Guide Pratique 1: L’Afrique Urbaine

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  • 8/12/2019 Guide Pratique 1: LAfrique Urbaine

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    G U I D E SP R A T I Q U E SP O U R L E S

    D C I D E U R SP O L I T I Q U E S

    1LAFRIQUE URBAINE :

    CONSTRUIRE EN TIRANT PARTI DU POTENTIELINEXPLOIT

    logerpauvres

    villesdans lesles

    africainesL Alliance des VillesCities Without Slums

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    Guide pratique n 1

    Copyright Programme des Nations Unies pour les tablissementshumains (ONU-Habitat), 2011

    Tous droits rservsProgramme des Nations Unies pour les tablissements humains(ONU-Habitat)PO Box 30030, Nairobi (Kenya)Tl : +254 2 621 234Tlcopie : +254 2 624 266www.unhabitat.org

    AVERTISSEMENTLes appellations employes dans la prsente publication et laprsentation des lments qui y figurent nimpliquent de la partdu Secrtariat de lOrganisation des Nations Unies aucune prise

    de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ouzones ou de leurs autorits, ni quant au trac de leurs frontiresou limites, ni quant leur systme conomique ou leur degr dedveloppement. Les analyses, conclusions et recommandationsfigurant dans le prsent rapport ne refltent pas ncessairementles vues du Programme des Nations Unies pour les tablissementshumains, de son Conseil dadministration ou de ses tats membres.

    Numro HS/038/11FNumro ISBN (Series): 978-92-1-131926-2Numro ISBN (Volume): 978-92-1-132337-5

    Photo de couverture par A Grimard

    La publication de la srie Loger les pauvres dans les villesafricaines a t rendue possible grce au soutien financier delAlliance des villes.

    Publi parProgramme des Nations Unies pour les tablissements humains(ONU-Habitat)Service de la formation et du renforcement des capacitsCourriel: [email protected]

    Impression et Pr-presse ; BNUN/ Section des Publications/ Nairobi, Certification ISO 14001:2001

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    GUIDES PRATIQUES POUR LES DCIDEURS POLITIQUES

    logerpauvres

    villesdans lesles

    africaines

    LAFRIQUE URBAINE :CONSTRUIRE EN TIRANT PARTI DU POTENTIEL INEXPLOIT

    Cities Without Slums

    LAlliance des Villes

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE2

    Cette srie de guides pratiques a t prpare en sinspirant dune srie similaire sur le logement despauvres dans les villes dAsie et qui a t publie conjointement par ONU-Habitat et la CESAP (Commissionconomique des Nations Unies pour lAsie et le Pacifique) en 2009. Cette srie est une adaptation de la versionpour lAsie aux ralits et aux contextes des pays dAfrique sub-saharienne et elle sera disponible en anglais,franais et portugais. Ceci a t rendu possible grce aux contributions financires de lAlliance des villes etdONU-Habitat.

    Les guides ont t rdigs par lquipe dexperts du Centre africain pour les villes (ACC) dirig par EdgarPieterse, avec des contributions importantes de Karen Press, Kecia Rust et Warren Smit. Les experts delquipe qui ont contribu aux rapports de base prcieux pour les guides sont Sarah Charlton, Firoz Khan,Caroline Kihato, Michael Kihato, Melinda Silverman et Tanya Zack. Bruce Frayne a apport son concours la gestion du projet et Tau Tavengwa en a magistralement assur la conception. Un certain nombre de col-

    lgues du Service de la formation et du renforcement des capacits, du Service du logement et du Bureaurgional pour lAfrique et les pays arabes dONU-Habitat ont contribu la conception, au dveloppe-ment et ltude des guides. Ce sont notamment Gulelat Kebede, Cynthia Radert, Claudio Acioly, JeanDAragon, Rasmus Precht, Christophe Lalande, Remy Sietchiping et Alain Grimard. Les guides ont aussibnfici des contributions de plusieurs experts ayant particip la Runion du Groupe dexperts qui sesttenue en novembre 2009 Nairobi (Kenya) : Benjamin Bradlow, Malick Gaye, Serge Allou, Barbra Kohlo,Ardelline Masinde, Esther Kodhek, Jack Makau, Allain Cain, Sylvia Noagbesenu, Kecia Rust, Babar Mum-taz, Alain Durand Lasserve, Alan Gilbert et Tarek El-Sheik.

    Toutes ces contributions ont orient cette srie de guides pratiques. Nous esprons quils faciliteront letravail quotidien des dcideurs politiques dans la rgion de lAfrique sub-saharienne dans leur qute demoyens susceptibles damliorer le logement et laccs au foncier pour les citadins pauvres.

    REMERCIEMENTS

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    3GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    RFRENCES 45

    AUTRES LECTURES SUGGRES 46

    SITES INTERNET 48

    TABLE DES MATIRES

    REMERCIEMENTS

    RESSOURCES

    LAFRIQUE URBAINE: CONSTRUIRE EN TIRANT PARTI DU POTENTIEL INEXPLOIT 4

    LURBANISATION EST LA FOIS COMPRHENSIBLE ET GRABLE 6

    LES MOTEURS DE LURBANISATION 9

    LES CONSQUENCES DUNE URBANISATION MAL GRE 10

    DES CHANGEMENTS DE MENTALIT SONT NCESSAIRES :

    CONSIDRER LE DVELOPPEMENT URBAIN COMME UNE OPPORTUNITE 13

    UN CHANGEMENT DE MENTALIT: CINQ BONNES RAISONS POUR MIGRER 14PASSAGE A LA VITESSE SUPERIEURE : DE LA PRVENTION LA FACILITATION 20

    LE LOGEMENT 20

    LE FONCIER 27

    DIX STRATGIES POUR RENDRE LES TERRAINS PLUS ACCESSIBLES AUX PAUVRES 31

    LA GOUVERNANCE 36

    RENFORCER LEFFICACIT DES ADMINISTRATIONS LOCALES EN AFRIQUE 40

    APPRENDRE AGIR AGIR AMLIORER - AGIR 44

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE4

    LAFRIQUE URBAINE : CONSTRUIRE EN TIRANT PARTI DU PO-TENTIEL INEXPLOIT

    Une Afrique en urbanisation dans un monde urbanisLAfrique et lAsie sont lpicentre de la deuxime transition urbaine grande chelle de lhistoire du monde.La premire a eu lieu entre 1750 et 1950 en Amrique du Nord et en Europe, qui ont vu le pourcentage de lapopulation urbaine dans leur population totale passer de 10 % 52 %. La deuxime touche en grande partieles pays de Sud depuis 1950; dici 2030, la part de la population urbaine dans cette rgion aura bondi de18 % 56 %.

    La part de la population urbaine dans la population totale de lAfrique a progress de 15 % en 1960 35 % en2006 et devrait dpasser 60 % dici 2030.1Ainsi, mme si lAfrique nest pas encore urbanise 50 %, sontaux durbanisation, 3,3 %, est lun des plus forts du monde.2Actuellement, le continent est urbanis 38%, encore que certains pays et rgions aient dj atteint la barre des 50 % et que les plus grandes conomies

    africaines laient presque toutes dpass.Ces valeurs numriques ne sont que la face visible des profonds changements dmographiques et culturelsque cette mutation implique. La vie en zone urbaine est trs diffrente de la vie en zone rurale et les activi-ts exerces pour sassurer des moyens de subsistance sont aussi totalement diffrentes; les rseaux sociauxstendent bien au-del des liens familiaux, claniques et ethniques; les rgles spirituelles et coutumires sontremises en cause et fusionnes avec de multiples influences et tendances extrieures; la dynamique gnra-tionnelle est modifie; et, surtout, les attentes et les aspirations de la population se modifient sensiblementPour toutes ces raisons, les tablissements urbains sont des lieux de vie marqus par la densit, le changement,lincertitude, la surprise, le risque, et paradoxalement, le sentiment que tout est possible.

    En raison de leur manque de recul, les dirigeants et les dcideurs politiques de nombreux tats et villesdAfrique ont en gnral t impuissants reconnatre la ralit et les consquences de lurbanisation rapide.Ainsi, la mauvaise gestion des villes et le gaspillage de leur potentiel sont monnaie courante en Afrique sub-saharienne. Au pire, cette impuissance se reflte travers des conditions de vie de bidonvilles et par un taux

    dexpansion lev de cette forme dtablissements. Ce taux tant quasiment identique au taux de croissancedes zones urbaines en gnral suggrant que le doublement de la population urbaine au cours des 20 pro-chaines annes impliquera la formation de plus en plus de bidonvilles.

    Les raisons pour lesquelles il na pas t possible dinverser cette expansion des tablissements informelsinduite par laccroissement dmographique sont nombreuses et complexes. Dans ce Guide Pratique, noussouhaitons rflchir la plus importante dentre elles, savoir le manque dimagination de la part de tous ceuxqui sont impliqus dans la gestion et le dveloppement urbains et qui nont pas su voir dans lurbanisationune ressource potentiellement prcieuse pour rsoudre la crise du dveloppement en Afrique, la considrantplutt comme une des causes de la crise.

    Les ides fausses sur la vie urbaineCe manque dimagination peut tre attribu plusieurs ides fausses profondment enracines. Premire-ment, lurbanisation est souvent considre comme une mauvaise chose, car elle implique un dpeuplementdes zones rurales et un recul de lactivit conomique et du capital humain dans ces zones. Deuximement,daucuns estiment que la vie urbaine entrane une dperdition des bonnes valeurs morales associes aux innocents modes de vie ruraux. Il sagit l dune simplification dune dynamique plus complexe lie unerupture des valeurs et du patrimoine culturels traditionnels. Troisimement, lurbanisation, est-il avanc, ag-graverait la pauvret car les agglomrations urbaines ne sont dj pas en mesure de rpondre aux besoinsdes populations existantes et un dveloppement incontrl ne ferait quempirer la situation. Enfin, les zonesurbaines sont parfois considres comme un terrain privilgi des opportunistes politiques qui cherchent saper les ordres et les partis politiques tablis. Ce sont l quelques-uns des facteurs subjectifs qui conduisentles politiciens et les responsables du secteur public envisager lurbanisation et ses consquences commefondamentalement ngatives et comme un phnomne endiguer, voire inverser.

