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La Société Santé en français a fêté ses dix années d’existence. En examinant son bilan, elle peut être satisfaite. À l’observateur extérieur que je suis depuis le début de sa création, trois traits fondamentaux se sont révélés lors du dernier Rendez-vous 2012. D’abord, la motivation de ses membres dont la ferveur initiale s’est maintenue, voire amplifiée : elle agit comme une formidable énergie pour surmonter les défis et garder le cap sur les engagements. Ensuite, l’épanouissement des programmes au sein des dix-sept réseaux qui se sont consolidés, diversifiés et dont la gouvernance s’est améliorée, laissant présager une pérennité des actions entreprises. Enfin, une reconnaissance éblouissante par les autorités politiques, sanitaires et académiques de la qualité des accomplissements comme en témoignent la présence de ministres provinciaux au Rendez-vous 2012 et l’audience auprès du Premier ministre. Choix stratégique La vitalité de la Société Santé en français repose sur le choix stratégique d’associer les principaux partenaires dans la réussite de ses projets de santé : décideurs politiques, gestionnaires de santé, professionnels de la santé, institutions académiques ou écoles de formation, et représentants des communautés. Ceci l’a conduit à créer des alliances propices à aborder les problèmes de santé dans leur globalité par des solutions respectueuses des valeurs de qualité, d’équité et d’efficience, de sorte que chacun des partenaires peut s’approprier une part de la réussite. Aujourd’hui, la Société Santé en français peut en confiance se projeter vers l’avenir comme le document « Destination santé 2018 » l’y invite. De mon point de vue, le grand objectif de « rattrapage », qui fut à l’origine de la création de la Société afin que les francophones en situation minoritaire jouissent des mêmes avantages que les autres citoyens canadiens, est en bonne voie d’être atteint. Au-delà de ce premier objectif, elle peut prétendre partager la dynamique qu’elle a créée à l’ensemble de la population canadienne au-delà des spécificités linguistiques et culturelles. D’ailleurs, il m’est arrivé de constater qu’au Nord de l’Ontario, des projets de santé anglophones s’appuyaient sur le même schéma du pentagramme illustrant le partenariat entre acteurs de santé. Ainsi donc, la Société pourrait- elle entrevoir dorénavant deux perspectives intimement liées : celle d’améliorer durablement ses services pour les francophones minoritaires et celle de partager son modèle au bénéfice des systèmes de santé canadiens. Une vision d’avenir Charles Boelen Consultant international en systèmes et personnels de santé. Ancien coordonnateur du programme de l’OMS des ressources humaines pour la santé Commentaires inspirés de l’allocution de clôture du Rendez-vous 2012 Page 1 Aujourd’hui, la Société Santé en français peut en confiance se projeter vers l’avenir.

CHARLES BOELEN : Une vision d’avenir

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La Société Santé en français a fêté ses dix années d’existence. En examinant son bilan, elle peut être satisfaite.

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Page 1: CHARLES BOELEN : Une vision d’avenir

La Société Santé en français a fêté ses dix années d’existence. En examinant son bilan, elle peut être satisfaite. À l’observateur extérieur que je suis depuis le début de sa création, trois traits fondamentaux se sont révélés lors du dernier Rendez-vous 2012. D’abord, la motivation de ses membres dont la ferveur initiale s’est maintenue, voire amplifiée : elle agit comme une formidable énergie pour surmonter les défis et garder le cap sur les engagements. Ensuite, l’épanouissement des programmes au sein des dix-sept réseaux qui se sont consolidés, diversifiés et dont la gouvernance s’est améliorée, laissant présager une pérennité des actions entreprises. Enfin, une reconnaissance éblouissante par les autorités politiques, sanitaires et académiques de la qualité des accomplissements comme en témoignent la présence de ministres provinciaux au Rendez-vous 2012 et l’audience auprès du Premier ministre.

