Histoire de France

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Michelet, Jules (1798-1874). Histoire de France. 1-5, [Livres 1-5, 1-1461]. 1833.

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HISTOIRE

DE

FRANCE.

PARIS, IMPRIMERIEDE DUCESSOIS , Quai desAugustius, 55.

HISTOIRE

DE

FRANCE

PAR

M.

MICHELET,

PROFESSEUR SUPPLEANTLA FACULT ES LETTRES, A PROFESSEUR D A L'COLE ORMALE, DELASECTIONISTORIQUE CHEF N H AUX DUROYAUME. ARCHIVES

TOME PREMIER.

PARIS. LIBRAIRIE CLASSIQUE DE L. HACHETTE, RUEPIERRE-SARRAZIN , 12. 1855

JE ddie et ceux Je l'offre mes.

ce livre qui

mes matres, ne sont plus. lves devenus mes surtout

ceux

qui

vivent

mes

matres

eux-m ceux qui

Je l'offre bien au

critiques,

voudront le mettre science. scientia.

le corriger niveau des

le refaire, , l'amliorer, de la ultrieurs progrs et multiplex erit

Plurimi

pertransibunt,

Mon livre est sorti tout

(la critique entier

la plus

svre

en conviendra) Cependant

des sources

je dois beaucoup rains. C'est un bonheur

quelques-uns moi devoir pour ou

originales. de nos

contempoc'est un de le dire,

leur ami pour mer les hommes auxquels le plus troit, la parent nion histoire de la pense. de notre

de nomdisciple, il se sent uni par le lien la commuintellectuelle, leur la consciencieuse Sismondi, les beaux

L'immense, vnrable

VI rcils m'ont vantage faits, avant sociaux obligations des deux Thierry, voil les ouvrages qui ne dadois encore l'histoire des point faits mes serait jamais intrt

Toutefois jamais quitt. ceux de M. Guizot il a vu l'histoire son Cours une et intellectuels. envers des telle

je 1. Sous

ides.

Il n'existait

des grands analyse numrer Si je voulais historien, la liste

l'illustre

Il en est une que je ne reconnatrai longue. du bienveillant selon mon coeur; je parle pris mes travaux. qu'il a toujours Pour quoi cd visage expliquer en des dire quoi deux sous je me coles rapproche, qui m'ont

en pr-

je m'loigne , il faudrait la mthode

historique.

de vue j'enquel point de Mais pour traiter

1 Je parle ici des crivains qui ont embrass l'histoire de France dans son ensemble. Je reconnatrai en temps et lieu mes obligations envers ceux qui ont trait avec un mrite suprieur, quelque partie de notre histoire politique ou littraire. Je dois nommer entre autres les savans continuateurs des Bndictins, et mes collgues de la socit des Antiquaires de Normandie. J'aurai aussi occasion de dire tout ce que je dois plusieurs savans trangers , J. Grimm , Gans, etc. Le Manuel de M. Gieseler m'a t de la plus grande utilit pour l'histoire ecclsiastique. Je parlerai des deux autres et de quelques-uns de leurs compatriotes en tte de mon troisime volume. Pour n'oublier aucune de mes obligations, j'en mentionnerai une de nature diffrente. Plusieurs de mes lves m'ont habilement second, particulirement MM. Monin, Duruy, Ravaisson. Le dernier m'a aid avec autant d'intelligence que de zle dans les notes , claircissemenset tables des deux premiers volumes. Voyez la fin du deuxime volume les circonstances personnelles qui ont dcid cette publication.

VII la mthode, mon livre. Un mot il faut Qu'il avoir dise autorit. Je laisserai s'il peut. gnral Elles romain, leur : sont unies, dans l'emparler

sa mthode, sur l'ordre les races. l'empire

seulement

Au premier volume, dans mais non mles

pire carlovingien. Au second, les provinces, leur tendance vers l'unit riode avec fodale saint de notre la fin

gographie

monarchique. histoire finit et l'idal avec du

; puis, Cette p1300,

avant

Louis,

moyen-ge.

moderne L'ge avec l'abaissement de Boniface Au troisime leurs nalit, Dtermination VIII.

commence de

la papaut

Philippe-le-Bel, , avec le soufflet leur

volume,

emprunts de la nationalit

les institutions; aux institutions franaise.

origi-

trangres.

Aux quatrime et cinquime de cette nationalit depuis nos jours, le grand jusqu' de l'ordre chie, proclam parte. Je viens de rsumer l'histoire civil, consomm dans lentement par l'Europe la

le progrs sicle le quatorzime de l'galit et ouvrage volumes, prpar par la Monarcouronn et de Bona-

Rpublique, par les victoires

politique,

l'histoire

VIII extrieure. Mais, dans mon livre, elle est claircie

intrieure, par celle de la philosophie par l'histoire du droit et de la littrature. et de la religion, si l'oeuvre ne l'est Ce est grand, L'effort pas. rcit et un systme n'est , une pas moins qu'un de la France, sa diversit de races formule tension loppement du drame est gographique, considre et de provinces, d'autre part dans un tissu dont du d'une dans part dans son exson dvetrame est le que

dans

chronologique, national. C'est

l'unit dont

croissante la

et la matire, l'espace et la pense. Tel est temps nous avons poursuivi.

la chane moins l'idal

1ernovembre 1833.

HISTOIRE

DE

FRANCE.

LIVRE CELTES.

PREMIER. IBRES. ROMAINS.

CHAPITRE

PREMIER.

Celteset Ibres.

LE caractre commun de toute la race gallile philosophe d'aprs que, dit Strabon Posidonius, c'est qu'elle est irritable et folle de guerre, prompte et sans malignit. Si on au combat, du reste simple ils marchent ensemble droit l'ennemi, les irrite, s'informer d'autre et l'attaquent de front, sans on en vient aisment chose. Aussi, par la ruse, bout ; on l'on veut, I. les peu attire combat on veut, o quand les motifs ; ils sont touimportent 1 au

arme d'autre n'eussent-ils que leur prts, jours Toutefois et leur audace. force par la persuasion, aux choses utiles ; amener sans peine ils se laissent litet d'instruction de culture ils sont susceptibles taille et de leur nombre, Forts de leur haute traire. aisment en grande ils s'assemblent foule, simples en et spontans, volontiers sont prenant qu'ils 1. Tel est main la cause de celui qu'on opprime de la philosophie sur la plus le premier regard et la plus des races huperfectible sympathique maines. de ces Galls ou Celtes n'est d'abord Le gnie autre chose que mouvement, et conqute; attaque c'est par la guerre et se rapprochent que se mlent les nations de guerre et de bruit, antiques. Peuple ils courent le monde la main, ce l'pe moins, semble, par avidit que par un vague et vain dsir brisant, d'agir; de voir, de savoir, dtruisant, faute de pouvoir encore. Ce sont les produire du monde enfans de grands naissant; mous, corps blancs et blonds et d'ha; de l'lan, peu de force leine 9 ; jovialit froce, espoir immense; vains, rien encore rencontr eux. n'ayant qui tnt devant Ils voulurent aller voir ce que c'tait cet que ce conqurant de l'Asie, Alexandre, devant la face 2uv7vax1ov1cf ro Stxsa-flai Soxoaiv e2 TWVcrWiov. Strab. , lib. IV, 211. Diodor. Sic, lib. V:... TolcrSs u.ri6pK-> xo Tijv Kijsiv hpoirofia.1. (Ed. Casaubon, IV, p. 157. ) On cite encore un passage de Denys le Periegte ; mais plus vague et peu concluant ( v. 565 ). Celui en qui ce systme trouve son unit, c'est SAMHANle mauvais esprit ( Satan ), l'image du soleil ( littralement Sam-han ), le juge des mes, qui les punit en les renvoyant sur la terre, ou en les envoyant en enfer. Il est le matre de la mort ( Bal-Sab ). C'tait la veille du 1er novembre qu'il jugeait les mes de ceux qui taient morts dans l'anne : ce jour s'appelle encore aujourd'hui la nuit de Samhan ( Beaufort et Vallancey, Collectanea de rebus hibernicis , t. IV, p. 83 ). C'est le Cadmilos ou Kasmilos de Samothrace, ou le Camillus des trusques, le serviteur ( coismaol, cadmaol, signifie en irlandais serviteur ). Samhan est donc le centre d'association des Cabires ( sam, sum, cum, indiquent l'union en une foule de langues ). On lit dans un ancien Glossaire irlandais : . Samhandraoic, eadhon Cabur, la magie de Samhan, c'est--dire . CABUR , et il ajoute pour explication : Association mutuelle . Cabur, associ; comme en hbreu , Chaberim; les Consentes trusques ( de mme encore Kibir, Kbir signifie Diable dans le dialecte maltais, dbris de la langue punique. Creuzer, Symbolique, II, 286-8 ). Le systme Cabirique irlandais trouvait encore un symbole dans l'harmonie des rvolutions clestes. Les astres taient appels Cabara. Selon Bullet, les Basques appelaient les sept plantes Capirioa (?) Le nom des constellations signifiait en mme temps intelligence et musique, mlodie. Rimmin, rinmin, avaient le sens de soleil, lune, toiles; rimham veut dire compter; rimh, .nombre(en grec, p\>0u.o;, eu franais, rime, etc. ). . Il semble que la hirarchie des Druides eux-mmes composait une vritable association cabirique, image de leur systme religieux. Le chef des Druides tait appel Coibhi '. Ce nom, qui s'est ' Bed. Hist. Eccl., II, c. 13 : Cui primus pontificum ipsius Coifi continuo

( 451

)

conserv dans quelques expressions proverbiales des Gals de l'Ecosse, se lie encore celui de Cabire. Chez ls Gallois, les Druides taient nomms Cowydd, associs a. Celui qui recevait l'initiation, prenait le titre de Caw, associ, cabire,, et Bardd caw signifiait un barde gradu (Davies, myth., 165. Owen, Welsli dict. ). Parmi les iles de Scilly, celle de Trescaw portait autrefois le nom d'Innis Caw, le de l'association, et on y trouve des restes de monumens druidiques ( Davies ). A Samothrace, l'initi tait aussi reu comme Cabire dans l'association des dieux suprieurs , et il devenait lui-mme un anneau de la chane magique (Schelling , Samothr. Gottesd., p. 40). La danse mystique des Druides avait certainement quelque rapport la doctrine cabirique, et au systme des nombres. Un pascit par Davies, sage curieux d'un pote gallois, Cynddelw, p. 16, d'aprs l'Archologie de Galles, nous montre Druides et Bardes se mouvant rapidement en cercle et en nombres impairs, comme les astres dans leur course, en clbrant le conducteur. Cette expression de nombres impairs nous montre que les danses druidiques taient, comme le temple circulaire , un symbole de la doctrine fondamentale , et que le mme systme de nombres y tait observ. En effet, le pote gallois, dans un autre endroit, donne au monument druidique le nom de Sanctuaire du nombre impair. Peut-tre chaque divinit de la chane cabirique avait-elle, parmi les Druides, son prtre et son reprsentant. Nous avons vu dj, chez les Irlandais , le prtre adopter le nom du dieu qu'il respondit ( premier prtre d'Edwin, roi de Northumbrie, converti par Paulinus au commencement du septime sicle. Macpherson., Dissert, on the celt. antiq.) Coibhi-draoi, Druide coibhi, est une expression usite en Ecosse , pour dsigner une personne de grand mrite ( Voy. Mac Intosh's gaelic proverbs, p. 34. Haddleton, notes on Tolland, p. 279 ). Un proverbe galique dit : La pierre ne presse pas la terre de plus prs que l'assistance de Coibhi (bienfaisance , attribut du chef des Druides ? ). * Davies Mythol. , p. 271 , 277. Ammian. Marcell. , liv. XV : Druidae ingeniis celsiores, ut authoritas Pythagorae decrevit, sodalitiis astricti consortiis, quastionibus occultarum rerum allarunique erecli sunt, etc.

