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1 Gouvernance de la santé Région de Sikasso Laurence TOURE Janvier 2010 MISEL I

Gouvernance de la santé Région de Sikasso

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MISELI. Gouvernance de la santé Région de Sikasso. Laurence TOURE Janvier 2010. Problématique de recherche. Une recherche sur la gouvernance réelle de la santé. Le programme global de recherche action est financé par la DDC - PowerPoint PPT Presentation

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Gouvernance de la santéRégion de Sikasso

Laurence TOURE

Janvier 2010

MISELI

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Problématique de recherche

Le programme global de recherche action est financé par la DDC− Un programme sur la gouvernance quotidienne des services publics et les

réformes visant une amélioration de leur délivrance− Un programme sous-régional − Un programme de recherche action de 4 ans− Un programme axé au Mali sur les services publics de la santé et du

développement social dans la région de Sikasso (choix du BUCO)

Dans le cadre de ce programme, recherche spécifique dont la finalité est d’étudier la mise en œuvre concrète des politiques publiques de décentralisation et leur appropriation, appliquées au domaine de la santé− La gouvernance de la santé est «définie ici loin de toute acception

normative, comme l’exercice d’un pouvoir caractérisé par l’interaction de multiples acteurs. »

Etudier comment se construisent, dans ce domaine très fermé de la santé et en milieu urbain, de nouvelles formes interactives de gouvernement et une co-production de services publics santé, consécutives au double mouvement de décentralisation sectoriel et administratif

Il s’agit ici d’étudier la gouvernance réelle donc s’intéresser aux écarts entre normes théoriques et normes pratiques

Une recherche sur la gouvernance réelle de la santé

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Justifications de la recherche

L’intérêt scientifique du thème− Le résultat des politiques publiques mises en œuvre dépend étroitement du

contexte dans lequel elles prennent place et de leurs modalités de mise en œuvre

− La réalité de la mise en œuvre locale de cette réforme, la perception du processus par les acteurs locaux et leur appropriation de la réforme, sont peu traités, de manière qualitative bien que fort instructives

Les enjeux politique et social de cette réforme sont considérablesLa décentralisation offre l’opportunité – de passer d’une gestion sectorielle, nationale, corporatiste des affaires de

santé à une gestion locale, transversale et pluridisciplinaire. – de faire de la santé un objet de débats publics, cruellement absents

jusqu’ici

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Un contexte propice pour cette recherche

Le contexte actuel est intéressant− On dispose d’un recul de 15 ans, suffisant pour faire de l’application de cette

réforme et de son appropriation un objet d’étude− La période actuelle est une période de réflexion, de flottement pendant

laquelle on constate un infléchissement de la volonté politique

Le double mouvement de décentralisation a donné à la réforme sectorielle de la santé un contexte institutionnel cohérent

− Réforme sectorielle amorcée avec politique des SSP, puis IB (privatisation du niveau le plus périphérique, délégation de gestion aux hôpitaux)

‒ Déconcentration des services techniques : district comme maillon fort‒ Décentralisation géographique et administrative : transfert de compétences

aux collectivités territoriales, dirigées par des élus (2002)

La région de Sikasso constitue un contexte géographique favorable ‒ Existence de formes d’organisations collectives autour d’intérêts communs

de longue date (Tons villageois dans la zone CMDT)‒ Des innovations intéressantes repérées pendant l’enquête collective en juin

07 : Initiative de la coopération suisse ; étude bilan diagnostic

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Démarche méthodologique

Une approche qualitative

Une approche comparative− Niveau communal versus niveaux Cercle et Région

Des outils méthodologiques classiques de l’anthropologie− La réalisation d’entretiens − L’observations des situation d’interactions entre acteurs locaux− L’exploitation de la documentation

Une analyse en trois dimensions− Les perceptions des acteurs locaux− L’application des textes concernant le transfert de compétence et la

déconcentration− Des études de cas sur des enjeux importants (finances, ressources

humaines, informations)L’expérimentation du transfert de ressources aux collectivités (fonds suisses)La gestion de deux CSCOM en milieu urbain

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Résultats de l’analyse

1. Perceptions des acteurs locaux

2. Bilan du transfert de compétences et de la déconcentration des activités

3. Présentation des deux études de cas

1. Perceptions des acteurs locaux

La décentralisation est perçue comme un principe imposé

La décentralisation est un changement jugé nécessaire

MAIS

La mise en œuvre est jugée insuffisamment préparée, peu anticipée et généralisée sans test préalable

L’articulation des deux réformes, institutionnelle et sectorielle est difficile avec des zones d’incohérences

Le scepticisme des acteurs locaux est général quant aux effets annoncés des politiques de décentralisation (meilleure gestion…)

