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Dossier Enseignant - BNU · L’exposition Alter ego, ... I. Introduction sur les éléments de programmes concernés p.1 II. Aux origines du mot et de la pratique p.3 III

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Dossier enseignant réalisé par

Christine Butterlin, enseignante de Lettres modernes au Lycée Kléber à Strasbourg

et Françoise Kirner, enseignante de Lettres Classiques au collège Twinger à Koenigshoffen

Missionnées par la DAAC,

Et avec le concours du service Action Culturelle de la BNU et de la commissaire d’exposition Aude Therstappen

L’exposition Alter ego, Amitiés et réseaux du XVIe au XXIe siècle propose une traversée de la pratique du Livre d’amitié dans une perspective chronologique et thématique. Ce dossier offre un aperçu de cet usage pour que l’enseignant maîtrise la géographie, la temporalité et les thématiques du livre d’amitié. Des pistes de préparation à la visite sont proposées, en lien avec les programmes scolaires concernés, ainsi que des prolongements en classe.

Le livret élève (un livret primaire-collège, un livret lycée) permet au public scolaire de découvrir cette pratique. A l’enseignant de choisir les questions qui lui semblent pertinentes, ainsi que la forme de la visite : la classe peut très bien être divisée en groupes. Lors de la réservation de la visite scolaire auprès de la BNU ([email protected]), il est possible de demander une visite guidée rapide de 20 minutes en début de séance. La durée d’une visite lycée est d’environ 1h30, et d’environ 1h pour le primaire/collège. A noter également : les groupes doivent être encadrés à raison d’un accompagnant pour dix élèves.

Une activité ludique est proposée aux élèves avec le matériel à disposition à la fin du parcours de l’exposition : tampons, feutres, collages... pour réaliser une page de leur livre d’amitié.

A noter : l’une des difficultés du principe de cette exposition est que seule une page peut être présentée au public à chaque fois (sauf dans les cas où les livres ont été séparés en feuillets, pour diverses raisons). Mais tous les livres d’amitié de la BNU et de la SAAMS sont sur http://www.bnu.fr/numistral/collections-numeriques/alba-amicorum et il est possible de consulter chaque page de chaque livre.

Sommaire du dossier enseignant

I. Introduction sur les éléments de programmes concernés p.1II. Aux origines du mot et de la pratique p.3III. Constitution des collections présentées p.4IV. Une tradition universitaire, humaniste et réformiste p.5V. Témoignages sur le commerce de l’amitié au XVIIIe siècle p.6VI. De l’amitié p.7VII. Quelle place pour les femmes ? p.8VIII. Des livres d’art(s) p.9IX. Pistes d’exploitation avant et après la visite p.9X. Dossier élève corrigé p.10XI. Sitographie commentée p.12

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LYCEE : L’exposition Alter ego peut intéresser plusieurs entrées des programmes de lycée :

En SecondeEnseignement d’exploration Littérature et société entrée « des tablettes d’argile aux écrans du numérique »En cours de Français séquence sur les « formes de l’argumentation aux XVIIe et XVIIIe siècles » En Histoire « L’Humanisme »

En PremièreEn Français « Le Roman, vision de l’homme, vision du monde »« La question de l’homme dans les genres de l’argumentation du XVIIe siècle à nos jours »

En Première LEn Littérature « Humanisme et Renaissance, mouvement littéraire et culturel européen »

En enseignement de Spécialité Histoire des arts première L« Le statut de la femme artiste »

En Terminale littéraire pour aborder le travail de l’écriture et la genèse d’un manuscrit comme les Faux-Monnayeurs de Gide et en contrepoint du thème central dans l’œuvre de Gide de l’amitié

Langue et Culture de l’AntiquitéHistoire des arts tous niveaux

COLLEGEFrançaisEn 5ème, thématique « Vivre en société, participer à la société » : Avec autrui, familles, amis, réseauxEn 3ème, thématique « Se chercher, se construire » : se raconter, se représenter « Regarder le monde, inventer des mondes » : visions poétiques du monde, notamment le romantisme et les paysages