. ( 452 ) servait ; et, chez les Gallois, le chef des Druides semble avoir t considr comme le reprsentant du Dieu suprme .( Jamieson, Hist. of the Culdees, p. 29 ). La hirarchie druidique aurait t ainsi une image microcosmique de la hirarchie de l'univers, comme dans les mystres de Samothrace et d'Eleusis... Nous savons que les Caburs taient adors dans les cavernes et l'obscurit, tandis que les feux,en l'honneur de Beal taient allums sur le sommet des montagnes. Cet usage s'explique par la doctrine abstraite : Le monde cabirique, en effet, dans son isolement du grand principe de lumire, n'est plus que la force tnbreuse, que l'obscure matire de toute ralit. Il constitue comme la base ou la racine de l'univers, par opposition la suprme intelligence, qui en est comme le sommet. C'tait sans doute par suite d'une manire de voir analogue, que les crmonies du culte des Cabires, Samothrace , n'taient clbres que pendant la nuit. On peut ajouter ces inductions de M. Pictet que, suivant une tradition des montagnards d'Ecosse, les Druides travaillaient la nuit et se reposaient le jour (Logan , II, 351). Le culte de Beal, au contraire, se clbrait par des feux allums sur les montagnes. Ce culte a laiss des traces profondes dans les traditions populaires (Tolland, XIe lettre , p. 101 ). Les Druides allumaient des feux sur les cairn, la veille du 1er mai, en l'honneur de Beal, Bealan (le soleil). Ce jour garde encore aujourd'hui en Irlande le nom de la Bealteine, c'est--dire le jour du feu de Beal. Prs de Londonderry un cairn plac en face d'un autre cairn, s'appelle Bealteine. Logan, II, 526. Ce ne fut qu'en 1220 que l'archevque de Dublin teignit le feu perptuel qui tait entretenu dans une petite chapelle prs de l'glise de Kildare, mais il fut rallum bientt et continua de brler jusqu' la suppression des monastres ( Archdall's mon. Hib. apud Anth. Hib., III , 240). Ce feu tait entretenu par des vierges, souvent de qualit, appeles filles du feu (inghean an dagha), ou ce qui les a fait confondre avec gardiennes du feu (breochuidh), les nonnes de sainte Brigitte.

( 453 ) Un rdacteur du Gentleman s magasine , 1795, dit : Que se trouvant en Irlande la veille de la saint Jean, on lui dit qu'il verrait minuit allumer les feux en l'honneur du soleil. Riches dcrit ainsi les prparatifs de la fte : " What watching, what vattling, what tinkling upon pannes and candlesticks, what strewing of hearbes, what clamors, and other crmonies are used. Spenser dit qu'en allumant le feu, l'Irlandais fait toujours une prire. A Newcastle les cuisiniers allument les feux de joie la saint Jean. A Londres et ailleurs, les ramoneurs font des danses et des processions en habits grotesques. Les montagnards d'Ecosse passaient par le feu en l'honneur de Beal, et croyaient un devoir religieux de marcher en portant du feu autour de leurs troupeaux et de leurs champs Logan, II, 564. Encore aujourd'hui les montagnards cossais font passer l'enfant au-dessus du feu, quelquefois dans une sorte de poche, o ils ont mis du pain et du fromage. ( On dit que dans les montagnes on baptisait quelquefois un enfant sur une large pe. De mme en Irlande, la mre faisait baiser son enfant nouveau-n la pointe d'une pe. Logan, I, 122.) Id. f, 215. Les Caldoniens brlaient les criminels entre deux feux; de l le proverbe : Il est entre les deux flammes de Bheil. Ibid., 140. L'usage de faire courir la croix de feu subsistait encore en 1745; elle parcourut dans un canton trente-six milles en trois heures. Le chef tuait une chvre de sa propre pe, trempait dans le sang les bouts d'une croix de bois demi-brle, et la donnait avec l'indication du lieu de ralliement un homme du clan qui courait la passer un autre. Ce symbole menaait du fer et du feu ceux qui n'iraient pas au rendez-vous. Caumont, I, 154 : Suivant' une tradition, on allumait autrefois dans certaines circonstances , des feux sur les lumuli, prs de Jobourg ( dpart, de la Manche ). Logan, II, 64. Pour dtruire les sortilges qui frappent les animaux, les personnes qui ont le pouvoir de les dtruire sont charges d'allumer le Needfire ; dans une le ou sur une petite rivire ou lac, on lve une cabane circulaire de pierres ou de gazon, sur laquelle on place un soliveau de bouleau; au centre est un poteau engag par le haut dans cette pice de bouleau;

(454) ce poteau perpendiculaire est tourn dans un bois horizontal au moyen de quatre bras de bois. Des hommes, qui ont soin de ne porter sur eux aucun mtal, tournent le poteau, tandis que d'autres, au moyen de coins, le serrent contre le bois horizontal qui porte les bras, de manire qu'il s'enflamme par le frottement ; alors on teint tout autre feu. Ceux qu'on a obtenus de cette manire passent pour sacrs, et on en approche successivement les bestiaux. $II. Dans la religion Galloise (Voyez Davies, Myth. and rites of theBritish druids, et le mme, Celtic researches ), le dieu suprme , c'est le dieu inconnu, DIANA (dianaff inconnu, en breton; diana en lonais, dianan dans le dialecte de Vannes). Son reprsentant sur la terre c'est Hu le grand, ou Ar-bras, autrement CADWALCADER,le premier des Druides. Le castor noir perce la digue qui soutient le grand lac, le monde est inond ; tout prit, except DOUYMANet DOUYMEC'H ( man, mec'h, homme, fille ), sauvs dans un vaisseau sans voiles, avec un couple de chaque espce d'animaux. Hu attle deux boeufs la terre pour la tirer de l'abme. Tous deux prissent dans l'effort ; les yeux de l'un sortent de leur orbite, l'autre refuse de manger et se laisse mourir. Son char Cependant Hu donne des lois et enseigne l'agriculture. est compos des rayons du soleil, conduit par cinq gnies ; il a pour ceinture l'arc-en-ciel. Il est le dieu de la guerre, le vainqueur des gans et des tnbres, le soutien du laboureur, le roi des bardes, le rgulateur des eaux. Une vache sainte le suit partout. Hu a pour pouse'une enchanteresse, Ked ou Ceridguen, dans son domaine de Penlynn ou Penleen, l'extrmit du lac o il habite. Ked a trois enfans : Mor-vran (le corbeau de mer, guide des navigateurs ), la belle Creiz-viou ( le milieu de l'oeuf, le symbole de la vie), et le hideux Avagciu ou Avank-du (le castor noir).

( 455 ) Ked voulut prparer Avagdu, selon, les rites mystrieux du 1livre de Pherylt, l'eau du vase Azeuladour (sacrifice), l'eau de l'inspiration et de la science. Elle se rendit donc dans la terre du repos, o se trouvait la cit du juste, et, s'adressant au petit Gouyon , le fils du hraut de Lanvair, le gardien du temple, elle le chargea de surveiller la prparation du breuvage. L'aveugle Morda fut charg de faire bouillir la liqueur sans interruption pendant un an et un jour. Durant l'opration, Ked ou Ceridguen tudiait les livres astronomiques et observait les astres. L'anne allait expirer, lorsque del liqueur bouillonnante s'chapprent trois gouttes qui tombrent sur le doigt du petit Gouyon; se sentant brl, il porta le doigt sa bouche..-. Aussitt l'avenir se dcouvrit lui ; il vit qu'il avait redouter les embches de Ceridguen, et prit la fuite. A l'exception de ces trois gouttes, toute la liqueur tait empoisonne : le vase se renversa de lui-mme et se brisa... Cependant Ceridguen furieusepoursuivait le petit Gouyon. Gouyon, pour fuir plus vite, se change en livre. Ceridguen devient levrette et le, chasse vigoureusement jusqu'au bord d'une rivire. Le petit Gouyon prend la forme d'un poisson ; Ceridguen devient loutre, et le serre de si prs , qu'il est forc de se mtamophoser en oiseau et de s'enfuir tired'ailes. Mais Ceridguen planait dj au-dessus de sa tte sous la forme d'un pervier... Gouyon, tout tremblant, se laissa tomber sur un tas de froment, et se changea en grain de bl ; Ceridguen se changea en poule noire , et avala le pauvre Gouyon. Aussitt elle devint enceinte, et Hu-Ar-Bras jura de mettre mort l'enfant qui en natrait ; mais au bout de neuf mois, elle mit au monde un si-bel enfant, qu'elle ne put se rsoudre le faire prir. Hu-Ar-Bras lui conseilla de le mettre dans un berceau couvert de peau et de le lancer la mer. Ceridguen l'abandonna donc aux flots le 29 avril. En ce temps-l, Gouydno avait prs du rivage un rservoir qui donnait chaque anne, le soir du 1er mai, pour cent livres de poisson. Gouydno n'avait qu'un fils, nomm Elfin, le plus malheureux des hommes, qui rien n'avait jamais russi ; son pre le croyait

( 456 ) n une heure fatale. Les conseillers de Gouydno l'engagrent confier son fils l'puisement du rservoir. Elfin n'y trouva rien ; et comme il revenait tristement, il aperut Un des garun berceau couvert d'une peau , arrt sur l'cluse diens souleva cette peau, et s'cria en se tournant vers Elfin : Regarde, Thaliessin ! (quel front radieux ! ) Front radieux sera son nom, rpondit Elfin. Il prit l'enfant et le plaa sur son cheval. Tout--coup l'enfant entonna un pome de consolation et d'loge pour Elfin, et lui prophtisa sa renomme. On apporta l'enfant Gouydno. Gouydno demanda si c'tait un tre matriel ou un es-prit. L'enfant rpondit par une chanson o il dclarait avoir vcu dans tous les ges, et o il s'identifiait avec le soleil. Gouydno, tonn, demanda une autre chanson ; l'enfant reprit : L'eau donne le bonheur. Il faut songer son Dieu ; il faut prier son Dieu, Je parce qu'on ne saurait compter les bienfaits qui en dcoulent suis n trois fois. Je sais comment il faut tudier pour arriver au savoir. Il est triste que les hommes ne veuillent pas se donner la peine de chercher toutes les sciences dont la source est dans mon sein ; car je sais tout ce qui a t et tout ce qui doit tre. Cette allgorie se rapportait au soleil, dont le nom, Thaliessin (front radieux), devenait celui de son grand-prtre. La premire duraient un an. Le barde alors initiation, les tudes, l'instruction, s'abreuvait de l'eau d'inspiration, recevait les leons sacres. Il tait soumis ensuite aux preuves ; on examinait avec soin ses moeurs, sa constance, son activit, son savoir. Il entrait alors dans le sein de la desse, dans la cellule mystique, o il tait assujti une nouvelle discipline. Il en sortait enfin, et semblait natre de nouveau ; mais , cette fois , orn de toutes les connaissances qui devaient le faire briller et le rendre un objet de vnration pour les peuples. On connat encore les lacs de l'Adoration , de la Conscration , du bosquet d'Ior (surnom de Diana ). Ils offraient, prs du lac, des vtemens de laine blanche, del toile, des alimens. La fte des lacs durait trois jours. Prs Landlorn (Landerneau), le 1er mai, la porte d'un roc

( 457 ) s'ouvrait sur un lac, au-dessus duquel aucun oiseau ne volait. Dans une le chantaient des fes avec la chanteuse des mers : qui y pntrait tait bien reu, mais il ne fallait rien emporter. Un visiteur emporte une fleur qui devait empcher de vieillir; la fleur s'vanouit. Dsormais plus de passage ; un brave essaie, mais un fantme menace de dtruire la contre... Selon Davies (Myth. and rites ), on trouve une tradition presque semblable dans le Brecnockshire. Il y a aussi un lac dans ce comt, qui couvre une ville. Le roi envoie un serviteur on lui refuse l'hospitalit. Il entre dans une maison dserte, y trouve un enfant pleurant au berceau, y oublie son gant ; le lendemain, il retrouve le gant et l'enfant qui flottaient. La ville avait disparu. SUR LES PIERRES CELTIQUES( Voy. page 145 ). La pierre fut sans doute la fois l'autel et le symbole de la Divinit. Le nom mme de Cromleach (ou dolmen) signifie pierre de Crom, le Dieu suprme (Pictet, p. 129). On ornait souvent le Cromleach de lames d'or, d'argent ou de cuivre, par exemple le Crum-cruach d'Irlande, dans le district de Bresin, comt de Cavan (Tolland's letters, p. 133). Le nombre de pierres qui composent les enceintes druidiques est toujours un nombre mystrieux et sacr : jamais moins de douze , quelquefois dix-neuf, trente , soixante. Ces nombres concident avec ceux des dieux. Au milieu du cercle, quelquefois au-dehors, s'lve une pierre plus grande , qui a pu reprsenter le Dieu suprme (Pictet, p. 154). Enfin, ces pierres taient attaches des vertus magiques, comme on le voit par le fameux passage de Geoffroy de Montmouth (1. V). Aurelius consulte Merlin sur le monument qu'il faut donner ceux qui ont pri par la trahison d'Hengist ?... Choream gigantum * Sur le bord de la Seine , prs de Duclair, est une roche trs leve, counue sons le nom de Chaisede Gargantua ; prs d'Orches , deuxlieues de Blois , la Chaise de Csar; prs de Tancarville, la Pierre-Gante, ou pierre du gant.

