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Gilles Philippe FRENCH STYLE LES IMPRESSIONS NOUVELLES L’accent français de la prose anglaise

Extrait de "French Style"

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Extrait de l'essai littéraire de Gilles Philippe, intitulé "French Style. L'accent français de la prose anglaise", paru aux Impressions Nouvelles en mai 2016.

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Gilles Philippe

French style

LES I M P R E S S I O N S N O U V E L L E S

L’accent français de la prose anglaise

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French style

LES IMPRESSIONS NOUVELLES

Gilles Philippe

L’accent français de la prose anglaise

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extrait

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IntroductionLa référence et l’influence

But my mind is very bare to words–English words–at the moment: they hit me, hard, I watch them bounce & spring. I’ve read only French for 4 weeks. An idea comes to me for an article on French; what we know of it1.

« Je ne lis que du français depuis quatre semaines. Une idée me vient pour un article sur le français ; ce que nous en savons. » Cette note du 24 avril 1928 m’intrigue. Car Virginia Woolf ne devait jamais écrire l’article pro-jeté dans son journal, se contentant de donner en février 1929 un joli texte : « On not Knowing French », « Sur l’ignorance du français ». Mais si elle avait suivi son idée première, qu’aurait-elle dit ? Comment un auteur anglais des années 1920 percevait-il notre langue ou la littérature écrite dans notre langue ?

C’est à ces questions que ce livre veut répondre. Il essaie à sa façon d’écrire l’article que Virginia Woolf n’a pas écrit. Il prend aussi au sérieux le nous du « nous en savons » : il ne s’agit pas de savoir ce que la romancière savait du français, mais bien ce qu’en savait toute sa géné-ration, la dernière sans doute qui fût d’abord tournée vers

1. The Diary of Virginia Woolf, t. III, Londres, The Hogarth Press, 1980, p. 182. Dans les citations en anglais, les usages typographiques originaux ont été respectés. Sauf indication contraire, toutes les traductions sont miennes.

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la France, avant que la littérature anglaise, comme celle de toute l’Europe, ne regardât vers l’Amérique.

Le retard et la detteL’enquête qu’on va lire prend cette note de journal

comme point de départ et comme point d’arrivée. Pour faire bonne mesure, on arrondira la date à 1930. Cette année-là meurt Charles Kenneth Scott Moncrieff, qui a permis à l’Angleterre de lire Marcel Proust dans sa langue. Mais l’arrondi permet surtout de dépasser l’anecdote : le début des années trente marqua une forte rupture dans l’histoire littéraire anglaise, avec une évidente interna-tionalisation de ses perspectives et surtout une très nette montée des préoccupations politiques et sociales, tant en poésie que dans le roman. Cette date de 1930 est d’ail-leurs communément retenue pour noter la fin d’une pé-riode de cinquante années, où les historiographes britan-niques regroupent les derniers victoriens et les premiers modernistes. Cinquante ans, c’est l’empan nécessaire pour comprendre ce qu’un auteur comme Woolf savait effectivement du français. Nous voici ramenés en 1880 : c’est l’année de la mort de Gustave Flaubert et de George Eliot. Virginia Woolf est née en 1882.

Or, pris comme un bloc, ce demi-siècle apparaît d’abord comme le « moment français » de la littérature anglaise. On aura d’ailleurs l’occasion de vérifier que la borne aval est ici encore pertinente : les années 1930 virent un très rapide reflux de l’intérêt pour la langue, la culture et la littérature françaises, reflux en quelque sorte symétrique du mouvement qui, à la fin de l’ère victorienne, avait vu reculer les clichés antifrançais au profit d’une attention de plus en plus vive pour tout ce qui se passait outre-

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Manche2. Bien sûr, l’année 1880 ne marqua en rien le début de l’influence littéraire française en Angleterre (la légende veut par exemple que George Eliot ait choisi son prénom en hommage à George Sand), mais auparavant l’influence avait été symétrique. Pendant cinquante ans, cette symétrie fut rompue : l’Angleterre eut le sentiment d’avoir, face à la France, un retard et une dette.

