, nouvelliste et journaliste. Hacine Bouzaher use du pseudonyme de Sofiane Zuhier pour signer une nouvelle dans Algne-Actualit en 1968 (Zuhier est le prnom de son pre, Sofiane celui de son fils ain). L'Encre d'un fait diriers (Pans, 1984) est sign Ahmed K...; sans plus, mais l'auteur dvoilera son nom dans un autre roman paru en 1986. D'autres exemples pourraient sans doute tre donns (22).

    Parmi les humoriste, Saladin, auteur de l'album de bandes dessines Les Migrations de Djeha (Paris, 1979), est le pseudonyme de Slimane Zeghidour. El Slim, bien connu pour son Zid, ya Bouzid (Alger. 1980). est celui de Menouar Merabtne. Mohammed Souheil Dib a pris le nom de Nys Ladide pour publier Cancre dixit (Paris, 1977) et Les Analphabbtes (Alger, 1984), florilge, l'un de perles scolaires, l'autre de perles recueillies dans l'administration en Algrie.

    Parnii les auteurs fminins, romancires et nouvellistes, sur les vingt auteurs ayant publi de 1947 a 1986 inclus. six ont eu recours un pseudonyme : Assia Djebar (Fatima-Zohra Imalayne). Acha Lemsine (Ladi), Safia Ketou (Zohra Kabhi), Hakima Tsabel (Tamani Redjimi), Hawa Djabali (traduisant Eve) et Bediya Bachir. Nous avons mentionn dj Assia qui occulte son patronyme Dridi (elle travaille actuellement au mensuel Lui Paris, s'occupant des photos de charme ). Myriam Ben occulte pareillement une partie de son patronyme. Deux surs signent Safa Wakas, rduisant un seul les deux prnoms. Aisha cache son patronyme : Bernier pour son tmoignage (Dcharge publique, Paris, 1980). En ce qui concerne les potes, de 1963 1966 inclus, sur trente auteurs quatre utilisent un pseudonyme : Anna Gerki (Colette Anna Grgoire, pouse Melki' dcde le 6 janvier 1966), Assia Djebar (cite sripra), Safia Ketou (cite supra) Taos Sadjine. Asha (Bernier) ne signe son recueil que de son prnom, comme pour son tmoignage.

    Parmi les auteurs de tmoignages et de rcits de vie, outre Asha, mentionnons encore Zoubia Bittari, de son vrai nom Louise Al-Rachedi, signant mes saeurs n~usulnianes, pleurez (Paris, 1964) et Lela Aouchal, auteur d'un tmoignage, Une autre vie (Alger, 1970).

    (22) Un Marocain. Salim JAY. utilise le nom d'Irne REFRAIN pour signer un roman 'h serns nabab mon fils (Paris. 1982). parodiant celui d'Irne FR41N. Le iVobob (Paris. 1982). Titouan LAhlA'LOC (auteur du 'Ik6sor de 1:4llos. Paris. 1983) a ru son prnom Antoine transformer par ses proches et la gouvernante en Petit Antoine et l'itouan, cnlrninant ainsi une sorte d'quivoque sur I'ideiititii marocaine D de I'auteur.

  • 2) Parmi les essayistes, nientionnons Moutawakkil pseudonyme de Mo- hand Tazerout; crivant en 1960 L'Algrie de demain ou encore Hesnay-Lahmek qui n'tait autre que Hocine Lahmek signant les Lettres algriennes (Paris, 1931). Ismal Hamet (plusieurs ouvrages dont Histoire du Maghreb en 1923) francisait son nom en changeant le d >) (Hamed) en t . Fadla M' Rabet, auteur de La Femn~e algrienne et des Algriennes (1964 et 1967) est galement un nom d'emprunt (le patronyme tant Abada). Saadia et Lakhdar prfraient signer de prnoms leur essai L'Alination colonialiste et la rsistance de la famille algrienne (Lausanne, 1961).

    Du reste, dans l'ordre de la politique, il faudrait citer ici un certain nombre d'hommes politiques qui, dans leurs uvres, utilisaient un pseudonyme : Ferbat Abbas (Karnel Abencerages autours des annes 1930), Ahmed Tawfik al-Madani (Mansour en Tunisie. au temps du Destour) par exemple. Le prsident Boum- dienne conservait son nom de guerre, au lieu de Boukharouba, son vrai nom.