    GUIDE PRATIQUE N 1 POUR LES DCIDEURS POLITIQUES

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    5GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    DES TENDANCES POSITIVES SOUS-TENDENT LURBANISATION EN AFRIQUE

    Revenant sur la dernire dcennie, il semblevident que lheure de lAfrique a finalementsonn. Depuis 2000, les investissements privsannuels en Afrique ont tripl, se chiffrant une moyenne de 19 milliards de dollars entre2006 2008. Les 18 plus grandes villes afric-

    aines ont dsormais un pouvoir dachat totalde 1 300 milliards de dollars. En 2000, environ59 millions de foyers africains avaient franchila barre des 5000 dollars de revenu par an, au-del de laquelle ils commencent dpenser peu prs la moiti de leurs gains en produitsnon-alimentaires. Dici 2014, ils devraienttre 106 millions. En 1998, seulement deuxmillions dAfricains avaient des tlphonesmobiles; aujourdhui, ils sont 400 millions. Ily a dix ans, seulement 58 % des enfants af-

    ricains taient scolariss dans le primaire;aujourdhui, prs de 75 % le sont. En 2009, lesdpenses de sant se sont accrues en termesrels dans 20 des 29 pays les plus pauvres. Si,en 2002, seulement 50 000 Africains au curmme de la pandmie de sida pouvaient ac-cder des antirtroviraux, ils sont aujourdhui3,7 millions pouvoir bnficier de ce traite-ment, sans avoir payer.3

    La possibilit de tirer parti de ces tendancespositives dpend de quelques facteurs cri-

    tiques. Tout dabord, les tats africains peu-

    ventils consolider ces tendances par le biaisdinvestissements dans linfrastructure ad-quatement financs, bien cibls et raliss ef-ficacement au cours des quelques prochainesdcennies? Ensuite, peuvent-ils maintenir cestaux de croissance conomique modrs voire

    levs, tout en augmentant radicalement lenombre de bnficiaires de cette croissance- savoir parvenir une croissance inclu-sive? Enfin, sont-ils en mesure damliorerlefficacit carbone de lconomie lre duneplus grande instabilit climatique? Les idesavances par divers organismes des NationsUnies sur le potentiel de lconomie verte etle dveloppement urbain durable sont prom-etteuses pour assurer des formes plus ouverteset durables de croissance. Pour faire face ces

    facteurs, il faudra que les tats africains ap-prhendent de faon beaucoup plus prcise etclaire les dimensions territoriales des politiquesde dveloppement locales et nationales. Lesinvestissements publics et les mesures en fa-veur de la croissance doivent tre fonds surune meilleure comprhension de la faon dontle dveloppement urbain et rural sera favorispar un ensemble intgr de mesures de dvel-oppement.

    Par dfinition, cela suppose un change-

    ment de mentalit de la part des gouverne-

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    ments, qui doivent reconnatre le fait quelurbanisation peut tre une dynamique fon-damentalement productive exigeant une prisede conscience sereine et une comprhensionfactuelle des volutions intervenant dans les

    villes et des mesures que les pouvoirs publicsdoivent mettre en uvre pour y rpondre.Tous ceux impliqus dans lamnagement et ledveloppement urbains doivent tenir comptede quatre messages essentiels :

    1. Lurbanisation est la fois comprhensibleet grable.

    2. Des solutions durables de dveloppementurbain existent, mais elles exigent que soi-ent instaurs la confiance et le dialogue

    et que soient mises en place de nouvellesinstitutions bien adaptes au contexte ur-bain informel de lAfrique.

    3. La russite ne peut venir que de la pour-suite sans relche du cycle itratif agir apprendre agir apprendre , qui faitavancer les gouvernements innovants. Desexemples de telles pratiques peuvent tre

    observs dans des domaines tels que lefoncier, le logement et les moyens de sub-sistance.

    4. Les dynamiques du pouvoir qui caract-risent les milieux et institutions urbainsdoivent tre reconnues et matrises, afindassurer les rsultats les plus dmocra-tiques possibles.

    Le Guide n 1 passe en revue chacun de cesmessages de faon plus dtaille, tout en ex-

    pliquant les ides centrales qui sont prises encompte dans les sept autres Guides de cettesrie.

    LURBANISATION EST LA FOISCOMPRHENSIBLE ET GRABLE

    MODES DURBANISATION

    Entre 2000 et 2030, la population urbaine delAfrique passera de 294 millions 742 millionsdhabitants.4Il sagit dun dfi de taille, tantdonn que la plupart des Etats africains nesont dj pas en mesure de rpondre auxbesoins de leur population urbaine actuelle.La croissance urbaine rsulte la fois delaccroissement dmographique naturel et

    des migrations. Daucuns seront peut-tresurpris dapprendre que lexode rural nentreque pour un quart dans cette croissance,5.

    qui est donc attribuable pour lessentiel laccroissement dmographique naturel dela population des villes. Cette ralit urbaineva lencontre de lide reue des politiques,qui cherchent de manire obsessionnelle endiguer les migrations rurales-urbaines.

    Une ide fausse trs rpandue est quelurbanisation va de pair avec une explosiondes mgapoles (villes de plus de sept millions

    dhabitants). En effet, la grande majorit descitadins africains rsident, et continueront dersider, dans des villes de moins de 0,5 milliondhabitants. En 2005, par exemple, 51 % dela population urbaine africaine vivaient dansdes villes de moins de 0,5 million dhabitants,10 % dans des villes comptant entre 0,5 et 1million dhabitants, 23 % dans des villes de 1 1,5 million dhabitants, 8 % dans des villesde 5 10 millions dhabitants et seulement9 % dans des villes de plus de 10 millionsdhabitants. (Voir tableau 1.)

    La taille dune ville influe de faon fonda-mentale sur ses caractristiques, ses prob-lmes et ses potentialits. Il est indispensableque les politiques destines faire face lurbanisation tiennent compte du type et dela taille de chaque agglomration.

    Il est intressant de noter que, dans ledernier rapport dONU-Habitat sur ltat des

    villes dans le monde, laccent est mis sur

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    7GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    lmergence de nouveaux systmes de peu-plement urbain qui introduisent de nouvelles

    logiques conomiques et de mobilit dans lafaon dont les tablissements urbains fonc-tionnent au sein des territoires nationaux etentre eux : mga-rgions, couloirs urbains etvilles-rgions.7

    Les mga-rgions sont des unitsconomiques naturelles qui rsultent dela croissance, de la convergence et deltalement dans lespace de rgions mt-ropolitaines lies gographiquement etrelativement matures.

    Les couloirs urbainscorrespondent unsystme de centres urbains connects viades liaisons de transport. Par exemple, lerseau qui relie la rgion mtropolitainedIbadan, Lagos et Accra est un couloir de600 km qui sert de poumon conomique la rgion. Un autre exemple significatifest le couloir entre Johannesburg dans laville-rgion de Gauteng et Maputo au Mo-zambique.

    Les villes-rgions se constituent parlextension de grandes villes au-del deslimites administratives formelles pour ab-sorber des villes de tailles diffrentes. Sou-vent, ce processus implique labsorptionde larrire-pays semi-urbain et rural ouune fusion avec dautres villes intermdi-aires, aboutissant la cration de grandesagglomrations qui finissent par formerdes villes-rgions.

    Les points nodaux des couloirs urbains, et

    surtout des nouvelles villes-rgions, conci-

    dent avec un aspect de longue date des sys-tmes urbains africains : la centralit de la ville

    dominante. LAfrique a une longue histoire decroissance centralise dans les grandes villes.La localisation historique de celles-ci, notam-ment en tant que villes portuaires, et leur utili-sation en tant que zones de commerce (avantla colonisation) ainsi quen tant que centresdadministration coloniale, ont jou un rledans cette volution. Aprs lindpendance,certains gouvernements ont galement con-tribu la renforcer. Cependant, limportancedes villes dominantes dans lAfrique urbaineest aujourdhui parfois remise en question, carune grande partie de la population urbaine ducontinent vit dans des petits centres urbains etnon dans des grandes agglomrations (com-me indiqu dans le tableau 1).

    LA NCESSIT DUNE POLITIQUENATIONALE DURBANISATIONET DE POLITIQUES URBAINESSPCIFIQUES

    Face au rythme rapide durbanisation, associ la diversit des formes dagglomration ur-baine et des hritages coloniaux, tous les tatsdoivent dabord et avant tout bien apprhenderleur systme national urbain et la faon dont ilsintgre la dynamique territoriale globale dupays. Une telle analyse dbouche en gnralsur une politique nationale durbanisation.Cette politique devrait exposer clairement lafaon dont les pouvoirs publics dfinissent

    et conoivent la configuration du territoire

    TABLEAU 1: TAILLE DES AGGLOMRATIONS AFRICAINES EN 2007 ET PRVISIONS POUR 20256

    Taille de lagglomration

    Plus de 10

    millions

    dhabitants

    5

    10 millions

    dhabitants

    1 5millions

    dhabitants

    0,5-1million

    dhabitants

    Moins de0,5 million

    dhabitantsNombre de villes en 2007 2 2 48 69 Inconnu

    Population (1000) 23 076 14 238 102 418 41 057 231 404

    Pourcentage de la popula-tion urbaine

    6,18 3,81 27,53 10,10 52,48

    Tendances pour 2025 3 8 73 84 Inconnu

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    national, notamment le maillage des villes,grandes et moyennes, et des villages, et leursfonctions respectives. Gnralement, cette vi-sion dtermine les dcisions concernant lespoints particuliers du territoire national o les

    investissements doivent tre concentrs. Lescadres gographiques nationaux dterminentgalement la faon dont les dynamiques mi-gratoires sont comprises et gres.

    Un bon exemple de typologie spatiale natio-nale est celle mise au point rcemment pourlAfrique du Sud, qui prsente de lintrt danstous les contextes africains. Cette typologieest prsente dans le tableau 2.

    Les politiques urbaines, en revanche, t-

    moignent du rle que les administrations na-tionales attribuent certaines villes, grandeset moyennes, dans la ralisation des objectifsnationaux de dveloppement. En rgle g-nrale, ces politiques dfinissent les actions

    mener pour atteindre certains objectifs sec-toriels, concernant la mobilit, le logement,lducation, la sant, etc., dans des agglo-mrations spcifiques. Autrement dit, ellesdonnent une vue densemble des problmes

    critiques rsoudre au sein des villes et desmesures mme dtayer les efforts faits parles chelons dadministration infranationauxpour laborer des politiques et des stratgiesplus dtailles leur niveau. Elles compltentet structurent les processus de dveloppementplus spcifiques intervenant lchelle locale.9

    Une fois que les tats africains et les autresacteurs du dveloppement ont une com-prhension claire et approuve du systme

    urbain national, et des fonctions des diverstablissements au sein de ce systme, il im-porte quils apprhendent bien les principauxmoteurs de lurbanisation.

