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Abb Emmanuel BARBIER : Les Infiltrations Maonniques dans l'glise. DEUXIME PARTIE NIHIL OBSTAT Insulis, die 27 septembris 1910. H. QUILLIET, Libr. Censor.
IMPRIMATUR Cameraci, die 28 septembris 1910. A . MASSART , Vic. Gen.
Domus Pontificie Antistes.
APPROBATIONS PISCOPALES ARCHEVECHE DE MONTPELLIER Le 18 septembre 1910.
MONSIEUR L'ABB,
Je vous remercie d'avoir gard si fidlement la mmoire d'une rencontre dj
ancienne, et dans laquelle ftais l'oblig, tandis que je trouvais auprs de vous
l'accueil le plus gracieux et le plus sympathique. Vous me demandez
d'appuyer de mon nom la rimpression que l'on va faire de vos articles sur
Les Infiltrations maonniques dans l'Eglise . Je n'ajouterai rien la valeur
de ce travail si tendu, si important et qui, pour un si grand nombre de
catholiques et de membres mme du clerg, aura tous les caractres d'une
rvlation, la rvlation de ce mystre d'iniquit , oppos au mystre de
divine condescendance , dont parlait l'Aptre saint Paul !
J'ai quelquefois pens que, sur le Calvaire, en assistant l'agonie de Notre-
Seigneur, le Prince de ce monde avait frmi de colre, lorsqu'il avait entendu
le consummatum est du Rdempteur, triomphant par sa mort elle-mme. Ds
lors, mesurant tout ce qu'il avait perdu, tout ce qu'il allait perdre dans la suite
des ges, le dmon s'tait promis de ne pas subir humblement sa dfaite, de
n'y pas acquiescer et de mettre tout en uvre, au cours des sicles, pour
paralyser, sinon pour dtruire l'Eglise et son action dans le monde.
Vos vastes tudes dvoilent le travail rebours fait avec une si extraordinaire
persvrance par tous les ennemis de la religion pour s'opposer d'abord, puis
pour l'entraver et le retarder, au mouvement de conversion qui entranait le
monde vers Jsus-Christ. Les perscutions sanglantes ont tromp l'espoir des
bourreaux : Mes ont baign et fait pousser et fleurir les racines du grand arbre
de la Croix. La foi a merg des catacombes comme, aprs une aurore
assombrie par les nuages, le soleil embrase tout l'horizon. Mais alors, vous le-
dites, d'autres antres se sont ouverts, non plus ct des saintes galeries o
dormaient les reliques des martyrs, mais seront plus tonns encore que,
parmi les adeptes ou fauteurs de ce culte, vous comptiez des hommes qui se
disent enfants soumis de l'Eglise. Mais il est, hlas, plus d'une manire de
servir le le mauvais, et certains sont ses esclaves qui ne croient pas en lui.
Je vous flicite, cher Monsieur l'Abb, d'avoir signal, avec preuves l'appui,
les progrs tnbreux d!une secte qui reste toujours fidle aux procds de
celui qui fut homicide et menteur ds le commencement.
Veuillez agrer, cher Monsieur l'Abb, mes sentiments bien dvous en N.-S.
V I C T O R - O N S I M E, Ev. de Cahors.
ARCHEVCH DE Chambry, le 2 octobre 1910.
BIEN CHER MONSIEUR,
Excusez-moi d'avoir attendu si longtemps pour vous donner une rponse au
sujet des pages si solides et si vraies que vous avez crites sur les Infiltrations
maonniques dans l'Eglise. Tout d'abord, que je vous dise un merci
affectueux. Dfenseur intrpide de l'orthodoxie catholique, vous tes sur tous
les points o elle est attaque ou menace de l'tre. Avec une franchise et
une sincrit que jadmire, vous dfendez la vrit, telle qu'elle veut l'tre, sans
crainte et sans hsitation.
Assurment, les Infiltrations maonniques, telles que vous les dnoncez sous
le nom d'occultisme ou d'sotrisme, sont peu connues dans nos campagnes
et ne peuvent gure par elles-mmes, tant elles sont obscures, y causer le
moindre ravage, mais dans le monde qu'on appelle aujourd'hui intellectuel ou
semi intellectuel, elles sont rellement dangereuses. L'ignorance de beaucoup
en matires religieuses et la ressemblance plus ou moins affecte que l'on
veut tablir entre ces connaissances occultes et les bases de la religion
chrtienne, expose de rels prils des mes jeunes et inexprimentes. Il
sera donc extrmement utile que dans ces temps de troubles et d'hsitations
pour plusieurs, vos pages, si elles sont mises en brochure, se rpandent
abondamment dans un certain monde o, si l'on est encore catholique on ne
craint pas] de s'attachera certaines nouveauts doctrinales qui seraient pour
beaucoup la ruine de la foi et du surnaturel.
Ici, comme dans toute question doctrinale, c'est l'Eglise qu'il faut voir, l'Eglise
qu'il faut entendre. En matire de philosophie, de dogme et de morale, c'est
elle qui a la vrit intgrale, pure de toute erreur et de tout alliage fcheux.
Veuillez agrer, bien cher Monsieur l'Abb, l'assurance de mes sentiments
affectueux et dvous.
F R A N O I S - V I R G I L E, Arch. de Chambry.
VCH DE Bar-le-Duc, en tourne de confirmation, VERDUN le 10
octobre 1910.
BIEN CHER MONSIEUR L'ABBE,
Depuis longtemps, j'applaudis l' nergie avec laquelle vous dnoncez les
prils qui menacent la doctrine catholique, particulirement en France. Vous
tes une de ces sentinelles qui on peut demander avec confiance d'une
rponse, et d'une rponse claire : Custos, quid de nocte ? Votre nouveau
livre est un nouveau service rendu la vrit religieuse et aux catholiques.
Vous signalez un danger que beaucoup ignoaient jusqu'ici. L'cueil
apparaissait bien parfois la surface, mais il tait plus cach que visible et
n'en tait que plus redoutable. Il est bien vrai que l'sotrisme nous envahit et
qu'il est propag chez nous par la Franc-Maonnerie.
Pour ma part, je vous flicite de votre clairvoyance et vous redis mes
affectueux sentiments en N. S.
J E A N , Evque de Verdun.
VCH DE PRIGUEUX ET DE SARLAT Prigueux, le 12 octobre 1910.
CHER MONSIEUR L'ABB,
Vos articles sur les Les Infiltrations maonniques m'ont tristement
intress. Eclaireur d'avant-garde, comme vous l'avez t pour le Modernisme
et le Sillon, vous signalez, nos portes, une secte nouvelle qui tendrait
devenir l'universelle religion, comme la Maonnerie aspire donner au monde
la rpublique universelle. Et comme rien, prsent, dans le champ de l'ide,
n'a l'espoir d'aboutir sans le prestige de la science, la science est, ici,
proclame l'idal. Que sera la gnose en effet, sinon l'apothose de la
science ? Ce point de vue n'est pas sans suggrer l'esprit un
rapprochement entre la secte nouvelle de la gnose et le modernisme, de telle
sorte que l'une semble devoir tre le terme fatal de l'autre. Ici et l, la
raison mancipe reste matresse d'elle-mme, et proclame dfinitive sa
victoire sur la foi.
Mais, en prenant cong du dogme, l'agnostique a-t-il donc teint l'instinct
religieux en lui ? Et les faits n'ont-ils pas dmontr qu'aprs deux sicles de
matrialisme, il y a aujourd'hui, une faim du surnaturel qui veut tre tout prix
satisfaite ? Comment, sous cette influence spiritualiste, en dehors de toute
religion positive le modernisme, dt-il y trouver le chtiment de l'orgueil,
ne subirait-il pas la magie de cette colossale synthse doctrinale,
clectiquement faite des erreurs du pass et des plus attrayantes conceptions
scientifiques du jour ? Cest cette synthse de l'erreur et du progrs qu' l'aide
d'une documentation abondante et prcise, vous avez voulu rvler au lecteur.
Celui-ci vous saura gr d'avoir soutenu son attention plus haut que le
rpugnant naturalisme de l'cole sotrique. Il vous sait gr surtout d'avoir mis
en lumire le danger d'une mthode spiritualiste anti-chrtienne, qui accapare
les deux plus puissants mobiles de Fesprit humain l'heure actuelle : l'instinct
religieux sduit par des expriences tangibles de l'au del, et les aspirations
scientifiques, ravies par la systmatisation doctrinale de tous les progrs. Bon
courage dans la lutte. Nunc antchristi multi facti sunt.
Croyez, cher Monsieur l'Abb, mon affectueux respect en N.-S
H E N R Y - J O S E P H , v. de Prigueux et Sarlat.
SOMMAIRE DEUXIEME PARTIE UNE RENAISSANCE SPIRITUALISTE
I. LES DOCTRINES DU NOUVEAU SPIRITUALISME.
I. L'OCCULTISME
Historique. La constitution de l'homme. Le corps astral. Le plan
astral. Les lmentals. Auras ou images astrales. La mort et ses
mystres. Les applications de l'occultisme. Occultisme chrtien.
Un pontife de l'occultisme chrtien.
II LA GNOSE
Notion historique. La restauration de la Gnose. Le rle de la Gnose
contemporaine. La profession de foi gnostique. Les mystres
illuminateurs : le monde divin. Le monde spirituel. Le monde hylique ou
matriel. Le Christ Sauveur. L'Ascension au Plrme. Les
mystres purificateurs. - La Gnose et le catholicisme. La Gnose et
l'occultisme. Le Gnosticisme et la Franc-maonnerie.
III. LA KABBALE
IV. LA THOSOPHIE
V. LE MARTINISME
VI. L'ORDRE KABBALISTIQUE DE LA ROSE-CROIX
VII LUCIFER ET LES SECTES OCCULTES
II. LA RORGANISATION DE LA FRANC-MAONNERIE.
CATHOLICISME ET SOTRISME Comment se pose la question des
infiltrations.
LA ROSE-CROIX CATHOLIQUE M. Josphin Peladan. Le comte de
Larmandie. Le Docteur Alta.
LES ENTRETIENS IDALISTES
M. PAUL VULLIAUD
UN COLLABORATEUR : M. JOSEPH SERRE
VENDU PAR SES FRRES
UN POINT DE JONCTION : L'IDALISME DMOCRATIQUE
LES SOCITS SECRTES CATHOLIQUES.
CONCLUSION
UNE RENAISSANCE SPIRITUALISTE.
Nous assistons en France une prtendue renaissance du spiritualisme sous
laquelle se cachent un effort pour rorganiser l'occulte conjuration contre
l'Eglise de Jsus-Christ et un nouveau pige tendu aux catholiques. On ne se
dissimule plus que le rle politique de la Franc-Maonnerieest sur le point de
finir, et l'on commence se rendre compte qu'il lui a fait subir une dviation.
