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Guerres des diadoques Sommaire 1 L'impossible succession 1.1 Le partage de Babylone 1.1.1 D'immédiates difficultés 1.1.2 La répartition des postes 1.1.3 Le soulèvement de Bactriane 1.1.4 La guerre lamiaque 1.1.5 Nouvelles conquêtes en Orient 1.2 La première guerre entre diadoques (322-319 av. J.-C.) et la régence d'Antipater 1.2.1 L'échec de Perdiccas en Égypte 1.2.2 La guerre en Asie Mineure 1.2.3 La mort de Cratère

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Guerres des diadoques

Sommaire

• 1 L'impossible succession • 1.1 Le partage de Babylone

• 1.1.1 D'immédiates difficultés • 1.1.2 La répartition des postes • 1.1.3 Le soulèvement de Bactriane • 1.1.4 La guerre lamiaque • 1.1.5 Nouvelles conquêtes en Orient

• 1.2 La première guerre entre diadoques (322-319 av.J.-C.) et la régence d'Antipater

• 1.2.1 L'échec de Perdiccas en Égypte • 1.2.2 La guerre en Asie Mineure • 1.2.3 La mort de Cratère

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• 1.2.4 Le partage de Triparadisos (321 av. J.-C.)

• 1.2.5 La régence d'Antipater (321-319 av. J.-C.)

• 2 Antigonos le Borgne, ou la dernière tentation impériale • 2.1 La coalition contre Polyperchon • 2.2 Cassandre s'impose en Grèce et Macédoine

• 2.2.1 Lutte pour le contrôle d'Athènes • 2.2.2 Cassandre régent • 2.2.3 L'assassinat de Philippe III et la fin

d'Olympias • 2.3 Antigonos s'impose en Asie (319-316 av. J.-C.)

• 2.3.1 Premier succès d'Antigonos • 2.3.2 Troubles dans la partie orientale de

l'empire • 2.3.3 Victoire d'Antigonos sur Eumène de

Cardia (317-316 av. J.-C.) • 2.4 Première coalition contre Antigonos et la paix de

311 av. J.-C. • 2.4.1 Antigonos agit en maître • 2.4.2 Première coalition contre Antigonos

(316 av. J.-C.) • 2.4.3 La proclamation de Tyr (315 av. J.-C.) • 2.4.4 Les combats en Grèce (315-312 av. J.-

C.) • 2.4.5 La guerre en Asie • 2.4.6 La paix de 311 av. J.-C.

• 2.5 L'intervention de Ptolémée en Grèce (310-308 av.J.-C.)

• 2.5.1 La reprise rapide du conflit

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• 2.5.2 La fin de la dynastie royale • 2.5.3 L'échec de Ptolémée en Grèce

continentale (308 av. J.-C.) • 2.6 Vers la bataille d'Ipsos (301 av. J.-C.)

• 2.6.1 Nouveau succès pour Antigonos • 2.6.2 Les diadoques deviennent rois • 2.6.3 Le siège de Rhodes (306 av. J.-C.) • 2.6.4 La guerre de quatre ans en Grèce (307-

304 av. J.-C.) • 2.6.5 La dernière coalition contre Antigonos

(302 av. J.-C.) • 3 Derniers conflits entre les diadoques

• 3.1 Le partage du royaume d'Antigonos • 3.2 Démétrios • 3.3 Premiers conflits entre les vainqueurs • 3.4 La mort de Cassandre et les nouveaux conflits en

Grèce et Macédoine (298-290 av. J.-C.) • 3.5 La chute de Démétrios (288-285 av. J.-C.) • 3.6 La fin de Lysimaque • 3.7 La mort de Séleucos

• 4 Notes • 5 Références • 6 Bibliographie

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L'impossible succession

Le partage de Babylone

D'immédiates difficultés

Les guerres des diadoques sont les conflits qui interviennent entreles successeurs d'Alexandre le Grand pour le partage de l'empireentre 323 av. J.-C. (mort d'Alexandre) et 281 av. J.-C. (bataille deCouroupédion).

Lorsque Alexandre le Grand meurt le 13 juin 323 av. J.-C. àBabylone, aucun des compagnons d'armes du souverain ne songe àdiviser l'empire. Tout d'abord parce que le roi défunt a des héritierset que le loyalisme à l'égard de la famille royale des Argéades estfort, sinon chez les généraux, du moins chez les soldats. L'idée d'unempire unique subsiste une bonne vingtaine d'années et résiste ainsiaux forces centrifuges jusqu'à la défaite finale d'Antigonos leBorgne. D'ailleurs, bien après le démembrement de l'empired'Alexandre, le souvenir de celui-ci reste vivace et inspire sansdoute les ambitions de certains souverains, tel Antiochos III.

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Le monde hellénistique à la mort d'Alexandre

Alexandre avait pris la précaution au début de son règne de faire levide parmi la nombreuse parentèle masculine, souvent illégitime, deson père. De celle-ci ne demeure qu'un bâtard mentalement arriéré,Arrhidée, qu'Alexandre garde à ses côtés. De ses femmes légitimes,Alexandre n'a pas d'enfants, mais Roxane est sur le pointd'accoucher. Il semble que dans un premier temps, deux conceptionss'affrontent au sein du conseil des Amis (philoi) et des Gardes ducorps (sômatophylaques) qui suit la mort du roi[N 1]. Certains, dontPerdiccas, privilégient l'option visant à renforcer le pouvoir centralet à l'organiser fortement. Ptolémée et d'autres diadoques souhaitentau contraire la constitution d'une assemblée de satrapes seréunissant épisodiquement, structure assez lâche qui revient àdonner une forte autonomie aux provinces et à ceux qui les dirigent.Dans les deux cas, il est pris la décision d'attendre la naissance del'enfant de Roxane : si c'est un fils, il sera roi[N 2]. Perdiccas etLéonnat, auxquels le conseil prête serment, sont désignés tuteursprovisoires de l'enfant à naître.

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C'est compter sans les fantassins de la phalange qui acceptent mal lapolitique de fusion des cultures prônée par Alexandre et qui le luiavaient signifié dans le passé (sédition d'Opis). L'idée que le futurroi puisse être à demi-iranien par sa mère provoque l'opposition dela phalange[N 3]. De plus, Méléagre, officier envoyé par le conseilpour négocier auprès des soldats, joue sa carte personnelle et serange à l'avis de ces derniers[N 4]. Il semble que l'on soit très prèsde l'affrontement (les diadoques et la cavalerie doivent même quitterun temps Babylone), mais un compromis est finalement trouvégrâce au chancelier d'Alexandre, Eumène de Cardia, qui profite deson statut de non-Macédonien pour œuvrer à une conciliation[N 5].Le demi-frère d'Alexandre est proclamé roi sous le nom de« Philippe III Arrhidée », mais les droits de l'enfant à naître sontpréservés ; c'est un fils qui à sa naissance est proclamé roi sous lenom d'Alexandre IV.

La répartition des postes

Aucun des deux rois n'étant apte à assumer les obligations du trône,une répartition des postes s'organise au sein du Conseil deBabylone [N 6]. Perdiccas est désigné chiliarque de l'empire(équivalent du vizir achéménide) et épimélète (gouverneur) duroyaume. Cratère, l'officier en qui sans doute Alexandre avait leplus confiance après Héphaestion, devient prostatès (tuteur) dePhilippe III, épileptique et déficient mental ; il n'est cependant pas àBabylone, mais en Cilicie avec 50 000 vétérans sur la route duretour en Europe. Antipater conserve la régence de la Macédoine etde la Grèce (alors qu'avant la mort d'Alexandre, Cratère était censéle remplacer), tandis que son fils Cassandre, arrivé à Babylone peuavant la mort du roi, est placé à la tête du bataillon des hypaspistes.Séleucos reçoit quant à lui le titre d'hipparque qui lui offre le

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commandement de la cavalerie des Compagnons (commandementprestigieux qu'ont exercé avant lui Héphaistion et Perdiccas). Lechoix de Perdiccas comme chiliarque n'est guère surprenant ; ilexerce déjà cette charge auprès d'Alexandre, mais sans le titre, etc'est à lui que le roi à l'agonie aurait confié l'anneau royal dont lesceau authentifie les actes de souveraineté[N 7]. Perdiccas devientcette fois officiellement chiliarque mais la tutelle des rois, qui luiéchappe, est donc confiée à Cratère. Afin de marquer sa nouvelleautorité, Perdiccas fait rapidement exécuter Méléagre parmi unetrentaine d’insurgés de la phalange[N 8].

Le conseil de Babylone se traduit par un vaste renouveau à la têtedes satrapies que l'on peut résumer ainsi[N 9] :

• Ptolémée reçoit l'Égypte (la satrapie la plus riche et la pluspeuplée) sur laquelle il a des ambitions depuis longtemps ;

• Antigonos est confirmé à la tête de la Phrygie qu'il gouvernedepuis -333 et obtient la Lycie et la Pamphylie [1] ;

• Lysimaque reçoit la Thrace (prise à Antipater) où il se rendrapidement pour faire face à des révoltes ;

• Léonnatos reçoit la Phrygie hellespontique ; • Peithon reçoit la Médie ; • Peucestas reçoit la Perside ; • Philotas (à distinguer de nombreux homonymes) reçoit la

Cilicie ; • Archon reçoit la Babylonie ; • Asandros reçoit la Carie ; • Atropatès, un des rares Asiatiques à rester en poste, conserve

la Petite Médie, qui prend le nom de Médie « Atropatène » ; • Eumène de Cardia reçoit la Cappadoce et la Paphlagonie, à

condition de les conquérir car ces deux territoires n'ont pas

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été conquis par Alexandre.

L'examen d'une liste exhaustive fait apparaître la netteprépondérance des Macédoniens. On remarque en effet peu deGrecs (le cas d'Eumène de Cardia, qui doit s'emparer des territoiresqui lui sont attribués, est particulièrement éloquent) et quelquesOrientaux parmi les souverains qu'Alexandre avaient maintenus enposte, tels Pûru et Taxilès en Inde ou Oxyartès dans le « pays desParopanisades » (sa qualité de beau-père d'Alexandre le rendintouchable). Le partage des satrapies est à considérer sous undouble point de vue. Pourquoi tout d'abord dépêcher tant d'officiersde premier plan aux quatre coins de l'empire ? De plus, le choix desbénéficiaires a-t-il une signification particulière ? Il est souventestimé, au vu de la destinée de Ptolémée ou de Séleucos, que cesont les diadoques qui ont exigé cette répartition des satrapies. Celadit, et sans écarter les ambitions à long terme de certains, ils segardent bien d'en faire état. Officiellement, c'est la sauvegarde del'empire qui prime et la désignation d'officiers prestigieux dans lesprovinces d'un empire encore fragile s'impose. Perdiccas n'est sansdoute pas non plus mécontent de voir s'éloigner des rivaux enpuissance, rendus encore plus méfiants depuis l'exécution deMéléagre. Les écarter présente des risques sur le long terme, maislui donne dans l'immédiat le temps de consolider son pouvoir.

Le soulèvement de Bactriane

La crise qui oppose les diadoques à la phalange n'est pas la seulequi survient au lendemain de la mort d'Alexandre. En Bactrianeéclate une révolte des colons grecs, installés par Alexandre dans descolonies militaires — plus ou moins disciplinaires — afin deprotéger cette marge particulièrement vulnérable, et qui se

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considérant comme exilés, réclament leur rapatriement depuis 325av. J.-C.. Les colonies militaires fondées par Alexandre en Bactrianeet en Sogdiane ont en effet surtout été peuplées par des colonsgrecs. Après la mort du souverain, ce mouvement prend del'ampleur et se combine apparemment avec un soulèvement desBactriens[N 10]. Les rebelles forment une armée estimée à 20 000fantassins et 3 000 cavaliers. Perdiccas met alors sur pied une arméeformée de Macédoniens tirés au sort (car ceux-ci rechignent àretourner dans les terres de Haute Asie) et de troupes orientaleslevées dans les satrapies. Il charge Peithon, satrape de Médie deréduire l'insurrection ; celui-ci utilise la trahison pour vaincre lescolons grecs mais, contrairement aux ordres de Perdiccas qui aordonné l'extermination des insurgés, il accepte leur capitulation.Cependant les soldats ne respectent pas ce traité qui est censérenforcer les ambitions de Peithon ; voulant amasser le butin promispar Perdiccas, ils massacrent impitoyablement tous les colons. LaBactriane est alors confiée au satrape d'Arie-Drangiane, leChypriote Stasanor de Soloi, qui forme ainsi un vastegouvernement.

La guerre lamiaque

Le principal danger vient de la Grèce où une révolte d'Athènes, sousla conduite d'Hypéride, et malgré l'hostilité de Phocion, sedéclenche contre Antipater. Une vaste coalition, dirigée parLéosthène, un magistrat d'Athènes et chef de guerre, rassemble,outre la cité attique, l'Étolie, la Locride et la Phocide. À la fin del'année 323 av. J.-C., Léosthène est vainqueur en Béotie, puiss'empare des Thermopyles et contraint Antipater à s'enfermer dansla cité de Lamia (d'où le nom de guerre lamiaque)[N 11]. La mortde Léosthène dans une escarmouche sous les murs de cette cité,

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remplacé par Antiphile, n'entame pas la combativité des Grecs qui,grâce à la cavalerie thessalienne, défont le satrape nouvellementnommé de Phrygie, Léonnat, lequel est tué. Néanmoins l'arrivée desrenforts de Léonnat permet à Antipater d'évacuer Lamia.

C'est la venue de Cratère avec des troupes nombreuses, ainsi que lesdeux défaites navales d'Athènes en 322 av. J.-C., qui retourne lasituation en faveur d'Antipater. Les Grecs sont battus en août àCrannon, en Thessalie[N 12] et la coalition se délite. La répressionest particulièrement sévère (Hypéride est exécuté et Démosthène sesuicide dans le temple de Poséidon situé dans l'île de Calaurie —aujourd'hui Poros — au large de l'Argolide) tandis que ladémocratie est une fois de plus renversée. Cratère se prépare, avecAntipater, à poursuivre les Étoliens retirés dans leurs montagnes[N13] quand son attention est détournée par les événements d'Asie.

Nouvelles conquêtes en Orient

En Orient, la vitalité militaire du jeune empire n'est pas entamée parla mort d'Alexandre. Ainsi l'année 322 av. J.-C. qui voit finir laguerre lamiaque est marquée par la soumission de la Cappadoce etl'annexion de la Cyrénaïque.