    Type dtablissement Population(Pourcentagedu total na-tional)

    Activitconomique

    (Pourcentagede la VAB to-tale au niveaunational)*

    Personnes vivant au-dessous du niveaude subsistanceminimum

    (Pourcentagedu total national)

    Ville-rgion de Gauteng 22 39 14

    Villes-rgionsctires 16 25 10

    Grandes villes 6 5 6

    Centres rgionaux de services 14 15 14

    Villes de services 4 3 5Etablissements locaux et de niche 9 5 12

    Sous-total : % urbain dans le total national 72 92 61

    Etablissements ruraux en grappes etdisperss

    21 2 31

    Exploitations agricoles/Reste delAfrique du Sud

    8 6 8

    Sous-total : pourcentage rural dans le totalnational

    29 8 39

    *VAB = valeur ajoute brute

    Tableau 2:Typologie des tablissements en Afrique du Sud, de leur population, de leur conomieet de leur niveau de pauvret8

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    9GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    Le principal moteur de lurbanisation est ledveloppement conomique. Il est renforcpar plusieurs facteurs qui favorisent lexoderural, comme les variations du climat (par ex-emple, de faibles prcipitations), la guerre etles conflits et la volont daccder des ser-vices de base tels que lducation et la santqui peuvent amliorer la qualit de la vie.

    En gnral, plus la croissance conomiquedun pays est rapide, plus vite il surbanise.Les zones urbaines reprsentent un fort pour-

    centage du produit intrieur brut (PIB) dans laplupart des pays. Les activits industrielles etde services sont gnralement situes dans leszones urbaines, du fait dun accs facile, ceszones offrent un ensemble de ressources etde services, notamment :

    De fortes concentrations dintrants,tels que matriaux, main-duvre, infra-structures, transports et services;

    de fortes concentrations de consom-

    mateurs(le march );

    davantage de possibilits de rseau-tage et dun rapide partage des connais-sances;

    la proximit de services administratifsqui rgissent les activits commerciales;

    laccs dautres conomies dchelleet de porte.

    Les activits des citadins pauvres, en tant queconsommateurs et producteurs des biens etservices concentrs dans les villes, sont in-

    dispensables la croissance de lconomienationale. Mme dans les pays qui restentfaiblement urbaniss, comme la Tanzanie etle Kenya, les zones urbaines contribuent dansune trs large mesure lconomie nationale.

    Cest dans ce contexte que les migrations ru-rales-urbaines doivent tre considres com-me naturelles, et comme un aspect logique duprocessus global de dveloppement. En fait,lexode rural peut constituer une stratgie dediversification conomique pour les mnages,

    le revenu agricole tant trs variable en raison

    LES MOTEURS DELURBANISATION

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE10

    des changements climatiques, des marchsagricoles, des prix, de laccs la terre, de lamaladie et des conflits. Les familles peuventrester attaches leur base rurale, mais sou-haiter nanmoins disposer dune autre source

    de revenu grce lexercice par un ou plus-ieurs membres de la famille de diffrentes ac-tivits en milieu urbain.

    Parmi les autres raisons pour lesquelles lesindividus se dplacent vers la ville figurent lavolont dchapper des contraintes famili-ales et culturelles, comme laccs restreint la terre ou, pour les femmes, un faible niveaudindpendance, ou bien encore le dsirdamliorer le statut social, autant dattentes

    qui, selon les intresss, devraient tre ex-auces dans le monde faussement perucomme excitant de la ville. Les jeunes mi-grants peuvent galement rechercher dans laville les moyens dacqurir des revenus mon-taires pour contribuer au paiement dune dot.(bridewealth).

    Au fil du temps, les villes deviennent le curdu dveloppement conomique, du capital

    humain et dexpriences socio-culturelles pas-sionnantes qui permettent de transcenderlesprit de clocher de la vie rurale. Autrementdit, elles sont au centre de la crativit, delinnovation et de lentreprise dans le pays.

    Tirer parti des possibilits conomiques, ac-cder aux services de base et fuir des condi-tions difficiles dans les zones rurales sontautant de facteurs qui peuvent contribuer lurbanisation, mais les ralisations cumulesdes zones urbaines suffisent elles seules auto-entretenir lurbanisation; selon certainschercheurs, les centres urbains contribuent la croissance conomique nationale en aug-mentant la productivit des individus, desentreprises et de lindustrie grce des con-

    omies dagglomration; en renforant le bien-tre des mnages grce la mobilit sociale etau dveloppement humain; et en encourag-eant des volutions institutionnelles positives.Les villes favorisent aussi le dveloppementrural car elles constituent un march pour laproduction rurale et gnrent des revenus quireviennent vers les zones rurales.10

    LES CONSQUENCES DUNEURBANISATION MAL GRE

    Il est sans doute vrai que la prospritconomique est associe des taux plus levsdurbanisation, mais en Afrique cette corrla-tion na jamais t vraiment prsente. Cestseulement au cours des cinq dernires annesque le lien entre performance conomique

    et urbanisation a commenc dtre percep-tible. Avant, et durant la majeure partie desannes 80 et 90, ce lien tait faible. Ainsi, ledveloppement des villes, grandes et moy-ennes, est all de pair avec lexpansion desbidonvilles et des taudis, et surtout duneactivit conomique informelle. Il nest doncpas surprenant que ce soit en Afrique subsa-harienne que lon trouve le plus grand nombrede personnes vivant dans des bidonvilles, o leniveau de dnuement est aussi ingal.

    Entre 2000 et 2005, la croissance urbainemoyenne a atteint 4,5%, tout comme le tauxdexpansion des bidonvilles. Bien entendu, lanature et lexprience de la vie dans ces bi-donvilles diffrent largement suivant les situ-ations. Cest pourquoi, il est utile et instructif

    de ne pas perdre de vue dans ce contexte ladfinition des bidonvilles retenue par ONU-Habitat (voir encadr 1).11

    Partant du principe que les bidonvilles peu-vent tre dcrits en fonction de cinq lacunes,ONU-Habitat a mis au point une mthodeintressante pour nuancer notre apprcia-tion des bidonvilles , en rpartissant dans untableau les tablissements modrment d-ficients (1-2 lacunes sur les cinq numres

    dans lencadr 1) ou gravement dficients (3-4

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    11GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    lacunes). Grce cette mthode, on peut for-muler lhypothse que six citadins africains sur10 vivent dans des bidonvilles, et que 27%dentre eux vivent dans des tablissementsgravement dficients. Il sagit l dun taux ex-

    traordinairement lev par rapport la situa-tion dans dautres rgions en dveloppementdu monde, comme le montre le tableau 3.

    Il nest donc pas surprenant que les donnesdisponibles mettent en vidence des retardsnormes dans les services de base : seule-ment 20% de la population de lAfrique sub-saharienne ont accs un rseau dlectricit;40% leau potable; 27% lassainissement;4% la tlphonie fixe ou mobile.13Il sagit l

    dagrgats qui prennent en compte les zonesrurales et urbaines. Toutefois, il est gnrale-ment admis que les pourcentages de la popu-lation urbaine en Afrique nayant pas accs leau et lassainissement sont, respective-ment de 35-50 % et 50-60 %.14

    Ces faibles niveaux daccs aux services debase tmoignent dune pauvret gnralise.Si nous souscrivons en outre largumentdONU-Habitat selon lequel les activits in-formelles reprsentent 93% des nouveaux

    emplois et 61% de lemploi urbain en Af-rique , force est aussi de reconnatre que cette conomie largement invisible nest pasen mesure de propulser le continent hors dela pauvret. Ainsi, le chiffre de 68% de lapopulation pouvant tre considre comme

    pauvre en termes de revenu (voir tableau 4) nese modifiera probablement pas de sitt.

    Le Rapport sur ltat des villes dans le monde2008/9a valu pour la premire fois les in-

    galits intra-urbaines dans plusieurs agglom-rations. En Afrique, ces ingalits, mesuressur la base du coefficient de Gini, figurentdsormais parmi les plus leves du monde- bien suprieures ( 0,58) au seuil dalerteinternational de 0,4.17Dans les plus grandes

    TABLEAU 3:POURCENTAGE DE LA POPULATION HABITANT DES BIDONVILLES DANS TROIS RGIONSEN DVELOPPEMENT, 200512

    Rgion Pourcentagede la popu-lation vivantdans des tau-dis et bidon-villes

    Pourcentage dela populationvivant dans destablissementsmodrmentdficients (1-2))

    Pourcentage dela populationvivant dans destaudis grave-ment dficients(3-4)

    Afrique sub-saharienne 62 63 27

    Amrique latine et Carabes 27 82 18

    Asie du Sud 43 95 5

    Un mnage habitant un bidonville a t d-fini comme un groupe de personnes vivant

    sous le mme toit dpourvu dun ou de plu-sieurs des lments suivants : accs un ap-provisionnement en eau amlior; accs unsystme dassainissement amlior; surfacehabitable suffisante (pas plus de trois per-sonnes partageant la mme pice); qualitstructurelle et durabilit des logements; etscurit doccupation. Quatre des cinq indica-teurs utiliss pour la dfinition des bidonvillesconcernent des aspects physiques [] Cesindicateurs se focalisent sur les conditions devie dans les bidonvilles, dcrivant les lmentsmanquants et faisant de la pauvret un aspect

    de lenvironnement dans lequel vivent les ha-bitants de ces tablissements. Le cinquimeindicateur la scurit doccupation a trait la lgalit, qui nest facile ni mesurer ni contrler, car la scurit doccupation deshabitants des bidonvilles dpend souvent dedroits de facto ou de jure ou de labsencede ces droits.

    ENCADR 1:QUENTEND-ON PAR BIDONVILLE?

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE12

    TABLEAU 4 :PAUVRET URBAINE ET RURALE EN AFRIQUE SUB-SAHARIENNE16

    Anne Nombre de pauvres (millions) Pourcentage de la population

    Zonesurbaines

    Zonesrurales

    Total Zonesurbaines

    Zonesrurales

    Total

    Vivant avec moins de 1,08 dollar par jour1993 66.4 206.7 273.2 40.2 53.1 49.2

    2002 98.8 228.8 327.6 40.4 50.9 47.2

    Augmentationannuelle

    4.54% 1.13% 2.04% 66.9 85.2 79.8

    Vivant avec moins de 2,15 dollars par jour

    1993 110.5 332 442.4 68.5 82.5 77.5

    2002 167.7 370.8 538.6

    Augmentation

    annuelle

    4.75% 1.24% 2.21%

    conomies africaines, comme lAfrique duSud, lingalit des revenus est beaucoup plusaccentue, avec des coefficients de Gini deplus de 0,7 pour toutes les grandes villes.18Eugard ces tendances, nous pouvons conclureque la pauvret urbaine devrait continuer progresser, car elle saccrot quatre fois plusvite que la pauvret rurale (voir tableau 4).

