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Mélann http://prepacrpe.hautetfort.com/ 1 Cours d'Histoire pour concours CRPE Le monde celtique ................................................................................ 2 Romanisation de la Gaule ..................................................................... 3 La christianisation du monde Gallo-Romain ......................................... 5 Naissance de la France : un Etat royal, une capitale, une langue ......... 7 L’Europe des abbayes et des cathédrales ........................................... 12 L'Islam ............................................................................................... 17 Le temps des découvertes et des conquêtes ...................................... 20 La Renaissance .................................................................................. 22 La monarchie absolue en France ........................................................ 25 Le mouvement des Lumières, la Révolution française, le Premier Empire ............................................................................................... 28 Expansion industrielle et urbaine en Europe, Colonisation ................. 31 Naissance de la République ................................................................ 34 La planète en guerre : l'extrême violence du XXème siècle ................ 37 La Vème République........................................................................... 41 La société en France........................................................................... 44

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Cours d'Histoire pour

concours CRPE

Le monde celtique................................................................................ 2 Romanisation de la Gaule..................................................................... 3 La christianisation du monde Gallo-Romain ......................................... 5 Naissance de la France : un Etat royal, une capitale, une langue ......... 7 L’Europe des abbayes et des cathédrales ........................................... 12 L'Islam............................................................................................... 17 Le temps des découvertes et des conquêtes ...................................... 20 La Renaissance .................................................................................. 22 La monarchie absolue en France ........................................................ 25 Le mouvement des Lumières, la Révolution française, le Premier Empire ............................................................................................... 28 Expansion industrielle et urbaine en Europe, Colonisation................. 31 Naissance de la République................................................................ 34 La planète en guerre : l'extrême violence du XXème siècle................ 37 La Vème République........................................................................... 41 La société en France........................................................................... 44

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Le monde celtique

La France n'est pas la Gaule. Celle-ci n'a jamais existé dans l'antiquité que par l'invention de Jules César, alors général romain. La Gaule, en effet, n'est qu'une entité purement géographique créée à posteriori par César pour justifier le cadre de sa conquête. La Gaule n'est pas plus l'ancêtre de la France que les Gaulois ne sont les nôtres. Ces celtes, que les romains appelaient Gaulois, furent érigés par l'école de la IIIème république au rang d'ancêtres des Français : "nos ancêtres les Gaulois…"

Les Celtes ne connaissent pas l'écriture. C'est un choix volontaire qui fit refuser l'emploi de l'écrit pour tout ce qui concernait le domaine du sacré, alors très vaste. La mythologie, la médecine, les annales historiques étaient transmissent oralement par les druides. Il ne s'agit donc pas d'un retard culturel mais d'un parti pris délibéré. Les sources écrites concernant les Celtes émanent d'auteurs grecs et romains, tels que Hécatée de Millet et Hérodote (Vème av.). C'est par César dans la Guerre des Gaules que l'on connaît surtout la Gaule.

Les celtes en Gaule

Une nouvelle civilisation s'implante en Gaule au IXè et VIIIè siècles, les tombes sous tumulus qui la caractérisent font apparaître une hiérarchie sociale dominée par des guerriers à cheval qui semblent jouir de beaucoup de richesses. Les guerriers sont désormais inhumés avec leurs parures en or, des services à boisson, et surtout avec de longues épées en lames de bronze, puis de fer. Cette civilisation du 1er age du fer, du milieu du VIIIè à la fin du VIème siècle, est dite de Hallstatt. De petites principautés princières se forment alors progressivement, qui s'organisent autour de sites fortifiés matérialisant l'importance de la nouvelle aristocratie.

Une grande vague d'immigration celtique a lieu lors du second age du fer, ou époque de la Tène. Ces mouvements ne se limitent pas à la Gaule les migrations celtes se déclinant à l'échelle européenne. Au début du IVème siècle, les Celtes devenus conquérants se répandent au-delà des Alpes, et s'installent durablement au nord de la péninsule italienne qui devient la Gaule cisalpine. Aux alentour de 390, ceux que les Romains appellent Gaulois prennent Rome. En 335, ils rencontrent Alexandre le Grand dont la renommée ne les impressionne pas.

La société celtique

Une nouvelle société se met en place en Gaule, qui repose maintenant sur l'agriculture et l'élevage. La plupart des outils en fer utilisés par les agriculteurs jusqu'au XIXème siècle apparaissent à cette période. Le pays est riche, et ses productions variées. La population, difficile à estimer, atteint probablement 10 ou 15 millions d'habitants à la veille de la conquête de César.

Les Gaulois ne forment pas une nation, mais sont divisés en une soixantaine d'états souverains. Chaque peuple a sur son territoire une enceinte fortifiée, ou oppidum, qui en est l'agglomération principale et le centre du pouvoir politique. Les formes d'autorité sont multiples, du chef héréditaire au conseil des notables. Le régime de la société est toujours aristocratique, les grands propriétaires dominant la masse du peuple.

La religion celtique

De la religion gauloise, nous savons très peu de chose. Les sources archéologiques sont d'interprétation difficile, et la principale source écrite est Jules César, qui nous donne son interprétation personnelle de cultes qu'il connaît mal.

La société celte était dominée par les croyances religieuses. Les druides faisaient partie de l'élite intellectuelle. Ils étaient à la fois prêtre, avocat, médecin, enseignant et prophète. Le druide sert d'intermédiaire entre les dieux et les hommes. Il possède l'autorité spirituelle et est le seul à être détenteur du savoir, de la connaissance et de toutes autres activités intellectuelles et religieuses. Ces druides seront interdits par le gouvernement romain dès le Ier siècle après.

Les dieux du panthéon celte manifestaient les forces de la nature. Lug "le lumineux", dieu solaire, était le plus important. Teutatès, "le père de la tribu", était associé à la fonction guerrière.

Seule leur incapacité à s'unir et à constituer une entité politique unique a permis à Rome de vaincre

les Celtes.

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Romanisation de la Gaule Il convient d’analyser comment les Romains ont conquis et annexé les territoires gaulois ; comment la présence romaine en Gaule a contribué à intégrer ce territoire dans l’Empire en façonnant une civilisation « gallo-romaine ». Il s’agit d’analyser l’empreinte durable laissée par les Romains en Gaule, à partir de la conquête de Jules César.

L’intégration de la Gaule au monde Romain

Le processus de romanisation ne peut se réduire à une conquête militaire et encore moins à la Guerre des Gaules. La romanisation de la Gaule fut en effet lente, progressive, et le plus souvent pacifique. Elle connut une accélération certaine à partir de la création de la province romaine de Transalpine en 125-122 av. JC.

Le sud de la Gaule, pour sa part, était entré dans l’orbite grecque autour de l’an 600 avec la fondation de Marseille (Massalia) par des colons originaires de Phocée. Marseille devint rapidement la place commerciale essentielle de la Gaule du Sud dont le dynamisme se fit sentir dans la vallée du Rhône à partir du IVème siècle.

La Gaule centrale fut en fait conquise par le commerce bien avant l’époque de César. A partir du IIIème siècle, certains peuples se mirent à battre monnaie d’or à l’imitation de celle de Philippe II de Macédoine. Le commerce y est très important, la Gaule importait de l’huile, mais surtout du vin, en échange de salaisons, de cuir, de bétails et surtout d’esclaves. La Gaule est alors une région prospère et ouverte sur le monde extérieur. Dès la fin du IIIème siècle, avec l’installation de Rome dans la péninsule Ibérique, la Gaule du sud avait pris une dimension nouvelle en devenant un axe de circulation essentiel. Une voie romaine est construite (via Domitia), et Narbonne devient colonie romaine en 118 av, les romains créent alors la province de Gaule transalpine.

La Guerre des Gaules Cette conquête est décrite dans le détail par Jules César dans le commentaire de la Guerre des Gaules. Il s’agit d’un document qui raconte dans un récit continu les opérations militaires menées alors. Sans aucun doute, ce livre apparaît comme un ouvrage de propagande à la gloire de son auteur, et même s’il doit être lu avec esprit critique, il n’en demeure pas moins un témoignage irremplaçable pour comprendre.

En 58 av, le Sénat donne à Jules César les pouvoirs militaires en Gaule, il est alors gouverneur de la Transalpine. La même année, il intervient dans des querelles qui divisent les peuples gaulois, à la demande des Eduens attaqués par les Germains. Il se pose en protecteur des peuples alliés pour intervenir militairement. Les romains étaient intéressés par les richesses agricoles et forestières de la Gaule, et César souhaitait conquérir la Gaule pour affiner son pouvoir à Rome. Suite à son intervention, il choisi alors de laisser désormais son armée cantonner en Gaule, ce qui provoqua un cycle de révoltes durement réprimées. En 52 av, les chefs gaulois décident de s’unir sous la direction de Vercingétorix et de se soulever contre les Romains. Vercingétorix inflige d’abord un grave échec à César devant Gergovie en 52av, et rejoint ensuite Alésia. César assiège la ville pendant 2 mois et finalement, Vercingétorix se rend.

Le mythe Vercingétorix fut bâti par Plutarque deux siècles plus tard, afin de magnifier la vie d’un « homme illustre » et repris par les historiens du XIXème siècle pour faire de lui un héros bienveillant incarnant la courageuse résistance gauloise.

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Le monde Gallo-Romain

Les deux civilisations se mêlent peu à peu, puis fusionnent. De cette fusion est née une civilisation originale que nous appelons gallo-romaine.

Si l’on excepte quelques révoltes sporadiques, l’assimilation de la Gaule au monde romain se fit sans heurts majeurs. Cela passa d’abord par une organisation administrative : la Gaule chevelue des soixante cités (qu’on appelait désormais Les Trois Gaules) fut divisée en trois provinces : l’Aquitaine, la Lyonnaise et la Belgique. La transalpine, enfin, devint la Narbonnaise, province sénatoriale qui avait à sa tête un proconsul, les Trois Gaules étant gouvernées par des légats de l’empereur.

Devenue langue officielle, la langue latine se diffuse largement. Un brassage des populations s’opère à la faveur des déplacements de troupes et de négociants. A la fin de leur service militaire, les soldats acquièrent un lot de terre dans les nouvelles provinces conquises et beaucoup s’installent alors sur leurs domaines. On peut effectivement devenir citoyen romain en servant 25 ans dans l’armée. Le processus de romanisation était avant tout un processus d’urbanisation. Les oppida se transformèrent en véritables villes dont les notables s’intégrèrent au jeu politique romain en accédant à la citoyenneté. 3 statuts de cités : les cités pérégrines, les cités de droit latin (même droits civils, mais pas politiques), et les cités de droit romain. Il faut attendre 212 et l’édit de Caracalla pour que tous les habitants de l’Empire, et donc de la Gaule, deviennent des citoyens romains. Les cités étaient dirigées par des magistrats et avaient des institutions calquées sur le modèle romain. Peu à peu les villes se couvrirent de monuments publics : temples, cirques, théâtres, amphithéâtres, thermes, aqueduc témoignent d’une romanisation des modes de vie et de la mise en place d’une nouvelle sociabilité urbaine qui s’organisait autour du forum, cœur de la vie publique. Ces villes étaient reliées entre elles par un important réseau routier qui rayonnait dans toutes les directions à partir de Lyon, fondé en 43 av. Auguste en fit la capitale des Trois Gaules en 12 av. De plus, le culte impérial est un profond facteur d’intégration et un vecteur important de romanisation. Il permet de mesurer la loyauté e l’unité des populations de l’Empire. Il en fut de même de la religion en général, les dieux gaulois étant rapidement assimilés à des divinités romaines. Tout s’effondra au début du Vème siècle avec la rupture du fragile équilibre qui s’était établi entre les Romains et les Germains : en 406, les peuples germaniques franchirent le Rhin et ravagèrent la Gaule. La Gaule romaine avait vécu.

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La christianisation du monde Gallo-Romain

Le christianisme

Jésus est probablement né vers -6 et sans doute mort vers +30. Sa prédication, commencée vers 27-28, n'aura duré que 2 ans. Les sources dont nous disposons sont partielles et partiales. Citons les Evangiles. Ce sont des récits en langue grecque dont 4, ceux de Matthieu, Marc, Luc, et Jean furent retenus par l’Eglise. Ils n’ont pas pour objet d’être des biographies du Christ, mais de mettre en lumière certains de ses faits et gestes relus dans une perspective d’évangélisation.

Le christianisme est une religion d'amour des autres et de fraternité universelle. C'est sa vocation à l'universalité qui en fait le succès et explique son triomphe. Elle se caractérise par la croyance en un dieu unique et en l'immortalité de l'âme. Héritant de la religion juive et des préceptes de la Bible, elle commande de s'aimer les uns les autres.

La diffusion du christianisme dans le monde romain

L’histoire du christianisme s’inscrit d’emblée dans celle de l’Empire romain. Jésus est né dans une colonie romaine, et c’est une peine romaine, la crucifixion, qui lui fut infligée par Ponce Pilate. Elle s’inscrit aussi dans l’histoire juive, puisque Jésus, ses disciples et ses apôtres étaient tous juifs.

Le christianisme, qui n’était à l’origine qu’une des formes du judaïsme, se sépara clairement de celui-ci après la destruction du Temple par les Romains en 70. Les premières communautés chrétiennes se constituèrent progressivement sur les rives de la Méditerranée. Pourtant, à l’inverse de l’idée communément admise par les Eglises chrétiennes actuelles, la diffusion du christianisme fut lente et modérée. Importance de Paul dans la diffusion de la nouvelle religion. Il se convertit en 38 et meurt à Rome en 67 pendant les persécutions. Paul est celui par qui le christianisme sort du milieu juif palestinien et pénètre le monde romain.

On a probablement exagéré les persécutions dont furent victimes les chrétiens. Si persécutions il y eut à cette époque, ce ne fut pas tant pour des motifs religieux que pour des motifs politiques, le refus des chrétiens de participer au culte impérial étant vécu comme une rupture de la concorde civique.

Pendant 2 siècles, le christianisme est probablement resté dans l’Empire à l’état d’une secte minoritaire. Il s’est au contraire répandu partout au IIIe siècle. Il est désormais acquis que la diffusion massive du christianisme dans l’Empire romain est la conséquence et non la cause de la conversion de l’empereur Constantin en 312. Elle ne s’explique donc que par le caractère de religion d’Etat qui fut progressivement accordé à la religion chrétienne. Celle-ci ne s’est pas imposée par ses vertus et sa supériorité naturelle mais par la séduction et la puissance de coercition du pouvoir impérial.

La conversion de Constantin est ainsi un moment majeur de la diffusion du christianisme dans le monde romain. L’édit de Milan, promulgué en 313, accorda « aux chrétiens et à tous la faculté de suivre librement leur religion préférée ». En 325, Constantin réunit le Concile de Nicée. Avec ce premier concile, l'Église commence à se doter d'une organisation centralisée fondée sur une stricte hiérarchie du clergé. (� Fixation du credo, affirmation des croyances, confirmation de la Trinité)

En 391, l’empereur Théodose proclame le christianisme religion officielle de l’Empire romain et interdit toute manifestation du paganisme. A leur tour, les chrétiens se font persécuteurs en combattant les traditions païennes, en détruisant les temples et en pourchassant les hérétiques. Les petites communautés indépendantes de croyants du 1er siècle qui s’appelaient elles-mêmes Eglises donnèrent ainsi naissance à une Eglise officielle qui lia définitivement son sort à celui du pouvoir politique. La structure de l’Eglise se calqua sur celle de l’Empire. L’Eglise y gagna en puissance mais y perdit en indépendance.

Mais dès le Vème siècle, l'Empire, affaibli et divisé, est menacé par l'arrivée massive des Barbares. Les chrétiens s'organisent de plus en plus en marge des structures politiques de l'Empire. La papauté se met réellement à exister. Rome apparaît désormais comme le centre de la chrétienté. Les dogmes sont définitivement fixés et surtout des règles précisent s'imposent à toutes les communautés, avec l'institution d'une hiérarchie qui établit pour longtemps le fonctionnement du clergé.

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La christianisation de la Gaule

Comme dans tout le bassin occidental de la Méditerranée, le christianisme pénétra en Gaule par les colonies grecques et syriennes qui s’installèrent à Lyon. L’Eglise de Lyon fut probablement fondée au milieu du IIe siècle. En 177, sous le règne de l’empereur Marc Aurèle, elle fut victime d’une sévère persécution. Elle eut pour origine le refus des chrétiens de s’associer au culte de Rome et d’Auguste. Universelle et exclusive, la religion chrétienne ne pouvait s’accommoder du culte impérial. Les chrétiens apparaissaient alors comme des ennemis de l’Etat. Se dissocier du culte civique, c’était se mettre au ban de l’Empire et se livrer à la vindicte populaire. Le premier document à donner une image synthétique du christianisme en Gaule émane du concile tenu à Arles en 314. Seize communautés chrétiennes étaient alors attestées, pour la plupart à l’Est et dans la vallée du Rhône. Seules quelques villes étaient touchées par la nouvelle religion. Les paysans habitant la campagne restaient attachés aux cultes anciens. L’apôtre de Gaule fut finalement saint Martin (vers 316-397) dont la Vie fut écrite avant même sa mort par Sulpice Sévère, ce qui en fait l’un des rares évêques du 4e siècle sur lequel on dispose d’une documentation abondante. Il introduisit l’érémitisme occidental en Gaule en fondant les abbayes de Ligugé en 360 et de Marmoutier en 372. Il évangélisa inlassablement les campagnes. Mais il est probable que les campagnes gauloises aient été encore majoritairement païennes au début du Ve siècle.

L’Eglise gauloise fut donc une église tardive qui ne s’installa solidement qu’aux IVe et Ve siècles, au moment où le pouvoir romain avait perdu tout contrôle sur les campagnes.

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Naissance de la France : un Etat royal, une capitale, une langue

Il convient d'abord de caractériser la royauté des Capétiens puis des Valois : ses liens étroits avec

l'Eglise, son rôle militaire et sa fonction judiciaire. Il convient ensuite d'étudier la mainmise progressive de la monarchie sur l'ensemble du royaume grâce à l'institution d'une administration centrale et provinciale. Paris devient capitale du royaume, tandis que l'usage du français se répand. La guerre de Cent Ans conduit paradoxalement au renforcement de l'Etat royal avec la création d'une armée permanente et des impôts royaux, elle contribue surtout à l'affirmation d'un sentiment national.

La monarchie franque

A la fin du 4e siècle, après la mort de Théodose, en 395, et la séparation définitive de l'empire romain entre une entité orientale et une entité occidentale, la «pax romana» n'est plus qu'un souvenir. Hiver 406 : l’Empire romain d’Occident est envahi par les Germains et fractionné en royaumes barbares. Parmi ces royaumes, celui des Francs, de première importance. Clovis en hérite en 481.

� Vers 496, il se convertit au christianisme et est baptisé à Reims par l’évêque Remi. La conversion de Clovis entraîne celle de son peuple. Avec Clovis, fondateur de la 1ère monarchie française, la Gaule devient mérovingienne et tous les habitants du royaume deviennent "Francs".

Les successeurs de Clovis, les Mérovingiens, maintiennent cette alliance avec l’Eglise et fondent des monastères où les moines vivent en communauté selon la règle édictée par saint Benoît vers 530. Ils perdent cependant peu à peu tout pouvoir du fait des luttes incessantes et des partages successifs du royaume. Les Francs ont en effet une conception patrimoniale de la royauté qui implique qu’à la mort du souverain, son héritage soit partagé entre ses fils.

A la fin du règne de Dagobert, le pouvoir est progressivement contrôlé par de riches familles aristocratiques franques qui, via leur rôle de "Maire du Palais" (placés à la tête de l’armée et de l’administration), vont tenir les rênes de l'état. L’un d’eux, Charles Martel, qui jouit d’un grand prestige après avoir arrêté les Arabes à Poitiers en 732, devient le véritable maître du royaume. Le fils de Charles Martel, Pépin le Bref, s’empare de la couronne avec l’accord du Pape qui le sacre roi des Francs en 754. C’est le début de la dynastie carolingienne. A la mort de Pépin le Bref en 768, son fils Charlemagne lui succède. Charlemagne

Il renforce la puissance des Francs dont il étend le royaume et diffuse le christianisme en Germanie. Dans ce but, il organise chaque année une expédition militaire qu’il dirige en personne. Tous les hommes libres du royaume doivent le service armé.

� Les victoires de Charlemagne aboutissent à la création d'un vaste empire européen qui nécessite une administration plus complexe que la traditionnelle administration franque : il va ainsi faire évoluer l'administration en place

� La civilisation médiévale se constitue en Occident autour d’un triple héritage : romain, germanique et chrétien.

� A la Noël de l’an 800, le pape couronne Charlemagne empereur d’Occident. Celui-ci établit sa résidence permanente à Aix-la-Chapelle. Il y fait construire un vaste palais et y installe son administration, son trésor ainsi qu'une bibliothèque.

L’empire carolingien est découpé en comtés. A leur tête, les comtes représentent l’empereur, perçoivent les impôts, rendent la justice et lèvent l’armée. Ils prêtent serment de fidélité à l’empereur et sont contrôlés par les missi dominici, «envoyés du maître », qui vont toujours par deux (un comte et un évêque) et informent Charlemagne de l’état du royaume. Fin de l’unité de l’Empire

Avant même la mort de Charlemagne, l’unité de l’empire est menacée. Les comtes échappent à l’autorité de l’empereur et la sécurité extérieure est mise en danger par le retour des invasions. En 814, Louis le Pieux succède à son père mais ses fils se livrent une guerre fratricide. A la mort de Louis en 840, la guerre reprend de plus belle entre l’aîné Lothaire, Louis le Germanique et Charles le Chauve. En 843, l’empire est partagé par le traité de Verdun.

La monarchie connaît un tel affaiblissement que la majeure partie du royaume est donnée à des ducs ou à des comtes qui acquièrent une véritable autonomie sur leurs terres et les transmettent à leurs descendants. De fait, ces grands seigneurs s'affranchissent de l'autorité royale et exercent localement les droits régaliens. A la même époque commence une nouvelle vague d’invasions. La lignée carolingienne est contestée.

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La monarchie capétienne

Une nouvelle famille, celle des Capétiens, s’installe au pouvoir avec l’élection d’Hugues Capet à la tête du royaume en 987. Le pouvoir des rois de France repose initialement sur une alliance avec l'Eglise, symbolisée par le baptême de Clovis à Reims. Cette alliance est renouvelée quand Pépin le Bref et Charlemagne sauvent le pape des Lombards et lui permettent de constituer les Etats de l'Eglise. Les rois de France sont donc les défenseurs naturels de la papauté.