La dette ne me préoccupera pas d’abord, ou plutôt pas comme telle. Henry James l’a bien résumée en 1899 : « Nous devons tous tellement à la France de ces cinquante dernières années que ce serait manquer aux bonnes ma-nières que de laisser passer l’occasion […] de dire notre gratitude3. » On a longtemps considéré que le retard concernait principalement un genre, le roman, et l’on a parfois encore convoqué James : « En règle générale, rien n’est plus frappant dans un habile roman français que la supériorité de sa facture et de ses proportions artistiques sur celles d’un habile roman anglais4. » Selon un histo-riographe de la littérature britannique, la situation pou-vait être ainsi résumée en 1900 : « les exigences françaises de style, d’économie artistique, de complétude structu-relle, étaient largement et pleinement acceptées par ceux qui prenaient leur art au sérieux5. » Le style, c’est donc

2. Sur le créneau chronologique exact qui nous retiendra, voir le livre de Christophe Campos, The View of France, from Arnold to Bloomsbury, Oxford, Oxford University Press, 1965.3. Henry James, « The Present Literary Situation in France » (1899), Literary Criticism, t. I, New York, The Library of America, 1984, p. 111.4. H. James, « [Recent Novels] » (1876), ibid., p. 41.5. Ernest A. Baker, The History of the English Novel, t. IX, Londres, Witherby, 1938, p. 205.

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d’abord de cela qu’il s’agit. Mais l’allégeance dépassa le seul genre narratif.

Pendant cinquante années, l’Angleterre a, plus que jamais et plus que tout autre pays, considéré la France comme le pays du style. Alors qu’une certaine méfiance avait été auparavant jetée sur l’obsession française de la mise en mots, les conditions semblèrent tout à coup ré-unies pour que le pays transformât en pure admiration le soupçon longtemps maintenu sur ce qu’il percevait comme un formalisme moralement douteux.

Le plus grand romancier anglais lui-même n’avait d’ail-leurs jamais eu une très haute idée de son style6. Charles Dickens était mort en 1870 ; dix ans plus tard, il était de notoriété européenne que les écrivains français ne se pré-occupaient guère que de style, et que les écrivains anglais ne s’en souciaient point. L’attestent par exemple ces lignes bien connues d’Émile Zola :

Les étrangers ne comprennent absolument rien à nos soucis de style. J’en ai causé avec des Anglais et des Allemands ; jamais aucun mouvement semblable n’a eu lieu dans leurs littératures. Les plus grands romanciers anglais, Dickens entre autres, ont écrit au petit bonheur de la langue, sans raffiner sur la ponctuation7.

C’est un peu injuste, car les derniers textes de Dickens marquaient un évident infléchissement vers un plus grand souci rédactionnel et esthétique, et c’est cet infléchisse-ment même, celui de toute l’époque, qui explique que

6. Voir l’introduction, par Daniel Tyler, de Dickens’s Style, Cambridge, Cambridge University Press, 2013.7. Émile Zola, Les Romanciers naturalistes (1881), Œuvres complètes, t. X, Paris, Nouveau Monde Éditions, 2004, p. 619.

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l’Angleterre eût soudain honte de sa nudité et qu’elle dé-cidât d’aller prendre à Paris des leçons de vêture.

Vers 1880, une chose semblait ainsi assurée : il y avait un retard à combler. La France avait ce que l’Angleterre n’avait pas : du style, le style. Les Français savaient écrire, les Anglais non. Parmi les nombreux témoignages que ce livre va convoquer, parmi ceux surtout qu’il laissera sur sa marge pour ne pas s’encombrer de répétitions inutiles, je retiendrai par exemple celui du grand critique John Addington Symonds : « ces auteurs français », écrivait-il en 1890, sont « nos maîtres pour ce qui est de l’expres-sion littéraire considérée comme un art » ; et il poursui-vait : « Bien tard peut-être mais résolument, nous autres, Anglais, avons fini par reconnaître notre infériorité dans l’art de la prose et la nécessité dans laquelle nous étions d’en apprendre les règles auprès de nos maîtres français »8. Robert Louis Stevenson n’avait pas dit autre chose en 1885 : « la prose française est sensiblement meilleure que l’anglaise9. » Thomas Sturge Moore le dirait encore en 1910 : « par sa prose, la France occupe le premier rang parmi les nations10. » Nous appellerons bien assez de té-moins à la barre ; ceux-ci nous suffiront pour le moment.