    Des auteurs de tmoignages et de rcits de vie se dissimulent galement sous un pseudonyme ou sous un prnom : Ahmed (Une oie d'Algrien ..., Paris, 1973), Mohammed (Journal de Mohammed, Paris, 1973), Haussan (Comment prira l'Algrie franaise, 1938). cachait R. Zenati, romancier de Bou-el-Arouar (Alger. 1945).

    Mentionnons aussi pour mmoire que dans certains romans autobiogra- phiques, entirement ou en pertie, o Je parle de Je. le nom du hros est une contraction ou un arrangement de celui de l'auteur : Fouroulou Menrad dans Le Fils du pauvre du Mouloud Feraoun.

    3) Deux cas mritent d'tre signals : Taos Amrouche (1913-1976) a chang plusieurs fois son nom d'auteur au

    cours de ses publications. Marie au peintre Bourdil, elle signait alors Marie-Louise Bourdil-Amrouche un texte dans L'Arche en octobre 1946 (no 20), cxtrait de Jacinthe noire, roman: qu'elle faisait paratre en 1947 sous le nom de ]\farie-Louise Amrouche (Marie-Louise tant son prnom de baptme (23); Rue des tambourins, roman (Paris, 1960) tait sign Marguerite Taos (Marguerite, prnom chrtien de sa mre, et Taos le prnom kabyle de Marie-Louise; Taos veut dire le paon). Le Grin magique, contes, pomes et proverbes (Paris, 1966) est publi sous le nom de Marguerite Taos Amrouche. Jacinthe noire est rdit en 1972 avec le nom de Taos Amrouche. C'est sous ce nom que paratra en 1975 le dernier roman L'Amaril imaginaire. La rcupration de soi et de l'africanit a t peu peu opre, avec des variantes, de 1944 1975.

    Jean Snac (1926-1973), enfant naturel de pre dit inconnu. a sign des textes et des pomes sous le nom de Grard Comma, Jean Comma, du nom de sa mre, galement sous le noin de Christian Prs. II signa Snac ensuite (il fut reconnu par Edmond Snac l'ige de trois ans, aprs le mariage de sa nire). Oprant une prise de conscience politique dans le sens de l'Algrie combattante

    (23) Avant son mariage. Taas .&4lROCCHE avait publi des contes sous Ic nom de Warie.lauie .%\IROtiCIIE dans la Revue d:Aigrren ! N d . Nous trouvons aussi de nouveau Ir ninis prnom et nom dans Alp~r ia en 1949.

  • L'IDENTITE ET LE MASQUE 395

    et de l'identit algrienne, il signa du pseudonyme Yahia el Ouahrani (Jean l'oranais) pendant la guerre de libration. Il voulait tre reconnu parmi les frres algriens fils de la Mre Algrie , mme si d'aucuns lui disaient qu'il n'aurait pas sa place dans l'Algrie indpendante, parce qu'il s'appelait Jean. 11 tendait donc d'arabiser son nom, pendant que le chemin de l'identit passait par l et que la mtamorhose du nom masquant son patronyme Snac (port d'ailleurs, nous disait-iil, comme un pseudonyme) Iiii permettait de montrer qu'il n'tait pas Franais (24).

    Actuellement, il y aurait d'autres noms mentionner. Des Algriens publient, en effet, par prudence sous des pseudonymes des essais d'ordre politique, des recherches d'ordre conomique, quand leurs positions vont en sens contraire du discours officiel. Cela arrive aussi pour des textes portant sur des problmes de langue berbre et de revendication culturelle berbrophone, par exemple. Nous ne dvoilerons donc pas ces pseudonymes.

    Quelles sont les fonctions de ces pseudonymes d'auteurs algriens ? II est clair que la plupart du temps ils servent dissimuler l'identit, soit par crainte de la rpression, soit pour ne pas engager la famille. Ce peut tre le cas quand on n'utilise que le prnom sans dvoiler le patronyme. 11 en va de mme quand une pouse algrienne ne tient pas a se faire connatre sous son nom de mariage: on prfre alors tre discret, et ce peut tre aussi un dsir du mari.

    Parfois, il s'agit d'une rappropriation d'identit comme pour Taos Amrouche. Dans ce mme ordre d'ides, on peut orientaliser son nom pour mieux s'intgrer au monde arabe, ou au contraire le franciser (Haniet) par dsir d'assimilation politique au coloniateur. Quant Jean Snac, signant Yahia el Ouahrani, il voulait lui aussi s'intgrer davantage l'Algrie et montrer par la mtamorphose du nom qu'il n'tait pas Franais.

