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Revue Politiques et Management Public 36/1 Janvier-Mars 2019 /75-92 *Adresse mail : [email protected] doi :10.3166/pmp.36. 2019.0005 © 2019 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés Ariane Marie Galy Sciences Po Toulouse- Laboratoire des Sciences Sociales 2 Ter Rue des Puits Creuses 31000 Toulouse Université de Montréal Résumé En nous fondant sur l’analyse de Global Entry - un programme de gestion automatisée des mobilités aux frontières aéroportuaires des États-Unis, cette contribution s’intéresse aux mu- tations de la gestion des mobilités aux frontières. Par l’adoption d’une démarche socio-histo- rique adjointe à l’approche par les instruments, nous soulèverons que, si une certaine conti- nuité dans le choix de l’instrument existe, l’enjeu que cet instrument est censé traiter connaît une mutation intimement liée à la refondation de l’agence des douanes et de la protection des frontières des États-Unis à la suite des évènements du 11 septembre 2001. L’étude de cette mutation met en lumière une redéfinition de la division du travail des officiers CBP dans leurs pratiques d’admission des voyageurs aux États-Unis. Enfin, la compréhension de ces muta- tions s’avère essentielle afin de rendre compte des rapports entretenus entre gouvernants et gouvernés ainsi qu’entre bureaucratie et bureaucrates en matière de processus décisionnel dans un secteur d’action publique caractérisé par l’opacité. © 2019 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés Mots clés : contrôle frontalier, automatisation, socio-histoire, instrumentation, États-Unis. Abstract Shifts in the management of mobilities at the U.S. Border: an analysis of the Global Entry Program. Based on the analysis of the Global Entry - an automated mobility mana- gement program of the United States’ air ports of entry, this contribution interests itself in the transformation of border mobility control. Adopting a socio-historic lens conjoint- ly with the instrumentation approach to public policy, it is suggested that if a certain continuity in the choice of the instrument exists, the core objective of the instrument’s implementation has shifted with the re-establishment of the United States’ Customs and Border Protection agency in the aftermath of 9/11. The study of this shift brings into light Les mutations de la gestion des mobilités aux frontières des États-Unis. Une analyse du programme « Global Entry » 05 Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur pmp.revuesonline.com

des États-Unis. Une analyse du programme

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Revue Politiques et Management Public 36/1 Janvier-Mars 2019 /75-92

*Adresse mail : [email protected]

doi :10.3166/pmp.36. 2019.0005 © 2019 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

➤ Ariane Marie Galy Sciences Po Toulouse- Laboratoire des Sciences Sociales

2 Ter Rue des Puits Creuses 31000 Toulouse Université de Montréal

Résumé

En nous fondant sur l’analyse de Global Entry - un programme de gestion automatisée des mobilités aux frontières aéroportuaires des États-Unis, cette contribution s’intéresse aux mu-tations de la gestion des mobilités aux frontières. Par l’adoption d’une démarche socio-histo-rique adjointe à l’approche par les instruments, nous soulèverons que, si une certaine conti-nuité dans le choix de l’instrument existe, l’enjeu que cet instrument est censé traiter connaît une mutation intimement liée à la refondation de l’agence des douanes et de la protection des frontières des États-Unis à la suite des évènements du 11 septembre 2001. L’étude de cette mutation met en lumière une redéfinition de la division du travail des officiers CBP dans leurs pratiques d’admission des voyageurs aux États-Unis. Enfin, la compréhension de ces muta-tions s’avère essentielle afin de rendre compte des rapports entretenus entre gouvernants et gouvernés ainsi qu’entre bureaucratie et bureaucrates en matière de processus décisionnel dans un secteur d’action publique caractérisé par l’opacité. © 2019 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Mots clés : contrôle frontalier, automatisation, socio-histoire, instrumentation, États-Unis.

Abstract

Shifts in the management of mobilities at the U.S. Border: an analysis of the Global Entry Program. Based on the analysis of the Global Entry - an automated mobility mana-gement program of the United States’ air ports of entry, this contribution interests itself in the transformation of border mobility control. Adopting a socio-historic lens conjoint-ly with the instrumentation approach to public policy, it is suggested that if a certain continuity in the choice of the instrument exists, the core objective of the instrument’s implementation has shifted with the re-establishment of the United States’ Customs and Border Protection agency in the aftermath of 9/11. The study of this shift brings into light

Les mutations de la gestion des mobilités aux frontières des États-Unis. Une analyse du programme « Global Entry » 05

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a redefinition of the division of labor regarding border admission practices. Lastly, it is our understanding that these shifts are key to understand the relationships between the gover-ning and the governed as well as between bureaucracy and bureaucrats with regards to the decisional process in public sectors characterized by opacity. © 2019 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Keywords: border control, automatization, socio-history, instrumentation, United States.

Introduction

Les travaux portant sur les « politiques de frontières » (Guiraudon, 2008) ont connu ces dernières années un nouvel élan. L’identification des effets classificatoires du déploiement de technologies de contrôle des flux est l’un des objets de ces travaux (Amoore, 2006 ; Ceyhan, 2006 ; Cote-Boucher, 2008 ; Lyon, 2007 ; Pötzsch, 2015), l’aéroport constituant un terrain d’enquête privilégié (Adey, 2003, 2004 ; Bourne, Johnson, et Lisle, 2015 ; Crosby et Rea, 2016 ; Valkenburg et van der Ploeg, 2015). Les annonces du déploiement de « nouvelles technologies 1 » suite aux évènements du 11 septembre ont pu laisser croire que l’on assistait à une rupture en matière de contrôle des flux. Cependant, l’étude histo-ricisée de « l’instrumentation » (Lascoumes et Le Galès, 2004) des frontières démontre que les évènements du 11 septembre ne constituent pas le point de départ d’une problé-matisation du franchissement de la frontière comme porteur de risques (Ceyhan, 2004a, 2004b, 2008, 2010 ; Palluault, 2011). Au contraire, on assiste à une reformulation de cette problématique (Lippert et O’Connor, 2003) dans laquelle les instruments sont encastrés et affectent la décision des professionnels du contrôle frontalier2. Interroger le changement ne reviendrait donc pas à interroger uniquement les conséquences d’un évènement sur le déploiement de ces « technologies de sécurité » (Ceyhan, 2006) et leurs implications sur les procédures d’admission. Cette perspective courrait le risque de cristalliser les transfor-mations du processus décisionnel d’admission par ces instruments de sécurité autour de « moments forts » renvoyant l’incorporation d’une perspective historique dans l’analyse des instruments à « une question de timing » (Baudot, 2014 : 202). Comme le soulignent Anthony Amicelle, Claudia Aradau et Julien Jeandesboz (2015), ces instruments ont leurs « histoires propres ». L’étude de leurs trajectoires constituerait donc une clé d’entrée pour interroger les transformations à l’œuvre en matière de gestion des mobilités aux mêmes titres que de nombreux chercheurs s’inscrivant dans l’approche de l’instrumentation l’ont démontré pour d’autres d’objets (Delori, 2006 ; Mégie, 2006 ; Lascoumes, 2007 ; Palier, 2004 ; Gauthier et Simard, 2011). Dans cette perspective, il nous paraît donc nécessaire de porter une attention sur les enjeux et effets du déploiement de ces instruments afin de souligner les mutations des modalités de la gestion des flux.