Arts plastiquesTous niveaux et toutes thématiques

Histoire-géographieEn 5ème, thématique « Transformations de l’Europe et ouverture sur le monde aux XVIème et XVIIème siècles » : l’Humanisme et les réformesEn 4ème, thématique « Le XVIIIème siècle. Expansions, Lumières et révolutions » : l’Europe des Lumières, la circulation des idées« Société, culture et politique dans la France du XIXème siècle » : conditions féminines dans une société en mutation

I. Introduction sur les éléments de programme concernés

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Langue vivante AllemandPour le cycle 4, en LVI comme en LV2, beaucoup de thématiques sont concernées (cette pratique est née dans les milieux germanophones du XVIème siècle et se poursuit encore aujourd’hui) : - Média, modes de communication, réseaux sociaux, publicité- Les langages artistiques et leurs interactions- Ecole et société (pour le parcours des étudiants)- Présence des langues dans l’environnement proche et dans les parcours familiaux- Voyages et migrations - Repères historiques et géographiques- Modes de vie, traditions et institutions

EPI Cette exposition se prête particulièrement bien à un travail en interdisciplinarité, en amont ou en aval d’un enseignement pratique interdisciplinaire, avec la création d’un livre d’amitié comme production finale.

Les thématiques concernées peuvent être :- Information, communication, citoyenneté- Langues et cultures étrangères et régionales (en LCR notamment, avec la spécificité des livres d’amitié alsaciens, où le mélange des contributions en langues allemande et française atteste bien de la particularité de la région d’Alsace, ou encore parce que les contributions nous renseignent sur l’histoire de la région) - Sciences, technologies et sociétés

HISTOIRE DES ARTSDe la même manière, beaucoup de thématiques Histoire des arts peuvent être enrichies par une visite de l’exposition.- Forme et circulations artistiques (IXème-XVème siècles)- Le sacre de l’artiste (XIVème-début XVIIème siècles)- L’art au temps des Lumières et des révolutions (1750-1850)- De la Belle Epoque aux « années folles » : l’ère des avant-gardes (1870-1930)- Les arts à l’ère de la consommation de masse (de 1945 à nos jours)

PRIMAIRE (cycle 3)Français - Se découvrir, s’affirmer dans le rapport aux autres

Langue vivante- Repères géographiques, historiques et culturels de la langue étudiée : en Allemand, pour cette pratique typiquement germanique, avec en prolongement en classe la création d’un livre d’amitié

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En Allemand, Stammbuch signifie plutôt « livre d’origines » et renvoie ainsi à un contexte généalogique. Mais c’est une expression qui date de 1570 et désigne un objet précis. Nous pouvons renvoyer à d’autres terminologies plus éloquentes : Album amicorum, Liber amicorum ou Thesaurus amicorum, album de poésie, livres de souvenirs. Le terme allemand a été en usage également dans d’autres pays pour désigner cet objet particulier : on peut dire que « Le qualificatif a donc voyagé avec l’objet désigné » (cf. catalogue de l’exposition). Il s’agit cependant d’une tradition géographiquement précisément circonscrite aux pays germanophones (Scandinavie, Pologne, Hongrie) mais non implantée en zone méridionale, catholique et en pays latin. Des exemplaires ont circulé mais l’usage ne s’est pas répandu. Ce phénomène naît il y a 450 ans et se propage dans de nombreux milieux sociaux : témoignages riches donc, du point de vue linguistique, musical et artistique.L’inventeur se situe à Wittemberg, ville où Martin Luther (1483-1546) et Philippe Mélanchton (1497-1560), les deux grands artisans de la Réforme, enseignèrent. En effet, l’enthousiasme des étudiants devant la nouvelle doctrine les pousse à vouloir conserver une trace écrite de leurs enseignants. En outre, les inscriptions servent de certificat d’entrée dans d’autres Universités, sortes de carnets de formation. Camerarius (1500-1574), biographe de Luther, livre le plus ancien témoignage de cet usage d’écriture des grands enseignants dans les Livres d’amitié. Souvent le professeur remplissait plusieurs pages.