La Cappadoce, restée indépendante sous la domination d'Ariarathe,est attribuée au partage de Babylone à Eumène de Cardia ainsi quela Paphlagonie et les pays du Pont-Euxin jusqu'à Trapézonte [N 14].Mais Léonnat qui doit mener la conquête est tué lors de la guerrelamiaque et Antigonos refuse de s'en charger. C'est donc Perdiccasen personne qui dirige l'expédition. Accompagné de Philippe III, ilmarche sur la Cappadoce à la tête de l’armée royale[N 15].Ariarathe a mis sur pied une troupe de 30 000 fantassins et de 5 000

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cavaliers[N 16]. Cet effectif imposant ne doit pas surprendre car laCappadoce et la Paphlagonie sont traditionnellement des terres derecrutements, notamment de cavaliers. Il semble par ailleursqu'Ariarathe ne paie pas de tribut, ni à Darius III ni à Alexandre[N17]. Perdiccas défait Ariarathe, en une ou deux batailles, les pertesdu dynaste cappadocien s’élevant à 4 000 tués et à 5 000prisonniers[N 18]. Ariarathe est capturé et mis en croix, châtimentque les Achéménides appliquaient aux rebelles, puis la ville deLaranda est prise ainsi que l'Isaurie, mais sans que le Pont-Euxinsoit atteint[2]. Perdiccas accorde une amnistie aux Cappadociensinsoumis et établit Eumène à la tête de sa satrapie[2].

Ptolémée arrive quant à lui en Égypte à la fin de 323 av. J.-C.(octobre ou novembre) où il est confronté à Cléomène, chargé parAlexandre de l'administration financière du pays et dont il étaitdevenu satrape. Il semble que Cléomène ait été maintenu parPerdiccas pour seconder, et sans doute espionner, Ptolémée. Celui-ciet les autres diadoques voyaient dans ce moyen, et les conflitsinévitables qu'il allait entraîner, une façon d'affaiblir la position del'ambitieux général. Mais Ptolémée va rapidement éliminer leproblème en accueillant avec attention les accusations d'exactionsportées contre Cléomène par les Égyptiens, accusations semble-t-ilfondées. Cléomène est exécuté rapidement. Débarrassé de son rival,Ptolémée se tourne vers la Cyrénaïque. Cyrène en effet est agitéepar des troubles politiques entre diverses factions et un condottierespartiate, Thibron, celui-là même qui avait tué Harpale en Crète,s'est emparé du pouvoir. Chassé de la ville par l'un de seslieutenants, il assiège celle-ci laquelle, pour compliquer les choses,connaît une révolution démocratique. Certains oligarques seréfugient auprès de Ptolémée et parviennent à le convaincre deprofiter de la situation. Le compagnon d'armes de Ptolémée,Ophellas, est envoyé avec une armée et écrase les Cyrénéens, entre-

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temps réconciliés avec Thibron. Thibron est tué et Ophellas devientle gouverneur de la Cyrénaïque pour le compte de l'Égypte (322 av.J.-C.).

La première guerre entre diadoques (322-319 av. J.-C.)et la régence d'Antipater

Buste de Ptolémée I er Sôter, III e siècle av. J.-C., musée du Louvre

Le détournement par Ptolémée du convoi funéraire d'Alexandre(322 av. J.-C.), dont il faut bien voir toute la portée symbolique,ainsi que l'annexion immédiate de Cyrène, ont un très fortretentissement. Ces événements venus d'Égypte inquiètent

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Perdiccas, à qui une ambition démesurée procure beaucoupd'ennemis[N 19]. Cet affrontement d'ambitions, clairementaffichées, donne le branle à la première crise majeure de l'aprèsrègne d'Alexandre.

Alexandre tenait le pouvoir de sa naissance bien sûr, mais aussi deson génie et de l'énergie qu'il mettait pour atteindre ses objectifs.Lui mort, la royauté représentée par un faible d'esprit et un enfant,personne n'est en mesure de s'imposer à ces nobles Macédoniensdont quelques-uns ne se croient pas indignes de succéder auconquérant. Plus de trente années de guerres sous Philippe II etAlexandre ont développé dans la noblesse de fortes personnalités.

Mais le démembrement de l'empire ne résulte pas que du chocd'ambitions rivales et individuelles. Cet empire est trop vaste etcomposé de parties disparates. À partir du moment où l'autoritécentrale est divisée, les forces centrifuges (langues, cultures,intérêts, etc.) entament le morcellement. D'ailleurs les monarchieshellénistiques (Séleucides, Attalides, rois de Bithynie, du Pont, etc.)reposeront moins sur un territoire que sur la personne dessouverains à l'exception notable de l'Égypte et de la Macédoine. Etencore l'Égypte des Lagides ainsi que la Macédoine desAntigonides n'hésiteront pas à annexer des territoires en dehors deleurs frontières tout au long de l'époque hellénistique et qui neseront unis que par la puissance et la personnalité des souverains.

L'émiettement de l'empire n'est donc pas un phénomène vouluexplicitement au départ par les diadoques. Ceux-ci, depuis lepartage de Babylone, cherchent surtout à s'assurer une certaineautonomie et à ne souffrir personne de plus puissant qu'eux. Dèsque l'un des diadoques semble en mesure de restaurer à son profit lapuissance impériale, une coalition des autres généraux met fin à ses

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ambitions. Perdiccas n'est que le premier à faire les frais de cettesituation.

L'échec de Perdiccas en Égypte

Perdiccas, une fois le partage de Babylone effectué, voit non sansun certain plaisir partir les plus fortes personnalités (Ptolémée Ier,Antigonos, Cratère, etc.) vers leurs satrapies respectives. Il faitrapidement exécuter Méléagre, le commandant de l'infanteriemacédonienne, que son comportement lors du partage avait rendususpect. Surtout, il aide Eumène de Cardia à entrer en possession dela Cappadoce (322 av. J.-C.) après le refus d'Antigonos. Eumène estun Grec qui, après une carrière à la tête de la chancelleried'Alexandre malgré l'inimitié d'Héphaestion, avait succédé àPerdiccas à la tête d'une hipparchie. Il se révèle d'une fidélité tenaceà la cause de l'unité impériale. Est-ce par fidélité au souvenird'Alexandre ou par opportunisme ? Difficile à dire. Il est vrai quedans le cadre d'un partage entre diadoques il n'eût pas trouvé, de parses origines non-macédoniennes, l'appui des troupes.

Perdiccas reçoit le soutien de la reine-mère Olympias. La querellede celle-ci avec Antipater avait empoisonné les dernières années durègne du souverain et il n'est pas impossible qu'Antipater, appelé enAsie peu avant la mort du roi, ait été déjà disgracié. Il est l'un deceux pour qui la mort d'Alexandre tombe à pic, ce qui explique lesrumeurs, probablement erronées, concernant un éventuelempoisonnement d'Alexandre fomenté par Cassandre et Iollas(échanson du roi), les fils d'Antipatros arrivés à Babylone peu avantjuin 323 av. J.-C. Olympias, qui cherche à se débarrasser dePhilippe III et d'Eurydice (elle-même petite-fille de Philippe II parsa mère Cynané et fille d'Amyntas IV, qu'Alexandre avait fait tuer

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lors de sa prise du pouvoir), invite Perdiccas à épouser sa proprefille Cléopâtre, la sœur du conquérant. Le projet d'Olympias est defaire venir Perdiccas en Macédoine afin d'y épouser Cléopâtre, alorsqu'il est censé épouser Nikaia, fille d'Antipater. Elle est persuadéeque le prestige des deux princesses associé au fait que Perdiccaspeut faire figure d'héritier légitime ayant été désigné sur son lit demort par Alexandre lèvera tous les obstacles surtout si Perdiccasamène avec lui la dépouille du héros pour la déposer à Ægées. MaisPerdiccas hésite. Il est confronté au passage en Asie de Cynané etde sa fille Eurydice avec une armée. Il envoie son frère Alcétas lacombattre mais les soldats macédoniens refusent de porter les armescontre une fille de Philippe tant le prestige de la dynastie royale estencore important. Perdiccas parvient néanmoins à s'emparer deCynané et la fait exécuter, mais ses soldats obtiennent de lui qu'ilautorise le mariage d'Eurydice avec Philippe III. Perdiccas ainsi sefait de nombreux ennemis. Méfiant envers Antigonos, lequel avaitrefusé d'apporter son concours à Eumène de Cardia dans laconquête de la Cappadoce, il lui demande des comptes dans lagestion de sa satrapie. Antigonos se réfugie alors auprèsd'Antipatros et de Cratère (322 av. J.-C.).

Ces derniers, qui viennent d'en finir avec la guerre lamiaque,signent une paix hâtive avec les Étoliens et prennent contact avecPtolémée tant l'attitude de celui-ci sera décisive pour faire pencherla balance d'un côté ou de l'autre. Cela dit, Antipater ne doute pas deson appui car son hostilité à Perdiccas est connue. Ainsi en quelquetemps Perdiccas voit ses plans s'écrouler. Lassée par sesatermoiements, Cléopâtre refuse désormais de se marier avec lui,sans doute sur les conseils de sa mère Olympias furieuse du mariaged'Eurydice avec Philippe III, qui lui apparaît comme une menace.Mais surtout Ptolémée s'empare en Syrie de la dépouille mortelled'Alexandre en achetant Arrhabée, l'officier chargé du convoyage

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vers la Macédoine, et la rapatrie sur Memphis en attendant letombeau qu'il lui prépare sur Alexandrie dont il souhaite faire sacapitale[N 20].

Perdiccas laisse alors en Asie mineure son frère et Eumène deCardia pour contenir Cratère et Antipater et décide d'abattrePtolémée. Il sous-estime cependant son adversaire. Ptolémée a étél'un des meilleurs officiers d'Alexandre, de plus son accessibilité,son humilité, contrairement à la morgue de Perdiccas, le rendentpopulaire auprès des Macédoniens. Enfin la frontière orientale dudelta du Nil est relativement facile à défendre par un souverainénergique. Perdiccas échoue devant Péluse, puis tente en vain defaire passer le Nil à son armée. Il perd 2000 hommes dans cet échecqui sonne le glas de sa tentative. Il est assassiné en 321 av. J.-C.sous sa tente par Antigénès, Peithon et Séleucos [N 21]. Ptoléméeest suffisamment avisé pour ne pas prendre le titre de chiliarque enlieu et place de Perdiccas. Il confie à Peithon et Arrhabée la chargede veiller sur les deux rois et attend l'arrivée d'Antigonos, Cratère etAntipatros.

La guerre en Asie Mineure

Au printemps -321, Antigonos débarque ses troupes à Éphèse tandisqu'Antipater et Cratère traversent l'Hellespont. Eumène doit quitterla Phrygie ; il se réfugie dans sa satrapie de Cappadoce et alertePerdiccas du débarquement d’Antipater. Le chiliarque, alorsstationné en Cilicie avec les rois, décide de marcher sur l’Égypte[N22], tandis qu'Eumène est chargé de défendre l’Asie Mineure contrele régent d’Europe et ses alliés[N 23]. Le titre de stratège autokratordonne à Eumène le commandement des armées d’Asie Mineure quisont à cette époque sous le contrôle d’Alkétas, frère de Perdiccas, et

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de Néoptolème, satrape d’Arménie[N 24]. Ce qui pose à Eumène degraves difficultés : Alkétas refuse d’abord de prendre part àl’expédition et se replie en Pisidie car ses soldats « auraient hontede combattre contre Antipater [et] n’avaient que bons sentimentspour Cratère »[N 25]. Par ailleurs Néoptolème, chef des hypaspistesd’Alexandre, n’a jamais témoigné de considération envers Eumène,le « scribe grec »[N 26]. Néoptolème accepte donc les propositionsde ralliement faites par Antipater et détourne une grande partie de laphalange macédonienne. Eumène reçoit également desambassadeurs du régent de Macédoine mais il refuse toutenégociation. Eumène parvient à intercepter la troupe de Néoptolèmeen Phrygie hellespontique (avril -331) et remporte la victoire enrenforçant son infanterie déficiente par un fort contingent decavaliers cappadociens[N 27]. Eumène s’empare en outre desbagages de la phalange macédonienne qui finit par se rallier à lui.Néoptolème parvient malgré tout à s’échapper avec une petitetroupe de cavaliers et se réfugie auprès de Cratère. Antipater tentesans succès de conclure une nouvelle fois une alliance avecEumène. Il est donc décidé que Cratère et Néoptolème marchentcontre Eumène, tandis qu’Antipater doit gagner la Cilicie pourcombattre Perdiccas.

La mort de Cratère

La bataille décisive entre adversaires et partisans de Perdiccas seserait déroulée dix jours après celle ayant opposé Eumène de Cardiaet Néoptolème[N 28]. Prévenu de l’arrivée imminente de Cratère,Eumène regroupe son armée et utilise habilement le mythed’Alexandre auprès de la troupe : « Deux Alexandre » lui seraientapparus en songe, l’un protégé par Athéna, l’autre par Déméter, etse sont livrés un combat à l’issue duquel est vaincu le protégé

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d’Athéna. Eumène donne donc pour mot d’ordre « Déméter etAlexandre » et demande à ses soldats de se couronner d’épis de blé,symbole de la déesse[N 29]. Il semble même qu’Eumène cache àses troupes qu’elles vont combattre Cratère en personne[3], bienqu’il soit plus probable qu’Eumène se contente de ne ranger sur sonaile gauche aucun Macédonien car ceux-ci n’auraient effectivementpas osé combattre Cratère[4].

Cratère dispose de 20 000 fantassins, majoritairement Macédoniens,et de 2 000 cavaliers. Eumène lui oppose 20 000 fantassins de« toutes origines » (pantodapoi), dont les phalangites deNéoptolème, et 5 000 cavaliers grâce auxquels il compte remporterla victoire[5]. Eumène ordonne donc à ses cavaliers orientaux decharger immédiatement l’aile droite commandée par Cratère quitrouve la mort dès le début des combats[6]. Néoptolème est tué parEumène lors d'un duel âprement disputé[7]. La phalangemacédonienne négocie alors une trêve laissant la victoire à Eumène.Ce dernier fait élever un trophée sur le champ de bataille, peut-êtreen sa qualité de Grec car cet usage ne semble pas être en vigueurchez les Macédoniens[8]. Étant donné leur amitié passée et leprestige du sômatophylaque d’Alexandre, Eumène organiseégalement une cérémonie funéraire en l’honneur de Cratère et faitrapatrier son corps en Macédoine[9]. La trêve n'est pas respectéepar les phalangites qui, ayant reçu l’autorisation de se ravitailler,profitent pour s’échapper auprès d’Antipater [10]. Dès que l’arméed’Égypte apprend la mort de Cratère et de Néoptolème, Eumène estcondamné à la peine capitale et déclaré ennemi des Macédonienspar une assemblée de l’armée[11].

