Parure et pointe :les deux imaginairescollectifs du design

Armand Hatchuel

Chaire Théorie et méthodes

de la Conception innovante MinesParisTech

Design researchDémarches empiriques

quanti. et quali.

Design theoryHistoire, traditions,

épistémologie, modèles

Nouvelle pistes : New Design history, Theory-driven research and experiments…

• Imaginaire ne se “réalise” pas !

• inconnu/imaginé (C ) et connu/imaginant (K)= expansion générique : distincte des logique classique (deduction, induction, abduction,..) mais les contient.

• Inconnu/imaginé : disjonction désirée par chimérisation du connu

• L’imaginaire et le connu sont tous deux transforméspar la conception

• Double expansion des chimères et des connaissances : permet la transformation des identités des objets (Coleridge, Bachelard, Horton, Brouwer..)

I. Imaginaire et conceptionThéorie de la conception : indépendante de l’identité des objets : de “ce qui est à

concevoir” (théorie C-K, Hatchuel et Weil, 2003, 2009) :

Réception expansive : l’usage n’arrête pas la conception

II. Du “design” : un imaginaire situé

Contraintes cognitives et socialesspécifiques par comparaison avec l’ingénieur (mutations du quotidien fin 19è):

• Chimérisation plus ouverte mais ancragedans identités (et connaissances communes)

• Expansion des connaissances (essais, validations, recherches…)

• Réception sous contrainte sociale forte (marchande ou non) : apprentissage réduitou rapide, pas de formation préalable,…

© Hatchuel , ParisTech lund oct 08

« Imagine then a man wishing to open a

door locked with a combination lock and

bolted on the inside. Assume that he

does not know a single number of the

combination and has not a chance to

open the door until he finds the whole

combination, and not a chance to do so

even then unless the bolt on the inside is

open. Also bear in mind that he cannot

tell whether a single number of the

combination is right until he knows the

combination complete. When we started

to make ductile tungsten, our

situation was like that »

William Coolidge

The invention of ductile tungsten for filament

lamp by William Coolidge at GE (1912)

• Le defi du “design” : des expansions génériques sous conditions

o Des inconnus quasi immédiatement “reconnus” : “different but not strange” (J.Jensen)

o “Séduire en surprenant” ou “surprendre enséduisant” : “decision in 3 seconds: fight, escape, love” (Jensen)

• Le programme = une rhétorique des choses

o “persuader et convaincre” par l’art oratoireo “persuader et convaincre” par une polyurgie

générique des choses

• Deux types de généricité :o Parure ou axiophanie : “parer” sans changer l’identité des

objets (sans néologisme) :

o Pointe ou ontophanie : en brisant l’identité des objets (avec

néologisme)

• Louis Gernet : anthropologie de la valeurcomme imaginaire de l’agalmata (trophées, mythes génériques de la monnaie)• Agallein : to adorn, honour, adapt..• Latin : paro, parare :

• La parure : rhétorique classique :• Logos/pathos/ ethos• Double opération : association d’objets /tropes provoque

une expansion et une révélation de valeurs• design “cosmétique” et design fonctionnaliste sont des

aussi des parures

• Design comme circulation-superposition des Imaginaires : • Imaginaires circulants, visibles, lisibles : idéologies

sémiotiques (keane 2008, Barthes)• Réassurance, convenance, “user centric”, distinctions,• “faux semblants”, artifice, “magie”, archétypes, mythes.

De la Parure (axiophanie) : expansion de valeur avec identité des objets

maintenue

Objet 1

Le paré, identité est

maintenue mais étendue

Objet 2Le parant

provoque une expansion de

valeur

Incarnationancrage

référentiel

HonneurAmélioration

Expansion

La parure provoque des imaginaires d’expansion et de révélation

Elements d’une théorie critique de la parure : imaginaires expansifs ou archétypes répétés ?

The portland vase

1793

Imaginaires du design : des jeux de la parure et de l’objet….

Cartier

Alessi

Imaginaires du design : des jeux de la parure et de l’objet….

“Searching for a conscious coincidence” (J.Jensen)

• Baltazar gracian : Traité du génie et de la pointe (1648)

La distinction paré-parant disparâit : du “concept” comme chimère “vive” (P.Ricoeur)

Dérangement et régénération des objets : logos, pathos et ethos

• Rhétorique conceptiste : Design “à la

Duchamp” ? Expansion forte des connaissances Design comme espace d’apprentissage d’un

imaginaire générique du social et du sensible

• Notion d’épistémologie générique(Schmid et hatchuel 2014)

IV. De la pointe comme ontophanie : trouble, étrangeté et

apparition dans l’identité des objets :

Quand l’objet et son imaginaire naissent de la pointe…

Mais parures et pointes se superposent aussi en une algèbre infinie….

• Le design de l’imaginaire au Bauhaus :

• une école d’émancipation qui s’oppose aux imaginaires professionnels des arts classiques !

• l’enseignement de Itten et Klee (cours et exercices) est une théorie formelle de la pointe contre les identités de la couleur, des textures et de la composition des formes (Le Masson et al. 2013, 2014)

Implications pour la recherche

• Tests expérimentaux comparatifs (Agogué et Cassoti 2013) montrent que étudiants designers pratiquent spontanément la pointe mais sont plus fortement conformés par l’autorité.

• Design de l’imaginaire vs imaginaire du design : Recherche et théorie critique passent par un détachement de l’imaginaire professionnel ; comme pour les ingénieurs et les architectes

• L’approche par la théorie de la conception peut contribuer à ce détachement et de ce fait…

à un nouvel imaginaire scientifique du Design.

Implications pour la recherche

Don Norman