Afin d'assurer une monarchie stable, la 1ère préoccupation d'Hugues Capet fut de fonder une dynastie héréditaire. Jusqu'au début du XIIIème siècle, les rois prennent la précaution de faire sacrer leur fils aînés alors qu'ils sont encore sur le trône, associer du vivant du roi le fils aîné au trône. De nouvelles relations entre les hommes vont apparaître, donnant ainsi naissance à la féodalité. Règles vassaliques : le vassal doit à son seigneur : assistance militaire, service de conseil et aide financière (participation pour la rançon si le seigneur est fait prisonnier, lors du mariage de sa fille aînée, lors de l'adoubement de son fils aîné et lorsqu'il part en croisade). Au lieu d'appartenir au roi, le pouvoir est morcelé aux mains de puissants seigneurs qui lèvent des impôts, font la guerre ou rendent la justice eux-mêmes dans leur fief. La France est ainsi un puzzle de seigneuries.

Cependant, Le roi dispose d'un atout majeur qui lui donne de l'autorité sur les autres seigneurs qui sont bien souvent plus puissants que lui : il est couronné et sacré par un évêque, et est ainsi reconnu comme roi de droit divin. Ce sacre religieux lui assure un pouvoir qui le distingue de ses vassaux et lui garantit un prestige incomparable.

1ère croisade en 1096 : Jérusalem a été prise par les Fatimides en 996. Le Saint Sépulcre est détruit et l’arrivée des Turcs musulmans en 1078 bouleverse encore cet équilibre précaire. Face à la gravité de la situation en Terre Sainte, région devenue quasiment inaccessible aux pèlerins, le Pape Urbain II réunit un concile à Clermont en 1095 et invite les chevaliers à aller libérer le tombeau du Christ en leur promettant une place au Paradis. La croisade est donc un pèlerinage en armes, qui se donne pour but la délivrance du Saint Sépulcre. Echec de la 2ème croisade (1147 – 1149) : Profitant des rivalités au sein du royaume de Jérusalem, les turcs envahissent le comté d'Edesse en 1144. A la demande de Louis VII, le pape Eugène III prêche cette 2ème croisade en 1145 ou 1146. Cette dernière ne rencontre pas l'enthousiasme de la 1ère croisade. L'expédition est un échec total. Au XIIème siècle, Louis VI (1108-1137), en butte aux révoltes de petits seigneurs assiège leurs châteaux qu'il démantèle, et met fin à leur indépendance. A sa mort, le domaine royal, agrandi, est d'un seul tenant. Louis VII (1137-1180) épouse Aliénor d'Aquitaine, héritière du quart sud-ouest du royaume, et il installe ainsi pour la première fois l'autorité du roi dans le Midi. Ce rattachement est de courte durée : le couple royal se sépare, Aliénor épouse Henri II Plantagenêt qui devenu roi d'Angleterre, tient par sa femme ou par héritage toute la moitié ouest de la France. Philippe Auguste (1180 – 1223)

A partir de 1180, Philippe Auguste succède à son père Louis VII : il n'a que 15 ans et est encerclé de principautés théoriquement vassales mais en réalité indépendantes et arrogantes vis à vis du pouvoir royal. Il va se consacrer en priorité à affirmer son pouvoir en agrandissant son royaume. Il lutte contre les rois d'Angleterre, Henri II et ses fils Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre, en exigeant la stricte application du droit féodal. �1202 : Philippe Auguste fait condamner Jean Sans Terre à la saisie de ses fiefs français. Il s’empare ainsi de l’Anjou, du Maine et de la Touraine et envahit la Normandie. �24 juillet 1214 : Bataille de Bouvines emportée par les chevaliers français. Par ses victoires, l'autorité et la puissance de Philippe Auguste en sortent renforcées et l'unité du pays s'affirme. Echec de la 3ème croisade : 1190 : Les rois Philippe Auguste, Richard Coeur de Lion et l'empereur d'Allemagne Frédéric Barberousse rassemblent leurs contingents à Vézelay et font le "votum crusis" (voeu de croisade). Pour la première fois les armées française et anglaise arrivent par la mer. Suivant la vallée du Danube, l'empereur d'Allemagne Frédéric Barberousse se noie en traversant une rivière en Asie Mineure et son armée se disloque : il ne reste donc en lice plus que les armées française et anglaise pour poursuivre cette croisade. La mésentente entre les souverains ne tarde pas à être préjudiciable à l'efficacité de l'expédition. Philippe Auguste rentre en France en 1191, Richard Coeur de Lion négocie en 1192 avec Saladin le traité de Jaffa. Mais est fait prisonnier sur le chemin du retour et ne sera libéré qu'en 1194.

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Louis IX : Saint Louis (1226 – 1270) Louis IX renforce les acquisitions de Philippe Auguste; grâce à lui, l'autorité royale progresse dans le Sud-est, il contribue à la répression contre l'hérésie cathare et en profite pour parachever la conquête du comté de Toulouse. C'en est fini des libertés des pays de langue d'Oc : le Midi se trouve définitivement placé sous l'autorité royale et le Nord lui impose sa civilisation. Le pouvoir des rois s'étend et se renforce. Un roi législateur et justicier :

� Systématise son pouvoir législateur en multipliant les ordonnances � Impose sa propre monnaie par ordonnance et limite la circulation de celles des seigneurs à leur

propre domaine � 1254 : crée un Parlement à Paris (cour de justice et conseil politique) � met fin au jugement de

Dieu en faisant rechercher des preuves par des enquêtes et des auditions de témoins Philippe IV le Bel (1285 – 1314)

Son règne est marqué par un accroissement de l'autorité royale, un affranchissement de l'autorité pontificale, un développement de l'administration et une extension du domaine sous contrôle royal. � Conflits avec la papauté, au nom de l'indépendance de l'Eglise de France. La victoire de Philippe le Bel confirme l’indépendance absolue des rois chrétiens à l’égard de la papauté. En 1314, Philippe le Bel meurt. La paix règne dans son royaume qui abrite entre 15 et 20 millions d'habitants, les frontières sont bien gardées et les féodaux sont maintenus dans l'obéissance : le roi devient enfin plus un vrai souverain qu'un suzerain.

A la mort de Charles IV le Bel en 1328, faute d’héritier mâle en ligne directe, la noblesse du royaume donne le trône à Philippe IV de Valois. Cela excitera la rancœur du roi d’Angleterre Edouard III et sera à l’origine de la Guerre de Cent Ans.

Le « roi-Etat »

Tout au long du Moyen Âge ont été précisées les caractéristiques du pouvoir monarchique dont le prestige tient probablement à son caractère sacré et dont les prérogatives se renforcent sans cesse. Les premiers Capétiens utilisent politiquement le sacre et le système des liens fédéo-vassaliques pour asseoir leur autorité. Le roi est le suzerain suprême, le seul à ne prêter hommage à personne. Le prestige du sacre : Le roi est sacré avec les saintes huiles que les anges auraient apportées du ciel à Clovis. Il prononce alors les 4 serments qui l'engagent à protéger l'Eglise et son peuple. Il reçoit vêtements et attributs symboliques (les sandales, la camisole, les bottines, les éperons et l'épée). La tunique et la dalmatique, signes de distinction ecclésiastique, le manteau, l'anneau, le sceptre et la main de justice en ivoire, symbole de sa toute puissance lui sont ensuite remis. On lui prête des pouvoirs de thaumaturge et l'on croit qu'il peut guérir miraculeusement les écrouelles par le seul contact de ses mains.

Ses sujets lui doivent une soumission et une obéissance sans bornes; toute désobéissance est considérée comme un sacrilège. Roi très chrétien, le monarque est le représentant de Dieu sur la terre. Souverain de droit divin, il est responsable devant Dieu seul. Le roi rassemble tous les pouvoirs, qu'ils soient exécutifs, législatif ou judiciaire. Il peut lever l'impôt, décider de la paix et la guerre, disposer de la vie et des biens de tous ses sujets. La création des impôts réguliers est une conséquence de la guerre, le roi est obligé d'avoir recours à des finances extraordinaires.

Le terme France n’apparaît dans son sens moderne qu’au début du XIe siècle. Selon Alain Boureau,

« l’émergence du royaume comme Etat, hors de la structure féodale, naît avec Philippe Auguste, même si cette « institution imaginaire » précède largement sa consolidation administrative ». La royauté se définit alors comme le sommet d’une pyramide (roi, ducs, comtes), tout en faisant du roi le souverain direct de ses sujets.

C’est de 1180 à 1328, et particulièrement sous les règnes de Philippe II Auguste (1180 – 1223), Louis IX:Saint Louis (1226 – 1270) et Philippe IV le Bel (1285 – 1314) que s’accomplit l’essentiel :

- Philippe Auguste se consacre à la lutte contre le roi d’Angleterre Henri II Plantagenêt et ses fils. Il réussit finalement à confisquer les fiefs français des Anglais. Il devient alors le maître de la France du Nord et le plus grand prince territorial du royaume. Il triomphe ensuite à Bouvines d’une coalition menée par l’empereur germanique et le comte de Flandre en 1214 ; - Le règne de Saint Louis marque l’apogée de la monarchie féodale. Modèle de la chrétienté, mort de la peste à Tunis lors d’une croisade, il est canonisé dès 1297 : les rois de France ont désormais un saint pour ancêtre. - Philippe le Bel, quant à lui, se proclame « empereur en son royaume » : délié de toute influence extérieure, fût-elle papale. En 1302, il réunit à Paris une grande assemblée qui peut être considérée comme les premiers états généraux du royaume.

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Une administration royale se construit très progressivement. Philippe Auguste met en place des baillis dans le nord et des sénéchaux dans le sud qui représentent le roi dans les provinces et qui sont chargés de contrôler les prévôts, ces agents locaux du roi qui administrent ses biens et exercent la justice en son nom. Sous Saint Louis apparaît le Parlement, où est rendue la justice royale et qui joue le rôle de chambre d’appel. Le roi impose aussi sa monnaie dans tout le royaume. Philippe le Bel crée la Chambre des Comptes, chargée du contrôle de la gestion financière du domaine royal. La Chancellerie, qui s’occupe de la rédaction et de l’expédition des actes royaux, se développe enfin considérablement.

Une capitale

Au XIIIe siècle, Paris compte environ 200 000 habitants et est la ville la plus peuplée de l’Occident chrétien. Philippe II Auguste décide d’y laisser ses archives, qui jusqu’alors suivaient le roi dans ses déplacements, d’y construire une enceinte plus vaste et de faire paver quelques rues. La ville, et tout particulièrement l’île de la Cité, devient ainsi le centre administratif du royaume. Le palais n'est plus seulement la résidence du roi, il est devenu le siège du gouvernement.

Le lien privilégié entre Paris et le roi s’affaiblit pourtant singulièrement au cours de la guerre de Cent Ans. En 1418, sous le roi fou Charles VI, la ville se donne aux Anglais pour être la capitale d’une France anglo-bourguignonne. Après 1453, le royaume libéré, la royauté s’établit dans la vallée de la Loire. C’est là que résident désormais les rois et que se trouvent les centres du pouvoir. A la fin du Moyen Age, les rois de France ne font plus que visiter Paris où ils ne vivent plus.

Paris, qui fut la capitale du royaume pendant plusieurs siècles, ne l’est donc plus au XVe. Retenons enfin que sa domination ne fut ni absolue, ni exclusive.

Une langue

Comme toutes les nations médiévales, la France est multilingue. Au nord la langue d’oïl et au sud la langue d’oc. Certaines provinces du royaume parlent le flamand, le basque, le breton. Quant au latin, il est la langue des clercs, de la liturgie, des étudiants, mais aussi de l’administration royale, au moins jusqu’au début du XIVe siècle.

Au XIIIe siècle, le succès international du français est incontestable. Il est parlé dans les Etats latin d’Orient, mais aussi à la cour d’Angleterre et par les principaux seigneurs flamands et allemands. C’est en français que l’italien Marco Polo rédige Le Livre des Merveilles du Monde.

Le succès du français de Paris à l’intérieur du royaume est en revanche beaucoup plus mitigé. S’il progresse dans les actes royaux à partir de Philippe le Bel, dans la France du Sud, la langue de l’administration royale reste le latin, alors que les actes privés ou municipaux sont rédigés en langue d’oc.

Pourtant, vers 1300, l’unité linguistique commence à apparaître comme nécessaire aux nations. L’idée de langue maternelle, au sens actuel du terme, surgit chez Dante à cette époque. L’idée émerge aussi progressivement que les peuples parlant la même langue ont vocation à vivre dans le même Etat, et que les membres du même Etat doivent parler la même langue.

Rappelons pour mémoire que l’ordonnance de Villers-Cotterêts qui impose l’usage du français dans les actes publics, qui fait donc du français la langue de l’Etat, date de 1539, sous François 1er.

La Guerre de Cent Ans (1337 – 1453)

La guerre de Cent Ans est un moment clé de la construction de l’Etat national. Elle tire son origine de la crise dynastique à laquelle est confronté le royaume de France au début du XIVe siècle. Quand Charles IV meurt sans héritier en 1328, Philippe VI de Valois est choisi pour lui succéder. Le roi d’Angleterre Edouard III refuse de lui prêter hommage pour ses fiefs de Guyenne et réclame la couronne de France en 1337. C’est le début d’un long conflit entrecoupé de trêves.

Les français sont vaincus à Crécy (1346), puis à Poitiers (1356) où le roi Jean le Bon (1350-1364) est fait prisonnier. Aidé de son connétable, Du Guesclin, Charles V le Sage (1364-1380) parvient à reconquérir l'essentiel de son royaume.

Le règne de Charles VI (1380 – 1422) plonge alors la France dans l’anarchie. Victime de fréquents accès de folie, le roi laisse la guerre civile éclater entre les partisans du duc de Bourgogne, les Bourguignons, qui s’allient aux Anglais, et les partisans de Louis d’Orléans, les Armagnacs. Les Anglais écrasent les troupes françaises à Azincourt (1415) avant que le traité de Troyes (1420) ne déshérite le dauphin au profit du roi d’Angleterre.

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Le sursaut vient alors de Jeanne d’Arc, une jeune Lorraine, qui rejoint Charles VII (1422 – 1461) réfugié au sud de la Loire en 1429, délivre Orléans et conduit le roi à Reims où il est sacré. En le faisant sacrer à Reims, Jeanne d'Arc a contribué à lui donner tout son prestige, en application de la tradition capétienne. Cette cérémonie conforte de manière définitive la légitimité du roi aux yeux du peuple, c'est dire l'importance de la religion et du fait religieux au Moyen Âge. Arrêtée devant Compiègne par les Bourguignons en 1430, Jeanne est livrée aux Anglais puis brûlée vive à Rouen en 1431.

Charles VII entreprend la reconquête de son royaume grâce à une armée professionnelle financée par un nouvel impôt, la taille. Après la bataille de Castillon (1453), les Anglais quittent le sol français, à l’exception de Calais qu’ils n’évacuent qu’en 1559. Le roi est désormais à la tête d’un royaume réunifié que protège une armée soldée, financée par un impôt permanent. 1347 : Grande Peste. Le terrible virus de la peste s'est installé en Europe à la faveur de l'accostage d'une nef en provenance d'Asie dans les ports de Marseille et de Gênes en 1347. Il va frapper en quelques mois la plupart des régions d'Europe et tuer jusqu'à 40% de la population de certaines d'entre elles. La guerre de Cent Ans a eu pour effet de fragiliser la monarchie, mais elle a surtout contribué à obliger les rois de France à mettre en place un système de gouvernement plus solide. Au terme de la guerre, les rois de France ont réussi à renforcer l'Etat monarchique. Ils sont les seuls à entériner des lois, à exercer la justice, à lever des impôts, à frapper monnaie et les seuls à décider de la guerre et de la paix. Paradoxalement la monarchie sort affermie des épreuves et peut s'appuyer désormais sur un sentiment national qui s'est construit dans les combats contre les anglais.

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L’Europe des abbayes et des cathédrales

Expression monumentale avec des réalisations, en particulier aux XIIème et XIIIème siècles, la construction des églises est l'aboutissement de l'épanouissement de la pensée spirituelle catholique.

Comment peut-on expliquer le mouvement de grande ampleur qui a construit les églises et cathédrales ? Comment peut-on expliquer l'importance et la diversité des autres manifestations de la ferveur religieuse des populations européennes ?

Une des réponses possibles se trouve dans la vigueur de la foi. La spiritualité catholique se fonde d'abord sur l'affirmation du dogme, construit par les papes et la hiérarchie épiscopale dans la phase de christianisation de l'Europe dès le IVème siècle, en s'appuyant sur la vie de Jésus et les textes sacrés.

Il ne s'agit pas moins que de sauver son âme pour l'éternité et de participer à la Résurrection des Corps : la société entière est éduquée dans cette perspective. Les églises, abbayes et cathédrales sont les lieux sacrés qui y contribuent.

Aborder aujourd'hui l'étude de la construction des cathédrales au Moyen Age ne peut donc se limiter à une description du visible (décrire les formes, les ornements, les décorations…); il faut dépasser le visible pour découvrir l'invisible, l'essence même de la foi qui a construit les monuments. Il faut entrer dans les mentalités des époques et des lieux concernés et mettre en valeur le sens du sacré, ce qui est difficile car étranger à la pensée profane. L'enjeu pédagogique est bien de tenter de comprendre le fait religieux.

Une église omniprésente Dotée d’une organisation puissante, l’Eglise est au cœur de la société médiévale occidentale dont elle est le principal élément d’unité. Elle contrôle la population par un encadrement efficace et hiérarchisé placé sous l’autorité du pape. Elu par les cardinaux, celui-ci affirme son indépendance à partir du XIe siècle face aux puissants : seigneurs, rois et empereur. Il bénéficie d’une arme redoutable : l’excommunication, qui fait douter même les rois et les plus grands seigneurs. Aux laïcs s’opposent les clercs qui exercent une fonction religieuse et se distinguent par la tonsure. Les clercs se répartissent entre le clergé régulier, qui regroupe ceux d’entre eux qui observent une règle de vie et vivent en communauté comme les moines, et le clergé séculier qui vit dans le siècle, au milieu des fidèles, comme les prêtres et les évêques. Groupe sacralisé par sa fonction religieuse, le clergé dans son ensemble est placé au somment de la hiérarchie sociale, ce qui le rend incontournable. L'individu n'a de reconnaissance sociale que religieuse. Un état civil est totalement inconcevable dans cette société. De la naissance à la mort, la religion est présente à chaque instant de la vie des hommes au Moyen Age. Les fêtes religieuses rythment l’année et la vie sociale des paroisses et des corporations. Les chrétiens sont soucieux d’assurer leur salut. Le jour du Jugement dernier, en effet, les bon, qui accèderont au royaume des cieux, seront séparés des méchants qui brûleront en enfer. Aussi la foi s’exprime-t-elle par la prière, la pratique régulière, la vénération des reliques, la construction d’édifices religieux et les pèlerinages. Ceux-ci conduisent les chrétiens vers Rome, Jérusalem ou Saint Jacques de Compostelle. Les évêques sont placés à la tête des diocèses (ou évêchés) subdivisés en paroisses. Ils célèbrent le culte dans l’église principale du diocèse, la cathédrale, et étendent leur autorité sur tous les clercs du diocèse. L’Eglise est riche grâce à la dîme, impôt en nature qui correspond en principe au dixième des récoltes, et grâce aux donations des fidèles. En 1054, après de nombreuses crises et des évolutions liturgiques divergentes, les Eglises d’Orient et d’Occident se séparent définitivement. Le schisme d’Orient voit le pape Léon IX et le patriarche de Constantinople s’excommunier mutuellement. L’église d’Orient prend alors le nom d’Eglise Orthodoxe. Du XIe au XIIIe siècle, l’Eglise se fait conquérante et s’attaque à l’Islam (croisades et Reconquista : première croisade engagée par les chrétiens d’Occident contre les envahisseurs musulmans), alors que le tribunal de l’Inquisition (tribunal créé en 1233 par le pape Grégoire IX) pourchasse les hérétiques comme les Cathares. Impliquée dans tous les pouvoirs, religieux, économique, social et politique, la religion catholique connaît un apogée pendant plusieurs siècles et imprègne profondément les mentalités mais la confusion des fonctions devient un problème incessant.

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Des abbayes, des cathédrales…

L'architecture religieuse du Moyen-âge est l'expression de la pensée religieuse catholique qui la soutend. Elle est la trace visible et marquante de la relation des croyants avec Dieu, dans une société dans laquelle la religion est le lien social puissant qui assure la cohérence du groupe. C'est l'église qui est au cœur de la religion catholique :

- Le lieu de culte pour les rites catholiques qui rythment le temps du croyant, dans le temps journalier mis sous la protection d'un saint patron, dans le temps hebdomadaire, avec le dimanche (obligation de faire de cette journée un moment de réflexion et de pratiques religieuses), dans le temps de l'année par les fêtes religieuses, par le temps personnel des individus en les accompagnant tout au long de la vie par les 7 sacrements. L'église est ouverte à tous et tout est occasion de célébrations. La cloche, objet sonore et musical, est le marqueur de temps et le clocher qui l'abrite un repère dans l'espace. - Le siège de l'autorité du clergé, qui s'instaure comme médiateur entre les chrétiens et Dieu. - L'ancrage de la foi et un rempart contre les hérétiques, - La maison du peuple, la sacralisation de l'église n'empêche pas l'utilisation par les fidèles de cet espace comme lieu de rencontre, de discussions et d'échanges (le parvis). De plus, c'est dans les églises que se développent des lieux d'enseignement dans les villes et plus tard, des universités.