(458) ex Hiberni adduci jubeas... Ne moveas, domine rex , vanum risum. Mystici sunt lapides, et ad diversa medicaniina salubres , gigantesque olim asportverunt eos ex ultimis finibus Africae... Erat autem causa ut balnea intr illos conficerent, cm infirmitale gravarentur. Lavabant namque lapides et intr balnea diffundebant, und oegroti curabantur ; miscebant etiani cuin herbarum infectionibus , und vulnerati sanabantur. Non est ibi lapis qui medicamento careat. Aprs un combat, les pierres sont enleves par Merlin. Lorsqu'on cherche partout Merlin, on ne le trouve que "ad fontem Galabas, quem solitus fuerat frequentare. Il semble lui-mme un de ces gans mdecins. On a cru trouver sur les monumens celtiques quelques traces de lettres ou de signes magiques. A Saint-Sulpice-sur-Rille, prs de l'Aigle, on remarque, sur l'un des supports de la table d'un dol=men, trois petits croissans gravs en creux et disposs en triangle. il existe un dolmen dont la table est couPrs de Lok-Maria-Ker, d'excavations rondes disposes verte, sa surface intrieure, symtriquement en cercls: Une "autre pierre porte trois signes assez semblables des spirales. Dans la caverne de New-Grange comt de Meath, voy. les Collect. de reb. (prs Drogheda, Hib. II, p. 161, etc.), se trouvent des caractres symboliques et leur explication en ogham. Le symbole est une ligne spirale rpte trois fois. L'inscription en ogham se traduit par A , c'est-dire le Lui, c'est--dire le Dieu sans nom, l'tre ineffable (?). Dans la caverne il y a trois autels (Pictet, p. 152). En Ecosse , ontrouve un assez grand nombre de pierres ainsi couvertes de ciselures diverses. Quelques traditions enfin doivent appeler l'attention sur ces hiroglyphes grossiers et peu prs inintelligibles : les Triades disent que sur les pierres de Gwiddon-Ganhebon on pouvait lire les arts et les sciences du monde ; l'astronome Gwydion ap Don fut enterr Caernarvon sous une pierre d'nigmes . Dans le pays de Galles on trouve sur les pierres certains signes qui semblent reprsenter tantt une petite figure d'animal, tantt des arbres entrelacs. Cette dernire circonstance semblerait rattacher le culle des pierres celui des arbres. D'ailleurs l'Ogham ou Ogum,

( 459 ) alphabet secret des Druides, consistait en rameaux de divers arbres et assez analogues aux caractres runiques. Telles sont les inscriptions places sur un monument mentionn dans les chroniques d'Ecosse, comme tant dans le bocage d'Aongus, sur une pierre du Cairn du vicaire, en Armagh, sur un monument de l'le d'Arran, et sur beaucoup d'autres en Ecosse. On a vu plus haut que les pierres servaient quelquefois la divination. Nous rapporterons ce sujet un passage important de Talliesin. (N'ayant pas sous les yeux le texte gallois, je rapporte la traduction anglaise. ) I know the intent of the trees, I know winch was decreed praise vor disgrce, by the intention of the mmorial trees of the sages, and clbrtes a the engagement of the sprigs of the trees, or of devices, and their battle with the learned. He could delineate the elementary trees and reeds , and tells us when the sprigs were marked in the small tablet of devices they uttered their voice. (Logan, II, 588). Les arbres sont employs encore symboliquement par les Welsh' et les Gals; par exemple, le noisetier indique l'amour trahi. Le caldonien Merlin (Talliesin est Cambrien) se plaint que l'autorit des rameaux commence tre ddaigne . Le mot irlandais aos, qui d'abord signifiait un arbre, s'appliquait une personne lettre ; feadha, bois ou arbres, devint la dsignation des prophtes, ou hommes sages. De mme, en sanskrit, bd'hi signifie le figuier indien, et le bouddiste , le sage. Les monumens celtiques semblent n'avoir pas t consacrs exclusivement au culte. C'tait sur une pierre qu'on lisait le chef de clan (Voy. plus haut p. 156, note 1 ). Les enceintes de pierres servaient de cours de justice. On a en trouv des traces en Ecosse, en Irlande, dans les les du Nord ( King , 1, 147 ; Martin's Descr. of the Western isles ), mais surtout en Sude et en Norwge (Voy. mon IIIe volume). Les anciens pomes erses nous apprennent en effet que les rites druidiques existaient parmi les Scandinaves, et que les druides bretons en obtinrent du secours dans le danger .(Ossian's Cathlin , II, p. 216, not. edit. 1765, t. II; Warton, t. I).

(460) Le plus vaste cercle druidique tait celui d'Avebury ou Abtiry, dans le Wiltshire. Il embrassait vingt-huit acres de terre entours d'un foss profond et d'un rempart de soixante-dix pieds. Un cercle extrieur, form de cent pierres, enfermait deux autres cercles doubles extrieurs l'un l'autre. Dans ceux-ci, la range extrieure contenait trente pierres, l'intrieure douze. Au centre de l'un des cercles taient trois pierres, dans l'autre une pierre isole; deux avenues de pierres conduisaient tout le monument. ( Voy., O'Higgin's , Celtic druids). Stonehenge, moins tendu , indiquait plus d'art. D'aprs Waltire, qui y campa plusieurs mois pour l'tudier (on a perdu les papiers de cet antiquaire enthousiaste, mais plein, de sagacit et de profondeur ), la range extrieure tait de trente pierres droites ; le tput en y comprenant l'autel et les impostes, se montait cent trente-neuf pierres. Les impostes taient assurs par des tenons. Il n'y a pas d'autre exemple dans les pays celtiques du style trilithe ( sauf deux Holmstad et Drenthiem ). Le monument de Classerness, dans l'le de Lewis, forme, au moyen de quatre avenues de pierres, une sorte de croix dont la t te est au sud, la rencontre des quatre branches est un petit cercle. dont Quelques-uns croient y reconnatre le temple hyperboren parlent les anciens. ratosthnes dit qu'Apollon cacha sa flche l o se trouvait un temple ail. Je parlerai plus loin des alignemens de Camac et de Lok-Maria-Ker (t. II, p. 16. Voyez aussi le Cours de M. de Caumont, I, p. 105). Il est rest en France des traces nombreuses du culte des pierres, soit dans les noms de lieux, soit dans les traditions populaires : 1 On sait qu'on appelait pierre fiche ou fiche ( en celtique , menhir, pierre longue, peulvan, pilier de pierre), ces pierres brutes que l'on trouve plantes simplement dans la terre comme des bornes. Plusieurs bourgs de France portent ce nom. PierresFiche , cinq lieues N. E. de Mendes, en Gvaudan. PierreFiques , en Normandie, une lieue de l'Ocan, trois de Montivillicrs. Pierrefitte, prs Pont-1'vque. Pierrefitte,

( 461 ) deux lieues N. O. d'Argentan. Pierrefitte, trois lieues de'Falaise. Pierrefitte, dans le Perche, diocse de Chartres , six lieues S. de Mortagne. Idem, en Beauvoisis, deux lieues N. O. de Beauvais. Idem, prs Paris, une demi-lieue N. de Saint-Denis. Idem, en Lorraine, quatre lieues de Bar. Idem, en Lorraine, trois lieues de Mirecourt. Idem, en Sologne, neuf lieues S. E. d'Orlans. Idem, en Berry, trois lieues de Gien, cinq de Sully. Idem, en Languedoc, diocse de Narbonne, deux lieues et demie de Limoux. Idem, dans la Marche, prs Bourganeuf. Idem, dans la Marche, prs en Limousin, six lieues de Brives. Idem, Gurct. Idem, en Forest, diocse de Lyon, quatre lieues de Roanne, etc. 2 A Colombiers, les jeunes filles qui dsirent se marier doivent monter sur la pierre-leve, y dposer une pice de monnaie, puis sauter de haut en bas. A Gurande, elles viennent dposer dans les fentes de la pierre des flocons de laine rose lis avec du clinquant. Au Croisic, les femmes ont long-temps clbr des danses autour d'une pierre druidique. En Anjou, ce sont les fes qui, descendant des montagnes en filant, ont apport ces rocs dans leur tablier. En Irlande, plusieurs dolmen sont encore appels les lits des amans : la fille d'un roi s'tait enfuie avec son amant; poursuivie par son pre, elle errait de village en village , et tous les soirs ses htes lui dressaient un lit sur la roche, etc., etc.

TRIADES DE L'LE DE BRETAGNE , Qui sont des triades de choses mmorables, de souvenirs et de sciences, concernant les hommes et les faits fameux qui furent en Bretagne, et concernant les circonstances et infortunes qui ont dsol la nation des Cam.briens plusieurs poques ( traduites par Probert. Voy. page 154). Voici les trois noms donns l'le de Bretagne. Avant qu'elle ft habite, on l'appelait le Vert Espace entour des eaux de

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l'Ocan ( the Seagirt Green Space ) ; aprs qu'elle fut habite, elle fut appele le de Miel ; et aprs que le peuple eut t form en soelle fut appele l'le de cit par Prydain , fils d'Aedd-le-Grand, Prydain. Et personne n'a droit sur elle que la tribu des Cambriens, car les premiers ils en prirent possession ; et avant ce temps-l, il n'y eut aucun homme vivant, mais elle tait pleine d'ours, de loups, de crocodiles et de bisons. Voici les trois principales divisions de l'le de Bretagne. Cambrie, Llogrie et Alban, et le rang de souverainet appartient chacun d'eux. Et sous une monarchie, sous la voix de la contre , ils sont gouverns selon les tablissemens de Prydain, fils d'Aeddle-Grand; et la nation des Cambriens appartient le droit d'tablir la monarchie selon la voix de la contre et du peuple, selon le rang et le droit primordial. Et sous la protection de cette rgle, la royaut doit exister dans chaque contre de l'le de Bretagne, et toute royaut doit tre sous la protection de la voix de la contre ; c'est pourquoi il y a ce proverbe : Une nation est plus puissante qu'un chef. Voici les trois piliers de la nation dans l'le de Bretagne. La voix de la contre, la royaut et la judicature d'aprs les tablissemens de Prydain, fils d'Aedd-le-Grand. Le premier fut Hu-lePuissant, qui amena la nation le premier dans l'le de Bretagne ; et ils vinrent de la contre de l't, qui est appele Defrobani (Constantinople ?); et ils vinrent par la nier Hazy (du nord) dans l'le de Bretagne et dans l'Armorique, o ils se fixrent. Le second fut Prydain, fils d'Aedd-le-Grand, qui le premier organisa l'tat social et la souverainet en Bretagne. Car avant ce temps il n'y avait de justice que ce qui tait fait par faveur, ni aucune loi except celle de la force. Le troisime fut Dyvnwal Moelmud ; car il fit le premier des rglemens concernant les lois , maximes, cou-tmes et privilges relatifs au pays et la tribu. Et cause de ces raisons, ils furent appels les trois piliers de la nation des Cambriens. Voici les trois tribus sociales de l'le de Bretagne. La premire fut la tribu des Cambriens, qui vint de l'le de Bretagne avec Hu-