    Lexpansion ininterrompue des bidonvilles,le manque de services et laccentuation des

    ingalits et de la pauvret urbaines ne sontpas inluctables. Ils peuvent tre attribusdans une large mesure la gestion mdiocredes zones urbaines, imputable son tour aumanque dimagination politique et opra-tionnelle quant la meilleure faon de ma-triser les processus durbanisation. La ques-tion qui se pose est la suivante : commentpouvons-nous tirer parti dune situationde crise pour favoriser un dveloppementurbain durable?

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    13GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    DES CHANGEMENTS DE MENTALITSONT NCESSAIRES : CONSIDRER LEDVELOPPEMENT URBAIN COMME UNE

    OPPORTUNITELe dveloppement national est alimentpar la croissance conomique. La croissanceconomique dpend de la productivit et dela comptitivit des entreprises prives, dontla performance est tributaire, son tour, duneinfrastructure fiable, de laccs des capitauxet une main-duvre appropris, de la dis-ponibilit dinformations stratgiques et delexistence de dbouchs. A mesure que lespays se dveloppent, le centre nvralgiquede lconomie change, lagriculture cdantsa place lactivit industrielle et aux ser-vices.19Dans le monde daujourdhui, o lesconomies et les flux financiers sont intgrsglobalement, les services tendent devenir lesegment dominant des activits conomiques.Cela nest pas surprenant, puisque la pos-sibilit de gnrer une plus grande valeurconomique est plus grande dans ce secteurque dans celui de lindustrie ou de lagriculture

    (voir tableau 5).

    Les activits conomiques industrielles etde services dpendent de la concentrationdinfrastructures, de personnes, de services etde dbouchs que lon trouve dans les villes.En outre, lactivit agricole trs concurrentielleet trs comptitive est fortement tributaire delexistence de marchs urbains consommantses produits, et les faisant parvenir dautres,plus loigns, par le biais de centres de trans-

    port efficaces. Autrement dit, toutes les di-mensions de lconomie sont tributaires dansune large mesure du bon fonctionnement desvilles, grandes, moyennes et petites. Cestpourquoi ONU-Habitat a rcemment affirmque : Les villes ont le potentiel de rendre lespays riches, car elles assurent les conomiesdchelle et de proximit ncessaires pour ac-crotre lefficacit de la croissance. Les fortesdensits urbaines rduisent les cots de trans-action, rendent les dpenses publiques au titredes infrastructures et des services plus viablesconomiquement et facilitent la production etla diffusion des connaissances, qui sont au-tant daspects importants pour la croissance.Quelles alimentent la croissance conomiqueou en soient le sous-produit, les villes sont in-contestablement devenues des ples majeursde lactivit conomique, tant au sein des dif-frents pays quen tant que contributeurs

    lconomie mondiale. 21

    LA POLITIQUE CONOMIQUEDOIT ACCEPTER ET SOUTENIRLURBANISATION

    Trois domaines de la politique conomiqueapparaissent comme des contraintes unecroissance plus rapide des conomies urba-

    TABLEAU 5: CONTRIBUTION SECTORIELLE LA CROISSANCE DU PIB EN AFRIQUE SUB-SAHARIENNE20

    1990-1995 1996-2000 2001-2005

    Contribution au PIB ( %) 17 31 52 17 30 53 19 31 50

    Industrie

    Industrie

    Industrie

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE14

    ines : linstabilit macroconomique, la m-diocrit des conditions dinvestissement etlinsuffisance des infrastructures.22Heureuse-ment, au cours des dix dernires annes en-viron, il a t remdi nombre des dfail-

    lances des politiques prcdentes. La majoritdes gouvernements africains savent dsormaisquelles sont les politiques macroconomiquesqui doivent tre maintenues pour favoriserla stabilit. Cependant, il reste beaucoup faire pour mettre en place des cadresdinvestissement plus stables, plus efficacespar rapport aux cots et plus transparents. Et ilfaut faire plus encore pour remdier au dficitinfrastructurel.

    Les tudes et les analyses des dfaillances despolitiques mises en uvre en Afrique pourfaire face aux dfis de lurbanisation arrivent une seule conclusion : les dirigeants afric-ains continuent voir lurbanisation sous unjour ngatif et sont gnralement obsdspar la limitation de lexode rural, au lieu detirer activement parti de cette tendance. Uneenqute mene par lOrganisation des Na-tions Unies en tmoigne : en 2007, 74 % des

    gouvernements africains craignaient que leurpays ne surbanise trop et trop vite et 78 %mettaient en uvre des mesures actives pourrduire les migrations rurales-urbaines.23

    Tant que leur proccupation essentielle res-tera le contrle de lexode rural, les gouver-nements africains resteront impuissants transformer les agglomrations urbaines pouren faire de puissants moteurs du programmede dveloppement national. Pour remdier cela, plusieurs changements de mentalit doi-vent intervenir. Premirement, il faut mieuxcomprendre lintrt et les dterminants desmigrations rurales-urbaines Deuximement,la dynamique de linformalit dans les cono-

    mies urbaines et les lieux de vie doit tre biencomprise, afin de mettre un terme aux atti-tudes ngatives des dirigeants envers les bi-donvilles et le travail informel. Troisimement,il faut reconnatre que les gouvernements af-ricains ne peuvent pas rpondre ces ques-tions de faon constructive sans la participa-tion de tous les acteurs urbains, notammentles citadins pauvres.

    UN CHANGEMENT DE MENTALIT: CINQBONNES RAISONS POUR MIGRER

    La dcision de migrer vers la ville est presquetoujours prise en connaissance de cause.

    1. Les forces dimpulsion et dattractiondes migrations. Les migrations intervi-ennent soit parce que des individus sontpousss hors de leur lieu dorigine, soit

    parce quils sont attirs vers leur nou-velle destination. Le plus souvent, ils sedplacent sous leffet conjugu de forcesdimpulsion et dattraction. Certains sontpousss hors de leur lieu dorigine parcequils ne peuvent pas gagner un revenusuffisant pour subvenir leurs besoins ou ceux de leurs familles. Dautres peuventen tre chasss, soit temporairement, soiten permanence, en raison de catastro-phes naturelles comme les inondations

    ou les scheresses, ou de changements

    cologiques persistants comme la dserti-fication ou lrosion du sol, autant de man-ifestations des changements climatiques.Dans de nombreuses rgions africaines,des problmes de scurit et des situationspost-catastrophe et post-conflit poussentgalement les individus vers les agglom-

    rations urbaines. Dans le mme temps,ils sont attirs vers leur destination par demeilleures perspectives demploi, de meil-leurs quipements de sant et dducationou une plus grande libert par rapport auxrestrictions culturelles et sociales, pour euxet pour leurs enfants.

    2. La plupart ont peu de chances degagner dcemment leur vie danslagriculture.La plupart des habitants des

    zones rurales travaillent dans le secteur

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    15GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    agricole, mais lagriculture est fortementtributaire des conditions mtorologiques,les terrains agricoles sont limits et par-fois peu ou de moins en moins fertiles,les exploitations sont de petite taille, les

    dettes des agriculteurs sont leves et denombreux mnages ont toujours t ousont devenus des paysans sans terre. Enconsquence, les revenus ruraux globauxont tendance tre faibles. Pour accrotreleur revenu, les petits agriculteurs doiventamliorer leur productivit, mais ils sontsouvent trop pauvres pour payer pour latechnologie ncessaire, quil sagisse dematriels, de semences haut rendementou dengrais chimiques onreux. De plus

    en plus, les agriculteurs et les autres ha-bitants des zones rurales compltent leurrevenu agricole avec un revenu non ag-ricole, dans les zones rurales, si possible,ou dans les zones urbaines o ils migrentde faon temporaire pour travailler surdes chantiers, exercer des emplois do-mestiques, devenir vendeurs ambulantsindpendants ou exercer dautres typesdemplois urbains.

    3. Les migrations rurales-urbaines am-liorent les perspectives demploi.Mmesi un mnage rural peut vivre de ses terres,il envisage lavenir de ses enfants hors de

    lemploi agricole et de plus en dehors delemploi rural. Pour ces enfants, la migra-tion vers les zones urbaines amliore leurchance de trouver un tel emploi. Outrequelles offrent des possibilits demploi

    considrablement plus importantes, leszones urbaines leur permettent aussidavoir accs une ducation et des soinsde sant de meilleure qualit - et parfois une plus grande libert sociale. Les cul-tures urbaines tant en gnral moins con-traintes par les coutumes traditionnelles etles structures hirarchiques que les cul-tures villageoises, les villes offrent aussiaux jeunes migrants et leurs enfants demeilleures perspectives dascension so-

    ciale.

    4. La population est consciente de ce queles villes offrent.Bien que certains m-nages ruraux naient dautre choix que dequitter les zones rurales afin de survivre, laplupart des migrants choisissent dlibr-ment de rester ou de partir. Lamliorationdes transports, la disponibilit des t-lphones mobiles, de meilleures com-munications et des liens de plus en plusnombreux avec les gnrations prc-dentes de migrants urbains sont autantdlments qui ont rendu la populationrurale beaucoup plus consciente la fois

    TABLEAU 6 :LEMPLOI DANS LE SECTEUR INFORMEL DANS CERTAINS PAYS AFRICAINS 24

    Pays Couverture Nombre de personnesemployes danslconomie informelle(en millions)

    Emploi danslconomie informelleen pourcentage dutotal des emplois

    Bnin (2002) Niveau national 2.4 94.50%Cameroun (1993) Zones urbaines 0.1 57.30%

    Ethiopie (2004) Zones urbaines 1.1 38.10%

    Madagascar (1995) Zones urbaines 0.2 57.50%

    Mali (2004) Niveau national 1 41.30%

    Afrique du Sud (2004) Niveau national 1.7 13.80%

    Tanzanie (1995) Zones urbaines 0.4 67.00%

    Ouganda (2003) Niveau national 2.6 26.50%

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    17GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    La prsence dun secteur informel de plus enplus grand dans la plupart des villes africainesest souvent voque pour expliquer la persis-tance de lexode rural, malgr des possibilitslimites demploi dans lconomie formelle. Le

    secteur informel constitue un filet de scuritface un chmage lev et la pauvret. Lesentreprises du secteur informel sont aussi sou-vent le principal systme dapprovisionnementdes citadins pauvres. Toutefois, cette infor-malisation des moyens de subsistance en mi-lieu urbain a galement conduit la chutedes taux durbanisation dans de nombreuxpays africains mesure que les perspectivesdemplois bien rmunrs dans le secteurformel se sont dgrades. Pour les femmes

    pauvres en particulier, qui doivent souventprendre soin de leur famille et grer leur foyer,le travail indpendant par le biais de petitesentreprises du secteur informel reprsente uneoption flexible pour gnrer un revenu, touten restant la maison ou proximit. Pour denombreuses femmes, cest galement la seuleoption, en raison de la discrimination et dumanque dducation.