La fièvre des chantiers veut traduire la pensée chrétienne par des monuments, dans une recherche

de perfectionnement permanente. Les églises et les cathédrales constituent un maillage religieux qui marque le territoire. Les initiatives reviennent souvent et d'abord des religieux, ces "grands abbés bâtisseurs" vont multiplier les constructions. On peut citer St Bernard (T 1152) ou Suger, abbé de St Denis en 1121/1151 qui se consacre à la reconstruction de l'abbaye pour en faire la plus belle réalisation du moment, à la gloire de Dieu et des rois de France dont c'est la nécropole. Les prêtres et évêques s'engagent également, ainsi que les papes de Rome ou à Avignon (au XIVème), qui ont lancé des opérations de grande envergure avec le Vatican et le Palais des Papes. Ce dernier est le plus grand des édifices gothiques du monde. Avec le développement des villes au XIIème siècle, la bourgeoisie urbaine a voulu montrer sa ferveur mais aussi sa puissance et sa richesse : les cathédrales ne sont plus seulement des signes religieux mais des signes de son pouvoir économique et social qui ne fait que croître. La construction des cathédrales représente une somme de travail difficilement imaginable dans le contexte technique de l'époque et des investissements financiers colossaux à la hauteur des ambitions démesurées qui animent les travaux. Tous les métiers de la construction interviennent. Les techniques utilisées supposent des personnels compétents et formés. La construction des édifices a mobilisé des énergies multiples, créé de l'emploi, développé les techniques et les innovations; mais il ne suffisait pas de construire… Il fallait aussi faire du beau : la recherche esthétique va triompher dans l'architecture religieuse. L'importance du beau Le catholicisme a cherché à toucher les émotions des fidèles pour créer un contexte favorable au recueillement mystique. Tous les sens sont appelés. Cette sensibilité accélère le chemin pour se rapprocher de Dieu, qui est la beauté dans sa perfection. C'est un espoir pour l'au-delà qui permet de supporter la précarité de la vie terrestre. Le beau doit être signifiant. Pour rendre intelligible la pensée spirituelle forcément abstraite, les milieux intellectuels catholiques ont manié le symbole, représentation imagée d'abord pour formuler la pensée, mais aussi comme outil pédagogique de vulgarisation de la Bible à l'usage des populations qui ne savaient pas lire. Des exemples de thèmes fondateurs que l'on va retrouver dans la décoration des édifices religieux : l'Ascension du Christ, la Nativité de Jésus dans la crèche, la mort par Crucifixion, le Jugement Dernier et la Résurrection… Les monastères, des foyers culturels et artistiques dès le IXème siècle : L’une des principales caractéristiques de l’Eglise médiévale est l’importance du monarchisme. Un ensemble de moines obéissant à la même règle forment un ordre. Dans la 1ère partie du M-A la règle de St Benoît eut un certain succès, o point d'être imposé à tous les monastères par les Carolingiens. Les moines vivent au sein de monastères dirigés par un abbé, d’où leur autre nom d’abbayes. Les abbayes s’organisent le plus souvent autour d’un jardin central, le cloître, entouré d’une galerie. Il s’agit là d’édifices de type roman. Fondé au Xe siècle, l’ordre de Cluny est au XIe à la tête de plus de 800 monastères et devient une puissance économique et politique. Les moines clunisiens accordent une attention particulière à la prière, au luxe et aux cérémonies somptueuses.

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En 1098, la création de l’ordre de Cîteaux relève d’une volonté de retour aux sources et à l’austérité. L’ordre se développe au XIIe siècle sous la direction de Bernard de Clairvaux. Chez les cisterciens, les bâtiments sont simples et dépouillés. Les monastères sont construits à l’écart du monde, dans des lieux reculés. Les moines contribuent ainsi à l’aménagement de l’espace rural par d’importants défrichages de forêts. Au XIIIe siècle, de nouvelles communautés ne vivant que d’aumônes apparaissent : les ordres mendiants. Le fils d’un riche marchand italien, François d’Assise, choisit de se consacrer aux exclus et crée l’ordre des franciscains. Un Espagnol, Dominique, fonde celui des dominicains. Ces religieux ne vivent plus dans des monastères isolés du monde mais au cœur des villes où ils se consacrent à la charité (franciscains) et à la prédication (dominicains). L'art roman (an mil) : Autour de l’an mil, l’Occident connaît un vif élan de construction d’art religieux. Du milieu du XIe siècle au milieu du XIIe siècle se répand un art dit « roman » parce qu’il emprunte de nombreux éléments à l’art romain, surtout dans le domaine de l’architecture. Dans ces églises basses et peu éclairées, le plan en croix latine remplace le plan basilical. Les sculptures prennent une place primordiale. L’art roman se manifeste aussi dans la construction de nombreuses abbayes. L'art gothique, l'art français du XIIème au XIVème siècle : L’art gothique, né au cœur du royaume de France, succède à l’art roman au milieu du XIIe siècle et s’épanouit au XIIIe. Les villes construisent des cathédrales, églises de l’évêque et de la cité, plus hautes et plus lumineuses grâce à l’utilisation de la croisée d’ogives et à celle de l’arc-boutant (pilier en demi arc servant à soutenir un mur). Les murs sont percés de larges ouvertures ornées de vitraux qui laissent pénétrer la lumière à l’intérieur des édifices. L'art gothique est toujours l'expression de la ferveur d'une population urbaine, mais clergé et bourgeois veulent utiliser la richesse pour la gloire de Dieu. L'évolution de la pensée théologique au XIIIème siècle met l'accent sur l'humanité du Christ, homme parmi les hommes et donc sur sa mère : le culte marial se développe et se concrétise dans l'art gothique avec la décoration et les appellations des édifices, sous le vocable de "Notre Dame" Entre les IXème et XIIIème siècle, soit pendant presque 500 ans, l'imbrication entre les croyances et les arts est totale parce que la vie terrestre est imprégnée de l'espérance du ciel.

� L’art roman L'art roman ne s'affirme vraiment qu'à partir du 10e siècle. On distingue plusieurs phases :

1er âge roman (950 – 1060/70) L'art roman apparaît dans l'Europe méridionale. Les premières églises romanes ont un plan simple (une nef à trois vaisseaux terminés par une abside, sans transept). Elles sont généralement de petite taille et massives. La charpente en bois est progressivement remplacée par un voûtement en pierre qui ne concerne dans un premier temps que quelques parties des églises (collatéraux, absides). Un souci de rythmer l'espace apparaît avec l'évolution des piliers. La sculpture monumentale se développe également.

2nd âge roman (1060/70 – 1130) Le plan en croix latine se généralise (il apparaît déjà à la fin du IXe siècle). Le voûtement en pierre s'étend à la nef, même si l'on trouve encore des charpentes. On favorise les voûtes en berceau (brisé ou cintré) et les voûtes d'arêtes. Les poussées sont contenues soit par des murs épais, soit par des bas-côtés soutenus par des contreforts. On peut trouver des élévations à trois niveaux, en ajoutant au-dessus des tribunes des fenêtres hautes qui permettent un éclairage direct de la nef. Cette dernière solution sera la plus utilisée dans les édifices gothiques. L'intérieur des édifices était parfois peint (il est difficile de déterminer aujourd'hui quelle était la proportion d'édifices peint).

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Bien souvent, les points essentiels de l'architecture sont ornés de sculptures (chapiteaux, tympan), même si on ne trouve pas de tels ornements dans toutes les régions. Les grands tympans sculptés apparaissent vers 1100. Auparavant, seuls le linteau et l'encadrement des portes étaient ornés. Ensuite, la sculpture historiée s'étend aux voussures et aux ébrasements. Le tympan le plus orné donne souvent sur la rue principale de la ville. L'art roman a longtemps été considéré comme un art barbare. La

réhabilitation du roman et du gothique commence au début du XIXe avec l'action de restauration de Mérimée.

� L’art gothique

On situe généralement la naissance de l'art gothique à Saint-Denis (ci-contre). On identifie généralement l'art gothique à la croisée d'ogives et aux arcs-boutants. Pourtant, l'apparition de la croisée d'ogives précède de beaucoup celle de l'art gothique, puisqu'on la trouve pour la première fois à Lessay, en Normandie ou à Durham, en Angleterre à la toute fin du 11e siècle. Suger s'est d'ailleurs inspiré des innovations normandes pour la construction de sa basilique. Quant aux arcs-boutants, leur utilisation n'est devenue systématique qu'au 13e siècle. Notre-Dame de Paris en était initialement dépourvue. Ils n'étaient pas toujours techniquement indispensables (d'ailleurs, lorsqu'ils sont utilisés le point d'application de l'arc n'est pas toujours celui de la poussée) et leur systématisation

répond plutôt à un parti pris esthétique. Le gothique n'est donc pas seulement le recours aux possibilités architectoniques offertes par la croisée d'ogives et l'arc-boutant. C'est aussi la recherche d'une lumière toujours plus abondante, d'une élévation toujours plus haute et d'une unification de l'espace par le décloisonnement des volumes

Le gothique primitif (1140 – 1190) Le gothique se dessine essentiellement à travers deux edifices : la basilique Saint Denis et la cathédrale de Sens. A Saint Denis, le double déambulatoire révèle la liberté laissée par les croisées d'ogives. Sa grande finesse, très audacieuse, ne sera pas immédiatement comprise et suivie. Suger fait un autre choix important en optant pour la façade harmonique, apparue en Normandie. A Sens, les choix architecturaux sont moins audacieux : l'alternance des supports (piliers forts et faibles) est conservée et avec elle la voûte sexpartite. Les murs restent épais. Cependant des innovations sont bel et bien présentes : l'absence de transept unifie l'espace, l'éclairage fourni par les grandes baies des bas-côtés est abondant.

Les apports de Sens sont compris plus vite que ceux de Saint Denis. Ils sont transposés, avec de nombreuses adaptations, à Senlis, Noyon...Notre-Dame de Noyon inaugure la formule de l'élévation à quatre niveaux (grands arcades, tribunes, triforium, fenêtres hautes) qui, sans être exclusive (Notre-Dame de Paris a trois niveaux...) connaîtra un grand succès pendant toute la seconde moitié du 12e siècle. A partir de 1160 commence une course à la hauteur, inaugurée par Notre-Dame de Paris et Notre-Dame de Laon (ci-contre). A Laon, le maître d’œuvre utilise un mur découplé, une élévation à quatre niveaux et réussit à donner à la cathédrale un éclairage abondant. A Paris, le mur est simple, le triforium supprimé au profit de tribunes à larges baies et la lumière moins abondante. C'est pourtant ce second modèle qui connaît le plus de succès. De nombreuses recherches sont faites par la suite sur le rythme des percements, sur la diaphonie.

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Le gothique classique (1190 – 1240) En 1190, le gothique trouve un nouveau souffle, notamment au Nord de la France. Les deux édifices les plus marquants de cette période sont Chartres et Bourges. A Bourges est adoptée une élévation pyramidale à cinq niveaux, permise par l'utilisation de double collatéraux. 1 - Arc formeret : la voûte sexpartite unit deux travées. 2 - Elévation de la nef centrale 3 - Elévation du premier collatéral, englobée par la grande arcade de la nef centrale 4 - Elévation du second collatéral, englobée par la grande arcade du premier collatéral C'est la combinaison de l'élévation de la nef centrale et des deux collatéraux qui constitue une élévation à cinq niveaux Le maître d'oeuvre renonce à la tribune mais pas aux voûtes sexpartites. A Chartres subsiste une alternance des piliers dans le décor mais pas sur le plan technique. L'adoption de l'élévation à trois niveaux, soutenue par des arcs-boutants, qui est faite à Chartres vaudra désormais pour tous les autres édifices. Enfin, Chartres se caractérise par la recherche d'un ajournement maximal. Le gothique rayonnant (1240 – 1350)

A partir de 1231 émerge progressivement un nouveau style qui se caractérise surtout par la virtuosité des remplages, une verticalité accrue, des piliers fasciculés et l'édification de murs de verre. L'origine du gothique rayonnant peut être située à Paris. Là encore, la basilique de Saint Denis fait figure de précurseur, puisque ces innovations apparaissent lors de la réfection des parties hautes du choeur. On introduit notamment un triforium à claire-voie. La constitution de murs de verre prend toute son ampleur avec

la Sainte Chapelle. Le gothique rayonnant s'impose réellement à partir de 1240. Les édifices alors en construction, comme Amiens, Reims ou Beauvais, prennent immédiatement en compte cette évolution et changent partiellement leur plan (parties hautes du choeur à Beauvais, façade occidentale à Reims...). C'est à cette époque que la rose devient vraiment un élément incontournable du décor, même si elle était déjà très utilisée avant. La multiplication des chapelles latérales permet d'agrandir l'espace de la cathédrale. Le gothique flamboyant (1350 – 1500)

Les innovations se font rares pendant une longue période. Un souffle nouveau est trouvé vers 1420. La structure des édifices reste la même, mais ceux-ci "flamboient" sous l'effet de décors exubérants, notamment en Normandie (Saint Maclou de Rouen...). Le terme de flamboyant est dû à la forme de flamme des remplages des baies (notamment des roses). A l'intérieur les voûtes deviennent très complexes. On constate aussi un retour plus fréquent à des élévations à deux niveaux qui font disparaître les murs entre les grandes arcades et les baies supérieures (Saint Germain l'Auxerrois, Saint Etienne du Mont). Plus tardivement, certains éléments d'architecture gothique sont utilisés à des fins essentiellement décoratives. C'est le cas des croisées d'ogives qui se complexifient jusqu'à perdre leur sens. On leur adjoint des clefs de voûtes pendantes qui peuvent menacer la stabilité de l'édifice (ex : certaines chapelles de Senlis, dont on voit le transept ci-contre)

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L'Islam On insistera davantage sur cette civilisation et son rayonnement, abordés à partir de l'exemple d'une ville, que sur les constructions politiques qui résultent de l'expansion. Il s'agit de mettre en valeur la diversité des contacts que développent ces différentes civilisations : affrontements guerriers (croisades, Reconquista…), échanges commerciaux (comptoirs), influences culturelles. Outre une étude approfondie de l'Islam, le problème de fond qui est posé dans ce thème revient à étudier les rapports entre deux religions du Livre.

Une religion nouvelle à la conquête du monde Le mot Islam, au sens propre de son attitude religieuse de soumission à Dieu, caractérise la révélation monothéiste prêchée par Mahomet en Arabie au VIIe siècle, et répandue au cours des temps sur toute une partie des terres habitées. Il s’applique aussi à la communauté formée par les adeptes de cette foi, et à la civilisation qui en est issue. L’islam est donc une religion apparue en Arabie au VIIe siècle de notre ère. Son fondateur, Mahomet, est né à La Mecque aux alentours de 570. Sa vie nous est connue grâce à une biographie traditionnelle, la Sîra. En 612, Mahomet raconte que l'ange Gabriel lui a révélé en songe qu'Allah (Dieu en arabe) l'a choisi comme prophète. C'est la Révélation. La nouvelle religion s’inscrit ainsi dans la continuité des religions juive et chrétienne. En dehors de quelques intimes, la communauté initiale touche essentiellement des humbles en marge de la cité. Elle passe donc pour subversive. En 622, en proie à l’hostilité de l’aristocratie mecquoise, le Prophète et ses partisans quittent La Mecque pour Yathrib qui prend le nom de Médine. C’est l’Hégire, point de départ du calendrier musulman. En 632, le Prophète accomplit le Pèlerinage à La Mecque avant de mourir en 633. Mahomet ne laisse pas d’héritier mâle et ne désigne pas clairement de successeur (calife). Aussi, sa mort provoque-t-elle une crise politique et religieuse. Pour les uns, les sunnites, le calife ne doit être qu’un remplaçant du prophète, chargé de perpétuer et d’appliquer sa pensée. Pour les autres, les chiites, l’étincelle divine est appelée à se perpétuer à travers Ali (beau-fils de Mahomet) et ses descendants. Sous les quatre premiers califes, l’islam connaît une expansion triomphale qui lui permet de prendre le contrôle de l’Arabie, de la Syrie, de la Mésopotamie (Irak), de la Perse (Iran), de l’Egypte et de la Cyrénaïque. Suivent ensuite en Occident la prise de la Tripolitaine, la conquête du Maghreb et la soumission définitive de la rive méridionale de la Méditerranée. En Orient, les troupes arabes prennent l’Afghanistan, le Turkestan chinois, le Pendjab. En moins d’un siècle, l’islam, parti de l’Arabie, se répand donc de l’Atlantique à l’Inde. L’Espagne est conquise entre 711 et 715, à l’exception du nord-ouest de la Péninsule. Les musulmans avancent encore en Gaule mais sont vaincus près de Poitiers par Charles Martel en 732. Le Coran promet le paradis au guerrier mort pour l'expansion de l'islam, au nom du djihâd, ce qui renforce l'ardeur au combat et la cohésion des armées musulmanes, un des facteurs décisifs dans les conquêtes. Le mot djihâd peut prendre le sens de guerre légale (plutôt que guerre sainte), défensive et offensive, contre les infidèles. En outre, la préoccupation majeure des conquérants ne fut pas de convertir à l'islam les habitants des pays conquis, mais d'assurer leur propre hégémonie et d'organiser le prélèvement d'un tribut.

Le Coran et l’islam La révélation transmise par Dieu à son Prophète par l’intermédiaire de l’archange Gabriel se trouve consignée dans le Coran. Le texte sacré, en langue arabe, se décompose en 114 sourates, elles-mêmes réparties en versets. Il est complété par la Sunna, l'ensemble des traditions qui relatent des événements parfois légendaires de la vie du prophète. Tel qu’il se dégage du Coran et de la Sunna, l’islam repose sur cinq piliers : la profession de foi, la prière, le jeûne, l’aumône et le pèlerinage. - La profession de foi est la reconnaissance de la transcendance et l’unicité divines. Elle peut se traduire par « j’atteste qu’il n’y a de dieu que Dieu (Allâh) et que Mahomet est son prophète ». - La prière est dite cinq fois par jour : aube, midi, après-midi, coucher du soleil, nuit. La prière est dite face à La Mecque sur un tapis qui sépare du monde extérieur. Elle peut s’accomplir en tous lieux, sauf celle du vendredi midi pour laquelle les musulmans doivent se réunir à la mosquée.

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- Le jeûne est défini explicitement par le Coran comme une continuation de la loi juive et chrétienne. Il a lieu au cours du mois de Ramadan, époque de l’année où Mahomet eut ses premières révélations. - L’aumône légale s’apparente à une dîme prélevée sur les riches au profit des pauvres - Le pèlerinage (hajj) à La Mecque est recommandé une fois dans sa vie à tout musulman s’il est en état de le faire. En sont donc dispensés les esclaves, les femmes n’ayant aucun parent pour les accompagner, les pauvres et les malades. Le pèlerinage est une manifestation collective qui a lieu au sanctuaire de la Ka’ba, édifice rectangulaire en pierre.

Le Coran n'est pas seulement un ouvrage religieux, il prescrit des règles morales, juridiques, et il influence toute la vie sociale et politique. Il précise ainsi comment doit se comporter un musulman dans sa vie de tous les jours. Il tolère ainsi la polygamie. Il définit enfin des interdits alimentaires : le porc et les bêtes non égorgées, l’alcool. Notons enfin que l’islam est une religion sans clergé, l’imam n’ayant pour fonction que de mener la prière dans une mosquée et d’y prononcer le sermon du vendredi.

Les chrétiens à travers le Coran Mahomet s’inscrit dans la lignée des prophètes bibliques. Il ne prétend pas s’opposer aux religions juive et chrétienne mais les dépasser. Le principal reproche fait aux juifs et aux chrétiens est de rejeter son message. L’islam médiéval ne fait donc preuve d’aucune hostilité particulière à l’égard des chrétiens. Les musulmans, tout comme les chrétiens, estiment légitime de combattre pour soumettre le monde à leur autorité. Ils n’envisagent pourtant nullement de convertir les juifs et les chrétiens qui, s’ils acceptent la soumission au pouvoir politique symbolisé par le paiement d’un impôt, sont libres de pratiquer leur religion. En dehors de périodes rares et limitées, l’accès aux lieux saints ne leur est jamais interdit, les musulmans comprenant parfaitement leur volonté d’accomplir un pèlerinage sur le tombeau du Christ.

Les conflits guerriers : croisades et Reconquista

a) Les croisades Les croisades sont incontestablement les mieux connues des conflits qui mettent aux prises l’islam et la chrétienté. L’historiographie traditionnelle en distingue huit. Plutôt que des croisades, on pourrait parler de la croisade, tant l’effort est continu pendant deux siècles. Les croisades s’inscrivent dans le grand mouvement de pèlerinage vers Jérusalem qui se développe au XIe siècle. En prêchant la croisade au concile de Clermont en 1095, Urbain II a deux objectifs : tendre la main à l’autre partie de la chrétienté, l’Empire byzantin récemment séparé par le schisme de 1054, et exporter la violence endémique des chevaliers inoccupés auxquels il offre une occasion de faire fortune en rachetant leur âme. Les chrétiens prennent la croix pour accomplir en armes le pèlerinage de Jérusalem. Jérusalem est prise en 1099, et quatre Etats francs s’établissent en Terre Sainte : la principauté d’Antioche, le comté d’Edesse, le comté de Tripoli et le royaume de Jérusalem. La belle unité qui avait permis aux troupes musulmanes de constituer un immense empire n’est plus qu’un lointain souvenir. Aux Omeyades, installés à Damas aux VIIe et VIIIe siècles, ont succédé en 750 les Abbassides et leur nouvelle capitale Bagdad. Mais le califat abbasside s’affaiblit de plus en plus, la réalité du pouvoir étant désormais exercée par des dynasties régionales autonomes. Elle finit par passer sous le contrôle des Turcs Seldjoukides qui confisquent le pouvoir politique. C’est donc à un empire seldjoukide divisé en émirats rivaux que sont confrontés les croisés en arrivant en Terre Sainte. L’éveil musulman ne se produit qu’un demi-siècle plus tard avec la reprise d’Edesse (1144) à l’initiative de l’émir Zengî qui lance un appel à la guerre sainte (djihad) et à l’unité des musulmans. La victoire de Saladin à Hâttin en 1187 entraîne la chute de Jérusalem. La troisième croisade, conduite par Frédéric Barberousse, Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste échoue à reprendre la ville mais permet de remettre la main sur la côte de Syrie et de Palestine. La quatrième croisade, quant à elle, est détournée de son but initial à l’instigation de Venise et aboutit à la prise et au pillage de Constantinople par les croisés en 1204. Suivent encore quatre croisades dont les deux dernières sont menées par Louis IX qui meurt finalement de la peste à Tunis en 1270. A ces croisades clairement identifiées, il faudrait ajouter les départs réguliers de chevaliers qui effectuent le pèlerinage à Jérusalem et viennent au secours des Etats latins avant de retourner au pays. Ils ne peuvent cependant empêcher la chute d’Accre, en 1291, ce qui marque la fin des Etats latins d’Orient.

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L’ensemble aboutit finalement à un piètre bilan. Les croisades ont pour principal effet de renforcer l’incompréhension mutuelle entre les chrétiens d’Occident et les musulmans. Elles permettent accessoirement aux cités italiennes de prendre le contrôle de la navigation en Méditerranée.

b) La Reconquista La deuxième zone de conflits majeurs entre chrétiens et musulmans est la péninsule Ibérique. A l’origine, la conquête militaire menée de 711 à 715 ne semble pas avoir eu comme objectif l’occupation permanente du territoire. L’essentiel est plutôt de ramasser un important butin et de faire des esclaves. L’émirat indépendant d’Al-Andalus ou de Cordoue est crée en 756. Cordoue, qui compte alors 100 000 habitants, est l’une des plus grandes et des plus riches cités du monde musulman. La période califale va durer un siècle, pour laisser la place en 1031 à un émiettement du pouvoir en une multitude de royaumes. L’ère omeyyade est marquée en Espagne par de très nombreux conflits de faible envergure entre les royaumes chrétiens, qui se constituent peu à peu dans le Nord, et les musulmans. Là encore, il s’agit plus souvent de mener de brèves razzias pour rapporter du butin que de s’installer durablement. Le tournant majeur de la Reconquista : la bataille de La Navas de Tolosa en 1212. Là, les armées coalisées des rois chrétiens du nord de l’Espagne, aidés d’Italiens et de Français qui répondent à l’appel à la croisade lancé par le pape, infligent une cuisante défaite aux troupes musulmanes. Les îles Baléares (1229 – 1235), Cordoue (1236), Valence (1238), Séville (1248), Cadix (1263) tombent successivement. Seul un dernier royaume peut se maintenir autour de Grenade avant d’être conquis en 1492 : la Reconquista est achevée.