1U.S. Senate, Committee on Foreign Relations, Hearing on Post-9/11 Visa Reforms And New Technology: Achieving The Necessary Security Improvements in a Global Environment », October 23 2003. Référence : S. Hrg. 108-4352Comme l’indiquent Emmanuel-Pierre Guittet et Julien Jeandesboz (2010) les technologies de sécurité sont à la fois constitutives et vecteurs de la sécurisation, ils génèrent donc des effets propres.

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Évoquer « la gestion des flux » et plus spécifiquement « la gestion des mobilités » relève d’un parti pris. Se concentrer sur « l’acte d’admission », nous permet plutôt de considérer ses implications quant à la « gouvernance » ou aux « régimes des frontières ». Ces considérations nous amènent donc à choisir d’interroger les mutations de la gestion des flux par l’étude relationnelle et historicisée des instruments de l’admission automatisée des voyageurs3, en tenant compte des idées et pratiques qui l’entourent (Côté-Boucher, Infantino, et Salter, 2014 :198 ; Dubois, 2003 : 348).

Cette contribution s’inscrit à la jonction d’un dialogue fécond sur les apports de la démarche socio-historique à l’étude des instruments (Baudot, 2014) et des actions (Dubois, 2003). À partir de l’étude de « Global Entry », elle s’intéresse à l’incorporation de la « rapi-dité » comme moyen de régulation des voyageurs lors de leurs arrivées aux États-Unis et de ses effets sur la procéduralisation de l’admission.

Afin de mener à bien notre propos, nous rendrons compte de la trajectoire de Global Entry en réinscrivant cet instrument dans l’histoire de l’élaboration d’instruments de gestion automatisée des voyageurs aux frontières. C’est-à-dire « historiciser » au sens de « contextualiser » (Buton et Mariot, 2006). Ce « détour historique » (Payre et Pollet, 2005 :150) nous permet d’entrevoir différentes conceptions du voyageur et du risque que le franchissement de la frontière par ce dernier pourrait engranger. Par extension, une mutation de l’enjeu de cet instrument retentit au niveau des pratiques déployées par les officiers CBP afin d’apprécier le « risque » qu’un voyageur pourrait poser si l’admission est autorisée4. Au-delà de la qualification de voyageur « à faible risque » et « à haut risque », Global Entry induit une appréciation du niveau de risque des voyageurs en vertu de leur adhésion ou non au programme.

Notre démonstration s’appuie sur une recherche sur documents de première main adjointe à la mobilisation d’entretiens semi-directifs auprès d’officiers hauts-gradés de l’agence des douanes et de la protection des frontières. Une part conséquente de notre analyse se fonde sur une étude croisée de la littérature grise traitant de notre objet de recherche par diffé-rentes instances législatives et exécutives des États-Unis. Dans une perspective similaire à « l’observation historique » décrite par François Buton (Buton, 2008) nous avons traité nos sources comme des indices et comme moyens d’immersion dans le « monde des officiers CBP » pour ainsi pallier à l’impossibilité d’une observation de l’utilisation des instruments en temps réel et de rencontrer des officiers de première ligne aux frontières. Il a été question de « pister » ces instruments de gestion automatisée des voyageurs afin de comprendre comment est pensée et actée la gestion des mobilités, les mutations se dévoilant à nous au fur et à mesure de notre enquête. L’objet de notre démonstration n’est donc pas autant de déchiffrer une relation causale entre différentes variables préconçues afin de mettre en évidence pourquoi l’instrument Global Entry a été adopté (Hall, 2006) que d’effectuer une comparaison dans le temps entre Global Entry et l’instrument INSPASS qui le précède5

3 Par instrument nous faisons référence à : « un dispositif à la fois technique et social qui organise des rap-ports sociaux spécifiques entre la puissance publique et ses destinataires en fonction des représentations et des significations dont il est porteur » (Halpern, Lascoumes et Le Galès, 2014 : 3)4Nous distinguons entre l’admissibilité du voyageur qui se présente à l’officier pour l’inspection et l’admis-sion du voyageur qui a acquis l’autorisation d’entrée et donc de sortir du Centre d’Inspection Fédérale5 Cette démarche méthodologique a par ailleurs été mobilisée par Jérome Aust (Aust, 2013) afin d’étudier la dynamique du rapprochement des universités et de ses effets au cours de deux périodes distinctes.

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pour traiter la question d’une mutation de l’enjeu des instruments de gestion automatisée des voyageurs et des effets que cette mutation implique sur « l’acte d’admission ».

Par ce détour historique et la mise à nu des mutations en cours aux États-Unis en matière de contrôle frontalier il sera enfin possible de discuter des effets de ces mutations sur le processus décisionnel d’admission des passagers aux États-Unis. C’est-à-dire mettre l’accent sur ce qui par la mise en œuvre de ces instruments devient la focale des officiers dans la poursuite de leur mission de contrôle frontalier. Ceci sera l’occasion de discuter des répercussions [possibles] des mutations cognitives sur les pratiques mobilisées par les officiers dans la poursuite de leurs missions d’admission des passagers et de protection des frontières.

Présentation de « Global Entry »

« Global Entry » est un « programme de voyageurs de confiance » (Trusted Traveler Program) établi par l’agence des douanes et de la protection des frontières états-unienne (Customs and Border Protection ou CBP). Rendu permanent le 6 février 2012, citoyens et résidents permanents des États-Unis ainsi que certains citoyens d’États tiers membres de Global Entry bénéficient d’un contrôle aux frontières rapide et automatisé. Suite à une vérification des antécédents et un entretien avec un officier de l’agence dans un centre d’adhésion, les voyageurs déclarés « dignes de confiance » ne sont pas – sauf en cas de contrôle aléatoire – soumis à une inspection individuelle avec un officier de l’agence lors de leur arrivée aux États-Unis. Si l’inspection des citoyens des États-Unis s’apparente davantage à un contrôle d’identité, chaque voyageur doit néanmoins acquérir une « autorisation d’entrée » de la part d’un officier de l’agence des douanes et de la protection des frontières afin de quitter le centre d’inspection fédérale et ainsi officiellement entrer aux États-Unis. Cette autorisation - symbolisée par un tampon dans le passeport - est conditionnée par la détention d’un titre d’identification (passeport biométrique), la détention d’une autorisation de voyage (Visa, ESTA-pour voyageurs étrangers) et le déroulement d’un entretien avec un officier. Cependant pour les voyageurs empruntant le « corridor Global Entry », le voyageur utilisant un kiosque, scanne son passeport, soumet ses empreintes digitales, est pris en photo et remplit sa déclaration douanière. Le kiosque lui imprime un reçu lui permettant de quitter le centre d’inspection fédérale en moins d’une minute.