Choix stratégiqueLa vitalité de la Société Santé en français repose sur le choix stratégique d’associer les principaux partenaires dans la réussite de ses projets de santé : décideurs politiques, gestionnaires de santé, professionnels de la santé, institutions académiques ou écoles de formation, et représentants des communautés. Ceci l’a conduit

à créer des alliances propices à aborder les problèmes de santé dans leur globalité par des solutions respectueuses des valeurs de qualité, d’équité et d’efficience, de sorte que chacun des partenaires peut s’approprier une part de la réussite. Aujourd’hui, la Société Santé en français peut en confiance se projeter vers l’avenir comme le document « Destination santé 2018 » l’y invite. De mon point de vue, le grand objectif de « rattrapage », qui fut à l’origine de la création de la Société afin que les francophones en situation minoritaire jouissent des mêmes avantages que les autres citoyens canadiens, est en bonne voie d’être atteint. Au-delà de ce premier objectif, elle peut prétendre partager la dynamique qu’elle a créée à l’ensemble de la population canadienne au-delà des spécificités linguistiques et culturelles. D’ailleurs, il m’est arrivé de constater qu’au Nord de l’Ontario, des projets de santé anglophones s’appuyaient sur le même schéma du pentagramme illustrant le partenariat entre acteurs de santé.

Ainsi donc, la Société pourrait-elle entrevoir dorénavant deux perspectives intimement liées : celle d’améliorer durablement ses services pour les francophones minoritaires et celle de partager son modèle au bénéfice des systèmes de santé canadiens.

Une vision d’avenirCharles Boelen

Consultant international en systèmes et personnels de santé. Ancien coordonnateur du programme de l’OMS des ressources humaines pour la santé

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Aujourd’hui, la Société

Santé en français peut en

confiance se projeter vers

l’avenir.

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Engagement et nouveaux défisJ’ai le sentiment que l’ambition de maintenir le niveau d’engagement de ses membres à plus long terme et d’améliorer la performance de ses programmes exige de la Société qu’elle accompagne le volontarisme et la générosité qui caractérisèrent cette première décennie par une approche méthodologique plus rigoureuse aboutissant à définir des codes de bonnes pratiques. Dans cette perspective, je me permets de soumettre à votre réflexion quelques propositions pour la décennie suivante. Je le fais en demandant par avance votre indulgence envers un ami qui n’est pas impliqué dans l’action immédiate de la Société et ne la connaît qu’à distance. Ces cinq propositions sont relatives aux domaines de la recherche, de l’établissement de normes, de l’évaluation, de la publication et de l’échange international.

1 - La recherche L’échange d’expériences à l’intérieur de la Société amène à identifier des questions importantes qui mériteraient une exploration méthodique, et donneraient donc naissance à autant de projets de recherche. Par exemple : comment identifier des priorités de santé propres à une population dans un contexte local donné ? Comment créer des partenariats productifs et durables entre différents acteurs du système sanitaire et social ? Quelles interventions ont un meilleur impact et à moindre coût ? Quel système d’information

promouvoir pour une prise en charge globale d’une personne ou d’une communauté ? Quand, à qui et comment déléguer ?

Ces questions sont parmi les quelques-unes qui appelleraient à conduire une étude en s’appuyant sur des données de nature quantitative ou qualitative. La Société pourrait encourager ses membres à acquérir une expertise dans ce domaine, contribuant ainsi à promouvoir plus d’objectivité et de performance dans ses réalisations.

2 - L’établissement de normesLa riche expérience acquise par la Société pourrait être exploitée pour faire émerger des normes qui seraient formellement proposées pour faciliter un cheminement des programmes vers les valeurs dans lesquelles nous nous reconnaissons : qualité par des services centrés sur la personne, équité pour garantir une justice sociale, efficience pour faire le meilleur usage de nos ressources, et pertinence pour accorder notre attention prioritaire aux plus défavorisés. Les normes serviraient de références depuis la conception d’un projet jusqu’à sa mise en œuvre et son évaluation. Ce qui est trop souvent compris de façon implicite sera ainsi rendu explicite et deviendra plus facilement compréhensible au grand nombre. Je voudrais prendre l’exemple d’une présentation, à laquelle j’ai assisté lors du dernier Rendez-vous, sur l’organisation de services de santé intégrés, et au cours de laquelle les

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Je me permets de

soummettre quelques

propositions pour la

décennie suivante.