Montage de cahiers

Au début du XVIe siècle des livres imprimés semblent avoir été transformés après coup en livres d’amitié : un relieur y ajoutait alors des cahiers au début ou à la fin. Le livre d’amitié vient également enrichir des livres d’emblèmes. D’une tradition limitée à des cercles non catholiques, la pratique se diversifie progressivement et s’étend à d’autres cercles et milieux : la haute noblesse européenne y figure en tête et la tradition des voyages d’études également. L’idée était aussi d’obtenir le témoignage et la signature de grands hommes : architectes, mathématiciens…Autre élément marquant du genre : l’abondance d’illustrations en fait également des témoignages artistiques importants, la plupart du temps la personne qui écrit n’étant pas l’auteur des dessins, le scripteur avait recours à des peintres professionnels demeurés anonymes pour la plupart.Les livres d’amitié se caractérisent également par une grande mobilité, cela en fait donc des sortes de récits de voyage en creux. Ils permettent aussi de reconstituer des portraits de leur propriétaire et de leurs compagnons de route. En moyenne un livre d’amitié compte environ quatre-vingts contributions.

II. Aux origines du mot et de la pratique

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1. La collection de la Duchesse AmaliaLa collection de livres d’amitié de la bibliothèque Duchesse Anna Amalia compte près de 1400 pièces datées de 1550 à 1950 et est la plus importante au monde. La sauvegarde de cette collection est due à de nombreux amateurs passionnés.

2. Les collections alsaciennesLa collection de la BNU compte une soixantaine d’exemplaires : elle est composée d’albums de professeurs et de leurs étudiants. Ils sont robustes, vraisemblablement destinés à être emportés en voyage, certains d’entre eux comptent des signatures de personnages importants de leur époque. On y trouve également une pratique des blasons ainsi que des livres de peintres, ornés de précieux dessins. Hormis la collection de la BNU, un fonds importants vient de La Société des Amis des Arts et des Musées (184 livres d’amitié).

3. La collection de la Bibliothèque régionale de Wurtemberg (199 albums)Une collection qui illustre toute la variété du genre : recueils riches en iconographie, utilisation de livres d’emblèmes, usage du papier coloré turc, contributions de personnages célèbres comme F. Hölderlin. Cette collection constitue également un témoignage important sur la reconstitution d’albums à partir de feuillets épars, cette dernière catégorie nécessitant un travail de recherche important pour reconstituer sa naissance.

III. Constitution des collections

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A. Un statut spécifique : Strasbourg, ville bi-confessionnelle