La ncessit d'un recrutement nombreux pour soutenir son action politique et
l'acharnement triompher dans ce rle l'ont amene peu peu laisser au
second plan ses doctrines secrtes, ouvrir son sein des membres qui n'en
ont cure, oublier mme les significations profondes de son symbolisme, et,
scandale plus grand encore, on voit ses adeptes eux-mmes ne plus prendre
au srieux les rites qui sont l'enveloppe de ces redoutables mystres.
Il s'agit de ranimer son esprit, de la ramener sa fin vritable qui est
d'opposer aux doctrines du catholicisme celles caches sous ces symboles et
ces rites, de dtruire celles-l par celles-ci et d'lever la synagogue de Satan
sur les ruines de l'Eglise du Christ. Et la suprme habilet sera de procder
cette restauration en adaptant l'une l'autre avec un tel art que les enfants de
Dieu, s'ils coutent les suggestions de l'orgueil, aient un prtexte de s'y
mprendre. Il n'a pas chapp nos ennemis que l'agnosticisme, l'immanence
vitale, la ngation plus ou moins dissimule de l'ordre surnaturel et de la
divinit mme de Jsus-Christ, celle des principes constitutifs de l'Eglise, qui
sont le fond du modernisme dont se sont imbus en ces dernires annes
beaucoup de catholiques sculiers et mme de jeunes prtres, leur ouvraient
des facilits inespres pour faire accepter insensiblement cette substitution
sacrilge.
Notre intention est d'exposer ce plan et d'en faire ressortir les premires
consquences. On n'a rien nglig pour attirer l'attention du monde intellectuel
non chrtien; et des catholiques galement, sur ce rveil spiritualiste. Un
premier congrs spiritualiste a t tenu en 1908, dont le compte-rendu publi
par la librairie hermtique, forme un solide volume qui nous fournira d'utiles et
curieux renseignements. II couronnait la formation d'une Alliance spiritualiste
dont l'appel s'adressait indiffremment aux penseurs et aux croyants de toute
cole. Le mouvement a aujourd'hui son organe, la revue de l' Alliance
spiritualiste. Quelques-uns des plus grands journaux lui ont donn leur
concours et ont feint de lui attribuer une grande importance. Rcemment, le
Matin ouvrait une enqute bruyante sur l'angoisse religieuse qui travaille
notre socit et le besoin d'idal qui tourmente tous les esprits. Plusieurs voix
dans la presse se sont unies lui pour signaler l'vnement.
Singulire volution du spiritualisme, ou plutt des doctrines pares de ce
nom. Un matre de la philosophie catholique crit ce sujet Vers le milieu du
sicle dernier et longtemps aprs, le nom de spiritualiste tait noblement
port. Les philosophes qui on accordait cette qualification n'taient pas tous
catholiques; mais ils se distinguaient gnralement par l'lvation de la
pense, par leur franche hostilit contre le matrialisme et les autres doctrines
qui ravalent la nature humaine. Victor Cousin tait revenu alors de ses
incursions dans la philosophie allemande; il avait repris contact avec le bon
sens des Ecossais et surtout avec le bon sens chrtien. Sans embrasser
encore la doctrine catholique, qui ajoute aux certitudes du spiritualisme l'ordre
surnaturel de la foi, il s'attachait ne plus contredire celle-ci et dveloppait
avec une loquence et une sincrit indniables, quoique un peu
emphatiques, les thses prliminaires du christianisme.
Sans doute, c'tait encore le rationalisme, avec la prtention plus ou moins
dissimule de ramener les dogmes surnaturels aux proportions de simples
vrits philosophiques. A ce dfaut s'en joignaient d'autres : cette philosophie
manquait de bases solides et de consistance; elle tait incapable de rsister
longtemps aux pousses du positivisme et du criticisme qui combinaient leurs
efforts contre elle. Mais enfin, c'tait encore une philosophie elle offrait un
ensemble de grandes vrits, qui appelaient pour ainsi dire toutes les autres;
si elles n'taient point suffisantes, elles permettaient du moins aux vrits
indispensables de venir se greffer sur elles et d'lever ainsi la raison humaine
jusqu' la foi. L'existence de Dieu tait proclame; on saluait avec un respect
religieux ses perfections infinies; on tenait pour sacrs le devoir, la
conscience, le sacrifice; on croyait aux merveilleuses destines de l'me aprs
cette vie et l'on aimait s'inspirer, dfaut des livres saints, des meilleures
pages de Platon et de Cicron.
L'un des hrauts, j'allais dire l'un des vanglistes, de cette religion naturelle
, fut Jules Simon, qui, pourtant ne fut jamais dupe de son matre, Victor
Cousin, dont il a dessin un joli portrait, ni mchant, ni flatt. En ralit, et
malgr ses fines critiques, il a t peut-tre son meilleur disciple et son plus
fidle continuateur. Nul n'a mieux reprsent ce noble spiritualisme franais,
issu de Descartes et de Malebranche, fait de convictions gnreuses, d'un
libralisme sincre, d'une franche admiration pour la doctrine chrtienne. Jules
Simon allait ainsi jusqu'aux portes de l'Eglise catholique; mais il n'y entra que
bien tard, aprs avoir assist la ruine de la plupart de ses esprances. La
sincrit de son libralisme lui avait alin les sectaires de son parti, qui le
laissrent presque seul; et puis il avait vu grandir d'autres philosophes, qui
jouissaient leur tour des faveurs officielles, sinon de la faveur du public. Ces
nouveaux venus professaient peu d'estime pour l'cole clectique, dont il tait
l'un des derniers survivants. Avec lui ou peu prs finit donc cette cole, qui
s'tait fait un drapeau du spiritualisme. Quant au spiritualisme lui-mme, il
avait d'autres destines. Pendant quelque temps, les promoteurs de la
neutralit de renseignement, la suite de Jules Ferry, parurent vouloir donner
pour base la morale scolaire l'ancien spiritualisme de l'cole clectique. On
se souvient que M. Combes lui-mme, un peu plus tard, faisait encore devant
la Chambre profession de spiritualisme. Avant lui, les autres taient-ils
sincres? Quelques-uns peut-tre, mais non pas tous. Quelle que ft d'ailleurs
leur intention, il n'tait pas possible de s'en tenir longtemlps ce spiritualisme
indcis, battu en brche de toutes parts par les nouveaux systmes. Il devait
voluer franchement vers la philosophie chrtienne retrempe dans ses
sources traditionnelles, ou bien s'ouvrir toutes sortes de thories nouvelles
et envahissantes.
Car il ne suffit pas de se dclarer hostile au matrialisme. Qu'est ce, au fond,
que le matrialisme pour le philosophe qui rsout la matire en pense ou en
monades? Les positivistes, les monistes contemporains entendent bien, pour
la plupart, n'tre ni spiritualistes, au vieux sens du mot, ni matrialistes.
D'ailleurs, s'il suffit de rpudier un grossier matrialisme et de ne pas nier une
certaine survivance de l'me aprs cette vie, pour adhrer au nouveau
spiritualisme, on s'y rencontrera avec les idalistes de toutes les coles, sans
excepter les panthistes, avec les illumins de toutes les sectes, les fidles de
toutes les religions, les spirtes et autres esprits superstitieux, qui n'ont jamais
manqu aucune poque. "Or, il parat que nous en sommes-l". (M. l'abb
Blanc. La Pense contemporaine, 26 avril 1910).
Le but apparent et trs affich de cette renaissance spiritualiste est bien la
raction contre le matrialisme. Elle fait l'objet de tous les discours prononcs
en janvier 1910 l'inauguration publique des travaux de l' Alliance, dont le
compte-rendu remplit les premiers numros de son bulletin. Les chefs des
diffrentes coles ou sectes ont donn contre lui avec un merveilleux
ensemble. On comprendra un peu plus tard qu'ils ont d'excellentes raisons
pour cela, car le matrialisme ruine par la base leurs thories extravagantes
sur le monde des esprits. A cette doctrine grossire, les promoteurs de
l'Alliance se font gloire d'opposer le spiritualisme, l'idalisme, et, ce n'est pas
encore assez dire, l'idalisme chrtien. Ces noms reviennent sans cesse sur
leurs lvres. Le secrtaire gnrai du Congrs de 1908 saluait en ces termes
les reprsentants des divers groupes : Je puis vous certifier que nous
sommes vraiment mus de votre large participation cette grande
manifestation du plus pur idalisme chrtien (Le Dr Papus, dans un toast,
salue le
premier congrs de l'occultisme franchement spiritualiste et chrtien ).
Observons, sans nous y attarder, la rencontre de catholiques comme ceux du
Sillon avec les chefs et les membres de l'Alliance spiritualiste, dont nous
dvoilerons tout l'heure le vritable esprit, dans l'adoption d'une formule
identique, .celle de l'idalisme, d'un idalisme chrtien exprimant leurs
aspirations communes. L'on prtend bien d'ailleurs que cet idalisme, ce
spiritualisme sont du bon aloi. Parmi les orateurs dont je viens de parler, M.
Paul Duvis, reprsentant de la Revue spirite, disait : Voyons maintenant quels
sont les principes fondamentaux communs toutes les coles spiritualistes.
Ces principes sont : la croyance en un Dieu, crateur ternel et infini de tous
les univers et de tous les tres, principe suprme de toute justice, de toute
vrit, de tout amour et de toute perfection; et la croyance en l'existence,
indpendante de celle du corps physique, de l'me humaine, de l'esprit, et en
son immortalit...
L'Evangile du Christ est tout entier notre vangile et notre code. Nous ne
venons rien dtruire; nous venons, au contraire, essayer de tout consolider en
nous efforant d'expliquer et d'accomplir les vrits prches par les messies
et les prophtes, et mme de les dvelopper et de les affirmer avec l'aide de la
science, de cette science dont certains savants prtendent se faire un
monopole, un temple accessible seulement quelques privilgis. Et M.
Jounet, l'un des prophtes de l'occultisme, qui s'est donn en mme temps
pour le chef des catholiques modernistes : Aussi, pour former la Synthse
spiritualiste tolrante, s'ajoutent graduellement, la Fraternit et la Vertu,
Dieu leur origine, puis l'immortalit (consquence force, nous l'avons vu, de
l'impossibilit du nant), puis la rtribution et le salut final, consquences
rationnelles de l'immortalit et de Dieu.
Ces cinq grand Principes: Fraternit, Vertu, Dieu, Immortalit, Salut final, voil
ce que proclament l'unanimit les Ecoles spiritualistes (L'Alliance
spiritualiste, janvier 1910, pages 23, 25). Mais le but rel de l'entreprise est
tout autre. Il se prsente sous un double aspect. C'est, d'une part, la
rsurrection des hrsies des premiers sicles du christianisme, jointes aux
superstitions de l'Inde et aux anciens mystres paens, tente par diverses
sectes sous le nom de thsophes, de gnostiques ou d'occultistes, et, de
l'autre, une reconstitution de la Maonnerie gare par la politique, laquelle
cooprerait trs efficacement la fdration de ces sectes dont les chefs sont
en notable proportion des Francs-Maons des hauts grades. Le double effort
tend donc une mme fin. Nous aurons l'envisager sous l'une et l'autre de
ses faces. Que dit le programme de l'Alliance?