( 463 ) le-Puissant, parce qu'ils ne voulaient pas possder un pays par combat et conqute, mais par justice et tranquillit. La seconde fut la tribu des Lloegriens, qui venaient de la Gascogne ; ils' descendaient de la tribu primitive des Cambriens. Les troisimes furent les Brython, qui taient descendus de la tribu primitive des Cambriens. Ces tribus taient appeles les pacifiques tribus, parce qu'elles vinrent d'un accord mutuel, et ces tribus avaient toutes trois la mme parole et la mme langue. Les trois tribus rfugies : Caldoniens, Irlandais, le peuple de Galedin, qui vinrent dans des vaisseaux nus en l'le de Wight, lorsque leur pays .tait inond; il fut stipul qu'ils n'auraient le rang de Cambriens qu'au neuvime degr de leur descendance. Les trois envahisseurs sdentaires : les Coraniens, les Irlandais Piets, les Saxons. Les trois envahisseurs passagers : les Scandinaves ; Ganwall l'irlandais (conqute de 29 ans), vaincu par Caswallon, et les Csariens. Les trois envahisseurs tricheurs ; les Irlandais rouges en Alban, les Scandinaves, et les Saxons. Voici les trois disparitions de l'le de Bretagne : la premire est celle de Gavran et ses hommes qui allrent la recherche des les vertes des inondations on n'entendit jamais parler d'eux. La seconde fut Merddin, le barde d'Emrys ( Ambrosius, successeur de Vortigern ? ), et ses neuf bardes, qui allrent en mer dans une maison de verre ; la place o ils allrent est inconnue. Le troisime fut Madog, fils d'Owain, roi des Galles du nord, qui alla en mer avec trois cents personnes dans dix vaisseaux ; la place o ils allrent est inconnue. Voici les trois vnemens terribles de l'le de Bretagne : le predu lac du dbordement avec inondation sur mier fut l'irruption tout le pays jusqu' ce que toutes personnes fussent dtruites, except Dwyvan et Dwyvach qui chapprent dans un vaisseau ouvert, et par eux l'le de Prydain fut repeuple. Le second fut le tremblement d'un torrent de feu jusqu' ce que la terre ft dchire jusqu' l'abme, et que la plus grande partie de toute vie ft ,

( 464 ) dtruite. Le troisime fut l't chaud, quand les arbres et les plantes prirent feu par la chaleur brlante du soleil, et que beaucoup de gens et d'animaux , diverses espces d'oiseaux, vers, arbres et plantes furent entirement dtruits. Voici les trois expditions combines qui partirent de l'le de Bretagne : la premire partit avec Ur, fils d'Erin, le puissant guerrier the de Scandinavie (ou peut-tre le vainqueur des Scandinaves, bellipotent of Scandinavia ) ; il vint en cette le du temps de Gadial, fils d'Erin, et obtint secours condition qu'il ne tirerait de chaque principale forteresse plus d'hommes qu'il n'y prsenterait. A la premire il vint seul avec son valet Mathata Vawr ; il en obtint deux hommes, quatre de la seconde, huit de la troisime, seize de la suivante, et ainsi de toutes en proportion, jusqu' ce qu'enfin le nombre ne pt tre fourni par toute l'le. Il emmena soixante-trois mille hommes, ne pouvant obtenir dans toute l'le un plus grand nombre d'hommes capables d'aller la guerre : les enfans et les vieillards restrent seuls dans l'le. Ur, le fils d'Erin le puissant guerrier, fut le plus habile recruteur qui et jamais exist. Ce fut par inadvertance que la tribu des Cambriens lui donna cette permission stipule irrvocablement. Les Coraniens saisirent cette occasion d'envahir l'le sans difficult. Aucun des hommes qui partirent ne retourna, aucun de leurs fils ni de leurs descendans. Ils firent voile pour une expdition belliqueuse jusque dans la mer de la Grce, et s'y fixant dans les pays de Galas et d'Avne ( Galatia ?), ils y sont rests jusqu' ce jour, et sont devenus Grecs. La seconde expdition combine fut conduite par Caswallawn, le fils de Beli, et petit-fils de Manogan, et par Gwenwynwyn et Gwanar, les fils de Lliaws, fils de Nwyvre et Arianrod , fille,de Beli, leur mre. Ils descendaient de l'extrmit de la pente de Galedin et Siluria, et des tribus combines des Boulognse, et leur nombre tait de soixante-un mille. Ils marchrent avec leur oncle Caswallawn, aprs les Csarieris, vers le pays des Gaulois de l'Armorique, qui descendaient de la premire race des Cambriens. Et aucun d'eux, aucun de leurs fils ne retourna dans cette le, car ils se fixrent dans la Gascogne parmi les Csariens, o

( 465 ) ils sont prsent; c'tait pour se venger de cette expdition que les Csariens vinrent la premire fois dans cette le. La troisime expdition combine fut conduite hors de cette le par Ellen, puissant dans les combats, et Cynan son frre, seigneur de Meiriadog en Armorique, o ils obtinrent terres, pouvoir et souverainet de l'empereur Maxime, pour le soutenir contre les Romains Et aucun d'eux ne revint ; mais ils restrent l et dans Ystre Gyvaelwg , o ils formrent une communaut. Par suite de cette expdition, les hommes arms de la tribu des Cambriens diminurent tellement que les Piets irlandais les envahirent. Voil pourquoi Vortigern fut forc d'appeler les Saxons pour repousser cette invasion. Les Saxons, voyant la faiblesse des Cambriens, tournrent leurs armes perfidement contre eux, et s'alliant aux. Piets irlandais et d'autres tratres, ils prirent possession du pays des Cambriens ainsi que de leurs privilges et de leur couronne. Ces trois expditions combines sont nommes les trois grandes Prsomptions de la tribu des Cambriens, et aussi les trois Armes d'argent , parce qu'elles emportrent de l'Ile tout l'or et l'argent qu'elles purent obtenir par la fraude, par l'artifice et par l'injustice, outre ce qu'elles acquirent par droit et par consentement. Elles furent aussi nommes, les trois Armniens irrflchis, vu qu'elles affaiblirent l'le au point de donner occasion- aux trois grandes invasions; savoir : l'invasion des Coralliens, celle des Csariens, et celle des Saxons. Voici les trois perfides rencontres qui eurent lieu dans l'le de le fils de Bretagne. La premire fut celle de Mandubratius, Lludd, et de ceux qui trahirent avec lui. Il fixa aux Romains une place sur l'troite extrmit verte pour y aborder; rien de plus. Il n'en fallut pas davantage aux Romains pour gagner toute l'le. La sur la seconde fut celle des Cambriens nobles et des Saxons plaine de Salisbury , o fut trame le complot des Longs-Couteaux, par la trahison de Vortigern; car c'est par son conseil qu' l'aide des Saxons presque tous les notables des Cambriens furent massacrs. La troisime fut l'entrevue de Medrawd et d'iddawg Corn o ils conspirrent conPrydain avec leurs hommes Nanhwynain

ire Arthur, Bretagne. Les trois insignes tratres de l'le de Bretagne. Le premier , Mandubratius , fils de Llud , fils de Beli-le-Grand qui, invitant Jules Csar et les Romains venir en cette le, causa l'invasion des Romains. Lui et ses hommes se firent les guides des Romains, desquels ils reurent annuellement une quantit d'or et d'argent. C'est pourquoi les habitans de cette le furent contraints de payer en tribut annuel, aux Romains , 5,000 pices d'argent jusqu'au fils de Maxime , qui refusa de payer le tribut. temps d'Orvain, Sous prtexte de satisfaction, les Romains emmenrent, de l'le de Bretagne, la plupart des hommes capables de porter les armes et les conduisirent en Aravie ( Arabie ) , et en d'autres contres lointaines d'o ils ne sont jamais revenus. Les Romains, qui taient en Bretagne, marchrent en Italie et ne laissrent en arrire que les femmes et les petits enfans ; c'est pourquoi les Bretons furent si faibles , que, par dfaut d'hommes et de force, ils n'taient pas capables de repousser l'invasion et la conqute. Le second tratre fut saisit la couronne de Vortigern , qui massacra Constantin-le-Saint, l'le par la violence et par l'injustice, qui, le premier, invita les Saxons de venir en l'le comme auxiliaires, pousa Alis Rowen , la fille d'Hengist, et donna la couronne de Bretagne au fils qu'il eut d'elle et dont le nom tait Gotta. De l, les rois de Londres sont nomms enfans d'Alis. C'est ainsi que les Cambriens perdirent, par Vortigern, leurs terres , leur rang et leur couronne en Lloegrie. Le troisime tait Mdrawd, fils de Llew, fils de Cynvarch : car , lorsque Arthur marcha contre l'empereur de Rome, laissant le gouvernement de l'le ses soins , Medrawd ta la couronne Arthur par usurpation et sduction ; et pour se l'assurer , il s'allia aux Saxons. C'est ainsi que les Cambriens perdirent la couronne de _ Lloegrie et la souverainet de l'le de Bretagne. Les trois tratres mprisables, qui mirent les Saxons mme d'enlever la couronne de l'le de Bretagne aux Cambriens. Le premier tait Gwrgi Garwlwgd, qui, aprs avoir got la chair humaine dans la cour d'Edelfled, roi des Saxons, y prit got au point

( 466 ) et par ces moyens fortifirent les Saxons dans l'le de

( 467 ) de ne plus vouloir d'autre viande. C'est pourquoi lui et ses gens s'unirent Edelfled,, roi des Saxons ; il fit des incursions secrtes contre les Cambriens , lesquelles lui valurent chaque jour un garon et une fille qu'il mangeait. Et toutes les mauvaises gens d'entre les Cambriens vinrent lui et aux Saxons, et obtinrent bonne part dans le butin fait sur les naturels de l'le. Le second fut Medrad , qui, pour s'assurer le royaume contre Arthur, s'unit avec ses hommes aux Saxons; cette trahison fut cause qu'un grand nombre des Llogriens devinrent Saxons. Le troisime fut Aeddan, le tratre du Nord, qui, avec ses hommes, se soumit aux Saxons, pour pouvoir , sous leur protection, se soutenir par l'anarchie et le pillage. Ces trois tratres firent perdre aux Cambriens leurs terres et leur couronne en Lloegrie. Sans de telles trahisons , les Saxons n'auraient jamais gagn l'le sur les Cambriens. Les trois Bardes qui commirent les trois assassinats bienfaisan de l'le de Bretagne. Le premier fut Gall , fils de Dysgywedawg, qui tua les deux oiseaux fauves (les fils ) de Gwenddolen, fils de Ceidiaw, qui avaient un joug d'or autour d'eux, et qui dvoraient chaque jour deux corps des Cambriens, un leur dner, et un leur souper. Le second, Ysgawnell, fils de Dysgywedawg , tua Edelfled, roi de Llogrie,, qui prenait chaque nuit deux nobles filles de la nation cambrienne, et les violait, puis chaque matin, les tuait et les dvorait. Le troisime, Difedcl, fils de tua Gwrgi Garwlwyd, qui avait pous la soeur Dysgywedawg, et qui commit des trahisons et des meurtres sur les d'Edelfled, Cambriens, de concert avec Edelfled. Et ce Gwrgi tuait chaque jour deux Cambriens, homme et fille, et les dvorait ; et le samedi il tuait deux hommes et deux filles afin de ne pas tuer le dimanche. Et ces trois personnes, qui excutrent ces trois meurtres bienfaisans, taient Bardes. Les trois causes frivoles de combat dans l'le de Bretagne. La premire fut la bataille de Godden, cause par une chienne, un chevreuil et un vanneau; soixante-onze mille hommes prirent dans cette bataille. Le second fut la bataille d'Arderydd , cause par un nid d'oiseau ; quatre-vingt mille Cambriens y prirent. Le