Malgré les victoires d’Eumène en Asie Mineure, la cause dePerdiccas — et de ses partisans — est néanmoins perdue. Antigonosa vaincu la flotte du chiliarque vers Chypre et Antipater,

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contournant Eumène, est déjà en Cilicie. Quand le résultat de laguerre en Égypte est connu, une rencontre entre les vainqueurs estdécidée. Elle a lieu à Triparadisos, au nord de la Syrie en -321.Antigonos est nommé stratège d’Asie par Antipater, à charge pourlui de vaincre Alcètas et Eumène en Asie Mineure[12].

Le partage de Triparadisos (321 av. J.-C.)

La situation lors de cette rencontre est assez confuse. Il semblequ'une nouvelle mutinerie éclate, sans doute fomentée par Eurydice,qui contrairement à son mari est saine d'esprit et fort ambitieuse desurcroît. Le tuteur des rois était en effet, depuis le partage deBabylone, Cratère, bien que ce soit Perdiccas qui en avait la gardeeffective. La mort de Cratère lui laisse, du moins le croit-elle, lechamp libre. Elle tente dans un premier temps de s'imposer auprèsde Peithon et Arrhabée, que Ptolémée a chargé de gouverner l'arméede Perdiccas en attendant la rencontre avec les autres diadoques.Son échec ne la décourage pas et elle est très probablement àl'origine de la mutinerie qui éclate à Triparadisos contre Antipatros.Eurydice utilise le mécontentement de l'armée, qui réclame lesgratifications qu'Alexandre lui avait promises, et accuse Antipateren public[13]. Antigonos le Borgne et Séleucos sont malmenéslorsqu'ils prennent la défense d'Antipater. Antigonos finit parrameuter ses troupes et reprendre le contrôle de la situation mais cetépisode montre la fragilité de la situation pour chaque diadoque.C'est l'armée, selon la coutume macédonienne, qui est la dépositairede la volonté nationale, et qui peut donc intervenir dans le choix dusouverain.

La principale décision prise à Triparadisos est de confier la régenceà Antipater. Il est à la fois chef de l'armée, puisqu'à son arrivée

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Peithon et Arrhabée lui ont transmis leur pouvoir provisoire sur lestroupes, mais aussi chef du gouvernement et tuteur des rois. Unnouveau partage des satrapies est alors décidé pour tenir compte dela nouvelle situation politique. Ptolémée est bien sûr maintenu enÉgypte, avec toute latitude pour intervenir à l'ouest. Cela revientpour le gouvernement central à se dessaisir en sa faveur de sesprérogatives politiques et militaires sur la frontière méridionale del'empire. Séleucos devient satrape de Babylone. Ce changement està noter car en 323 av. J.-C., il avait préféré le poste prestigieuxd'hipparque, à savoir un poste auprès du pouvoir central considérécomme plus important que celui de satrape ; cette fois, il estimenécessaire d'avoir un gouvernement provincial. Les forcescentrifuges sont entrées en action et certains diadoques lecomprennent parfaitement. D'autres sont récompensés pour avoirparticipé au complot contre Perdiccas ; ainsi Antigénès se voitconfier la satrapie de Susiane, Peithon se voit confirmer en Médie.

Antigonos voit son domaine s'agrandir puisque déjà satrape deGrande Phrygie, de Lycie et de Pamphylie, il y ajoute la Lycaonie.Surtout il est chargé de mettre fin à la guerre avec Eumène deCardia dont le domaine jouxte le sien. Enfin Antipatros lui laisse lecommandement effectif de l'armée avec le titre de « stratèged'Asie » et lui laisse la garde des rois. C'est faire d'Antigonos unvéritable vice-roi, aucun diadoque n'ayant une puissanceéquivalente si l'on excepte peut-être Ptolémée. Antipatros lui adjointcependant comme second le nouveau maître de la cavalerie, sonpropre fils Cassandre. La mésentente entre Antigonos et Cassandreest fatale, aucun n'étant disposé à jouer les seconds rôles. Elle éclatepeu après, Antipatros n'étant pas encore rentré en Macédoine, etCassandre est désavoué par son père. Il parvient cependant àconvaincre celui-ci de ne pas se séparer des rois et à les emmener enMacédoine. Toutefois Antipatros ne peut se permettre une dispute

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avec Antigonos, aussi entoure-t-il son geste de défiance par desbons procédés. Il donne ainsi sa fille Phila en mariage au filsd'Antigonos, Démétrios I er. Cette union, qui engendre le futurAntigonos II Gonatas et Stratonice I re, ne sera guère heureuse maisrenforcera provisoirement les liens entre les deux diadoques.

La régence d'Antipater (321-319 av. J.-C.)

La prééminence d'Antipater dure environ deux ans. Elle est marquéepar la reprise du conflit contre les Étoliens qui, profitant du départd'Antipater et Cratère pour l'Asie, avaient envahi la Thessalie.Celle-ci est reconquise par Polyperchon, aidé il est vrai par uneinvasion d'Acarnaniens sans doute suscitée par Antipater.

En Asie, Antigonos est quasiment venu à bout d'Eumène de Cardiaet des derniers partisans de Perdiccas. Mal secondé par le frère dece dernier, Alcétas, qui est tué en Pisidie, Eumène, avec 500cavaliers et 200 fantassins, se réfugie dans la forteresse de Nora(Kodja ou Hassan-Dagh, dans l'actuelle Turquie), aux confins de laCappadoce et de la Lycaonie [14].

La cité d'Athènes retrouve après les troubles de la guerre lamiaqueune certaine prospérité matérielle sous le gouvernement de Phocion.Mais le ressentiment contre les Macédoniens, dont une garnison estprésente à Munychie, reste fort. Aussi Démade, considéré commeun ami de la Macédoine, est envoyé auprès d'Antipater afind'obtenir le départ des troupes. Mais les multiples palinodies deDémade dans le passé, dont des lettres invitant trois ans plus tôtPerdiccas à venir libérer la Grèce qui ne tenait plus qu'à « ce vieuxfil pourri d'Antipater »[15], suffisent à Dinarque de Corinthe, unami de Phocion, à le faire accuser de trahison. Cassandre qui le juge

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fait égorger son fils devant lui avant de le faire exécuter.

Antipater, malade, laisse faire. Il meurt peu après à l'âge de 78 ans(été 319 av. J.-C.). Avec lui disparaît le dernier compagnon dePhilippe II, contemporain de Parménion. Certes il n'a pas participédirectement à l'expédition d'Alexandre, mais il l'a rendue possibleen maintenant la Grèce sous la tutelle macédonienne. Sa successionva relancer les conflits entre les diadoques.

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Antigonos le Borgne, ou la dernièretentation impériale

La mort d'Antipater voit se lever en Asie l'ambition d'Antigonos.Maître de la plus grande partie de l'Asie mineure, vaguementapparenté à la dynastie des Argéades, il se juge visiblement commele seul capable d'incarner l'idée impériale. Aussi est-ce cettepersonnalité qui domine l'histoire complexe de l'Orient hellénistiquedurant les quinze années qui suivent la disparition du régent. Nonque les personnalités des autres diadoques manquent de grandeur oud'énergie, mais comparées à celle d'Antigonos, leurs ambitionssemblent limitées à se constituer dans l'empire d'Alexandre unespace personnel, quitte à contribuer à son éclatement. Antigonos,lui, a en tête la volonté de tout dominer[16]. Certes il n'est pas,quoique âgé déjà au moment de l'expédition d'Alexandre, l'un desofficiers les plus prestigieux du monarque défunt. Il avait été faitsatrape de Phrygie mais sans jamais avoir un commandement depremier plan. Cependant, à près de 65 ans, il révèle des talentsmilitaires certains contre les partisans de Perdiccas, d'autant qu'il estrapidement secondé par son fils Démétrios I er Poliorcète, un desplus brillants capitaines de ces temps.

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Pièce à l'effigie d'Antigonos, portant l'inscription ΒΑΣΙΛΕΩΣΑΝΤΙΓΟΝΟΥ / BASILEÔS ANTIGONOU, « Roi Antigone »

La coalition contre Polyperchon

Antipater se méfie visiblement de son fils Cassandre. Il transmet eneffet le pouvoir à l'un de ses collaborateurs, Polyperchon, tandis queCassandre est nommé chiliarque de la cavalerie, titre qu'il avait déjàobtenu à Triparadisos. L'âge de Polyperchon, son manque deprestige et l'ambition de Cassandre entraîne dès le décès d'Antipaterun nouveau conflit. De plus, la nomination de Polyperchon nepossède aucune base politique puisqu'elle n'émane pas d'uncompromis entre les diadoques.

Cassandre va s'allier tout d'abord à Ptolémée, qui vient de s'emparerde la Syrie-Phénicie sur le satrape désigné à Triparadisos,Laomédon. De ce fait, le satrape d'Égypte est en délicatesse avec lepouvoir central représenté par Polyperchon. Quant à Antigonos, quidéjà s'est emparé de la Lydie et de la Phrygie hellespontique, ilcherche à se concilier Eumène de Cardia, qu'il n'arrive pas à délogerde la forteresse de Nora, et entre en négociation avec lui par

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l'intermédiaire d'un ami commun, l'historien Jérôme de Cardia.

Polyperchon cherche donc à se concilier des alliés. Pour cela, ilproclame la liberté des Grecs [17] et se rapproche des démocrates.Son édit proclame sa volonté de rétablir les constitutions du tempsde Philippe et Alexandre, reconnaît les maux dont les Grecs ontsouffert (tout en les blâmant d'avoir résisté aux Macédoniens) et endétourne la responsabilité sur les partisans de l'oligarchie, soutenuspar Antipatros (pourtant son ancien mentor) et Cassandre (sonprincipal ennemi). En Asie, Polyperchon songe à obtenir l'aided'Eumène et lui écrit une lettre en ce sens que rapporte Diodore deSicile [18]. Eumène est sorti de Nora après un accord avecAntigonos, mais continue de proclamer sa fidélité aux rois (et doncà l'idée impériale), seul moyen pour lui de justifier sa lutte contreles autres diadoques. Il reçoit l'aide d'un corps de 3000« Argyraspides », vétérans des guerres d'Alexandre, parfois âgésselon Plutarque de plus de 60 ans mais expérimentés, dirigés pardeux officiers nommés Antigénès, satrape de Susiane, et Teutamos.Eumène est aussi nommé par Polyperchon « stratège d'Asie[19] »,titre qu'Antigonos avait reçu à Triparadisos. Ainsi s'affrontent àl'intérieur de l'empire deux forces antagonistes.

Cassandre s'impose en Grèce et Macédoine

Lutte pour le contrôle d'Athènes

L'édit de Polyperchon met en difficulté Phocion, le chef de lafaction oligarchique d'Athènes, ainsi que Nicanor, un ami deCassandre qui dirige la garnison macédonienne. Le retour prévisiblede nombreux bannis, la réorganisation du parti démocratique qui

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retrouve un chef en la personne d'Hagnonidès de Pergase neconviennent pas à Nicanor qui s'empare du Pirée. La situation secomplique avec l'arrivée en Attique d'Alexandros, le fils dePolyperchon, qui prend le contrôle du Pirée alors que Nicanor seréfugie auprès d'Antigonos. Phocion, mis en accusation parHagnonidès, se rend auprès d'Alexandros mais celui-ci l'abandonneau jugement d'Athènes, proclamée indépendante, et quitte Le Pirée.Phocion, accusé devant l'assemblée qui refuse d'écouter sa défense,meurt en buvant la ciguë.

Cette victoire de la démocratie est de courte durée. Cassandre, avecune troupe peu importante, s'empare de nouveau du Pirée etPolyperchon, arrivé en renfort, ne peut s'emparer de la ville. Il laissealors Alexandros devant la ville et tente de prendre Mégalopolis(318 – 317 av. J.-C.) qui refuse d'appliquer son édit. Il compte surses éléphants, encore inconnus en Grèce, et parvient à percer unebrèche dans la muraille. Les Mégapolitains parviennent cependant àrepousser l'assaut en cachant sous terre des portes hérissées declous[20]. Son prestige, déjà faible en est amoindri. De plusCassandre voit l'élection comme « archonte décennal » en 317 av.J.-C. de Démétrios de Phalère, qui impose une oligarchie modérée(il crée un système censitaire qui porte à 1000 drachmes le revenuexigé pour être citoyen actif, et fait exécuter le chef du partidémocratique Hagnonidès) et maintient Athènes dans l'alliance avecCassandre. Ce dernier accepte l'indépendance d'Athènes mais unegarnison macédonienne reste à Munychie.

Cassandre régent

Cassandre repart alors en Macédoine et s'entend avec la reineEurydice. Il peut ainsi se proclamer régent cependant que

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Polyperchon, qui ne contrôle guère que le Péloponèse, est déchu dece titre. Eurydice ordonne au nom de Philippe III à Polyperchon etAntigonos le Borgne de remettre leurs armées à Cassandre, auquelest confié l'administration du royaume. La Grèce du nord se rallie àCassandre (317 av. J.-C.) tandis qu'il marche sur Polyperchon,laissant la garde des rois à son frère. Cassandre commence alors lesiège de Tégée. Polyperchon sollicite le soutien d'Olympias, la mèred'Alexandre le Grand, qui d'Épire observe avec attention lasituation. Elle entre en Macédoine, profitant de l'absence deCassandre, et s'empare, sans combattre véritablement (les soldats nevoulant lever les armes contre la mère d'Alexandre), du roi PhilippeIII à Euia, sur la frontière entre la Macédoine et la Thessalie.Eurydice est bientôt elle aussi arrêtée alors qu'elle fuyait versAmphipolis.

L'assassinat de Philippe III et la fin d'Olympias

En septembre 317 av. J.-C., Olympias fait assassiner Philippe III parses soldats thraces et contraint Eurydice au suicide. Elle faitégalement exécuter 100 de leurs partisans, dont Nicanor, le frère deCassandre. Celui-ci réagit avec rapidité et tandis que ses officiersrepoussent les Épirotes et Polyperchon, il fait le siège de Pydna oùs'est enfermée Olympias. Après un long siège (hiver 317 –printemps 316 av. J.-C.), la ville est contrainte de se rendre.Cassandre, qui craint encore l'influence de la reine mère (Pella etAmphipolis résistent encore un certain temps), la fait assassiner ets'empare du roi Alexandre IV et de sa mère Roxane. Cassandre secomporte désormais en véritable souverain, sans en avoir le titre. Ilest de plus lié à la dynastie d'Alexandre, ayant épousé l'une desfilles de Philippe II, Thessaloniké. Il fonde Cassandréia, surl'emplacement de Potidée, peuplée de colons venant de la

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Chersonèse et de ce qui reste des Olynthiens, puis en 315 av. J.-C.fonde la ville de Thessalonique, du nom de sa femme. Sa décisionde rebâtir Thèbes est plébiscitée en Grèce. Enfin, dans une dernièreexpédition en Argolide et en Messénie, il réduit Alexandros, le filsde Polyperchon, à la possession de quelques places fortes.

Antigonos s'impose en Asie (319-316 av. J.-C.)