Les échanges Les trois siècles qui vont du milieu du VIIIe au milieu du XIe correspondent à l’apogée du monde musulman. La civilisation musulmane s’appuie sur un important réseau urbain qui constitue son armature économique, sociale et culturelle. Quand ils n’échangent pas des coups, chrétiens et musulmans échangent des marchandises, des connaissances et des techniques. Des chrétiens, les musulmans attendent essentiellement le bois et les métaux qui leur font défaut, produits à l’utilité militaire évidente. Les chrétiens, en retour, importent des « épices » que l’on aurait tort d’assimiler à de simples denrées d’usage alimentaire : poivre, gingembre, girofle, muscade certes, mais aussi séné, camphre, myrrhe (à usage médicinal), des colorants, de la verrerie, des faïences, des pierres précieuses. A ces épices s’ajoutent l’alun, le cuir et les soieries. Plus encore que les marchandises, ce sont les techniques agricoles et de nouvelles plantes qui sont acclimatées en Occident par les musulmans d’Al-Andalus. Dattes, oranges, citrons, pamplemousses, grenades, abricots, safran, riz, coton, canne à sucre, bananes, artichauts, aubergines font ainsi leur apparition au nord de la Méditerranée. Mais le domaine dans lequel l’apport du monde musulman au monde chrétien est le plus important est celui de la culture. Le monde musulman médiéval est en effet d’une incroyable richesse intellectuelle. Il a gardé la mémoire des connaissances grecques et orientales, auxquelles s’ajoutent les travaux de ses propres savants. L’Espagne musulmane joue là un rôle fondamental d’interface entre les lettrés musulmans et les clercs chrétiens.

Un sujet propice à l'éducation à la citoyenneté Il semblerait important en cycle 3 d'insister sur le concept de croyance et le comparatif entre la religion chrétienne et l'islam. Sur ce qu'elles ont de commun et sur ce qui les sépare dans leurs rites, leur fonctionnement ou dans leurs croyances spécifiques. Dans notre société où règne une réelle intolérance qui, de fait, correspond souvent à la méconnaissance de la religion de l'autre, cette approche peut avoir le mérite d'inciter à une meilleure compréhension et à combattre les préjugés. Valoriser la religion musulmane, insister sur la tolérance qui a souvent prévalu dans les relations entre les chrétiens et les musulmans. Il est également préférable de constater combien les engagements religieux (croisade ou djihâd) ont souvent été détournés par des projets politiques qui ont débouché sur des conquêtes militaires. Etudier les religions monothéistes de manière comparative, c'est la meilleure entrée possible pour que tous les enfants comprennent à quel point les principes fondamentaux de la foi chrétienne, judaïque ou musulmane sont proches. En abordant l'histoire des religions, l'enseignant contribue à donner du sens au religieux, comme les programmes du primaire ou du secondaire l'exigent aujourd'hui. Il s'agit bien de 3 "religion du Livre" inspirées par la Bible; de croyance en un même Dieu unique, celui d'Abraham et de Moïse; des même références à de hautes valeurs morales : la justice, l'amour, la paix.

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Le temps des découvertes et des conquêtes

Le temps des découvertes Au XVe et XVIe siècle, les Européens élargissent considérablement le champ de leur connaissance du monde. Ils accomplissent de nombreux voyages dont le principal objectif est d’ouvrir une route maritime de la soie et des épices afin d’en réduire le coût et de contourner le monde musulman qui constitue un obstacle majeur en direction des Indes. Car en effet, dans l'Europe d'après la Peste Noire et la Guerre de Cent Ans, il y avait une forte demande pour les produits de l'Orient que les Croisades avaient contribué à faire apprécier en dehors des élites : les épices, les cotonnades, les soieries, les colorants… Il s’agit aussi pour eux de diffuser le christianisme hors des frontières en poursuivant l’œuvre de la Reconquista. Ces voyages sont facilités par un certain nombre d’innovations techniques. La caravelle est un navire de petite taille maniable et rapide qui élargit l’éventail du possible. Les premières cartes maritimes (portulans) donnent une connaissance plus précise du tracé des côtes, alors que la boussole et l’astrolabe se diffusent et permettent des expéditions au grand large. Le Génois Christophe Colomb espère atteindre l’Asie par l’ouest. En 1492, ayant enfin fini la Reconquête avec la prise de Grenade, et sous la pression des relations religieuses et financières de Colomb, la reine Isabelle donne son accord. Le voyage fut assez facile et assez brefs (36 jours). Il aborde aux Antilles persuadé qu’il s’agit d’îles proches de la Chine. Colomb n'y trouva pas les richesses espérées. Ce fut la violence qui fut surtout utilisée : le travail forcé dans les plantations sucrières et les mines fit que la population d'Hispaniola (Haïti) s'effondra. Entreprise sur une erreur, terminée par un semi échec, idéologiquement contestable par la naissance de l'esclavage, l'épopée de Colomb finit, dans un deuxième temps, au XVIème siècle, par se révéler payante pour l'Espagne. 7 juin 1494 : Traité de Tordesillas signé entre l’Espagne et le Portugal. Il partage les découvertes futures en deux zones dont la limite passe à l’ouest des îles du Cap Vert. Tout ce qui est à l’ouest de cette ligne de partage revient à l’Espagne, ce qui est à l’est étant attribué au Portugal. Les Portugais créent des comptoirs sur la route des Indes et occupent les côtes du Brésil. Les Espagnols s’emparent de l’Amérique centrale et de l’ouest de l’Amérique du Sud où ils détruisent les empires amérindiens. Au cours du XVe siècle, les navigateurs portugais progressent lentement le long des côtes de l’Afrique, Vasco de Gama n'ouvre la voie maritime de Lisbonne aux Indes qu'en 1498. Ce voyage de 9 mois qui supposait l'utilisation de toutes sortes d'alizés et de courants était un exploit maritime bien supérieur à ce lui de Colomb. Cette nouvelle route permit à Lisbonne de concurrencer Venise mais cette "Grande Découverte" ne provoqua aucun bouleversement ni économique ni politique. Ce ne fut pas la fin du commerce méditerranéen et le basculement brutal vers l'atlantique. En 1519, Magellan quitte l’Espagne pour l’Amérique où il découvre le détroit qui porte aujourd’hui son nom et qui permet de passer de l’Atlantique au Pacifique. Il meurt pendant le voyage, mais les survivants de l’expédition rejoignent l’Espagne par l’est en 1522 et bouclent ainsi le premier tour du monde. En 1520, Cortés arrive au Mexique avec moins de 600 hommes et s’empare de la capitale des Aztèques (Mexico) et réussi à renverser l'empire avec ses 12 millions d'habitants. Des colons s’installent dans les territoires nouvellement conquis où ils créent de grandes plantations et exploitent les mines d’or et d’argent grâce à l’utilisation de la population indienne réduite en esclavage. Celle-ci dépérit par millions en raison des mauvais traitements et de l’apparition de maladies venues d’Europe contre lesquelles elle n’est pas immunisée. Le choc microbien fut catastrophique; la variole et la grippe provoquèrent un énorme effondrement démographique chez les Amérindiens; leur isolement et une faiblesse héréditaire les rendaient très vulnérables; d'environs 40 millions la population tomba à 4 millions. Les violences des conquêtes et le travail forcé accentuèrent le reste. Espagnols et Portugais imposent la religion catholique et leurs langues aux populations de leurs empires : l’Amérique latine est née. L’exploitation des empires coloniaux provoque un essor économique important en Europe du fait de l’afflux soudain de métaux précieux. Des produits nouveaux apparaissent, comme le tabac et le cacao, alors que des plantes inconnues sont acclimatées en Europe (maïs, tomate, pomme de terre). Elle a surtout comme conséquence la naissance de nouvelles formes d’esclavage à partir de la traite des Noirs.

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La traite négrière La traite négrière européenne débute en Afrique dès le XVe siècle, soit avant même la découverte de l’Amérique. Celle-ci n’est pas une nouveauté, car le continent noir est depuis plusieurs siècles livré à une traite transsaharienne à destination du Maghreb, et à une traite musulmane en direction de la péninsule arabique qui se poursuivra jusqu’au 20e siècle. Elle n’en prend pas moins une ampleur nouvelle, puisqu’on estime qu’en trois siècles, 12 millions d’Africains sont conduits en esclavage en Amérique. Les Espagnols puis les Portugais développent le commerce des esclaves en direction de leurs colonies d’Amérique. Ce fut le Brésil (Portugal) qui reçut plus du tiers des 9 millions de Noirs amenés d'Afrique (de 1500 à 1800). La Hollande, l’Angleterre, la France et le Danemark se lancent à leur tour dans ce fructueux trafic. Le Sénégal et la Gambie, la Côte de l’or et la Côte des esclaves (Ghana, Togo et Bénin actuel), le Congo et l’Angola sont particulièrement touchés par la traite. Celle-ci transforme certains royaumes préexistants en esclavagistes qui ravagent l’intérieur du continent pour revendre leurs prises aux Européens qui se cantonnent aux côtes. Les premiers esclaves apparaissent en Amérique du Nord au début du XVIIe siècle. Le commerce triangulaire enrichit alors bon nombre de ports européens, comme Bordeaux ou Nantes pour la France. Les navires quittent l’Europe chargés de verroterie, de métaux ou d’alcool, marchandises qui sont échangées en Afrique contre des esclaves aussitôt emmenés en Amérique dans des conditions effroyables. Les esclaves sont vites revendus et les navires rentrent en Europe les cales pleines de produits tropicaux, comme le tabac, le sucre ou le coton.

C’est pour sauver des âmes païennes que Louis XIII autorise l’importation d’esclaves aux Antilles en 1642, soit dès les premières années de la présence française. Aux Antilles, les religieux eux-mêmes possèdent des exploitations agricoles, les habitations, où les esclaves ne sont guère mieux traités que chez les colons. En 1685, un édit royal connu sous le nom de Code Noir précise le statut des esclaves des possessions françaises. Il reste en vigueur tout au long de l’Ancien Régime. Il faut attendre 1794 pour que l’esclavage soit aboli dans les îles à sucre, avant d’être rétabli par Bonaparte en 1802.

EUROPE

AFRIQUE AMERIQUE

Verroterie, métaux, alcool

Esclaves

Tabac, coton, sucre

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La Renaissance

Il y a un consensus relatif pour situer le début de la Renaissance aux alentours de 1430/50; le point de repère généralement retenu est celui de 1453, chute de l'empire chrétien de Byzance avec la prise de Constantinople par les Turcs. 1492, qui marque à la fois la découverte de nouvelles terres à l'ouest et la fin de l'occupation arabe en Andalousie est une année remarquable : la période de transition se fait donc sur 50 ans environ (1450/1500). La date qui en annonce la fin pose davantage de questions; on pourrait retenir un repère français significatif : 1598 (Edit de Nantes) ou 1610, mort d'Henry IV. Il s'agit donc d'une période qui se déroule sur un peu plus d'un siècle qui par la densité et la multiplicité des champs de transformations, est une période cruciale pour l'Europe Occidentale.

Humanisme et Renaissance A la fin du Moyen Age, une nouvelle vision du monde, inspirée par la redécouverte de l’Antiquité, apparaît en Occident. Dès le XIVème siècle, l’Italie est le lieu d’un renouveau intellectuel imprégné de culture gréco-latine. Celle-ci irrigue la société italienne par le biais des relations commerciales avec l’Empire byzantin qui mettent les Italiens au contact de la Grèce ancienne. En 1453, la prise de Constantinople par les Turcs ottomans provoque un exode des érudits grecs qui cherchent refuge dans la péninsule. � Redécouverte des textes anciens. Il s’agit désormais de restituer le sens original des oeuvres de l’Antiquité en en assurant une traduction de qualité. Mais ce serait une erreur de concevoir la Renaissance uniquement comme un retour à l'Antiquité; il s'agit davantage d'une intégration dans la pensée religieuse contemporaine des deux volets païen et chrétien, avec des retombées dans tous les domaines des mentalités. C'est l'émergence d'un nouveau système explicatif du monde. La pensée nouvelle éclot dans une effervescence culturelle. L'humanisme fait la synthèse des philosophies anciennes païennes et de l'héritage chrétien du Moyen Âge, en changeant la vision que l'homme a de lui même et de sa place dans le monde. "Le nouvel homme idéal" est celui qui se construit lui-même par la culture qu'il acquiert et la réflexion critique qu'il exerce, celui qui s'engage dans la société pour la vivifier…. Ce sont les élites intellectuelles : religieux, philosophes, théologiens, politiques, bourgeois, artistes ou astronomes qui sont les acteurs directs de l'élaboration de la pensée nouvelle. Ceux qu’on appelle désormais les humanistes font confiance à l’homme et valorisent les activités esthétiques et intellectuelles. La diffusion est rapide car elle va trouver des conditions favorables, par la naissance et le développement du livre imprimé. Ce nouveau moyen de diffusion, l’imprimerie, favorise en effet un profond renouveau artistique et littéraire. Avant le XVème siècle, il n’existe que des livres manuscrits recopiés sur parchemin, et donc très coûteux. L’invention de Gutenberg est décisive. L’emploi de caractères de bois puis de plomb, mobiles et réutilisables, permet la fabrication de livres à moindre coût grâce à l’utilisation d’une presse efficace. Le premier livre imprimé, une Bible, l’est ainsi vers 1450 à Mayence. Des ateliers typographiques s’installent un peu partout en Europe, où l’on estime que 20 millions d’ouvrages sortent des presses en un siècle. Cette renaissance de la culture classique est soutenue par de puissants mécènes, qui s'impliquent dans la nouveauté et s'entourent des hommes les plus représentatifs (intellectuels ou artistes), comme les Médicis à Florence ou les papes à Rome. Les idées nouvelles apparaissent en France par le biais des guerres d’Italie menées de 1494 à 1525. François Ier (1515 – 1547) attire à sa cour Léonard de Vinci et d’autres artistes transalpins. Il soutient et protège les humanistes.

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Une vision scientifique du monde Les humanistes veulent comprendre le monde qui les entoure. L’astronome polonais Nicolas Copernic (1473 – 1543) critique la théorie de Ptolémée, reprise par l’Eglise, qui fait de la Terre le centre du monde. En 1543, il montre que la Terre tourne sur elle-même et autour du soleil. Comme l’astronomie, la médecine fait de remarquables progrès grâce à l’usage de plus en plus répandu de la dissection des cadavres. Une véritable vision scientifique du monde ne s’élabore pourtant que bien plus tardivement avec Galilée (1564 – 1642), Descartes (1596 – 1650) et Newton (1642 – 1727). Galilée fonde la science moderne en utilisant de manière systématique la méthode expérimentale. La publication en 1632 du Dialogue sur les Deux Grands Systèmes du Monde, dans lequel il défend les idées de Copernic, lui vaut d’être condamné par l’Inquisition. Cinq ans plus tard (1637) paraît le Discours sur la Méthode de Descartes. En 1687, Newton énonce la loi de la gravitation universelle. A noter également qu'un décalage entre le mouvement de la terre et le calendrier amène l'Eglise a mettre en concordance le temps réel et le temps liturgique par un nouveau calendrier : le calendrier grégorien le 15 octobre 1582

Le renouveau de l'art Les valeurs développées par la pensée humaniste génèrent aussi un art nouveau fondé sur des représentations de l'homme inspirées de l'antiquité mais intégrées dans la pensé chrétienne. Architecture et peinture sont les arts majeurs de l'expression artistique de l'époque. Quand aux artistes qui ont un rôle primordial, ils changent de statut : ils sont désormais reconnus pour leur talents artistiques. L'Italie est considérée comme le berceau de la Renaissance, grâce à une pléiade d'artiste. Léonard de Vinci (1452-1519) est le 1er d'entre eux, parce que le plus représentatif. Par ses talents exceptionnels d'une grande diversité, il incarne bien l'artiste de la Renaissance. Architecte, peintre, sculpteur, musicien, inventeur en recherche permanente, il s'intéresse aussi à la botanique et à la médecine. Michel Ange (1475-1564), sculpteur et peintre, architecte, poète, il est aussi un génie créateur, né à Florence. C'est là qu'il passe sa première période d'artiste. Appelé par les papes successifs, il travaille ensuite à Rome. Ses œuvres maîtresses sont les fresques de la Chapelle Sixtine, et en matière d'architecture, la reconstruction du Vatican. Raphaël (1483-1520) devient rapidement le peintre préféré des papes. Il fait preuve de qualités artistiques tant dans la composition très étudiée, que dans le dessin et la peinture. En France, l'évolution fut lente et se déroula sur le siècle. C'est principalement dans l'architecture noble que s'exprima le changement. Les châteaux de la Loire en sont les meilleurs exemples. La Renaissance se traduit également par des productions littéraires et poétiques de facture nouvelle; en 1532, François Rabelais publie Pantagruel avant de lui donner un début, Gargantua, en 1534.

La réforme protestante Avec l’imprimerie, le lecteur a accès directement à la Bible dont les humanistes cherchent à établir un texte plus exact grâce à la maîtrise des langues anciennes. En 1517, l’Allemand Martin Luther (1483 – 1546) s’oppose à la hiérarchie et au dogme catholique. Il est excommunié par le pape en 1520, mais ses idées se répandent rapidement dans l’Empire germanique et aboutissent à la mise en place d’Eglises luthériennes. En Suisse et en France, la doctrine de Jean Calvin (1509 – 1564) donne naissance à des Eglises réformées. En Angleterre, Henri VIII (1509 – 1547) rompt avec le pape avant qu’Elizabeth Ière n’instaure une Eglise anglicane qui adopte le dogme calviniste mais conserve certains aspects catholiques comme le rôle des évêques. Les Protestants ne reconnaissent pas l’autorité du pape. La relation avec Dieu ne doit pas passer par la médiation de prêtres, les pasteurs sont seulement des accompagnateurs. Ceux-ci sont libres de se marier. La lecture de la Bible est fondamentale pour tout croyant et les offices sont célébrés dans la langue locale. Sont rejetés les rajouts et les inventions : la messe, la transsubstantiation, le purgatoire, le culte marial et le cultes des saints (fêtes et reliques). Seuls deux sacrements, le baptême et la communion, sont conservés. Un des points théologiques important est le Salut par la Grâce. Secouée par la violence de la contestation et par la division, l'Eglise Catholique se devait de réagir pour se préserver, se défendre, se développer. Ainsi l'Eglise catholique essaie à son tour de se réformer. D’importantes décisions sont alors prises au Concile de Trente (1545 – 1563) qui condamne les thèses

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protestantes et précise la doctrine officielle de l’Eglise. Les prêtres, toujours voués au célibat, devront être mieux instruits dans les séminaires, alors qu’un catéchisme est publié pour l’instruction des fidèles. Il faut aussi à l'Eglise de se développer par des actions militantes, avec le rôle des Jésuites par exemple. Cette réaction a pris plus tard l'appellation de Contre Réforme.

La France des guerres de religion Après la séparation de la chrétienté occidentale en deux églises (romaine et protestante), la tolérance humaniste ne survit que difficilement. Un mouvement de haine apparaît et conduit à de terribles et douloureuses guerres civiles en Europe. Dans les dernières années de son règne François Ier subit l’influence des catholiques intransigeants et se montre disposé à frapper les hérétiques. La répression s’accentue sous Henri II (1547–1559) qui se lance dans une politique systématique de persécutions. La mort d’Henri II est suivie d’une longue période de guerres civiles que l’on a coutume d’appeler les guerres de religion parce qu’elles ont pour cause essentielle les haines religieuses entre catholiques et protestants (huguenots). Trois fils d’Henri II se succèdent sur le trône : François II (1559–1560), Charles IX (1560–1574), roi à dix ans, et Henri III (1574-1589). A la mort de François II, Catherine de Médicis assure la régence au nom de son fils, Charles IX. En signe de bonne volonté, Charles IX décide de marier sa soeur Marguerite (la Reine Margot de Dumas) à un responsable protestant, Henri de Navarre, le futur Henri IV. Catherine de Médicis décide alors de convaincre son fils de supprimer les chefs protestants présents à Paris en raison du mariage projeté : c’est le massacre de la Saint Barthélemy (24 août 1572). Les passions sont à leur paroxysme. Il faut plusieurs années à Henri IV pour conquérir son trône (suite à la mort de Henry III), conquête qui passe par son abjuration et son retour au sein de l’Eglise catholique en juillet 1593, avant le sacre du 27 février 1594. Après de longues et délicates négociations, Henri IV réussit à faire accepter une solution de compromis, l’Edit de Nantes (30 avril 1598), qui règle les rapports entre catholiques et protestants jusqu’à la révocation par son petit-fils Louis XIV en 1685. La religion catholique reste la religion officielle du royaume, la Religion prétendue réformée (RPR) n’étant que tolérée. La liberté de conscience est reconnue, mais l’exercice du culte soigneusement circonscrit. Des places de sûreté sont concédées aux protestants pour garantir leurs droits. L’épisode des guerres de religions est désormais définitivement clos, même si les catholiques ne pardonnent pas au roi de tolérer les huguenots dans le royaume. L’assassinat d’Henri IV par Ravaillac en 1610 en fournira la preuve. Les guerres permanentes ne sont pas faites seulement pour la conquête de territoires, mais on voie apparaître dans toute l'Europe des guerres idéologiques toutes aussi meurtrières et cruelles, qui sont le résultat négatif et contradictoire de la pensée humaniste qui a suscité les évolutions

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La monarchie absolue en France L'absolutisme de Louis XIV a été bâti de toute pièce par les historiens du XIXè siècle. La notion même d'absolutisme leur revient et les conceptions d'un monarque très autoritaire qui a abusé de son pouvoir arbitraire, notamment par la révocation de l'édit de Nantes, qui a ruiné le royaume par ses dépenses somptuaires et appauvri le bon peuple, ont longtemps prévalu dans l'historiographie hexagonale. Tout n'est pas faux dans ces points de vue, mais les recherches menées récemment conduisent à réviser en baisse les prétentions centralisatrices et surtout à considérer combien la monarchie était prisonnières d'un système ou le pouvoir tendait de fait à lui échapper. Au-delà de l'affirmation d'un pouvoir absolu et de la volonté du roi d'organiser un "Etat-spectacle" où son image devait être constamment valorisée, quelle efficacité pouvait avoir le gouvernement monarchique ? Il s'agit de comprendre comment ce système de monarchie absolue, qui s'est bâti tout au long du XVIIème siècle, a connu son apogée sous Louis XIV, avec la recherche d'un pouvoir absolu; analyser les conquêtes du "roi de guerre" avec toutes leurs conséquences sur la construction du territoire français; se demander ensuite comment s'est opérée une mainmise sur les esprits des français en usant d'un art consommé de la propagande; réfléchir enfin à la notion d'absolutisme en relevant les nombreux obstacles qui entravent les ordres du roi.