Aujourd'hui plus que jamais, dans le monde spiritualiste, s'lvent des appels
d'union, se raniment ou se crent des courants de sympathies. La menace
gnrale du matrialisme ambiant et leurs convictions gnrales communes
portent les Ecoles diffrentes s'allier sans se confondre... Pour l'apostolat du
spiritualisme dans le peuple et parmi les intellectuels, pour la prparation et la
russite des recherches psychiques exprimentales, pour l'dification
collective d'une doctrine minimale acceptable de tous, car propose par tous,
l'Alliance Spiritualiste pourra beaucoup si ses adhrents comprennent qu'elle
n'est pas une construction artificielle superpose eux, mais leur droit mme
et leur devoir mme. Thosophes, spirites, chrtiens sotriques,
Swedenborgiens, chrtiens gnreux de toutes les confessions et de toutes
les coles, Islam, Judasme, Indousme, Religions d'Extrme-Orient,
spiritualisme de tout nom et de toutes fois, l'Alliance n'est pas quelque chose
d'tranger et d'autoritaire qu'on vous apporte. Elle n'est que votre me
commune extriorise par la libert.
Dj, au congrs de 1908, le secrtaire gnral, dans son discours
d'ouverture, se flicitait en ces termes du mouvement accentu de la
renaissance spiritualiste. Voil plus de vingt ans que les Chefs de
l'Hermtisme contemporain ne cessent de rpandre la bonne parole, afin
d'illuminer les curs et d'clairer les cerveaux embrums par les tnbres de
l'ignorance ou du sectarisme. Quantit d'associations plus ou moins fermes
aux profanes et de groupes d'tudes psychiques ont t crs non seulement
en Europe, mais aussi en Afrique, en Amrique, en Asie et mme en Ocanie.
Les savants matrialistes ou positivistes s'inquitent et se demandent
anxieusement ce que vont devenir leurs ingnieuses hypothses. La Presse
elle-mme s'intresse l'tude de certains phnomnes hypnotiques,
magntiques ou mdiumnimiques. C'est ainsi que les Dbats, l'Eclair, l'Echo
de Paris, le Figaro, le Gaulois,
le Journal, la Libert, le Matin, le Petit Parisien, la Petite Rpublique, le
Temps, et tant d'autres quotidiens que je regrette de ne pouvoir citer, ont dj
publi de nombreux articles dans lesquels on traite de tables tournantes, de
mdiums crivains ou incarnations, de dplacements d'objets sans contact,
de lvitations d'tres humains, d'apports de fleurs, de matrialisations et
d'apparitions d'esprits, de tlpathie, des diffrentes phases de l'hypnose, de
clairvoyance, de maisons hantes, d'envotement, de messes noires, de
fakirisme, de graphologie, de cihiromancie, de physiognomonie, d'astrologie
ou de magie.
Et chose qu'on n'aurait pas faite il y a quelques annes, on ose crire ou
prononcer en public les mots autrefois si mal interprts de thosophie,
gnosticisme, mysticisme, occultisme, kabbale. Quelques journaux, notamment
le Matin, ont mme eu l'ide de romans-feuilletons dans lesquels tout lecteur
attentif peut retrouver de multiples donnes de la Tradition Hermtique.
Certaines revues catholiques s'occupent aussi de ces diffrentes questions
occultes et je ne puis que les louer d'en aborder l'tude avec moins de
partialit qu'autrefois. Les dates de cette renaissance sont galement faciles
marquer et intressantes connatre, elles font bien constater qu'il s'agit d'un
puissant effort nouveau. Le spiritisme, qui a la priorit, fut import d'Amrique
en France par Allan Kardec, en 1855, comme une doctrine renouvelant la
croyance l'immortalit de l'me et aux rapports de l'humanit avec un monde
surnaturel. Selon le Docteur Papus, principal chef des occultistes franais, le
congrs runi Paris, en septembre 1889, comptait plus de 40.000 adhrents.
Il crivait la mme poque: En Amrique, 10.000.000 de spirites font le 27
de chaque mois la communion des mes. Cette communion est faite en
Europe par plus de 2.000.000 d'adhrents. (Papus. Le spiritisme. Librairie du
Magntisme, 1890). Bien entendu, nous donnons ces chiffres sous contrle.
Vers 1875, nous arrivait galement d'Amrique une nouvelle socit
occultiste, celle des thosophes, fonde par Mme Blavatsky. D'abord tablie
New-York, elle eut ensuite son sige dans l'Hindoustan, Adyar. La Socit
thosophique mit la mode, en quelques annes, les tudes sur le boudhisme
et le brahmanisme. La premire loge thosophique fut fonde Paris en 1884,
sous la direction de la duchesse de Pomar. Des spirites, des swedenborgiens,
des martinistes se coudoyaient dans ses salons. Un moment, les thosophes
esprrent accaparer la direction de toutes les sectes mystiques, lorsqu'ils
virent se fonder par de jeunes occultistes la socit rivale de la RoseCroix.
Stanislas de Guata en tait le grand matre, avec, autour de lui, un suprme
conseil dont faisaient partie Albert Jounet, J. Peladan, Papus, Barlet et un
Docteur Alta, prtre catholique, dont nous aurons reparler. La secte des
gnostlques fut restaure en France, vers 1888.
Dans un synode tenu en 1893, son organisation se constitua sous la forme
d'Eglise gnostique. En 1906, le patriarche Fabre des Essarts, ayant form une
association cultuelle sous le nom d'Eglise Gnostique de France, cette Eglise
se partagea en deux branches. Chacune a sa revue. Le Rveil gnostique
fut fond en 1907, La Gnose en 1909. La reconstitution du Martinisme, qui
est peut-tre la force la plus dangereuse et la plus redoutable de l'ordre
maonnique, fut l'uvre de M. Encausse (Docteur Papus). Il en commena le
groupement vers 1885. Les premires loges martinistes fonctionnrent
Montmartre en 1889. A la mme poque, fut tabli par Papus le Groupe
d'tudes sotriques qui devint bientt le centre de recrutement du
martinisme. En mme temps Papus fonda l'Initiation, et le Voile d'Isis, puis
Hiram, revues qui sont en pleine activit. C'est donc bien une renaissance.
Tels sont les groupements que nous trouvons runis au congrs et dans
l'alliance spiritualistes.
Nous aurons tout dit, en ajoutant que le programme de l'une et de l'autre est
emprunt celui de l' Initiation et du Voile d'Isis; que l'initiative du Congrs de
1908, plac sous la prsidence du Docteur Papus, est l'uvre de ces deux
revues, et que le Voile d'Isis a t choisi pour en tre l'organe officiel. Tout
ceci est clairement confirm par le programme que l'Initiation porte en tte de
tous ses numros. Les Doctrines matrialistes ont vcu. Elles ont voulu
dtruire les principes ternels qui sont l'essence de la Socit, de la Politique
et de la Religion; mais elles n'ont abouti qu' de vaines et striles ngations.
La Science exprimentale a conduit les savants malgr eux dans le domaine
des forces purement spirituelles par l'hypnotisme et la suggestion distance.
Effrays des rsultats de leurs propres expriences, les Matrialistes eu
arrivent les nier.
L' Initiation est l'organe principal de cette renaissance spiritualiste dont les
efforts tendent : Dans la Science, constituer la Synthse en appliquant la
mthode analogique des anciens aux dcouvertes analytiques des
exprimentateurs contemporains. Dans la Religion, donner une base solide
la Morale par la dcouverte du mme sotrsme cach au fond de tous les
cultes. Dans la Philosophie, sortir des mthodes purement mtaphysiques
des Universitaires, sortir des mthodes purement physiques des positivistes
pour unir dans une Synthse unique la Science et la Foi, le Visible et l'Occulte,
la Physique, et la Mtaphysique. Au point de vue social, l'Initiation adhre au
programme de toutes les revues et socits qui dfendent l'arbitrage contre
l'arbitraire, aujourd'hui en vigueur, et qui luttent contre les deux grands flaux
contemporains: le clricalisme et le sectarisme sous toutes leurs formes ainsi
que la misre. Enfin l'Initiation tudie impartialement tous les phnomnes du
Spiritisme, de l'Hypnotisme et de la Magie, phnomnes dj connus et
pratiqus ds longtemps en Orient et surtout dans l'Inde.
L'Initiation expose les opinions de toutes les coles, mais n'appartient
exclusivement aucune. Elle compte, parmi ses 60 rdacteurs, les auteurs les
plus instruits dans chaque branche de ces curieuses tudes. L'Initiation est, en
France, le seul organe officiel des centres suivants: Ordre Martiniste,
Dlgus et Loges dans toutes les parties du monde. Ordre Kabbalistique de
la Rose-Croix, rserv aux anciens Martinistes. cole Suprieure libre des
Sciences Hermtiques. Union Idaliste Universelle. Rite Ancien et Primitif de
la Franc-Maonnerie (Chapitre et Temple INRI). Rite National Espagnol (Loge
symb.-. Humamdad). Comme pour ne laisser subsister aucun doute sur le
double but poursuivi, la circulaire de Papus, annonant le grand vnement du
congrs spiritualiste de 1908; disait aussi: Un couvent maonnique des Rites
spiritualistes sera organis la mme poque par l'Ordre Martiniste sous la
directionde notre Fr.-. Teder, 33e. Ce couvent sera prpar par la revue
Hiram. En ralit congrs et couvent furent une mme uvre et le mme
compte-rendu rsuma les travaux de l'un et de l'autre.
Un triple objet s'offre donc nos tudes. Ce sont d'abord les doctrines du
nouveau spiritualisme. Mais on ne s'attendra pas trouver ici un expos tant
soit peu complet de ces systmes abstrus, enfants par des efforts d'esprit
aussi prodigieux que striles. Leur littrature remplirait une bibliothque.
Quelques notions sommaires, clairant l'antagonisme radical de ces systmes
avec la doctrine catholique et l'infernale entreprise qu'ils dissimulent, suffiront
notre dessein. En second lieu, nous aurons montrer les rapports de ces
sectes spiritualistes avec la Franc-Maonnerie et le vritable but auquel tend
cette prtendue renaissance d'un idalisme chrtien. Enfin, il y aura lieu de
constater comment s'oprent ses infiltrations dans l'Eglise et parmi les
catholiques.