Premier succès d'Antigonos

La lutte qui s'ouvre en Asie à la mort d'Antipater est avant tout unduel entre Antigonos le Borgne et Eumène de Cardia. Celui-ci, auxabois à l'été 319 av. J.-C., réussit à retourner la situation. Il reçoit dePolyperchon des fonds et le titre de stratège d'Asie. Il lève destroupes et sait habilement s'effacer devant le souvenir d'Alexandrele Grand. Pour cela, il dresse dans la tente de son état-major le trôneroyal, avec le sceptre et le diadème, et fait libeller les ordres à sonarmée au nom du roi défunt. De cette manière, il rattache ses actionsà la cause officielle de défense de la monarchie tandis que se répanddans les camps le culte d'Alexandre. Eumène, un Grec, contrastefortement dans sa personnalité avec l'orgueil des diadoquesmacédoniens et est réputé pour le raffinement de ses mœurs et sesmanières séduisantes[21]. Dans un premier temps, il descend sur laPhénicie, prudemment abandonnée par Ptolémée qui se replie sur laSyrie du sud. Il semble qu'Eumène cherche à construire une flottepour rejoindre Polyperchon en Europe. Mais cela pose un problèmemajeur, il lui faut éviter la flotte lagide qui croise entre Chypre etl'Égypte. C'est alors que lui parvient la nouvelle d'un nouveausuccès d'Antigonos.

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Polyperchon avait chargé l'amiral macédonien Cleithos, levainqueur de la flotte athénienne lors de la guerre lamiaque,d'empêcher la jonction des forces de Lysimaque, le satrape deThrace qui venait de se débarrasser des menaces d'invasion despeuples vivant au nord de son gouvernement et qui, de ce fait, étaità la tête d'une armée aguerrie. La maîtrise des mers est vitale pourPolyperchon afin de pouvoir joindre ses efforts à ceux d'Eumène.Cleithos est vainqueur en mer mais Antigonos, avec l'aide deNicanor, l'un des officiers de Cassandre, et de la cité de Byzanceréussit, le soir même de la bataille, à transférer ses troupes sur larive européenne de l'Hellespont et, comme Lysandre à la batailled'Aigos Potamos, il détruit le camp et la flotte ennemie aumouillage (318 av. J.-C.).

Troubles dans la partie orientale de l'empire

Eumène quitte la Phénicie (sans doute à l'été 318 av. J.-C.) pour laBabylonie afin de profiter des troubles qui viennent d'éclater dans lapartie orientale de l'empire. Peithon, le satrape de Médie, avait tentéde se créer une principauté sur le plateau iranien en s'emparant de laParthie pour la donner à son frère Eudamos. Il est alors chassé parune coalition de satrapes animée par Peucestas, qui gouverne laPerse, et se réfugie auprès de Séleucos à Babylone. Eumène, quipasse ses quartiers d'hiver (318-317 av. J.-C.) en Babylonie, intimel'ordre à Séleucos et Peithon de le rejoindre dans sa lutte contreAntigonos, mais ils refusent et tentent sans succès de débaucher sonarmée. Eumène passe alors le Tigre dans des conditions difficiles,Séleucos ayant fait ouvrir des digues. Finalement, Séleucos traiteavec lui et le laisse rejoindre en Susiane, à l'est de Babylone, lesdiadoques coalisés. Au total son armée est estimée à 40 000hommes et à 120 éléphants.

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Victoire d'Antigonos sur Eumène de Cardia (317-316 av. J.-C.)

Antigonos arrive en Mésopotamie à l'été 317 av. J.-C. et reçoitl'appui de Peithon et Séleucos. Ils marchent sur Suse dont Séleucoscommence le siège tandis qu'Antigonos se dirige contre Eumène. Latentative de traversée du fleuve Copratès est un désastre (Antigonosperd plusieurs milliers d'hommes) et le diadoque décide de remontervers la Médie à travers le pays des Cosséens (région entre Suse etEcbatane) sans payer le tribut à ces montagnards qui harcèlent alorsles troupes. Eumène se retire vers la Perse au sud-est, ses alliéssongeant d'abord à protéger leurs satrapies. La confrontation a lieu àl'automne 317 en Paratécène (région au centre-ouest de l'Iranactuel). Si Antigonos reste maître du champ de bataille, ses pertessont plus lourdes que son adversaire et il se retire en Médie.

C'est alors qu'Antigonos entreprend le projet risqué de surprendreson adversaire dans ses quartiers d'hiver. Par des chemins escarpés,estimés impraticables pour une armée, Antigonos tombe sur lescantonnements disséminés d'Eumène en Perside. Celui-ci réussitquand même à réunir ses troupes et une dernière bataille a lieu audébut de l'année 316 en Gabiène. Antigonos, profitant de lapoussière qui s'élève du champ de bataille, parvient à s'emparer ducamp d'Eumène. Mais les Argyraspides d'Eumène semblentirrésistibles, surtout sur l'aile gauche, renforcée pour combattre l'ailedroite ennemie où se trouve Antigonos. Finalement la trahison dePeucestas et de sa cavalerie qui se retirent de la bataille décide dusort des armes. Les Argyraspides livrent Eumène à Antigonos contreleurs femmes et enfants pris avec leur camp. Leurs officiersTeutamos et Antigénès sont exécutés sur ordre d'Antigonos, quirègle ainsi une vieille rancœur. Quant à Eumène, il est tué sur ordred'Antigonos, sans doute sous la pression de ses soldats[22].Antigonos peut se croire le maître de l'Asie.

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Première coalition contre Antigonos et la paix de 311av. J.-C.

Antigonos agit en maître

À peine a-t-il vaincu Eumène de Cardia, et tandis que son alliéCassandre s'impose en Macédoine contre Olympias, qu'Antigonosse lance dans un vaste mouvement de réorganisation de l'Asie (316av. J.-C.) et se comporte ainsi en souverain. Il écarte sansménagement les divers satrapes pour les remplacer par des hommesà lui. C'est ainsi que Peucestas, à qui il doit pourtant sa victoirecontre Eumène, est écarté de Perse où il est populaire. Peithon deMédie est exécuté[23] et Antigonos vient à Babylone demander descomptes à Séleucos. Celui-ci ne doit son salut qu'à la fuite.Antigonos, imitant en cela Alexandre, n'hésite pas à nommer desPerses. De plus il s'empare du trésor de Kyinda (Cilicie), estimé à10 000 talents, auquel s'ajoutent ses revenus annuels d'environ11 000 talents[24]. Il est donc en 316 le plus riche et le plus puissantdes diadoques.

Première coalition contre Antigonos (316 av. J.-C.)

Séleucos trouve refuge auprès de Ptolémée en Égypte. Il lui estfacile de convaincre le Lagide du danger que constitue la montée enpuissance d'Antigonos. Le précédent de l'attaque de Perdiccas surl'Égypte en 322 av. J.-C. démontre bien que, pour tout candidat à larestauration de la puissance impériale, l'indépendance et la richessede l'Égypte représentent une menace. De plus Ptolémée a des viséesnettes sur la Syrie, qu'il avait déjà occupée provisoirement vers 318av. J.-C., contrôlée dorénavant par Antigonos. Des ambassadeurs

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sont envoyés à Cassandre et Lysimaque, inquiets eux aussi desprojets d'Antigonos. Une coalition se forme donc avec les troisdiadoques (auxquels certains historiens ajoutent le satrape de Carie,Asandros). Un véritable ultimatum est adressé à Antigonos. Ilréclame un nouveau partage des satrapies, ce qui reviendrait àdémanteler le domaine d'Antigonos, avec la Babylonie pourSéleucos, la Syrie pour Ptolémée, la Lycie et la Cappadoce pourCassandre[25] et la Phrygie hellespontique pour Lysimaque. Deplus, les diadoques réclament un partage équitable des trésorsroyaux. Sans considérations diplomatiques particulières, le vieuxdiadoque — Antigonos a environ 68 ans en 316 — se déclare prêt àla guerre[26].

La proclamation de Tyr (315 av. J.-C.)

Antigonos souhaite porter la guerre en Europe, car c'est,nominalement du moins, la tête de l'empire. De plus il espèreprobablement mettre la main sur le roi survivant, Alexandre IV deMacédoine, le fils d'Alexandre. Mais il est retenu en Asie par sesadversaires et n'intervient en Grèce et en Macédoine que parl'intermédiaire de ses alliés. En effet, par un retournement d'alliance,Antigonos s'est allié à Polyperchon, qui deux ans plus tôt était leprincipal soutien d'Eumène. Polyperchon, et son fils Alexandros, netiennent guère que quelques places fortes dans le Péloponnèse maisles Étoliens et le roi Éacide d'Épire, un cousin d'Olympias, sonthostiles à Cassandre. De plus celui-ci gouverne en Grèce ens'appuyant sur les factions oligarchiques des cités. Antigonoscherche donc à s'allier les partisans de la démocratie en Grèce.

C'est dans ce contexte qu'il faut analyser la proclamation qu'il faitdans son camp en 315 lors du siège de Tyr, tenue par une garnison

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lagide. Dans ce texte[N 30], mélange de mauvaise foi et parfois demensonges[27], Antigonos accuse Cassandre d'avoir tué Olympias,de maintenir prisonniers à Amphipolis Roxane et son fils, d'avoircontraint Thessaloniké à l'épouser, bref d'être en train d'usurper laroyauté macédonienne. Il lui reproche aussi de rétablir les habitantsd'Olynthe, vieux adversaires des Macédoniens, dans leur cité encréant Cassandréia [N 31]. Il condamne sa décision de fairereconstruire Thèbes, détruite par Alexandre.

Il fait donc voter par ses troupes un décret aux termes desquelsCassandre est déclaré ennemi à moins qu'il ne détruise les cités enquestion, ne reconnaisse son titre de « stratège d'Asie[N 32] ».Enfin Antigonos s'attribue pour la première fois le titre de régent(« épimélète »). Polyperchon, à la mort d'Antipater, avait porté cetitre sans qu'aucun des diadoques ne le lui reconnaisse. Antigonosprend ce titre afin de justifier ses prétentions — bien qu'il soit dansl'incapacité d'assumer la fonction puisque le roi Alexandre IV estentre les mains de son adversaire. Cette condamnation deCassandre, qui n'est pas l'adversaire militairement le plus dangereuxpour Antigonos - il opère d'ailleurs en 315 contre Ptolémée - aplusieurs causes : Cassandre reste maître de la Macédoine ce qui luiapporte une certaine légitimité et des possibilités de recrutementmilitaire ; de plus il tient le roi légitime en sa possession et disposeainsi de la source de toute autorité légale, sans compter que sonmariage avec une fille de Philippe II lui crée un lien familial avec ladynastie d'Alexandre ; enfin, Cassandre condamné, ses alliés nesont plus que de simples rebelles, ce qui légitime les actionsmilitaires d'Antigonos.

Mais la décision la plus importante de cette proclamation reste ledécret qui proclame « la liberté des Grecs ». Cette promesse, dont labonne fortune va durer jusqu'à la conquête romaine, va plus loin que

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le décret de Polyperchon de 319 av. J.-C. [N 33] La paternité de cetteidée revient donc à Antigonos[N 34]. C'est pour lui une façond'affaiblir Cassandre car les méthodes utilisées par Antipater et sonfils rendent la domination macédonienne odieuse. Ils s'appuient surles oligarques, alors même que ce mode de gouvernement est enrecul dans le monde grec, persécutant les gouvernementsdémocratiques qui pourtant avaient les faveurs d'Alexandre lui-même. De fait, Cassandre fait régner, en s'appuyant sur les classespossédantes un climat d'« ordre moral[28] ». Le cas le plus connuest celui de Démétrios de Phalère à Athènes. Il ne faut cependantpas voir dans cette proclamation une simple manœuvre d'Antigonosdans le but d'encourager les cités grecques à se révolter contreCassandre. Mais il est le premier des souverains hellénistiques, lacréation plus tard de la Ligue des Nésiotes le prouve, à envisager lesnouveaux rapports qui vont se créer entre cités et États sous unangle politique nouveau qui n'est pas uniquement fondé sur lerapport de forces.

Ptolémée n'hésite d'ailleurs pas à suivre l'exemple d'Antigonos etlance à son tour une proclamation en faveur de l'autonomie descités[N 35]. Cela peut sembler surprenant, car il prend son alliéCassandre à contre-pied, mais il est probable que le Lagide a unevision sur le long terme. Quel que soit le diadoque qui s'impose enMacédoine, Antigonos ou Cassandre, il s'arrogerait le titre de régentet voudrait s'imposer aux autres diadoques. Ptolémée serait doncson principal adversaire et il faut voir dans l'action de celui-ci unevolonté de préserver son avenir en se réservant des armes contre unadversaire encore incertain.

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Les combats en Grèce (315-312 av. J.-C.)

Aristodème de Milet, l'un des généraux d'Antigonos, porte le décretde son maître en Grèce. Il trouve rapidement de nombreux soutienset en particulier celui des Étoliens. Cassandre cependant réagit avecvigueur. Il entre en campagne contre Polyperchon (dans lePéloponnèse), dont le fils Alexandros est massacré par lesdémocrate de Sicyone [N 36]. Polyperchon, acculé, finit par quitterl'alliance avec Antigonos pour se rallier à son vieil adversaire,Cassandre, en 315 av. J.-C. Cassandre se retourne alors contreAristodème, les Étoliens et les Illyriens sans succès décisifs. Maisen 314 av. J.-C., il remporte plusieurs victoires et reprend les citésde Leucade, Apollonie et Épidamne aux Illyriens. Profitant del'agitation régnant dans les îles de la mer Égée, notamment dans lespossession athéniennes de Lemnos, Imbros et Délos [N 37] quirejettent la domination de Cassandre, et alors même que seconstitue, largement encouragé par Antigonos, la Ligue desNésiotes (Confédération des insulaires des Cyclades)[N 38], unneveu de celui-ci, Télesphore, débarque en Grèce. Les diverses citésaident Antigonos vers 315, alors qu'il assiège Tyr, à se constituerune flotte qui permet ainsi à Télesphore de porter le fer chezl'adversaire de son oncle.

Le neveu d'Antigonos remporte plusieurs succès (313 av. J.-C.),notamment dans le Péloponnèse et en Béotie, mais Cassandre écraseles Étoliens et les Épirotes (dont le roi est tué). Cependant c'est unsuccès sans lendemain pour le maître de la Macédoine car un autreneveu d'Antigonos, prénommé Polémée, intervient en Grèce,réprime une révolte de Télesphore, lequel tentait semble-t-il uneaventure personnelle, et parvient à enlever la Grèce à Cassandre. Ils'en faut de peu pour qu'Antigonos ne passe lui-même en Grècemais la défaite de son fils, Démétrios, à Gaza le contraint à rester en

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Asie. Si cette défaite brise l'élan de l'offensive contre Cassandre,celui-ci est néanmoins très affaibli et accepte, ainsi queLysimaque [N 39], des propositions de paix (312 av. J.-C.)[N 40].