    11 se trouve aussi de nos jours que des algriens utilisent des pseudonymes berbres trs spcifiques, sans rsonance arabe. pour signifier leur volont d'un quant--soi-berbre.

    Prudence par rapport la faniille ou l'autorit rprssive, mimtisme pour mieux s'intgrer culturellement et politiquement (orientalisation. occidenta- lisation, berbrisation du nom), dsir de drouter le lecteur ou dsir d' habiter son nom , comme disait Jean Amrouche pendant la guerre d'Algrie, ces dmarches ne fonctionnent en fait parfois que quelque temps.

    11 arrive un moment o l'on veut quand ninie profiter du succs. sc dvoiler pour mieux bnficier donc de l'entre en gloire (si la russite littraire survient).

    (24) Voir l'ouvrage Jean St,':.IC i,ivoril (Paris. St. Germnin-des-Pi.& 19SI.?i5 p) arec notre rssni a Jpsn SEKAC. pote pour habiter son nom et nos Indications biographiques M. J. SESAC eiinsit dissiminlei. des ~ 1 6 % dans scs pomes. Poiii. ne citer qu'iin exemple. dans CiIvens de beourr' (Kode. Subervie. 1965) ces deux vers (p. 231 : Comme Bella Akhmaduulina ! Et comme son fils aux rilti'aves >.. 11 faut voir dans ce Fils (Ben en arabe). Ben Bella. alors eniprionn. Vair sur Jean SGnac les rencontver de fin septembre 1983 aux Archives de la Ville de Marseille: Posie au Sud cl Io nuui.rlle poric olgi,ir.,ine d'krprrssioii /rori

  • Le danger disparu, la famille acceptant le fait accompli, l'intgration tant ralise, etc. on ne joue plus avec le masque. Il fait partie de la personnalit, il est connu comme tel. On est clbre avec lui. Les noms de guerre, par exemple, sont conservs, car la crainte des reprsailles a disparu. Mais l'inverse, des auteurs n'ont utilis leur pseudon~me qu'une seule fois, comme s'ils avaient eu hte par la suite de l'oublier.

    Dans ce jeu de masques, J e n tient parfois ne pas tre oubli. Il choisit un pseudonyme apte le valoriser. Ainsi Ahmed Taleb Ibrahimi. ministre des Affaires trangres en Algrie et fils de l'ancien prsident de l'Association des Ulania rformiste, signait Ibn el-Hakim (le fils du sage) un long article : .< Rflexions sur la personnalit nationale algrienne dans El Moudjahid du 25 mars 1981. On sait bien qu'un jour ou l'autre le patronyme sera dvoil: on saura d'une faon ou d'une autre de qui il s'agit. On ne tient pas d'ailleurs . ce que le masque passe inaperu dans la mesure o il donne une rsonance un peu solennelle la parole.

    En gnral. il semhle bien qu'on n'entend pas se rabaisser, se dvaloriser en empruntant un autre nom; on ne choisira pas un jumeau noir, moins que ce ne soit un a Soleil noir (25). qui est encore une faon d'tre remarqu mme si ce soleil ne rutile pas.

    L'crivain qui met en valeur son moi en publiant une uvre littdraire, mme s'il doit dissimuler et jouer avec son identit, ne tient pas finalement tre totalement autre . T,e jeu est entre le mme et l'autre. Jeu de socit s'entend. car on compte bien sur le regard (le l'autre.

    Jean Datiui

    ( 2 5 ) C c s t ainsi que I ' i c~ iv i i in i u n i s i ~ n .\luhaninied AT1ZI i igiit! Cl~ei i is XdDIR s r i i.criioil. iIc co i i i t .~ e i de po3rnrs. II rioi.qiic ji l'ncru$atir,n de inai.ci;si.inir quon iu i n fa i te que \irdi;e-i i ~ i i tci.ri,r ii,abr d3sr:olopie dsignant I'antipodr dii Zenitli. LP psc,ilciony~ie s i ~ i ~ i j i e 8 , Soleil nuit. OU rn ciipsr p~ur opposition au ruri!eilient du s o l ~ i l dc son znirh ., %zii,ps. ? , a i 19PO. i$ i i r i .~ icwl .