Le sentiment d’un retard sur la France en matière de style était tel, au début du xxe siècle, qu’il ne concernait même plus la seule prose littéraire :

8. John Addington Symonds, « Notes on Style », Essays Speculative and Suggestive (1890), Londres, John Murray, 1907, p. 168 et 201.9. Robert Louis Stevenson, Essais sur l’art de la fiction, trad. F.-M. Watkins et M. Le Bris, Paris, Payot, 1992, p. 269 ; « On Some Technical Elements of Style in Literature » (1885), Essays on the Art of Writing, Londres, Chatto and Windus, 1919, p. 30.10. Thomas Sturge Moore, Art and Life, Londres, Methuen and Co., 1910, p. 108.

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[…]

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Chapitre premierLa France, c’est le style même

L’Angleterre a tant répété la formule de Buffon « Le style est l’homme même » qu’elle l’a usée. En 1989, la dernière édition de l’Oxford English Dictionary considé-rait Style is the man comme une « expression proverbiale », réputée connue et admise de tous, sans origine décelable. On ne saurait compter, il est vrai, ni les occurrences ni les gloses d’une citation inlassablement reprise, en français comme en anglais, dans les essais sur le style ou les ou-vrages littéraires que l’Angleterre vit paraître entre 1880 et 19301.

Dès 1890, un éminent professeur d’Oxford pouvait d’ailleurs s’exclamer :

Le mot de Buffon selon lequel le style est l’homme même est si largement repris et célébré que l’on peut raisonnablement penser qu’il a une portée profonde et générale ; il n’eût point autrement été reçu avec une ap-probation si unanime et si durable2.

Et l’on relève, dès le début de la période, au moins deux articles parus dans des revues anglaises de renom qui

1. Voir, parmi tant d’autres, les occurrences relevées dans les années 1890 par Jason Camlot (Style and the Nineteenth-Century British Critic: Sincere Mannerisms, Hants, Ashgate, 2008, p. 139). Je ne les reprends pas ici.2. John Earle, English Prose. Its Elements, History and Usage, Londres, Smith, Elder and Co., 1890, p. 342.

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prennent pour titre la forme française usuelle de la sen-tence de Buffon : celui du poète et diplomate Edward Robert Lytton dans la livraison de juin 1884 de la Fortnightly Review, celui de l’économiste et romancier William Hurrell Mallock dans le numéro d’avril 1892 de la New Review. « Le style, c’est l’homme même », ironisait ce dernier, cela veut dire que le style, ce n’est pas l’homme de lettres : la prose ne doit pas sentir la littérature, sinon elle n’est plus personnelle et n’est donc plus de la littéra-ture.

Dans la version publiée du « Discours sur le style » prononcé par Buffon le 25 août 1753, à l’occasion de sa réception à l’Académie française, la formule n’autorisait pourtant pas cette lecture : suivant une conception clas-sique, elle désigne avant tout la part que l’esprit humain apporte, dans la mise en mots, aux objets dont il traite et qui lui sont extérieurs. En France, en Angleterre, en Amérique, il y eut des universitaires pour rappeler, va-riantes et commentaires à l’appui, que telle était l’unique lecture possible de la sentence3. Le style, c’est la part de l’Homme, c’est-à-dire l’ordre que celui-ci met dans les choses et les idées. On est donc bien loin d’une définition du style comme singularisation de l’idiome et marquage subjectif. Selon Buffon d’ailleurs, toute tentative d’appro-priation personnelle du bien commun qui ne viserait qu’à « faire de nouvelles combinaisons de syllabes » ne saurait être que l’ambition d’esprits stériles :

ils travaillent donc sur les mots, et s’imaginent avoir combiné des idées, parce qu’ils ont arrangé des phrases, et avoir épuré le langage quand ils l’ont corrompu en

3. Voir Lane Cooper, Theories of Style, with Especial Reference to Prose Composition, New York et Londres, MacMillan, 1907, p. 179.

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détournant les acceptions. Ces écrivains n’ont point de style, ou, si l’on veut, ils n’en ont que l’ombre4.

Mais le contexte immédiat de la sentence n’en interdi-sait pas tout à fait une lecture préromantique : le style, ce serait alors la part d’un homme même, dans la singularité de son expression et de sa sensibilité. Isolée, et dans une Angleterre dont la conception du style venait de basculer d’une définition idéale vers une définition idiolectale, la sentence sembla faire l’apologie du singulier. Mieux en-core, on jugea proprement française cette vision du style, et l’on cita volontiers et abondamment Buffon dans sa langue d’origine. On importa donc non seulement la for-mule, mais aussi la lecture à contresens qui s’était égale-ment répandue en France.