La guerre en Asie

En Asie cependant les combats, jusqu'en 313 av. J.-C., se limitent àun affrontement entre Antigonos et Ptolémée. Le satrape d'Égypteest un général prudent, peu enclin à jouer son avenir sur unebataille, et de ce fait il répugne à s'éloigner de sa base arrière. Il estvrai que contre Perdiccas, cette stratégie lui a été bénéfique. Ainsiabandonne-t-il la Syrie, en refusant d'affronter Antigonos, et laisseune importante garnison à Tyr, qui résiste près d'un an (315-314).Ptolémée confie la direction de sa flotte à Séleucos, lequel croise aularge de Chypre et de l'Asie mineure [29]. Pour Antigonos, lapériode 314-313 est une période faste. La chute de Tyr ne lui permetpas certes de partir à l'assaut de l'Égypte que son adversaire afortifié. De plus la crainte d'Asandros, sur ses arrières en Asiemineure, le fait hésiter. Il décide alors, modifiant son ambitioninitiale, de s'emparer de l'Asie mineure, tandis que ses neveuxTélesphore puis Polémée débarquent en Grèce. Antigonoss'allieavec Zipœtès, le roi de Bithynie, ainsi qu'avec les villes deChalcédoine et celle d'Héraclée. En -313, tandis que la Grèceéchappe progressivement à Cassandre, la ville de Cyrène se révoltecontre Ophellas, le gouverneur nommé par Ptolémée. Antigonosparvient enfin à détacher Asandros de la coalition et s'empare desvilles de la côte ionienne dont Milet.

C'est alors que Ptolémée comprend que son prudent attentisme n'estplus de mise. Aussi réagit-il avec plus de force que d'habitude. Ils'empare de Chypre et impose le pouvoir de son gouverneur,

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Nicocréon de Salamine. Il se retire chargé de butin. Mais Ptoléméeest aussi servi par la fougue inconsidérée de Démétrios qui perd lagrande Bataille de Gaza (312 av. J.-C.). La Phénicie et la Syrieretombent entre les mains du Lagide. Dans le même temps,Séleucos en 312 franchit les territoires sous contrôle d'Antigonosets'empare avec une troupe réduite de Babylone, ouvrant de fait untroisième front contre Antigonos, après la Grèce et la Syrie[N 41].Les événements de l'année 312 obligent donc Antigonos à différerson passage en Grèce et en Macédoine. Une nouvelle arméeconduite par Démétrios, puis par Antigonos en personne, remportequelques succès qui contraignent Ptolémée à évacuer une nouvellefois la Syrie et la Phénicie. Antigonos cependant ne tente pas des'emparer de l'Égypte car préoccupé par Séleucos, il envoie son filscontre lui.

La paix de 311 av. J.-C.

En 311, aucun des diadoques n'a remporté d'avantage décisif mais lanécessité d'une trêve se fait sentir, chacun étant épuisé. C'estpourquoi les plénipotentiaires de Lysimaque et de Cassandreprennent contact avec Antigonos cette année-là, après une tentativeavortée en 313. Ceux de Ptolémée se joignent bientôt à eux. Cettepaix nous est connue par une allusion assez brève de Diodore deSicile [N 42] et par un texte épigraphique incomplet découvert sur lesite de la cité de Skepsis en Troade [N 43]. Il semble qu'une phased'intenses négociations ait précédé la signature du traité. Unepremière tentative entre Antigonoset Ptolémée avait échoué enraison de l'ampleur des exigences d'Antigonos[N 44]. En 313, la« conférence de l'Hellespont » entre des représentants de Cassandreet d'Antigonos traîne en longueur puis échoue pour les mêmesraisons. Mais en 311, la situation est moins satisfaisante pour

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Antigonos. L'expédition de son fils Démétrios contre Séleucos enBabylonie est un échec (312-311) et Antigonos a besoin de la paixpour se retourner contre ce nouvel adversaire. Celui-ci d'ailleursreste totalement en dehors des négociations. Il semble donc que sesoit Antigonos qui en reprenne l'initiative. Prépélaos est dépêché parCassandre et Lysimaque, eux-mêmes en difficulté, auprèsd'Antigonos. Ptolémée, qui craint d'être isolé, envoie commeambassadeur Aristoboulos tandis qu'Antigonos est représenté parAristodème de Milet.

Les deux principales dispositions du traité sont les suivantes :chacun garde ses possessions et la liberté des Grecs est proclaméeofficiellement. Antigonos demeure ainsi le « stratège d'Asie », cequi fait de facto de Séleucos un satrape rebelle. Effectivement, pourCassandre et Lysimaque, Séleucos n'est rien puisqu'il était liésurtout à Ptolémée donc ils n'hésitent pas à le sacrifier. QuePtolémée ne fasse guère plus pour soutenir Séleucos s'explique sansdoute par son manque de marge de manœuvre et aussi, peut-être,par une analyse réaliste de la situation de Séleucos, à savoir quecelui-ci est en train de s'emparer de toute la partie orientale del'empire et de fait n'a pas réellement besoin d'aide. Antigonosd'ailleurs, nous l'avons vu, ne se résigne à la paix que pour avoir lesmains libres avec Séleucos.

Cela dit Antigonos apparaît comme le vainqueur provisoire duconflit. Son empire, centré sur l'Asie mineure, est intact, si l'onexcepte la Babylonie dont s'est emparée Séleucos. Il garde la hautemain sur les trésors dont ses adversaires souhaitaient s'emparer etdont il n'est pas question dans les négociations de paix. Laproclamation de la liberté des Grecs est l'aboutissement duprocessus qu'il avait initié lors de la proclamation de Tyr en 315 av.J.-C. C'est une arme qu'il estime favorable à ses ambitions car tous

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les diadoques ont dans leurs états des cités grecques et la moindremanifestation d'autorité de l'un d'eux contre l'une d'entre elles peutfournir le casus belli dont il aurait besoin pour une repriseéventuelle des hostilités. Il s'agit cependant d'une arme à doubletranchant et qui peut se retourner contre lui. Il y a également unparadoxe car les cités sont invitées à jurer une paix à l'élaborationde laquelle elles n'ont pas participé. D'une certaine façon, et ceparadoxe se retrouve tout au long de l'époque hellénistique, elles sesoumettent ainsi à la volonté du maître de l'État dans lequel ellessont incorporées et adhérent ainsi à des décisions prises en dehorsd'elles. Curieuse façon d'inaugurer la liberté. Dans le texteépigraphique, Antigonos insiste pour que les Grecs adhèrent à cetteliberté qui leur est octroyée :

« C'est pourquoi il me paraît bon que vous prêtiez leserment que nous vous envoyons. Nous nousefforcerons dans l'avenir de vous procurer à vous et auxautres Grecs, tous les avantages en notre pouvoir[N45]. »

Cependant Antigonos n'a atteint aucun de ses objectifs. Aucun deses adversaires n'est à terre et il doit reconnaître Cassandre comme« stratège d'Europe » (ce qui lui redonne pouvoir sur les citésgrecques d'Europe) et tuteur du roi Alexandre IV. La majorité du roiapprochant, il existe une menace que tous les diadoques redoutent,c'est qu'il mette fin à leurs fonctions, ce que légalement il peut faire.Cette paix contient en elle l'extinction de la dynastie des Argéadescar, même si l'auteur en est Cassandre, la disparition de la familleroyale arrange tous les diadoques. Au total cette paix est unarrangement qui maintient le statu quo ce qui, vu les circonstancesayant présidé à sa gestation, n'est guère étonnant.

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L'intervention de Ptolémée en Grèce (310-308 av. J.-C.)

La reprise rapide du conflit

La paix de 311 av. J.-C. n'est qu'une simple trêve et celle-ci serévèle de courte durée. En effet Séleucos repousse les générauxenvoyés contre lui par Antigonos et étend son gouvernement verstoutes les hautes satrapies (Perse, Médie, Drangiane, Arie, Susiane,etc.) et jusqu'à l'Inde (entre 310 et 308 av. J.-C.). À partir de 308, ilengage contre le prince indien Chandragupta Maurya un longconflit qui se règle par un traité de paix en 303 av. J.-C. : l'épigamieest reconnue entre Grecs et Indiens, Séleucos abandonne lessatrapies indiennes de l'empire (Gandhara), ainsi que les partiesorientales de l'Arachosie et de la Gédrosie [N 46], mais s'empare dela Bactriane et place le centre de sa puissance sur la Babylonie encréant sa capitale Séleucie du Tigre.

Mais c'est Ptolémée qui reprend l'initiative en mer Égée où dominela confédération des Cyclades, sous le contrôle d'Antigonos. Ilprofite d'un conflit familial entre Antigonos et son neveu Poléméequi estime ses services, lors du conflit qui vient de s'achever,insuffisamment reconnus. Il se constitue une principauté en Eubéeautour de Chalcis et parvient à circonvenir Phœnix, l'officier quidirige pour Antigonos la Phrygie hellespontique (310 av. J.-C.).Ptolémée profite de cette situation, tandis que Démétrios est occupéde nouveau contre Séleucos et qu'Antigonos n'a plus de flotte, celle-ci étant dans les mains de son neveu révolté.

Le satrape d'Égypte sait qu'il ne doit guère compter sur ses anciensalliés. Cassandre est occupé dans d'obscurs conflits internes à la

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péninsule balkanique [N 47] et Lysimaque est occupé de nouveaupar des attaques sur ses frontières. Aussi Ptolémée agit-il seul etenvoie son général Léonidès[N 48] en 310 s'emparer de la Cilicie.La réaction d'Antigonos est rapide et ses fils reprennent la Phrygie àPhœnix qui est battu, tandis que Léonidès est vaincu à son tour.Mais en 309 av. J.-C., Ptolémée s'est emparé des villes côtières de laCarie et de la Lydie, telles Caunos, Xanthe, Héraklion et Persicon. Ilconnaît un échec devant Halicarnasse, qu'il avait déjà assiégée25 ans plus tôt aux côtés d'Alexandre le Grand. Il s'installe ensuite àCos et a l'habileté de se présenter en libérateur plutôt qu'endominateur[N 49].

La fin de la dynastie royale

Tandis que Ptolémée et Antigonos s'affrontent et que Séleucos estoccupé en Asie centrale, la Macédoine connaît des événementstragiques avec la disparition quasi-totale de la famille royale desArgéades. Le traité de 311 av. J.-C. permet à Cassandre de garder letitre de « stratège d'Europe » jusqu'à la majorité du roi AlexandreIV. C'est condamner de façon certaine le jeune roi, qui est assassinéavec sa mère Roxane (très probablement en 310 av. J.-C.).Polyperchon, de nouveau en délicatesse avec Cassandre, prend soussa protection le fils d'Alexandre le Grand et de Barsine prénomméHéraclès, et lève une armée de plus de 20 000 hommes. Cassandre,impopulaire jusqu'en Macédoine, s'estime incapable de tenir le chocface à son adversaire mais a l'habileté de s'entendre avec lui (vers309 av. J.-C.). En échange d'un partage du pouvoir en Grècecontinentale, il persuade Polyperchon de se débarrasser d'Héraclès.Avec cet assassinat disparaît la dynastie des Argéades, au moinsdans sa parentèle masculine, et le dernier obstacle à ce que lesdiadoques se proclament rois.

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L'échec de Ptolémée en Grèce continentale (308 av. J.-C.)

Pendant ce temps, Ptolémée se débarrasse du neveu d'Antigonos,Polémée [30]. Il semble que le Lagide ait conclu un accord avecAntigonos pour se partager la mer Égée. Les îles seraient revenues àAntigonos et la Grèce continentale à Ptolémée. Cette alliance estclairement dirigée contre Cassandre et Polyperchon. Dès 308 av. J.-C., le satrape d'Égypte traverse la mer Égée et s'empare d'Andros,tenue par une garnison du défunt Polémée. Puis il débarque dans lePéloponnèse, reçoit la soumission de Sicyone des mains deCratésipolis, occupe ensuite Corinthe et prend Mégare à Cassandre.Ses ambassadeurs appellent les Grecs à la liberté. Il est probableque Ptolémée cherche à ce moment-là à ressusciter la ligue deCorinthe. Mais les événements en Cyrénaïque inquiètent Ptoléméedepuis longtemps loin de ses bases. En effet Ophellas, qui gouvernela Cyrénaïque pour le compte de Ptolémée et qui en réalité estdevenu plus ou moins indépendant, s'allie avec Agathocle, le tyrande Syracuse, lors de son expédition en Afrique [31]. Ophellas estfinalement éliminé par Agathoclès qui prend le contrôle de sestroupes (309 av. J.-C.). Ptolémée ne voit pas d'un bon œill'émergence d'une nouvelle puissance sur sa frontière occidentale.De plus le succès en Grèce est assez mitigé, sans compter son coût.Il est probable que c'est à ce moment que Ptolémée comprend que lalutte contre la Macédoine est inégale en Grèce continentale et qu'ilest plus important de dominer les îles de la mer Égée, que l'Égyptedoit être une thalassocratie. Ptolémée traite alors avec Cassandre etrentre en Égypte (vers 308) d'où son gendre, Magas, monte uneexpédition victorieuse sur Cyrène.

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Vers la bataille d'Ipsos (301 av. J.-C.)

Nouveau succès pour Antigonos

Le retrait de Ptolémée de la Grèce continentale laisse le champ libreà Antigonos. En effet il vient de traiter avec Séleucos, reconnaissantà ce dernier la mainmise sur les satrapies orientales, et, profitant dece que ce dernier est occupé à la frontière orientale de son empirepar la montée en puissance de Chandragupta Maurya, il tourne sonactivisme vers ce qui a toujours été son objectif, la mainmise sur laGrèce et la Macédoine. Il fait construire une nouvelle flotte, laprécédente étant passée sous le contrôle de Ptolémée lors de sonannexion des possessions de Polémée. Dans l'hiver 308-307 av. J.-C., Démétrios I er Poliorcète part d'Éphèse et cingle vers leSounion[32], puis il entre dans Athènes et chasse Démétrios dePhalère [33] qui gouvernait depuis 10 ans la ville au nom deCassandre à la tête d'un gouvernement oligarchique. Il annonce savolonté de rendre la liberté aux Grecs, poursuivant ainsi la politiqueentamée par Antigonos depuis sa proclamation de Tyr (315 av. J.-C.) et de repousser Cassandre au-delà des Thermopyles. Démétriospille ensuite Mégare, qui ne s'en relèvera jamais, bien qu'à lademande des Athéniens, il la déclare libre, puis assiège Munychiequi capitule. Athènes est ainsi totalement libre, mais avec undiadoque dans ses murs. Les clérouquies d'Imbros et de Lemnossont rendues à Athènes. Les événements sont donc très défavorablesà Cassandre, qui de plus perd l'Épire où le fils du roi Éacide,Pyrrhus I er, vient d'être rétabli par le roi d'Illyrie, Glaucias.