La Haute école de Strasbourg, le très prisé Gymnase Jean STURM obtient de l’Empereur Ferdinand II en 1621 le statut d’université pluridisciplinaire habilitée à décerner des diplômes de doctorat dans quatre grandes disciplines : Philosophie, Droit, Médecine et Théologie, ce qui est une récompense accordée à une grande institution éducative luthérienne. Strasbourg est solidement ancrée dans le luthéranisme et ainsi dans la seconde confession de l’Empire reconnue par la paix d’Augsburg de 1555 à côté de l’église catholique. Plusieurs Universités luthériennes coexistaient dans cette région : Tübingen, Heidelberg et Bâle en Suisse. Fribourg était restée catholique. La ville passe sous l’autorité de Louis XIV en 1681, la religion protestante des habitants de la ville continue néanmoins à être reconnue. Strasbourg est ainsi « une ville libre royale », l’édit de révocation qui mit fin en 1685 à la liberté de culte pour les protestants ne s’y applique pas. Forte de ce statut particulier, l’Université voit s’épanouir l’enseignement du droit. La ville a un caractère original et bi-confessionnel. Cependant, la nouvelle présence catholique à Strasbourg s’incarne dans des représentants célèbres de liens forts avec les souverains Louis XIV, XV et XVI : en particulier, la famille des comtes de Rohan dont le statut est original puisqu’ils dépendaient à la fois de l’autorité française mais également germanique.Le pouvoir royal et sa quête d’autorité s’inscrit également au plan architectural dans la construction du somptueux palais du Prince-évêque à côté de la cathédrale. Au même moment le collège des Jésuites est transféré de Molsheim vers Strasbourg à proximité de la cathédrale dans l’ancienne cour des Frères. Deux universités de confessions différentes se sont ainsi côtoyées pendant une centaine d’années à Strasbourg, une spécificité que seules cinq autres villes germaniques possédaient. Les Rohan contribuèrent beaucoup au rayonnement de la ville. Les jeunes nobles d’Empire protestants vinrent se former à L’Université, la filière Droit y était notamment prestigieuse, ainsi que l’Histoire et la Médecine. Le climat intellectuel de la ville était donc marqué par la tolérance et une certaine ouverture (voir à ce sujet le livre n° 19 de Nicolas Engelhard). L’université catholique épiscopale attirait quant à elle moins d’étudiants.

A la veille de la Révolution, le climat intellectuel de Strasbourg est marqué par une certaine ouverture et la coexistence des confessions et des langues. L’influence des Lumières rend marginales les pensées radicales.Au moment de la Révolution et malgré le soutien de la bourgeoisie protestante à celle-ci, les deux universités sont dissoutes et ce dès 1793. Strasbourg devient avant tout une place d’armes et un camp militaire. Elle perd alors pour longtemps son prestige universitaire.

L’influence protestante et l’admiration pour les grands théologiens est bien visible dans les livres d’amitié d’étudiants ou de maîtres d’école strasbourgeois, et ce jusqu’au XIXème siècle (voir livres n° 61, 107 et 108).

IV. Une tradition universitaire, humaniste et réformiste

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B. Formation des étudiants : Les « Humanités »

Les Livres d’amitié d’étudiants les plus anciens datent de 1535. Les villes de Stuttgart et Göttingen possèdent des fonds importants. La tradition des Emblèmes (ajout d’une image ou sentence) et le goût du XVIe siècle pour les messages chiffrés nous renseignent en filigrane sur les parcours des étudiants, universités choisies, professeurs et maîtres, liens avec les condisciples.Les Universités protestantes sont des vecteurs privilégiés de la pratique d’où les nombreuses collections du Rhin Supérieur, de Tübingen et Göttingen. Les étudiants peuvent alors suivre les cours de professeurs représentatifs de l’orthodoxie luthérienne.

Par leur système de dédicaces, les livres d’amitié permettent parfois de renseigner l’histoire des sciences. Ainsi, le 8 mars 1629, à Florence, Galilée écrit dans l’album de J. F. Weiss (un médecin) une dédicace avec le dessin d’une parabole. Une des hypothèses envisagée est que 10 ans avant la publication de ses Discorsi, le savant connaissait la forme mathématique de la trajectoire d’un projectile se déplaçant horizontalement.

Les livres d’amitié nous révèlent cette vie universitaire et l’influence protestante (voir les gravures au mur n° 5m et 6m).

Le livre d’amitié est utilisé dans les sphères professionnelles, comme par exemple le livre d’amitié de la corporation strasbourgeoise de l’Echasse dont le siège (le poêle) est situé 15, rue du Dôme et qui regroupe des métiers nombreux et très différents : orfèvres, bijoutiers, relieurs, peintres, sculpteurs, imprimeurs, typographes, libraires, graveurs, faiseurs d’instruments et faïenciers. Dans ce cas ce livre s’apparente au livre d’or actuel. Les corporations ayant été supprimées en 1791, les collections se dispersèrent. Ce livre d’amitié précieux permet de situer les métiers artistiques dans la ville, il comporte cinquante-trois illustrations qui correspondent à la variété des métiers (le montage des illustrations n’est pas chronologique) : l’orfèvrerie y domine nettement à travers les métiers du métal.