( 468 ) troisime fut la bataille de Camlan , entre Arthur et Medrod, o Arthur prit avec cent mille hommes d'lite des Cambriens. Par suite de ces trois folles batailles, les Saxons otrent aux Cambriens la contre de Lloegrie, parce que les Cambriens n'avaient plus un nombre suffisant de guerriers pour s'opposer aux Saxons, la trahison de Gwrgi Garwlwyd et la fraude de Eiddilic-le-Nain. Les trois reclemens et dclemens de l'le de Bretagne. Le premier fut la tte de Bran-le-Saint, fils de Llyr, laquelle Owain, fils d'Ambrosius, avait cache dans la colline blanche de Londres, et tant qu'elle demeura en cet tat, aucun accident fcheux ne put arriver cette le. Le second furent les ossemens de Gwrthcwynle-Saint, qui furent enterrs dans les principaux ports de l'le; et tandis qu'ils y restaient, aucun inconvnient ne put arriver cette le. Le troisime furent les dragons, cachs par Lludd , fils de Beli, dans la forteresse de Pharaon parmi les rochers de Snowdon. Et ces trois reclemens furent mis sous la protection de Dieu et des attributs divins. L'infortune devait tomber sur l'heure et sur l'homme qui les dclerait. Vortigern rvla les dragons, pour se venger parl de l'opposition des Cambriens contre lui, et il appela les Saxons sous prtexte de combattre avec lui les Piets irlandais. Aprs cela, il rvla les ossemens de Gyrthewyn-lc-Saint, par amour pour Et Arthur dcouvrit la tte de Rowen , fille d'Hengist-le-Saxon. (ils de Llyr, parce qu'il ddaignait de garder l'le Bran-le-Saint, autrement que par sa valeur. Ces trois choses saintes tant dceles, les envahisseurs gagnrent la supriorit sur la nation cambrienne. Les trois nergies dominatrices de l'le de Bretagne. Hu-lePuissant, qui amena la nation cambrienne de la contre de l't, nomme Defrobani, en l'le de Bretagne; Prydain, fils d'Aedd-leGrand, qui organisa la nation et tablit un jury sur File de Bretagne; et Rhitta Gawr, qui se fit faire une robe avec les barbes des rois qu'il avait faits prisonniers , en punition de leur oppression et de leur injustice. Les trois hommes vigoureux de l'le de Bretagne. Gwrnerthle-1ion-tireur, qui tuait avec une flche de paille le plus grand

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ours qu'on et jamais vu; Gwgawn--la-main-puissante, qui roulait la pierre de Macnarch de la valle au sommet de la montagne : il fallait soixante boeufs pour l'y traner ; et Eidiol-le-Puissant, qui, dans le complot de Stonehenge, tua avec une bche de cormier six cent soixante Saxons, entre le coucher du soleil et la nuit. Les trois faits qui causrent la rduction de la Llocgric et l'arrachrent aux Cambriens. L'accueil des trangers, la dlivrance des prisonniers, et le prsent de l'homme chauve (Csar ? ou saint Augustin? Ce dernier excita les Saxons massacrer les moines et porter la guerre dans le pays de Galles ). Les trois premiers ouvrages extraordinaires de l'le de Bretagne. Le vaisseau de Nwydd-Nav-Neivion , qui apporta dans l'le le mle et la femelle de toutes les cratures vivantes, lorsque le lac de l'inondation dborda ; les boeufs aux larges cornes, de Hu-le-puissant, qui tirrent le crocodile du lac sur la terre, de sorte que le lac ne dborda plus ; et la pierre de Gwyddon-Ganhebon , dans laquelle sont gravs tous les arts et toutes les sciences du monde. Les trois hommes amoureux de l'le de'Bretagne. Le premier fut Caswallawn , fils de Beli, pris de Flur , fille de Mygnach-lenain; il marcha pour elle contre les Romains jusque dans la Gas cogne, et il l'emmena et tua six mille Csarions; pour se venger, les Romains envahirent celte le. Le second fut Trystan, fils de Tallwch, pris d'Essylt, fille de Mardi, fils de Meirchion, son oncle. Le troisime fut Cynon, pris de Morvydd, fille de Urien Piheged. Les trois premires matresses d'Arthur. La premire fut Garwen , fille de Henyn , de Tegyrn Gwyr, et d'Ystrad Tywy ; Gwyl, fille d'Eutaw , de Cacrvorgorn ; et Indcg , fille d'Avarwyle-Haut, de Radnorshine. Les trois principales cours d'Arthur. Caciilion sur l'Usk en Cambrie , Celliwig en Cornwall, et Edimbourg au Nord. Ce sont les trois cours o il ftait les trois grandes ftes : Nol, Pques et Pentecte. Les trois chevaliers de la cour d'Arthur qui gardaient le Grcal. Cadawg, fils de Gwynlliw; Ylltud, le chevalier canonis; et Percdur, fils d'Evrawg.

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Voici les trois hornmes qui portaient des souliers d'or dans l'le de Bretagne. Caswallawn, fils de Beli, lorsqu'il alla en Gaslaquelle y cogne pour obtenir Flur, fille de Mygnach-le-nain, avait t emmene clandestinement pour l'empereur Csar , par un homme nomm Mwrchan-le-voleur , roi de cette contre et ami de Jules-Csar ; et Caswallawn la ramena dans l'le de Bretagne. Le second Manawydan, fils de Llyr Llediaith , quand il alla aussi loin que Dyved , imposer des restrictions. Le troisime, Llew Llaw Gyfes , quand il alla avec Gwydiori, fils de Don, chercher un nom et un projet de sa mre Riannon. Les trois royaux domaines qui furent tablis par Rhadri-le-Grand en Cambrie. Le premier est Dinevor, le second Aberfraw, et le troisime Mathravael. Dans chacun de ces trois domaines, il y a un prince ceint d'un diadme ; et le plus vieux de ces trois princes , quel qu'il soit, doit tre souverain , c'est--dire roi de toute la Cambrie. Les deux autres doivent obir ses ordres , et ses ordres sont impratifs pour eux. Il est le chef de la loi et des anciens dans chaque runion gnrale et dans chaque mouvement du pays et de la tribu. (Maldictions continuelles contre Vortigern, Rowena, les Saxons, les tratres la nation 1. ) SUR LES BARDES( Voy. page 157 ). Les Bardes tudiaient pendant seize ou vingt ans. Je les ai vus, dit Campion, dans leurs coles, dix dans une chambre couchs a plat ventre sur la paille et leurs livres sous le nez. Brompton dit que les leons des Bardes en Irlande se donnaient secrtement, 1-Un roi d'Irlande , nomm Cormac, crivit en 260 de Triadibus , et quelques triades sont restes dans la tradition irlandaise sous le nom de Fingal. Les Irlandais marchaient au combat trois par trois ; les highlanders d'Ecosse sur trois de profondeur. Nous avons dj parl de la trimarkisia. foxsouper , dit Giraldus Cambrensis, les Gallois servent un panier de vgtaux devant chaque triade de convives; ils ne se mettent jamais deux deux ( Logan , the Scotish Gal ).

(471 ) et n'taient confies qu' la mmoire ( Logan , the Scotish Gal, t. II, p. 215 ). Il y avait trois sortes de potes : pangyristes des grands ; potes plaisans du peuple ; bouffons satiriques des paysans ( Tolland's letters). Buchanan prtend que les joueurs de harpe en Ecosse taient tous Irlandais. Giraldus Cambrensis dit pourtant que l'Ecosse surpassait l'Irlande dans la science musicale, et qu'on venait s'y perfectionner. Lorsque Ppin fonda l'abbaye de Neville , il y fit venir des musiciens et des choristes cossais ( Logan , Et , 251 ). Giraldus compare la lente modulation des Bretons avec les accens rapides des Irlandais ; selon lui, chez les Welsh chacun fait sa partie ; ceux du Cumberland chantent en parties , en octaves et l'unisson.- Vers 1000 , le welsh Gryffith ap Cynan , ayant t lev en Irlande, rapporta ses instrumens dans son pays, y convoqua les musiciens des deux contres, et tabbt vingt-quatre rgles pour la rfomie de la musique ( Powel, hist. of Cambria ). Lorsque le Christianisme se rpandit dans l'Ecosse et l'Irlande , les prtres chrtiens adoptrent leur got pour la musique. A table, ils se passaient la harpe de main en main ( Bcde, IV, 24 ). Au temps de Giraldus Cambrensis, les vques faisaient toujours porter avec eux une harpe Gunn dit dans son Enquiry : Je possde un ancien pome gallique , o le pote , s'adressant une vieille harpe, lui demande ce qu'est devenu son premier lustre ? Elle rpond qu'elle a appartenu un roi d'Irlande et assist maint royal banquet, qu'elle a ensuite t successivement dans la possession de Dargo, fils du druide de Beal, de Gaul, de Fillon , d'Oscar , de O'duine , de Diarmid, d'un mdecin , d'un barde, et enfin d'un prtre , qui dans un coin retir mditait sur un livre blanc (Logan, II, 268). Les Bardes, bien qu'attachs la personne des chefs, taient eux-mmes fort respects. Sir Richard Cristecd , qui fut charg par Richard II d'initier les quatre rois d'Irlande aux moeurs anglaises, rapporte qu'ils refusrent de manger parce qu'il avait mis leurs bardes et principaux serviteurs une table au-dessous de la leur ( Ibid., 138). Le joueur de cornemuse , comme celui de harpe ,

( 472 ) occupait celte charge par droit hrditaire dans la maison du chef ; avait des terres et un-serviteur qui portait son instrument. Le fameux joueur de cornemuse irlandais des derniers temps , Macdonald, avait serviteurs, chevaux, etc. Un grand seigneur le fait venir un jour pour jouer pendant le dner. On lui place une table et une chaise dans l'antichambre avec une bouteille de vin et un domestique derrire sa chaise ; la porte de la salle tait ouverte. Il s'y prsente et dit en buvant : A votre sant et celle de votre compagnie, monsieur... Puis jetant de l'argent sur la table, il dit au laquais : Il y a deux schellings pour la bouteille , et six pences pour toi, mon garon. Et il remonta cheval (ibid., 277-279 ). La dernire cole bardique d'Irlande , Filean school, se tint Tipperary , sous Charles Ier (ibid., 215 ). L'un des derniers bardes accompagnait Montrose , et pendant sa victoire d'luverlochy, il contemplait la bataille du haut du chteau de ce nom. Montrose lui reprochant de ne pas y avoir pris part : Si j'avais combattu, qui vous aurait chant? (Ibid., 247. ) La cornemuse du clan Chattan , que Walter-Scott mentionne comme ta:.t tombe des nuages pendant une bataille en 1596, fut emprunte par un clan vaincu, qui esprait en recevoir l'inspiration du courage, et qui ne l'a rendue qu'en 1822 ( ibid., 298). En 1745 , un joueur de cornemuse composa, pendant la bataille de Falkirk , un piobrach qui est rest clbre. A la bataille de Waterloo, un joueur de cornemuse , qui prparait un bel air , reoit une balle dans son instrument, il le foule aux pieds , tire sa claymore, et se jette au milieu de l'ennemi ou il se fait tuer ( ? ibid.,. 273-276 ). SUR LA LGENDE SAINTMARTIN( Voy. page DE 116 ).