Cette situation est inacceptable pour Ptolémée, à qui la puissancenouvelle d'Antigonos apparaît comme une menace. Aussi arme-t-ilune flotte en vue d'attaquer la Syrie. Démétrios est alors rappelé par

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son père sans avoir pu prendre Corinthe ni Sicyone, toujours auxmains de Léonidès, le général de Ptolémée, depuis l'expédition deson maître en Grèce. Le fils d'Antigonos fait voile vers Chypre,bloque le stratège lagide Ménélas dans Salamine de Chypre etécrase la flotte de Ptolémée en 306 av. J.-C. [N 50]. Celui-ciabandonne Chypre et la maîtrise des mers à son adversaire.

Les diadoques deviennent rois

Pièce à l'effigie de Démétrios I er (ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΔΗΜΗΤΡΙΟΥ /BASILEÔS DÊMÊTRIOU, « Roi Démétrios »)

Ce succès encourage Antigonos, qui vise toujours la restauration del'empire d'Alexandre, à prendre, conjointement avec son fils, le titrede basileus (en grec Βασιλεύς, « roi ») sous le nom d'Antigonos I er

et de Démétrios I er [N 51]. Plutarque [N 52] raconte que c'est àl'initiative d'Aristodème de Milet, et à toute une mise en scène de cedernier pour convaincre Antigonos[N 53] qu'est prise la décision.En réalité, même si l'histoire est authentique, une telle décisionpolitique ne peut être prise que par Antigonos lui-même. C'est unefaçon de s'affirmer comme successeur d'Alexandre, surtout depuisla disparition des derniers héritiers de la dynastie argéade dont

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Antigonos ne porte pas la responsabilité première[N 54], et dereconnaître le fait accompli. Le fait que, selon Appien [N 55],Démétrios soit associé au trône illustre bien cette volonté de fonderune nouvelle dynastie[N 56].

Les autres diadoques se doivent évidemment de réagir et adoptentsuccessivement une attitude identique en prenant un titre royal.C'est ainsi que deviennent rois Ptolémée I er (un an plus tard, en 305av. J.-C., suite à l'échec de l'expédition d'Antigonos sur l'Égypte caril est nécessaire pour se proclamer souverain d'attendre une victoirece que Ptolémée ne peut faire immédiatement après sa défaite deChypre), Cassandre de Macédoine, Lysimaque et Séleucos I er. C'estune façon de s'opposer aux prétentions impériales d'Antigonos maisaussi d'assurer une légitimité à leur pouvoir. La prise du titre royalne vise que les Macédoniens et les Grecs car vis-à-vis des autrespeuples, les diadoques se comportent comme des souverains dèsl'origine, qu'ils aient ou non accompli à cette fin les cérémoniesd'usage. La conséquence la plus directe est d'assurer en droit —dans les faits c'est déjà le cas depuis longtemps — ledémembrement définitif de l'empire. Il s'agit là de l'acte denaissance juridique des monarchies hellénistiques.

Le siège de Rhodes (306 av. J.-C.)

Si Rhodes adopte dans ses relations avec les diadoques une stricteneutralité, ses intérêts économiques orientent sa préférence vers unealliance avec l'Égypte. De plus, les nombreux conflits et ledéveloppement de la piraterie accordent à la ville un rôle degendarme des mers qui lui valent un grand prestige. Cependant, siAntigonos souhaite s'emparer de la ville, c'est avant tout pour sonimportance géostratégique. Il dirige Chypre depuis sa victoire de

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Salamine de Chypre sur Ptolémée et mettre la main sur Rhodes[N57], c'est contrôler l'ensemble des communications en Méditerranéeorientale et en Égée. De plus Antigonos vient d'échouerpersonnellement dans une attaque sur l'Égypte (305 av. J.-C.), il estdonc nécessaire d'empêcher la naissance de cette thalassocratie quePtolémée avait failli établir en 308 av. J.-C. Il faut remarquercependant l'extrême mauvaise foi d'Antigonos pour qui la libertédes Grecs ne pèse plus très lourd quand son intérêt l'exige, alorsqu'il s'en proclame le champion.

Démétrios est donc chargé de s'emparer de la ville. Ce siège de plusd'un an est l'un des plus célèbres de l'Antiquité [N 58] et Démétriosy gagne son surnom de Poliorcète (« preneur de ville ») bien qu'ilne s'empare pas de la cité. Il utilise de nombreuses machines desiège auxquels les Rhodiens opposent une grande vaillance.Ptolémée, Cassandre et Lysimaque ravitaillent la ville qui estcependant sur le point de céder en 305 av. J.-C. Ptolémée lui-mêmeconseille alors aux Rhodiens de traiter avec Démétrios. Grâce àl'entremise des Étoliens, un accord est signé. Rhodes s'engage àdevenir l'alliée d'Antigonos, sauf contre l'Égypte, et livre centotages.

La guerre de quatre ans en Grèce (307-304 av. J.-C.)

Si Démétrios met fin au siège, c'est aussi parce qu'en GrèceCassandre vient de reprendre l'offensive. Il assiège à la fin del'année 307 la ville d'Athènes et la cité est sur le point desuccomber. En 306 av. J.-C., une diversion des Étoliens contraintCassandre à lâcher prise mais celui-ci reprend pied en Béotie, enEubée et en Phocide. La ville de Corinthe quitte l'alliance avecPtolémée, trop lointain, pour se rapprocher de Cassandre, et

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Polyperchon reprend le contrôle du Péloponnèse. En 304 av. J.-C.,les Étoliens sont repoussés par Cassandre et ses alliés et l'Attique ànouveau ravagée. C'est à ce moment que Démétrios, qui vient definir le siège de Rhodes, reparaît en Grèce. Il débarque à Aulis ets'empare de Chalcis. Puis il repousse Cassandre au nord desThermopyles après avoir remporté une grande victoire sur cedernier. La Béotie et la Phocide font leur soumission à Démétrioslequel, soucieux de conserver l'alliance athénienne, livre à la citéattique Phylé, Salamine et Panacton. C'est donc sur cette victoireque se termine ce conflit appelé « guerre de quatre ans » et dont lachronologie reste discutée[réf. nécessaire].

Entre 304 et 302 av. J.-C., Démétrios s'empare de Sicyone qu'ilrefonde par synœcisme [N 59] (à ne pas confondre avec laDémétrias de Thessalie qu'il fonde en tant que roi de Macédoine).Puis il occupe Corinthe et enfin le Péloponnèse, à l'exception deMantinée, qui reste fidèle à Cassandre.

La dernière coalition contre Antigonos (302 av. J.-C.)

Les autres diadoques ne peuvent laisser Cassandre se fairedépouiller de son royaume sans réagir. Si Antigonos et son filsmettent la main sur la Grèce, ce qui est déjà partiellement le cas, etsur la Macédoine, ils acquerraient une légitimité encore plus forte,d'autant qu'Antigonos reconstitue à son profit la ligue de Corintheen 302. Aussi, en 304 av. J.-C., des tractations aboutissent à unedernière coalition contre le vieux souverain[34]. Les forces sontéquivalentes car l'immensité et la richesse du royaume d'Antigonoslui permettent de mobiliser des effectifs considérables, sans douteéquivalents à ses principaux adversaires réunis (entre 70 000 et80 000 hommes à Ipsos). Il est donc nécessaire pour les adversaires

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d'Antigonos de parvenir à faire la jonction de leur forces s’ilsveulent l'emporter. Pour cela il faut gagner du temps, ce quiexplique le plan hardi mais savant mis au point : une défenseopiniâtre en Europe contre Démétrios, permettant une attaque del'Asie par Lysimaque et surprendre Antigonos, temporiser ensuitejusqu'à ce que les forces coalisées soient réunies.

Lysimaque est le premier à se mettre en branle au printemps de 302av. J.-C. Il envahit, avec l'aide de troupes envoyées par Cassandre etdirigées par Prépélaos, la Phrygie hellespontique, prend ou reçoit lasoumission de Lampsaque, Parion et Sigéion. Il ne peut s'emparerd'Abydos mais reçoit la soumission de nombreuses cités sur la côtede Lycie et de Carie. Ainsi en est-il de Colophon, Éphèse, Téos puisde Sardes. Antigonos marche à sa rencontre et rappelle Démétrios.

Celui-ci avait envahi la Thessalie au printemps 302, en contournantles Thermopyles avec sa flotte. Il traite rapidement un armisticeavec Cassandre et passe en Asie où il débarque à Éphèse (automne302) qui repasse sous son contrôle[N 60]. Cassandre, dès le départde Démétrios, s'empresse de rétablir son autorité en Thessalie, enPhocide (siège d'Élatée) et menace Argos dans le Péloponèse. Ilrenverse Pyrrhus le roi d'Épire et le remplace par Néoptolème (vers302 av. J.-C./301 av. J.-C.).

L'arrivée de Démétrios en Asie met Lysimaque en difficulté. Deplus, les renforts envoyés par Cassandre sous le commandement deson propre frère Pleistarchos sont balayés par Démétrios. AussiLysimaque se retire-t-il à Héraclée lors de l'hiver 302/301 av. J.-C., afin d'y attendre l'arrivée de Séleucos qui hiverne en Cappadoce.Quant à Ptolémée, il commet une erreur importante car, ayantenvahi la Cœlé-Syrie et se préparant à rejoindre Séleucos, il batprécipitamment en retraite sous la fausse nouvelle d'une victoire

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d'Antigonos. L'arrivée de Séleucos, avec environ 500 éléphants deguerre [N 61] obtenus après son accord avec le roi indienChandragupta Maurya, bouleverse cependant complètement lerapport de force car il permet de réaliser enfin l'égalité numérique.Antigonos se retire en Phrygie mais il est vaincu et tué en 301 av. J.-C. à la bataille d'Ipsos, l'une des plus importante de son temps[N62].

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Derniers conflits entre les diadoques

Le partage du royaume d'Antigonos

Les royaumes des diadoques en 301 av. J.-C.

La bataille d'Ipsos est décisive en ceci qu'elle consacredéfinitivement le démembrement de l'empire d'Alexandre le Grand.L'idée d'unité du monde hellénistique est abandonnée même si elletraverse encore, de manière cependant épisodique, l'esprit deDémétrios, qui a échappé au désastre. Du partage du royaumed'Antigonos, quatre royaumes se dégagent. Celui de Cassandre enMacédoine et en Grèce mais qu'il va falloir, pour cette dernière, enpartie disputer à Démétrios. Lysimaque annexe l'Asie mineurejusqu'aux monts Taurus, à l'exception de quelques places de Lycie,de Pamphylie, voire de Pisidie, qui semblent être tombées aux

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mains de Ptolémée (dans la mesure où il ne les possédait pas déjà)et fonde ainsi un royaume à cheval sur l'Asie et l'Europe. Séleucoss'empare du reste de l'Asie et en particulier de la Syrie qui, promiseà Ptolémée, récompense le principal acteur de la victoire tandisqu'est pénalisée l'excessive prudence du Lagide. Un petit royaume,à la destinée éphémère, est créé en Cilicie et accordé à Pleistarchos,le frère de Cassandre.

Démétrios

Le personnage central de la période qui sépare la bataille d'Ipsos decelle de Couropédion (281 av. J.-C.), qui marque la fin des guerresdes diadoques, est celui de Démétrios, le fils d'Antigonos. Ce sontses ambitions, ses tentatives, ses expéditions qui déterminentfortement les réactions des autres diadoques. Mais Démétriosoccupe plus qu'il ne domine la période, car son ambition estdesservie par un défaut de mesure et de prudence ainsi que par soninconstance. Grand général, il remporte de nombreuses victoires surses adversaires mais est aussi, par sa fougue, à l'origine de désastresdécisifs (Gaza en 312 av. J.-C., et Ipsos). Prompt à profiter de lamoindre occasion, il n'a pas de plan réellement organisé sur le longterme et manque d'objectifs clairement définis. Séducteur (sesconquêtes féminines sont légion et célèbres dès l'Antiquité) etgénéreux, il adopte souvent un orgueil qui lui éloigne de fidèlessoutiens. Cette vie romanesque, remplie d'actions d'éclat et debrusques retours de fortune, se termine sans gloire en captivité (285av. J.-C.).

Au lendemain de la mort de son père et de sa défaite, la puissancede Démétrios reste importante. Il possède la maîtrise des mers, ainsique celle de la plupart des villes côtières de Phénicie et d'Asie

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mineure. De plus il domine presque toute la Grèce au sud desThermopyles. Dans un premier temps, après la défaite, il regagneÉphèse puis Athènes. Une mauvaise surprise l'attend car la citéattique décide de maintenir sa neutralité, ainsi que la Béotie et laPhocide et de nombreuses cités du Péloponnèse. Les cités nesouhaitent visiblement pas se compromettre aux yeux desvainqueurs.

Premiers conflits entre les vainqueurs

La « Grande alliance » entre les adversaires d'Antigonos le Borgnene dure pas. Très vite une brouille survient entre Ptolémée etSéleucos à propos de la Cœlé-Syrie. Promise à Ptolémée en cas devictoire sur Antigonos, elle est occupée par le Lagide. Mais suite àsa peu glorieuse retraite avant la défaite finale d'Antigonos, cetteprovince est attribuée à Séleucos qui la réclame. mais, devant lerefus de Ptolémée de la lui rétrocéder, Séleucos n'insiste pas mais nerenonce pas à ses droits (et ceux de ses descendants)[35]. C'est ainsique naît l'épineuse question de la Syrie méridionale qui vaempoisonner les relations entre les Lagides et les Séleucides.Ptolémée décide d'anticiper la menace et se rapproche deLysimaque, à qui il offre sa fille Arsinoé en mariage en 299 av. J.-C.Le diadoque de Thrace répudie pour cela sa femme Amastris, reined'Héraclée du Pont [N 63] (en 282 av. J.-C. il marie sa fille, elleaussi prénommée Arsinoé, au futur Ptolémée II).

Cette alliance menace Séleucos qui risque d'être pris à revers en casde conflit. Aussi celui-ci amorce-t-il un rapprochement avecDémétrios dont il épouse la fille, Stratonice, qu'il cède plus tard àson fils, le futur Antiochos I er, profondément amoureux de laprincesse[N 64]. Démétrios saisit cette opportunité et débarque en

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Cilicie (299 av. J.-C.) où il s'empare du trésor de Kyinda et renversePleistarchos, le souverain de cet éphémère royaume fondé à la chuted'Antigonos. Pleistarchos se plaint en vain auprès de Séleucos, ilsemble que ce dernier se soit entendu avec son beau-père pourdépouiller le frère de Cassandre[36]. Aussi Pleistarchos se réfugieauprès de son frère en Macédoine. Une ambassade est envoyée enMacédoine avec à sa tête Phila Ire, la femme de Démétrios maisaussi la sœur de Cassandre et Pleistarchos. Une alliance, ou aumoins un accord tacite, est conclue. Cassandre admet la perte de laCilicie par son frère et Démétrios ne tente rien contre lui en Grèce.Démétrios se rend ensuite en Syrie pour le mariage de sa fille avecSéleucos.