    Mais le secteur informel, tel quil estaujourdhui dans les villes africaines, ne doitpas tre trop idalis ou juge comme cou-ronne de succs. La majorit des acteurs de cesecteur vivent au-dessous du seuil de pauvret.Et les pires effets de linformalit sont gale-ment davantage ressentis par les femmes, qui

    sont au bas de la hirarchie des vendeursambulants .25 Marty Chen, qui travaille entroite collaboration avec lorganisation Wom-en in Informal Employment: Globalizing andOrganizing (WIEGO), illustre la dynamique in-

    terne de classe du secteur informel au moyendun graphique trs parlant (graphique 1).

    Il ressort clairement de ce graphique quelexpression gnrique secteur informel estsimplement trop large et gnralise pour ren-dre compte de la riche et conteste diversitde lconomie informelle. Tout en restant con-scient des liens hirarchiques et des ingalitsde pouvoir entre, par exemple, les employ-eurs et les travailleurs du secteur informel, il

    est galement important de reconnatre quel point lconomie informelle contribue lconomie urbaine et nationale.

    tant donn lomniprsence des emplois et desrevenus informels, et limportante contributiondes entreprises informelles lconomie urba-ine, il est clair que le potentiel de ce secteurpourrait tre exploit de faon plus efficacesi les dcideurs cessaient tout simplement dele mpriser et trouvaient les moyens den tirerparti afin de dvelopper la fois les activits

    formelles et informelles. Dans cette optique,une intgration de ces deux secteurs simposeau niveau de lamnagement urbain, notam-ment lorsquil sagit de planifier les infrastruc-

    tures et les quipements conomiques.

    UN CHANGEMENT DE MENTALIT :TRAVAILLER ENSEMBLE POUR TROUVERDES SOLUTIONS

    Les changements normes intervenantaujourdhui dans la plupart des villes africainesne sont plus rgis par des plans de dveloppe-ment formels arrts dun commun accord,mais plutt par les interactions ponctuelles en-tre les politiques foncires, les investissementsdu secteur priv et les mga-projets financs

    par des capitaux trangers. Dans ce contexte,

    des forums et des approches qui favorisent ledialogue et le consensus entre les diffrentsintervenants revtent dsormais une impor-tance cruciale. Parmi ces approches figurentles stratgies de dveloppement urbain, les fo-rums et les consultations en milieu urbain. Lesprincipales caractristiques communes de ces

    approches sont quelles sont fondes sur un

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE18

    large processus de recherche, de discussion,de planification et de mise en uvre entre lesdiverses parties prenantes. Ces dialogues peu-vent tre initis par les administrations natio-nales ou locales, comme cest souvent le casavec les stratgies de dveloppement urbainet les consultations dans les villes, ou par desorganisations de la socit civile concernespar le dveloppement urbain.

    Les partenariats sont essentiels pour assurerune offre suffisante de foncier, de logementspour les revenus faibles et dinfrastructuresde la quantit et de la diversit voulues. Cettetche est beaucoup trop vaste pour pouvoirtre gre par un seul groupe - ni les citadinspauvres eux-mmes, ni les pouvoirs publics, nile secteur priv ne sont en mesure de sy at-teler seuls. Mais, pour que de tels partenariatssoient efficaces, les organisations des urbainspauvres doivent tre des partenaires centraux.

    Et comme dans tout partenariat, il importe dedterminer qui fait quoi selon ce que chaquegroupe fait le mieux :

    Les gouvernements tous les niveauxpeuvent aider de diffrentes manires lescommunauts pauvres (qui restent lesacteurs les plus vulnrables sur le marchfoncier urbain) accder aux ressourc-es foncires si ncessaires. Ils peuventrserver des terrains pour le logementdes personnes faible revenu au sein de

    leurs plans durbanisme, et ils peuventservir de mdiateur entre les propritairesfonciers, institutionnels ou individuels, etles squatters pauvres, afin de trouver dessolutions de compromis comme le part-age de terrain, leur regroupement et leremembrement. (Voir Guide pratique n 3: Le foncier.Les administrations doiventencadrer, en intervenant le moins possible,

    les efforts faits par les pauvres eux-mmespour se loger et veiller ce faisant ne pasentraver les initiatives communautaires.Afin dempcher que la classe moyenneurbaine ne prenne le contrle des terrainsconvoits, le gouvernement peut aussimettre au point des formes innovatricesdoccupation de foncier urbain, telles quele titre de proprit collective ou la loca-tion de terres collectives.

    Les communauts pauvres peuvent

    pargner collectivement, laborer leurspropres plans pour le logement et la r-novation et mettre en uvre ces plans,en maintenant un contrle sur le proces-sus de construction et de rnovation. Ellespeuvent galement mettre en place desorganisations communautaires fortes, enmesure de grer les besoins futurs de leursmembres, dans loptique de rduction dela pauvret long terme. (Voir Guide pra-tique n 6 : Les organisations communau-

    taires.)

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    19GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    Les ONG peuvent aider les commu-nauts pauvres sorganiser au seindorganisations collectives puissantes et dvelopper les capacits dinitiative etles comptences collectives en matire de

    prise de dcision et de gestion financiredont elles auront besoin pour raliser desamliorations significatives des logements qui ne pourront pas tre menes bienpar les mnages titre individuel.

    Le secteur priv peut ngocier des ac-cords de partage de terrains sur place ousubventionner des solutions de compromiscomme le relogement au lieu dexpulserles squatters de leurs terrais. . Les propri-

    taires fonciers peuvent tirer des profits nonngligeables des projets de ramnage-ment, tout en aidant ceux qui y vivent djdans des habitats informels se procurerun logement dcent et sr. (Voir le Guidepratique n 4 : Les expulsions)

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE20

    PASSAGE A LA VITESSE SUPERIEURE :DE LA PRVENTION LA FACILITATION

    LOGEMENTDans les sections prcdentes de ce Guide,nous avons vu que les citadins pauvres sontles principaux acteurs impliqus dans la four-niture dabris dans les villes africaines. Malgrlabsence de soutien et dinvestissement dela part des pouvoirs publics, ils semploient

    subvenir leurs besoins. Bien entendu, leursmaisons, qui sont construites sans les infra-structures ncessaires pour accder leau, lassainissement et lnergie, sont dficien-tes et inadquates et ne reprsentent gure letype de logement prn par le droit universel un logement dcent, comme stipul larticle25 (1) de la Dclaration universelle des droitsde lhomme.27

    Le principal dfi pour les gouvernements et

    les responsables urbains en Afrique est desattacher reconnatre et apprcier les ef-forts faits par les citadins pauvres, et de tirerparti de leurs investissements pour rsoudreprogressivement la crise du logement dontsouffrent les villes du continent. Il y a mainten-ant suffisamment de prcdents et de preuvesdans tous les pays africains et dans dautrescontextes comparables pour tirer quelquesconclusions sur la meilleure faon de rpondreau dfi du logement en milieu urbain.

    Lune des conditions pralables la com-prhension par les dcideurs politiques desactions engager face la prvalence de con-ditions de vie misrables est lapprciation dela riche diversit existant au sein des tablisse-ments et entre eux. Les tablissements in-formels abritent en leur sein des conomieslocales dynamiques, avec leurs propres loge-ments informels, leurs propres marchs fonci-ers et leurs propres multiples groupes culturelset sociaux. Bien que les conditions de viedans certaines zones puissent tre effective-ment sordides, malsaines, indigentes et peupropices lintgration sociale, cette situa-tion nexiste que parce que les rsidents nontpas dautres choix. Fondamentalement, lesrsidents de chaque tablissement sont ceuxqui connaissent le mieux la faon dont leurtablissement fonctionne, les caractristiques

    de leur communaut et la nature de leurs be-soins et priorits. Les gouvernements, et enparticulier les services statistiques nationaux,doivent sappuyer sur ces connaissances pourdterminer le nombre de personnes en ques-tion, leurs conditions de vie, leurs besoins etleurs aspirations autant dinformations es-sentielles qui doivent faonner toutes les poli-tiques et les plans qui auront une incidence surla zone.

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    21GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    Une fois ces connaissances acquises, elles doi-vent tre relies quatre aspects cls du dvel-oppement des tablissements informels :

    1. Diversit du logement : les tablisse-

    ments informels sont constitus de con-structions et de logements de qualits trsdiverses, allant de btiments trs solidesen bton dots de tous les services, des cabanes prcaires faites de boue, dedchets de bois ou de tle ondule.

    2. Profil de linfrastructure :Dans de nom-breuses villes, les gouvernements ont prisdes mesures pour mettre en place aumoins une partie des infrastructures debase dans les tablissements informels,

    mais ces programmes sont souvent frag-mentaires, mal planifis et mis en uvre,et de nombreux tablissements finissentpar tre laisss de ct. Sur le terrain, lafourniture dinfrastructures est gnrale-ment fragmente, ingale et irrgulire. Ilimporte davoir une ide aussi claire quepossible des infrastructures existantes etdu niveau et de la qualit des services as-surs.

    3. Les dynamiques de la localisation :Les pauvres essaient presque toujours desinstaller dans les quartiers de la ville aussiproches que possible des lieux o ils peu-vent exercer une activit rmunratrice,

    mme si les emplacements en questionsont des terrains prcaires du point de vuede lenvironnement ou vulnrables face toutes sortes de risques. Il est essentielque les responsables urbains comprennentbien les raisons pour lesquelles les indivi-dus se sont installs sur un site particulier,qui peut leur paratre impropre ou non vi-able, et la faon dont ils sy sont installs.