Cette lgende du saint le plus populaire de la France nous semble mriter d'tre rapporte presque entirement, comme tant l'une des plus anciennes, de plus crite par un contemporain; ajoutez qu'elle a servi de type un et oule d'autres.

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Ex Sulpicii Severi vild B. Martini : Saint Martin naquit Sabaria en Pannonie, mais il fut lev en Italie, prs du Tsin ; ses parens n'taient pas des derniers selon le monde, mais pourtant payens. Son pre fut d'abord soldat, puis tribun. Lui-mme,.dans sa jeunesse, suivit la carrire des armes, contre son gr, il est vrai, car ds l'ge de dix ans il se rfugia dans l'glise, et se fit admettre parmi les catchumnes ; il n'avait que douze ans, qu'il voulait dj mener la vie du dsert, et il et accompli son voeu, si la faiblesse de l'enfance le lui et permis Un dit imprial ordonna d'enrler les fils de vtrans ; son pre le livra ; il fut enlev, charg de chanes, et engag dans le serment militaire. Il se contenta pour sa suite d'un seul esclave, et souvent c'tait le matre qui servait ; il lui dliait sa chaussure, et le lavait de ses propres mains; leur table tait commune...Telle tait sa temprance, qu'on le regardait dj, non comme un soldat, mais comme un moine. Pendant un hiver plus rude que d'ordinaire, et qui faisait mourir beaucoup de monde, il rencontre la porte d'Amiens un pauvre tout nu ; le misrable suppliait tous les passans, et tous se dtournaient. Martin n'avait que son manteau ; il avait donn tout le reste : il prend son pe , le coupe en deux et en donne la moiti au pauvre. Quelques-uns des assistans se mirent rire de le voir ainsi demi-vtu et comme court Mais la nuit suivante, Jsus-Christ lui apparut couvert de cette moiti de manteau dont il avait revtu le pauvre. Lorsque les Barbares envahirent la Gaule , l'empereur Julien rassembla son arme et fit distribuer le donativum Quand ce fut le tour de Martin : Jusqu'ici, dit-il Csar, je t'ai servi ; permets-moi de servir Dieu ; je suis soldat du Christ, je ne puis plus combattre Si l'on pense que ce n'est pas foi, mais lchet, je viendrai demain sans armes au premier rang ; et au nom de Jsus , mon Seigneur, protg par le signe de la croix, je pntrerai sans crainte dans les bataillons ennemis. Le lendemain l'ennemi en-

( 474 ) voie demander la paix, se livrant corps et biens. Qui pourrait douter que ce ft l une victoire du saint, qui fut ainsi dispens d'aller sans armes au combat ? En quittant les drapeaux, il alla trouver saint Hilaire, vque de Poitiers, qui voulut le faire diacre mais Martin refusa, se dclarant indigne, et l'vque voyant qu'il fallait lui donner des le fit exorciste Peu de fonctions qui parussent humiliantes, temps aprs, il fut averti en songe de visiter, par charit religieuse, et saint sa patrie et ses parens, encore plongs dans l'idoltrie, Hilaire voulut qu'il partt, en le suppliant avec larmes de revenir. Il partit donc, mais triste, dit-on, et aprs avoir, prdit ses frres qu'il prouverait bien des traverses. Dans les Alpes, en suivant des sentiers carts, il rencontra des voleurs L'un d'eux l'emmena les mains lies derrire le dos mais il lui prcha la parole de Dieu, et le voleur eut foi : depuis il mena une vie religieuse, et c'est de lui que je tiens cette histoire. Martin continuant sa route, comme il passait prs de Milan, le diable s'offrit lui sous forme humaine, et lui demanda o il allait; et comme Martin lui rpondit qu'il allait o l'appelait le Seigneur, il lui dit : Partout o tu iras, et quelque chose que tu entreprennes, le diable se jettera la traverse. Martin rpondit ces paroles prophtiques : Dieu est mon appui, je ne craindrai pas ce que l'homme peut faire. Aussitt l'ennemi s'vanouit de sa prsence. Il fit abjurer sa mre l'erreur du paganisme; son pre persvra dans le mal. Ensuite, l'hrsie arienne s'tant propage par tout le monde, et surtout en Illyrie, il combattit seul avec courage la perfidie des prtres, et souffrit mille tourmens ( il fut frapp de verges et chass de la ville) Enfin il se retira Milan, et s'y btit un monastre. Chass par Auxentius, le chef des ariens, il se rfugia dans l'le Gallinaria, o il vcut long-temps de racines. Lorsque saint Hilaire revint de l'exil, il le suivit, et se btit un monastre prs de la ville. Un catchumne se joignit lui Pendant l'absence de saint Martin il vint mourir, et si subitement, qu'il quitta ce monde sans baptme.... Saint Martin accourt pleurant et gmissant. Il fait sortir tout le monde, se couche sur les mem-

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bres inanims de son frre Lorsqu'il eut pri quelque temps, peine deux heures s'taient coules, il vit le mort agiter peu peu tous ses membres, et palpiter ses paupires rouvertes la lumire. Il vcut encore plusieurs annes. On le demandait alors pour le sige piscopal de Tours ; mais comme on ne pouvait l'arracher de son monastre, un des habitans, feignant que sa femme tait malade, vint se jeter aux pieds du saint, et obtint qu'il sortt de sa cellule. Au milieu de groupes d'habitans disposs sur la route, on le conduisit sous escorte jusqu' la ville. Une foule innombrable tait venue des villes d'alentour pour donner son suffrage. Un petit nombre cependant, et quelques-uns des vques, refusaient Martin avec une obstination impie : C'tait un homme de rien, indigne de l'piscopat, et de pauvre figure, avec ses habits misrables et ses cheveux en dsordre. Mais, en l'absence du lecteur , un des assistans prenant le psautier, s'arrte au premier verset qu'il rencontre : c'tait le psaume : Ex ore infantium et lactentium perfecisti laudem, ut destruas inimicum et defensorem. Le principal adversaire de Martin s'appelait prcisment Defensor. Aussitt un cri s'lve parmi le peuple, et les ennemis du saint sont confondus. Non loin de la ville tait un lieu consacr par une fausse opinion comme une spulture de martyrs. Les vques prcdens y avaient mme lev un autel... Martin, debout prs du tombeau , pria Dieu de lui rvler quel tait le martyr , et ses mrites. Alors il vit sa gauche une ombre affreuse et terrible. Il lui ordonne de parler : elle s'avoue pour l'ombre d'un voleur mis mort pour ses crimes, et qui n'a rien de commun avec un martyr. Martin fit dtruire l'autel. Un jour il rencontra le corps d'un gentil qu'on portait au tombeau avec tout l'appareil de funrailles superstitieuses ; il en tait loign de prs de cinq cents pas, et ne pouvait gure distinguer ce qu'il apercevait. Cependant, comme il voyait une troupe de paysans, et que les linges jets sur le corps voltigeaient agits par le vent, il crut qu'on allait accomplir les profanes crmonies des sacrifices ; parce que c'tait la coutume des paysans gaulois de pro-

(476) mener travers les campagnes, par une dplorable folie , les images des dmons couvertes de voiles blancs 1. Il lve donc le signe de la croix, et commande la troupe de s'arrter et de dposer son fardeau. O prodige ! vous eussiez vu les misrables demeurer d'abord raides comme la pierre. Puis , comme ils s'efforaient pour avancer, ne pouvant faire un pas, ils tournaient ridiculement sur eux-mmes; enfin, accabls par le poids du cadavre, ils dposent leur fardeau, et se regardent les uns les autres, consterns, et se demandant euxmmes ce qui leur arrivait. Mais le saint homme s'tant aperu que ce cortge s'tait runi pour des funrailles et non pour un sacrifice , leva de nouveau la main, et leur permit de s'en aller et d'enlever le corps. Comme il avait dtruit dans un village un temple trs antique , et qu'il voulait couper un pin qui en tait voisin, les prtres du lieu et le reste des payens s'y opposrent... Si tu as, lui dirent-ils, quelque confiance en ton Dieu, nous couperons nous-mmes cet arbre, reois-le dans sa chute ; et si ton Seigneur est comme tu le Comme donc le pin penchait dis. avec toi, tu en rchapperas tellement d'un ct qu'on ne pouvait douter quel endroit il tomberait , on y amena le saint, garrott... Dj le pin commenait chanceler et menacer ruine ; les moines regardaient de loin et plissaient. Mais Martin, intrpide, lorsque l'arbre avait dj craqu, au moment o il tombait et se prcipitait sur lui, lui oppose le signe du salut. L'arbre se releva comme si un vent imptueux le repoussait , et alla tomber de l'autre ct, si bien qu'il faillit craser la foule qui s'tait crue l'abri de tout pril. Comme il voulait renverser un temple rempli de toutes les superstitions payennes, dans le village de Leprosum (le Loroux), une multitude de gentils s'y opposa, et le repoussa avec outrage. Il se retira donc dans le voisinage, et l, pendant trois jours, sous ' Dans Grgoire de Tours (ap. Scr. fr., II, 467), saint Simplicius voit de loin promener par la campagne, sur un char tran par des boeufs, une statue de Cyble. La Cyble germanique , Ertha , tait trane de mme. Tacit. German.

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le cilice et la-cendre, toujours jenant et priant, il supplia le Seigneur que, puisque la main d'un homme ne pouvait renverser ce temple, la vertu divine vnt le dtruire. Alors deux anges s'offrirent lui, avec la lance et le bouclier, comme des soldats de la milice cleste; ils se disent envoys de Dieu pour dissiper les paysans ameuts, dfendre Martin, et empcher personne de s'opposer la destruction du temple. Il revient, et la vue des payens immobiles , il rduit en poussire les autels et les idoles... Presque tous crurent en Jsus-Christ. Plusieurs vques s'taient runis de divers endroits auprs de l'empereur Maxime, homme d'un caractre violent. Martin, souvent invit sa table, s'abstint d'y aller, disant qu'il ne pouvait tre le convive de celui qui avait dpouill deux empereurs, l'un de son trne, l'autre de la vie. Cdant enfin aux raisons que donna Maxime ou ses instances ritres, il se rendit son invitation. Au milieu du festin, selon la coutume, un esclave prsenta la coupe l'empereur. Celui-ci la fit offrir au saint vque, afin de se procurer le bonheur de la recevoir de sa main. Mais Martin, lorsqu'il eut bu, passa la coupe son prtre, persuad sans doute que personne ne mritait davantage de boire aprs lui. Cette prfrence excita tellement l'admiration de l'empereur et des convives, qu'ils virent avec plaisir cette action mme, par laquelle le saint paraissait les ddaigner. Martin prdit long-temps avant Maxime que s'il allait en Italie , selon son dsir, pour y faire la guerre Valentinien, il serait vainqueur dans la premire rencontre, mais que bientt aprs il prirait. C'est en effet ce que nous avons vu. On sait aussi qu'il reut trs souvent la visite des anges qui venaient converser devant lui. Il avait le diable si frquemment sons les yeux, qu'il le voyait sous toutes les formes. Comme celui-ci tait convaincu qu'il ne pouvait lui chapper, il l'accablait souvent d'injures , ne pouvant russir l'embarrasser dans ses piges. Un jour, tenant la main une corne de boeuf ensanglante, il se prcipita avec fracas vers sa cellule, et lui montrant son bras dgouttant de sang et se glorifiant d'un crime qu'il venait de commettre : Martin , ditil o est donc ta vertu ? Je viens de tuer un des tiens. Le saint