Ce n'est pas sans un regret poignant, ni mme sans quelque hsitation, que
nous talerons sous les yeux de nos lecteurs tant d'impits et
d'pouvantables blasphmes profrs avec un hypocrite amour de la vrit
religieuse. Il est cependant ncessaire de leur dvoiler ces horreurs. Cette vue
les portera renouveler notre divin Sauveur l'ardente profession de leur foi
et leur fera mieux comprendre l'tendue de l'infinie misricorde qui suspend
encore l'effet de sa justice vengeresse. Mais sans cet aperu, il serait
impossible de se rendre compte des infiltrations que nous entendons
dnoncer et de mesurer l'immensit du pril qu'elles nous font courir. En outre,
trop de catholiques accordent aujourd'hui aux monstrueuses fantaisies de
l'esprit humain, dvoy par l'orgueil, une attention qu'ils ne donnent plus
l'tude de leur religion, pour qu'il n'y ait pas une utilit directe dcouvrir leur
illusion insense.
Il est cependant une prcaution que la prudence nous impose. C'est de ne pas
favoriser une curiosit dangereuse en indiquant par des rfrences prcises
les passages des livres et des revues spciales auxquels seront emprunts
les divers traits de cet affligeant tableau. Nous viterons mme le plus souvent
d'en donner les titres. Le lecteur ne doutera pas de notre probit. Notre
expos ne sera dans toutes ses parties qu'une reproduction souvent textuelle
de ces crits.
I. - LES DOCTRINES DU NOUVEAU SPIRITUALISME
Avant d'esquisser un rapide aperu des principaux systmes, que rend assez
ardu la contradiction dont ils ne s'embarrassent pas les uns vis--vis des
autres et mme chacun avec lui-mme, il sera bon de dgager leurs traits
communs. Leur premier caractre gnral est l'essai d'une grossire
adaptation au christianisme. Il importe de paratre en rgle avec lui. A chaque
instant se trahit l'effort pour dguiser sous le nom de ses dogmes les erreurs
qui leur sont le plus contraires. On ira mme jusqu' une sacrilge et
abominable parodie de ses mystres et de sa liturgie sacre.
Il y a un principe fondamental, commun toutes ces sectes, et sur lequel
toutes leurs thories reposent. C'est l'sotrisme, c'est--dire l'existence d'une
tradition secrte, la conservation d'un enseignement rserv aux seuls initis,
qui se serait perptu depuis l'antiquit travers les ges, que Jsus-Christ lui
mme aurait recueilli et communiqu quelques-uns de ses disciples pour
tre gard avec le mme soin au sein du christianisme, et qui, dfigur ou
trahi par l'Eglise, aurait t fidlement recueilli par les sectes occultes dont la
chane ininterrompue se rattacherait aux origines mmes du christianisme (Il
est presque superflu de faire remarquer que cette absurde et mensongre
supposition, si oppose l'uvre de la Rdemption et son plan, est en
contradiction flagrante avec toute l'histoire de l'Eglise, et, premirement, avec
les paroles les plus formelles de Jsus-Christ disant ses disciples : Ce que
vous avez recueilli de ma bouche, en particulier, prchez-le sur les toits ;
Pilate : J'ai parl ouvertement au monde et n'ai rien enseign de secret.
Interrogez ceux qui m'ont entendu ; ses aptres, avant de remonter au ciel
: Allez, enseignez toutes les nations... ).
Celles-ci se trouveraient donc avoir hrit de la mission de l'Eglise. Et leur
mission est identiquement celle de la Franc-Maonnerie. Leur thme commun,
c'est une explication du monde permettant d'carter le dogme de la cration et
conduisant la divinisation de l'homme. De l, le panthisme manatiste qui
se retrouve au fond de presque tous ces systmes. Parmi les erreurs
ncessaires cette explication spiritualiste et que les occultistes s'efforcent de
prsenter comme conformes la doctrine catholique, il faut signaler la
prexistence des mes, leur rincarnation et la pluralit des existences pour le
mme individu.
Aprs un court expos du panthisme manatiste, le secrtaire gnral du
Congrs de 1908, s'criait : Incrdules et croyants peuvent-ils adhrer cette
synthse dogmatique? Nous osons l'esprer. Sans doute, quelques
catholiques romains Intransigeants crieront, tout d'abord, l'hrsie. Qu'ils se
rassurent. La thorie expose par nous laisse, en effet, subsister intacts le
baptme et la rdemption par le Christ. Mais, elle implique comme corollaire la
pluralit des existences de l'me rejete, il est vrai, par plusieurs thologiens,
mais admise par toutes les grandes religions orientales et que l'Evangile
mme ne condamne pas. Ce dernier dogme, uni au prcdent, rsout bien
des objections inhrentes aux diverses solutions exotriques du problme du
mal (*).
De son ct, M. Jounet disait dans les mmes runions : Quelles que soient
d'ailleurs les affirmations de certains thologiens, la Rincarnation n'a jamais
t condamne par l'Eglise, comme va fort bien dmontr notre ami et ancien
matre le docteur Rozier, dans une tude qu'il a publie nagure dans
l'Initiation. J'ajouterai mme que l'Eglise catholique peut trs bien reconnatre
officiellement la vrit mtaphysique de cette consolante doctrine, sans pour
cela abandonner jamais le dogme du Ciel, du Purgatoire et de l'Enfer. Je
vous rappellerai aussi que la Rincarnation a t admise par le Druidisme, le
Brahmanisme, la Kabbale, les Chaldens, la Tradition orphique, les
Pythagoriciens, les Essniens, le No-Platonisme, la Primitive Eglise
chrtienne les Gnostiques, le Nouveau Coran, les Troubadours et les
Trouvres, la Chevalerie du Moyen-Age, les Templiers, les Rose-Croix, la
Haute-Maonnerie du XVIe sicle, le Martinisme, les Occultistes, l'Eglise
gnostique moderne, la Socit thosophique et les Spirites. Et depuis le
commencement de l're chrtienne, un grand nombre de potes, de
philosophes et de savants n'ont pas craint d'y faire allusion dans leurs uvres
ou mme de s'en montrer partisans convaincus, etc..
Enfin, ce qui est vraiment le comble, le F.:. Tder, prsident du couvent
maonnique annex au Congrs spiritualiste, nous apprend que la Franc-
Maonnerie, gardienne de cette doctrine sotrique, a t introduite en
Europe par ... les Papes (En effet, ce dogme supprime la responsabilit
humaine; il fait de l'existence du mal la consquence inexorable d'un
enchanement de faits antrieurs celui qui le commet; il ferme l'enfer comme
le ciel, remplaant l'un par les rincarnations, l'autre par l'absorption de
l'homme dans le grand Tout, ou, suivant les cas, comme on le verra; par son
anantissement). Dans une lecture prcdente, publie par Hiram, j'ai prouv
que la FrancMaonnerie nous est venue des Essniens et qu'elle fut introduite
en Europe par des Moines envoys partout comme Missionnaires et comme
Maons par les vques de Rome.
Comme il a t annonc, ce que nous dirons de chaque systme sera
presque textuellement emprunt ses docteurs. Le lecteur voudra donc bien
se souvenir que ce n'est pas moi qui parle. Parmi ces divers systmes, il en
est un qui, dans sa forme et son tat actuels, runit et combine, au moins
dans leurs traits gnraux, les doctrines de tous les autres. C'est l'occultisme.
Commencer par lui, sera simplifier et abrger le reste.
I. L'OCCULTISME.
On comprend sous le terme d'occultisme l'tude des phnomnes qui ne
peuvent tre perus par nos sens physiques, mais qui sont compris et
interprts par nos sens hyperphysiques, (cette expression s'expliquera plus
loin). Cela veut dire, dans un autre langage, que l'occultisme enseigne non ce
que paraissent tre l'homme et la nature, mais ce qu'ils sont en ralit. Son
but est donc de donner une solution la fois positive et mystique aux grands
problmes qui nous tourmentent tous : Dieu, le Bien, le Mal, le Monde visible
et invisible, l'Homme, l'me humaine et ses destines.
L'occultisme remonte la plus haute antiquit, mais le mot ne date gure que
du moyen ge. Auparavant, il existait un sotrisme. Par section sotrique
les philosophes alexandrins et grecs entendaient une sorte de classe
slecte parmi leurs meilleurs lves, et o ils donnaient leurs enseignements
les plus abstraits que n'auraient pu comprendre les disciples ordinaires. Cet
sotrisme se perptua dans le Christianisme pendant les premiers sicles
par le moyen des initis qui, sous le nom de gnostiques donnrent un appui
considrable au Christianisme naissant. Peu peu, une scission s'opra dans
le Christianisme; le nombre des chrtiens exotriques (xotrisme
: enseignement commun et public) s'tant considrablement accru, les initis
finirent par disparatre peu prs; ils furent perscuts et obligs de se
cacher. Ils se runirent en secret, fondrent des socits secrtes, o fut
conserve intacte la tradition occultiste. Telle fut l'origine de ces mystrieuses
associations d'hermtistes, de chevaliers initis, d'adeptes de Saint-Jean et
enfin des Templiers.
Les Templiers taient sur le point de reconstituer l'ancienne fraternit des
anciens temples; ils s'apprtaient infuser de nouveau dans la chrtient la
vraie doctrine, qui aurait fait avancer l'humanit de plusieurs sicles, quand en
1312, ils furent trahis et bientt disperss. Les survivants du massacre se
runirent nouveau et donnrent naissance la Socit des Rose-Croix, puis
la Franc-Maonnerie. C'est apparemment cette poque que prit naissance
l'appellation
d'occultisme. Les ides qui faisaient le fond de la doctrine, issues la fois, du
noplatonisme, de la kabbale et de la Gnose sentaient le fagot l'poque o il
n'tait que trop facile de se rendre coupable du crime d'hrsie et d'tre
condamn au bcher. Aussi, les occultistes d'alors, Reuchlin (1455-1522),
Agrippa (1486-1535), Paracelse (1493-1541), Cardan (1501-1576), Postel
(1510-1581), Robert Fiudd (1574-1637) envelopprent-ils leur style de
mystrieuses priphrases et de symboles obscurs; et encore, malgr cette
ruse, ils n'chapprent que pniblement aux perscutions.
Plus tard, vinrent Van Helmont le pre (1577-1674), surnomm le Paracelse
du XVIIe sicle, Anglius Silzius (1624-1677), Poiret (1646-1719) et enfin
Swedenborg (1688-1777). C'est Swedenborg que se rattachent toutes les
socits occultistes et illumines du XIX* sicle, car il fut l'inspirateur de
Martins Pascalis (1715-1799), de Claude de Saint-Martin (1743-1803), de
Lavater (1741-1804) qui nous conduisent Wronski, Eliphas Lvi, Louis
Lucas, Henri Delaage, et aux occultistes modernes. L'occultisme est donc une
philosophie traditionnelle en mme temps qu'un positivisme transcendant.