1. Histoire(s) de rapidité

Aux États-Unis, le déploiement d’instruments permettant une inspection rapide et auto-matisée des voyageurs ne débute pas avec Global Entry. Cependant, il convient de noter que l’enjeu de ces derniers se différencie en fonction du contexte et des pressions exercées sur l’agence en charge de l’inspection et de l’admission des passagers. Ainsi, ce qui relève ici d’une mutation ne réside pas tellement dans la « nouveauté » de l’instrument ou de l’objectif que ce dernier matérialise (Lascoumes et Simard, 2011) – diminuer le temps d’attente des voyageurs lors de leur inspection dans le Centre d’Inspection Fédérale de l’aéroport (FIS) - que dans

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l’insertion de ce dernier dans l’accroissement du type de risque faisant l’objet d’un contrôle aux frontières. En l’espèce, on remarque une agrégation du risque qui est considéré comme devant être évalué au moment du franchissement de la frontière : du risque prioritairement migratoire s’ajoute une préoccupation pour le danger économique, agricole et criminel que le franchissement d’un voyageur pourrait poser aux États-Unis. De cette sédimentation des risques à être évalué lors du contrôle d’un individu aux frontières des États-Unis c’est la perception même du voyageur qui connaît une mutation. Loin de se limiter à un enjeu d’identification du voyageur qui se présente au poste frontalier, par l’institutionnalisation de la rapidité aux frontières c’est bien l’évaluation du voyageur qui s’érige en priorité.

1.1. Raisonner la rapidité

Le raisonnement de la rapidité aux frontières étudié sous le prisme de l’histoire des programmes d’automatisation des entrées aux États-Unis soulève l’accélération d’une pré-occupation sécuritaire parmi les professionnels du contrôle frontalier. En effet, alors que les premiers programmes d’automatisation résorbaient l’enjeu de la rapidité à un raisonnement tout d’abord économique – la frontière étant perçue comme un espace d’échanges commerciaux – le développement de programmes contemporains d’automatisation des entrées comme Global Entry témoigne l’affirmation d’une approche conciliatoire du contrôle frontalier : protéger la frontière des dangers extérieurs tout en facilitant les flux économiques transfrontaliers.

Premièrement sous le nom de « programme pilote en vue de faire payer des frais d’utilisa-tion à certains ports d’entrée terrestres », INS a posé les jalons du développement des premiers instruments d’inspection rapide et automatisée des voyageurs6. L’assise juridique de ces instru-ments était la « Public Law 101-515 » du 5 novembre 1990 autorisant l’Attorney Général après consultation auprès du Secrétaire du Trésor et le Congrès de développer de tels instruments. Leur déploiement était limité spatialement à la frontière avec le Canada (Public law 103-121 du 27 octobre 1993) puis étendu à la frontière entre la Californie et le Mexique (Public law 103-217 du 26 août 1994)7 en lien avec l’établissement d’une coopération entre cet État et le Mexique. L’argumentation pour le déploiement de ces instruments était avant tout économique : une forte augmentation des voyageurs internationaux, un manque d’inspecteurs aux ports d’entrée d’où la nécessité de combler des besoins financiers pour diverses missions de l’INS8.

Sur ces bases, deux instruments pilotes d’inspection automatisée aux frontières ont été déployés en 1995 : Automated Permit Port (APP) et Dedicated Commuter Lane (DCL). En dépit de spécificités opérationnelles, ces derniers partageaient une portée et des principes communs : la définition d’une catégorie d’individus pouvant bénéficier d’une inspection

6Immigration and Naturalization Service (Department of Justice), Interim Rule, « Establishment of Pilot Programs to Charge a User Fee at Selected Ports of Entry », May 13 1991. Federal Register, volume 56, no. 92 p.21917-21921. Référence 56 FR 21917. Cette réglementation rend compte des critères retenus par INS pour l’établissement de ces instruments. Elle est en quelque sorte une “fiche de route” initiale des critères qui pourraient être pris en compte lors de leur élaboration et déploiement futur.7Les programmes pilotes avaient pour première date d’expiration le 30 septembre 1993 puis le 30 sep-tembre 1996 avant d’être de nouveau renouvelés.8Les missions énumérées incluent : le recrutement d’inspecteurs supplémentaires, paiement d’heures supplémentaires, financement de programmes pour le « contrôle des non-immigrants », acquisition de technologies et d’entraînement pour distinguer l’utilisation de faux documents.

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automatisée. Avec APP, les adhérents pouvaient franchir certains ports d’entrée terrestres en l’absence de la présence d’inspecteurs, tandis que l’adhésion à DCL permettait aux individus l’accès à une inspection par « voie expresse ». Les heures d’opérations d’APP étaient limitées et ce dernier était exclusivement déployé à la frontière américano-canadienne tandis que DCL était aussi accessibles le long de la frontière entre l’état de la Californie et le Mexique9. L’adhésion pour ces deux instruments n’était acquise que suite à une ins-pection, identification et sélection effectuées en amont par un officier d’immigration. En outre, l’adhésion était ouverte à tous citoyens des États-Unis et non immigrés déterminés comme éligibles par le Commissionnaire de l’agence10.

Un instrument d’inspection automatisée a aussi été déployé au sein de certains aéroports. Il s’agissait d’INSPASS (Immigration and Naturalization Service Passenger Accelerated Service System)11. Mandaté par le Congrès américain à limiter le temps d’attente des voyageurs dans le FIS à 45 minutes, INS a avancé INSPASS comme une solution12. Dans le cadre de ce « service13 », l’entretien entre inspecteur INS et voyageurs membres d’INSPASS était remplacé par un kiosque. Ce kiosque identifiait le voyageur et l’admettait à sortir du FIS14. Pour le porte-parole d’INSPASS, l’instrument était orienté vers les voyageurs fréquents (pour être éligible, le voyageur devait se rendre aux États-Unis au moins trois fois par an) et de faible risque15 qui, pour ces deux raisons, ne nécessitaient pas d’être inspectés à chaque arrivée aux États-Unis16.