V. Témoignages sur le commerce de l’amitié au XVIIIe siècle

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Amitiés illustres du XVIe au XVIIIeProgressivement les grandes amitiés acquièrent une dimension littéraire. A cet égard la Renaissance marque un tournant avec la naissance d’une forme de sociabilité épistolaire entre savants lettrés. Ces échanges consacrent l’amitié « idéale », les lettres sont montrées, collectionnées et quelquefois publiées. C’est dans cette volonté ostentatoire que vient se ranger l’« Album amicorum », il ne s’agit pas alors d’amitiés intimes ou privées mais de liens sociaux. La pratique de la lettre familière directement inspirée des Lettres familières de Pétrarque s’invente au XVIe siècle dans les cercles humanistes. Les modèles sont Cicéron mais également Platon. Cette pratique de la lettre s’apparente à une conversation, même si le style en est plus informel ; ce type de lettre ne s’apparente pas encore à l’échange intime. Progressivement à partir du XVIIe siècle la pratique épistolaire s’élargit et les femmes s’y inscrivent également. A cet élargissement des milieux correspond également un changement de statut, l’échange épistolaire marque la naissance du concept d’« honnêteté» et vient renforcer le savoir-vivre et la sociabilité des salons.

L’Amitié s’enseigne dans les livresLe culte de l’amitié s’appuie sur les références antiques : Cicéron, Platon, Plutarque, Sénèque, Saint-Augustin. Erasme, lui aussi, n’a cessé d’encenser l’amitié dans ses écrits, notamment dans ses Adages. On trouve également un discours sur l’amitié dans les traités, chez Montaigne, La Rochefoucauld ou La Bruyère.

L’Amitié par l’exemple : ancêtres des traités d’éducationOn s’intéresse aux modèles de vertu : Achille et Patrocle, Oreste et Pylade, des figures mythiques. L’amitié sera également sanctifiée au XVIIIe siècle, sous l’influence des idées de la franc-maçonnerie. Les genres sont nombreux : tombeaux, vies, mémoires… On peut penser à Rousseau dans Les Confessions, ou Saint-Simon dans ses Mémoires mais la force de l’amitié s’exprime par la valeur unique de la relation comme c’est le cas entre Montaigne et La Boétie dont le modèle n’est porté aux nues qu’au XVIIIe siècle. L’amitié devient alors plus apaisée : un modèle de vertu et de bienveillance. C’est bien le XVIIIe siècle qui accordera une importance capitale à cette forme de sociabilité.Hölderlin, dans sa contribution au livre d’amitié de Daniel Andreas Manskopf (voir le livre n°88), évoque le personnage de Diotima qui apparaît dans Hypérion. Il s’agit d’un texte conséquent sur la vertu et la beauté intérieures dans la tradition orale du genre. Dans ce texte, on peut lire en creux l’influence de la rencontre de Hölderlin avec Suzette Gontard-Diotima mais ici, il parle surtout de la vocation du poète : rester fidèle à sa vision de la beauté sans tomber ni dans l’arrogance ni se fondre dans la masse. C’est un texte poétologique.