Cette seconde lecture ne s’imposa cependant pas tout de suite, elle ne fit jamais l’objet d’un parfait consensus, et surtout elle n’occupa jamais la totalité de la réflexion stylis-tique anglaise. Même quand l’idée que la singularité définît le style fut devenue dominante, dans les années 1890, elle n’a jamais chassé d’autres questionnements, notamment la recherche d’un style proprement anglais, c’est-à-dire d’une part d’un style aussi anglais que le style français était fran-çais, et d’autre part d’un style qui ne fût pas un simple calque du style français. Cet English prose style prendrait acte de la dualité de la langue – foncièrement germanique dans sa grammaire, fortement latine dans son lexique –, mais aussi de l’esprit « viril » d’une nation bien différente sur ce point de son esthétisante voisine5.

4. Georges-Louis Leclerc de Buffon, « Discours sur le style » (1753), Œuvres, Paris, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 2007, p. 425.5. On trouvera quelques éléments sur ce point dans J. Camlot, Style and the Nineteenth-Century British Critic, p. 115-121, mais je

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Le moment FlaubertJ’ai pu laisser penser qu’il fallut attendre les années

1880 pour que l’Angleterre décrétât « française » la notion de style, et qu’il y eut sur ce point une spécificité locale. L’Angleterre victorienne prit en fait appui sur une doxa eu-ropéenne établie à la fin du xviiie siècle et qui voulait tout d’abord que la langue française, impropre au vers, présen-tât des qualités incomparables pour la prose, ensuite que ces qualités de la langue fussent liées à des pratiques de socialité spécifiques, enfin que le souci français du style eût tourné en obsession moralement suspecte voire blâ-mable6. Cette doxa était issue d’une sorte de négociation entre la France et l’Allemagne, et c’est, sans grande sur-prise, dans la version qu’en avait procurée Mme de Staël qu’elle parvint en Angleterre.

La chose s’observe fort bien dans les grands essais que Thomas De Quincey consacra à la langue et au style entre la fin des années 1820 et le début des années 18507, es-sais qui déclinent tous localement une même question : comment expliquer et corriger l’indifférence anglaise en matière de langue, sans tomber pour autant dans les excès français ? Bien que le propos de De Quincey évoluât assez

reviendrai sur la question du « style anglais » dans les chapitres IV et VI.6. On trouvera une étude complète de cette doxa dans G. Philippe, Le Français, dernière des langues. Histoire d’un procès littéraire, Paris, Puf, 2010. Je reviendrai sur le cas anglais dans la conclusion de cet essai.7. Voir Lois Peters Agnew, Thomas De Quincey: British Rhetoric’s Romantic Turn, Carbondale, Southern Illinois University Press, 2012, p. 78-102. Sur les enjeux philosophiques de la théorie de De Quincey, voir la préface d’Éric Dayre à sa traduction des Essais sur la rhétorique, le langage, le style, Paris, Corti, 2004, p. 7-20.

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sensiblement au cours des années, sa conception du style français resta étonnamment stable.

Les considérations proposées dans l’article sur « La rhétorique », paru dans le Blackwood’s Magazine en mars 1828, sont déjà marquées par un imaginaire de l’opposi-tion entre style anglais et style français que l’on retrouvera par la suite : c’est par la structure des phrases plus que par toute autre chose que les prosateurs français l’emportent sur leurs confrères anglais ; on s’inquiète plus en France de la forme que du fond d’un discours ou d’un ouvrage (« chez les Français, les écrivains les plus vides du point de vue de la matière mettent beaucoup de soin dans leur style8 ») ; en matière de description et de stabilisation de la langue, l’Angleterre présente, comparée à la France, un retard abyssal :

Nous, les Anglais, nous ne possédons à ce jour aucune grammaire savante de notre langue ; […] nous ne pos-sédons pas non plus de dictionnaire satisfaisant ; et nous ne possédons aucun ouvrage, même insatisfaisant, sur les expressions et les tours idiomatiques de notre langue, qui corresponde aux ouvrages de Vaugelas, parmi d’autres, pour le français9.