La mthode de l'occultisme, sa loi fondamentale, est l'analogie, dont le
principe est ainsi formul : ce qui est en haut est comme ce qui est en bas;
pour tout ramener l'unit (Dans l'application, il faudrait plutt dire, ce qui est
en bas est comme ce qui est en haut, ainsi qu'on va le voir plus loin). La loi du
Ternaire, reconnue en Dieu par toutes les religions (Trinit) domine tout, en se
refltant dans les trois mondes qui composent l'univers: le monde divin, le
monde psychique et le monde physique. Elle se rvle particulirement dans
l'homme, o nous allons surtout l'tudier. C'est sur cette loi du Ternaire que
repose toute la thorie occultiste.
La constitution de l'homme. L'occultisme enseigne que l'homme est form
de trois principes primordiaux: le corps physique, le corps astral (ou spirituel)
et l'esprit. Ainsi, entre le moi et le non-moi, entre l'esprit et le corps,
l'occultisme enseigne l'existence d'un principe intermdiaire. Saint Paul et
saint Thomas ont toujours trs nettement distingu le corps, le corps astral ou
me et l'esprit : corpus, anima et spiritus (Qu'on veuille bien ne point oublier
que ce n'est pas moi qui- parle ici). Dans l'me humaine, la fois, principe de
la vie corporelle et doue de la vie surnaturelle, la philosophie chrtienne
distingue logiquement, non physiquement, deux parties : une partie ou une
tendance suprieure, illumine par la foi et attire vers Dieu par la grce, et
qu'elle appelle spirituelle relativement la partie infrieure o s'agitent les
passions. Mais, nulle part, cette unit de l'me n'est plus clairement suppose
que dans ce rapport du principe spirituel avec le principe matriel constitue un
des plus importants problmes de la psychologie occultiste.
Sur ce point, les occultistes n'ont jamais vari leurs enseignements, depuis les
Egyptiens de la XVIIIe dynastie (1500 ans avant Jsus-Christ) enseignant
l'existence du corps, du double et de la substance intelligente; les kabbalistes
distinguant le corps, le corps astral et l'esprit; jusqu' Paracelse enseignant au
XVIe sicle l'existence du corps lmentaire, du corps astral et de l'me
spirituelle; et enfin Eliphas Levi tudiant au XIXe sicle les proprits du
Double fluidique ou mdiateur plastique intermdiaire entre le corps et
l'esprit. L'tre humain est donc compos de trois principes: le corps
physique, ce qui supporte tout; le corps astral ou me, ce qui anime et
meut tout; et enfin l'esprit, ce qui gouverne l'tre tout entier.
Le corps physique supporte tous les lments constituant l'homme incarn. Le
corps astral anime tous les lments constituant l'homme incarn. L'esprit
gouverne l'organisme tout entier. Il a son point d'appui dans le cerveau
matriel, quoiqu'on gnral, il ne soit pas compltement incarn dans l'tre
humain. Dirig dans sa marche organique par l'instinct, le corps physique se
manifeste l'Esprit conscient par les besoins. Le corps astral constitue, lui
aussi, une ralit organique; il a des organes physiques, des centres d'action
et des localisations, qui sont les organes de la respiration et de la circulation et
toutes leurs dpendances. Dirig par le sentiment, le corps astral se manifeste
l'esprit conscient par la passion. L'Esprit est ce qui gouverne l'tre humain
tout entier, ce qui sent et ce qui veut. Il a un domaine d'action bien dlimit,
avec un centre d'action, des organes et des conducteurs particuliers. Un
exemple va nous mettre mme de nous rendre exactement compte des trois
principes humains.
L'homme peut tre compar un quipage dont la voiture reprsente le corps
physique; le cheval, le corps astral, et le cocher, l'me ou l'esprit. C'est
l'emblme que Papus a choisi pour dmontrer ce principe dans son Trait
mthodique de Science occulte. Cette image permet un passage de l'ptre de
saint Paul aux Hbreux o la division est le plus nettement dans les mots :
Car la parole de Dieu est vivante et efficace, et elle perce plus qu'une pe
deux tranchants; elle entre et pnlre jusque dans les replis de l'me et de
l'esprit; (pertingens usque ad divisionem anim ac spiritus), jusque dans les
jointures et dans les moelles, et elle dmle les penses et les mouvements
du coeur. (IV. 12.) En outre, est-ce que tout le monde n'emploie pas les deux
expressions d'me et d'esprit, pour dsigner tantt, le principe commun
d'oprations multiples, tantt, plus particulirement, celles de l'intelligence? Et
faudrait-il conclure que quiconque dit tantt l'me, tantt l'esprit de l'homme,
admet par la mme l'existence du corps astral?
Nous ferions tous de l'occultisme, comme M. Jourdain faisait de ta prose, sans
nous en douter de bien saisir le rle de chaque principe. La voiture est inerte
par ellemme et rpond bien au corps physique; le cocher commande la
direction par les rnes, sans participer la traction directe, c'est l le rle de
l'Esprit. Enfin, le cheval, uni par les brancards la voiture et par les rnes au
cocher, meut tout le systme sans s'occuper de la direction, indique bien le
caractre du corps astral, vritable cheval de l'organisme qui meut et ne dirige
pas.
Le corps astral. Ce qui distingue les occultistes des physiologistes ordinaires
relativement la question de la constitution de l'tre humain est donc
l'existence de ce corps astral, intermdiaire entre le corps et l'esprit. Il est le
double parfait du corps physique. Cette ide du corps astral, sous des
dnominations diverses, est une des plus anciennes et des plus persistantes
qui aient travers toutes les philosophies anciennes. Elle se retrouve dans
toutes les religions orientales. Le boudhisme enseigne l'existence du linga
sharira, les Persans du kaleb, les Zoroastriens du keherpas. Le panthisme
grec dsigne le corps astral sous le nom de Ochma, le substratum matriel
de l'esprit. C'est surtout dans la kabbale que nous trouvons l'ide du corps
astral nettement exprime.
D'aprs elle, les trois lments de l'homme sont: Nephesch; le corps; Ruach,
le corps astral; Neschamah: l'esprit. Ruach est un corps interne, idal,
expression virtuelle, passive de l'action extrieure de la matire. Il est le miroir
de la vie corporelle. Compos des forces qui sont la base de l'tre matriel, il
est un individu spcial, disposant de lui-mme par une action libre et
volontaire toutes les fois que l'action de Nephesch, du corps, n'est plus
suffisante pour le retenir. Il peut s'vader, sortir du corps dans le sommeil, la
prostration, tout en y tant retenu par un lien dont la rupture entranerait la
mort du corps matriel. Le corps astral est en l'homme et en mme temps hors
de l'homme; c'est--dire que tout en l'emplissant entirement, il a, en outre,
une sorte d'manation fluidique, que l'on appel aura et qui entoure le corps
comme une sorte d'estampage (C'est sur la mirifique invention de ce a double
, du corps astral, que les occultistes de toutes sortes font reposer l'explication
des prestiges de leur science).
Par une forte concentration de volont, l'homme peut projeter hors de lui une
partie de son corps astral qui sera alors comme une sorte de prolongement de
son propre corps. Il peut aussi sortir compltement de son corps et apparatre
en corps astral. Dans ce cas le corps astral n'est reli au corps physique que
par un fil vaporeux et brillant qui lui forme comme une espce de cordon
ombilical.
Mais cette opration est extrmement dangereuse et il n'est donn qu' de
trs rares personnes, voues depuis de longues annes la pratique des
sciences occultes de la tenter. On ne peut y arriver que par un trs long
entranement et l'on risque chaque instant la mort. Il arrive aussi qu'un
mourant peut apparatre en corps astral. Le cas n'est mme pas rare. Pendant
les maladies graves, il s'chappe parfois du corps des souffrants et se place
ct d'eux; ou, s'extriorisant davantage, il va s'asseoir prs du lit ou dans un
autre point de la chambre. Parfois, le malade peut voir son double qu'il
prend d'ordinaire pour un tranger s'obstinant rester ses cts, et dont il
demande instamment tre dbarrass.
En nous, le corps astral veille sans cesse; jamais il ne dort. Le corps astral n'a
par lui-mme ni intelligence, ni conscience. C'est lui qui vit dans les rves, qui
erre dans le plan astral (ou intermonde) et y rencontre les visions qui hantent
notre sommeil.
Le plan astral. Nous avons dit que la loi du ternaire domine tout en
occultisme. En effet, l'occultisme enseigne que trois mondes composent
l'univers: Le monde physique, le monde astral, le monde mental ou spirituel.
Supposons un peintre qui a conu un tableau, ce tableau existe (?) dans ses
lobes crbraux ou dans son imagination, comme l'on voudra. Eh bien, le plan
astral est au plan divin ce que l'imagination est au peintre, et l'on pourrait
appeler le plan astral l'imagination de Dieu. Les trois mondes peuvent tre
figurs comme trois enveloppes se pntrant l'une l'autre, la fois unies et
distinctes.
Le monde spirituel produit et remplit le monde astral qui produit et remplit le
monde matriel. Le monde astral est la manifestation du monde spirituel et le
monde physique est la manifestation du monde astral. Ainsi ce plan
intermdiaire est charg de recevoir les impressions du plan suprieur et de
les raliser en agissant sur la matire, de mme que la main de l'artiste est
charge de recevoir les impressions du cerveau et de les fixer sur la matire.
Tout est troitement embot dans la nature aussi bien que dans l'homme.
Ce plan nous enserre, comme il enserre l'infusoire, comme il enserre l'univers.
Comment le monde spirituel produit et remplit le monde astral qui son tour
produit et remplit le monde matriel : rservons la Gnose dont nous ferons
plus loin l'expos, cette explication qui est de son domaine propre.
L'occultisme enseigne en outre que, de mme que toute chose ou tout tre
projette une ombre sur le plan physique, de mme tout projette un reflet sur le
plan astral. Quand une chose ou un tre disparat, son reflet en astral persiste
et reproduit l'image de cette chose ou de cet tre, telle que cette image tait
au moment de la disparition. Chaque homme laisse donc en astral un
reflet, une image caractristique.
Le plan astral a, de mme que le plan physique ses habitants : Le monde
astral, dit l'occultiste Guymiot, n'est pas moins vari que le monde physique:
tout comme celui-ci, il est peupl d'tres qui ont en lui leurs conditions
d'existences comme nous avons les ntres dans le monde matriel.