L’avenir de la réforme est jugé incertain

Des perceptions différenciées du transfert de compétence selon les acteurs

2. Bilan du transfert de compétences et de la déconcentration des activités

Transfert des équipements‒ Le décret de transfert des équipements aux collectivités est publié‒ Le transfert des équipements est effectif dans la région de Sikasso

OR, deux problèmes se posent :‒ Les CSCOM sont des structures privées ‒ Les titres fonciers des CSREF ne sont pas toujours disponibles

Financement des activités‒ Les ressources n’ont toujours pas été transférées aux collectivités ‒ L’implication financière des collectivités reste limitée et peu visible car

faiblement documentée‒ La gestion des fonds est encore très peu déconcentrée

2. Bilan du transfert de compétences et de la déconcentration des activités (suite)

Gestion des ressources humaines‒ 12% du personnel sont pris en charge par les collectivités dans la

région‒ Le cas du personnel sur fonds PPTE est problématique‒ La gestion des RH reste toujours largement pilotée par Bamako

Fonction politique et technique de planification‒ La participation des élus aux rencontres de planification (CROCEP) est

très formaliste‒ Le processus de planification des activités socio sanitaires est top down

Fonction de suivi et de contrôle − La position d’arbitrage des conflits est difficile à tenir par les élus qui

sont souvent à la fois juge et partie− La participation des élus aux instances de gestion des centres de santé

(Coges et Asaco) n’est pas systématique et reste formaliste

3. Présentation des deux études de cas

L’expérimentation suisse du transfert de ressources aux collectivités‒ L’expérience est inédite au Mali ‒ Elle se traduit par un transfert de ressources (fonds suisses) à deux

Conseils de cercle et à l’Assemblée Régionale de Sikasso‒ Le transfert de ressources représente un enjeu majeur déterminant pour

étudier les logiques d’acteurs

La gestion de deux CSCOM dans la ville de Sikasso‒ Au niveau le plus décentralisé de la pyramide sanitaire, la gestion des

CSCOM est assurée par les Asaco, structures associatives donc privées

‒ Les deux CSCOM retenus présentent un historique semblable mais des résultats actuels contrastés

‒ L’étude a porté sur les interactions entre acteurs en situation normale et en situation de crise

‒ L’enjeu fondamental des interactions est la gestion des ressources humaines

Synthèse des résultats

1. Les interactions horizontales : positionnement et stratégies des acteurs locaux

Les services techniques déconcentrésLes acteurs politiquesLes acteurs communautairesLes acteurs administratifs

2. Le poids des acteurs de l’ombre et les logiques verticalesL’agenda caché de l’Etat centralLa position ambivalente des PTFL’absence non remarquée des populations

3. Peut-on parler de coproduction de services publics ?

4. Les politiques de décentralisation favorisent-elles l’expression d’un pluralisme d’opinions et de visions en matière sanitaire ?

5. Les politiques de décentralisation suscitent-elles l’émergence de réformateurs locaux ?

1. Positionnement et stratégies des acteurs locaux

Le repli des services techniques sur les instructions de leurs instances hiérarchiques

‒ Les techniciens se sentent encore en position de force en termes de compétences techniques, de capital médical international et d’accès aux ressources financières

‒ Ils refusent de rendre compte à des personnes qu’ils jugent moins diplômées, moins informées

‒ Ils s’en tiennent à une application formaliste des textes‒ Dans ce contexte, leur hiérarchie leur apparaît comme la seule

source de légitimité et de pouvoir

L’attentisme des collectivités décentralisées‒ Peu d’élus sont des professionnels de santé− Les hommes politiques font preuve d’une capacité de propositions

réduite‒ Les élus fonctionnent en s’inspirant du modèle classique de « chef »‒ Ils adoptent une attitude effacée face aux autres acteurs dans toutes

les interactions (refus de s’imposer)‒ Ils recherchent une légitimité auprès de l’Etat et des bailleurs, non

des citoyens, via le contrôle des ressources et des hommes

1. Positionnement et stratégies des acteurs locaux (suite)

• Les acteurs communautaires (Coges et Asaco) détournés de leur mission première‒ Leur légitimité est diversement reconnue

• Les Asaco sont des acteurs jugés légitimes et incontournables, quelque soit par ailleurs leurs pratiques

• Les Comité de gestion des CSREF sont en mal de reconnaissance‒ Les acteurs communautaires sont enfermés dans une logique

gestionnaire ‒ Les acteurs communautaires sont peu à l’écoute des besoins des

populations

Les instances d’arbitrage distantes ‒ Leur arbitrage est sollicité en cas de conflits ouverts

• des services administratifs déconcentrés• des autorités traditionnelles locales

‒ Leur arbitrage reste peu efficace : Tentation de laisser faire et souci de consensus apparent

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Les textes manquent de cohérence et leur application est souvent laissée à l’appréciation des acteurs locaux (absence de guide d’opérationnalisation, etc.)