La recherche d'un pouvoir absolu

De François Ier à Louis XIII, les rois de France se sont efforcés, non sans difficultés, à imposer leur autorité à l’ensemble du royaume. Par le concordat de Bologne (1516), le roi de France obtient du pape la tutelle de l’ensemble du clergé français. Il choisit ainsi les évêques auxquels le pape accorde l’investiture spirituelle. L’Eglise est donc placée dans la dépendance étroite du roi. A la mort de Louis XIII, la régente Anne d’Autriche et son ministre Mazarin, qui dirigent le royaume au nom de l’enfant Louis XIV, doivent affronter un très grave soulèvement, la Fronde. Celle-ci dévaste en partie le royaume entre 1648 et 1653.

Louis XIV est bien décidé à gouverner seul. En 1661, le roi décide de prendre, seul, les rênes du pouvoir. Pour gérer les affaires de son royaume, Louis XIV fait appel à 6 ministres auprès desquels il prend conseil avant de prendre une décision. Des conseils spécialisés contribuent à gérer les affaires du royaume. La vieille noblesse est écartée du pouvoir; il la remplace souvent par des bourgeois récemment anoblis. L’affirmation de la monarchie passe par une administration efficace du royaume. Une administration constituée par des officiers dévoués à la cause monarchique impose partout une justice royale et une fiscalité plus rigoureuse. L’office est une fonction publique rétribuée par gages dont le titulaire, l’officier, est propriétaire. Il peut la revendre, d’où la vénalité des offices. Certains offices confèrent la noblesse à leur propriétaire. Les intendants sont les agents dans l'absolutisme centralisateur. Ils sont envoyés dans les généralités om ils sont chargés de surveiller la justice et les impôts, de maintenir l'ordre, de contrôler les autorités locales, et enfin de veiller sur la vie économique et le ravitaillement des provinces.

Colbert, l'ordonnateur des grandes réformes économiques, est nommé contrôleur général des finances (décembre 1665-1683). Pour faire face aux dépenses de la monarchie, il a dû faire preuve d'efficacité en améliorant les recettes fiscales et en mettant en œuvre une politique économique appelée mercantilisme ou "colbertisme". En vertu de cette théorie, l'idée s'est imposée que l'Etat, pour s'enrichir, doit avoir une balance commerciale positive afin d'accumuler le plus possible d'or et d'argent. Pour ce faire, il doit intervenir en entravant les importations de produit de luxe, en stimulant les exportations et créer des manufactures royales pour satisfaire les besoins intérieurs. Selon lui, il convient surtout de développer le commerce, et cela débouche sur une politique de création de compagnies commerciales, au nom du roi. La politique coloniale va dans le même sens. Il s'agit de conquérir des terres qui fourniraient à la métropole les produits tropicaux : le café, le tabac, le sucre, le coton. Enfin, le mercantilisme a pour objectif majeur d'affirmer la puissance du pays par rapport aux pays étrangers. Le lien entre la monarchie et l'Eglise est un des fondements essentiels de l'Ancien Régime. Depuis 1598, l'édit de Nantes accordait aux protestants la liberté de conscience et la liberté de cultes. En période d'affirmation de l'absolutisme monarchique, le principe : une foi, une loi, un roi, ne peut, aux yeux de Louis XIV, être plus longtemps bafoué. En révoquant l’édit de Nantes le 16 octobre 1685, le roi

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contraint les protestants à se convertir sous peine d’emprisonnement ou de galères. De nombreux huguenots passent outre à l’interdiction royale et s’exilent. Convertis de force, les protestants acceptent très mal l'édit royal. Cette décision est lourde de conséquences que ne manquent pas de dénoncer le duc de Saint-Simon, Fénelon ou Vauban : des milliers d'huguenots quittent la France, ce qui affaiblit le commerce, la marine royale et les finances du royaume.

Louis XIV, roi guerrier

La France de Louis XIV s'est agrandie, dès le début de son règne. Aux traités de Westphalie, qui mettent fin en 1648 à la guerre de Trente ans, l'Empereur d'Autriche cède la majeure partie de l'Alsace à la France; la guerre avec les Habsbourg d'Espagne s'achève en 1659 par le traité des Pyrénées qui laisse à la France l'*Artois et le Roussillon. A partir de 1661, le roi entreprend de renforcer la sécurité du pays en protégeant son "pré carré". Louis XIV réussit à imposer son hégémonie sur l'Europe en renforçant les forces militaires du royaume. Une marine de guerre est constituée par Colbert et une armée permanente de 400000 hommes réorganisée par Le Tellier et Louvois. Il compte surtout protéger les limites de son "pré carré" en confiant à Vauban la construction d'une "frontière de fer", notamment, en faisant restaurer les fortifications des places fortes ou en édifiant de nouvelles. A partir des années 1680, Louis XIV se heurte à la plupart des grands Etats d'Europe occidentale qui organisent de grandes coalitions. La France reste isolée et les guerres coûtent très cher. A la taille, un impôt direct qui frappe tous les roturiers et qui a quintuplé depuis Louis XIII, doivent s'ajouter trois nouveaux impôts directs : la capitulation et le dixième (crées en 1695) puis le vingtième. Louis XIV se fait représenter sur de nombreux tableaux de peinture, sur son cheval, en chef de bataille ou en héros guerrier.

Mainmise sur les arts et sciences

Le pouvoir monarchique entend faire connaître ses actions, ses exploits guerriers par une propagande que les agents du roi contrôlent habillement dans les nombreux libellés ou almanachs élaborés à la gloire du roi. L'autre objectif du roi est d'exercer un patronage sur la création artistique et littéraire. Il crée les Académies qui contribuent à exiger des règles et à imposer l'art classique. C'est pour mieux contrôler la vie intellectuelle et servir le prestige de son royaume que Louis XIV pensionne les artistes et les écrivains contraints de mettre leurs talents et leurs idées au service de l'Etat monarchique et de se dévouer à sa propagande.

Versailles, le cadre du culte monarchique Le roi n'a pas oublié les désordres de la Fronde ; il entend soumettre la grande noblesse à son autorité, et lui imposer une obéissance sans faille. Afin de mieux les surveiller, il attire autour de lui les nobles et plus puissants. Les courtisans ainsi "domestiqués" vivent selon un cérémonial précisément codifié, "l'étiquette". Louis XIV donne à la Cour un éclat sans précédent et un rôle politique bien précis. Le roi décide en 1668 d'entreprendre la construction de Versailles. Mettant à profit le vaste espace dont il dispose, Le Nôtre entreprend l'agencement des jardins et les architectes Le Vau puis Hardouin-Mansart édifient le gigantesque palais que décore Lebrun. A partir de 1682, le roi et la cour s’y installent. Le château n’est pas tant une résidence royale que le siège du gouvernement. Versailles est devenu le lieu central du pouvoir monarchique. En regroupant la noblesse à la cour, le roi peut la contrôler. On assiste aussi à une véritable domestication de la noblesse qui ne joue plus aucun rôle politique. Versailles permet une mise en scène du pouvoir royal, qui insiste sur la vénération et l'exaltation de la personne du roi.

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La monarchie absolue selon Bossuet

Nul mieux que Bossuet (1627–1704) n’a exprimé la théorie de l’absolutisme royal. Pour Bossuet, la personne des rois et leur autorité sont sacrés. Ainsi, « les princes agissent comme ministres de Dieu et ses lieutenants sur la terre. C’est par eux qu’il exerce son empire ». « Il paraît de tout cela que la personne des rois est sacrée et qu’attenter sur eux est un sacrilège ». L’autorité royale est absolue : « Le prince ne doit rendre compte à personne de ce qu’il ordonne ». Le roi est ainsi le seul détenteur de la puissance publique. « Tout l’Etat est en la personne du prince. En lui est la puissance. A lui seul appartient de faire tout conspirer au bien public. Il faut faire concourir ensemble le service qu’on doit au prince et celui qu’on doit à l’Etat comme deux choses inséparables ».

La monarchie absolue n’est pourtant nullement arbitraire, il existe des limites à l'absolutisme. En effet, le roi est contraint à respecter les lois fondamentales du royaume. Il s'agit d'un ensemble de règles non écrites qui limite impérativement ses prérogatives. Ainsi il ne peut pas désigner son successeur et il doit observer la loi salique en vertu de laquelle la couronne ne peut être transmise par les femmes. L'autre règle qui s'impose à lui est celle de l'inaliénabilité du domaine royal et de l'unité de la couronne. Le roi ne peut vendre ou céder une partie des biens qu'il a reçus en héritage et dont il n'est que l'usufruitier. De même, il ne peut partager son trône. Son pouvoir est encore plus limité lorsqu'il s'engage par serment lors du sacre, à respecter les privilèges de ses sujets qu'il agisse de coutumes, de franchises ou de libertés accordées par le passé à des villes, à des provinces, à des groupes sociaux comme le clergé et la noblesse ou encore à des corporations. En raison de cette multitude d'entraves, l'administration royale impose difficilement son emprise sur la société. De plus, la géographie administrative de l'ancienne France devient de plus en plus confuse et enchevêtrée. Les pouvoirs des rois sont limités par bien des obstacles et ce d'autant que la lenteur des communications (15 jours pour Paris/Aix) ne permet pas au roi d'être rapidement informé. L'absolutisme tel qu'il vient d'être analysé repose sur des institutions, des instruments symboliques qui ont permis à Louis XIV d'imposer une autorité, en apparence sans faille, pendant tout son règne. Affirmant sans cesse la raison d'Etat, il a cherché à rendre plus rationnelle l'administration du royaume par la mise en place d'une véritable bureaucratie, contrôlée par son gouvernement.

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Le mouvement des Lumières, la Révolution française, le Premier Empire

Il ne s'agit pas d'étudier les événements de la Révolution et de l'Empire, mais de comprendre en quoi les idées et l'application de nouveaux droits ont conduit à la fin du système de l'Ancien Régime et à la mise en place d'une nouvelle organisation de la société, concept de changement. L'étude de cette question oblige à approfondir deux idées fortes (liberté et égalité) qui ont assurément marqué notre histoire sur le long terme, les deux mots clé de la devise républicaine qui constituent les fondements historiques de la citoyenneté depuis la Révolution française. Comment se sont imposées les idées de liberté et d'égalité ? Quels événements ont marqué "l'an I de la liberté" ? Comment l'instauration de la République a-t-elle conduit à affirmer de nouveaux droits ? La période napoléonienne a-t-elle renforcé les acquis révolutionnaires ou les a-t-elle remis en cause ?

Lumières et liberté

La société française du XVIIIe siècle est une société d’ordre bloquée dans sa division traditionnelle entre clergé, noblesse et tiers état. Incapable de se réformer, elle est soumise à des tensions de plus en plus vives. Une aspiration à la liberté et un désir d’égalité des droits progresse donc tout au long du siècle. Les philosophes considèrent qu'il faut tout analyser à la lumière de la raison. Ils développent leurs critiques à l'égard de l'organisation de la société qu'ils n'hésitent pas à contester. Par leurs écrits, ils remettent en cause la monarchie absolue et proposent d'autres formes d'exercice du pouvoir. Ils préfèrent chercher un système politique qui évite toute forme de despotisme. Les philosophes des Lumières rejettent ainsi la monarchie absolue et réclament le respect des libertés fondamentales : penser, se déplacer, s’exprimer. De 1751 à 1772 est publiée l’Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, sous la direction de Diderot et d’Alembert. En 1748, Montesquieu préconise la séparation des pouvoirs dans l’Esprit des Lois. Dans le Contrat Social, Rousseau émet en 1762 l’idée d’un contrat entre le peuple souverain et ceux qui le gouvernent. Voltaire combat l'omnipotence de l'Eglise catholique et défend les protestants Les Lumières ont connu une large diffusion. Les livres, les journaux, les salons, les cafés, les académies provinciales, les loges maçonniques ont joué un rôle capital dans la propagation des idées nouvelle en France, mais aussi en Europe. En Angleterre : Pour beaucoup, la monarchie parlementaire anglaise fait figure de modèle. L’Habeas Corpus (loi votée par le Parlement anglais sous le roi Charles II d’Angleterre) garantit la liberté individuelle dès 1679 en interdisant toute arrestation arbitraire. Le Bill of Rights du 13 février 1689, cette Déclaration des Droits, marque la véritable naissance de la démocratie moderne. Le Parlement est composé d'une chambre basse, la Chambre des Communes (House of Commons), qui vote les lois, tandis qu'une Chambre haute, la Chambre des Lords, contrôle celles-ci et peut les modifier. En Amérique : En Amérique du Nord, de nombreux conflits opposent à partir des années 1760 les colons à la couronne britannique qui multiplie les contributions. L’instauration d’une nouvelle taxe sur le thé met le feu aux poudres en 1773. Le 4 juillet 1776, les délégués des 13 colonies proclament l’indépendance des EUA. Il s’ensuit une guerre où la France, qui intervient militairement pour soutenir les insurgés, s’enthousiasme pour leur cause. La constitution adoptée le 13 septembre 1787, complétée par une série d’amendements, est toujours en vigueur aujourd’hui. Elle s’inspire du principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir exécutif appartient à un Président élu pour 4 ans au suffrage universel. Le pouvoir législatif est exercé par un Congrès composé de deux assemblées : le Sénat, qui comprend deux sénateurs par Etat, et la Chambre des Représentants, où la représentation de chaque Etat est proportionnelle à sa population. C’est de cette recherche de la liberté et de l’impossibilité de mettre en œuvre les réformes nécessaires que naît la Révolution.

La Révolution française

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A la fin du XVIIIe siècle, la monarchie française est confrontée à un déficit financier chronique.

Louis XVI hérite en 1774 d’un royaume au bord de la faillite. Les mauvaises récoltes de 1787/88 entraînent une disette et une forte hausse du prix du pain. Dans un monde dominé par l’économie agricole, la crise économique se propage rapidement. L'exaspération des mécontentements grandit dans de nombreuses catégories sociales du pays et aggrave la crise sociale perceptible depuis longtemps, contestant les inégalités et décalages entre les cadres institutionnels (les 3 ordres traditionnels) et la société réelle qui se fonde désormais sur une diversification des catégories socioprofessionnelles avec la prédominance d'une bourgeoisie, force vive de la nation. La crise des mentalités, latente depuis plusieurs années avec le développement des idées contestataires sur la monarchie absolue et ses liens avec le catholicisme dominant, y trouve confirmation des thèmes qui se sont développés au cours du siècle : liberté, égalité, citoyenneté.

Le roi décide alors, en décembre 1788, de revenir à une pratique ancienne : la convocation des Etats Généraux, organisme institutionnel de consultation qui ne s'était pas réuni depuis presque 200 ans. La rédaction des cahiers de doléances est lancée au printemps 1789. Toute la population se mobilise dans les paroisses rurales et les métiers urbains pour faire émerger les problèmes, vécus au quotidien ou ressentis sur fondements idéologiques. Ces cahiers font apparaître des thèmes récurrents sur la lourdeur des taxes, les dysfonctionnements de l'administration royale mais aussi des revendications pour l'égalité, la liberté individuelle, la citoyenneté. Ainsi, les trois ordres s’expriment dans des cahiers de doléances et élisent leurs députés aux Etats généraux qui se réunissent à Versailles le 5 mai 1789. Mais la réunion des Etats généraux ne pouvait qu'échouer car cette structure n'était plus adaptée aux évolutions sociales et politiques de la société du XVIIIème siècle. Représentant plus de 95% de la nation, les députés du Tiers exigent un vote par tête et non par ordre, qui leur garantit un droit d'expression. Le blocage immédiat provoque la scission et la rupture. Le 17 juin, les députés du tiers état se proclament Assemblée nationale. Le 20 juin, réunis dans la salle du Jeu de Paume, ils font le serment de ne pas se séparer avant d’avoir donné une constitution au royaume. Louis XVI cède alors et demande aux députés du clergé et de la noblesse de rejoindre l’Assemblée qui se proclame constituante le 9 juillet : la monarchie absolue a vécu. Le pouvoir appartient désormais à la nation représentée par des députés, la révolution juridique des institutions est faite.

Au même moment, l’agitation est à son comble à Paris où le petit peuple supporte mal la hausse du prix du pain et le chômage, et n’accepte pas le renvoi de Necker le 11 juillet. L’inquiétude gagne la population quand des rumeurs font état d’un encerclement de la ville par des troupes royales. Croyant y trouver des armes, le peuple prend la Bastille le 14 juillet, prison symbole de l’arbitraire royal, et la bourgeoisie se constitue en Garde Nationale sous le commandement de La Fayette. Le roi est obligé au compromis et, le 17 juillet, accepte de se rendre à Paris et arbore la cocarde tricolore où le blanc de la monarchie est encadré par le bleu et le rouge du peuple de Paris. Les trois couleurs scellent l'union de la nation et de son Roi et deviennent le symbole du changement. En juillet et en août, les troubles gagnent les campagnes. Les paysans refusent l’ordre seigneurial et brûlent les châteaux : c’est la « Grande Peur ». Inquiets devant le soulèvement populaire, les députés abolissent l’ensemble des droits seigneuriaux et des privilèges au cours de la nuit du 4 août. La société repose désormais sur les nouveaux principes fixés par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen adoptée le 26 août 1789. Il n’y a plus de sujets soumis à l’arbitraire royal, mais des citoyens libres et égaux en droit. Inspiré par une philosophie de droit naturel qui était déjà inscrite dans le Bill of Rights anglais de 1689 et la Déclaration d'indépendance américaine de 1776, la déclaration des droits de l'homme et du citoyen doit poser les bases d'un nouveau droit pour les citoyens et d'un nouveau régime de gouvernement. Pour défendre les droits naturels, les individus se lient par contrat et deviennent citoyens d'une communauté nationale. Membres de la nation, les citoyens naissent libres et égaux. La souveraineté réside dans la Nation et le principe de séparation des pouvoirs est consacré. Elle proclame l'égalité civile ou égalité devant la loi, la liberté individuelle et la liberté de conscience en vertu desquelles nul ne peut être arrêté arbitrairement et nul ne peut être inquiété pour ses croyances religieuses. Elle reconnaît les libertés publiques d'opinion et de presse, les droits de propriété et de sûreté (la garantie de la sécurité des personnes et des biens) et le droit de résistance à l'oppression.

Une nouvelle hausse du prix du pain mécontente le peuple de Paris. Le 5 octobre, un cortège de femmes se rend à Versailles et ramène le roi. Celui-ci est maintenant l’otage de Paris.

Les députés réorganisent rapidement le royaume. Les biens du clergé sont nationalisés et les provinces cèdent la place à 83 départements subdivisés en communes. Le 17 juillet 1790, la fête de la Fédération commémore la prise de la Bastille. La Fayette prête alors le serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi. La Constitution civile du clergé adoptée en juillet 1790 qui prévoit l’élection des curés et des évêques provoque pourtant une crise, une partie du clergé (les réfractaires) refusant de prêter serment à la constitution.

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Le 20 juin 1791, l’arrestation du roi en fuite à Varennes témoigne de son double jeu et marque la rupture du souverain avec son peuple. L’agitation se renforce alors chez les sans-culottes, révolutionnaires issus du peuple qui réclament l’instauration de la république. Une monarchie constitutionnelle est mise en place en septembre 1791. Le roi détient le pouvoir exécutif et dispose du droit de veto, alors que le pouvoir législatif appartient à l’Assemblée législative.

A l’étranger, on s’inquiète du risque de contagion révolutionnaire. Le 20 avril 1792, les députés, soutenus par le roi qui attend une défaite de la Révolution, déclarent la guerre à l’Autriche. Les sans-culottes prennent les Tuileries le 10 août 1792. Les députés votent la déchéance du roi et son arrestation avant de proclamer la République le 22 septembre 1792, deux jours après la bataille de Valmy où des volontaires en armes arrêtent l’invasion étrangère.

Une nouvelle assemblée, la Convention, est aussitôt élue au suffrage universel. Elle est divisée entre les Montagnards, qui s’appuient sur le peuple de Paris, et les Girondins, modérés qui souhaitent un retour aux principes de 1789. La Convention vote la mort du roi qui est guillotiné le 21 janvier 1793. Un tribunal révolutionnaire et un Comité de salut public sont mis en place. En mars 1793, une première levée en masse provoque le soulèvement des paysans vendéens. Le 2 juin 1793, les sans-culottes obtiennent l’arrestation des Girondins qui sont exécutés. Les Montagnards mettent en place un régime d’exception, la Terreur, destinée à vaincre les ennemis de la Révolution en satisfaisant les sans-culottes. Le Comité de salut public, dominé par Robespierre, multiplie les mesures d’exception. Robespierre élimine alors Danton et ses partisans, qui veulent atténuer la Terreur (avril 1794). Robespierre et ses amis sont finalement arrêtés à leur tour le 9 thermidor (27 juillet 1794) avant d’être exécutés le lendemain. La Terreur est ainsi un exemple parmi d’autres de la contradiction entre les principes généraux de la Révolution et la réalité de leur application.

Une nouvelle constitution instaurant le Directoire est adoptée en septembre 1795. Le suffrage universel est remplacé par un suffrage censitaire très restreint, et le pouvoir législatif confié à deux assemblées : le Conseil des Anciens et le Conseil des Cinq Cents. Le nouveau régime est très rapidement discrédité et l’armée devient l’arbitre du jeu politique. Le 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799), devenu très populaire après l’expédition d’Egypte, le général Bonaparte organise un coup d’Etat qui met fin au Directoire.

Le Consulat et l’Empire

Bonaparte établit une nouvelle constitution qui est ratifiée par voie de plébiscite. En approuvant par leur vote le texte proposé par Bonaparte, les citoyens lui manifestent leur confiance et lui assurent une apparence de légitimité. En 1802, le Consulat à vie est instauré, et le 2 décembre 1804, Bonaparte est sacré « empereur des Français » sous le nom de Napoléon Ier. L’Empereur est le seul maître de l’exécutif face à un législatif impuissant. Il contrôle le pays grâce à une administration efficace qui s’appuie sur les préfets placés à la tête des départements. Napoléon Ier veut mettre un terme à la Révolution en en consolidant les acquis. En 1801, la signature d’un Concordat avec le pape met fin à la querelle religieuse. L’Eglise renonce à ses propriétés vendues comme biens nationaux et le clergé est salarié par l’Etat. Le catholicisme n’est plus religion officielle mais est reconnu comme la religion de « la majorité des Français ». En 1803, Bonaparte crée une nouvelle monnaie, le franc germinal.