( 478 ) homme runit ses frres, leur raconte ce que le diable lui a appris, leur ordonne de chercher dans toutes les cellules afin de dcouvrir la victime. On vint lui dire qu'il ne manquait personne parmi les moines, mais qu'un malheureux mercenaire, qu'on avait charg de voiturer du bois, tait gisant auprs de la fort. Il envoie sa rencontre. On trouve non loin du monastre ce paysan demi mort. Bientt aprs il cessa de vivre. Un boeuf l'avait perc d'un coup de corne dans l'aine. Le diable lui apparaissait souvent sous les formes les plus diverses. Tantt il prenait les traits de Jupiter , tantt ceux de Mercure, d'autres fois aussi ceux de Vnus et de Minerve. Martin, toujours ferme, s'armait du signe de la croix et du secours de la prire. Un jour, le dmon parut prcd et environn lui-mme d'une lumire clatante, afin de le tromper plus aisment par cette splendeur emprunte : il tait revtu d'un manteau royal, le front ceint d'un diadme d'or et de pierreries, sa chaussure brode d'or, le visage serein et plein de gat. Dans cette parure, qui n'indiquait rien moins que le diable, il vint se placer dans la cellule du saint pendant qu'il tait en prire. Au premier aspect, Martin fut constern, et ils gardrent tous les deux un long silence. Le diable le rompit le premier : Martin, dit-il, reconnais celui qui est devant toi. Je suis le Christ. Avant de descendre sur la terre, j'ai d'abord voulu me manifester toi. Martin se tut et ne fit aucune rponse. Le diable reprit audacieusement : Martin, pourquoi hsites-tu croire lorsque tu vois? Je suis le Christ. Jamais, rreprit Martin, notre Seigneur Jsus-Christ n'a prdit qu'il viendrait avec la pourpre et le diadme. Pour moi, je ne croirai pas la venue du Christ, si je ne le vois tel qu'il fut dans sa Passion, portant sur son corps les stigmates de la croix. A ces mots, le diable se dissipe tout coup comme de la fume, laissant la cellule remplie d'une affreuse puanteur. Je tiens ce rcit de la bouche mme de Martin ; ainsi que personne ne le prenne pour une fable. Car sur le bruit de sa religion, brlant du dsir de le voir, et aussi d'crire son histoire, nous avons entrepris, pour l'aller trouver, un voyage qui nous a t trs agrable. Il ne nous a entre-

(479) tenus que de l'abandon qu'il fallait faire des sductions de ce monde, et du fardeau du sicle pour suivre d'un pas libre et lger notre Seigneur Jsus-Christ. Oh ! quelle gravit, quelle dignit il y avait dans ses paroles et dans sa conversation ! Quelle force, quelle facilit merveilleuse pour rsoudre les questions qui touchent les divines Ecritures ! Jamais le langage ne peindra cette persvrance et cette rigueur dans le jene et dans l'abstinence, celte puissance de veille et de prire, ces nuits passes comme les jours, cette constance ne rien accorder au repos ni aux affaires, ne laisser dans sa vie aucun instant qui ne ft employ l'oeuvre de Dieu ; peine mme consacrait-il aux repas et au sommeil le temps que la nature exigeait. O homme vraiment bienheureux, si simple de coeur, ne jugeant personne, ne condamnant personne, ne rendant personne le mal pour le mal ! Et en effet, il s'tait arm contre toutes les injures d'une telle patience, que, bien qu'il occupt le plus haut rang dans la hirarchie, il se laissait outrager impunment par les moindres clercs, sans pour cela leur ter leurs places ou les exclure de sa charit. Personne ne le vit jamais irrit , personne ne le vit troubl, personne ne le vit s'affliger, personne ne le vit rire; toujours le mme, et portant sur son visage une joie cleste, en quelque sorte, il semblait suprieur la nature humaine. Il n'avait la bouche que le nom du Christ, il n'avait dans le coeur que la pit, la paix, la misricorde. Le plus souvent mme , il avait coutume de pleurer pour les pchs de ceux qui le calomniaient, et qui, dans la solitude de sa retraite, le blessaient de leur venin et de leur langue de vipre. Pour moi, j'ai la conscience d'avoir t guid dans ce rcit par ma conviction et par l'amour de Jsus-Christ. Je puis me rendre ce tmoignage que j'ai rapport des faits notoires et que j'ai dit la vrit. Ex Sulpicii Severi Historid sacra, libr. Il :

'tyvilov 'pau? xEiftiv^v. Strabon , 1. IV). Quae posita in altissimo monte omnes aditus difficiles habebat (Cassar, 1. VI, c. 56. Dio Cass., 1. XL). Sidon. Apollin. 1. III, epist. 4 [ann. 474]: Oppidum nostruni, quasi quemdam sui limitis oppositi obicem, circumfusarum nobis gentium arma terrificant. Sic asmulorum sibi in medio posili lacrymabilis prasda populorum, suspecti Burgundionibus, proximi Gothis, nec impugnantm ira nec propugnantm caremus invidi. L. VII, ad Mamert. : Rumor est Gothos in Romanum solum castra movissa, Huic semper irruptioni nos miseri Arverni janua suinus. Namque odiis inimicorum bine peculiaria fomenta subministramus, quia, qud necdm terminos suos ab Oceano in Rhodanum Ligeris alveo limitaverunt, solam sub ope Christi moram de noslro tantm obice patiuntur. Circumjectarum ver spatium tractumque regionum jampridem regni minacis importuna devoravit impressio. Ainsi livre elle-mme, abandonne des faibles successeurs de Majorien, l'Auvergne se dfendit hroquement, sous le patronage d'une puissante aristocratie. C'tait la maison d'Avitus avec ses deux allies, les familles des Apollinaires et des Ferrcols ; toutes trois cherchrent sauver leur pays , en unissant troitement sa cause celle de l'Empire. Aussi les Apollinaires occupaient-ils ds long-temps les plus hautes magistratures de la Gaule ( 1. I, epist. 5 ) : Pater , sccr, avus , proavus proefecturis urbanis prastorianisque , magis-

( 488 ) teriis palatinis militarjbusque micuerunt. Sidonius lui - mme pousa , ainsi que Tonantius Ferrol, une fille de l'empereur Avitus , et fut prfet de Rome sous Anthemius ( Scr. fr. I, 783 ). Tous ils employrent leur puissance soulager leur pays accabl En 469 , Tonanpar les impts et la tyrannie des gouverneurs. tius Ferrol fit condamner le prfet Arvandus, qui entretenait des Sidon. 1. I. ep. VII : Legati prointelligences avec les Gotlis. vincial Gallioe Tonantius Ferreolus proetorius, Afranii Syagrii consulis filia nepos. Thaumastus quoque et Petronius, verborumque scienti praediti , et inter principalia patrias nostrae dcora ponendi, proevium Arvandum publico nomine accusaluri cum gestis decretalibus insequunlur. Qui inter castera quae sibi provinciales agenda Haec ad rgent inandavcrant, interceptuas litteras. deferebant Gothorum charta videbatur emitti , pacem cum graeco imperatore (Anthemio) dissuadens , Britannos super ligerim sitos oppugnari oportere demonstrans, cum Burgundionibus jure gentium Gallias dividi debere confirmans. Ferrol avait lui-mme administre' la Gaule et diminue'les impts. Sid. 1. VII, ep. XII : ...Prastermisi slylus nosfer Gallias tibi administratas tune qum maxime incoium s erant propterque prudentiam tantam providentiamque , currum tuum provinciales cum plausuum maximo accentu spontaneis subiisse cervicibus ; quia sic habenas Galliarum moderabere, ut possessor exhaustus tributario jugo relevaretur. Avitus, dans sa jeunesse, avait t dpute par l'Auvergne Honorais, pour obtenir une rduction d'impts ( Pancgyr. Aviti, vers 207). Sidonius dnona et fit punir [471] Scronatus, qui opprimait l'Auvergne et la trahissait comme Arvandus. L. II, ep. I : Ipse Gatilina soeculi nostri implet quotidi sylvas fugientibus , villas liospitibus , altaria reis, carceres clericis : exultans Gothis , insultansque Romanis , illudens proefectis , colludensque numerariis : leges Theodosianas calcans , Theodoricianasque proponens veteresque culpas, nova tributa perquirit. Proind moras tuas citus explida, et quicquid illud est quod te retentat, incide. Ces derniers mots s'adressent au fils d'Avitus , au puissant Ecdicius... Te expectat palpitantium civium extrema libertas.

(4*9) Quicquid sperandum, quicquid desperandum est, fieri te medio , te praesule placet. Si nulLs republic vires, nulla praesidia, si nulloe, quantum rumor est, Anthemii principis opes : statuit te auctore nobilitas seu patriam dimittere, seu capillos. Ecdicius, en effet, fut le hros de l'Auvergne ; il la nourrit pendant une famine , leva une arme ses frais, et combattit contre les Goths avec une valeur presque fabuleuse : il leur opposait les Burgundes, et attachait la noblesse Arverne la cause de l'Empire, en l'encourageant la culture des lettres latines. Gregor. Turon., 1. II, c. 24 : Tempore Sidonii episcopi magna Burgundiam fams oppressit. Cumque populi per diversas remiEcdicius quidam ex senatoribus giones dispergerentur, sit pueros suos cum equis et plaustris per vicinas sibi civitates, ut eos qui hc inopi vexabantur , sibi adducerent. At illi euntes, cunctos pauperes quotquot invenire potuerunt, adduxre ad domum. ejus. Ibique eos per omne tempus sterilitatis pascens, ab interitu famis exemit. Fuereque , ut multi aiunt , amplis qum quatuor millia Post quorum discessum , vox ad eum coelis lapsa pervenit : Ecdici, Ecdici, quia fecisti rem hanc , tibi et semini tuo panis non deerit in sempiternum. Sidon. 1. III, epist. III : Si quand , nunc maxime, Arvernis meis desideraris, quibus dilectio tui imman dominatur , et quidem multiplicibus ex causis.... Mitto ist'ic ob gratiam pueritias tuas undique gentium confluxisse studia litterarum, tuaeque personoe debitum , quod sermonis Celtici squamam depositura nobilitas, nunc oratorio stylo, nunc etiam camoenalibus modis imbuebatur. Illud in te affectum principaliter universitatis accendit, quodquos olim Latinos fieri exegeras, barbaros deinceps esse vetuisti... Hinc jam per otium in urbem reduci, quid tibi obvim processerit officiorum, plausuum, fletuum, gaudiorum , ma gis tentant vota conjicere, qum verba reserare Dm alii osculis pulverem tuum rapiunt, alii sanguine ac spumispinguia lupata suscipiunt; ....Hic licet multi complexibus tuorum tripuin te maximus tamen laetitia; popularis imdiantes'adhaerescerent, Taceo deinceps collegisse te privatis vipetus congerebatur , etc ribus publici cxcrcits speciem.... te aliquot supcrvenientibus cu-

neos mactsse turmales, praelium desideratis.