Cette période est assez confuse et certains éléments sont difficiles àrestituer dans leur chronologie exacte. Il semble que Démétrios,sans doute soutenu par son gendre Séleucos, attaque Ptolémée etoccupe Samarie et peut-être la Cœlé-Syrie dans son ensemble (vers298 av. J.-C.. Mais rapidement, une entente semble conclue entre lesdeux hommes par l'intermédiaire de Séleucos. Ce dernier est inquietdes volontés hégémoniques de Démétrios, qui refuse de lui vendrela Cilicie et les villes phéniciennes et la mésentente s'installe entreles deux. Quant à Ptolémée, il aurait conclu avec Démétrios unaccord secret. À la mort de Cassandre, qui semble imminente, leLagide pressent que Démétrios souhaite se tailler un royaume enEurope. Il lui fournit donc de l'argent que Démétrios rembourseraavec quelques-unes de ses possessions asiatiques. Prudent,Ptolémée signe aussi un accord avec Agathocle — qui épouse uneprincesse égyptienne —, le tyran de Syracuse, et garde à Alexandriele roi d'Épire en exil, Pyrrhus, ce qui peut lui servir à l'occasion demoyen de pression.

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La mort de Cassandre et les nouveaux conflits enGrèce et Macédoine (298-290 av. J.-C.)

Cassandre meurt à une date indéterminée entre 298 et 297 av. J.-C.Ce décès perturbe le fragile équilibre entre les diadoques et permetà Démétrios de relancer ses ambitions. Le fils aîné de Cassandre,Philippe IV de Macédoine, meurt au bout de quelques mois et sesdeux frères — Antipater, qui est le gendre de Lysimaque dont il aépousé la fille Eurydice, et Alexandre, gendre de Ptolémée dont il aépousé la fille Lysandra — se disputent l'héritage. Sur les conseilsde leur mère Thessaloniké, ils se partagent le royaume.

Démétrios a saisi la mort de Cassandre pour intervenir de nouveauet assiège Athènes gouvernée par le démagogue Lacharès. Ils'empare de Salamine, d'Égine, d'Éleusis et Rhamnonte. Cettemenace affole ses adversaires et Ptolémée réagit. Il envoie en ÉpirePyrrhus, avec des troupes, qui parvient à éliminer définitivementson rival Néoptolème (en 297 av. J.-C.) et expédie une flotte troppeu nombreuse au secours d'Athènes. Ptolémée parvient seulementà s'emparer de nouveau de Salamine de Chypre où se trouve PhilaI re, la femme de Démétrios. Séleucos, quant à lui, envahit la Cilicie,sans doute son véritable objectif, consacrant ainsi la rupture avecson beau-père.

Démétrios s'empare d'Athènes, dont Lacharès s'est enfui, en 294 av.J.-C. [N 65] mais exerce une domination assez souple, laissant auxAthéniens leur constitution et leurs lois[N 66]. Il se contented'installer une importante garnison et se lance dans la conquête duPéloponnèse. Il s'empare d'une partie de ce dernier lorsqu'il estrappelé par les événements de Macédoine.

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En effet les deux fils de Cassandre se sont disputés, Antipater Ier

s'estimant lésé par la partialité de sa mère qu'il fait assassiner. Sonfrère Alexandre V appelle à l'aide à la fois l'allié de son beau-pèrePtolémée, Pyrrhus le roi d'Épire, mais aussi, et c'est plus surprenant,Démétrios. Pyrrhus, plus rapide que Démétrios, se fait accorderpour prix de son intervention plusieurs petites provinces limitrophesde ses États (la Tymphée, le Paravée, l'Acarnanie et l'Amphilochie)et contraint Antipater à traiter. Le jeune roi Alexandre V s'inquièteencore plus de l'arrivée de Démétrios et le reçoit avec faste mais enlui faisant comprendre que son intervention n'est plus nécessaire.Envisage-t-il d'assassiner Démétrios pour se débarrasser d'unetutelle encombrante ? C'est ce qu'affirme Plutarque [37]. Toujoursest-il que ce dernier le devance et fait assassiner par ses gardes lejeune roi à Larissa (en). Il marche ensuite sur Antipater Ier qui estdéfait et s'enfuit chez Lysimaque avec sa femme et la veuve de sonfrère, Lysandra, qui épouse Agathoclès, le fils aîné de Lysimaque.Celui-ci, gêné par un conflit contre les Gètes, n'est pas réellementintervenu pour soutenir son gendre. C'est ainsi qu'à l'automne 294av. J.-C., Démétrios réalise le vieux rêve de son père et devient roide Macédoine.

Lysimaque est fait prisonnier par le roi gète Dromichætès vers 293av. J.-C. Cela facilite les projets de Démétrios qui cherche às'imposer définitivement en Grèce. Il s'empare de la Thessalie etfonde la ville de Démétrias sur le golfe pagasétique. À plusieursreprises, il intervient en Béotie contre Thèbes révoltée. Renonçantaux principes de libération des Grecs, il rétablit l'oligarchie àAthènes. Mais en 290 av. J.-C., son stratège Patauchos est écrasépar une coalition des Étoliens et du roi d'Épire Pyrrhus.

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La chute de Démétrios (288-285 av. J.-C.)

En 289 av. J.-C., Pyrrhus lance une expédition contre la Macédoine,profitant de la nouvelle que Démétrios est malade. Mais celui-ciréagit rapidement et contraint le roi d'Épire à repasser la frontière.Ce raid révèle cependant la faiblesse militaire du roi de Macédoineet le mécontentement de la population épuisée par plus de 75 ans deguerres incessantes. De plus, la morgue de Démétrios, son allure dedespote oriental et surtout ses projets de reconquête de l'héritage deson père inquiètent les autres diadoques. Ptolémée, conscient del'affaiblissement de l'Antigonide, est alors, semble-t-il, à l'origined'une vaste coalition qui englobe, Séleucos, Pyrrhus et Lysimaque(délivré du conflit contre les Gètes). Pyrrhus et Lysimaqueenvahissent en 288 av. J.-C. la Macédoine avec le soutien de laflotte de Ptolémée. Démétrios est vainqueur de Lysimaque àAmphipolis [N 67] mais Pyrrhus est accueilli comme un libérateurpar les Macédoniens eux-mêmes et Démétrios est obligé de fuir[N68]. Son épouse Phila I re se donne la mort. La Macédoine est alorspartagée entre Pyrrhus et Lysimaque. Ce partage ne peut-être queprovisoire car la cohésion de la Macédoine, de ses habitants et deses intérêts, est trop forte.

Cependant le fils d'Antigonos ne se trouve pas totalement défait. Ilpossède de nombreuses possessions grecques. En 287 av. J.-C., ilmet le siège devant Athènes qui, sous la direction du stratègeOlympiodore, s'est révoltée. La ville est secourue par les autresdiadoques et Pyrrhus mais ce dernier, une fois la ville sauvée,reconnaît à Démétrios ses possessions de Thessalie et de Grèce(dont Le Pirée, Salamine, Lemnos, Éleusis, Skyros et Imbros quirestent détachées d'Athènes). Il semble que Ptolémée, dont Pyrrhusest l'allié indéfectible, trouve habile de gêner la puissance montantede Lysimaque par une alliance objective entre Pyrrhus et Démétrios.

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La politique de Ptolémée de fait est immuable. Ayant renoncé asseztôt à toute ambition impériale, il s'oppose à tout souverain quireprésente une menace pour l'Égypte. Il craint en particulier unpouvoir fort en Macédoine et en Grèce (surtout en mer Égée dontl'Égypte vise à s'assurer le contrôle).

Lysimaque est, dans ses propres États, impopulaire du fait de safiscalité excessive et de l'autoritarisme de son gouvernement. Maisil est le maître d'une grande partie de l'Asie mineure (en faitl'essentiel des anciennes possessions d'Antigonos), de la Thrace etd'une bonne moitié de la Macédoine. L'assassinat par ses propresfils de la reine Amastris, qui gouverne Héraclée du Pont, donne àLysimaque (qui fut un temps l'époux de la reine) l'occasiond'intervenir et de s'emparer de la ville. Démétrios n'hésite pascependant et débarque à Milet, laissant son fils Antigonos Gonatasgarder ses possessions grecques, afin d'en finir avec Lysimaque. Ilépouse au passage Ptolémaïs, une fille de Ptolémée Ier et de safemme répudiée Eurydice, puis s'empare de Sardes. Toutefois le filsde Lysimaque, Agathoclès, survient avec une armée plus nombreuseet contraint Démétrios à se retirer en Phrygie. Il pénètre sur lesterres de son gendre, Séleucos, en Cilicie et, abandonné par sessoldats, est contraint de se rendre[N 69] (285 av. J.-C.). Lysimaqueexige sa mort mais Séleucos refuse et se contente de le garderprisonnier jusqu'à sa mort en 283 av. J.-C. en Chersonnèse de Syrie.

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La fin de Lysimaque

Pièce à l'effigie de Ptolémée II et Arsinoé II

La ruine de Démétrios représente l'apogée du règne de Lysimaque.Tant que le combat contre Démétrios se poursuit, Lysimaqueménage Pyrrhus qui possède la moitié de la Macédoine et qu'ilutilise pour mener la lutte contre Antigonos Gonatas [N 70]. Cedernier d'ailleurs fait mieux que résister puisqu'il s'empare deDémétrias et de la Thessalie, défend Le Pirée contre une attaqueathénienne et est vainqueur de Sparte (vers 286-285 av. J.-C.). Unefois Démétrios mis hors de combat, en 285, Lysimaque s'empare surPyrrhus de la partie sud de la Macédoine. Cela ne lui est guèredifficile car le roi d'Épire est abandonné pas une large partie de sestroupes macédoniennes dont la fidélité va d'abord à Lysimaque,Macédonien lui-même. Antigonos Gonatas garde quant à lui lesterritoires au sud des Thermopyles. Lysimaque devient ainsi l'un destrois souverains prépondérants avec Ptolémée et Séleucos. Unetragédie domestique va ruiner tout cela.

Ptolémée, malade, abdique vers 285 en faveur de son fils PtoléméeII qu'il a eu de Bérénice sa seconde épouse. Il déshérite pour cela

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son fils aîné, Ptolémée Kéraunos, fils d'Eurydice, dont il craint laviolence et la démesure. Celui-ci se réfugie alors à la cour deLysimaque, auprès de sa sœur Lysandra qui a épousé Agathoclès,fils de Lysimaque et de Nikaia et héritier présomptif. Or la nouvelleépouse de Lysimaque, Arsinoé II, cherche à discréditer Agathoclèsdans l'esprit de Lysimaque afin d'offrir la succession à ses propresfils. Convaincu que son fils complote contre lui (ce qui est faux),Lysimaque le fait assassiner en 282 av. J.-C. [38]. Cet assassinatébranle l'armature du royaume, Agathoclès étant populairecontrairement à son père. Les cités d'Asie Mineure, qui ploient sousune lourde fiscalité, profitent de l'indignation suscitée par cetassassinat pour se révolter. Lysandra et Ptolémée Kéraunos,craignant pour leur vie, prennent alors la fuite à la cour de Séleucoset l'encouragent à entrer en guerre contre Lysimaque[N 71]. ÀPergame, le gouverneur de la ville, Philétairos, se révolte et livre saforteresse et son trésor à Séleucos. La rencontre décisive entreLysimaque et Séleucos a lieu à Couroupédion, en Lydie,probablement en février 281 av. J.-C.. Lysimaque est complètementdéfait et tué.

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La mort de Séleucos

Séleucos I er Nicator, fondateur de la dynastie des Séleucides, busted'époque romaine impériale, musée du Louvre

La mort de Lysimaque et la bataille de Couroupédion sontgénéralement considérées comme la fin de la période des conflitsentre diadoques. De ceux-ci en effet ne reste en vie que Séleucos,Ptolémée Ier étant mort en 283 av. J.-C. À la fois maître de l'Asie etde l'Asie mineure [N 72], il apparaît comme le grand vainqueur. Letrône de Macédoine est libre et Séleucos y voit l'occasion unique derestaurer l'unité de l'empire (si l'on excepte l'Égypte).

Séleucos oublie cependant un peu rapidement les promesses faites àLysandra et Ptolémée Kéraunos. Ce dernier, qui espère devenir roide Macédoine, prépare un complot et fait assassiner Séleucos à

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proximité de la capitale de Lysimaque, Lysimacheia, afin des'emparer du trône macédonien (vers 280 av. J.-C.).

La mort du dernier des diadoques voit disparaître la génération desofficiers d'Alexandre. Elle marque aussi un tournant car, même si lastabilisation de la situation en Macédoine se fait un peu plustardivement, les trois grandes puissances qui dominent l'époquehellénistique jusqu'à la conquête romaine, à savoir la Macédoine, leroyaume des Séleucides et l'Égypte des Lagides sont constituées.

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Notes

1. ↑ Diodore de Sicile,Bibliothèque historique[détail des éditions] [lire enligne], XVIII, 2-3.

2. ↑ Il existe même unetentative de Néarque pourfaire d'Hercule, le filsillégitime de Barsine etAlexandre, l'héritier dutrône. Le fait queNéarque soit le gendre deBarsine n'est sans doutepas étranger à cetteproposition refusée parles soldats et lesdiadoques.

3. ↑ D’après Quinte-Curce,Histoires d’Alexandre, X,6 et Justin, Abrégé desHistoires Philippiques deTrogue-Pompée, XIII, 1,11, les fantassins prirentle parti d’Arrhidée aprèsque le conseil eut choisi,sans les consulter,l’enfant de Roxane.

4. ↑ Justin, XIII, 3, 1-10 et

4, 1-4. 5. ↑ Plutarque, Vie

d'Eumène, 3, 1-2. 6. ↑ Diodore, XVIII, 2, 4 ;

Arrien, Histoire de laSuccession d'Alexandre,1, 3 ; Justin, XIII, 4.

7. ↑ Diodore, XVII, 117, 3 ;Cornélius Népos,Eumène, 2, 2 ; Quinte-Curce, X, 6, 16.

8. ↑ Diodore, XVIII, 4, 7. 9. ↑ Pour la répartition

complète des satrapies,voir Diodore, XVIII, 3 ;Quinte-Curce, 10, 10.

10.↑ Diodore, XVII, 99, 5-6(mouvement de 325) ;XVIII, 7 (mouvement de323).