L’Empereur s’appuie sur les notables qui accèdent à l’administration locale et approuvent l’instauration d’un ordre bourgeois fondé sur le Code civil de 1804. Celui-ci fait aboutir le projet révolutionnaire visant à unifier les coutumes de France en un ensemble clair et simple. Il confirme la liberté, l’égalité civile et le partage égal des successions tout en garantissant la propriété. L’autorité du père de famille est renforcée alors que la femme est maintenue dans une position subalterne. Les lycées créés en 1802 forment l’élite de la nation en garantissant la promotion au mérite et non plus en vertu de la naissance. Le baccalauréat est créé en 1809. En dépit du despotisme impérial qui a pu laisser croire à un retour de l'Ancien Régime, la période napoléonienne a définitivement jeté les bases de la nouvelle société qui s'est établie en France au XIXème siècle.

L’Empereur conquiert militairement un immense empire qui englobe plus de la moitié de l’Europe

par une série de victoires remportées de 1805 à 1807 contre l’Europe aristocratique coalisée. La campagne de Russie de 1812 marque un tournant. Après avoir atteint Moscou, la Grande Armée bat en retraite dans des conditions désastreuses. Napoléon est vaincu à Leipzig en 1813 et, en 1814, les armées coalisées entrent en France. Napoléon doit abdiquer et le frère de Louis XVI, Louis XIII, est rétabli sur le trône : c’est la Restauration. Exilé à l’île d’Elbe, Napoléon rentre en France le 1er mars 1815 pour une épopée de cent jours qui s’achève à Waterloo. Il abdique de nouveau et meurt en exil à Sainte-Hélène en 1821.

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Expansion industrielle et urbaine en Europe, Colonisation

Touchant aux mutations économiques et sociales du XIXème siècle, le sujet est vaste et son abord

complexe. Il faut avoir à l'esprit ce qu'en dit le programme de première : "on présente le processus d'industrialisation et les transformations économiques et sociales qui lui sont liées. Il s'agit de saisir les évolutions et les ruptures majeures sur près d'un siècle et non d'examiner le détail de la conjoncture."

Lorsque les historiens évoquent les transformations économiques de l'Europe avant 1850, ils utilisent de moins en moins le concept de "révolution industrielle" pour les caractériser. Le mot "révolution" suppose des changements rapides qui n'ont pas vraiment eu lieu dans le domaine économique et matériel. Le passage d'une économie agraire et artisanale à une économie industrialisée et mécanisée s'est progressivement opéré tout au long du XIXème siècle.

Comment est née une nouvelle organisation de l'économie en rupture avec l'économie agraire et artisanale de l'Ancien Régime ? Pourquoi l'industrialisation s'est-elle produite en Europe au XIXème siècle ?

En quelques décennies, la vie quotidienne des populations, les mutations sociales, les rapports des Européens au reste du monde se trouve profondément transformés.

L’expansion industrielle en Europe

L'industrialisation démarre en Grande-Bretagne entre 1780 et 1830, avec une large avance sur les autres pays d'Europe occidentale : le pays connaît un décollage (take off) de son économie grâce aux inventions techniques. Le tissage progresse et, vers 1840, toute la production des tissus de coton est assurée par des machines dans de grandes usines. En un demi-siècle, l'activité cotonnière est passée d'une production artisanale à une production industrielle, en adoptant les méthodes du capitalisme. La productivité est multipliée alors que les coûts de production et les prix de vente s’effondrent.

L'extraction du charbon connaît elle aussi une progression accélérée. La houille devient le combustible indispensable aux nouvelles machines, ce qui entraîne un essor minier sans précédent. La machine à vapeur de Watt permet de mécaniser la remontée du charbon. La production quintuple entre 1800 et 1850. La machine à vapeur de Watt mise au point vers 1765 est désormais utilisée comme force motrice, non seulement dans les mines de charbon, mais aussi dans toute l'industrie.

Vers 1830, la Grande-Bretagne jouit d'une avance incontestable sur tous les autres pays d'Europe. Les trois facteurs décisifs dans l'avance anglaise : le cercle vertueux de la mécanisation, de la baisse des prix industriels et de la croissance des profits place, vers 1830, l'industrie britannique en position hégémonique; elle sera, pour 50 ans, l'atelier du monde.

A l'origine de toutes les grandes innovations techniques, la Grande-Bretagne conserve son avance et maintient sa suprématie dans la grande industrie. Devenue le moteur de la croissance, la métallurgie a pris le relais des industries cotonnières et l'acier anglais envahit l'Europe.

Le chemin de fer devient le moteur de la révolution industrielle. Il naît de la conjonction de deux progrès : l’usage de rails de fer et la machine à vapeur mobile. En 1830 est inaugurée la première ligne de chemin de fer Manchester-Liverpool. Ce nouveau mode de transport connaît alors un immense succès en Europe : tous les pays occidentaux adoptent ce nouveau moyen de transport capable de déplacer, plus vite et à moindre coût, d'énormes quantités de marchandises, en franchissant fleuves et montagnes. Au milieu du siècle, le réseau atteint déjà 10 000 Km. Les chemins de fer ont un effet d'entraînement sans précédent sur toutes les activités économiques. Ils provoquent une hausse considérable de la demande pour l'extraction de charbon, la métallurgie et les travaux publics. La métallurgie devient le secteur pilote de la croissance industrielle. En France, la Monarchie de Juillet donne une impulsion décisive aux chemins de fer en décidant, en 1842, de faire prendre en charge le financement des infrastructures par l’Etat. En 1870, le réseau ferré français atteint 17 500 Km, et en 1913 59 000 Km, ce qui en fait le plus dense d’Europe.

L’industrialisation en Europe continentale est plus tardive. Alors que la France poursuit une croissance économique "raisonnable", l'Allemagne et les Etats-Unis rattrapent très rapidement leur retard sur les Britanniques. Dans tous ces pays industrialisés naît une civilisation commune dont les autres pays européens, vers l'est et le sud, restent à l'écart. En France, la modernisation est inégale selon les secteurs. Mais l’essor décisif a lieu sous le Second Empire grâce à la révolution des transports qui permet l’unification du marché intérieur. Cet essor dépend largement de la technologie anglaise. L’industrie automobile apparaît dans les années 1890, Les frères Lumière inventent le cinéma en 1895. En 1903, les frères Wright volent pour la première fois. Dès 1909, Louis Blériot traverse la Manche en avion.

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Une main-d’œuvre ouvrière

Les ouvriers connaissent des conditions de vie difficiles. Leur travail est très pénible, souvent dangereux, et ils subissent une discipline sévère dans les usines. Leurs journées de travail sont longues (12h par jour et plus), et leurs salaires très médiocres. Travaillant dans des conditions aussi difficiles, les femmes et les enfants, qui entrent parfois à l'usine dès l'age de 8 ans, ont des salaires inférieurs à ceux des hommes. Trop mal payés, les ouvrier du XIXème siècle arrivés récemment en ville, vivent généralement dans des logements sans aucun confort et insalubres. Leur condition misérable explique la gravité de drames cil l'abandon d'enfants et la criminalité, mais aussi le fléau de la tuberculose ou celui de l'alcoolisme dénoncé par Emile Zola (1840-1902) dans l'Assommoir (1877) Si le sort des ouvriers tend à s'améliorer pendant la seconde moitié du XIXème siècle, cela tient d'abord à leur solidarité et à leur capacité à mener des actions collectives pour améliorer leurs conditions de vie et de travail. Cette prise de conscience de leurs intérêts communs favorise l’émergence de mouvements revendicatifs. Les marxistes y voient la naissance d’une classe ouvrière constituée de prolétaires vendant leur force de travail aux détenteurs du capital. Ils obtiennent le droit de faire grève et de constituer des syndicats, dès 1824 au Royaume-uni plus tard en France, par la loi de 1864 (création des syndicats légalisée en 1884). Le sort des ouvriers s'améliore grâce à l'augmentation de leurs salaires et grâce à des lois sociales. La législation fixe peu à peu les règles précises sur l’âge minimal au travail (8 ans en 1841, 12 ans en 1874, 13 ans en 1892), sur le travail des femmes qui est interdit la nuit en 1892, sur la journée de travail (12 h en 1892, 10h en 1900, 8h en 1919) et sur le repos hebdomadaire obligatoire (1906). Prolongeant les revendications professionnelles des ouvriers, des partis politiques naissent et se préoccupent de la question sociale (on les appelle "socialistes"). Très vite ces partis se divisent : les marxistes veulent détruire le système capitaliste par la révolution, tandis que les réformistes rejettent la violence et souhaitent une transformation progressive en respectant la légalité. Sous la pression conjuguée de ces syndicats et des nouveaux partis qui reprennent les revendications ouvrières, des lois améliorent les systèmes de protection sociale à l'égard de la maladie, de l'accident et de la vieillesse.

L'essor urbain en Europe

La croissance des villes au cours du XIXème siècle est liée à l'industrialisation, aux progrès des transports et à l'exode rural. Dès la seconde moitié du XVIIIème siècle, l'avance de la Grande-Bretagne est manifeste : les villes y sont nombreuses, très populeuses et plus industrialisées que dans les autres pays européens. Dickens présente la gigantesque métropole londonienne, la ville la plus peuplée du monde avec 4,5 millions d'habitants en 1900, comme une "monstre dévorant". Paris, qui comptait environ 550 000 habitants en 1800, en compte plus d’un million en 1851, 2,3 millions en 1881, 2,9 en 1911.

Si la révolution démographique est loin d'être une condition nécessaire à l'urbanisation, un facteur a

joué un rôle décisif, dès le XVIIIème siècle, c'est l'arrivée massive dans les villes de populations nouvelles à la recherche d'un emploi. Les villes industrielles attirent le surplus de population qui ne trouve plus à s’employer dans les campagnes et les quitte massivement : c’est l’exode rural. Il se caractérise par des départs définitifs de jeunes qui quittent leur campagne.

La population urbaine augmente au XIXème siècle. Autour du noyau urbain central entouré de boulevards, s'édifient de nouveaux quartiers où s'élèvent, souvent pèle même, des usines et des immeubles neufs, particulièrement du coté de la gare. Les capitales comme Londres, mais aussi comme Paris, Bruxelles, Berlin deviennent d'énormes métropoles.

L'industrialisation s'accompagne d'une véritable urbanisation sauvage. Elle provoque la misère des populations ouvrières, celle des anciens citadins, intégrés dans le système industriels, mais surtout celle des ruraux chassés de leurs terres par l'exode rural. Les arrivants s'installent dans les immeubles vétustes des faubourgs ou dans un habitat précaire installé dans les banlieues avec des conditions extrêmement difficiles dues à la promiscuité et au manque d'hygiène. La ville devient un foyer de désordres où sévit la mendicité, la délinquance, l'alcoolisme et où se propagent les épidémies. Il en résulte une ségrégation spatiale qui bouleverse la géographie sociale de la ville. Partout, les banlieues populaires et usinières s'opposent aux "beaux quartiers" résidentiels.

Des politiques d'urbanisme entendent réorganiser et rationaliser les espaces. Pour faciliter l'accès,

améliorer la circulation et embellir la ville, de larges rues rectilignes sont ouvertes dans les anciens quartiers. A Paris, Rambuteau effectue de tes travaux au temps de Louis-Philippe et, sous le Second Empire, le préfet Haussmann entreprend de grandes percées dans le tissu urbain médiéval. Les centres des villes deviennent la vitrine de la nouvelle vie sociale telle qu'elle s'organise au XIXème siècle.

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Le temps de l’émigration et des colonies

La population de l’Europe s’accroît à un rythme très élevé tout au long du XIXe siècle, puisqu’on estime qu’elle passe de 200 millions à plus de 480 millions de 1800 à 1913. Sur la même période, près de 40 millions d’émigrants la quittent. Jusqu’en 1880, il s’agit essentiellement de Britanniques, d’Irlandais et d’Allemands. Ainsi, en Irlande, la grande famine de 1845 est une véritable catastrophe démographique qui entraîne le départ de plus d’un million de personnes vers la côte est des Etats-Unis. A la fin du siècle, les Italiens, les Slaves et les Scandinaves prennent le relais. La France n’est pas concernée par cette émigration. La France est une terre d’immigration, surtout dans les régions frontalières. En 1891, il y a plus d’un million d’étrangers en France, dont 40% de Belges. Les Italiens sont présents dans le sud, mais aussi dans les mines de fer et dans la sidérurgie lorraine.

Outre le Canada et les possessions d’Amérique du Nord, l'empire anglais se compose d’îles antillaises, de comptoirs africains, de la majeure partie de l’Inde et d’une colonie pénitentiaire en Australie. La Nouvelle-Zélande s’y ajoute en 1840 et Hong Kong en 1842.

La France a pour sa part perdu l’essentiel de l’empire constitué au XVIIe siècle dans les guerres franco-britanniques du XVIIIe. Elle ne conserve en 1814 que quelques îles des Antilles et de la Guyane, Gorée et Saint-Louis au Sénégal, l’île Bourbon (La Réunion), les comptoirs de l’Inde et Saint-Pierre-et-Miquelon. En 1830, elle entreprend la conquête de l’Algérie. En juin 1830, un corps expéditionnaire français s’empare d’Alger.

L’interdiction de la traite négrière est effective par le traité de Vienne en 1815. La Grande-Bretagne abolit finalement l’esclavage dans ses colonies en 1833, et la France en 1848.

Les principales puissances européennes se lancent alors dans un vaste mouvement d’expansion coloniale dans les années 1870 – 1880. Les Européens sont à la recherche de matières premières et de débouchés pour leurs productions industrielles. Les explications économiques ne sont pourtant pas les plus importantes. Il est intéressant de constater que Jules Ferry, dont on retient surtout l’image du père fondateur de l’école de la République, est tout autant un fervent défenseur de l’expansion coloniale française, et ce en dépit d’une farouche opposition parlementaire. Pour Jules Ferry, la France, patrie des Droits de l’homme, a naturellement vocation à répandre les Lumières sur le monde. Ferry reprend l’idée du « fardeau de l’homme blanc » évoquée par le Britannique Kipling. Les « races supérieures », affirme Ferry, ont « le devoir de civiliser les races inférieures » (Discours à la Chambre des Députés, 18 juillet 1885). On aurait tort cependant d’imaginer une France unanime menant une politique coloniale mûrement réfléchie. La colonisation ne fut jamais un grand destin national, tout au plus le rêve un peu fou d’une minorité agissante.

La loi de finances du 13 avril 1900 pose le principe de l’autonomie financière des colonies. Le texte stipule que « toutes les dépenses civiles et de la gendarmerie sont supportées en principe par les budgets des colonies ». Il revient donc aux colonisés de payer eux-mêmes les frais engagés par le colonisateur venu les soumettre à son autorité…

A la veille de la Première Guerre mondiale, les possessions françaises sont administrées par trois ministères différents : l’Algérie est rattachée au ministère de l’Intérieur, la Tunisie et le Maroc au ministère des Affaires étrangères et tout le reste au ministère des Colonies. L’Algérie apparaît comme un prolongement de la France au sud de la Méditerranée. Depuis 1898, elle a à sa tête un gouverneur général et est constituée de trois départements.

La Tunisie, depuis 1881, et le Maroc, depuis 1912, sont des protectorats qui conservent leur souverain et leur personnalité propres. Il s’agit en fait d’un trompe-l’œil, l’essentiel du pouvoir se trouvant concentré dans les mains du résident général qui est à la fois le chef des services administratifs du territoire, le ministre des Affaires étrangères du souverain et le commandant des forces armées. Depuis 1891, le gouvernement général de l’Indochine regroupe le Cambodge, le Laos, l’Annam, la Cochinchine et le Tonkin. L’Afrique Noire se divise en Afrique occidentale française et en Afrique équatoriale française, chaque fédération étant un ensemble de colonies. Le quatrième gouvernement général rassemble Madagascar et les Comores. A cela s’ajoute ce que l’on a pris l’habitude d’appeler les « quatre vieilles » : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion, qui deviendront des départements d’outre-mer en 1946, les Territoires d’outre-mer (TOM) d’aujourd’hui, les quatre comptoirs français de l’Inde, et la Côte française des Somalis, l’actuelle Djibouti.

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Naissance de la République

Restauration et monarchie de Juillet

La défaite des armées de Napoléon entraîne le rétablissement de la monarchie et l’installation sur le trône de Louis XVIII, le frère de Louis XVI. La Restauration n’est pourtant pas un retour à l’Ancien Régime. L’égalité civile est maintenue, tout comme les transferts de propriétés effectués pendant la Révolution. La Charte constitutionnelle octroyée en 1814 répartit le pouvoir législatif entre deux assemblées : une Chambre des députés, élue au suffrage censitaire, et une Chambre des pairs, héréditaires ou nommés à vie par le roi.

En 1824, Charles X succède à son frère. Il rompt rapidement avec l’esprit d’apaisement qui prévalait dans le pays, avant d’être renversé finalement par une révolution, les Trois Glorieuses des 27, 28 et 29 juillet 1830.

Le duc d’Orléans accède au trône et devient Louis-Philippe, roi des Français et non plus de France : c’est la monarchie de Juillet. Des oppositions républicaines et socialistes prennent forme surtout dans les sociétés secrètes et suscitent plusieurs révoltes armées qui sont écrasées par la force.

La IIe République

En février 1848, une insurrection populaire parisienne contraint Louis-Philippe à abdiquer et entraîne la proclamation de la République. Un gouvernement provisoire est formé, et le suffrage dit universel, bien qu’excluant les femmes du corps électoral, est adopté le 5 mars. Dans la foulée sont créés des ateliers nationaux chargés d'occuper les chômeurs à des travaux publics (véritable gouffre financier qui aggrave le déficit grandissant du Trésor public). L'abolition de l'esclavage est décidée. La Seconde République se réfère à la Révolution française et renoue avec ses fêtes publiques et ses symboles. De nombreuses municipalités procèdent à la plantation d'arbres de la Liberté et les mairies achètent le buste de la Marianne de Dubray, coiffée du bonnet phrygien.

Les premières élections au suffrage universel qui ont lieu le dimanche de Pâques (23 avril 1848) sont plus qu’une célébration de l’unité sociale : une communion dans la République. Les électeurs des campagnes se rendent au chef-lieu de canton en véritables processions, au sortir de la messe. Près de 7 millions d’électeurs participent au scrutin. Ils élisent une assemblée qui fait la part belle aux modérés et noie dans le sang l’insurrection ouvrière à Paris, en juin 1848, consécutive à la fermeture des Ateliers nationaux.

La constitution du 12 novembre 1848 adopte un régime présidentiel qui permet à Louis-Napoléon Bonaparte de se faire élire, le 10 décembre, à la présidence de la République. Aux élections législatives de mai 1849, les républicains modérés sont mis en minorité au profit d'une droite qui met en place une République conservatrice. Ces conservateurs sont amenés à modifier la loi électorale. La constitution ne permettant pas de revenir au suffrage indirect ni d’abolir le suffrage indirect ni d’abolir le suffrage universel, il reste la possibilité de jouer sur les conditions de résidence. Ainsi la loi du 31 mai 1850 impose trois ans de domicile fixe pour obtenir le droit de vote. Près de 3 millions d’électeurs sur 9 millions et demi sont privés de droit de vote. Le 2 décembre 1851, date anniversaire du sacre de Napoléon Ier en 1804, et de la bataille d’Austerlitz en 1805, le coup d'Etat de Louis Napoléon Bonaparte met un terme à la République. Une génération de républicains, dont beaucoup doivent s'exiler comme Ledru-Rollin ou Victor Hugo, entre dans une farouche opposition au régime impérial.

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Le Second Empire

Le Second Empire est proclamé le 2 décembre 1852. Le Second Empire est une période de forte expansion économique. La France se développe et s’enrichit. Elle se dote d’un puissant secteur bancaire et d’un vaste réseau de chemins de fer, tandis que le préfet de la Seine, Georges Haussmann, modernise la capitale où il perce de larges avenues.

Les élections ne sont guère démocratiques, et l’administration désigne des candidats officiels. Du moins ont-elles lieu régulièrement, ce qui ancre profondément le suffrage universel dans les habitudes des Français. A partir de 1869, avec l’amnistie des républicains, se dessine une évolution vers un « empire libéral ». Le droit de grève est accordé en 1864, et la législation sur la presse assouplie en 1868. Une véritable vie politique peut ainsi renaître.

L'Empire s’effondre quelques mois plus tard à la suite d’une guerre malheureuse contre la Prusse. L’Empereur est fait prisonnier à Sedan le 2 septembre et la République est proclamée à Paris le 4 septembre 1870.

La difficile naissance de la IIIe République

Un gouvernement de Défense nationale est constitué, mais la situation militaire est désastreuse. Paris doit capituler le 28 janvier 1871. Une Assemblée constituante à majorité monarchiste est élue le 8 février et Adolphe Thiers, « chef du pouvoir exécutif de la République Française », signe le traité de Francfort le 10 mai 1871 avec l’Empire allemand (solennellement proclamé dans la galerie des glaces du château de Versailles le 18 janvier 1871). L’Alsace et la Lorraine sont cédées à l’Allemagne à qui la France est contrainte de verser une indemnité de 5 milliards de francs or.

Ce même mois de mai voit l’écrasement de la Commune, qui prend naissance le 18 mars 1871 quand le gouvernement tente de s’emparer des canons de la garde nationale à Montmartre. Une insurrection se propage aussitôt, tandis que le gouvernement doit abandonner la capitale et se réfugier à Versailles. Du 21 au 28 mai 1871, les « Versaillais » donnent l’assaut à la capitale à l’aide de troupes provinciales. La répression est féroce, c’est la « semaine sanglante ». Les combats s’achèvent au cimetière du Père-Lachaise où sont fusillés les derniers insurgés.

L’assemblée est divisée sur les modalités d’une restauration. Les orléanistes favorables à la famille de Louis-Philippe, duc d’Orléans et roi des Français de 1830 à 1848, s’opposent aux légitimistes qui, depuis 1830, considèrent la branche aînée des Bourbons comme seule légitime et soutiennent le comte de Chambord, petit-fils de Charles X. Hostile à l’héritage de la Révolution et notamment au drapeau tricolore, le comte de Chambord fait échouer toutes les initiatives de ses partisans.