Cependant, INSPASS n’a pas été couronné de succès en dépit des retours généralement positifs exprimés par les adhérents17. En effet, comme l’extrait d’entretien entre Doris Meisner et les membres de la Commission du 11 septembre le signale, la technologie utilisée afin

9Immigration and Naturalization Service (Department of Justice), Interim Rule, « Collection of Fees Under the Dedicated Commuter Lane Program ; Port Passenger Accelerated Service System (PORTPASS) Program, September 29, 1995, Federal Register, volume 60 no.189 p.50386-50399. Référence : 60 FR 5038610Ibid.11Immigration and Naturalization Service (Department of Justice), Interim Rule, « Collection of Fees Under the Dedicated Commuter Lane Program ; Port Passenger Accelerated Service System (PORTPASS) Program, September 29 1995, Federal Register, volume 60 no.189 p.5038912Office of the Inspector General (Department of Justice), Audit Report, « Immigration and Naturalization service passenger accelerated service system pilot program », March 1995 et Office of the Inspector General (Département de Justice), Report, « INS and Airline Industry Relations », septembre 2000. Ces rap-ports mentionnent explicitement ce mandat établit par le « Département of Justice appropriation Act » du 5 novembre 1990, rétracté par la loi intitulée « Enhanced Border Security and Visa Entry Reform Act » du 14 mai 2002.13Immigration and Naturalization Service (Department of Justice), Draft Statement, « Standards and Guidelines for Developing an Immigration and Naturalization Services Passenger Accelerated Service System (INSPASS) », February 21 1995, Federal Register, volume 60, no. 34 p. 9697-9699 (Référence : FR 60 9697)14Ibid.15United States Immigration and Naturalization Service (INS) Office of Inspections, Briefing Paper, INS Passenger Accelerated Service System (INSPASS). URL : <http://www.biometrics.org/html/REPORTS/INSPASS2.html>16Ronald J. HAYS, Assistant Chief Inspector de INS, INS Passenger Accelerated Service System (INSPASS), presentation at the Biometrics Consortium, January 4th 1996. URL:<http://www.biometrics.org/html/REPORTS/INSPASS.html>17Dans le rapport Office of Inspector General (Département de Justice), « Immigration and Naturalization service passenger accelerated service system pilot program » on trouve les résultats de questionnaires distribués par INS aux utilisateurs du programme. Parmi eux 89 % des interrogés estimait qu’ils avaient gagné du temps en utilisant le programme.

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de vérifier l’identité du voyageur – l’empreinte de la main – a été la raison première pour l’abandon du dispositif.

«INSPASS. Tech was hand imprint, and was hand geometry based. Is a great system described, but not working very well. INSPASS preceded me and one of first airport innovations, but the vendor has… My understanding is that reading hands is a proven technology but never used in the volume that at land borders, and with different hands read at different rates, and eventually swore system down. It was temperamental and this made it unreliable»18.Dans un premier temps, les évènements du 11 septembre ont freiné l’expansion de ces

programmes jusqu’à leur abandon. La chute du nombre de voyageurs aux États-Unis et les pressions exercées sur l’agence des douanes et de la protection des frontières, désignée comme responsable d’une « mauvaise impression » des États-Unis partagée par les voya-geurs a réactivé un débat sur la poursuite d’une politique de sécurité des frontières et d’une facilitation des entrées aux États-Unis dans lequel s’inscrit Global Entry :

«There was a growing perception that CBP was the reason that people were not coming to the U.S. (...) [Global Entry says to the public] here are one of the things we’re doing (...) After 9/11 there was more stringent controls, started fingerprinting, the lines got longer, we needed to do these things but there was this negative perception19»Le 14 janvier 2005, le Secrétaire du Département de Sécurité Intérieure en déplacement

au Royaume-Uni mentionnait la construction d’un « programme pour voyageurs enregis-trés qui donne aux voyageurs l’opportunité de fournir des informations biométriques de manière volontaire qui peuvent être utilisées afin d’effectuer une vérification de sécurité dans les bases de données de maintien de l’ordre et des « watch lists » du terrorisme.20 » En 2006, le bureau de l’agence des douanes et de la protection des frontières (CBP) publiait un rapport sur l’évaluation des répercussions sur la vie privée du Global Enrollment System21. Ce rapport précisait le projet de l’élaboration d’une plateforme commune pour l’inscription et la demande d’adhésion des voyageurs aux programmes de passage rapide aux frontières terrestres SENTRI et NEXUS, composants de l’initiative « Frontières Intelligentes » avec le Mexique et le Canada. Ces instruments étaient les premiers « programmes de voyageurs dignes de confiance » à être déployés.

18National Archives Catalogue, Memorandum for the Record of the Interview of Doris Meissner of the Immigration and Naturalization Service Conducted by Team 5 (Prepared by Janice Kephart-Roberts), November 25 novembre 2003. National Archives Identifier : 2610315 Container Identifier :13. 19Entretien non enregistré de mai 2016 avec un haut-gradé de l’agence des douanes et de la protection des frontières. Toutes les citations sont des retranscriptions de notes prises à la main pendant l’entretien et retranscrites au plus tôt après ce dernier pour saisir les expressions de manière la plus proche possible.20Remarks by Secretary Tom Ridge U.S. Department of Homeland Security at the London School Of Economics London, England on January 14, 2005.21Customs and Border Protection (U.S Department Of Homeland Security), « Privacy Impact Assessment for the Global Enrollment System », April 20 2006.

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Présentation succincte des instruments NEXUS et SENTRI

L’instrument pour voyageurs de confiance NEXUS est un « programme d’entrée expéditif » administré conjointement par l’agence des douanes et de la protection des frontières des États-Unis et l’agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Les citoyens et résidents permanents des États-Unis et du Canada qui en sont membres reçoivent une carte d’identification à fréquence radio utilisable pour le franchissement de la frontière entre le Canada et les États-Unis aux ports d’entrée aériens, terrestres et maritimes participant au programme. Cet instrument remplace les anciens programmes de franchissement accéléré tels que PACE « un programme de dédouanement accéléré » ou CANSPASS qui furent abandonnés suite aux attaques du 11 septembre 2001.

En effet, NEXUS a été instauré et puis généralisé simultanément avec la signature de la « déclaration sur la frontière intelligente » entre le Canada et les États-Unis et le « 30 Point Action Plan » qui le suivi.