VI. « De l’Amitié

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Au XVIIème siècle, le livre d’amitié devient un témoignage d’une amitié douce, vertu bienheureuse et surtout littéraire. Avec l’essor du culte de l’amitié et l’esprit des Lumières, les femmes sont alors admises dans ce culte de l’amitié, comme le montrent les livres n° 103 et 104 pour le début du XVIIème siècle. Le livre n° 79 (fin du XVIIIème siècle) montre le dessin d’un temple de l’amitié. Le livre d’amitié de Sophie André n° 77 porte le titre de Stammbuch, et les contributions sont en langue française ou allemande. Les témoignages amicaux, dont celui du Pasteur Jean-Frédéric Oberlin, nous donnent un aperçu du cercle amical, géographique et intellectuel tissé par Sophie André. En effet, les signataires gravitent autour de la famille du pasteur Oberlin et de ses principes d’instruction de la petite enfance autour de la commune du Ban- de-La-Roche.Au XIXème siècle, cette pratique du livre d’amitié deviendra même majoritairement féminine (et bourgeoise), entre carnet d’autographes, bottin mondain ou de caractère plus intimiste.Ces albums se caractérisent alors par une certaine uniformité des contributions, prônant les vertus féminines d’effacement, de fidélité et d’humilité. Ces conseils moraux révèlent la place assignée aux femmes de la bourgeoisie du XIXème siècle.Les livres d’amitié de femmes présentés ici (voir livres n° 68 et 72) sont un support privilégié pour les arts féminins et comportent de délicats dessins, aquarelles, crayons, encres, broderies, papiers découpés ou mèches de cheveux (voir livres en vitrine n° 33v et 34v). Les inscriptions féminines dans les livres d’amitié sont souvent illustrées par des motifs floraux.Parmi les livres présentés qui révèlent une certaine codification du genre, un album se singularise : celui de la baronne Marie de Walouïeff, tenu entre les années 1845 et 1890 (livre n° 98). Son livre d’amitié n’est pas au format italien, mais plus au format français. La baronne collecte des autographes émanant des personnalités les plus en vogue du XIXème siècle (George Sand, Léon Gambetta, Giuseppe Garibaldi, Victor Hugo, Jacob Grimm, Hans Christian Andersen, Alexandre Dumas…). Sa démarche est également particulière : elle envoie au contributeur un feuillet vierge. Une photographie signée accompagne en général la dédicace. Cependant, il ne s’agit pas de témoignages d’amitié au sens classique du terme et dans son acception jusqu’alors dévolue aux livres d’amitié : les dédicaces présentent une certaine distance affective. Néanmoins, un autre regard, plus quotidien, nous est offert sur ces personnalités et sur cette Europe politique et culturelle du XIXème siècle. On peut lire cet album en entier sur Numistral ou bien sur les Ipads en consultation dans la salle d’exposition.

VII. Quelle place pour les femmes ?

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Le genre est très codifié. Cette pratique devient assez rapidement (XVIIe et XVIIIe siècles) majoritairement réservée à la noblesse. La contribution se compose en général de deux pages écrites en regard, une sentence, une devise ou un adage au sommet de la page, au milieu une armoirie et la dernière partie de la page consacrée à la dédicace, au lieu, à la date et à la signature.

Différents savoir-faire et techniques sont convoqués : - De l’illustration avec des dessins de Martin Schongauer ou de Brentel recopiés. Danses macabres, memento mori, allégories sont fréquemment représentés.- Des partitions de musique comme dans le livre d’amitié de Caroline Molique (livre n° 65), issue d’une famille de musiciens, et également des dédicaces d’autres musiciens, dont Franz Liszt. Il contient du papier à musique et des emblèmes musicaux. Son père Bernhard Molique était violoniste, et le livre d’amitié de la fille montre bien le réseau « musical » de cette famille. - Des maquettes, dans le livre d’amitié de Caroline-Louise Pfeffel (livre n° 79) avec un décor qui prend alors une dimension ludique : ici, une illustration avec un temple de l’amitié est faite en papier découpé et dévoile un autre dessin lorsqu’on la tire à l’aide d’une ficelle : une statue et une inscription. Le décor se fait minutieux et inventif.- De la broderie, avec le superbe travail dans le livre d’amitié de Paul Jenish (livre n° 60).- Des silhouettes (livres 78, 81 et 97).- Des canivets (livre 33v).

Avant l’exposition :

- Travail possible avec les élèves sur le mot « alter ego », son sens, ses synonymes et la tradition latine sous-jacente. Créer un horizon d’attente sur la notion de « livre d’amitié ».