Il y a d'abord des entits directrices prsidant la marche de tout ce qui
volue en astral. Ces entits sont constitues par les hommes suprieurs des
humanits antrieures, volus par leur propre initiative (esprits directeurs de
la kabbale) ou par des tres spciaux du plan divin (anges et receveurs de
lumire). Viennent ensuite les grgores, ou images astrales formes
spciales, entretenues par les aspirations des collectivits (dieux particuliers
des religions); les corps astraux d'tres surchargs de matrialit (suicids),
d'tres en voie d'volution, d'entits humaines traversant l'astral, soit pour
s'incarner, soit aprs s'tre dsincarns. Enfin, on y rencontre des tres divers
susceptibles de subir l'influence de la volont humaine : les lmentals. Ces
tres constituent une des classes les plus importantes des habitants du
monde astral.
Je reprends un instant la parole pour admirer la puissance cratrice de
l'occultisme. Quel chef-d'uvre d'imagination, si ce n'est une mystification
impayable, que celle de ce double du corps matriel, du corps astral ! Et
cependant ce n'est rien encore, en comparaison des merveilleux esprits dont il
va peupler le monde des lments. Il est vrai que ce sera en poussant la
contradiction ses dernires limites. Mais s'il faut prendre cette doctrine au
srieux, s'il se trouve des catholiques qui se laissent fasciner par son mirage, il
est peine besoin de remarquer qu'elle est inconciliable avec celle de l'Eglise
sur la nature du compos humain.
Ni l'esprit ni le corps astral, ainsi distingus l'un de l'autre, ne peuvent
s'accorder avec ses dfinitions de l'me. L'me est spirituelle: le corps astral a
des organes physiques et est en partie matriel . L'me est par elle-
mme et immdiatement la forme du corps, c'est--dire, comme le rappelle
Pie IX dans un acte du 30 avril 1860, le seul principe dont le corps reoit la
vie, le mouvement et le sentiment; et ce Pape a dclar qu'on ne peut nier
cette vrit sans erreur contre la foi.
Or, l'occultisme pose un principe double, dont l'un, qui est un individu spcial
, donne au corps le mouvement, mais sans diriger l'homme; dont l'autre
gouverne, mais sans tre compltement incarn dans l'tre humain , et
sans partager directement le rle du corps astral. Inutile d'insister. Venons la
nouvelle cration de l'occultisme, destine organiser le monde dans lequel il
prtend oprer.
Les lmentals (D'autres disent : Les lmentaux. On peut bien accorder la
syntaxe un peu de la libert que prend le bon sens). Ce sont aussi des esprits.
Il y en a de deux sortes : les lmentals du monde matriel et ceux du monde
astral. Voici pour les premiers. Avant tout, il faut bien se pntrer de l'ide que
les lments des choses ne sont pas de simples entits mtaphysiques, mais
des tres rels, dous de vie, de forme et de volont. Les lmentals ne sont
donc pas en ralit infrieurs l'homme puisqu'ils jouent dans sa constitution
un rle dont on ne saurait mconnatre l'importance : on peut mme dire que
l'homme est, en tant que corps matriel, sous l'influence de la force
lmentale. Ils sont des puissances de la nature, mais des puissances
bornes.
Par le vgtal, ils pntrent en l'homme pendant sa vie, autant du reste que
par les lments minraux, gazeux, essentiels la matire. Il existe donc
entre les lmentals et l'homme une connexion, une relativit.
De ces lmentals, les uns, sont bons, les autres mauvais, les autres neutres.
En fait, les lmentals sont soumis l'homme; en tant que forces, ils vaguent
travers l'univers, toujours en qute d'action; tout ce qui se trouve sur leur
passage leur sert d'instrument et, si l'homme cherche leur barrer le passage,
malheur lui. Le corps astral ne leur chappe mme pas, en sa partie
matrielle. L'homme en sa vie terrestre est environn d'lmentals qu'il
provoque et qui le harclent. Ainsi que nous l'avons dit plus haut, ils jouent un
rle dans la constitution de l'homme.
On distingue parmi les lmentals, les esprits des lments : air, eau, terre,
feu. Les esprits de l'air gouvernent les fonctions de la respiration et les
organes qui l'accomplissent. Les esprits de l'eau dirigent les humeurs et les
scrtions du corps, en particulier le sang. Les esprits de la terre ont pour
domaine les diffrents tissus du corps, et les esprits du feu dirigent
l'assimilation et la nutrition. Un initi en agissant par une impulsion de sa
volont sur les lmentals peut gurir les troubles du corps et rgnrer ses
fonctions.
Il y a galement d'autres lmentals que l'on peut appeler les astraux. Ils ne
sont en aucun cas des entits ou des personnalits intelligentes, mais des
rflexions, des chos; ns des fluides du corps, ils n'ont aucune spiritualit et
vivent du corps. Non seulement leurs aspirations ne vont pas au-dessus du
corps, mais ils ignorent et nient mme l'existence d'une sphre au-dessus de
la leur. Ils se mlent cependant de prophtiser et sont prodigues de menaces
ou de promesses. Ils semblent tre inconscients des contradictions que
prsentent leurs affirmations, et, quelque grossires qu'elles soient, ils ne s'en
troublent nullement. Lorsqu'on les laisse dblatrer leur aise, ils descendent
jusqu'au blasphme et l'obscnit; ils poussent la sensualit, au vice, la
cruaut; ils encouragent la vie grossire, la luxure; se nourrissant des esprits
vitaux du sang, ils puisent l'nergie et sont les vampires de ceux auxquels ils
s'attachent. Ils sont impersonnels, et par consquent n'ont aucun organe de
connaissance.
Comme ils ne possdent pas d'me, ils ne peuvent avoir d'individualit, et
n'ont aucune ide du bien et du mal, du vrai et du faux; ils ne possdent pas
plus une volont ou une action indpendante; ils ne sont que des vhicules.
Mais, quoiqu'ils ne soient pas des personnalits intelligentes ils sont souvent
des agents des ides intelligentes et servent de moyens de communication
entre des personnalits intelligentes. Ce sont eux qu'voquaient les Rose-
Croix et les magiciens du Moyen-ge et qu'voquent encore certaines
personnes aujourd'hui. Ils rpondent aux pentagrammes et aux autres
symboles et il est dangereux mme de les nommer dans certains lieux et en
certaines saisons.
C'est principalement par le moyen des lmentals que l'adepte accomplit ses
merveilles. D'autres personnes que des adeptes peuvent avoir des rapports
avec les lmentals; mais cette association est dangereuse pour tous ceux qui
ne sont pas purifis et perfectionns dans leur esprit. On peut les dominer;
mais qu'on ne cesse pas un seul instant une active surveillance, qu'on ne
commette pas la moindre des erreurs, car aussitt ils prennent leur revanche.
L o les lmentals ne sont pas domins ils deviennent les matres et ils se
montrent sans piti dans leur vengeance pour qui dsobit leurs ordres. Ils
s'emparent des corps astrals: alors, ils apparaissent sous des formes diverses.
Le sorcier leur livre lui-mme une partie de son influx astral et contribue leur
donner une existence phmre et presque toujours terrifiante en les projetant
dans un but dtermin soit sous forme de pierres invisibles qu'il jette son
ennemi, soit sous forme de vnfices que la passion et le vice ardent
projettent sur l'tre dsir. Ils peuvent aussi galvaniser le cadavre d'un animal
ou s'emparer du moule ou coque astrale qui a abandonn son corps matriel.
Ils raniment des dbris pars et constituent des formes monstrueuses qui
restent pendant de longues annes dans l'imagination des peuples. Les
lmentals constituent en un mot le monde du mal et du vice.
Voil donc des tres-esprits, qui n'ont aucune spiritualit, aucun organe de
connaissance, aucune volont ou action indpendante, comme il convient
des lments; et qui, cependant, prophtisent, dblatrent, poussent au mal,
au vice, et dterminent la moralit des actions humaines. Quelles insanits, et
quel impie bouleversement de l'uvre divine !
Auras ou images astrales. Nous ne sommes pas encore au bout de cette
cration fantasmagorique. Il reste voir comment ces spiritualistes
matrialisent jusqu' nos penses. L'occultisme enseigne que chaque tre
porte autour de lui un rayonnement invisible l'il de chair, mais perceptible
pour l'me entrane. Ce rayonnement s'appele Aura, d'aprs la tradition, et il
y a une aura pour chaque principe. Il y a donc un rayonnement ou aura du
corps physique trs peu tendu, un rayonnement ou aura du corps astral,
enfin un rayonnement ou aura de l'me ou esprit (On voit que l'occultisme
appelle galement me le corps astral et l'esprit. Nouvelle preuve que ce nom
ne convient ni l'un ni l'autre). C'est cette aura qui est connue dans les
traditions religieuses qui ont entour d'auroles lumineuses les ttes de saints
pour la symboliser. (Sic.)
Dans les rayonnements de l'aura sont inscrits, sous forme d'images, les
rsultats les plus importants de nos penses et de nos actions. C'est grce
ce rayonnement des principes de l'tre humain que s'expliquent beaucoup de
phnomnes en apparence tranges, comme les sympathies et les antipathies
subites lors de la premire rencontre d'un tre, comme les intuitions et les
prvisions dites inconscientes. L'occultiste entran, c'est--dire qui a
dvelopp ses facults de perception de l'invisible, se rend compte,
premire vue, de la valeur relle d'un tre humain, non pas d'aprs ses
manires extrieures, ses habits, mais d'aprs son rayonnement invisible.
L'homme qui se croit bon, ou suprieur aux autres, celui qui juge et critique les
autres, l'goste, tous ceux-l peuplent leur atmosphre invisible de vilaines
images, que le voyant et mme le somnambule verront parfaitement. Les
objets, les nations, les astres, ont chacun leurs clichs bons ou mauvais. Cette
existence d'manations invisibles nous amne la thorie des images
astrales. L'occultisme enseigne que de mme que toute chose ou tout tre
projette une ombre sur le plan physique, de mme tout projette un reflet sur le
plan astral.
Quand un tre ou une chose disparat, son reflet persiste en astral, et l'image
de cette chose ou de cet tre persiste telle qu'elle tait au moment prcis de
sa disparition. Chaque homme laisse donc, en astral, un reflet, une image
caractristique. C'est en se mettant en relation avec ces images astrales, que
le voyant retrouve toute l'histoire des civilisations vanouies et des tres
disparus.
Il serait particulirement intressant de savoir ce que peut tre ce
rayonnement, l'image produite en particulier par l'esprit distinct du corps astral;
et, mme quant ceux qui manent du corps astral et du corps physique,
comment et dans quelle atmosphre ils subsistent et se conservent. Sont-ils
matriels ou ne le sont-ils pas?
La mort et ses mystres. Nul ne sera surpris que l'occultiste possde aussi
les secrets de la mort. On va voir comment ces habiles gens remplacent par
une solution vraiment scientifique et morale les enseignements trop simplistes
de la foi catholique. Et c'est l que leur spiritualisme va de nouveau se donner
carrire. La mort est produite par la sparation de l'esprit entranant le corps
astral (me) hors du corps physique. La voiture est brise. Il ne reste plus que
le cocher et le cheval. Mais n'oublions pas que celui-ci est la fois bte et
esprit. Ce double devra lui-mme se ddoubler.