11.↑ Hypéride, Oraisonfunèbre, 10-19.

12.↑ Diodore, XVIII, 9-13 ;17-18 ; Justin, XIII, 5.

13.↑ Diodore, XVIII, 24-25. 14.↑ Diodore, XVIII, 3, 1 ;

Plutarque, Vie d'Eumène,

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3, 3 ; Cornélius Népos,Eumène, 2, 2 ; Justin,XIII, 4, 16 ; Quinte-CurceX, 10 ; Phouios, II, 92.Diodore indiquequ’Eumène « reçut tousles territoires adjacents »à la Cappadoce et à laPaphlagonie incluantpeut-être la Pisidie.

15.↑ Diodore, XVIII, 16, 1 ;Plutarque, 3, 12.

16.↑ Diodore, XVIII, 16, 2. 17.↑ Quinte-Curce, III, 1. 18.↑ Diodore, XVIII, 16, 2 ;

Photius, II, 92. 19.↑ « Suspect à tous, il se

méfiait de tous » ditArrien, Fragmente dergriechischen Historiker,156, 1, 5.

20.↑ Diodore de Sicile,XVIII, 38, 2-6.

21.↑ Diodore, XVIII, 33-36. 22.↑ Diodore, XVIII, 29, 1-

2 ; Cornélius Népos, 3,2 ; Justin, XIII, 6, 10-16.À propos des décisionsdu conseil de Cilicie, voirP. Briant, Antigone(1973), p. 192-198.

23.↑ Diodore, XVIII, 29, 1-

2 ; Plutarque, 1, 5 ;Justin, XIII, 6, 14-15

24.↑ Diodore, XVIII, 29, 4,Plutarque, 5, 2.

25.↑ Plutarque, 5, 3. Alcétasa auparavant œuvré à uneconciliation entreAntipater et Perdiccas enproposant à son frèred’épouser Nikaia la filled’Antipater : Diodore,XVIII, 23, 1-3 ; Justin,XIII, 6, 4-7.

26.↑ Plutarque, 1, 6. 27.↑ Diodore, XVIII, 29, 1. 28.↑ Plutarque, 8, 1. 29.↑ Plutarque, 6, 8-11. 30.↑ Diodore, XIX, 61. 31.↑ Ce qui est faux puisque

Cassandréia est construitesur l'emplacement dePotidée et que les anciensOlynthiens ne constituentqu'une partie de lapopulation de la nouvellecité.

32.↑ Ce titre ne lui avait étéconféré à Triparadisos en321 av. J.-C. que pour lalutte contre Eumène, maisAntigonos continue de sel'attribuer car en théorie il

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lui donne des pouvoirssur les autres diadoqueset le met sur un pland'égalité avec Antipater,« stratège d'Europe ».

33.↑ Le décret dePolyperchon était surtoutun décret d'amnistie pourles participants à laguerre lamiaque et quicorrespondait en fait àrevenir à la situation à lamort d'Alexandre. Il n'estquestion ni d'autonomieni de liberté.

34.↑ Sur la politiqued'Antigonos à l'égard descités, cf. C. Werhli,Antigone et Démétrios,1968, p. 103-129.

35.↑ La Diodore de Sicile,Bibliothèque historique[détail des éditions] [lire enligne] (XIX, 62) affirmequ'il désirait « que lesGrecs sussent qu'il n'avaitpas moins de sollicitudequ'Antigonos au sujet deleur autonomie »

36.↑ La veuve de celui-ci,Cratésipolis, parvientcependant à réduire la

révolte. 37.↑ Délos est ainsi délivré

de la dominationathénienne.

38.↑ Sur les circonstances decette fondation, cf. FélixDurrbach,« ΑΝΤΙΓΟΝΕΙΑ —ΔΗΜΗΤΡΙΕΙΛ. Lesorigines de laConfédération desinsulaires », Bulletin decorrespondancehellénique, vol. 31, 1907,p. 208-227, cité par Will(2003), I, p. 58.

39.↑ Lysimaque intervientpeu aux côtés de son alliéCassandre lors de cettepériode car les villesgrecques du littoral de lamer Noire qu'il contrôle,soutenues par lesgénéraux d'Antigonos,sont en révolte.

40.↑ Cassandre avait faitparvenir, sans succès carAntigonos faisait traînerles choses, des offres depaix dès 313 av. J.-C.après la campagne deTélesphore (conférence

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de l'Hellespont). 41.↑ Diodore, XIX, 90-92 42.↑ Diodore, XIX, 105, 1. 43.↑ Il s'agit d'une lettre

d'Antigonos aux habitantsde la cité et, plusvraisemblablement, d'unelettre « circulaire »adressée aux habitantsdes cités de ses États.

44.↑ En 314 av. J.-C. àEcregma.

45.↑ Lettre à la ville deSkepsis, Orientis GraeciInscriptiones selectae 5 =(en) C. B. Welles, RoyalCorrespondence in theHellenistic Period, no 1.

46.↑ Strabon, Géographie[détail des éditions] [lire enligne], XV, 2, 9 ; Justin,XV, 4, 12-21 ; Appien,Syriaca, 55.

47.↑ Cassandre soutient leroi des Péoniens,Audoléon, en lutte contreun peuple illyrien, etcommence à connaîtrequelques problèmes avecles Celtes.

48.↑ Plutarque, Viesparallèles [détail des

éditions] [lire en ligne] « Viede Démétrius, Chapitre15 »,La version de RobertFlacelière et ÉmileChambry (1977) l'appelleLéonidès(voir : Plutarque, Viesparallèles, vol. 2, RobertLaffont,coll. « Bouquins », 2001(ISBN 978-222109393-1)).Dans la version deDominique Ricard (1883)on trouve Cléonidas, letexte grec en regardcomporte Κλεωνιδας(voir : Vie de Démétrius,Chapitre 15, surUniversité de Louvain).

49.↑ C'est sans doute à cemoment qu'il faut placerl'intrigue, politique plusqu'amoureuse, entrePtolémée et la sœurd'Alexandre, Cléopâtre.Pour éviter de donner desdroits à l'empire à sonadversaire, Antigonos faitexécuter la princesse.

50.↑ Diodore, XIX, 47-52 ;Plutarque, Vie de

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Démétrios, 15 51.↑ Diodore, XX, 53 ;

Justin, XV, 2. 52.↑ Plutarque, Vie de

Démétrios, 17-18. 53.↑ Ainsi Aristodème,

chargé par Démétriosd'apporter la nouvelle dela victoire, prend unemine sinistre et refuse derépondre aux envoyésd'Antigonos le pressantde dévoiler l'issue de labataille. Finalement, il nele fait que lorsqueAntigonos lui-même seprécipite au-devant de luile saluant d'un sonore« Salut, roi Antigonos !Nous sommes vainqueursde Ptolémée ». Ce à quoirépond le nouveau roi :« Toi aussi par Zeus je tesalue ! Mais puisque tunous a mis à la question,tu le paieras : tu attendrasplus longtemps tarécompense. »

54.↑ Si l'on exceptel'assassinat de la sœurd'Alexandre, Cléopâtre.

55.↑ Appien, op. cit., 54.

56.↑ De plus, Antigonos estle lointain descendant despremiers rois argéades.

57.↑ Rhodes, que Démétriosavait en vain tentéd'entraîner contrePtolémée après savictoire.

58.↑ Diodore, XX, 81-88 et91-100 ; Plutarque, Viede Démétrios, 21-22.

59.↑ Diodore, XX, 100 et102-103 ; Plutarque, Viede Démétrios, 23-27.

60.↑ Diodore, XX, 107. 61.↑ Chiffre considérable

pour l'époque quand onsonge aux quelqueséléphants de Pyrrhus oud'Hannibal Barca et quipourtant terrifient lesRomains.

62.↑ Le caractère trèsfragmentaire du livreXXI de Diodore de Sicilene peut être que déploré.

63.↑ Ces deux reines vontconnaître un destintragique.

64.↑ Stratonice est, par samère Phila I re, la petite-fille d'Antipater, et par

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son père celled'Antigonos le Borgne.Elle est aussi la nièce deCassandre et la sœur dufutur roi de MacédoineAntigonos II Gonatas.

65.↑ Après une longuefamine durant laquelleÉpicure partageait sesfèves avec ses disciplesafin de ne pas mourir defaim.

66.↑ Plutarque, Vie deDémétrios, 33-34.

67.↑ Pausanias, Descriptionde la Grèce [détail deséditions] [lire en ligne], I, 10,2.

68.↑ « Il prit peur et s'éclipsasubrepticement, un grandchapeau sur la tête et une

capote miteuse autour ducorps », précisePlutarque [réf. nécessaire].

69.↑ Plutarque, Vie deDémétrios, 49.

70.↑ Celui-ci est installéedans les possessionsgrecques de son pèreDémétrios.

71.↑ Séleucos a promis àPtolémée Kéraunos lacouronne d'Égypte.

72.↑ À l'exceptiond'Héraclée du Pont, quiprofite de la mort deLysimaque pourproclamer sonindépendance, avec lesoutien du roi du Pont etde Byzance.

Références

1. ↑ Voir à ce sujet PierreBriant, Antigone leBorgne. Les débuts de sacarrière et les problèmesde l'assembléemacédonienne, Paris,1973, p. 240.

2. ↑ a et b Diodore, XVIII,16, 3.

3. ↑ Plutarque, 6, 6 4. ↑ Plutarque, 7, 1. 5. ↑ Diodore, XVIII, 30, 4-

5. 6. ↑ Diodore, XVIII, 30, 5,

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écrit au contraire desautres sources queCratère charge le premier.

7. ↑ Diodore, XVIII, 31, 1-4 ; Plutarque, 7 ;Cornélius Népos,Eumène, 4, 2-3.

8. ↑ Pausanias, Descriptionde la Grèce [détail deséditions] [lire en ligne], IX,40, 7-9. Voir en ce sens lanote de Paul Goukowsky,Bibliothèque historique,XVIII, p. 47 (32, 2) etl’avis contraire de PierreBriant, « Le casd’Eumène de Cardia »,Revue des étudesanciennes, no 74, 1972, p.79.

9. ↑ Cornélius Népos, 4, 4. 10.↑ Diodore de Sicile,

XVIII , 31, 4. 11.↑ Diodore de Sicile,

XVIII, 37, 1 ; Plutarque,8, 3 ; Cornélius Népos, 5,1. Alcétas et unecinquantaine d'officiersde Perdiccas sontégalement condamnés àmort. Cette condamnationest confirmée lors du

conseil de Triparadisos. 12.↑ Diodore, XVIII, 39, 7. 13.↑ Arrien, Diadoques, 30-

44. 14.↑ Diodore, XVIII, 41 ;

Plutarque, Vie d'Eumène,10.

15.↑ Voir page 41 inAlexander to Actium: thehistorical evolution of theHellenistic age, PeterGreen, University ofCalifornia Press, 1990

16.↑ Les principales sourcesutilisées concernant lepersonnage d'Antigonossont :

• Diodore, XVIII49-fin ;

• Justin, XIV, XV ; • Plutarque, Vies

parallèles [détaildes éditions] [lire enligne], Démétrios,Pyrrhus.

17.↑ Diodore, XVIII, 56. 18.↑ Diodore, XVIII, 57-58. 19.↑ Diodore, XVIII, 53 et

58. 20.↑ D'après Pierre Jouguet,

L'Impérialismemacédonien et

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l'Hellénisation del'Orient, Albin Michel,1972, p. 151.

21.↑ Plutarque, Vied'Eumène (XI, 2)

22.↑ Pierre Briant,« D'Alexandre le Grandaux diadoques : le casd'Eumène de Cardia »,dans Revue des étudesanciennes no 75 (1973),p. 74-79.

23.↑ Diodore, XIX, 46. 24.↑ Diodore, XIX, 56. 25.↑ On a parfois voulu

corriger Kasandros enAsandros, nom du satrapede Carie ; Édouard Will,Histoire politique dumonde hellénistique(323-30 av. J.-C.), Seuil,coll. « Points Histoire »,p. 55-56, met en évidenceles raisons de conserverle nom du maître de laMacédoine. Voirégalement MauriceSartre, L'Anatoliehellénistique de l'Égée auCaucase (334-31 av. J.-C.), Armand Colin, 2003,p. 29.

26.↑ Diodore, XIX, 57. 27.↑ Jean Delorme, Le

Monde hellénistique,événements etinstitutions, S.E.D.E.S,coll. « Regards surl'Histoire », 1975.

28.↑ Jean Delorme, op. cit.,p. 43.

29.↑ À Chypre, Séleucossoutient Nicocréon deSalamine, le seulsouverain qui ne soit pasrallié à Antigonos.

30.↑ Il le condamne à boirela ciguë.

31.↑ A. Laronde,« Observations sur lapolitique d'Ophellas àCyrène », dans Historiano 498 (1971), p. 300-306.

32.↑ Avec une flotte de 250navires et une sommed'environ 5000 talents.

33.↑ Démétrios Poliorcète,qui se distingue desautres diadoques par unmoindre recours à laviolence et à l'assassinatpolitique, le faitraccompagner jusqu'à

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Thèbes aveccourtoisie[réf. nécessaire].

34.↑ Antigonos a près de 80ans

35.↑ Walter M. Ellis,Ptolemy of Egypt,Routledge, 1994, 47

36.↑ Voir page 104 in TheCambridge ancienthistory (Volume VII -Part 1), CambridgeUniversity Press, 1984

37.↑ Ibid., 36. 38.↑ (de) Heinen, dans

Untersuchungen zurhellenistichen Geschichte

des 3. Jahrhunderts v.Chr., zur Geschichte desZeit des PtolemaiosKéraunos und zumchremonideischen Krieg(Steiner, Wiesbaden,1972), montre l'absurditéde la version de Memnon(dans F. Jacoby, DieFragmente dergriechischen Historiker,434 F 5-6), qui fait dePtolémée Kéraunos lemeurtrier, la phrase ledésignant ainsi pouvantêtre une glose.

Bibliographie

• Claire Préaux, Le Monde hellénistique. La Grèce et l'Orientde la mort d'Alexandre à la conquête romaine de la Grèce(323-146 avant J.-C.), tome 1, Presses Universitaires deFrance, collection « Nouvelle Clio. L'histoire et sesproblèmes », 2003, 398 p. (ISBN 2-13-042619-0)

• Maurice Sartre, L'Anatolie hellénistique de l'Égée auCaucase (334-31 av. J.-C.), Armand Colin, collection « U »,2003, 318 p. (ISBN 2-200-26574-3)

• Édouard Will, Histoire politique du monde hellénistique(323-30 av. J.-C.), préface inédite de Pierre Cabanes,

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Éditions du Seuil, collection « Points histoire », 2003, 650 p.(ISBN 2-02-060387-X)