Les conflits de compétence sont mal arbitrés‒ Absence d’arbitrage neutre des tensions et fuite des responsabilités face aux conflits

de compétence qui se multiplient

Les acteurs locaux sont mis en dépendance ‒ La politique de décentralisation est contrariée par d’autres politiques sectorielles très

verticales (pas de transversalité)‒ Les services techniques sont faiblement déconcentrés et les initiatives locales des

agents sont dévalorisées

L’Etat fait preuve d’indécision politique quant à l’avenir de la réforme‒ Des textes en cours d’élaboration qui révèlent une tentation à remettre en cause

certains acquis des collectivités

2. L’agenda caché de l’Etat

3. La position ambivalente des PTF face à la décentralisation

Les PTF sont considérés par les acteurs locaux comme les initiateurs et porteurs réels de la réforme

‒ Ce sont des alliés qui peuvent convaincre l’Etat de poursuivre la réforme‒ Ces alliés potentiels doivent être ménagés, quitte à ne pas faire état de

certaines difficultés ou réalités

Mais leur positionnement actuel manque de clarté‒ L’engagement des PTF en faveur des politiques de décentralisation est

moins soutenu‒ Des divergence entre PTF s’expriment quant aux modalités et à la

pertinence des la politique de décentralisation et son avenir‒ La décentralisation est un programme spécifique pour la plupart, et non un

axe transversal d’intervention(sauf exception suisse)

4. L’absence non remarquée des citoyensdans le processus de décentralisation

Les citoyens sont au cœur de tous les discours et principes– Ils sont toujours présentés comme les premiers bénéficiaires de ces réformes– Ils sont en théorie les acteurs centraux des processus de décentralisation

(élections, fonctionnement communautaire)

Dans les faits, un constat s’impose : les populations sont ignorées − Elles sont faiblement impliquées lors de la création des instances

communautaires– Leur participation au processus électoral est monnayée– Elles sont mal informées sur le processus de décentralisation alors qu’elles

sont peu familières des pratiques démocratiques– Il ne leur est fait aucun compte rendu des décisions prises en leur nom– Leurs intérêts et leurs priorités sont peu entendues et prises en compte pour

alimenter les politiques de santé

Les conséquences de cet oubli plus ou moins volontaire sont lourdes − Les citoyens ne sont pas en mesure de jouer leur rôle d’arbitrage et de

contrôle − Les privilèges de quelques-uns s’imposent au détriment de l’intérêt collectif

5. Peut-on parler d’une coproduction de services publics ?

Les interactions horizontales restent très formalistes

Les acteurs locaux privilégient à une gestion concertée, une stratégie de contournement des contraintes et un fonctionnement parallèle : cohabiter oui, collaborer non

On observe une logique de confiscation et non de partage du pouvoir

Le sentiment d’impunité se généralise et les abus se multiplient

Les cas de bonne collaboration demeurent exceptionnels et basés sur des initiatives individuelles, qui relèvent ainsi plutôt de la personnalité des acteurs

6. Les politiques de décentralisation favorisent-elles l’expression d’un pluralisme d’opinions et de visions en

matière sanitaire ?

Les enjeux de pouvoir tournent essentiellement autour de questions de légitimité et d’autorité− La maîtrise des ressources humaines et matérielles mobilise l’attention au

détriment d’une maîtrise de l’information sanitaire et des besoins des populations

Les débats de fond sur la santé publique sont absents − La capacité de propositions alternatives des élus est faible‒ Les services techniques restent très dépendants de leur hiérarchie‒ La voix des populations est peu intelligible et écoutée

Les résultats restent décevants en termes de débat public et de prise en compte de la demande dans l’offre de services − Les politiques de décentralisation soutiennent mal le principe de

démocratisation de la santé

Les clés de compréhension proposées par les acteurs locaux

Les acteurs locaux proposent des éléments de compréhension qui sont à chercher dans :

1. Le contexte dans lequel la réforme a pris place :La culture politique locale (représentations du

pouvoir)La culture du consensus

2. Les modalités de mise en œuvre de la décentralisationLes imperfections du dispositif d’accompagnement technique, institutionnel et politique

2. Le fonctionnement du milieu médical

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1- Les représentations du pouvoir et les conditions d’accès au pouvoir des élus

Le pouvoir des urnes est jugé comme une

faible source de légitimité d’exercice du

pouvoir• Accessible à tous • Limité dans le temps (mandatures)• Redevable aux électeurs• Sous contrôle de la tutelle• Sans capacités financières • Et au-delà, décrédibilisé par le dispositif

électoral dévoyé

Attrait du pouvoir du commandant, pouvoir fort

Besoin de fonctionnement hiérarchique

Attentisme des éluscar

Le pouvoir ne se partage pas. Il « s’arrache ».Attente d’un renforcement d’autorité par

l’intervention de l’Etat

Le pouvoir des urnes n’est soutenu par aucun référent

• Connaissance théorique de son mode d’exercice

mais

• Aucun modèle existant auquel se référer concrètement.