- Recherches élèves sur la notion d’Humanités (compagnonnage, formation intellectuelle)

- Recherches sur les métiers de la Corporation de l’Echasse à Strasbourg et de la Lanterne

- Recherches sur le vocabulaire : clerc, humaniste, érudit, chanoine…

VIII. Des livres d’art(s) : des techniques et un savoir-faire

IX. Pistes d’exploitation avant la visite

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Avertissement : il s’agit ici de la correction du livret « Lycée ». On retrouve les mêmes questions mais moins nombreuses dans le livret « Collège ». Pour la question sur Elie Brackenhoffer, les élèves doivent revenir à la première section.

I. Naissance d’une pratique

• Où ? Lisez les cartels dans les vitrines et repérez les différentes villes. Entourez-les dans la carte.Que constatez-vous ?Pratique germanique et liée à la Réforme• Qui ?Observez les livres n° 23 et 25. Dessinez les symboles et attributs des propriétaires de livres.A quel milieu renvoient-ils ? Milieu étudiant et surtout protestantRegardez le livre n° 3. Quels objets peut-on retrouver sur votre propre bureau ?• Leur quotidien Sur le mur de droite, que découvre-t-on sur un célèbre lycée strasbourgeois ? Panorama de la vie du Lycée Sturm, qui est uniquement désigné par le terme « Gymnase », depuis le XVIème siècle jusqu’au XIXème : hommages aux professeurs défunts, jugement d’un élève fauteur de troubles, menu d’une semaine, abondance de soupes ! • Leurs études Sur le mur de gauche, observez les gravures : qui sont ces personnages ? Retrouvez-vous des points communs entre eux ? Il s’agit de professeurs strasbourgeois, dont on retrouve fréquemment les signatures dans les livres d’étudiantsA votre avis, quel est l’intérêt d’avoir la signature de son professeur ? Le livre d’amitié ressemble à un cursus honorum ou un carnet de formation et indique dans quelles universités et avec quels maîtres l’étudiant a fait ses Humanités• Après le travail Sur le mur du milieu, quelle est l’activité favorite des étudiants d’après ces gravures ? Ces gravures représentent des rixes fréquentes entre la garde de Strasbourg et les étudiants

II. Un genre noble

• Dans cette section, quel nouvel élément apparaît ? Les blasonsDessinez-en un. Dans quels cercles se diffusent à ce moment-là les livres d’amitié ? Ils se diffusent dans les cercles nobles• Observez la vitrine consacrée à Elie Brackenhoffer. Selon vous, qu’est-ce qu’un voyage de formation ?A quelles époques ces voyages commencent-ils ? XVIème et XVIIème sièclesQuel mouvement naît à cette époque en Europe ? L’Humanisme

X. Livret élève corrigé

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III. Le commerce de l’amitié

• Observez attentivement et les illustrations des livres n° 47, 48, 56, 53, 62 et 65. Pour chacun, quel métier est illustré ? Grâce à quels éléments avez-vous reconnu ce métier ?

• Parmi ces métiers, certains se sont regroupés. Savez-vous comment s’appelle ce regroupement d’artisans ? En vous promenant dans cette section, retrouvez et nommez deux groupements de métiers strasbourgeois. Une corporation. A Strasbourg, il s’agit de la corporation de l’Echasse, des menuisiers ou des tanneurs (au mur).

• Penchons-nous sur la vitrine consacrée à Brentel. Observez les pages de ce livre. Qu’y retrouvez-vous exclusivement ? Quel était le métier de Brentel à votre avis ? Des dessins et illustrations. Brentel était peintre.Choisissez une des illustrations et décrivez ses attributs. Comment appelle-t-on ce genre pictural ? Il s’agit d’une allégorie.