Adolphe Thiers joue un rôle fondamental dans la nouvelle République. D’abord favorable à la monarchie, il va progressivement acquérir la conviction qu’il n’y a d’autre gouvernement possible pour la France que la République conservatrice. Il est contraint de démissionner au profit du légitimiste Mac-Mahon qui devient président de la République en mai 1873. A cette date, la République n’a toujours pas de constitution. En novembre, Mac-Mahon instaure le septennat qui doit lui laisser le temps de faire aboutir la restauration à laquelle il aspire. Le 30 janvier 1875 est adopté à une voix de majorité l’amendement Wallon qui précise que « le président de la République est élu par le Sénat et la Chambre », ce qui revient à instituer la République.

Trois lois constitutionnelles sont votées en février et juin 1875. Elles constituent l'embryon de constitution de la IIIème République. Ces lois prévoient de respecter le suffrage universel et la séparation des pouvoirs. C'est donc un régime parlementaire qui est mis en place. Le pouvoir législatif appartient à un Parlement formé de deux chambres : la Chambre des députés, élus pour 4 ans au suffrage universel direct, et le Sénat dont les membres sont élus pour 9 ans au suffrage indirect. Le Président de la République, élu pour 7 ans par le Parlement réuni à Versailles, est le chef de l’Etat. Il dirige les armées, dispose du droit de grâce, promulgue les lois dont il a l’initiative avec le Parlement et nomme le Président du Conseil, qui est le chef du gouvernement. La République est désormais en place.

Les républicains choisissent bientôt la Marseillaise comme hymne officiel et font du 14 juillet la fête nationale alors que le Parlement, qui siégeait à Versailles depuis la Commune, s’installe de nouveau à Paris.

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La République par l’école

Pour consolider la République, il faut soustraire la jeunesse à l’influence de l’Eglise, ce qui passe nécessairement par le contrôle de l’enseignement primaire. On aurait tort cependant d’imaginer que la IIIe République alphabétise des petits Français qui ne connaissent pas les chemins de l’école. La majeure partie des enfants fréquente l’école dès avant Ferry. L’essentiel s’est joué sous la monarchie de Juillet avec la loi Guizot de juin 1833 qui contraignit chaque commune à entretenir au moins une école primaire élémentaire et chaque département une école normale d’instituteurs. La gratuité avait de même fortement progressé avant l’instauration de la République.

Une première loi du 16 juin 1881 instaure la gratuité de l’enseignement primaire avant la loi du 28 mars 1882 sur l’obligation et la laïcité. Les républicains comptent sur l’école publique pour affermir le régime et interdire à jamais toute restauration. L’histoire est alors une pièce maîtresse des programmes qui exaltent la nation et ses héros, quand la géographie permet aux petits Français de se représenter un espace national qu’ils ne connaissent pas.

La République des républicains

Les républicains entendent consolider le nouveau régime en adoptant les grandes lois républicaines. Ils affirment les libertés publiques par les lois de 1881 instituant la liberté de la presse et le droit de réunion. Ils renforcent la démocratie locale par la loi de 1882 qui décide l'élection des maires (sauf à Paris). Ils adoptent les lois sur l'enseignement en 1881 et 1882. Par ailleurs sont créés des lycées de jeunes filles. La loi de 1884 rétablit le divorce, mesure qui déplait au parti clérical. Pourtant de 1885 à 1898, la République connaît une période de difficultés qui témoignent de sa fragilité. La crise boulangiste (1886-1889) suscite une coalition de mécontents. Le scandale de Panama (1892-1893) éclabousse de nombreux parlementaires accusés de corruption. L'affaire Dreyfus, avec ses manifestations d'antisémitisme, déchire l'opinion et conduit à l'affirmation d'une gauche républicaine favorable aux droits de l'homme et très anticléricale. Aux dreyfusards qui défendent les Droits de l’Homme et la Justice s’opposent les antidreyfusards qui mettent en avant l’honneur de l’armée et la raison d’Etat, avec des arguments antisémites.

Les radicaux s’installent alors durablement au pouvoir et instaurent une laïcité de combat. La loi de juillet 1901 sur les associations permet la naissance de véritables partis politiques mais soumet les congrégations religieuses à l’approbation du Parlement. Le 9 décembre 1905, enfin, est adoptée la loi de séparation des Eglises et de l’Etat. Désormais, « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». La République laïque est définitivement établie.

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La planète en guerre : l'extrême violence du XXème siècle

La Grande Guerre

8 400 000 mobilisés en métropole, et plusieurs centaines de milliers dans les colonies; 1 380 000 morts, dont 70 000 originaire de l'outre mer, 600 000 veuves, 700 00 orphelins, peut être 1 000 000 d'invalides. Ramené aux seuls chiffres nationaux, le bilan de la première guerre mondiale est effrayant. La nation tout entière est meurtrie dans sa chair.

Tout débute le 28 juin 1914 quand, à Sarajevo, un bosniaque assassine l'archiduc François-Ferdinand, l'héritier de la couronne impériale d'Autriche-Hongrie. Le 28 juillet, l'Autriche-Hongrie, qui espère un conflit limité, déclare la guerre à la Serbie. La machine infernale est désormais lancée. Le tsar mobilise pour défendre son allié serbe. L'Autriche-Hongrie en fait de même, tout comme l'Allemagne. Quant à la France, elle ne peut abandonner son allié russe. Le 2 août, l'Allemagne déclare la guerre à la France, ce qui conduit le Royaume-Uni à déclarer la guerre à l'Allemagne le 4 août. La mobilisation s'effectua en France dans le calme et avec le sentiment d'un devoir à accomplir. Le temps semblait venu de vider une fois pour toutes le contentieux franco-allemand et de reprendre l'Alsace et la Lorraine qui avaient été perdues en 1871. Le service militaire obligatoire, qui avait été porté à 3 ans l'année précédente, l'école de la République, qui exaltait le sentiment national, tout concourait à faire accepter une guerre qui serait, pensait-on, courte et victorieuse. Début août, les Français se rassemblent dans ce qu'on a appelé l'Union sacrée pour défendre la patrie.

Les allemands attaquent par la Belgique, pourtant neutre. Le nord de la France est peu protégé. La Belgique franchie, les allemands approchent dangereusement de Paris (45 km). Le général Joffre stoppe l'avancée ennemie sur la Marne du 5 au 12 septembre 1914. S'ensuit une course à la mer ou chaque armée essaie de déborder l'autre pour aboutir, à la fin de l'année, à un front continu de la Suisse à la mer du Nord où les troupes se font face, enterrées dans des tranchées. Le front n'évolue pratiquement plus avant le printemps 1918. Le 21 février 1916 débute la bataille de Verdun, dirigé par Pétain. Elle est interrompue en juillet car la bataille de la Somme est lancée le 1er juillet 1916, commandé par Joffre. Celle-ci se termine le 18 novembre, les alliés ont avancé d'une dizaine de km. Elle a fait 1 200 000 tués ou blessés. Quant à la bataille de Verdun, elle prend fin en décembre 1916, avec 700 000 morts, et pourtant les positions des 2 camps n'ont pas changées. Le général Nivelle lance en 1917 l'offensive du Chemin des dames. C'est une telle boucherie que des mutineries se déclanchent dans l'armée, durement réprimées. Pendant les 6 semaines d'offensive, 270 000 soldats trouveront la mort. Le 7 mai 1915, le navire Lusitania fait naufrage. Les Etats-Unis entrent alors en guerre. Le 13 juin 1917, les premiers contingents américains débarquent en France. L'année 1918 commence par des offensives allemandes sérieuses. Ceux-ci atteignent la Marne à 60 km de Paris, mais ils doivent reculer devant la contre-offensive (18 juillet 1918) que Foch peut organiser grâce à l'arrivée massive de soldats américains (1 millions de renforts). L'armistice qui met fin aux hostilités est alors signé à Rethondes, le 11 novembre 1918.

La deuxième Guerre mondiale Le 1er septembre 1939, l'Allemagne envahit la Pologne. Le 3 septembre 1939, le Royaume-Uni et la France déclarent la guerre à l'Allemagne. Le 10 mai 1940, les Pays-Bas, la Belgique et la France sont envahis par les troupes allemandes. Le corps expéditionnaire britannique est évacué en catastrophe à Dunkerque. Le 14 juin, les Allemands entrent dans Paris. L'armistice est signé le 22 juin 1940; les Britanniques sont désormais seuls face à l'armée allemande. Galvanisés par le Premier ministre Winston Churchill, ils résistent courageusement aux bombardements massifs et conservent la maîtrise du ciel. Le 22 juin 1941, l'Allemagne envahit l'URSS. L'armée rouge est balayée et, en décembre 1941, les troupes allemandes sont aux portes de Moscou et de Leningrad, où elles sont arrêtées par l'hiver russe auquel elles sont mal préparées. Les Etats-Unis entrent à leur tour dans la guerre. Leur politique isolationniste n'est plus d'actualité avec l'extension du conflit. Le 7 décembre 1941, sans déclaration de guerre, l'aviation japonaise détruit à Pearl Harbor la plus grande partie de la flotte américaine du Pacifique. La guerre s'internationalise. Parallèlement à la guerre européenne se déroule en effet une guerre dans le Pacifique où le Japon mène une politique impérialiste depuis le début des années 1930. Au printemps 1942, la puissance de l'Axe est à son apogée, tant en Europe et dans le Pacifique qu'en Afrique. L'expansion Japonaise est pourtant stoppée en mai lors de la bataille de la mer de Corail. En août, les troupes allemandes échouent à prendre Stalingrad (elles capitulent en février 1943). La victoire des Alliés qui disposent d'une énorme supériorité industrielle n'est plus alors qu'une question de temps. Le

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6 juin 1944, les Alliés débarquent en Normandie. Paris est libéré le 25 août. Un nouveau débarquement à lieu en Provence le 15 août, ce qui provoque la retraite des armées allemandes. Le Rhin est franchi en mars 1945. Les soviétiques entrent dans Berlin, et Hitler se suicide le 30 avril. Berlin capitule le 8 mai sans conditions. Dans le Pacifique, les Etats-Unis doivent faire face à une défense acharnée des troupes japonaises qui refusent de se rendre. Le président Truman décide alors d'utiliser la nouvelle arme atomique. Une première bombe est larguée sur Hiroshima le 6 août, une seconde sur Nagasaki le 9 août. Le 2 septembre 1945, le Japon signe l'acte de capitulation : c'est la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Plus de 50 millions de morts dans le monde, dont 20 pour la seule URSS. C'est le conflit le plus meurtrier de l'histoire. Certains pays comme l'Allemagne et la Pologne ont eu plus de morts civils que militaires, car les bombardements aériens sur les villes furent effroyables (celui de Dresde en février 1945 fit 135 000 victimes). Le massacre des populations et des camps d'extermination firent 15 millions de morts dont 6 millions de juifs et tziganes par les nazis.

La France dans la deuxième guerre mondiale

En déclarant la guerre à l'Allemagne, la France ne veut pas connaître à nouveau les sanglantes hécatombes de l'été 1914. Elle attend donc l'ennemi de pied ferme, retranchée derrière la ligne Maginot. La frontière belge n'est pas protégée, les Ardennes étant réputées infranchissables. La surprise est ainsi totale lors de l'attaque du 10 mai 1940. Dès le 14 juin, les troupes allemandes sont dans Paris, abandonné par le gouvernement. Le 22 juin, l'armistice est signé à Rethondes sur les lieux mêmes où avait été signé celui du 11 novembre 1918. La guerre a été courte, mais sanglante : 92 000 tués en cinq semaines dans les rangs dans l'armée française. Les conditions faites à la France sont dures. Le pays est partagé entre une zone nord, occupée, et une zone sud, dite "libre". L'Alsace et la Moselle sont annexées de fait. Les frais d'occupation sont à la charge des Français, et les soldats démobilisés sont considérés comme prisonniers de guerre et emmenés en Allemagne. La IIIème République n'est plus. Le pouvoir appartient à un vieil homme de 84 ans qui entend bien imposer à la France un ordre nouveau. Pétain met rapidement en place un régime xénophobe et antisémite, et choisit d'entrer dans la voie de la collaboration avec l'Allemagne dont il tient la victoire finale pour inéluctable. Le 24 octobre, il rencontre Hitler à Montoire. Si la majorité des Français semble faire confiance au héro de Verdun, tous ne se résignent pas à la défaite. Le 17 juin 1940, le général de Gaulle, sous-secrétaire d'Etat à la Défense nationale, rejoint Londres d'où il lance, le 18 juin, un appel à poursuivre le combat. Il est bien peu entendu. L'Afrique équatoriale française (AEF) se rallie fin août à l'initiative du gouverneur du Tchad Félix Eboué. Parallèlement à l'action de De Gaulle se développe une résistance intérieure qui se structure progressivement en mouvements à partir de 1941. Après l'invasion de l'URSS en juin 1941, les communistes entrent massivement dans la Résistance. Ils sont rejoints en 1943 par des travailleurs qui refusent d'être envoyés en Allemagne au titre du service du travail obligatoire (STO) mis en place par Vichy. Avec le débarquement allié en Afrique du Nord, de Gaulle s'installe à Alger. Il parvient progressivement à faire reconnaître son rôle de chef de la France Libre par les Alliés et à asseoir son autorité sur la Résistance intérieure, que son envoyé Jean Moulin regroupe au sein du conseil national de la Résistance (CNR). Le 3 juin 1944, il proclame à Alger la naissance du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Il s'agit dès lors de songer à la reconstruction politique du pays au lendemain de la Libération. La Libération commence avec le débarquement anglo-américain en Normandie (6 juin 1944). La Résistance intérieure y participe activement par des actions de renseignement, de sabotage, de guérilla. Le régime de Vichy s'effondre dès le reflux de l'armée allemande, et le général de Gaulle peut installer le GPRF dans la capitale à la fin du mois d'août 1944. La France poursuit alors la guerre avec les Alliés, ce qui permet de faire partie du camp des vainqueurs. Les pertes matérielles sont énormes, bien plus qu'en 1918. Des villes entières, comme Le Havre, ont été rasés par les bombardements alliés. Le ravitaillement reste une obsession quotidienne, et il faut attendre 1949 pour voir la fin du rationnement. Sur le plan économique comme sur le plan politique, le pays est à reconstruire.

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L'extermination des juifs par les nazis Le nazisme fut d'abord un racisme extrême, présenté dès 1925 dans Mein Kampf. Hitler reprend à son compte les idées racistes qui ont servi de fondement à la doctrine national-socialiste. Pour Hitler, la lutte des peuples s'explique par la lutte des races entre les peuples. A ces yeux, les germains sont les plus dignes descendants des Aryens. Ils constituent la "race supérieure", ce qui les désigne comme les plus aptes à dominer le monde et à disposer d'un espace vital qui favorise leur épanouissement. La priorité doit être de préserver la pureté de la race aryenne des menaces de contamination par les races inférieures. Ce qui fut nouveau dans le nazisme ce fut, en très peu de temps, l'ampleur et la violence des moyens utilisés pour créer une "race aryenne supérieure pure". Des mesures eugéniques destinées à améliorer la race furent utilisées. La persécution contre les Juifs débuta en Allemagne dès 1933 par leur exclusion de certains emplois, dont l'administration. Les lois de Nuremberg en 1935 marquèrent une nouvelle étape en les transformant en citoyens de seconde zone, avant la politique d'"aryanisation" de 1938 qui les exclut de la vie économique (le 9 septembre 1938, lors de la nuit de cristal, 7000 magasins juifs furent saccagés et des synagogues incendiées). Puis, au début de la guerre, confrontés aux millions de Juifs de Pologne et d'URSS, les allemands utilisent trois méthodes différentes. D'abord, ce furent les ghettos qui servirent à regrouper et enfermer les Juifs; celui de Varsovie voyait s'entasser 435 000 habitants. Puis pendant l'invasion de l'URSS, des groupes de soldats spécialisés furent chargés de massacrer les civils juifs et communistes. Enfin en décembre 1941 eurent lieu les premières exécutions avec des camions à gaz, en Pologne. Le durcissement de la guerre et le besoin de main-d'œuvre amenèrent les nazis à mettre au point la Solution finale lors de la conférence de Wansee (janvier 1942. Il se mêlait deux objectifs : utiliser la main d'œuvre et/ou éliminer les juifs. Les camps de concentration étaient soit des camps de travail, soit des camps d'extermination, soit les deux comme à Auschwitz-Birkenau. Les ghettos furent donc fermés et un énorme système de transport fut mis en place dans toute l'Europe pour acheminer les Juifs raflés. Le bilan est effroyable, mais ne concerne pas que les Juifs. Sur 8 millions de Juifs vivant en Europe en 1939, 5,1 périssent dont 3 millions exterminés dans les camps, 1,3 millions massacrés en URSS, 800 000 décimés dans les ghettos, soit plus de 70 % de la communauté juive. Sur les 75 000 juifs français déportés dans les camps, seuls 2 500 en sont revenus. Les tziganes, autre "race inférieure" sans patrie, furent exterminés à 47 % soit 240 000 morts; et la volonté de création d'une race supérieure amena l'euthanasie de 70 000 handicapés; même les homosexuels furent exterminés par milliers. Les slaves furent aussi massivement tués. Le 27 janvier est retenu comme la journée de la mémoire de l'Holocauste et de la prévention des crimes contre l'humanité.

Les guerres coloniales La deuxième guerre mondiale joua un rôle décisif : les Alliés, en affirmant les principes de la Chartes de l'Atlantique, encouragèrent l'émancipation des peuples colonisés que leur participation à la guerre paraissant justifier amplement. Mais la France, humiliée en 1940, essaya de rétablir partout sa domination, même assouplie; les incohérences de l'Union Française et la crise de la IVème république l'entraînèrent dans deux guerres longues et meurtrières, en Indochine et en Algérie. La guerre d'Indochine (1946-1954) Le bombardement de Haïphong en novembre 1946, qui, au lieu de calmer l'agitation, provoqua des massacres de Français à Hanoï le 19 décembre. La guerre allait durer huit ans et devenir de plus en plus un conflit idéologique internationalisé. De nombreux facteurs contribuèrent à affaiblir l'armée française. D'abord l'instabilité politique de la IVème République qui laissa se développer des politiques contradictoires entre civils et militaires. Cette guerre du bout du monde fut peu soutenue par les médias et la population qui avait bien d'autres problèmes. Le nombre important de morts (75 000), de prisonniers (14 000) et de blessés (50 000), aggravait le manque d'effectifs. L'armée Vietminh bénéficia rapidement de plusieurs atouts essentiels; elle fut armée et financée par l'aide chinoise puis russe; cela lui permit de posséder une artillerie lourde et des canons antiaériens décisifs lors de la bataille de Dien-Bien-Phû. Elle fut aussi très encadrée et motivée par l'appareil communiste. Une grande base aéroterrestre, avec 12 000 hommes fut installée à Dien-Bien-Phû en 1953. Mais le 6 mai 1954, après 55 jours de siège, ce fut la capitulation devant des forces 5 fois supérieures et très bien armées. Les négociations de Genève aboutirent en juillet 1954 à l'indépendance du Laos, du Cambodge et du Vietnam nord.

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La guerre d'Algérie (1954-1962) Conquise dès 1830, l'Algérie constituait la plus grande colonie française et la seule véritable colonie de peuplement. Près d'un million d'Européens y vivaient avec 8 500 000 Algériens. A la différence de la guerre d'Indochine, la guerre fut ici surtout nationaliste. Après Dien-Bien-Phû, les mouvements nationalistes firent la preuve de leur unification dans le cadre du Front de Libération Nationale (FLN) en organisant 30 attentats lors de la "Toussaint sanglante" de 1954. Avec l'envoi d'une armée de 400 000 hommes et 30 000 harkis, les violences réciproques s'amplifièrent. En France, l'opposition du PC et de nombreux intellectuels et les attentats du FLN divisèrent l'opinion. Sur place, l'arrivée du général Salan, ancien d'Indochine, conduisit l'armée à s'adapter à la guérilla et à employer la torture, ce qui permis de gagner la "Bataille d'Alger". Craignant l'abandon, les "pieds-noirs" et l'armée organisèrent le putsch d'Alger le 13 mai 1958. Pour éviter la guerre civile, le retour de De Gaulle s'imposa et entraîna le changement des institutions : naissance de la Vème république. Mais dès septembre 1959, il parle d'auto-détermination, puis l'Algérie algérienne. En janvier 1961, un référendum approuve cette politique à 75 %. Finalement les Accords d'Evian du 18 mars 1962 amenèrent le cessez-le-feu et un référendum d'auto-détermination le 3 juillet. Le plus tragique fut le massacre d'environ 50 000 harkis restés en Algérie; et bien sur le départ de 800 000 "pieds-noirs" et harkis vers la France.

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La Vème République

Ainsi qu’y invitent les documents d’application, ce thème doit être envisagé comme une première approche du fonctionnement des institutions de la République. Il s’agit donc de se familiariser avec les rôles respectifs de président de la République, du gouvernement et du Parlement.

Quelle place le général de Gaule a-t-il occupé dans notre histoire nationale ? Comment a-t-il contribué au renforcement du pouvoir exécutif dans la constitution de 1958 ? Quels rôles ont joué Georges Pompidou, Valéry Giscard d'Estaing ou François Mitterrand ? Comment ont fonctionné les institutions au temps de l'expérience socialiste ?

La Cinquième République est née de l’insurrection algérienne. Le 13 mai 1958, les généraux Massu et Salan font un putsch à Alger par lequel ils marquent leur refus de toute négociation avec les nationalistes ; ils constituent un Comité de salut public. Charles de Gaulle fait alors savoir le 15 mai qu'il est "prêt à assumer les pouvoir de la République". Il est appelé le 1er juin à la présidence du conseil par le président de la République René Coty et est invité à former un gouvernement. Le 2 juin, devant l’Assemblée Nationale, De Gaulle réclame les pleins pouvoirs pour six mois et promet de soumettre rapidement un projet de constitution au vote des Français. Le 28 septembre a lieu le référendum sur la nouvelle constitution : elle est adoptée à près de 80%. A la fin du mois de novembre se déroulent les premières élections législatives de la Cinquième République. Elles voient le succès de l’UNR (Union pour une Nouvelle République) du général. Lequel est élu président le 21 décembre.