Sentiment d’infériorité des élus Désarroi des élus

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2. Les imperfections du dispositif d’accompagnement technique, institutionnel et politique

Un dispositif de formation doublement orienté

Des textes législatifs peu opérationalisables et mal diffusés

Des services techniques déconcentrés peu coopératifs

Une opposition interne au sein des conseils des collectivités

Une absence d’articulation entre différents niveaux de collectivités

L’absence de relais réel au niveau national

Des directives politiques absentes

La fonction d’élu suppose une capacité à innover

dans le mode de gestion du pouvoir

dans l’élaboration des politiques

dans les interactions avec les acteurs

OR

Le dispositif d’accompagnement technique, institutionnel et politique des élus ne leur permet pas de relever pleinement ce défi

3- Une culture du consensus omniprésente

La décentralisation est la reconnaissance des oppositions d’intérêts et l’institutionnalisation de leur expression

La décentralisation impose la nécessité d’innover par rapport aux modèles

OR

La manifestation ouverte d’un désaccord est jugée inopportune dans le contexte culturel

Le principe de moussalaka permet d’esquiver et de régler en apparence les situations conflictuelles, les refus d’obtempérer

Le contexte est peu propice aux innovations‒ Principe de consensus qui paralyse les initiatives‒ Poids paralysant de la technique et de la hiérarchie‒ Faible intérêt pour les citoyens usagers

4- La soumission au pouvoir médical

Par nature expert

Des mots d’ordre internationaux difficilement contestables‒ Recommandations et priorités définies par l’OMS

‒ Le pouvoir aveuglant des statistiques

‒ Les considérations gestionnaires

Des professionnels de santé eux-mêmes peu favorables à l’implication d’acteurs profanes dans le domaine assez clos de la santé

Les politiques publiques de décentralisation :

La difficile adéquation entre normes officielles et normes pratiques

Du niveau international au niveau local :Des normes officielles aux normes pratiques

Les instances internationales ou coopérations multilatérales produisent les normes officielles des politiques de décentralisation− Elles élaborent un dispositif législatif en fonction d’une culture politique

élaborée ailleurs‒ Elles sous-estiment et négligent l’accompagnement des citoyens ‒ Elles évacuent les dimensions politique et sociale de ces réformes au profit

des dimensions technique et gestionnaire

L’Etat adopte une position ambigüe‒ Il maîtrise et accepte partiellement les normes officielles du dispositif : la

nécessité d’une adaptation au contexte, perçue mais non formulée‒ D’où de nombreuses résistances plus ou moins larvées au sein des

ministères concernés mais pas de critique ou d’amendement du dispositif‒ Il ne peut reconnaitre officiellement les normes pratiques

Au niveau local, les acteurs s’approprient les réformes en fonction des normes pratiques en vigueur‒ Ils réinjectent à la décentralisation une dimension politique dans les normes

de fonctionnement local‒ Pas de contestation ouverte de la politique telle qu’elle a été proposée par le

niveau national‒ Des adaptations et résultats assez éloignés des attentes de départ

L’action de la coopération suisse reproduit les contradictions observées aux différents niveaux d’intervention

DDC : le respect des normes classiques de coopération – Un appui aux politiques nationales– Une vision gestionnaire, dépolitisée– Un souci de quantification et de visibilité– Une recherche de résultats à court terme

BUCO Mali : une position originale et isolée– La décentralisation comme axe transversal d’intervention – Acceptation d’une faible visibilité de résultats à court terme– Une critique du dispositif vertical et sectoriel du PRODESS– Néanmoins, une connaissance et une prise en compte insuffisantes des

logiques d’acteurs et du contexte

PSDS Sikasso : un acteur dans l’incapacité de remplir son mandat de médiateur

– Acteur trop impliqué historiquement sur la scène locale– Un cahier des charges sans outils ni accompagnement– Conscient des logiques de pouvoir dans lesquelles il est lui-même pris, mais

disposant d’une marge de manœuvre réduite pour rendre compte à sa hiérarchie, et de fait peu soutenu par elle