SENTRI ou EXPRES est un composant du « Border Partnership Action Plan’s Smart Border 22 point Agreement » de 2002. Est éligible, tout voyageur sans distinc-tion d’âge ou de citoyenneté. Les individus à qui CBP accorde l’adhésion peuvent franchir de manière rapide la frontière terrestre entre les États-Unis et le Mexique en empruntant des corridors spécifiques au port d’entrées terrestres. Les membres reçoivent une identification de radio fréquence (RFID) qui identifie ce dernier, lui permettant d’éviter l’inspection de son véhicule et de sa personne en franchissant la frontière.

En outre ce même rapport de 2006 précisait qu’il était à présent possible pour certains voyageurs éligibles de participer à un « nouveau programme pilote » déployé dans trois aéroports internationaux22 par le biais de cette même plateforme.

En 2007, le Sénateur Mel Martiner de Floride a proposé un amendement au Department of Homeland Security Appropriations Act de 2008 dans lequel il appelait au déploiement d’un programme de voyageurs enregistrés aux frontières aéroportuaires des États-Unis qui «focus attention on lesser known travelers, and provide a smoother and more predictable travel schedule for repeat travelers 23 ». Par l’adoption de cet amendement, le déploiement d’un programme de voyageurs enregistrés était mandaté. Le 11 avril 2008, l’agence CBP publiait une notice dans le Registre Fédéral sur le déploiement d’un programme pilote de voyageurs enregistrés. Renommé “Global Entry” l’instrument a été proposé pour adoption en 2009 et établi le 6 février 2012. Ouvert premièrement exclusivement aux citoyens des États-Unis puis au résident permanent, la liste des individus éligibles inclut certains citoyens d’États tiers et individus de tous âges. L’argumentation pour l’établissement de cet instrument était conciliatoire entre deux objectifs : garantir plus de contrôle aux frontières sans pour autant entraver la circulation des voyageurs. En l’espèce on retrouve à la fois une préoccupation sécuritaire et un impératif de mobilité24.

22Customs and Border Protection (U.S Department Of Homeland Security), « Privacy Impact Assessment for the Global Enrollment System », April 20 2006, p. 2.23Congressional Record, Proceedings and Debates of the 110th Congress, First Session, July 26 2007, vol. 153 part 15 p. 20937.24Le politiste Mark B. Salter (Salter, 2004) fait référence à « two powerful governmental desires ». Cette formule explicite bien ce que nous cherchons à rendre compte.

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1.2. Enjeux de rapidité

À bien des égards, l’instrument Global Entry ressemble à INSPASS. Pour les deux ins-truments, l’inspection automatisée fait suite à une procédure d’adhésion. Cependant, tandis que l’instrument INSPASS déterminait l’identité des voyageurs de faible risque, Global Entry désigne et évalue les adhérents en tant que « voyageurs de confiance ». L’analyse comparée des critères d’adhésion à INSPASS et Global Entry illustre l’affirmation d’une définition plurielle du « risque ».

Global Entry repose sur une base de données « GOES » et un kiosque. GOES désigne à la fois la plateforme par laquelle les candidats à Global Entry soumettent une demande d’adhésion et une base de données permettant une recherche croisée entre diverses bases de données accessibles à CBP, regroupant l’information des membres25. Ainsi, lorsqu’un voyageur soumet sa demande d’adhésion, un contrôle de ses antécédents est effectué parmi une série de « watch lists », base de données de maintien de l’ordre, bases de données de violations de règles d’immigrations ou douanières. Par cette procédure, les déclarations faites en ligne par les demandeurs d’adhésion sont vérifiées et les contradictions révélées.

L’éligibilité à Global Entry est à la fois individualisée et ciblée ; les critères ayant été explicités. Alors que tout voyageur citoyens d’États appartenant au « programme pilote d’exemption de visa » (VWPP) se rendant pour un voyage d’affaire d’une période inférieure à 90 jours pouvait prétendre à l’instrument INSPASS26, seuls les citoyens d’États tiers avec lesquels CBP a conclu un mémorandum de compréhension sont éligibles à Global Entry27. Ce mémorandum stipule les critères d’éligibilités, partagés entre CBP et leurs homologues, des individus pouvant postuler à l’adhésion. Ceux ayant des antécédents criminels, ou ayant enfreint les lois d’immigration des États-Unis ne sont pas les seuls à se voir refuser l’accord d’adhésion comme c’était le cas pour le programme INSPASS. Par ailleurs, le respect des lois fédérales, étatiques et locales portant sur les substances contrôlées ou leur trafic, le respect des lois fédérales et étatiques portant sur l’importation d’alcool ou de produits agricoles et le respect de « toutes régulations pertinentes d’une autre agence d’inspection fédérale28 » n’apparaissaient que comme « conditions » de l’adhésion à INSPASS, c’est-à-dire d’un engagement que prenait le futur adhérant29. Au contraire, ceux ayant eu des « démêlés avec la loi30 », incluant une condamnation pour infraction aux lois fédérales ou étatiques, délit mineur ou pour « violations mineures de réglementations douanières31 » peuvent aussi se voir refuser l’adhésion au programme Global Entry dès leur demande d’adhésion.

25 Le recours à GOES par l’officier lui permet d’effectuer une recherche croisée parmi une variété de bases de données préexistantes telle que la base de données TECS de CBP.26U.S. Immigration and Naturalization Services Office of Inspection, INSPASS update, <http://www.biome-trics.org/html/REPORTS/INSPASS2.html>27Entretien non enregistré de mai 2016 avec un haut-gradé de l’agence des douanes et de la protection des frontières.28Immigration and Naturalization Service (Department of Justice), Interim Rule, « Collection of Fees Under the Dedicated Commuter Lane Program ; Port Passenger Accelerated Service System (PORTPASS) Program, September 29, 1995, Federal Register, volume 60 no.189 p. 5039629Ibid.30Susan Tellin, « Frustrating Hurdle at Customs », The New York Times, October 8th 201231Ibid.

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La procédure d’adhésion à Global Entry prend en compte différentes facettes du « risque » que peut poser un voyageur lorsque ce dernier se rend aux États-Unis, estompant la distinction entre « critères » d’adhésion et « conditions » d’adhésion, les secondes étant à présent des composantes des premiers. L’adhésion n’est donc pas acquise pour la seule raison que le voyageur qui postule ne poserait aucun « risque migratoire » (Infantino, 2010), c’est-à-dire le risque que le voyageur ne respecte pas les conditions de son admission aux États-Unis32. Pour U.S. CBP, une réponse positive à la demande d’adhésion et le maintien de cette adhésion est conditionnée par le respect passé, présent (et futur) de l’ensemble des réglementations en matière d’immigration, de visa, douanières et agricoles qui reviennent aux officiers CBP stationnés aux ports d’entrée et chargés d’assurer l’exécution33 à la suite à la restructuration de l’agence en 200334.