    4. Rgime foncier : Le problme le plus

    grave auquel sont confronts les millionsde personnes qui vivent dans les tablisse-ments urbains informels de lAfrique estlinscurit foncire. Celle-ci met un frein linvestissement par les rsidents et lesentreprises de services publics et fait enpermanence planer la menace dune ex-pulsion. Compte tenu des nombreux r-gimes fonciers diffrents existants dans laplupart des pays, il est essentiel de biencomprendre la situation caractrisant

    Dans toute lAfrique, des centaines de milliers de personnes font lobjet chaque anne dexpulsions forceset sont, dans de nombreux cas, laisses sans abri, perdant tous leurs biens sans indemnisation et/ou tantdplaces par la force loin des sources demploi, des moyens de subsistance ou des possibilits dducation,le tout en violation du droit international, y compris la Charte africaine des droits de lhomme et des peuples.La grande majorit de ces expulsions ne sont pas ncessaires. Il importe de comprendre les diffrentes causesdes expulsions, et leurs effets sur la vie, les moyens de subsistance et les choix de logement des citadinspauvres. Le Guide pratique n 4 : Les expulsions passe en revue les distinctions entre les diffrents typesdexpulsions et examine les conditions juridiques des expulsions eu gard aux pactes internationaux relatifs

    aux droits de lhomme et aux droits au logement.Un autre aspect critique concerne la faon dont les communauts menaces dexpulsion se sont organiseset ont tir parti du soutien offert par les rseaux et les institutions communautaires en Afrique et dans lemonde pour trouver des options de rechange la destruction de leurs tablissements. Les tudes de casfigurant dans le Guide pratique n 4montrent comment les communauts pauvres sont des partenairescentraux et cratifs dans la recherche de solutions durables aux problmes rencontrs par les villes pourfournir des terrains et des logements abordables - des solutions qui ne ncessitent pas que ces communautssoient chasses. A partir de ces expriences et des prcdents juridiques, des lignes directrices concrtes sontformules afin daider les gouvernements et les dcideurs laborer des procdures formelles pour rduirele plus possible les expulsions. Il est en effet possible de relever le dfi de la raret des terrains dans les villesafricaines sans recourir des expulsions illgales.

    ENCADR 2:LES EXPULSIONS EN AFRIQUE

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE22

    cet gard chaque tablissement informel rnover et dvelopper, de faon com-prendre le potentiel et les paramtres delintervention.

    Une fois que les pouvoirs publics ont rassem-bl ces informations de base, ils peuvent com-mencer soccuper dans une optique durabledu logement faible cot . Dans leGuide pra-tique n 2 : Le logement pour les faibles reve-nus,nous examinons cinq options concernantce type de logement. Ces options sont poten-tiellement complmentaires et ce sont les con-ditions locales qui dtermineront lapprocheglobale qui permettra de tenir compte des dif-frentes considrations. Ces cinq options sont

    examines ci-aprs.

    Option 1 : Amlioration sursite Par amlioration sur site, on entend

    lamlioration de lenvironnement phy-sique, social et conomique dun tablisse-ment informel existant, sans dplacer lesgens qui y vivent. Quand les villes et les

    gouvernements soutiennent le proces-sus damlioration des communautsinformelles, il sagit du moyen le moinsonreux et le plus humain damliorer lestock trs ncessaire de logements abord-ables en zone urbaine, sans rien dtru-ire. La rnovation sur site ne consiste passeulement concevoir des programmestechniques pour installer des infrastruc-tures physiques. Il sagit, plus largement,de prendre en considration les maisons,les terrains, les revenus, les quipementscollectifs, laccs aux services publics demanire plus gnrale et les systmes lo-caux de prestation sociale (voir Guide pra-tique n 2).

    Il y a quantit de raisons imprieusespour lesquelles lamlioration sur siteest souvent la meilleure option, maisla plus importante est le fait quelle fa-vorise un renforcement des moyens desubsistance car les individus investis-

    sent dans lamlioration de leurs loge-ments et, partant, amliorent leur basedactifs, ce qui est bon pour le dveloppe-ment conomique local et lensemble delconomie urbaine.

    Toutefois, lamlioration sur site peut ais-ment dgnrer, ce qui jette le discrdit surcette approche et compromet davantage lesmoyens de subsistance des citadins pauvres.Daprs les expriences couronnes de succs,cette approche doit respecter huit principespour tre efficace :

    Elle doit tre participative.

    Elle doit tre durable et cologique ainsi

    que culturellement approprie. Elle doit tre mene en partenariat avec

    ladministration locale, les organisationscommunautaires et les ONG concernes,lorsquelles existent.

    Elle doit tenir compte de la scuritdoccupation.

    Elle doit prvoir une certaine contributionau cot de la part de la communaut b-nficiaire.

    Elle doit tre abordable de faon que lescots permanents de maintenance soient la porte de la communaut bnficiaire.

    Elle doit prvoir un modle de finance-ment durable.

    Elle doit faire partie dune stratgiedamnagement plus large pour la villedans son ensemble.

    Dans leGuide pratique n 2,un cadre opra-

    tionnel clair est prsent pour les diffren-tes tapes du lancement de programmes dernovation sur site efficaces, traduisant cesprincipes en lignes directrices oprationnelles.Lexprience internationale montre sans am-bigit que ces programmes sont faisables,si existe lengagement politique et financierncessaire pour les entreprendre avec sri-eux. Elle montre aussi que les expulsions, aux-quelles ont frquemment recours les pouvoirspublics, sont totalement inutiles (voir encadr 2).

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    23GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    Option 2 : Rinstallation surdes terrains approprisLa rinstallation ne doit jamais tre le choix privilgier par les pouvoirs publics pour fairepartir les rsidents de quartiers informels, car

    le relogement sur dautres sites dtruit tou-jours les rseaux sociaux, scinde les commu-nauts, rduit considrablement les capacitsde gains, accrot les cots de transport, inter-rompt la scolarit des enfants et aggrave g-nralement leur pauvret. Compte tenu de lararet des logements sociaux, la dmolitiondes quartiers informels et la dlocalisationde leurs habitants entranent une perte nettedunits de logement que personne na lesmoyens de compenser et qui complique les

    problmes de pnurie.Toutefois, la rinstallation est requise danscertaines circonstances. Dans ce cas, il estindispensable quelle soit mene de manireresponsable et rationnelle. Il sagit dabord etavant tout de placer les personnes au centredu processus. Autrement dit, les rsidents doi-vent tre impliqus dans tous les aspects dela planification de leur rinstallation, notam-ment la fixation des dates du dmnagement,lorganisation du transport, le choix du site

    de relocalisation, la conception des amnage-

    ments collectifs, des units de logement etdes systmes dinfrastructure et la gestion desprocdures dattribution. Ils doivent galementtre soutenus dans lorganisation de leurspropres petits groupes locaux, qui seront ap-pels grer le dmnagement, contribuer

    au dmantlement des vieux btiments et rcuprer tous les matriaux de constructionqui pourrait tre utilisables dans les nouvelleshabitations.

    Un important deuxime aspect du processusde rinstallation est le choix du terrain pour lenouvel emplacement. Idalement, celui-ci doittre viabilis et assurer laccs linfrastructurede base. Il doit galement tre situ dans unlieu qui permette le maintien ou la reconstitu-tion des moyens de subsistance, des rseaux

    sociaux et des stratgies de survie avec un min-imum de perturbations. Autrement dit, le sitedoit tre proche des possibilits demploi, avecun accs facile aux services publics comme lescoles, les cliniques, les banques et les liaisonsde transport. Ces considrations peuvent sem-bler onreuses, mais elles sont en fait efficacespar rapport au cot si elles minimisent le ris-que que les gens abandonnent les lieux derinstallation pour tout simplement revenir lendroit do ils sont venus, forant les autori-

    ts relancer lensemble du processus.

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE24

    Option 3 : Nouveauxlogements sociaux fournissous lgide de lEtat

    Daprs lopinion largement partage selonlaquelle lEtat a pour mission dassurer un ac-cs universel aux infrastructures urbaines et aulogement, il est aussi gnralement considrque cest lui quil appartient de prendre encharge la construction de logements pourles mnages urbains pauvres. Cest notam-ment le cas des pays o le PIB par habitantest denviron 2100 dollars par an28(contre 26000 dollars dans un pays de lOCDE), et o lescots de la construction et de la gestion des

    logements sociaux doivent tre subvention-ns pour une large part par ladministrationcentrale ou locale. Lorsque lEtat conoit, con-struit et livre des logements pour les fabilesrevenus ( vendre ou louer), cela est gale-ment un moyen de sassurer que le logementest de bonne qualit et amnag de manirerationnelle.

    Toutefois, dans les pays o les revenus moyenssont aussi bas quils le sont dans une grandepartie de lAfrique subsaharienne, trs peu de

    villes ou dadministrations nationales ont lavolont politique ou les ressources ncessairespour financer ces aides, ou pour construiresuffisamment de logements pour rpondrene serait-ce qu une fraction des besoinsen logement des citadins pauvres. Dans cesconditions, il est clair que lorsque des pro-grammes de logements publics ont t tentsen Afrique, limpact de ces programmes con-ventionnels a t minime, leurs objectifs ambi-tieux nont pas t atteints et leurs cots ont

    t trop levs. Comme il nest pas possible deles subventionner, les logements neufs devien-nent souvent trop chers et sont la porte desseuls mnages relativement aiss. Le pige estque si une aide plus importante par unit taitaccorde, ce qui ouvrirait laccs aux groupespauvres, relativement peu dunits de loge-ment pourrait tre construites.

    Compte tenu de cette valuation raliste desconditions conomiques requises pour quedes logements puissent tre fournis sous

    limpulsion de ltat, force est de conclure que

    les programmes de grande chelle de con-struction dunits de logement subvention-nes, normalises, intgralement quipespour les mnages pauvres existants et futurssont trop coteux pour les gouvernements de

    la plupart des pays en dveloppement. Pourle moment, les ressources publiques sontmieux dpenses dans lamlioration du parcexistant de logements abordables (mme demauvaise qualit) et la mise en uvre dunensemble dapproches flexibles et novatricespour la cration de nouveaux stocks. Dans lespays africains revenu intermdiaire, commelAfrique du Sud, il est certainement possibledenvisager des actions appropries de sub-ventionnement, paralllement aux autres op-

    tions envisages dans la prsente section (voirGuide pratique n 2).

    Option 4 : Approchesdes sites et services etamnagement progressif deterrainsCompte tenu des problmes rencontrs pour

    financer des logements publics subventionns,un changement de mentalit est intervenudans le monde entier, ltat ntant plus envis-ag comme un fournisseur de logements maiscomme un facilitateur des efforts autonomesde logement raliss par les pauvres eux-mmes. Par exemple, lEtat peut fournir desparcelles et des services de base dune manireplanifie, mais laisser les gens construire leurspropres habitations sur ces terrains. Il sagitde ce que lon appelle les approches sites et

    services.La stratgie inhrente aux approches sites etservices consiste partager la responsabilitde la fourniture de logements dcents etabordables en zones urbaines entre lEtat et lapopulation. Les organismes gouvernementauxne prennent en charge que la prparation desparcelles et la mise en place de certaines infra-structures de base. Les parcelles individuellessont ensuite vendues, loues ou attribues auxmnages bnficiaires, qui il appartient de

    construire leurs propres habitations - parfois

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    25GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    avec des prts bonifis, parfois avec des ma-triaux de construction de base et un appuitechnique fournis dans le cadre du projet, etparfois en utilisant uniquement leurs propresressources.