Le parallèle se retrouve presque inchangé dans l’essai sur « Le langage », paru en 1851 dans le Hogg’s Weekly Instructor. Les Français y apparaissent fort soucieux de correction, tandis que même les Anglais cultivés multi-plient les fautes ; ils y apparaissent surtout fort soucieux d’élégance, d’où une sensibilité extrême à la clarté et à la

8. Thomas De Quincey, Essais…, p. 69 (« Rhetoric », § 46). J’ai parfois modifié la traduction citée.9. Ibid., p. 70 (« Rhetoric », § 46).

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sobriété de la phrase, qualités à la fois admirables et mé-diocres :

le respect dont les Français font preuve à l’égard de leur langue s’exprime principalement dans la manière dont ils en font usage, c’est-à-dire dans l’attention qu’ils portent au style et au choix des mots. Il est extrême-ment rare de voir un écrivain français se lancer dans des phrases trop longues, trop compliquées, chargées d’un trop grand nombre de propositions, ou trop maladroites dans leur structure. Les plus hautes qualités du style ne participent pas fondamentalement de l’idéal de la com-position française ; mais dans les résultats de l’exécution, la prose française montre habituellement un aspect fini, une manière de ne pas céder à la tentation des longueurs, une grande adresse et une grâce dans les transitions10.

Mais c’est surtout le grand essai sur « Le style », paru en 1840 dans le Blackwood’s Magazine, qui permet de comprendre pourquoi l’Angleterre était prête depuis longtemps à recevoir les apports de la doctrine flauber-tienne dans les années 1880-1890. Non que ce texte soit plus que les précédents obsédé par la France.

10. Ibid., p. 90-91 (« Language », § 14).

[…]

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Table des matières

IntroductionLa référence et l’influence 5

Le retard et la dette 6Chevaux de Troie 14

Chapitre premierLa France, c’est le style même 27

Le moment Flaubert 30Le moment Gourmont 43

Chapitre IILe style, c’est la France même 55

Écrire comme Renan 56Écrire comme Flaubert 72

Chapitre IIIImporter l’impression 87

Traduire l’impression 90Donner l’impression 106

Chapitre IV Henry James : un romancier anglais au style français ? 131

Des gallicismes linguistiques 136Un gallicisme stylistique 147

Chapitre VMarcel Proust : un romancier français au style anglais ? 165

« This strangely un-French prose of his » 167L’idiome et l’idiolecte 180

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Chapitre VILa leçon française 193

T. S. Eliot, la France, le style 196Le style, la France, le Criterion 203

ConclusionLa querelle des imaginaires 221

Les deux corps de la langue 226Les deux corps du style 235

Index des noms 247

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Du même auteur

Le Discours en soi, Paris, Honoré Champion, 1996

Sujet, verbe, complément. Le moment grammatical de la littérature française (1890-1940), Paris, Gallimard, 2002

Le Français, dernières des langues. Histoire d’un procès littéraire, Paris, Presses Universitaires de France, 2010

Le Rêve du style parfait, Paris, Presses Universitaires de France, 2013

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Les Français savent écrire, les Anglais ne savent pas écrire. Du moins le pensa-t-on en Angleterre entre 1880 et 1930, si bien que Londres voulut rattraper son retard sur Paris.

Pendant cinquante ans, le style anglais connut son moment français ; certains voulurent écrire en anglais comme on écrivait en français ; d’autres se revendiquèrent des théories de Flaubert ou de Gourmont. On importa des idées et des citations, des tours et des pratiques, et peut-être plus encore : le souci du style. Ou du moins le crut-on.

Que les Français écrivent mieux que les Anglais, ce n’est sans doute qu’une illusion, disait Virginia Woolf, mais une illusion qui ne cesse de gagner des soutiens.

C’est donc l’histoire d’une illusion que ce livre raconte.

Gilles Philippe est professeur à l’Université de Lausanne. Il est notamment l’auteur de Le Français, dernière des langues (PUF, 2010) et de Le Rêve du style parfait (PUF, 2013). Il a dirigé avec Julien Piat La Langue litté-raire. Une histoire de la prose en France de Gustave Flaubert à Claude Simon (Fayard, 2009).

Diffusion / Distribution : Harmonia MundiEAN 9782874493249

ISBN 978-2-87449-324-9256 pages – 20 €

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French styleL’accent français de la prose anglaise

Mai 2016