L’appartenance citoyenne ne suffit pas pour être désignée par les officiers CBP « voya-geur légitime35 » « de faible risque » et « de confiance » - une triple désignation prévue par l’adhésion à Global Entry. Ainsi, un citoyen des États-Unis peut se voir refuser au même titre que les citoyens des États tiers l’admissibilité à Global Entry en raison du risque douanier ou agricole que son arrivée pourrait susciter.

Cette extension de ce que constitue un risque frontalier en parallèle avec une restriction des individus pouvant postuler à Global Entry se traduit sémantiquement. Tandis qu’APP, DCL et INSPASS étaient définis dans les règles fédérales publiées au Registre Fédéral par INS en tant que « automated inspection programs », le déploiement de NEXUS, SENTRI et Global Entry marque un tournant sémantique. En effet pour ces derniers, le terme « expedited entry » est substitué. Si ces deux termes, impliquent le même résultat - une entrée facilitée aux États-Unis - leurs implications cognitives sont distinctes. En effet alors que « automated inspection » souligne la capacité à agir (agency) des voyageurs dans la mesure où ces derniers « en substance s’auto-inspectent36 », ce qui n’est pas le cas pour « expedited entry »37.

De l’enchaînement des instruments INSPASS et Global Entry on remarque que ce qui est appréhendé comme un « risque » à être évalué au cours du franchissement frontalier se précise et s’étend. Cet élargissement observé sous le prisme de deux instruments de passage

32Par exemple un individu qui est admis pour des raisons touristiques, mais qui travaille lors de son séjour ou un voyageur qui outrepasse la durée de séjour que son titre de séjour lui permet.33Les officiers CBP ont l’autorité d’exécuter les réglementations même si ces derniers ont pour principal rôle l’admission et le contrôle migratoire des voyageurs. À leurs côtés travaillent des spécialistes de l’agri-culture et des douanes qui effectuent le contrôle, mais ces derniers n’ont pas la même autorité. Entretien non enregistré de janvier 2017 avec un ancien spécialiste de l’agriculture.34L’agence CBP regroupe les anciennes missions d’inspection, de contrôle et admission de l’Immigration and Citizenship Service, U.S. Customs Service et du Department of Agriculture’s Animal and Plant Health Inspection Service exécutées aux ports d’entrée des États-Unis.35Au cours de mes entretiens avec des membres de l’agence, le terme « voyageurs légitimes » (legiti-mate traveler) a été avancé à plusieurs reprises. Ce terme apparait aussi sur le site accessible au public de l’agence CBP. Ce terme est essentiellement utilisé de manière interchangeable avec celui de « voyageurs qui respectent le droit » (lawful traveler).36Ronald J. HAYS, Assistant Chief Inspector de INS, INS Passenger Accelerated Service System (INSPASS), presentation at the Biometrics Consortium, January 4th 1996. URL:<http://www.biometrics.org/html/REPORTS/INSPASS.html>37 Monica Den Boer (2017: 92-93) dans son étude de programmes de « voyageurs de confiance » euro-péen et nord- américain identifie le programme Global Entry comme relevant du scheme narrative du « self policing ».

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rapide matérialise l’intégration sous l’agence CBP en 2003 des missions de lutte contre les infractions douanières, la protection agricole et la lutte contre l’immigration « illégale » au côté de la lutte contre le terrorisme au nom de « l’intégrité de la frontière ».

Le développement de ces instruments s’est donc fait par « sédimentation », (Halpern et Galès, 2011) en se fondant sur des expériences préalables quoique reposant sur une conception du voyageur distinct. De l’« usager » d’INSPASS, Global Entry conforte une conception du voyageur « privilégié » sur laquelle repose l’institutionnalisation d’une inégalité en termes de « droit, risque et rapidité » (Pallitro et Heyman, 2002 : 318) aux frontières. Ainsi, les programmes ne reposent pas uniquement sur l’argument de la rapi-dité, mais se fondent dans une perspective de circonscription des catégories de voyageurs à privilégier non sans conséquence. Comme le souligne Sparke (2006 : 167) au sujet du programme Nexus, l’institutionnalisation de ces programmes engendre une différenciation entre citoyens voire permette l’achat d’une « citoyenneté flexible » pour certains, point sur lequel Aas (2011) est en accord.

2. La rapidité pratiquée

L’enjeu des instruments déployés aux frontières est en proie à une mutation. D’un moyen d’assurer l’identité des voyageurs, les instruments de passage rapide comme Global Entry participent aujourd’hui à différencier le niveau de risque qu’un voyageur aux États-Unis peut poser, sous-tendant une pratique d’évaluation de celui qui se présente au poste-frontière. En cela, on peut dire que ces instruments matérialisent une pratique adoptée par les officiers : distinguer entre « faible risque » et « haut risque » (Gilboy, 1991, 1992).

Nous supposons que cette mutation a des répercussions sur l’acte d’admission prati-qué par les officiers CBP en vue de la poursuite de leur double impératif. Concrètement le déploiement de Global Entry inciterait les officiers CBP à diriger leurs ressources vers certains individus et non vers d’autres en vertu de l’adhésion ou non à un instrument : cer-tains voyageurs seraient ainsi moins scrutés que d’autres lorsqu’ils franchissent la frontière. Par extension, on assisterait à une division du travail où les ressources humaines seraient encouragées par la hiérarchie à être dirigée en priorité envers les « voyageurs moins connus ».

2.1. De la vérification d’identité a la détermination du niveau du « plus faible risque »

L’abandon d’INSPASS et le déploiement de Global Entry témoignent de la substitution d’une préoccupation prioritaire pour l’identification des voyageurs à celle de l’évaluation de ces derniers lors de leur inspection par un officier CBP. Cette substitution est à la fois apparente dans le discours entourant les instruments de passage rapide et dans la construction du kiosque Global Entry. Pour clarifier, Global Entry renvoie à la fois à la plateforme d’adhésion et une base de données appelée « GOES » (Global Online Enrollment System) ainsi que les kiosques déployés aux ports d’entrée aériens. Nous préciserons à quel composant de Global Entry nous nous référons.