IV. Les affinités électives et V. Au bonheur des dames

• Repérez les livres d’amitié appartenant à des hommes et ceux appartenant à des femmes. Datez-les. Hommes : n° 85 : XVIIIème siècle n° 73 : XIXèmeFemmes : n° 77 : début XIXème siècle n° 71 : milieu du XIXème siècle

Remarquez-vous des différences entre eux ? Oui, la pratique féminine du livre d’amitié est bien plus fréquente au XIXème siècle, et ces derniers s’ornent de poèmes et de décorations nouvelles : papier découpé, broderie…

• Comment les femmes investissent-elles le genre du livre d’amitié ? Elles vont l’utiliser mais dans un cercle plus intime, en prônant certaines vertus attendues telles que la défense de la force de l’amitié, sous forme de maximes ou de poèmes, éloge de l’amie, principes religieux et fragments plus abstraits sur le bonheur.

Relevez des exemples de nouveautés dans l’illustration et dans la dédicace.Quelle nouveauté aimeriez-vous avoir dans votre livre d’amitié ?

• Observez le livre n°98. Quel illustre personnage appose sa signature ici ? Victor Hugo•A quelle pratique actuelle peut-on comparer le livre d’amitié de la baronne Walouïeff (projection au mur) ? A un autographe. Pratique de « fan »

Métiers Élémentsn°47 Chirurgien Un malade allongé sur une table d’opération, instruments de médecine…n°48 musicien militaire Uniformes, instruments de musiquen°56 Peintre Peinture d’une tête de statue, probablement dans un ateliern°53 Passementier Le fil et le tissage du motifn°65 Musicien Partitions et notesn°62 professeur, mathématicien Le globe, les différentes langues, tracés de compas… et orientaliste

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Métiers Élémentsn°47 Chirurgien Un malade allongé sur une table d’opération, instruments de médecine…n°48 musicien militaire Uniformes, instruments de musiquen°56 Peintre Peinture d’une tête de statue, probablement dans un ateliern°53 Passementier Le fil et le tissage du motifn°65 Musicien Partitions et notesn°62 professeur, mathématicien Le globe, les différentes langues, tracés de compas… et orientaliste

• Tous les livres d’amitié de la BNU et de la Société des Amis des Arts et des Musées de Strasbourg sont disponibles en version numérique sur Numistral, la bibliothèque numérique de la BNU : http://www.bnu.fr/numistral/collections-numeriques/alba-amicorum

• Sur la ville de Strasbourg et ses corporations les plus célèbres, on peut envisager des prolongements en cours d’Histoire ou d’Histoire des Arts.Ce pdf en présente une histoire claire :http://www.otstrasbourg.fr/images/coporation-metier.pdf

Un travail précis sur l’organisation des différentes corporations, leur histoire, les Armoiries et l’organisation des grades, apprentis, compagnons, et maîtres est également possible à partir de cette exposition virtuelle très riche des Archives de Strasbourghttps://archives.strasbourg.eu/expositions/salle-les-corporations-11/n:335

• L’Amitié a fait l’objet d’une question de programme en classe préparatoire scientifique. Le site Magister recueille de manière complète et pertinente, à la fois, la définition, mais surtout les principales références philosophiques et littéraires sur la questionDéfinition http://www.site-magister.com/prepas/page1a.htm#axzz4Pi5jC4Vq

Renvoi aux principales références http://www.site-magister.com/prepas/page7a.htm#axzz4RtIUYAy0 • Dans le cadre de séquences d’Histoire ou de Littérature en Première ou d’enseignement d’exploration Littérature et Société, on peut envisager des prolongements sur les aspects techniques et historiques des formes d’écritureshttp://classes.bnf.fr/ecritures/

http://www.hominides.com/html/dossiers/ecriture-origine-naissance-premieres-ecritures.php

http://classes.bnf.fr/dossitsm/humalumi.htm

Langues et cultures de l’Antiquité, le site Méditerranée offre un large panorama d’amitiés antiques que l’on peut exploiter avant ou après la visite de l’expositionhttp://www.mediterranees.net/index_antiquite.html

XI. Sitographie commentée

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