Il faut comprendre aussi que cette thorie de la mort est imagine pour
prparer le retour de l'esprit la Divinit, au Plrme, ainsi que la Gnose nous
l'expliquera. A l'instant de la mort, le lien entre le corps physique et l'esprit
vient d'tre rompu et le corps astral tend se diviser en deux parties : l'une,
infrieure, qui restera dans le plan physique, et l'autre, suprieure, qui
voluera jusqu'au plan astral suprieur. Cette lutte se manifeste ordinairement
par l'agonie.
Peu peu, les liens qui retiennent l'esprit se brisent et celui-ci sort de sa
prison corporelle. Cette sparation se produit plus ou moins rapidement selon
la plus ou moins grande matrialit de l'individu.. Chaque cellule physique
reprend alors son autonomie, la dcomposition du cadavre commence, et
chacun des petits tres cellulaires qui le constituait se dirige vers ses affinits
spciales. De son ct, l'esprit traverse une priode de trouble. Il flotte au-
dessus de son corps qu'il vient de quitter et ne peut se rendre compte de son
nouvel tat; d'abord plong dans l'obscurit, il n'a que la sensation d'un demi-
sommeil, mais insensiblement son engourdissement disparat, il commence
percevoir ce qui l'entoure : son corps rigide tendu sur le lit, des cierges
allums, des personnes agenouilles murmurant des prires; ce spectacle
l'tonn et l'effraye; il veut crier, mais il ne peut; soudain, la lumire dans
laquelle il baigne augmente d'intensit; il voit comme un torrent lumineux qui
parat l'entraner vers un inconnu qu'il redoute; des formes hideuses
surgissent (lmentals) et se prcipitent sur lui; des figures humaines, des
entits animales grimacent affreusement; il veut fuir, il veut monter, mais,
nouveau phnomne, toutes les actions de sa vie passe lui apparaissent
comme dans un mirage et fou de honte et d'pouvante, il va vers ce corps qu'il
a quitt, cherche fbrilement ressaisir la vie; en vain les esprits suprieurs
l'exhortent, il ne les voit pas, ne les entend pas, le vertige le saisit, il tournoie
un instant sur lui-mme comme une barque dans la tempte et disparat enfin
dans le torrent fluidique qui l'enserre de ses mille replis (Les frais d'imagination
mis part, voil, pour des spiritualistes, une description bien matrielle de
l'esprit).
Cet tat de trouble peut se prolonger pendant longtemps. Enfin, l'esprit sort de
son cauchemar, la conscience de son moi lui revient, il comprend alors ce qui
s'est produit en lui et se rend compte du milieu o il se trouve et les htes avec
lesquels il vit ne l'effrayent plus. II s'aperoit qu'il est plus rellement vivant
que sur la terre, mais que de nouveaux organes, signes de facults aussi
nouvelles, sont ns et que la communication physique avec le plan matriel
devient rapidement de plus en plus difficile; seuls, les sentiments servent de
liens entre les deux plans. Mais l'esprit se rend compte qu'il n'est pas encore
dans son vritable centre, et il va tendre de son mieux vers la seconde mort, la
mort au plan astral, qui acclrera son volution.
Nous avons pris comme exemple l'volution d'un esprit moyen; en effet, si
l'homme a t bon, honnte, s'il a dvelopp sa conscience, ses lments
psychiques, sa partie spirituelle voluera librement dans le monde astral.
Examinons maintenant le cas contraire. la brutalit physique; dtraquement de
l'organisme par des excs, par des privations, par le vice ou par culpabilit de
l'individu. Brutalit morale, existence criminelle, vicieuse, subordination
perptuelle de l'lment psychique l'lment matriel. Ici, la naissance
astrale s'accomplit dans les pires conditions. L'volution rgulire ne s'est pas
accomplie. Les parties matrielles de l'Etre, loin de s'tre affines, se sont
alourdies, les parties spirituelles se sont en quelque sorte matrialises; la
balance penche du ct de la matire, de l'animalit.
Dans ces conditions, l'esprit est pour ainsi dire encore li la terre. Il est
encore soumis aux forces humaines dont il ne s'est pas compltement
dgag. Il erre, flotte prs de la terre, attendant du temps sa libration de
l'animalit. Le poids est lourd, la chane auquel il est riv est solide, car c'est
lui-mme qui l'a forge. Ainsi, par exemple, un avare restera attach aux biens
matriels, son seul amour ici-bas. Mais il sera dans l'tat du pauvre hre qui
se rveille affam aprs avoir rv qu'il tait subitement devenu riche et jetait
de l'or poigne ses nombreux courtisans. Les biens matriels sont
devenus aussi insaisissables l'avare et l'gosme que l'or du rve pour le
pauvre hre. Avec cette diffrence, que l'avare a conscience de la dilapidation
de son trsor par ses hritiers, tout joyeux de cette aubaine, et qu'il assiste
impuissant et souffrant mille tortures la dispersion de ses chers cus.
Plus terrible encore est la situation de ceux qui sont morts par le suicide ou en
tat de crime brutal. Pour les suicids, attachs au corps dont ils ont cru se
dbarrasser jamais, ils prouvent les mmes besoins qu'ils prouvaient
tant vivants, car ils appartiennent aux besoins ou aux passions qui les ont
pousss au suicide, mais le moyen de satisfaire ces besoins et ces passions a
disparu. S'ils taient violents, ils subsistent violents. Alors, ils engagent une
lutte perptuelle avec les corps astraux des hommes mal quilibrs afin de se
substituer eux. Ils guettent les hommes en tat de sommeil, et si leur corps
astral s'loigne un instant, il lui faut engager une vritable lutte pour reprendre
possession de son domaine, d'o les cauchemars et les affres des visions
monstrueuses.
Quand l'poque de la mort normale arrive, l'esprit du suicid ou du criminel
retrouve ses anctres, et, trs rapidement il est rincarn dans un nouveau
corps, le plus souvent difforme ou estropi pour recommencer la lutte qu'il
avait dserte une premire fois (Pour d'autres, la rincarnation est la loi
commune. Peu peu, l'Esprit a conquis un peu de libert dans son nouvel tat
d'tre, son double s'est peu peu dissous, et il aspire la seconde mort. En
sa nudit, revtu seulement du corps spirituel, l'Esprit comprend la ncessit
d'une autre incarnation pour continuer payer ses dettes et se rapprocher du
but. Lorsqu'il n'est pas assez volu pour se dcider de lui-mme revenir
prendre une forme matrielle, on le guide, on l'endort et on choisit pour lui la
famille o il va venir continuer son volution).
Les applications de l'occultisme. On voit quel vaste champ, rel ou
suppos, l'occultisme s'est ouvert. Il embrasse plusieurs sciences.
I Science des tres normalement invisibles qui nous entourent et de leurs
rapports avec nous. C'est la pneumatologie (spiritisme).
2 Science des forces ou puissances mal connues de l'organisme humain,
dont les manifestations constituent ce qu'on appelle suggestion, hypnotisme,
magntisme, lectricit animale, etc., e t c . ; c'est une nouvelle physiologie.
3 Science de l'action du moral sur le physique, prise dans le sens le plus
tendu; action du moral sur l'organisme et de l'organisme sur les hommes, les
animaux, les vgtaux, les phnomnes mtorologiques. C'est la magie.
4 Science de l'action du physique sur le moral, prise aussi dans le sens le
plus tendu : action des phnomnes mtorologiques sur l'organisme et de
l'organisme sur le moral. Et comme en dernire analyse, les phnomnes
mtorologiques sont dus l'action des astres, et particulirement du soleil et
de la lune, c'est l'astrologie.
5 Science des transformations molculaires des corps inorganiques et
organiques. C'est l'alchimie grce laquelle certains occultistes se vantent
encore aujourd'hui de raliser la fabrication de l'or et celle de l'lixir de longue
vie.
Occultisme chrtien. Aprs tout cela, n'est-ce pas une gageure et un
blasphme de parler d'occultisme chrtien? Tel a t cependant l'objet d'une
communication de M. Phaneg au Congrs spiritualiste de 1908. Mais on ne
saurait croire jusqu'o cette audace blasphmatoire est pousse, si nous ne
citions. Aprs avoir expos que l'occultiste est le reprsentant de la science
formidable du pass, appuye par une tradition cent fois sculaire qui n'a
jamais vari sur la Nature, l'Homme et Dieu, il explique que cette science
morale et divine, ne fait qu'un avec l'Evangile et le christianisme.
Mais l'Occultisme n'est pas seulement intellectuel. En donnant l'Initi une
connaissance plus complte de la nature, en le mettant mme de connatre
la vritable constitution de l'Homme, et de pressentir la source de toute vie et
de toute lumire, en lui montrant comment la Morale est vivante, comment tout
est vivant, la Science Occulte dveloppe en lui le ct moral et le ct
spirituel, et l'homme, alors triplement illumin, dans son cerveau, dans son
coeur, dans son me, comprend que seul, l'Abme de Puissance, de Bont, de
Science absolue, de lumire, le centre crateur de tout ce qui vit et respire,
peut lui donner la clef universelle de la vie. Voil pourquoi l'Occultisme ne
mrite rellement ce nom que lorsqu'il est non seulement spiritualiste, mais
mystique, c'est--dire vivant en Dieu.
Maintenant, pourquoi l'occultiste vrai a-t-il t et est-il chrtien, ou plutt
christique? Il y a eu plusieurs courants diffrents partant du tronc unique de la
Tradition primitive, parce qme si la Vrit est une, les instruments humains
chargs d'en recevoir les rayons, sont multiples. Mais nous pouvons dire que
les Initis de notre Race blanche, Gnostiques, Hermtistes, Rose-Croix, se
sont toujours rattachs au Christ, dans l'Invisible. En voici la raison :
L'Homme dans son volution douloureuse vers la lumire, n'a jamais t
abandonn. De tout temps, des Etres divins, des Hommes rgnrs sont
venus sur terre pour l'aider. Chaque race a eu son Sauveur, son aide : Lao-
tz, Krischna, les Bouddhas, les Zoroastres, Odin et tant d'autres sont
descendus du Ciel pour eux. La Race Blanche est venue la dernire sur terre
et, comme les autres races, elle a eu son Sauveur, son Rvlateur, mais venu
le dernier, il a t, pour ainsi dire, le Sauveur par excellence, le Sauveur
central. Il est venu enseigner tout ce que les autres Sauveurs avaient dit et
aussi ce qu'ils n'avaient pu ou pas voulu dire. Seul, il a pass travers la Mort
et Fa vaincue. Chacune de ses paroles est devenue un ange vivant qui est
encore prsent parmi nous, et Lui mme est toujours avec nous et y sera
toujours, ainsi qu'il l'a promis.