Suite à la création du Superintendant d’Immigration par l’acte d’Immigration de 1891 et le déploiement de ses inspecteurs d’immigration aux ports d’entrée des États-Unis, l’entrée d’un individu aux États-Unis est devenue dépendante du déroulement de l’entretien avec l’inspec-teur. Durant cette interaction, le voyageur doit communiquer la raison et le cadre dans lequel

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il souhaite entrer aux États-Unis. Cependant dans les années 1990, une préoccupation pour le temps d’attente des voyageurs a débouché sur la limitation du temps d’attente des voyageurs au centre d’inspection fédérale à 45 minutes38. La conception de kiosques permettait de contourner cette préoccupation en faisant l’économie de l’entretien pour les voyageurs qui se rendaient aux États-Unis de manière régulière et ce pour les mêmes raisons39. Comme l’illustre cet extrait de la présentation d’INSPASS, le kiosque identifiait les voyageurs en tant qu’adhérents. Il ne déterminait pas la propension d’un individu à représenter un « risque » pour les États-Unis :

«All of our automated inspection systems use a “one-to-one” search ; that is, we attempt to verify a claimed identity40».Tout comme les kiosques INSPASS, les kiosques Global Entry recourent à la biométrie

pour vérifier si un individu est celui qu’il ou elle prétend être. Le kiosque s’appuie sur les empreintes digitales des 10 doigts, soumis par le voyageur au cours de son inscription dans un centre d’adhésion. Cependant, l’utilisation de la biométrie dépasse le cadre de la vérifica-tion de l’identité. Lorsque le voyageur utilise un kiosque Global Entry afin d’être admis aux États-Unis, la base de données intégrée au kiosque, exécute des requêtes de données auprès de bases de données qui lui sont rattachées telles que la base de données TECS de l’agence CBP. L’enjeu de ces requêtes est de déterminer si les « privilèges » pour « voyageurs dignes de confiance » peuvent à ce moment d’utilisation être octroyés. De plus, chaque 24 heures les informations retenues dans la base de données « GOES » de Global Entry sur ses membres sont croisées avec les bases de données qui lui sont associées. Si une information dérogatoire sur l’adhérent apparaît a posteriori de son adhésion, sa participation au programme peut lui être révoquée41. Les kiosques Global Entry en scrutant l’utilisateur renforcent donc les pratiques de différenciation des voyageurs (Pellerin, 2004). Dès lors, l’adhésion à Global Entry devient pour les officiers un indicateur d’un plus « faible risque » des voyageurs.

2.2. Définir la division du travail entre « hommes » et « outils »

Julien Jeandesboz et Emmanuel-Pierre Guittet (2010) ont noté que la technologie constitue « un des facteurs déterminants de la transformation des pratiques de sécurité » (p. 230). Dans le cas de Global Entry, la substitution (partielle) de l’évaluation des risques

38Mandat établit par le « Département of Justice appropriation Act » du 5 novembre1990, rétracté par la loi intitulée « Enhanced Border Security and Visa Entry Reform Act » du 14 Mai 2002. Outre la volonté de limiter le nombre de correspondances ratées par les voyageurs et de « traiter décemment », cette limitation du temps d’attente à 45 minutes découle d’une recommandation de l’Organisation de l’Avia-tion Civile Internationale (OACI). Voir U.S. House of Representatives, Hearings before a Subcommittee of the Committee of Appropriations, March 28th 1990, p.85-89 (David Z. Plavin, Director of Aviation, Port of Authority of New York and New Jersey-Testimony on behalf of Airport Operators Council International)39« Historically, each time a person seeks to enter a country, they must be personally interviewed by a government officer to determine the purpose of the proposed entry no matter how many times that person has entered the country before. This has been necessary because, until recently, it has not been possible to conclusively identify the traveler except by that face to face interview » déclaration de Ronald J. HAYS, Assistant Chief Inspector de INS, INS Passenger Accelerated Service System (INSPASS), presentation at the Biometrics Consortium, January 4th 1996.40Ibid.41 Customs and Border Protection (Department Of Homeland Security), Final Rule « Establishment of Global Entry Program », February 6 2012, Federal Register, vol. 77 no. 24. Référence : 77 FR 5681

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au contrôle de l’identité aurait des répercussions sur les pratiques d’évaluation des demandes d’admission des voyageurs des officiers CBP.

Dans un premier temps, le déploiement de Global Entry aux ports d’entrée contribuerait à concentrer l’attention des officiers davantage sur l’évaluation du risque plutôt que sur le contrôle d’identité. En effet, au-delà de la détention d’un titre en règle, l’appartenance ou non à Global Entry détermine un niveau préalable du risque. La différenciation des niveaux de risque des voyageurs en vertu de l’appartenance ou non à l’instrument se traduit spa-tialement. Par exemple, dans un aéroport international, les voyageurs sont alignés à leur arrivée en fonction de leur appartenance à un dispositif spécifique : Global Entry, APC – pour les utilisateurs d’ESTA et non membres de Global Entry, les détenteurs d’un visa ou ceux utilisant ESTA pour la première fois et non pas en fonction de leur appartenance à une nationalité (US/Residents permanents vs. Non US) comme il avait été le cas dans les années 1990s. Lors de l’utilisation du corridor Global Entry, la vérification du statut d’adhérant et de l’identité de l’individu n’est pas effectuée par un officier CBP. Le kiosque assume cette fonction se basant sur les informations soumises par le voyageur au cours de l’inscription. Dans un deuxième temps, le kiosque « vett » scrute le voyageur et évalue si ce dernier peut prétendre au passage rapide. Pour ce faire, la base de données intégrée au kiosque effectue une recherche croisée parmi les bases de données qui lui sont rattachées. Si pour une raison quelconque l’individu utilisant le kiosque n’est pas un membre, si son adhésion a été révoquée ou si ce dernier entre le temps de l’adhésion et l’utilisation du kiosque a enfreint aux conditions de son adhésion, les officiers CBP sont mis au courant et agissent en fonction42. Ceci illustre que le contrôle d’identité n’est pas abandonné, mais est au contraire incorporé au processus d’évaluation du risque. Global Entry ne cherche pas à certifier uniquement l’identité de la personne, mais cherche à certifier ceux qui continuent à être « voyageurs dignes de confiance ».

En cela, le déploiement de Global Entry aux ports d’entrée démontre bien les objectifs managériaux de l’agence qui consistent à encourager les officiers à déplacer la focale de leurs ressources des « voyageurs connus », car membres, vers les voyageurs « moins connus », car non-membres. Par exemple, prenant la parole pour délivrer une opinion partagée par lui-même et ses collègues, un officier CBP me dit que Global Entry permet aux officiers de se focaliser sur autre chose que « the beginning process » c’est-à-dire la vérification de l’identité et du relèvement des empreintes digitales. Selon lui, ceci est un gage de gain de temps pour les officiers, leur permettant de déployer leurs ressources envers les « voyageurs à plus haut risque ». La question de l’utilisation « efficiente » des ressources se joint donc aux préoccupations sécuritaires des officiers.