    Lintrt de ces approches est quelle cre unmodle dintervention dans des contextes oles ressources sont limites, la capacit de lEtatrestreinte et les besoins sont immenses. Si cesapproches sont bien planifies, elles peuventrendre la mise disposition et la maintenancedinfrastructures et de services moins coteus-es. Ces approches sont aussi en phase avecles ressources et les capacits des pauvres,car elles suivent leur rythme dinvestissement.

    Surtout, elles permettent lEtat datteindrebeaucoup plus de gens et beaucoup plus rap-idement que cela nest le cas avec la fourniturede logements publics subventionns.

    Pourtant, ces approches ont fait lobjet denombreuses mises en garde, en raison desproblmes inhrents qui sont apparues dansla pratique. En effet, mme si elles sont des-tines cibler les segments les plus pauvresde la ville, elles finissent souvent par servir lesgroupes relativement nantis, car les sites et

    services offerts restent inabordables pour laplupart des personnes dans le besoin. Le bilande ces approches en matire de recouvrementdes des cots est galement peu satisfaisant.

    Ces cueils peuvent tre vits si les cinq lignesdirectrices suivantes sont respectes:

    1. Fournir des terrains dans un bonemplacement, cest--dire proximitdes centres demploi et des rseauxdinfrastructures principales, afin de

    rduire les cots du prolongement deces rseaux jusquau nouvel ensemble deconstructions.

    2. Reconnatre que les sites ne doiventtre ni trop vastes, ni en priphriede la ville;dans la mesure du possible,choisir en priorit les sites plus petits dis-ponibles lintrieur mme de la ville,avec un accs plus facile aux infrastruc-tures et services existants.

    3. Conserver des parcelles de petitetaille afin daccueillir plus de per-sonnesau cot le plus faible possible. Lesnormes et rglements actuels sont sou-vent inappropris et doivent tre remis

    en cause afin de rendre les constructionsfinancirement abordables pour les pau-vres et de faire en sorte quelles ne soientpas transformes en logements plus hup-pes lavenir.

    4. Rduire les cots des services par unebonne planification.Comme dans tousles logements sociaux, la cl de la ralisa-tion de cet objectif est la pleine participa-tion des bnficiaires la planification, la

    mise en uvre et la maintenance.5. Assurer un dveloppement progres-

    sif afin de rduire les cots pour lapopulation. Une faon de rendre lesapproches sites et services plus abord-ables et plus souples est de les dvelop-per par tapes, en commenant par lesinfrastructures de base qui peuvent treamliores au fil du temps. (Voir Guidepratique n2 pour plus de prcisions.)

    Option 5 : Stratgies dulogement lchelle de lavilleLes besoins actuels de logements abordablessont eux seuls si considrables dans la plu-part des villes quil peut sembler impossible dyrpondre lavenir. Mais, en fait, rsoudre tousles problmes de logement dans une ville esttout fait possible. Toutefois, pour y parvenir- de manire systmatique et lchelle duneville - plusieurs lments sont ncessaires.

    Premirement, tablir plus de lienshorizontaux entre les communautspauvres. Daprs les donnes internation-ales, certaines des initiatives les plus nova-trices en matire de logement menes d-sormais dans les villes travers le monde nesont pas attribuables des ingnieurs, ar-chitectes, politiciens ou bureaucrates, mais

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE26

    sont le fait des communauts pauvres. Lesmodles dorganisation et de prestationde services doivent absolument soutenirles liens et les mcanismes qui permettentlapprentissage et lorganisation mutuels.

    Deuximement, faire une plus largeplace linnovation. Les politiques na-tionales et locales doivent tre assouplieset ajustes, afin de faire une plus largeplace linnovation dans la faon dontles pauvres peuvent accder un terrainet un logement et dans les modalitsselon lesquelles les tablissements faible

    revenu qui existent dj peuvent tre am-liors de manire concrte et durable.Cette srie de Guides pratiques propose,dans cette optique, quantit dides et detechniques.

    Troisimement, consacrer davan-tage dinvestissements publics linfrastructure.Il importe de se rappelerque de tels investissements peuvent aussitre stimuls par des ajustements des poli-tiques et des rglementations nationales

    et urbaines.

    Quatrimement, sassurer que des ef-forts sont consacrs renforcer lescapacits dont disposent les commu-nauts, les architectes, les ONG, les gou-vernements et toutes les autres partiesprenantes pour lancer des initiatives degrande chelle dans le domaine du loge-ment. Il faut pour cela des investissementscibls, car la plupart des organisations nesont habitues travailler quau niveau desprojets ou au niveau microconomique.

    Loption 5 est clairement complmentaire desquatre autres options examines ci-dessus. Il

    importe de comprendre que les stratgies ur-baines nont gure de chances de voir le jourou de se dvelopper en labsence de la volontpolitique requise. Ces stratgies dpendentaussi dun cadre national daction propice, d-finissant les orientations et les exigences mini-males pour les parties prenantes urbaines, quidoivent uvrer de manire plus concerte etplus intgre. Nous reviendrons sur ces consi-drations dans la discussion ultrieure sur lagouvernance.

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    27GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    LE FONCIERSans le foncier, il ne saurait y avoir de loge-ments. Et sans un examen des questions fonci-res, il ne saurait y avoir aucun dbat de fond

    sur la faon de rsoudre les problmes delogement des citadins pauvres en Afrique. Lemanque daccs des terrains dcents, scuri-ss et abordables est la principale raison pourlaquelle il y a tant de quartiers informels dansles villes africaines, et cest aussi un facteurcontribuant la pauvret urbaine.

    Il importe de bien saisir les diffrentes formesde rgime foncier en place dans les villes af-ricaines afin de mieux comprendre leurs dif-frents inconvnients et avantages. Cettecontextualisation permet de se faire une ide,eu gard aux conditions propres chaquepays et ville, de la faon dont les terrains sontfournis, valoriss, financs et vendus sur lemarch formel et de dterminer les raisonspour lesquelles, dune part, ce march formelne parvient pas mettre la disposition descitadins faible revenu des terrains appropriset srs et, de lautre, la majorit des pauvresdes zones urbaines dAfrique sont contraintsdobtenir les terrains ncessaires leur loge-

    ment en passant par le march foncier inform-el. Ces questions sont examines de manirebeaucoup plus approfondie dans le Guide pra-tique n 3 : Le foncier.

    Dans cette analyse prliminaire, nous abor-derons brivement les raisons pour lesquellesle foncier urbain est si rare ainsi que la por-te des actions requises pour assurer les ter-rains appropris indispensables lefficacitdes initiatives concernant les logements bon

    marchs vises ci-dessus. Nous commence-rons par examiner ce que signifie la scuritdoccupation en gnral, avant didentifier sesprincipaux aspects dans le contexte africain.

    La scurit doccupation?Les deux principales composantes de la scuritde toutes les principales formes doccupationsont les suivantes :

    dure raisonnable des droits, cest--dire une dure approprie compte tenu delutilisation qui est faite des terrains et desbesoins sociaux de leurs utilisateurs;

    protection juridique efficace contrelexpulsion ou la limitation arbitrairedes droits fonciers,comportant des ga-ranties excutoires et des voies de recoursjuridiques ou sociales contre la perte deces droits, et des mcanismes accessibleset efficaces de rglement des diffrends.

    Parmi les autres aspects importants de la scu-rit doccupation, on peut citer la libert desutilisateurs de lguer les terrains leurs hri-tiers, et de louer, prter ou donner les terrains

    dautres sur une base temporaire ou pourune plus longue priode, en tant raisonna-blement assurs quils pourront les rcuprer un moment ou lautre.

    La scurit doccupation peut tre assurede diffrentes faons, par exemple au moyende contrats de location prcisment rdigset de longue dure, ou de la reconnaissanceformelle des droits fonciers coutumiers, assor-tis de mcanismes de rglement des diffrendsaccessibles et efficaces. Les expriences de parle monde montrent que lamlioration de lascurit doccupation gnre de nombreuxavantages pour les mnages et pour la collec-tivit, en encourageant linvestissement dansles logements et les quartiers.29.

    Les Systmes dadministrationfoncire en Afrique

    Il importe de noter que les systmesdadministration foncire varient considrable-ment travers lAfrique. Dans la plupart despays, les systmes formels/juridiques coexis-tent avec des systmes coutumiers et extra-juridiques/informels. Limportance relative deces systmes peut varier dun pays lautre- par exemple, dans certains pays, un grandsystme foncier juridique/formel fonctionneparalllement avec un march foncier informel

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    GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE28

    florissant, alors que, dans dautres, le systmefoncier coutumier domine et quil y a peu oupas dactivit sur le march foncier formel.

    La part de la proprit de ltat par rapport celle de la proprit individuelle ou commu-nautaire peut galement varier. Par exemple,dans les pays avec un hritage du marxisme,

    comme le Mozambique, toute la terre est laproprit de lEtat. La plupart des systmesdadministration foncire sont fonds soitsur les pratiques coutumires soit sur les an-ciennes pratiques coloniales, alors que danscertains pays une approche islamique deladministration foncire prvaut.

    Typologie de la propritfoncireLe rgime foncier est complexe. Par exemple,parfois dans le mme tablissement informel,des mnages voisins peuvent vivre dans desconditions doccupation et des degrs de scu-rit diffrents. Certains peuvent avoir des con-

    trats de location, dautres peuvent possderleurs propres parcelles de terrain, dautrespeuvent avoir des droits dusage, alors quedautres peuvent tre des occupants illicites ou des locataires doccupants illicites sansdroits doccupation lgaux sur la terre. Pour serendre pleinement compte de la diversit quicaractrise la plupart des villes africaines,30 ilest utile de prsenter sous forme de typologietoute la gamme des systmes doccupationfoncire. (Voir tableau 7)

    TABLEAU 7:LES SYSTMES DOCCUPATION FONCIRE ET LEURS CARACTRISTIQUES

    Systme doccupation Caractristiques

    Occupation libre (proprit

    prive)

    Proprit perptuelle

    Bail enregistr Tenure bail pour une priode dtermine (parfoisjusqu 99 ans)

    Le propritaire doit crer le lot donner en bail et letransfrer au titulaire du bail.