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critères d’un service « intégré » ont été proposés. C’est un travail fort utile, car il guidera manifestement l’action vers un niveau accru d’excellence. D’autres concepts aux contours encore imprécis méritent également d’être balisés par des normes, celui de « l’imputabilité sociale » en est un. C’est précisément un sujet évoqué au cours du dernier Rendez-vous que se propose d’aborder l’Association des facultés de médecine du Canada. Ainsi, sur une variété de thèmes, à partir de l’expérience de la Société ou d’ailleurs, des guides de bonnes pratiques fondés sur des normes pourraient ainsi être établis, offerts aux gestionnaires de programmes, expérimentés et mis à jour à la faveur de projets de recherche.

3 - L’évaluationL’excellence de nos programmes sera reconnue si au bout du compte nous pouvons démontrer leur impact sur la santé. Certes, le nombre et la variété des services rendus sont déjà de bons indicateurs pour évaluer la qualité des programmes, mais l’ambition ne serait-elle pas d’aller au-delà de ce stade en posant la question de l’impact ? Par exemple, pouvons-nous démontrer que nous avons eu un impact en matière de réduction de risques pour la santé, de diminution de la morbidité et mortalité, d’amélioration de bien-être, à l’échelle de la population ? Bien qu’il ne soit pas aisé sur un plan méthodologique d’apporter les preuves que notre intervention est responsable de tels succès, nous

pourrions néanmoins documenter que l’approche du partenariat aide à adresser les principaux déterminants de la santé.

Ceci dit, ne serait-il pas important d’aborder la question critique d’évaluer la capacité de chacun des principaux partenaires de santé à se remettre en question, c’est-à-dire, à réexaminer ses missions en fonction des besoins prioritaires de santé des personnes et de la société et à réajuster ses programmes à l’aune de l’impact produit sur la santé de la population ?

4 - La publicationLa Société Santé en français mérite d’être mieux connue au niveau national. Nous avons remarqué que peu de nos amis du Québec et non-francophones des autres provinces et territoires sont informés de l’existence et des activités de la Société. Peut-être devrions-nous examiner comment remédier à cette situation, non pour signaler simplement notre présence, mais pour nous insérer dans une dynamique d’émulation. La publication de réalisations exemplaires de la Société dans des revues spécialisées dans le domaine de la santé peut contribuer à cet objectif. Par ailleurs, la préparation à la publication scientifique incite à une rigueur méthodologique qui se répercutera sur la qualité des prestations. Enfin, une plus grande visibilité et une meilleure reconnaissance des réalisations ne sont pas négligeables quand il s’agira d’obtenir une écoute favorable à nos requêtes.

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L’excellence de nos

programmes sera

reconnue si nous

pouvons démontrer leur

impact sur la santé.

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5 - L’échange international La participation au dernier Rendez-vous de collègues étrangers doit être saluée. La problématique de l’amélioration de l’accès et de la qualité des services en faveur des populations en situation minoritaire est en effet largement répandue au niveau international. C’est une préoccupation constante de l’OMS et de nombreuses organisations. Elle l’est bien entendu également au sein de la francophonie internationale, qui compte près d’une cinquantaine de pays, sur cinq continents. La Société serait bienvenue à partager ses expériences et ses projets à l’étranger, et donc à venir les communiquer périodiquement à l’occasion de Congrès nationaux ou

internationaux. Cette participation ajouterait à la crédibilité de la Société au niveau national et permettrait un échange fructueux et stimulant d’expériences.

Ces quelques réflexions livrées sommairement et intuitivement sont sûrement déjà à l’esprit des responsables de la Société Santé en français. Je voudrais leur dire, ainsi qu’à tous ses membres, que ces ambitions sont légitimes, et qu’ils peuvent être confiants dans l’avenir. En même temps, en récoltant les fruits de leur engagement et de leur ingéniosité, j’espère qu’ils assumeront la charge de les partager avec d’autres, au Canada et dans le monde.

Commentaires inspirés de l’allocution de clôture du Rendez-vous 2012Page 4

La Société Santé

en français serait

bienvenue à l'occasion

de Congrès nationaux ou

internationaux.