Ce Sauveur a port parmi nous le nom de Jsus-Christ et son enseignement
est contenu dans l'Evangile. Or, tout l'Occulte, la Science intgrale des races
humaines, la morale vivante de toutes les nations, le summum de la science,
toute la Vrit qui peut tre donne aux hommes, tout cela est contenu dans
l'Evangile. Comment pouvons-nous l'y trouver? En le vivant chaque jour
davantage, c'est cela que tous les vrais Initis blancs ont su lire non
seulement dans le Livre terrestre, mais aussi dans l'Evangile vivant crit dans
les Cieux de toute Eternit. Voil pourquoi nos grands anctres ont t
chrtiens. Voil pourquoi les occultistes blancs d'aujourd'hui essaient de l'tre.
En un mot, Mesdames et Messieurs, l'Occultisme est chrtien parce que les
enseignements du Christ et ses enseignements rels se confondent :
Occultisme et Christianisme sont un mme mot et n'ont qu'un nom, eux
deux, la Vrit.
Un pontife de l'occultisme chrtien. Dans ce mme Congrs de 1908, on
entendit un discours sur le Christianisme sotrique prononc par M.
Albert Jounet qui peut tre considr comme un pontife de l'occultisme
chrtien. Lui-mme ne s'est-il pas fait dcerner dans la presse, aprs
l'Encyclique Pascendi, le titre de chef incontest des catholiques modernistes
(L'intransigeant, 8 mars 1908)? Ceux-ci trouveraient peut tre un tel chef
compromettant; on verra cependant tout l'heure qu'il n'est pas sans titre
cette prtention et qu'il y a entre eux, du moins sur les points de dpart, un
accord incontestable. Ce n'est pas le ct le moins intressant de la situation.
M. Jounet, auquel nous ne refusons ni la sincrit de l'enthousiasme et des
aspirations gnreuses, ni la puissance d'esprit et la fcondit du talent, a pris
la part la plus active depuis vingt ans un vaste effort qui, sous le nom de
renaissance spiritualiste, tend une vaste synthse des antiques hrsies
adapte l'tat actuel de la socit et des sciences modernes. Ecoutons son
biographe (E. Bellot. A. Jounet et son uvre).
Comme la plupart des Franais, Albert Jounet est n catholique, mais il
appartient une famille dont les deux branches, paternelle (Jounet) et
maternelle (Serre!) taient, dans la majeure partie de leurs membres,
rpublicains, et cela depuis la premire Rvolution. Il fut donc lev avec une
grande libert d'esprit. Ses aspirations personnelles le portrent d'assez
bonne heure au mysticisme, sans paralyser une curiosit clectique qui
l'intressait simultanment la philosophie, la littrature, aux diffrents arts,
la sociologie. La passion de la synthse le possda toujours, encore que la
tendance religieuse restt dominante en lui.
Le hasard d'une lecture faite quinze ans lui fit dcouvrir l'Esotrisme, la
Kabbale, le no-spiritualisme, qui le frapprent sans doute par ces deux ides
: l'une, que les symboles religieux contenaient un sens plus profond, plus
rationnel que leur lettre extrieure; l'autre, que le monde invisible pouvait se
manifester l'me non seulement par des conceptions abstraites ou
imaginatives, mais par une action sensible, exprimentale. Il tudia donc
avidement et pendant des annes l'Esotrisme, celui bien entendu qui
demeure attach la mtaphysique thiste et un minimum de croyances
chrtiennes.
Au cours de cette tude, combine d'ailleurs avec d'autres tudes
philosophiques, esthtiques, etc.. et traverse d'intuitions personnelles, il se
formait lui diverses conceptions religieuses successives, identiques par le
sens gnral, distinctes par des nuances; et ces conceptions s'exprimrent
dans la premire srie de ses livres: L'Etoile sainte (1884), le Royaume de
Dieu (1887), les Lis noirs (1888), le Livre du Jugement, Ier volume, (la
cration, la chute) (1889), le Livre du Jugement, 2 volumes (la rdemption)
(1892), Esotrisme et socialisme (1893), et dans la Revue L'Etoile (1889-
1895). En toutes ces publications, sauf pour l'Etoile sainte, qui ne renferme
rien que d'orthodoxe, il tente une rnovation religieuse sans se soucier d'tre
ou non d'accord avec le Catholicisme, qu'il combat l'occasion.
Mais, paralllement l'tude abstraite et l'oeuvre littraire, il avait poursuivi
un effort de relation exprimentale et sensible avec Tau del. Il fut ainsi
amen faire intervenir dans ses expriences mystiques l'influence des saints
et de la mystique catholiques. Enfin, pendant une priode de danger pour un
tre cher, il perut que l'influence invisible venue de l'au-del catholique tait
suprieure aux autres influences invisibles; ce qui dtermina sa conversion.
Cependant, converti au Mystre catholique divin, et par une influence directe
de l'au-del, il ne se rendait point approbateur ni complice des erreurs ou des
fautes que le catholicisme humain peut avoir commises dans son histoire.
La preuve eu est qu'il ne renonait pas la rnovation religieuse, seulement il
la cherchait dsormais dans un catholicisme rnov, qu'il n'a cess de
prconiser depuis (C'est l une dmonstration par le fait de l'impossibilit de
concilier l'occultisme avec le catholicisme. Nous en verrons d'autres exemples
la fin de cette tude). Ce catholicisme devait runir l'enseignement de
l'Eglise, en ce qu'il a de divin, toutes les gnrosits et vrits modernes.
Albert Jounet entreprit donc d'riger, sous le nom d'Harmonie Messianique,
une synthse qui, dresse entre l'Eglise et le monde nouveau, incorporerait
les vrits modernes aux vrits chrtiennes, mais rejetterait les erreurs de
l'Eglise et les modernes erreurs. L'Harmonie Messianique est, par
consquent, la concentration de toutes les vrits dans le christianisme
intgral et l'adhsion ce christianisme de tous les hommes qui librement
acceptent d'y adhrer.
Voici, de la mme plume, le portrait de ce rformateur philosophique et
religieux, qui est en mme temps un pote. Incarnation brune de Lohengrin,
son effigie, d'une patine insolite, encadre de chevelure fine comme une
ombre, s'allonge anxieuse avec des lignes mues de jeune Christ. Dans cette
estompe, des yeux plors, mourants, palpitent doux et tendres, ainsi qu'au
firmament embruni le seraient deux toiles lointaines. Et de cette crature
manent des effluves attractifs, bienfaisants, qui pntrent, charment, purent,
sa voix chantante, comme un luth berce doucement et suavement transport
dans de beaux rves... ralits anticipes d'un avenir qu'il croit meilleur. Dans
son imprcision insaisissable, nous le voyons l devant nous, prsent par
l'vocation, nous temprant de sa sagesse, nous stimulant de sa croyance.
Puisse-t-il nous envoter de lumires et de voyance pour pntrer l'abscons
merveilleux de son uvre !
Chaque fois qu'un livre nouveau a man du jeune aptre, des critiques trs
srieux l'ont admir sans en pntrer toujours l'essence mtaphysique. Eux
mmes, les initis, ne savent toujours dire ce qu'ils comprennent. Ils
s'entendent, parat-il, par une intuition attractive, par la sympathie de leurs
mes, par la langue spirituelle, la seule et vritable langue des parfaits, pour
eux. Nanmoins, Albert Jounet sait se faire tout tous : aux profanes il sait
parler la vertu vulgaire, mais sans la moindre vulgarit. Dans sa synthse
messianique, son jet la force, l'ampleur, la posie des grands matres, et la
limpidit des pages sublimes d'exgse furent admirablement mises par lui
la porte de chacun. Tout le monde comprit cette langue, qui n'est point
pourtant la langue de tout le monde.
Sa langue est une plume parlante, sa plume est une langue crivante, soit qu'il
allocutionne un public, soit qu'il articule un priodique. Qu'il prononce des
confrences l'htel des Socits savantes, qu'il crive des chapitres dans
son journal, c'est toujours cette pntrante mlodie qui s'pand et qui captive
lecteurs ou auditeurs. Son succs dans le double apostolat est considrable,
et on est tout surpris, quelque profane qu'on soit, d'our la vrit, tel l'animal
qui ne sait pas la musique est charm par les accords d'un instrument.
Pourtant, il est des heures o le mage dialogue avec un monde suprieur en
des termes familiers l'au del, mots trangers notre sphre. Ce n'est pas le
philosophe, mais le pote. De ces confabulations thres rien ne nous arrive
qu'un bruit de voix dont l'articulation nette nous chappe.
Son Livre du Jugement, pome en deux gros volumes, est un cho
d'outremonde devant lequel les plus grands se trouvent les plus petits. L-
dedans, dit le kabbaliste Franck, on n'avance que lentement, en appelant
soi le souvenir, l'esprance et la mditation. C'est ainsi que je me reprsente
le travail des gnrations recules, lisant, ds leur apparition, les premires
rvelations crites qu'aient reu.es les hommes. C'est galement de cette
faon qu'on a d lire les oeuvres philosophiques de Pythagore et de
Parmnide. Tout cela est trs beau, trs original, trs profond. C'est de la
kabbale, de l'apocalypse et autre chose encore...
On comprendra que devant de telles immensits intellectuelles nous ne nous
hasardions de risquer un vol tmraire, crainte d'en retomber foudroys. Pour
nous, profanes, de telles hauteurs le vertige s'empare du plus brave; les
ailes les mieux empennes doivent se dsagrger dans les flammes
empyres, et comme de malheureux Icares on doit rouler dans les flots
tumultueux de l'incroyance. C'est la face contre terre qu'on approche de ces
symboles, ainsi qu'autrefois les patriarches devant le Saint des Saints.
Gardons-nous donc de cette tmrit. Aussi bien, un simple coup d'oeil
embrassant le portique du temple nous permettra d'en entrevoir les
profondeurs.
Le gros volume que M. Jounet a crit pour rfuter les impies blasphmes de
Strada sur Jsus-Christ n'est pas une de ses uvres les moins curieuses
(L'crivain cach sous le pseudonyme de Strada, issu galement d'une famille
catholique, est mort rcemment. Philosophe, pote et artiste, comme M.
Jounret, il dploya un immense effort dans la mme uvre de synthse. Ses
publications sont innombrables. L'esprit humain n'a gure ralis un
plus parfait chef-d'uvre d'garement. Par une disposition merveilleuse de la
Providence, et grce aux prires de la sur de Strada, femme vertueuse,
le prtre qui crit ces lignes a pu pntrer auprs du philosophe mourant et
retourner vers son Crateur cette me aveugle par un
incommensurable orgueil) (Jsus-Christ d'aprs l'Evangile, 1900). La prface
contient une tude de la foi et de ses rapports avec la science qui donne au
distingu reprsentant d