    Location (publique ou prive) Deux options :

    Location publique : occupation de terrains ou de loge-ments appartenant lEtat

    Location prive : location par un propritaire deslocataires

    Coopratives et condominiums

    Proprit dvolue une cooprative ou une entitmorale dont les rsidents sont copropritaires.

    Occupation coutumire Proprit dvolue une famille, une communaut, ungroupe ou une tribu.

    La terre est gre par les chefs au nom de la commu-naut.

    Une variation est loccupation religieuse.

    Les formes intermdiairesdoccupation

    Arrangements pragmatiques, souvent de court terme(par exemple, certificats, permis doccupation, etc.)

    Occupation informelle Squatteurs, subdivisions non autorises, location nonofficielle, etc.

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    Chacun des ces systmes doccupationprsente des avantages et des inconvnients,comme nous le verrons plus en dtail dans leGuide pratique n 3 : Le foncier et le Guidepratique n 4 : Les expulsions.Pour linstant,nous examinerons les conditions du marchdans lesquelles ces systmes doccupationsont en place.

    La dynamique du marchfoncierLe foncier est de plus en plus considr com-me une marchandise, et non comme un biencommun dont lutilisation doit tre soigneuse-ment rglemente dans lintrt de tous lescitoyens. Cette volution a des consquencesnormes sur la faon dont les terrains publicset privs sont utiliss, et sur la faon dont leurutilisation est rglemente par lEtat.

    Tout terrain qui convient pour le logementa une valeur et peut tre achet ou vendu,quil soit proprit publique ou prive, etquil se situe sur le march formel ou in-formel. Les forces du march dterminent

    en fin de compte qui utilise une parcelle deterrain quelconque et combien cote ce ter-rain, sauf lorsque lEtat fournit directementdes terrains publics la population, sous laforme de projets de logements subventionns.Pourtant, mme les terrains publics, une foisquils ont t attribus et ont servi de sites la construction de logements sociaux, entrentsur le march, et les units sont achetes ouvendues formellement ou informellement. Lesprix sont dtermins par la demande de loge-ments dans cet emplacement particulier, eugard certaines qualits et commodits.

    Les forces du march, les pressions d-mographiques et la croissance urbaine con-tinuent de faire grimper la demande de ter-rains, mais loffre dans la plupart des villesreste trs infrieure la demande. Certainsgouvernements se sont efforcs daccrotreloffre de terrains viabiliss en rglementantle march foncier urbain, tandis que, dans lemme temps, plusieurs systmes informels de

    loffre de terrains sont apparus pour rpondre

    aux besoins auxquels le march foncier formelne peut pas rpondre. Toutes les tentativesfaites par les pauvres ou par les gouverne-ments pour obtenir des terrains propres deslogements abordables doivent reconnatre ces

    forces. Il est donc logique de comprendre lesprincipes de base des marchs qui influentsur la disponibilit de terrains urbains pour lelogement.

    Contrairement dautres choses qui peuventtre achets ou vendus, chaque parcelle deterrain est unique. Chaque parcelle corre-spondra un endroit prcis et prsentera cer-tains avantages et inconvnients en matiredaccs, de qualit du terrain et de proximit

    avec les moyens de transport et les infrastruc-tures. Son emplacement et dautres caractris-tiques dterminent sa valeur, son utilisation etson prix de vente. Toutes ces caractristiquessont affectes par lvolution des exigencesurbaines. Lorsque loffre de terrains diminueet la demande grimpe, les prix des terrainsaugmentent et vite. Par consquent, ce sontceux qui ont le plus dargent dpenser quiauront accs aux meilleurs terrains urbains, etnon ceux qui en ont le plus besoin.

    Une population croissante augmente automa-tiquement la demande de terrains - des par-celles de terrain de toutes les tailles et danstous les emplacements, pour tous les groupesde revenu et pour tout lventail des formesdoccupation ( la fois formels et informels)et pour tous les types dutilisations : commer-ciales, industrielles, rcratives et publiques.Lorsque la population dune ville se dvelopperapidement, et que les gouvernements et lesmarchs fonciers ne peuvent pas fournir des

    terrains assez rapidement pour rpondre cesbesoins croissants, les prix des terrains grim-pent en flche.

    La plupart des villes africaines ont d faire facesimultanment une hausse de la demande et une diminution de loffre de terrains, ce qui aexerc une forte pression sur la valeur des ter-rains. Lorsque le march foncier formel ne peutmettre suffisamment de terrains dispositionpour rpondre aux besoins de la ville, les prixdu foncier augmentent et un nombre croissant

    de personnes ne vont plus avoir les moyens de

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    financer un logement ou un terrain. Et quandles pauvres nont pas financirement accs des terrains sur les marchs formels, ils setournent vers les marchs informels. Commeon le verra dans leGuide pratique n 3: Le fon-cier, le Guide pratique n 4 : Les expulsions etleGuide pratique n 7 : Le logement locatif,la plupart des villes africaines ont des marchsfonciers informels dynamiques qui rpondentaux besoins en terrains et en logements descitoyens dmunis, y compris les squatters etles migrants. Ces marchs informels sont si ef-ficaces quune majorit des transactions fon-cires intervenant dans de nombreuses villesafricaines revtent aujourdhui un caractreinformel.

    Il sagit donc dune variable importante danslconomie politique de loffre de logementspour les citadins pauvres. Les responsablesgouvernementaux et les gestionnaires dter-mins remdier la crise du logement dans

    les villes africaines devront tre bien au faitde ces dynamiques, et calibrer leurs interven-tions en consquence. Pour faciliter ce proces-sus, nous dcrivons ici dix stratgies visant rendre les terrains plus accessibles aux cita-dins pauvres, en gardant toujours lesprit laprpondrance des marchs fonciers inform-els ct des marchs formels caractriss parlexclusion.

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    31GUIDE PRATIQUE POUR LES DCIDEURS POLITIQUES 1 LAFRIQUE URBAINE

    DIX STRATGIES POUR RENDRE LESTERRAINS PLUS ACCESSIBLES AUXPAUVRES

    La meilleure faon de rsoudre les prob-lmes fonciers et de logement est de soute-nir, sur de nombreux fronts, un large ventailde groupes de personnes et dapproches enmatire doffre de logements. Les gouverne-ments et les organismes de dveloppementcroient souvent tort quil nexiste quunesolution aux problmes fonciers, par exempleloctroi de titres fonciers tout le monde. La solution unique est un mythe. Les terrains

    et toutes les possibilits quils offrent doiventtre envisags dans le cadre dune approcheplus large de laccs au logement des citadinspauvres. Les questions foncires doivent trereplaces dans le contexte de la gouvernanceurbaine, de lamnagement des villes et de lamise en place dinfrastructures ainsi que dedu renforcement conomique et sociale despauvres.

    Les dix stratgies dcrites ci-aprs (et beau-coup plus prcisment dans leGuide pratique

    n 3 : Le foncier)doivent tre examines con-jointement avec celles dcrites dans les autresGuides pratiques de cette srie, notamment lessystmes de sites et services et les solutions deremplacement lexpulsion (Guides pratiquesn 2 et 4),le financement du logement (Guidepratique n 5),le logement locatif (Guide pra-tique n 7)et le rle central des organisationscommunautaires (Guide pratique n 6). Lesdcideurs doivent avoir conscience du fait quefournir des terrains pour btir des logements

    pour les faibles revenus est finalement unequestion politique. Chacune des 10 strat-gies examines ci-dessous peut amliorer ourduire laccs des pauvres la terre, en fonc-tion de la volont et des objectifs politiques.

    Stratgie 1: Planifier plusefficacementComme le dveloppement, la croissance, la

    concurrence et la spculation font grimper

    de plus en plus les prix des terrains dans lesvilles africaines, ces terrains ncessaires aulogement de chacun - mais surtout des pau-vres - deviennent de moins en moins abord-ables. Une faon de rduire les cots des ter-rains dans les projets de logements pour lesfaibles revenus consiste rduire la superficieutilise pour chaque unit grce une planifi-cation plus efficace. Lors de la conception denouveaux logements ou doprations de ra-

    mnagement communautaire, une bonne pl-anification peut contribuer rduire les cotsunitaires des terrains, favoriser des services debase plus efficaces et plus abordables et assur-er une meilleure qualit de vie aux rsidents.

    Dans cette optique, plusieurs mthodes pro-gressives de planification peuvent tre distin-gues (qui sont dcrites plus en dtail dans leGuide pratique n 3 : Le foncier ) : planifica-tion avec la participation de la population;planification pour les pitons et non pour

    les voitures; planification pour une densitplus leve de population; planification effici-ente; et utilisation plus judicieuse des rglesdutilisation des sols. Cest surtout la dernirede ces approches qui peut se rvler un outilpuissant pour aider les pauvres obtenir lesterrains ncessaires au logement. Les rgles enmatire dutilisation des sols et de constructionpeuvent tre ajustes de faon tre plus enphase avec les besoins rels des pauvres. Ellespeuvent contribuer accrotre considrable-

    ment le nombre de logements abordablesdisponibles sur le march formel. En outre,des rgles dutilisation des sols qui mettenten rserve des terrains pour la construction delogements pour les faibles revenus constitu-ent un outil puissant pour les communautsorganises, qui peuvent les utiliser dans leurrecherche de terrains et dans les ngociationsquelles mnent pour utiliser ces terrains dansle cadre dinitiatives de construction de vri-tables logements pour les faibles revenus.

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    Stratgie 2 : Amliorer lesinformations fonciresUn systme dinformations foncires qui fonc-tionne bien est lune des plus importantesconditions pralables la mise dispositiondes terrains pour le logement des pauvres.Si les registres fonciers urbains ne sont pasclairs, les rgles dutilisation des sols peuventtre manipules de diffrentes faons par desintrts puissants et, dans ces manipulations,les pauvres sont presque toujours les perdants.En outre, il nest pas possible de donner oude louer lgalement des terrains aux pauvres(soit individuellement soit collectivement) si lesdroits sont incertains, et ainsi la menace dune

    expulsion demeure.

    Le manque de registres publics fiables et jour sur les droits fonciers et les transactionsfoncires peut galement tre un obstacle audveloppement dun march foncier trans-parent et efficace. Des registres fonciers d-ficients favorisent la croissance des marchsfonciers informels, o un grand nombre detransactions et dattributions foncires ne sontpas enregistres, les villes perdant ainsi des

    recettes au titre des impts fonciers. Les sys-tmes dinformations foncires sont indispens-ables pour la gestion des ressources naturel-l