Nonobstant, l’utilisation du kiosque n’efface pas pour autant l’interaction entre le voya-geur et l’officier d’admission. En effet, les utilisateurs des kiosques doivent toujours passer par un officier lorsque ces derniers quittent le Centre d’Inspection Fédérale pour lui rendre le reçu que le kiosque a imprimé. Il peut arriver qu’un ‘X’ soit marqué sur le reçu. Dans ce cas l’individu est sujet à une inspection secondaire. Il peut aussi arriver qu’un officier fasse usage de son pouvoir discrétionnaire pour inspecter un voyageur de façon plus détaillée43.

42Entretien non enregistré de mai 2016 avec un officier de l’agence des douanes et de la protection des frontières.43Ibid.

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Ainsi, le déploiement de Global Entry n’implique pas une limitation du pouvoir dis-crétionnaire des officiers, mais au contraire d’une reconfiguration de celui-ci car axé sur l’évaluation du risque qu’un individu peut poser.

L’étude de cette « approche par le risque » sous leur matérialisation en kiosques des instruments INSPASS et Global Entry rend compte d’une mutation : au lieu d’évaluer le risque en fonction de l’identité d’un individu, l’idée de concilier la sécurité et la mobilité s’appuie sur la détermination de qui mérite la confiance, renforçant les pratiques de diffé-renciation des voyageurs dans l’exercice de leur mobilité.

«Trusted traveler programs are a key component of CBP’s risk-based approach to facilitate travel and trade coming through U.S. POEs while keeping out terrorists and their weapons and enforcing U.S. laws and regulations, including those that prevent the illegal entry of persons and contraband. According to CBP, its trusted traveler programs help it achieve this dual mission by allowing it to focus resources at the POEs on passengers and cargo that have not been identified as low risk44.»La distinction faite entre « voyageurs de faible risque » et « voyageurs à plus haut

risque » est toujours d’actualité. Celle-ci est à la fois facteur et élément d’une distinction entre « voyageurs connus » et « voyageurs moins connus », donnant à voir une division du travail entre kiosque et officiers au sein du centre d’inspection fédérale. Pour l’observateur qui se rend à l’un des aéroports munis de Global Entry, ce sont les kiosques qui accueillent les premiers pour l’inspection tandis que l’accueil des deuxièmes est conditionné au dénoue-ment de l’interaction avec l’officier.

Vers une (re)configuration de l’acte d’admission ?Loin de proposer une analyse en rupture avec les travaux portant sur les « politiques de

frontières » (Guiraudon, 2008), saisir la décision par les « instruments » qui la matérialisent (Lascoumes et Le Galès, 2004) a le mérite de nous permettre de soulever les mutations en matière de gestion des mobilités au-delà de la question des objectifs, sans pour autant faire abstraction des débats et donc des idées qui entourent ces politiques.

Dans notre cas d’étude, on remarque que ce n’est pas tant un moyen technologique défec-tueux qui conduit à l’abandonnement d’INSPASS que la persuasion d’une inadéquation de cet instrument avec les enjeux de la gestion des mobilités de la nouvelle agence CBP. C’est-à-dire que si INSPASS avait pour enjeu l’identification du voyageur « à faible risque », cet instrument ne permettait pas l’évaluation du voyageur lors de son utilisation. Or, l’évaluation du voyageur s’avère être au cœur de la stratégie des officiers CBP dans la poursuite de leur double mission : protéger la frontière des États-Unis et faciliter les échanges commerciaux aux frontières45. L’affirmation du recours aux pratiques de « segmentation46 » des voyageurs en témoigne.

Pour reprendre la distinction entre « instrument », « technique » et « outil » proposée par Pierre Lascoumes (2007), il y a une mutation de la « technique » (le kiosque) de l’instrument

44U.S. General Accounting Office, Trusted Travelers Programs Provide Benefits, but Enrollment Processes Could Be Strengthened, Washington D.C., May 2014 Référence: GAO-14-48345 L’énoncé de la mission de l’agence CBP publié sur leur site gouvernemental s’articule comme suit : « To safeguard America’s borders thereby protecting the public from dangerous people and materials while enhancing the Nation’s global economic competitiveness by enabling legitimate trade and travel ».46Entretien non enregistré de janvier 2017 avec un haut-gradé de l’agence des douanes et de la protection des frontières.

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d’admission aux frontières (Global Entry) par l’intégration d’un « outil » de vérification (la base de données intégrée au kiosque Global Entry). Au sein du Centre d’Inspection Fédéral, le risque est apprécié en fonction de l’adhésion à un instrument de gestion des mobilités. Ainsi, Global Entry découle tout autant qu’il renforce une « stratégie » de gestion des mobilités aux frontières : classifier les voyageurs en catégories. Dès lors, l’identification des voyageurs s’avère être un critère partiel de la décision d’admissibilité et de l’admission du passager. L’admission sur le territoire est évaluée autour d’une perception du risque futur dans laquelle l’identification n’est qu’une composante. Par extension, « la rapidité » devient conditionnée à la « fiabilité » du voyageur renforçant à nouveau les pratiques de différentiation aux frontières. En substance, l’acte d’admission instruit par les « instru-ments d’admission automatisée » relève d’une évaluation du degré de « non-risque » que poserait un individu une fois entré sur le territoire. Cette évaluation ne signale pas pour autant l’abandon de l’évaluation du risque ou l’abandon d’une conviction qu’une entrée aux États-Unis peut constituer un risque. Il n’y a « pas de risque zéro47 ».

Illustratif de la poursuite de pratiques de différentiation des voyageurs et de l’indivi-dualisation de l’inspection de ces derniers, l’instrument d’admission automatisée des voya-geurs aux frontières « Global Entry » définit la distinction faite entre « voyageurs de faible risque » et « voyageurs à plus haut risque » en matière de « connaissance de l’individu » et « fiabilité » de ces derniers.

Ainsi, si les pratiques de sélection et ici de distinction d’un groupe pouvant prétendre à un passage rapide aux frontières ne sont pas neuves, Global Entry laisse entrevoir une configuration de l’acte d’admission - c’est-à-dire le processus décisionnel de l’entrée. Cette configuration repose sur trois traits dans lesquels, instruments, idées et pratiques de gestion des mobilités interagissent : l’incorporation de l’étape de l’identification à celle de l’évaluation du « risque », la détermination constante de la « fiabilité » du voyageur et un échange d’information pour rapidité par lequel la normalisation de la surveillance et du contrôle aux frontières des États-Unis se poursuit.

47Entretien non enregistré de mai 2016 avec un haut-gradé de l’agence des douanes et de la protection des frontières.

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