Les institutions de la Cinquième République

Le pouvoir exécutif - Le président de la République est au départ élu pour sept ans au suffrage restreint. Un collège

de « grands électeurs » est chargé de désigner le magistrat suprême. Le référendum du 28 octobre 1962 révise la Constitution et transforme l’élection du président de la République en scrutin au suffrage universel à deux tours. Une dernière modification au statut du président de la République est enfin apportée le 24 septembre 2000, l'adoption par référendum du quinquennat entrant en application avec la réélection de Jacques Chirac le 5 mai 2002. Le président de la République nomme le Premier ministre parmi les membres de la majorité parlementaire et, sur sa proposition, désigne les membres du gouvernement. Ses pouvoirs sont particulièrement étendus : outre ce qui vient d’être évoqué, il préside le Conseil des ministres ainsi que le Conseil supérieur de la magistrature ; il est le chef des armées, promulgue les lois et peut en appeler à la voix populaire par le référendum. Il peut dissoudre l’Assemblée nationale et ordonner l’état de siège en cas de menace grave. Il dispose enfin du droit de grâce.

- Le gouvernement est composé de ministres et de secrétaires d’Etat dont le chef est le Premier ministre qui lui dirige l’action du gouvernement. Celui-ci peut engager la responsabilité de son équipe devant les députés (vote de la question de confiance) ; l’Assemblée peut également le censurer. Les ministres ne peuvent exercer un mandat électoral en même temps qu’une fonction gouvernementale. Le pouvoir législatif (un régime à deux assemblées : bicamérisme) :

- L’Assemblée Nationale ou chambre des députés (Palais Bourbon) est élue pour cinq ans au suffrage universel direct. Son président est élu parmi les membres de la majorité pour la durée de la législature. Une session parlementaire dure 9 mois, du premier jour ouvrable d’octobre au dernier jour ouvrable de juin. L’Assemblée Nationale vote les lois d’origine gouvernementale (projets de loi) et celles d’origine parlementaire (proposition de loi) ; elle vote également le budget. Les députés exercent un contrôle de l’action du gouvernement par l’intermédiaire des « questions ».

- Le Sénat (Palais du Luxembourg) est élu pour neuf ans, au suffrage restreint à deux degrés (un collège électoral formé d’élus), et renouvelable par tiers tous les trois ans ; le mandat du sénateur dure six ans. La haute assemblée ne peut être dissoute. Son président est le troisième personnage de l’Etat et peut être amené à diriger le pays en cas de vacance du pouvoir jusqu’à l’organisation de nouvelles élections présidentielles. Comme les députés, les sénateurs ont l’initiative des lois (proposition) et l’exercice du contrôle du gouvernement. En revanche, ils ne peuvent renverser un gouvernement. En cas de désaccord avec la chambre des députés à propos d’une loi, une commission paritaire est formée afin de trouver un compromis ; s’il s’avère impossible, l’Assemblée Nationale a le dernier mot. Le Conseil constitutionnel Il comprend neuf membres appelés les neuf sages : trois d’entre eux sont nommés par le président de la République, les trois suivants par le président de l’Assemblée nationale et les trois derniers par celui du

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Sénat. Il siège à Paris, au Palais-Royal. Le président du Conseil constitutionnel est nommé par le président de la République et possède une voix prépondérante. En plus des neufs, les anciens présidents de la République en sont membres de droit. Ledit Conseil se renouvelle par tiers tous les trois ans ; le mandat est de neuf ans non reconductible. Lors des élections présidentielles, les sages veillent à la régularité du scrutin, proclament les résultats et examinent les éventuelles réclamations. Même chose lors d’élections législatives et sénatoriales. Le Conseil économique et social Il conseille le gouvernement et participe à l’élaboration de la politique économique et sociale du pays. Ses 213 membres sont nommés par le gouvernement pour cinq ans sur proposition des grands organismes économiques et sociaux du pays ainsi que des organisations syndicales, patronales et ouvrières. Il est obligatoirement consulté pour tout projet de loi, de programme ou de plan, et pour tout sujet économique et social. En séance plénière, cette assemblée se réunit à Paris au palais d’Iéna.

La fin des conflits coloniaux La Vème République naît de l'incapacité des gouvernements de la IVème de sortir des conflits coloniaux. Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, l'Empire colonial français est transformé en une Union française formée par la France et les Territoires d'outre-mer (anciennes colonies ou protectorats), alors que les quatre "vieilles" colonies (Guadeloupe Guyane, Martinique et Réunion) deviennent des départements d'outre-mer. L'Indochine est indépendante en 1954, le Maroc et la Tunisie en 1956. Cette même année, une loi-cadre permet aux territoires d'Afrique noire de prendre progressivement leur destin en main. Tous acceptent d'entrer dans la Communauté en 1958, à l'exception de la Guinée qui accède de fait à l'indépendance immédiate. La Communauté, qui prévoit l'autonomie interne associée à des liens étroits avec la France, cède rapidement la place à l'indépendance totale des pays africains en 1960. Le temps des empires coloniaux est définitivement révolu. Les choses sont beaucoup plus complexe en Algérie, où vivent plus d'un million de colons d'origine européenne. L'accession du général de Gaulle au pouvoir est accueillie avec enthousiasme par les Français d'Algérie qui voient en lui l'homme providentiel capable de les sauver du FLN qui mène la guerre d'indépendance. Mais dès 1959, il propose de recourir à l’autodétermination en soumettant trois solutions à la population : sécession, francisation ou association en collaboration étroite avec la France. De Gaulle se heurte alors aux partisans de l’Algérie française qui se sentent trahis ; il essuie successivement des émeutes – semaine des barricades à Alger en 1959 – et un putsch militaire en avril 1961. Le président ne faiblit pas et maintient l’idée d’une autodétermination en le faisant approuvé par référendum le 8 janvier 1961. L’OAS (Organisation armée secrète) se lance alors dans une campagne terroriste sanglante sur le territoire métropolitain, tout en essayant de persuader l’armée française de s’opposer à la volonté gouvernementale. Cela se solde par un échec. Le FLN négocie avec l’Etat français pour aboutir à la signature des accords d’Evian le 18 mars 1962. Les Européens fuient alors l’Algérie.

Une constitution à l'épreuve du temps Le cas algérien étant définitivement levée, Charles de Gaulle peut se consacrer à ce qui est pour lui l'essentiel : restituer à la France son rang dans le monde. Il s'appuie, pour ce faire, sur un contexte économique favorable et une croissance soutenue. Une politique budgétaire rigoureuse permet une modernisation spectaculaire du pays qui prend progressivement ses distances avec les Etats-Unis et se rapproche de l'Allemagne. La France est désormais une puissance nucléaire qui, tout étant fidèle à l'Alliance atlantique, décide la fermeture des bases américaines qui se trouve sur son territoire et la sortie de l'OTAN en 1966. Cette politique de grandeur passe aussi par la coopération avec les pays de l'ancien empire colonial et par des voyages remarqués dans le tiers-monde. A la surprise de tous, Charles de Gaulle est pourtant mis en ballottage par François Mitterrand à la première élection présidentielle au SU direct en 1965. Il est finalement élu au deuxième tour avec plus de 55 % des voix, ce qui constitue pour lui un demi-échec. Un fossé semble peu à peu se creuser entre le général et les Français, fossé qui apparaît en pleine lumière avec la crise de mai 1968. Le mois de mai 1968 témoigne d’une véritable crise politique et sociale, des grèves paralysent le pays. Le mouvement est d’abord étudiant puis devient rapidement ouvrier ; on compte près de dix millions de grévistes. La crise sociale est résolue par les accords de Grenelle (27 mai). De Gaulle dissout l’Assemblée et provoque des élections législatives anticipées qu’il remporte en juin, preuve que l’opposition n’aura pas su profiter de cette agitation. L’année suivante, le général soumet un nouveau référendum aux Français : il porte sur la régionalisation et la réforme du Sénat ; en filigrane se lit la question de son

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maintien à la tête de l’Etat. Les Français rejettent sa proposition le 27 avril 1969, Charles de Gaulle en tire immédiatement les conséquences et quitte ses fonctions le lendemain. Une première page de l'histoire de la Vème République est définitivement tournée. Il reste maintenant à vérifier que les institutions peuvent survivre à leur fondateur. Georges Pompidou, Premier ministre de 1962 à 1968, est élu président de la République en juin 1969. Durant cinq années, Georges Pompidou poursuit la politique gaullienne dans ses grandes lignes en l’infléchissant vers la concertation sociale. Ce qui permet au gouvernement de Jacques Chaban-Delmas de surmonter divers mouvements sociaux, échos de mai 1968. La gauche non communiste fonde le parti socialiste en 1969, dont François Mitterrand deviendra 1er secrétaire au congrès d’Épinay (1971). Le président, gravement malade, s'éteint en cours de mandat le 2 avril 1974. L’élection de Valéry Giscard d’Estaing marque l’avènement d’une droite rajeunie et libérale. Il nomme Jacques Chirac à Matignon et se démarque de ses prédécesseurs par l’adoption de mesures symboliques ainsi qu’une plus grande proximité avec le peuple : Giscard d’Estaing entreprend la légalisation de l’avortement (Loi Veil) (1974-1975), la libéralisation du divorce (1975), abaisse la majorité à 18 ans. Le septennat doit cependant affronter les répercussions de la crise économique et mondiale des années 1970. Jacques Chirac démissionne en 1976 de son poste de chef du gouvernement. Le ministre du commerce extérieur Raymond Barre le remplace avec pour objectif de juguler l’inflation, alors que les régions industrielles du nord de la France entrent en crise. Globalement le président est très présent en politique intérieure et peine à s’imposer sur la scène internationale. Le 10 mai 1981, pour la première fois dans l’histoire de la République, un président socialiste est élu au suffrage universel. L’alternance démontre une fois encore la solidité des institutions de la Cinquième République. Le gouvernement se lance dans une série de réformes qui devaient amener le « changement » promis par le candidat Mitterrand : abolition de la peine de mort, régularisation des immigrés clandestins, réduction de la durée du temps de travail à 39h, age de la retraite à 60 ans, instauration de la cinquième semaine de congés payés, création de l'impôt sur la fortune, décentralisation, nationalisations… Mais la réalité économique rattrape l’idéologie politique et Pierre Mauroy comme son successeur Laurent Fabius doivent se rallier à l’orthodoxie financière : augmentation du chômage, lenteur de la croissance, échec de la réforme scolaire de 1984 (loi Savary), résurgences extrémistes… Une modification de la loi électorale permet d'éviter une déroute électorale aux élections législatives de 1986. La droite remporte cependant une courte victoire en sièges, ce qui place le pays devant une situation inédite sous la Vème République : le président n'a pas de majorité à l'Assemblée. C'est le début d'une phase inédite de la République, la cohabitation. Jacques Chirac est alors nommé Premier ministre et mène une politique libérale marquée par la privatisation d’entreprises notamment parmi celles qui avaient été nationalisées en 1981. François Mitterrand est réélu à la présidentielle de mai 1988. Les trois premiers ministres successifs nommés par François Mitterrand entre 1988 et 1993 – Michel Rocard, Edith Cresson, Pierre Bérégovoy – ont à affronter la crise structurelle de l’économie française. Qu’ils soient partisans d’une modernisation du socialisme – Rocard – où partisans d’un « virage à gauche » plus prononcé, ils ne parviennent pas à endiguer la crise de confiance envers des socialistes. Surtout, le chômage, générateur d’exclusion sociale, ne cesse de croître, touchant des couches de plus en plus larges de la société, aggravant le malaise des banlieues. Le paysage politique est alors en pleine recomposition : effondrement des communistes après la chute du Mur de Berlin (1989) et montée du Front national. La victoire de la droite aux élections législatives de 1993 réduit les forces de gauche à 92 députés sur 577. Édouard Balladur est nommé à la tête d’un gouvernement de centre droit pour une deuxième période de cohabitation. Il réforme les retraites du secteur privé, effectue de nouvelles privatisations et se pose en rival de Jacques Chirac pour l'élection présidentielle suivante. Jacques Chirac est élu président de la République le 7 mai 1995. Il nomme Alain Juppé à la tête du gouvernement. Lequel est confronté à un chômage en hausse et à la nécessité de réformer l’Etat afin de réaliser l’union monétaire. Le plan Juppé de 1995 provoqua de nombreuses grèves (réforme de la Sécurité Sociale). Sur le plan extérieur, le président affirma la place de la France dans l’Union européenne et dans le monde. Mais désireux de trouver une majorité plus confortable pour gouverner, il décida de dissoudre l’Assemblée nationale en 1997. Les élections législatives anticipées se soldèrent par une victoire de la gauche dite « plurielle » (socialistes/communistes/écologistes), sanctionnant la politique gouvernementale. Lionel Jospin est alors appelé à Matignon, inaugurant la troisième période de cohabitation de la Cinquième République. Le nouveau premier ministre s’entoure de ministres communistes et écologistes et opte pour un programme de gauche avec une réduction du temps de travail (35 heures) et la création d’emplois-jeunes pour endiguer la crise du chômage. La multiplication des candidatures à gauche (8) ne permet pas à Lionel Jospin de se maintenir au second tour de l’élection présidentielle de 2002 qui oppose Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen : le président sortant l’emporte avec plus de 80% des suffrages alors que l’entre-deux tours connaît un ample mouvement populaire rejetant l’extrême droite et appelant à voter pour le président sortant.

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La société en France dans la deuxième moitié du XXème siècle

Cette question doit inciter à une réflexion sur l'histoire immédiate, en mettant en perspective les changements qui s'opèrent dans la vie sociale d'un pays occidental marqué par une forte croissance économique (les Trente Glorieuses) et perturbé par la crise qui a suivi. L'objectif doit être d'analyser la manière dont la société de consommation s'organise en impose une manière de vivre qui concerne, aujourd'hui, la grande majorité des Français. De 1945 au milieu des années 1970, l'économie mondiale est marquée par une phase de forte croissance, les Trente Glorieuses, à laquelle succède, de 1973 à 1995, une dépression. Ces fluctuations économiques ont provoqué de grands changements dans la vie sociale et ont eu des répercussions incontestables dans la vie des Français. Malgré de fortes inégalités, les niveaux de vie ont augmenté en France comme dans tous les pays développés. Cependant, les nouvelles habitudes de consommation et les innovations techniques posent de nouveaux problèmes de protection de l'environnement et la mondialisation suscite le désarroi de pans entiers de l'économie.

Expansion économique et prospérité De 1945 à 1975, la France, tout comme l'ensemble des pays occidentaux, connaît une formidable période de croissance économique que l'économiste Jean Fourastié a pu qualifier de Trente Glorieuses (1979). La croissance annuelle est alors de l'ordre de 5 % par an, ce qui entraîne le pays dans un essor économique et social tel qu'il n'en a jamais connu encore dans son histoire. La France se relève ainsi très rapidement des ruines de la guerre dans une frénésie de travail. Entre 1945 et 2004, la population active passe de 19 à plus de 26 millions de personnes. Cette augmentation s'explique tout à la fois par l'arrivée sur le marché de l'emploi d'une main-d'œuvre abondante, par les progrès du travail féminin et par le recours à l'immigration. L'appel à la main d'œuvre immigrée, qui ne prend fin qu'en 1974, est alors indispensable en raison de l'insuffisance de la population active.

Les campagnes françaises vivent une véritable révolution dans les années 1950, avec la mécanisation généralisée qui substitue le tracteur aux bœufs et aux chevaux de labours. Cela permet une formidable augmentation des rendements mais entraîne la quasi-disparition des ouvriers agricoles et des petits exploitants. L'agriculteur succède au paysan. L'agriculture n'est plus un état, mais une profession. Elle occupe 36 % des actifs en 1946, moins de 5 % aujourd'hui. Dans un premier temps, l'industrie se développe en se modernisant et en se concentrant. Cette modernisation des Trente Glorieuses fait pourtant des victimes, comme les petits commerçants qui doivent affronter la concurrence de la grande distribution. Le pouvoir d'achat des Français progresse considérablement, et l'Etat garantit un revenu décent aux bas salaires (Smig en 1950, Smic en 1970). Le premier choc pétrolier de 1973 met fin aux Trente Glorieuses. Depuis 1975, le taux de croissance est retombé à 2 %. Pourtant, ce qui a été longtemps perçu comme une période de crise est bien une période de prospérité où le niveau de vie de la majorité de la population continue de progresser. A la différence des Trente Glorieuses cependant, cette progression n'est plus générale. La société sécrète des exclus qui les mécanismes sociaux (allocations chômage ou RMI, crée en 1998) ne parviennent pas à endiguer. Avec la crise, la société française découvre à nouveau le chômage qu'elle avait oublié depuis les années 1930. Le plein emploi n'est aujourd'hui qu'un lointain souvenir, le taux de chômage s'établissant durablement autour de 10 % de la population active. En 2004, l'ensemble des exclus, des chômeurs et des travailleurs occupant un emploi précaire s'établit autour de 5 millions de personnes. L'emploi salarié stable, caractéristique des Trente Glorieuses, se raréfie. Plus qu'une crise, la période qui commence en 1973 traduit l'adaptation de l'économie française à la mondialisation, ce qui impose donc de douloureuses restructurations industrielles dans le textile, les mines et la sidérurgie. Des régions entières comme le Nord-Pas-de-Calais et la Lorraine sont sinistrées. Dans un contexte mondial dominé par le libéralisme, de nombreuses entreprises investissent à l'étranger et délocalisent leur production. L'importance des ouvriers décroît dans la société française, et il n'y a aujourd'hui plus de mineurs en France. Le secteur tertiaire connaît en revanche un essor plus marqué et regroupe la moitié des actifs depuis 1972. Il y a aujourd'hui plus d'employés que d'ouvriers.

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Une profonde transformation des genres de vie

La population française croit fortement au lendemain de la guerre. En fait, l'inflexion est perceptible dès 1942, qui voit l'indice de fécondité remonter nettement. C'est le début du baby-boom. La baisse de la natalité ne se manifeste que tardivement, au milieu des années 1970. La population passe de 40,5 millions en 1976 à 52,6 millions en 1975 et près de 62 millions en 2004.

La principale transformation de la société française depuis les années 1950 est incontestablement le net recul du monde rural qui conduit le sociologie Henri Mendras à publier en 1967 un ouvrage au titre évocateur : la fin des paysans. La population des campagnes, qui constituait encore 47 % de la population locale en 1976, n'en représente plus que 34 % en 1968.

Au lendemain de la guerre, il faut construire, et construire vite pour répondre aux besoins des générations du baby-boom qui demandent des logements plus spacieux et plus confortables. Le manque de logements est énorme, et les sans-logis nombreux, comme en témoigne l'action de l'abbé Pierre durant le terrible hiver 1954. Au début des années 1960, une partie de la population la plus pauvre, souvent immigrée, vit encore dans des bidonvilles. De grands ensembles sont construits à la périphérie des villes qui voit apparaître barres et tours du milieu des années 1950 à celui des années 1970. Cette politique d'urbanisation répondait à la nécessité de construire rapidement et à un moindre coût les millions de logements dont le pays manquait. Ces grands ensembles sont perçus à l'époque comme une formidable avancée de l'hygiène et du confort. Le mal des banlieues, aujourd'hui flagrant, est perceptible dès les années 1960.

La période est encore marquée par l'extension rapide et durable des classes moyennes qui regroupent les salariés du tertiaire et une nouvelle classe ouvrière. L'extension du salariat et l'enrichissement de la société française se traduisent par une uniformisation relative des niveaux de vie. Les Français découvrent avec avidité la société de consommation, se qui se lit essentiellement pendant les Trente Glorieuses dans le domaine de l'équipement des familles (réfrigérateur, voiture, télévision, machine à laver)

La durée de vie des Français s'allonge nettement, du fait des progrès de la médecine, de l'hygiène et d'une meilleure alimentation. L'esperance de vie à la naissance passe de 62 ans pour les hommes et 67 ans pour les femmes en 1946 à 76 et 83 en l'an 2000. Le taux de mortalité infantile qui est de 60 ‰ en 1950 n'est plus que de 4,5 aujourd'hui. La Sécurité sociale, créée en 1945, contribue à cette avancée et améliore les conditions de vie de l'ensemble de la population.

De nouvelles pratiques culturelles L'amélioration du niveau de vie et le rajeunissement de la population se traduisent aussi par de nouvelles pratiques culturelles. On se dirige vers une civilisation des loisirs. Au début des années 1950, les pratiques sont encore très proches de celles d'avant-guerre. Le journal, la radio et le cinéma font partie de la vie des Français. L'imprimé reste un support essentiel, même si la presse quotidienne connaît un recul inexorable. L'accès au livre se démocratise, avec l'apparition du livre de poche en 1953. L'arrivé de la télévision s'affirme nettement au cours des années 1960. La deuxième chaîne fait son apparition en 1964, la troisième en 1971. Le monopole d'Etat disparaît en 1981. Dans les années 1960, un Français sur 3 a moins de 20 ans, contre 1 sur 4 aujourd'hui. Une "culture jeune" apparaît alors. Le disque 45 tours et le poste à transistors sont les outils indispensables de la jeunesse dans le vent. L'émission Salut les copains, diffusé sur Europe en 1959, réunit les jeunes. Le 22 juin 1963, la Nuit des Copains réunit 150 000 adolescents place de la Nation. C'est le temps des "idoles de jeunes". Depuis la fin de la guerre, la pratique religieuse enregistre une forte baisse. La crise des vocations, sensible dès les années 1960, pose de nombreux problèmes à l'Eglise catholique. La sexualité et la vie de couple échappent à son emprise : près d'un enfant sur deux naît désormais hors mariage. Les familles se font, se défont et se recomposent dans un mouvement qui s'accélère depuis le milieu des années 1980. Les mariages sont ainsi moins nombreux et surtout moins stables que par le passé : on compte un divorce pour 3 mariages. Si 62 % des Français se disent encore catholiques, cette affirmation exprime essentiellement une fidélité à un ensemble de traditions et de souvenirs où le religieux n'est plus essentiel : moins d'un Français sur dix atteste d'une pratique régulière. L'Islam est maintenant la seconde religion de France.

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Une progressive amélioration de la condition féminine

La seconde partie du XXème siècle voit une nette amélioration du statut de la femme dans la société française. Depuis 1965, la femme mariée peut gérer ses propres biens, tout comme elle peut exercer une activité professionnelle sans l'autorisation de son mari. C'est ainsi par le biais de l'activité professionnelle que la femme conquiert peu à peu son autonomie.

La loi Neuwirth légalisant l'usage de la pilule contraceptive est adoptée en 1967, mais les décrets d'application ne paraissent que 5 ans après. L'année 1975 voit la création d'un secrétariat d'Etat à la Condition féminine confiée à Françoise Giroud. Cette même année, un projet de loi émanant de la ministre de la santé Simone Veil, soutenu par le président Valéry Giscard d'Estaing, légalise l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Il s'agit alors d'adapter la législation aux mœurs. L'année 1975 voit encore l'adoption d'une loi sanctionnant les discriminations fondées sur le sexe, en particulier en matière d'embauche, l'instauration du divorce par consentement mutuel. En 1970, remplacement de "l'autorité paternelle" par "l'autorité parentale" qui supprime la notion de chef de famille.