( 490 ) numro tuoruni vix binis ternisve post

En 472, le roi des Goths, Euric, avait conquis toute l'Aquitaine, l'exception de Bourges et de Clermont (Sidon. , 1. VII, ep. 5). Ecdicius put prolonger quelque temps une guerre de partisans dans les montagnes et les gorges de l'Auvergne (Scr. fr. XII, 55 : Alvernorum difficiles aditus et obviantia castella). Renaud, selon la tradition , n'osa entrer dans l'Auvergne, et se contenta d'en faire le tour. Sans doute, comme plus tard au temps de Louis-le-Gros, les Auvergnats abandonnrent les chteaux pour se rfugier dans leur petite, mais imprenable cit ( loc. cit. : Praesidio civitatis, quia peroptim erat munita, relictis montanis acutissimis castellis, se commiserunt). Sidonius en tait alors voque ; il instituait, pour repousser ces Ariens, des prires publiques : Non nos aut ambustam murorum faciem, aut putrem sudium cratem, aut propugnacula vigilum trita pectoribus confidimus opitulatura : solo tamen invectarum te ( Mamerte ) auctore, Rogationum palpamur auxilio; quibus inchoandis instituendisque populus Arvernus, etsi non effectu pari, affectu cert non impari, ccepit, et ob hoc circumfusis necdm dat terga terroribus. initiari, (L. VII, ep. ad Mamert. ) On a vu qu'Ecdicius repoussa les Goths ; l'hiver les fora de lever le sige (Sidon., 1. III, ep. 7). Mais en 475 , l'empereur Nepos fit la paix avec Euric, et lui cda Clermont. Sidonius s'en plaignit amrement (1. VII, ep. 7 ) : Nostri hic nunc est infelicis anguli status, cujus, ut fama confirmat, melior fuit sub bello qum sub pace conditio. Facta est servitus nostra pretium securitatis alinas. Arvernorum, proli dolor! servitus, qui, si prisca replicarentur , audebant se quondam fratres Latio dicere, et sanTellus guine ab Iliaco populos computare (et ailleurs : quas Latio se sanguine tollit alumnam. Panegyr. A vit. , v. 159)... Hoccine merucrunt inopia, flamma, ferrum, pestilentia , pingues credibus gladii, et macri jejuniis proeliatores ! Ecdicius, ne voyant plus d'espoir, s'tait retir auprs de l'Em-

( 491 ) pereur avec le titre de Patrice. (Sidon. 1. V, ep. 16; 1. VIII , 7; Jornandes, c. 45.) Euric relgua Sidoine dans le chep. teau de Livia, douze milles de Carcassonne, mais il recouvra la libert en 478, la prire d'un Romain, secrtaire du roi des Goths, et fut rtabli dans le sige de Clermont (Sidon. 1. VIII, ep. 8 ). Lorsqu'il mourut [484] , ce fut un deuil public. : Factum est post haec, ut accedente febre oegrotare coepisset ; qui rogat suos ut eum in ecclesiam ferrent. Cumque illuc inlatus fuisset, conveniebat ad eum multitudo virorum ac mulierum, simulque etiam et infantium plangentium atque dicentium : Cur nos deseris, pastor bone, vel cuinos quasi orphanos derelinquis ? Numquid erit nobis post transitum tuum vita ?.. Hase et bis similia populis cum magno ftetu dicentibus... Greg. Tur., 1. II, c. 23. Malgr la conqute d'Euric, les Arvernes durent jouir d'une certaine indpendance. Alaric, il est vrai, les enrle dans sa milice pour combattre Vougl [507] ; mais on les voit pourtant lire successivement pour vques deux amis des Francs, deux victimes des soupons des Ariens, Burgundes et Goths ; en 484, ' Apruncule, dont Sidoine mourant avait prdit la venue ( Greg. Tur., 1. II, c. 23 ), et saint Quintien en 507 , l'anne mme de la bataille de Vougl. Les grandes familles de Clermont conservrent aussi sans doute une partie de leur influence. On trouve parmi les-vques de Clermont un Avitus non infimis nobilium natalibus ortus. (Scr. fr. II, 220, note), qui fut lu par l'assemble de tous les Arvernes. ( Greg. Tur., 1. IV, c. 55), et fut trs-populaire (Fortu1. III, carm. 26). Un autre Avitus est vque de Vienne. nat, Un Apollinaire fut vque de Reims. Le fils de Sidonius fut vque de Clermont aprs saint Quintien ; c'tait lui qui avait command les Arvernes Vougl : Ibi tune Arvernorum populus, qui cum venerat, et primi qui erant ex senatoribus, conrucrunt. Apollinare (Greg. Tur., 1. II, c. 57.) De ce passage et de quelques autres encore, on pourrait induire cette famille avait t originairement la tte des clans Arque verncs :

(492 Greg. Tur., 1. III, c. 2 : Cm populus (Arvernorum) sanctum Quintianum, qui de Rutheno ejectus fuerat, elegisset, Alchima et Placidina,.uxor sororque Apollinaris, ad sanctum Quintianum venientes, dicunt : Sufficiat, domine, sencctuti tuae qud es pis copus ordinatus. Permutat, inquiunt, pietas tua servo tuo Apolli Quibus ille : Quidego, narilocum hujus honoris adipisci inquit, praestabo, cujus potestati nihil est subditum : sufficit enim ut oralioni vacans , quotidianum mihi victum praestet ecclesia. Les Avitus semblent n'avoir t pas moins puissans. Leur terre portait leur nom (Avitacum. Sidonius en donne une longue et pomCarmen XVIII.) Ecdicius, le fils d'Avitus, peuse description, semble entour de dvous. Sidonius lui crit (1. III, ep. 3 ) : Vix duodeviginti equitum sodalitate comitatus, aliquot millia Gothorum... transisti.. Cm tibi non daret tot pugna socios, quot solet mensa convivas. Le nom mme d'Apollinaire indique peut-tre une famille originairement sacerdotale. Le petit-fils de Sidonius, le snateur Arcadius, appela en Auvergne Childebert au prjudice de Theuderic [550] , prfrant sans doute sa domination celle de l'ami de saint Quintien, du barbare roi de Metz ( Greg. Tur., 1. III, c. 9, sqq.) Un Ferrol tait vque de Limoges en 585 (Scr. fr. II, 296 ). Un Ferrol occupa le sige d'Autun avant saint Lger. On sait que la gnalogie des Carlovingiens les rattache aux Ferrols. Un capitulair de Charlemagne (ap. Scr. fr. V, 744), contient des dispositions favorables un Apollinaire, vque de Riez ( Riez mme s'appelait Reii Apollinares ). Peut-tre les Arvernes eurentils grande part l'influence que les Aquitains exercrent sur les Carlovingiens. Raoul Glaber attribue aux Aquitains et aux Arvernes le mme costume, les mmes moeurs et les mmes ides (1. III s op. Scr. fr. X, 42).

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SUR LA CAPTIVIT DE LOUIS II ( Voy. page 579 )

Audite omnes fines terre orrore cum tristiiia , Quale scelus fuit factum Benevento civitas. ,Lhuduicum comprenderunt, sancto pio Auguste). Beneventani se adunrunt ad unum consilium , Adalferio loquebatur et dicebant principi : Si nos eum vivum dimittemus , certe nos peribimus. Celus magnum preparavit in istam provintiam, Regnum nostrum nobis tollit, nos habet pro nihilum, Plures mala nobis fecit, rectum est moriad. Deposuerunt sancto pio de suo palatio ; Adalferioillum ducebat usque ad pretorium , Ille Tero gaude visum tanquam ad martyrium. Exierunt Sado et Saducto, invocabant imperio ; Et ipse sancte pius incipiebat dicere : Tanquam ad latronem venistis cum gladiis et fustibus Fuit jam namque tempus vos allevavit in omnibus , Modo vero surresistis adversus me consilium , Neseio pro quid causamvultis me occidere. Generacio crudelis veni interficere, Eclesieque sanctis Dei venio diligere, Sanguine veni vindicare quod super terram fusus est. Kalidus ille temtador , ratum atque nomine Cororum imperii sibi in caput pronet et dicebat populo : Ecce sumus imperator, possuni vobis regero. Leto animo habebat de illo quo fecerat ; A demonio vexatur , ad terram ceciderat, Exierunt multx turmae videre mirabilia. MagnusDominus Jsus Christus judicavit judicium : Multa gens paganorum exit in Calabria, Super Salerno pervenerunt, possidere civitas. Juratum est ad Surete Dei reliquie Ipse regnum defendendum, et alium requirere.

( 494 ) coutez, limites de la terre, coutez avec horreur, avec tristesse, quel crime a t commis dans la ville de Bnvent. Ils ont arrt Louis, le saint, le pieux Auguste. Les Bnventins se sont assembls en conseil; Adalfieri parlait, et ils ont dit au prince : Si nous le renvoyons en vie, sans doute nous prirons tous. Il a prpar de cruelles vengeances contre cette province : il nous enlve notre royaume, il nous estime comme rien ; il nous a accabls de maux : il est bien juste qu'il prisse. Et ce saint, ce pieux monarque , ils l'ont fait sortir de son palais ; Adalfieri l'a conduit au prtoire , et lui, il paraissait se rjouir de sa perscution comme un saint dans le martyre. Sado et Sadueto sont sortis en invoquant les droits de l'Empire ; lui-mme il disait au peuple : Vous venez moi comme au-devant d'un voleur avec des pes et des btons ; un temps tait o je vous ai soulags, mais prsent vous avez complot contre moi, et je ne sais pourquoi vous voulez me tuer : je suis venu pour dtruire la race des infidles ; je suis venu pour rendre un culte l'glise et aux saints de Dieu ; je suis venu pour venger le sang qui avait t rpandu sur la terre. Le tentateur a os mettre sur sa tte la couronne de l'Empire ; il a dit au peuple : Nous sommes empereur, nous pouvons vous gouverner, et il s'est rjoui de son ouvrage ; mais le dmon le tourmente et l'a renvers par terre, et la foule est sortie pour tre tmoin du miracle. Le grand-matre Jsus-Christ a prononc son jugement : la foule des paens a envahi la Calabre ; elle est parvenue Salerne pour possder cette cit : mais nous jurons sur les saintes reliques de Dieu de dfendre ce royaume et d'en conqurir un autre.

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SUR LES COLLIBERTSCAGOTS CAQUEUX GESITAINS etc. , , , , ( Voy. page 51, IIe volume ). On retrouve dans l'ouest et le midi de la France quelques dbris d'une population opprime, dont nos anciens monumens font souvent mention, et que poursuivent encore une horreur et un dgot traditionnels. Les savans qui ont cherch en dcouvrir l'origine ne sont arrivs, jusqu' ce jour, qu' des conjectures contradictoires, plus ou moins plausibles, mais peu dcisives. Ducange drive le mot Collibert de cum et de libertus. Il semble, dit-il, que les Colliberts n'taient ni tout--fait esclaves, ni tout--fait libres. Leur matre pouvait, il est vrai, les vendre ou les donner, et confisquer leur terre. Iratus graviter contra eum, dixi ei quod meus Colibertus erat, et poteram eum vendere vel ardere, et terram suam cuicumque vellem dare, tanquam terram Coliberti mei (Charta Juelli de Meduana, ap. Carpentier, Supplem. gloss.) On les. affranchissait de la mme manire que les esclaves (vid. Tabul. Burgul. , Tabul. S. Albini Andegav., Chart. Lud. VI, ann. 1105, ap. Ducange). Enfin un auteur dit: Libertate carens Colibertus dicitur esse ; De servo factus liber, Libertus, etc. (Ebrardus Betun., ibid. Vid. Acta pontifie. Cenoman., ap. Scr. fr. X, 585.) Mais, d'un autre ct, la loi des Lombards compte les Colliberts parmi les libres (-L. I, tit. 29; 1. II, t. 21, 27, 55). Ils taient sans doute en gnral serfs sous condition, et dans une situation peu diffrente de celle des homines de capite. Le Domesday Book les appelle colons. On les voit souvent sujets des redevances : De Colibertis S. Cyrici, qui unoquoque anno solvere debent de capite trs denarios (Liber chart. S. Cyrici Nivern., n 85, ap. Ducange). C'est surtout dans le Poitou , le Maine, l'Anjou, l'Aunis, qu'on

( 496 ) trouve le mot de Colliberts. L'auteur d'une histoire de l'le de Maillesais les reprsente comme une peuplade de pcheurs qui s'tait tablie snr la Svre, et donne de leur nom une tymologie singulire. In extremis quoque insulaa, supr Separis alveum quoddam genus hominum, piscando quseritans victum, nonmilla tuguria confecerat, quod majoribus Collibertorum vocabulum contraxerat. Collibertus cultu imbrium descendere putatur. Il ajoute que les Normands en dtruisirent une grande quantit et qu'on chante e